B. LE RENOUVEAU DE L'INSERTION : DES DYNAMIQUES LOCALES ENCOURAGEANTES APPELÉES À SE POURSUIVRE

1. Améliorer les politiques d'insertion existantes
a) Des moyens en hausse pour intensifier l'accompagnement des bénéficiaires du RSA

Il s'agit de la promesse majeure de l'expérimentation : alors que « les dépenses d'insertion engagées par les départements ont continument diminué »62(*) depuis la création du RSA du fait de la croissance des dépenses d'allocation, la recentralisation devait permettre aux départements expérimentateurs d'investir avec volontarisme dans les politiques d'insertion des bénéficiaires du RSA.

Dans les trois départements concernés, des engagements ambitieux en matière de hausse des dépenses d'insertion ont été pris.

En Seine-Saint-Denis il s'agit, en deux ans, de doubler les crédits départementaux d'insertion, qui étaient de 23 millions d'euros en 2021 : une hausse de 10 millions d'euros est prévue en 2022, puis de 13 millions en 2023, pour atteindre 46 millions d'euros. Selon le président du conseil départemental, cet objectif est d'ores et déjà atteint, le budget primitif pour 2024 ayant été voté avec les 46 millions d'euros promis.

Le département des Pyrénées-Orientales a quant à lui pris l'engagement d'augmenter ses dépenses d'insertion, qui s'élevaient à environ 8 millions d'euros en 2021, de 5 millions d'euros en 2022 et de les maintenir à ce niveau durant toute l'expérimentation, pour un investissement cumulé de 24,7 millions d'euros sur la période 2022-2026.

Cette augmentation doit notamment permettre un effort quantitatif conséquent s'agissant du nombre de référents accompagnant les bénéficiaires du RSA.

Ainsi, en Seine-Saint-Denis le département s'est engagé, avec les moyens nouveaux dégagés grâce à la recentralisation, à doubler les effectifs de référents dans les parcours social et socio-professionnel afin d'intensifier l'accompagnement. Alors qu'en 2022 le département finançait environ 170 référents, travailleurs sociaux et conseillers en insertion professionnelle, la courbe d'augmentation des effectifs fixée dans la convention prévoit qu'ils soient 203 à fin 2023, 287 à fin 2025, pour atteindre 340 au terme de l'expérimentation. L'objectif fixé consiste dans l'atteinte d'une file active moyenne de 100 bénéficiaires par référent.

Dans les Pyrénées-Orientales, le département s'est engagé à tripler les effectifs dédiés à l'orientation et à l'accompagnement des bénéficiaires du RSA : de 24 ETP en 2022, les effectifs, doivent s'établir à 71 ETP dès 2023 et se maintenir à ce niveau jusqu'en 2026. Dès 2023, le département a ainsi recruté de nombreux travailleurs sociaux (29 ETP), conseillers d'insertion (10 ETP), encadrants et personnels administratifs (4 ETP chacun).

À ce stade, et bien qu'il soit encore tôt pour se prononcer, les services déconcentrés de l'État ont indiqué qu'en Seine-Saint-Denis « les objectifs tenant au respect de la courbe d'augmentation du nombre de référents et au nombre de places sont respectés ». Il en va de même des recrutements dans les Pyrénées-Orientales, dont les objectifs étaient « pratiquement atteints six mois avant la date cible du 31 décembre 2023 » selon le rapport de suivi du département.

Les premières remontées de ces départements semblent d'ailleurs démontrer que cette hausse des moyens permet de renforcer l'intensité de l'accompagnement : en Seine-Saint-Denis, l'intensité des contacts entre les bénéficiaires du RSA et leur référent aurait plus que doublé dans les parcours d'accompagnement socio-professionnel, passant de 3 rendez-vous en moyenne par an avant l'expérimentation à 3,3 rendez-vous en 6 mois d'activité.

De même, dans les Pyrénées-Orientales, cette hausse des moyens a permis une modernisation de son système d'information avec le développement d'un « progiciel » dénommé « Parcours solidarité », qui a permis d'améliorer le suivi des parcours des personnes accompagnées. Selon le département, ce progiciel a rendu possible une diversification et une dématérialisation des modes de contact avec les allocataires : « grâce à l'utilisation de SMS et de mails pour les convocations, le nouveau progiciel permet de fluidifier les accompagnements, de gagner du temps dans les mises en relations (pas de délais postaux) et ainsi d'être plus réactifs. »

En Ariège, où le conseil départemental avait déjà une politique d'insertion active, la recentralisation doit permettre d'en augmenter l'intensité. La convention signée entre l'État et ce département prévoit ainsi une hausse des dépenses d'intervention en faveur de l'insertion de 850 000 euros entre 2022 et 2023, puis de 100 000 euros à fin 2024 et 200 000 euros à fin 2025 jusqu'au terme de l'expérimentation, pour les porter de 2,74 millions d'euros à 3,88 millions d'euros. Quant aux dépenses de personnel, elles augmenteraient de 200 000 euros entre 2022 et 2023 pour se maintenir à 1,04 million d'euros jusqu'au terme de l'expérimentation.

Ces nouveaux moyens sont orientés vers l'augmentation de la capacité d'accompagnement en santé, mobilité et Parcours emploi personnalisé et sécurisé (PEP's).

b) Le partenariat avec le service public de l'emploi (SPE) a été renforcé pour promouvoir un « accompagnement global »

Partant du constat, notamment exposé par le département de Seine-Saint-Denis, que « les politiques territoriales d'emploi et d'insertion souffrent de l'insuffisance de la coordination entre les acteurs », les départements expérimentateurs ont entrepris de renouveler leur partenariat territorial avec les autres institutions oeuvrant en faveur de l'insertion des bénéficiaires du RSA, notamment le service public de l'emploi (SPE) et son opérateur « phare », Pôle-emploi, devenu depuis fin 2023 France Travail.

En Seine-Saint-Denis, la rénovation de l'accompagnement portée par le département (cf. infra) s'est ainsi faite en concertation étroite avec Pôle emploi. Dans le même temps, et dès la signature de l'accord de recentralisation, Pôle emploi s'est mobilisé en tant que référent de parcours pour 45 % des allocataires du RSA, mais également en tant qu'opérateur pivot de l'accès à l'emploi (offre de formation, réseau employeur etc.). Une gouvernance nouvelle et étroite s'est mise en place (comités de pilotage et comités opérationnels mensuels), qui a d'ores et déjà permis - entre autres réalisations :

- un partage inédit de bases de données et d'indicateurs ;

- un effort pour favoriser l'accès des allocataires du RSA aux modalités d'accompagnement les plus intensives de Pôle emploi ;

- le développement d'une culture commune, à travers la création d'une formation croisée pour les conseillers Pôle emploi, les travailleurs sociaux du département et les salariés des Agences locales d'insertion (ALI - cf. infra).

Surtout, ce partenariat a permis de favoriser la montée en charge d'un accompagnement dit « global », c'est-à-dire réalisé conjointement par un référent de Pôle emploi et un référent social du département pour un même allocataire.

Selon la DGCS, l'opérateur est satisfait de cette nouvelle organisation. L'administration précise que « le dispositif d'accompagnement global porté conjointement par Pôle emploi/FT et le Service social, qui donne d'excellents résultats (50 % de sorties positives), est lui aussi en croissance avec, (...) à ce jour, près de 1 200 personnes passées par ou en cours d'accompagnement global. »

Dans les Pyrénées-Orientales, des conventions bilatérales entre le département et les composantes du SPE existaient avant la recentralisation pour gérer l'accompagnement de publics spécifiques (jeunes, publics ayant une reconnaissance de handicap, etc.). Dans le cadre de la recentralisation du RSA, ce partenariat a été mobilisé pour promouvoir l'accompagnement global, réalisé conjointement par le département et les équipes de France Travail : la convention prévoit notamment le passage de 700 à 2 100 personnes par an bénéficiant de cet accompagnement au terme de l'expérimentation).

En Ariège, le conseil départemental a également déployé l'accompagnement global des bénéficiaires du RSA en partenariat avec Pôle emploi, avec une augmentation continue du nombre de parcours depuis 2018. À ce jour, environ 35 % des BRSA sont déjà suivis par France Travail, qui est leur référent unique. Le département travaille également avec la chambre des métiers et de l'artisanat (CMA) sur l'accompagnement des bénéficiaires du RSA ayant le statut de travailleurs indépendants.

2. Si les politiques d'insertion varient selon les territoires, les dynamiques locales sont incontestables

« En effet, ce n'est pas en nous contentant de doubler le budget (...) d'une politique qui a démontré ses limites que nous réussirons le défi de l'insertion dans notre territoire. La respiration budgétaire de la recentralisation doit donc s'accompagner d'un changement de philosophie et de méthode d'accompagnement en profondeur, porté par l'ensemble des acteurs du territoire », déclarait fin 2022 le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis pour la Fondation Jean Jaurès.

Les stratégies mises en oeuvre en ce sens dans les différents départements expérimentateurs varient selon les choix politiques et les caractéristiques des territoires, comme l'illustre le graphique ci-dessous.

Répartition de l'orientation des bénéficiaires du RSA
dans les départements expérimentateurs en 2023

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par les départements expérimentateurs

Ainsi, si le renouveau de la politique d'insertion en Seine-Saint-Denis est marqué par l'émergence d'un nouveau type de structures - les Agences locales d'insertion (ALI) - le département des Pyrénées-Orientales a fait le choix d'une réorganisation davantage fondée sur l'existant. Enfin, l'Ariège se caractérisant déjà par une grande diversité des structures concernées, le département y a opté plus qu'ailleurs pour la conduite d'actions expérimentales.

a) En Seine-Saint-Denis, la mise en place d'une politique locale d'insertion intégrée grâce aux Agences locales d'insertion (ALI)

Avant la mise en oeuvre de l'expérimentation de la recentralisation du RSA, l'accompagnement des allocataires en Seine-Saint-Denis reposait déjà assez largement sur des structures locales uniques, les « projets insertion emploi » ou PIE. Selon le cahier territorial consacré par la Cour des comptes à la Seine-Saint-Denis, la moitié des Séquano-Dionysiens allocataires du RSA étaient orientés vers un PIE (50,2 %)63(*).

Ainsi, l'offre d'accompagnement dans le département de Seine-Saint-Denis était organisée selon trois pôles : le service social départemental, le service public de l'emploi (dont Pôle emploi) et les PIE.

L'organisation de l'accompagnement en Seine-Saint-Denis
avant la recentralisation

Trois types d'organismes présents sur le territoire du département proposaient aux allocataires qui y étaient orientés un type d'accompagnement spécifique :

- le service social départemental, ou des structures auxquelles il confiait cette responsabilité64(*), proposait un accompagnement social : il s'agit d'un accompagnement visant à lever les freins sociaux à l'emploi (problèmes de santé, barrière linguistique, mobilité, estime de soi, etc.) ;

- le service public de l'emploi, en particulier Pôle emploi, proposait un accompagnement professionnel, souvent aux bénéficiaires les moins éloignés de l'emploi ;

- les PIE proposaient quant à eux un accompagnement dit « socio-professionnel », destiné aux bénéficiaires proches de l'emploi mais présentant néanmoins des freins à l'activité (transport, logement, garde d'enfants, etc.).

Cet accompagnement socio-professionnel est à distinguer de l'accompagnement « global » mentionné précédemment, qui se caractérise par un accompagnement conjoint par un référent de Pôle emploi et par un référent du département, bien que les deux dénominations recouvrent des actions relevant de l'accès à l'emploi et de l'appui social.

Source : Cour des comptes, Le revenu de solidarité active, janvier 2022

L'évolution réalisée dans le cadre de la recentralisation du RSA a consisté pour le département à faire émerger de « nouvelles agences locales de l'insertion » (ALI) en remplacement des PIE. Ces ALI ont pour objet de constituer « une offre socio-professionnelle largement appuyée sur les structures d'insertion par l'activité économique » (SIAE) et de devenir « de véritables centres de ressources de l'insertion, avec le monde économique comme avec les services sociaux et, surtout, ne se contentant plus d'accompagner vers l'emploi les allocataires qui en sont éloignés, mais accompagnant dans l'emploi, par la mise en situation professionnelle directe et la levée en temps réel des freins identifiés. »65(*)

L'accompagnement proposé auparavant par les PIE était en effet jugé assez faible : les taux de sorties positives des PIE étaient ainsi, selon le président du conseil départemental, de « trois à quatre fois » plus faibles que ceux des structures d'insertion par l'activité économique (SIAE).

Cette réorganisation a toutefois été retardée, en raison principalement des recherches de locaux dans un contexte urbain tendu et du recrutement des nombreux personnels (environ 300) des équipes pluridisciplinaires : ainsi, alors que 22 ALI doivent être créées, seules 13 d'entre elles avaient été conventionnées en juin 2022. Couplé à la fermeture des anciens PIE dans les délais prévus, ce décalage calendaire a créé une période de transition qui doit prendre fin courant 2024.

L'administration déconcentrée de l'État, dans une note adressée en juin 2023 à la Première ministre, a salué l'amélioration de la gouvernance territoriale dans la cadre de ce nouveau schéma d'accompagnement des bénéficiaires du RSA avec la désignation de coordinateurs au sein de chaque équipe pluridisciplinaire territoriale et le fait que chaque ALI a pour rôle notamment de faire le lien avec l'ensemble des acteurs.

Désormais sur le point d'être parachevée, la mise en place des ALI devrait permettre, selon le président du conseil départemental, de structurer un parcours socio-professionnel inédit par son ampleur et son ambition (15 000 personnes visées, 20 millions d'euros de budget annuel), permis par des files actives maitrisées (moins de 80 personnes par conseiller), des équipes pluridisciplinaires porteuses d'un savoir-faire sur le volet social comme sur le volet de l'accès à l'emploi ainsi que d'une réelle capacité d'innovation.

b) Dans les Pyrénées-Orientales, un approfondissement de la logique d'accompagnement vers et dans l'emploi

Dans le département des Pyrénées-Orientales, l'organisation de l'accompagnement des bénéficiaires du RSA n'a pas été modifiée aussi profondément qu'en Seine-Saint-Denis. L'offre y est toujours organisée, comme avant la recentralisation, en trois pôles.

L'organisation de l'accompagnement dans les Pyrénées-Orientales

Trois types d'organismes présents sur le territoire du département, selon la situation des allocataires qui y sont orientés :

- le service social départemental propose un accompagnement social ;

- le service public de l'emploi, en particulier Pôle emploi, propose un accompagnement professionnel aux bénéficiaires les moins éloignés de l'emploi ;

- les publics spécifiques sont orientés vers des solutions adaptées à leurs besoins : les jeunes bénéficiaires du RSA identifiés pour un parcours professionnel ou socio-professionnel sont orientés vers les missions locales et les allocataires en situation de handicap vers les Cap emploi.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents transmis par les départements expérimentateurs

Depuis la mise en oeuvre de l'expérimentation, le département a déployé, selon ses propres termes, « un accompagnement vers et dans l'emploi et s'attache à construire des passerelles avec les acteurs socio-économiques locaux. » À titre d'exemple, depuis la mise en oeuvre de la renationalisation du RSA, ont été mis en oeuvre :

- l'amplification du dispositif de la « clause sociale » dans les marchés publics ;

- l'augmentation du nombre de contrats aidés financés par le département dans les secteurs marchands et non marchands sur la durée de la convention ;

- depuis juin 2020, le déploiement d'une plateforme affinitaire de mise en relation entre allocataires du RSA volontaires et employeurs locaux.

L'expérimentation a également permis de diversifier et de renforcer l'ensemble de nos dispositifs d'aides financières (aides au retour à l'emploi, fonds de solidarité logement et fonds d'aides aux jeunes). Cette revue est d'autant plus bienvenue que la Cour des comptes soulignait, dans son rapport de 2022, que les aides locales connexes au RSA contribuent significativement à la lutte contre la pauvreté.

Selon la DGCS, le bilan 2022 du conseil départemental fait état d'une augmentation du nombre de personnes orientées vers des dispositifs d'accompagnement, avec un dépassement dès 2022 de la cible fixée pour 2023. Les chiffres sont donc à la hauteur des objectifs fixés par la convention, et des améliorations sont encore attendues, notamment dans le champ de l'insertion par l'activité économique et les contrats aidés.

c) En Ariège, un effort pour renforcer l'accompagnement et expérimenter de nouvelles actions

C'est sans doute en Ariège que l'écosystème d'accompagnement est le plus varié (cf. graphique supra). Pour cette raison, les objectifs du département consistent principalement en un renforcement de l'accompagnement proposé au sein des structures existantes, soit en augmentant leurs capacités, soit via un approfondissement des actions menées. Ainsi, le département souhaite, entre autres :

- augmenter le nombre de postes financés dans les structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) ;

- densifier l'accompagnement en augmentant le nombre de suivi dans les parcours de levée des freins concernant la santé ou la mobilité ;

- l'élaboration d'une stratégie de communication et l'organisation d'une rencontre annuelle entre acteurs de l'insertion dans le but de rendre les politiques d'accompagnement plus lisibles et abordables par les bénéficiaires du RSA ;

étendre à tout le territoire départemental le dispositif des parcours emploi personnalisé et sécurisé (PEP's), un dispositif expérimental actuellement mis en oeuvre dans un seul territoire du département (Courserans) et visant à la remobilisation des personnes cumulant plusieurs difficultés d'ordre social, à rompre leur isolement et in fine à une insertion sociale durable.

Outre ces actions de renforcement de l'existant, le département de l'Ariège s'est fixé pour objectif d'expérimenter des actions nouvelles, afin d'améliorer sur le long-terme la politique d'insertion menée dans le département, tels que :

- la mise en place d'un outil « Job Data » pour permettre un rapprochement entre besoins en main d'oeuvre des entreprises et bénéficiaires du RSA ;

- le soutien à la candidature du territoire à l'expérimentation « Territoire zéro chômeur de longue durée » ;

- la valorisation du bénévolat des bénéficiaires du RSA pour une meilleure reconnaissance de leurs compétences ;

- la conception d'une politique globale d'insertion à destination de la jeunesse, notamment dans le cas des jeunes sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE) et l'accueil par le département de jeunes en service civique.

L'analyse des premiers indicateurs disponibles à fin novembre 2023 montre l'atteinte, voire le dépassement, des objectifs annuels fixés en matière d'augmentation du nombre de postes financés au titre de l'IAE, de stratégie de communication et de fédération des acteurs sur le champ de l'insertion, de développement des parcours mobilité d'intégration de nouvelles structures de l'IAE au dispositif PEP's, et d'augmentation de contrats d'accueil des jeunes en service civique.

3. Des actions de lutte contre le non-recours sont également menées lorsqu'il s'agit d'une problématique identifiée au niveau local

Le phénomène du non-recours au RSA constitue le principal obstacle à l'efficacité du dispositif : une personne qui renonce à cette prestation ne peut en effet bénéficier ni de l'allocation, qui protège efficacement contre la grande pauvreté66(*), ni de l'accompagnement censé les préparer, à plus ou moins long-terme, à retrouver un emploi. Bien que le taux de non-recours soit par nature difficile à déterminer, il est estimé à environ 30 % par la Cour des comptes dans son rapport consacré, en janvier 2022, au RSA.

Dans ce contexte, et sans qu'il s'agisse nécessairement de l'objet principal de l'expérimentation, la recentralisation se conjugue à d'autres dispositifs favorisant les actions de lutte contre le non-recours - stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, Pacte des solidarités, expérimentations spécifiques, etc.

La Seine-Saint-Denis est sans doute le département où le problème du non-recours est le plus identifié. Ainsi, selon la DGCS, le point d'étape sur la mise en oeuvre de la recentralisation en septembre 2023 a fait état de plusieurs actions en matière de lutte contre le non recours en cours de déploiement par le conseil départemental, notamment :

- le recrutement de 12 assistants administratifs sur l'accès aux droits ;

- le lancement d'un appel à projet de 2 millions d'euros pour renforcer l'offre d'accompagnement des allocataires en parcours social, ayant permis la sélection d'une cinquantaine de candidatures d'associations en ce sens ;

- le déploiement d'actions visant à améliorer l'accès des bénéficiaires du RSA aux dispositifs de formation, tels que le PRIC.

Enfin, le conseil départemental et la ville de Saint-Denis se sont engagés dans l'expérimentation « territoires zéro non-recours », dont l'objectif est de faciliter et simplifier l'accès aux droits par le développement de démarches ciblées pour repérer, informer et accompagner les personnes dans leurs droits.

De même, le conseil départemental de l'Ariège poursuit les actions de lutte contre le non-recours engagés avant la recentralisation : sa convention d'insertion prévoit ainsi des actions de formation des travailleurs sociaux et référents uniques et a organisé en 2023 une grande journée sur la lutte contre le non-recours avec l'ensemble des acteurs du secteur.

Enfin, si le conseil départemental des Pyrénées-Orientales n'a pas indiqué réaliser d'actions spécifiques visant à lutter contre le non-recours dans le cadre de la recentralisation, il convient de souligner que la hausse du nombre de bénéficiaires du RSA dans ce département, vraisemblablement liée à un meilleur accès au dispositif des travailleurs indépendants67(*), a jusqu'à présent rendu de tels efforts moins urgents. Pour autant, le département dispose d'« ambassadeurs du numérique », chargés d'accompagner les usagers dans leurs démarches administratives. Il a également mis en place des comités locaux d'accès aux droits (CLAD) pour simplifier les démarches des usagers.

Ainsi, s'il est difficile d'apprécier l'apport spécifique de la recentralisation, celle-ci s'inscrit dans un continuum d'actions de lutte contre le non-recours.


* 62 Cour des comptes, Le revenu de solidarité active, janvier 2022.

* 63 Cour des comptes, Le revenu de solidarité active - Annexe au cahier territorial - Département de Seine-Saint-Denis, janvier 2022.

* 64 Il s'agissait souvent de centres communaux ou intercommunaux d'action sociale (CCAS ou CIAS).

* 65 Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Fondation Jean Jaurès.

* 66 Cour des comptes, Le revenu de solidarité active, janvier 2022.

* 67 La DGCS a mentionné des « pratiques restrictives du conseil départemental concernant le droit au RSA pour les travailleurs indépendants, auxquelles la recentralisation a mis fin ».

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