II. UN CHANGEMENT DE PARADIGME EST NÉCESSAIRE AFIN D'ASSURER UN ACCÈS AUX SOINS ÉQUITABLE POUR LES FRANÇAIS
A. DES MESURES D'URGENCE SONT IMPÉRATIVES AFIN DE RÉPONDRE AUX BESOINS DES ZONES LES MOINS MÉDICALEMENT DOTÉES
1. Pour remédier au besoin impérieux de soignants dans les zones sous-dotées, une régulation de l'installation est nécessaire
a) La pénurie quasi généralisée de soignants ne peut pas être l'alibi de l'inaction devant les besoins urgents et spécifiques des territoires sous-dotés
Si la pénurie généralisée de soignants, et notamment de médecins généralistes, sur l'ensemble du territoire national exige la mise en oeuvre de mesures globales63(*), il est également nécessaire de prendre des mesures d'urgence pour les zones les plus touchées par la désertification médicale. En effet, pour le rapporteur, ces disparités engendrent une inégalité entre les citoyens à l'égard de leur droit à la protection de la santé. Devant l'impératif de corriger cette situation inacceptable, la situation dégradée de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire ne doit pas servir de prétexte pour ne pas agir en faveur des zones les moins dotées.
Les territoires dans lesquels la densité de soignants est la plus faible rencontrent en effet des difficultés qui pourraient être atténuées, à court terme, par une meilleure répartition territoriale des soignants. C'est en particulier le cas des zones rurales et des quartiers paupérisés des grandes agglomérations.
Face à l'échec des mesures incitatives à l'installation des soignants dans ces territoires -- mesures généralement insuffisamment ciblées sur les territoires les plus en difficulté -- la mise en oeuvre de dispositifs alternatifs s'impose.
Pour le rapporteur, ces mesures doivent avoir des effets immédiats, afin de répondre à l'urgence. Pour les zones les moins bien dotées, il ne serait pas acceptable d'attendre l'échéance de 2030, en escomptant une amélioration de la démographie médicale et une répartition plus harmonieuse des professionnels sur le territoire.
b) Face aux limites des mesures jusqu'alors déployées, il est nécessaire d'envisager une forme de régulation de l'installation des médecins sur le modèle de ce qui est pratiqué pour les autres professions de santé
(1) Il est nécessaire de prendre en compte les caractéristiques spécifiques de la démographie de médecins par rapport aux autres professions de santé afin de définir les modalités de cette régulation
Réguler l'installation des soignants exige de définir un zonage, qui différencie les zones en fonction de la démographie des soignants, mais également des caractéristiques du territoire et de sa population.
Or, il existe un consensus qui montre que les zones surdotées en médecins, et notamment en médecins généralistes, sont peu nombreuses. Selon la Cnam, en effet, « les perspectives démographiques des professions médicales sont nettement plus contraintes pour cette profession et il paraît particulièrement difficile de parler de zones surdotées en médecins aujourd'hui ; bien que certains territoires puissent connaître des situations moins défavorables, la situation demeure tendue sur la majorité du territoire ».
Le syndicat MG France a indiqué au rapporteur que, selon lui, il n'existe « évidemment » pas de zone surdotée en médecins généralistes. De la sorte, « Le conventionnement sélectif ne peut avoir d'efficacité qu'en cas de démographie excédentaire. (...) On ne peut pas combler un manque par la contrainte dans un contexte de pénurie globale. Une mesure de contrainte à l'installation ne peut se concevoir que lorsque la profession est en surnombre ».
Pour le rapporteur, ces arguments sont partiellement exacts. Un conventionnement sélectif fondé uniquement sur le principe du « une arrivée pour un départ » dans les zones les mieux dotées ne bénéficierait surtout qu'aux zones moyennement dotées à leur périphérie et non aux zones les moins bien dotées. La Drees indiquait d'ailleurs en 2021 que « Dans un contexte d'effectifs globalement insuffisants, limiter les installations dans les zones “sur-denses” ne suffit pas à la couverture des besoins dans les zones les moins attractives ».
Dans ces conditions, le calibrage et la définition du cadre de régulation de l'installation des médecins, et notamment des médecins généralistes, doivent prendre en compte leur démographie pour avoir une efficacité en faveur des zones les moins bien dotées. Comme le note la Cour des comptes dans son rapport consacré à l'Organisation territoriale des soins de premier recours, « l'objectif ici visé n'est pas de limiter les installations en zones bien dotées mais d'obtenir -- ce qui est difficile à atteindre en période de baisse de la démographie médicale -- qu'une part accrue de professionnels s'installe dans les zones sous-denses ou, au moins, y exerce une part de leur activité ».
(2) Une régulation de l'installation des médecins dans les zones surdotées pourrait être mise en oeuvre à l'initiative de la profession
Afin de faire de la régulation de l'installation des médecins dans les zones les mieux dotées un outil en faveur de l'accès aux soins dans les zones les moins bien dotées, il pourrait être envisageable de lier toute nouvelle installation dans les zones les mieux dotées à un exercice partiel dans une zone sous-dotée. L'installation dans les zones où la démographie médicale est encore satisfaisante serait ainsi conditionnée à l'engagement à effectuer des consultations dans un cabinet secondaire dans une zone sous-dotée.
La liberté d'installation des médecins ne serait ainsi pas remise en cause, mais serait adaptée afin de la concilier avec la nécessité d'assurer la continuité des soins dans les zones les moins denses.
Les modalités pratiques d'une telle obligation, notamment son zonage, pourraient dans un premier temps être confiées à la profession elle-même. Une telle responsabilisation de la profession permettrait de concevoir un cadre adapté à ses spécificités et acceptable pour les praticiens.
Pour le rapporteur, l'exemple du système allemand de planification des besoins montre que l'implication de la profession dans la définition des modalités de la régulation de l'installation est la source d'une meilleure appropriation de ces dispositifs par les professionnels de santé.
Les organisations syndicales des médecins libéraux, appuyées par le Cnom, pourraient ainsi proposer à l'Assurance maladie une méthodologie pour définir ces zones. Elles pourraient aussi énoncer les modalités des obligations d'exercice dans les zones sous-denses, en ouvrant éventuellement plusieurs possibilités. À titre d'exemple, l'exercice avancé dans des zones de banlieue ou périurbaines pourrait avoir lieu une journée par semaine. En revanche, dans les zones rurales plus isolées, les médecins pourraient se déplacer seulement tous les mois, mais pour plusieurs journées. Ils devraient systématiquement bénéficier du soutien des ARS et de l'Assurance maladie pour assurer le bon fonctionnement de ces cabinets secondaires. Il est également possible d'envisager la généralisation de centres de santé dans lesquels les médecins se relaient à tour de rôle, à l'image de ceux qui sont déployés par l'association Médecins solidaires. Cet exercice délocalisé pourrait aussi prendre la forme de participation à des dispositifs « d'aller-vers » comme les médicobus.
La profession disposerait d'un délai raisonnable pour proposer ce nouveau cadre de régulation, qui pourrait ainsi faire l'objet d'un avenant à la convention liant les organisations syndicales des médecins libéraux et l'Assurance maladie.
Faute de proposition, le législateur pourrait se substituer à la profession pour définir lui-même ce cadre.
Pour avoir des effets immédiats sur la situation des zones sous-denses, ce cadre de régulation devrait concerner l'ensemble des médecins en activité, et pas seulement les médecins nouvellement formés.
À plus long terme, à mesure que le nombre de médecins augmentera du fait de la fin du numerus clausus, il est aussi nécessaire d'envisager de mettre en place un cadre de régulation de l'installation plus ambitieux, qui garantirait une répartition équilibrée des médecins sur le territoire. Ce dispositif reposerait sur l'usage du conventionnement sélectif par l'Assurance maladie.
Proposition n° 1 : Subordonner l'installation de nouveaux médecins dans les zones médicalement les mieux dotées à un exercice avancé à temps partiel dans les zones les moins bien dotées.
Confier à la profession le soin de définir les modalités de cette obligation, le législateur ne devant se substituer à celle-ci qu'en dernier recours.
(3) Concomitamment, une évaluation systématique des mesures incitatives et de régulation de l'installation des professionnels dans les zones sous-dotées doit être menée
L'efficacité des aides financières accordées par les pouvoirs publics aux professionnels de santé exerçant dans les zones sous-denses ne fait pas l'objet d'une évaluation systématique. Dans un souci de bon usage des deniers publics, il est impératif d'évaluer systématiquement les effets de ces mesures afin, le cas échéant, d'en modifier les modalités -- en particulier en les ciblant plus fortement sur certaines zones - voire d'en supprimer certaines.
Le rapporteur réitère donc sa proposition de février 2022 tendant à prévoir une évaluation systématique des aides financières accordées aux professionnels de santé exerçant dans les zones sous-dotées. Il plaide en particulier pour que la Cnam mette en oeuvre une doctrine stricte concernant les aides qu'elle accorde. Celles-ci devraient être systématiquement limitées dans le temps, et leur reconduction éventuelle soumise à la démonstration de leur efficacité par une évaluation.
Proposition n° 2 : Évaluer systématiquement les effets des aides financières accordées aux professionnels de santé exerçant dans les zones sous-dotées et conditionner leur maintien à leur efficacité.
De même, tout encadrement de l'installation des professionnels des santé est acceptable uniquement si elle a un impact réel sur l'équité territoriale d'accès aux soins. Il est donc nécessaire d'étudier les effets des dispositifs de régulation de l'installation sur la répartition des soignants sur le territoire. En particulier, la pertinence des zonages utilisés doit être régulièrement analysée. Plusieurs professions d'ores et déjà soumises à de tels dispositifs ont en effet indiqué au rapporteur que les critères retenus par la Cnam pour définir les zones sous-denses ne prenaient pas suffisamment en compte les spécificités de leur spécialité.
De telles études robustes permettraient en outre, le cas échéant, d'accroître l'acceptabilité de ces mesures par les soignants.
Proposition n° 3 : Évaluer systématiquement les effets des dispositifs de régulation de l'installation des professionnels de santé.
2. La téléconsultation doit être davantage encadrée afin qu'elle puisse répondre avec plus de justesse aux besoins des publics les plus éloignés des soins
La télémédecine est plus fréquemment utilisée par des publics qui souffrent le moins de difficultés d'accès aux soins. Pour le rapporteur, cette situation s'explique en partie par le manque d'encadrement dont elle fait l'objet.
En effet, actuellement, les téléconsultations sont prises en charge par l'Assurance maladie de la même façon que les consultations en présence. Il est possible de modifier les règles de remboursement afin de les recentrer sur les publics pour lesquels la téléconsultation serait la plus utile. Une telle mesure permettrait également de limiter des pratiques de patients « consommateurs » de téléconsultations et d'en réduire les mésusages identifiés par l'Assurance maladie (contournement du parcours de soins, sur-prescription médicamenteuse, absence d'urgence médicale, recours excessif par des patients ayant par ailleurs un médecin traitant, prescriptions d'arrêt de travail injustifiées, etc.).
La qualité de la téléconsultation peut être accrue si un professionnel de santé accompagne le patient physiquement et appuie ainsi le médecin dans la réalisation de son travail. Comme l'a mis en avant le CNOI, « la présence d'un infirmier lors d'une téléconsultation est très souvent plus qu'indispensable. L'IDE64(*) peut effectuer des examens cliniques essentiels, comme la détection d'oedèmes, que le médecin ne peut pas réaliser à distance, assurant ainsi une sécurité renforcée et une qualité des soins pour les patients. De plus, de nombreux patients éprouvent des difficultés à manipuler les outils numériques nécessaires à la téléconsultation, et l'IDE est fréquemment sollicité pour assister à la prise de rendez-vous et accompagner ces patients, en particulier les plus vulnérables ou à risque ». L'accompagnement par un infirmier peut notamment être réalisé au domicile des patients, et ainsi faciliter le suivi des patients âgés qui ont des difficultés à se déplacer. C'est en particulier le cas de nombreux patients en ALD qui bénéficient d'un suivi infirmier régulier, ainsi que, comme l'a souligné la FNI, des patients résidant dans des Ehpad. Le syndicat MG France a ainsi indiqué au rapporteur qu'il est souhaitable de travailler à « une solution interprofessionnelle associant le médecin généraliste traitant et l'infirmier diplômé d'État pour le suivi des patients à domicile ».
La téléconsultation pourrait aussi avoir lieu en pharmacie. Comme le souligne le Cnop, « l'accompagnement par un professionnel de santé constitue un atout qualitatif pour le patient car il peut l'aider à la réalisation de la téléconsultation en disposant d'une formation adéquate lui permettant d'interagir avec le professionnel. Suite à la téléconsultation, l'accompagnement par un pharmacien facilite la suite de la prise en charge ».
Pour le rapporteur, il est également nécessaire d'éviter que les téléconsultations déstructurent le parcours de soins. Ainsi, les téléconsultations entre un patient et son médecin traitant, notamment pour répondre à des demandes non programmées, sont pertinentes. Elles s'inscrivent en effet dans le parcours de soins et le colloque médical entre un patient et son médecin traitant.
En revanche, des téléconsultations, y compris celles qui pourraient avoir lieu en pharmacie ou avec un infirmier, hors parcours de soins ont une pertinence médicale plus contestable. Il serait donc opportun de prévoir que les téléconsultations avec un médecin qui n'est pas son médecin traitant ne soient pas remboursées sauf urgence, qui pourrait être évaluée par un médecin régulateur lorsque le patient a appelé le 15.
Ainsi, pour le rapporteur, il serait opportun de restreindre le remboursement de la téléconsultation aux seules consultations réalisées pour des soins non programmés avec son médecin traitant ou un autre médecin en cas d'urgence constatée par un médecin régulateur d'un SAS ou de la PDSA. Pour les soins programmés, le remboursement de la téléconsultation serait restreint aux consultations avec son médecin traitant avec appui du patient par un autre professionnel de santé.
Proposition n° 4 : Mieux cibler le remboursement de la téléconsultation aux consultations en incluant uniquement :
- les soins non programmés avec son médecin traitant ou un autre médecin si l'urgence est constatée par un médecin régulateur d'un SAS ou de la PDSA ;
- les soins programmés avec son médecin traitant uniquement, ou un autre médecin dans le cadre du parcours de soins, et seulement avec l'assistance d'un autre professionnel de santé.
Les cabines de téléconsultation dans les pharmacies doivent être développées en priorité dans les zones où le manque de professionnels de santé est le plus fort. Elles pourraient être utilisées en particulier pour des consultations avec des médecins spécialistes dans le cadre du parcours de soins. C'est pourquoi, pour le rapporteur, il serait pertinent de recentrer les aides à l'installation et au fonctionnement de cabines de téléconsultations dans les pharmacies uniquement dans ces territoires. Ces aides pourraient par ailleurs être rehaussées en contrepartie de cette diminution du nombre de pharmacies éligibles. Il est également nécessaire d'augmenter le plafond annuel de rémunération liée à la téléconsultation des pharmacies en zones sous-denses.
Proposition n° 5 : Mieux calibrer les aides à l'installation et au fonctionnement des cabines de téléconsultation en les limitant aux seules pharmacies situées dans des zones médicalement sous-dotées moyennant une revalorisation, en contrepartie.
3. Les visites à domicile de professionnels de santé doivent être encouragées afin d'assurer l'accès aux soins des publics les plus isolés et défavorisés
Les téléconsultations, même assistées par un professionnel de santé en présence du patient, ne peuvent pas complètement remplacer les consultations en tête à tête entre un médecin et son patient. En outre, pour certains professionnels de santé, la téléconsultation n'est pas une option envisageable. C'est par exemple le cas pour les masseurs-kinésithérapeutes dont la pratique est centrée sur une approche physique des pathologies. C'est pourquoi il est nécessaire de favoriser les visites à domicile effectuées par les professionnels de santé, afin que les patients qui ont des difficultés pour se déplacer puissent bénéficier d'un suivi médical de qualité.
Pour le rapporteur, une revalorisation des tarifs de prise en charge par l'Assurance maladie des consultations à domicile effectuées par les professionnels de santé serait de nature à inciter ces derniers à continuer à en effectuer. Elle prendrait mieux en compte le temps qu'ils consacrent à ces patients, lié tant à la durée du déplacement qu'à celle de la consultation, souvent longue compte tenu du profil des patients.
Proposition n° 6 : Revaloriser le tarif de prise en charge des consultations à domicile pour les professionnels de santé.
Plusieurs organisations représentatives des professionnels de santé entendues par le rapporteur lui ont également fait part des difficultés pratiques liées à leurs déplacements, notamment du fait du trafic routier et des difficultés de stationnement. Les collectivités territoriales pourraient être sensibilisées par l'intermédiaire de leurs associations représentatives nationales sur ce sujet afin qu'elles puissent proposer aux professionnels de santé des solutions concrètes et adaptées aux spécificités de leur territoire sur ce sujet.
Proposition n° 7 : Inciter les collectivités territoriales à faciliter le déplacement des professionnels de santé par des mesures concrètes.
4. Afin d'assurer une réponse adaptée aux besoins de soins non programmés, il est nécessaire d'améliorer la qualité de la permanence de soins
Les difficultés d'accès aux soins non programmés favorisent l'engorgement des services d'urgences hospitaliers et peuvent mener à une réponse inadaptée aux pathologies des patients, voire à des renoncements aux soins.
Pour le rapporteur, il est nécessaire de mieux s'appuyer sur l'ensemble des professions de santé afin d'assurer les soins non programmés.
En effet, les compétences des différentes professions de santé peuvent les conduire à exercer un rôle spécifique dans la permanence de soins qui est encore sous-estimé. Ainsi, les pharmaciens, qui peuvent prescrire des antibiotiques à la suite d'un Trod, peuvent jouer un rôle renforcé dans la permanence de soins. Les régulateurs du 15 pourraient ainsi être formés à renvoyer certains patients vers leur pharmacien lorsqu'ils sont arrivés à la conclusion qu'ils peuvent assumer leur prise en charge.
De même, les masseurs-kinésithérapeutes pourraient également être davantage impliqués dans la prise en charge des soins non programmés. Le CNOMK a ainsi indiqué que, « en cohérence avec leur volonté d'assumer un plus grand rôle dans la prise en charge des patients, les kinésithérapeutes sont en majorité favorables à la mise en place d'une permanence de soins (63 %). Une telle permanence de soins permettra plus particulièrement de recevoir les patients souffrant d'encombrement respiratoire ou de troubles musculosquelettiques. » Une telle participation exigerait des ajustements de leurs compétences, un droit de prescription élargi à l'imagerie médicale65(*). Elle permettrait d'éviter l'encombrement des urgences hospitalières par des patients qui ne nécessitent pas forcément de bénéficier de leur plateau technique. La FFMKR souligne que, « à titre d'exemple, l'entorse de la cheville est responsable d'environ 6 500 passages aux urgences par jour selon la HAS, pour un coût de passage évalué à 1 000 € par entorse. Cette permanence des soins, appuyée sur la kinésithérapie, permettrait ainsi de décongestionner les urgences et de réaliser d'importantes économies ». Une permanence de soins étendue notamment aux week-ends pourrait être particulièrement utile. Les masseurs-kinésithérapeutes pourraient ainsi être systématiquement associés aux SAS et à la PDSA.
Proposition n° 8 : Mieux impliquer l'ensemble des professions dans la permanence des soins.
Face au constat que certains territoires de PDSA sont trop étendus, notamment à cause du manque de médecins volontaires, il pourrait être envisagé que l'ARS puisse redéfinir des territoires de PDSA moins vastes et prévoir, le cas échéant, un tour de garde pour assurer son bon fonctionnement en soirée et le week-end. Une telle mesure permettrait d'éviter que la permanence de soins ne repose que sur un petit nombre de professionnels, qui courent un risque élevé d'épuisement, et améliorerait le fonctionnement de la PDSA, puisque professionnels de santé et patients auraient à parcourir des distances plus courtes. L'ISNAR IMG, tout en rappelant son opposition au principe d'obligation individuelle de garde, a indiqué au rapporteur que « dans le cas où une obligation de participation à la PDSA serait envisagée, nous proposons que celle-ci soit limitée à une garde par mois. Imposer plus de gardes risquerait d'augmenter la charge de travail des jeunes médecins, déjà élevée dans certains territoires, et pourrait être contre-productif ». Le rapporteur partage cet objectif de limiter le nombre de gardes par professionnel de santé. Il considère néanmoins que celui-ci devra être fixé d'abord en fonction des caractéristiques du territoire.
Proposition n° 9 : Permettre à l'ARS de définir un tour de garde obligatoire pour les médecins afin d'assurer le bon fonctionnement de la PDSA.
Afin de garantir dans le même temps une prise en charge de qualité des patients et permettre aux professionnels de santé d'effectuer leurs gardes dans des structures adaptées, il pourrait être pertinent d'organiser la PDSA autour des maisons médicales de garde (MMG). En particulier, dans les cas où les ARS seraient contraintes d'organiser un tour de garde, celui-ci pourrait s'effectuer dans ces maisons médicales, dont les locaux et, éventuellement, le personnel paramédical mobilisé, seraient parfaitement adaptés à la prise en charge des patients. Comme le souligne l'Isni : « le principal défi est l'accès aux soins non programmés. Une partie de cette demande pourrait être absorbée par des maisons médicales de garde bien identifiées et correctement structurées. Cela permettrait de décharger les urgences tout en assurant un meilleur accès aux soins pour les patients qui ne peuvent pas avoir une consultation en ambulatoire autrement ».
Proposition n° 10 : Favoriser l'implantation dans les territoires les plus faiblement dotés des maisons de santé de garde (MSG) et maisons médicales de garde (MMG) afin d'avoir un accès en dernier recours à des soins non programmés.
* 63 Ces mesures sont détaillées dans les sous-parties B, C et D infra.
* 64 Infirmier diplômé d'État.
* 65 Ces éléments sont développés dans la partie C « Pour répondre aux besoins de soins, il faut recourir plus intensément à l'ensemble des compétences des professions de santé ».