N° 436

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 mars 2025

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi visant à garantir le suivi de l'exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction,

Par Mme Françoise DUMONT,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Mmes Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Olivier Bitz, secrétaires ; M. Jean-Michel Arnaud, Mme Nadine Bellurot, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, M. Ian Brossat, Mme Agnès Canayer, MM. Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, David Margueritte, Hervé Marseille, Mme Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mmes Anne-Sophie Patru, Salama Ramia, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

751 (2023-2024) et 437 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

La proposition de loi n° 751 (2023-2024) d'Anne-Marie Nédélec et Émilienne Poumirol vise à traduire dans la loi une préconisation du rapport de la mission d'information sur les cancers imputables à l'activité de sapeur-pompier présenté le 29 mai 20241(*), visant à renforcer la traçabilité des expositions des sapeurs-pompiers à des substances nocives pour leur santé.

Le rapport d'information a en effet mis en lumière un risque de sous-déclaration généralisée des maladies professionnelles des sapeurs-pompiers, tenant pour partie aux difficultés à démontrer le lien entre les pathologies dont souffrent les soldats du feu et les expositions répétées à des agents toxiques dans le cadre de leur activité.

L'article unique de la proposition de loi vise en conséquence à inscrire dans la partie législative du code général de la fonction publique l'obligation pour le service départemental d'incendie et de secours (Sdis) de réaliser une fiche d'exposition dès lors qu'un sapeur-pompier a, dans le cadre de ses fonctions, été au contact d'agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) ou prévus par le code de la sécurité sociale. Afin de garantir une application uniforme et exhaustive de ce suivi dans l'ensemble des Sdis, cet article prévoit la publication de modèles de fiches d'exposition dont pourraient se saisir les autorités territoriales.

La commission a adopté un amendement de coordination visant à tenir compte de la publication par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crise, le 14 janvier 2025, des modèles de fiches d'exposition requis par la présente proposition de loi.

I. LE SÉNAT A RÉCEMMENT MIS EN LUMIÈRE LES FAILLES DANS LA TRAÇABILITÉ DE L'EXPOSITION DES SAPEURS-POMPIERS À DES SUBSTANCES NOCIVES POUR LEUR SANTÉ

A. MALGRÉ LA RECONNAISSANCE DE LA CANCÉROGÉNICITÉ DE L'ACTIVITÉ DE SAPEUR-POMPIER, LE NOMBRE DE MALADIES PROFESSIONNELLES DEMEURE FAIBLE

En 2022, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a classé l'activité de sapeur-pompier comme cancérogène pour l'homme, s'agissant notamment du mésothéliome (risque plus élevé de 58 % chez les sapeurs-pompiers par rapport à la population générale) et du cancer de la vessie (risque plus élevé de 16 % par rapport à la population générale). Ces pathologies pourraient, selon le centre, provenir de l'exposition des agents à l'amiante et aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Le Circ fait également état des preuves « limitées » concernant le lien entre l'activité de sapeur-pompier et l'apparition de cancers du côlon, de la prostate et des testicules, du mélanome et du lymphome non hodgkinien.

En France, deux types de cancer, le carcinome du nasopharynx et le carcinome hépatocellulaire, sont présumés imputables au service. Si un agent est atteint d'une affection ne bénéficiant pas de cette présomption, il lui incombe alors d'établir le lien entre la maladie et l'exercice de ses fonctions afin de pouvoir obtenir la reconnaissance en maladie professionnelle.

Or, selon les données de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), seules 24 déclarations de maladies professionnelles pour les sapeurs-pompiers ont été recensées pour l'année 2023, et 31 en 2022. Cela représente 0,55 % de la sinistralité pour cette catégorie d'emploi en 2023. La Caisse indique en outre qu'aucun cancer professionnel n'a été détecté pour un sapeur-pompier professionnel entre 2013 et 2025.

Au regard du nombre limité d'affections reconnues comme étant d'origine professionnelle, la mission d'information sénatoriale a constaté un risque de sous-déclaration d'ampleur, qui pourrait s'expliquer, selon les auteurs de la proposition de loi, par la difficulté à obtenir des preuves de l'exposition de l'agent à des substances CMR.


* 1  Rapport d'information n° 641 (2023-2024) fait au nom de la commission des affaires sociales sur les cancers imputables à l'activité de sapeur-pompier par Mmes Anne-Marie NÉDÉLEC et Émilienne POUMIROL, enregistré à la présidence du Sénat le 29 mai 2024.

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