Mme Micheline Jacques, rapporteur. J'en viens enfin à l'amendement n° 152 rectifié.
J'y insiste, la réduction d'impôt majorée vise à encourager les dons des particuliers pour la mise en œuvre de mesures d'urgence de soutien aux populations. Il ne s'agit pas de défiscaliser l'ensemble des dons à destination de Mayotte pour tous les sujets, aussi importants soient-ils.
Les dons aux œuvres et organismes d'intérêt général ayant un caractère culturel ouvrent déjà droit, dans les conditions de droit commun, à une réduction de 66 %, dans la limite de 20 % du revenu imposable. C'est le cas, par exemple, des dons à la Fondation du patrimoine, qui mène plusieurs projets à Mayotte, ou à d'autres fondations ou associations reconnues d'utilité publique agréées intervenant dans le domaine de la protection du patrimoine.
Il n'y a pas lieu de créer une nouvelle niche fiscale bénéficiant spécifiquement à Mayotte dans ce domaine. Là encore, l'avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par Mme Guhl, MM. Mellouli, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer le nombre :
1 000
par le nombre :
3 000
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
III. – La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Antoinette Guhl.
Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à encourager les dons des particuliers destinés à la reconstruction de Mayotte.
Le plafond de la réduction d'impôt a été modifié à la baisse en commission, passant de 3 000 euros à 1 000 euros. Ce recul nous semble injustifié.
Nous voulons rétablir le plafond initial de 3 000 euros, qui figurait dans le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Le plafond de 1 000 euros est celui qui est habituellement retenu pour les majorations exceptionnelles de réduction d'impôt. C'est notamment celui du dispositif Coluche pour les dons à destination des associations fournissant gratuitement des repas aux personnes en difficulté.
Compte tenu de l'état des finances publiques, il ne m'apparaît pas opportun de relever ce plafond, d'autant qu'il bénéficierait surtout aux couches aisées de la population, créant une nouvelle niche fiscale.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.
Mme Antoinette Guhl. Il nous a été dit hier, me semble-t-il, que le budget pour la reconstruction de Mayotte n'était pas tout à fait bouclé.
De fait, le budget prévoit 100 millions d'euros. Sachant que la reconstruction va coûter entre 1 milliard et 3 milliards d'euros, nous aurons besoin de fonds supplémentaires.
Je ne trouve pas très sérieux de se priver de la générosité des Françaises et des Français et de leur solidarité à l'égard de leurs compatriotes.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Après l'article 16
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 18, présenté par Mme Guhl, MM. Mellouli, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Par dérogation à la première phrase du 2 de l'article 238 bis du code général des impôts, ouvrent droit à une réduction d'impôt au taux de 75 % de leur montant les dons et versements effectués par les entreprises entre le 14 décembre 2024 et le 17 mai 2025 au profit des organismes d'intérêt général visés à l'article précité qui, dans le cadre de leur action dans le département de Mayotte à la suite du passage du cyclone Chido, fournissent gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté ou contribuent à favoriser leur logement, y compris par la reconstruction des locaux d'habitation rendus inhabitables.
Il n'est pas tenu compte des versements effectués au profit des organismes précédemment mentionnés dans l'application du seuil de 2 millions d'euros prévu au 2 de l'article précité.
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Antoinette Guhl.
Mme Antoinette Guhl. Cet amendement, qui procède de la même idée que le précédent, concerne les dons des entreprises et le mécénat d'entreprise.
Il s'agit de porter le taux de réduction d'impôt des entreprises réalisant du mécénat pour Mayotte à 75 %, soit le taux du fameux dispositif Coluche.
Au regard de la gravité de la situation, qui relève quasiment de l'humanitaire, nous pouvons faire bénéficier les entreprises – à l'instar de ce que nous avons demandé pour les particuliers – du taux le plus intéressant, à savoir 75 %, au lieu du taux habituel de 60 %.
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par Mme Berthet, M. Belin, Mme Belrhiti, M. Bouchet, Mmes F. Gerbaud, Josende et Lassarade, MM. H. Leroy et Panunzi, Mme Petrus, M. Rapin, Mmes Richer et Ventalon et M. P. Vidal, est ainsi libellé :
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Par dérogation à la première phrase du 2 de l'article 238 bis du code général des impôts, ouvrent droit à une réduction d'impôt au taux de 60 % de leur montant les dons et versements effectués par les entreprises entre le 14 décembre 2024 et le 17 mai 2025 au profit des organismes d'intérêt général visés à l'article précité qui, dans le cadre de leur action dans le département de Mayotte à la suite du passage du cyclone Chido, fournissent gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté ou contribuent à favoriser leur logement, y compris par la reconstruction des locaux d'habitation rendus inhabitables.
Il n'est pas tenu compte des versements effectués au profit des organismes précédemment mentionnés dans l'application du seuil de 2 millions d'euros prévu au 2 de l'article précité.
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Lauriane Josende.
Mme Lauriane Josende. L'amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 134, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Xowie, Gay et Lahellec, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le taux de réduction d'impôt prévue au 2 de l'article 238 bis du code général des impôts est porté à 70 %, pour la fraction inférieure ou égale à 2 millions d'euros, pour les versements effectués entre le 14 décembre 2024 et le 17 mai 2025 au profit des associations et fondations reconnues d'utilité publique qui, dans le cadre de leur action dans le département de Mayotte à la suite du passage du cyclone Chido, fournissent gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté ou contribuent à favoriser leur logement, y compris par la reconstruction des locaux d'habitation rendus inhabitables.
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Toutes les interventions contribuant à la reconstruction de Mayotte doivent être facilitées, y compris en mettant à contribution les entreprises et en encourageant les donations les plus généreuses possible.
Les membres de mon groupe préfèrent bien évidemment l'intervention publique. Toutefois, au travers de cet amendement portant article additionnel, nous proposons de flécher des défiscalisations symétriques à celles des particuliers.
Et pour cause, le coût des dégâts est estimé à plus de 1 milliard d'euros ; trois quarts des bâtiments et trois quarts des forêts mahoraises sont touchés. Il est possible que l'ampleur de la catastrophe soit plus importante encore, les travaux n'ayant pas vraiment démarré.
Au demeurant, si nous pouvons chiffrer ces dégâts à plus de 1 milliard d'euros, combien d'argent faudra-t-il pour que la reconstruction soit ambitieuse ? Celle que nous appelons de nos vœux doit permettre de mieux faire face aux prochaines catastrophes qui risquent de se produire, compte tenu du dérèglement climatique et de ses effets destructeurs.
Aussi, pour favoriser les dons aux associations et aux fondations reconnues d'utilité publique qui, dans le cadre de leur action dans le département de Mayotte, à la suite du Cyclone Chido, fournissent déjà gratuitement des repas et des soins aux personnes en difficulté et contribuent à favoriser leur relogement, y compris en reconstruisant les locaux d'habitation rendus inhabitables, nous proposons de porter le taux des défiscalisations à 70 %.
Nous espérons, mes chers collègues, que vous voterez cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. L'amendement n° 134 vise à dupliquer la majoration exceptionnelle de réduction d'impôt pour les dons effectués par des entreprises.
Les amendements nos 8 rectifié et 18 ont le même objet, même si le périmètre des organismes bénéficiaires est un peu différent.
Je suis défavorable à ces trois amendements, pour trois raisons.
Premièrement, les dispositions en vigueur ouvrent déjà droit à réduction d'impôt pour les dons des entreprises au profit d'organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent à titre principal à la fourniture gratuite à des personnes en difficulté de soins ou de matériel nécessaire pour vivre décemment, ce qui permet de couvrir la majeure partie des besoins visés.
Deuxièmement, je rappelle que cette mesure, contrairement à celle qui concerne les particuliers, n'a pas été annoncée dès le mois de décembre 2024. Or mettre en place une telle mesure fiscale incitative à titre rétroactif est pour le moins contestable.
Troisièmement, enfin, les plafonds de déduction pour les entreprises sont très supérieurs à ceux qui sont prévus pour les dons des particuliers. Dans un contexte budgétaire contraint, cette mesure ne me paraît pas bienvenue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Au début de nos débats, nous avons acté que les financements pour la reconstruction seraient dirigés massivement vers Mayotte, avec des dispositions dérogatoires permettant d'engager rapidement les travaux.
Nous savons, puisque nos amendements ont été rejetés, que beaucoup de cet argent ira droit aux majors du BTP. Alors que nous demandons, en contrepartie, une défiscalisation visant à capter la générosité nationale vers les associations qui, par leur travail, participent à la reconstruction, l'afflux des dons est limité. C'est fort dommage !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Chapitre VII
Mesures en faveur de la population à Mayotte
Avant l'article 17
M. le président. L'amendement n° 101 rectifié bis, présenté par MM. Omar Oili et Kanner, Mmes Artigalas et Le Houerou, M. Roiron, Mme Bélim, M. Fagnen, Mme Féret, M. Jacquin, Mme Narassiguin, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Redon-Sarrazy, Ros, Tissot, Bouad, Cardon, Pla, Mérillou, Michau, Montaugé, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d'un mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un bilan exhaustif de la catastrophe, incluant le nombre de personnes décédées, disparues, blessées et amputées lors du passage du cyclone Chido survenu dans la nuit du 13 au 14 décembre 2024.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, hier, à la suite d'une intervention sur le nombre de victimes, vous avez tenu des propos un peu vifs.
Sans chercher à susciter la polémique, je voudrais « remettre la mosquée au milieu du village », pour paraphraser l'expression hexagonale qui met l'église à cet endroit.
Je tiens à effectuer un rappel sur l'origine du flou persistant sur le nombre de victimes.
Quelques jours après Chido, le représentant de l'État, dans une intervention publique, a évoqué sa crainte de centaines, voire de milliers de victimes. De surcroît, il a évoqué notre rite musulman d'un enterrement des corps sous vingt-quatre heures, sous-entendant, fort justement d'ailleurs, que des victimes auraient pu échapper à la procédure normale d'une déclaration après un décès.
Le jour de l'arrivée du Président de la République à Mayotte, un journaliste, intervenant en direct sur une chaîne publique, a évoqué le chiffre de 60 000 morts avancé par des sauveteurs. Ce ne sont pas les Mahorais ou quelques élus qui sont à l'origine de cette suspicion.
Monsieur le ministre, ayant un profond respect pour les services de l'État, j'ai bien évidemment interrogé le préfet de Mayotte sur le nombre de disparus, dans la mesure où il avait lui-même évoqué une soixantaine d'opérations de recherche. Je n'ai pas obtenu de réponse précise à ma demande, sinon un tableau global des bilans, des « aller vers », mais rien sur le résultat des recherches des disparus. Vous comprendrez que ce culte du secret développe un sentiment de suspicion à l'égard de l'État.
Je sais que vous n'êtes pas indifférent à Mayotte, que vous connaissez notre archipel.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Saïd Omar Oili. En conclusion, monsieur le ministre, je demande à ce que l'on rétablisse l'article, voté à l'Assemblée nationale, qui prévoit la remise au Parlement d'un bilan officiel du nombre de victimes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission a estimé que cette demande de rapport serait redondante avec la mission interministérielle d'évaluation chargée de réaliser le bilan de la catastrophe, qui a rendu ses premiers travaux à la fin du mois de janvier.
La reconstruction exige de s'appuyer sur toutes les forces vives de l'administration. J'entends la préoccupation de nos collègues, notamment des parlementaires de Mayotte, sur la nécessité de confirmer le premier bilan de trente-neuf morts et de préciser le nombre de blessés, mais cela pourra, à mon sens, être fait dans un second temps : avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. Je répondrai chaque fois que l'on abordera ce sujet, lourd, grave, symbolique, du bilan humain, parce que c'est d'hommes, de femmes, d'enfants qu'il est question.
Tout d'abord, je répète qu'il faut bien avoir à l'esprit la situation dans laquelle l'île s'est trouvée juste après le passage de Chido : télécommunications perdues – il y a eu une vraie rupture entre l'île, d'une part, et La Réunion et l'Hexagone, d'autre part –, routes entravées, même si beaucoup ont très vite été rouvertes, accès aux bidonvilles empêché par des décombres, etc. Cela a évidemment complexifié l'évaluation de la situation sur le terrain.
Dans chacune des catastrophes du même type – je pense à l'ouragan Irma, à Saint-Martin, ou encore, en Europe, voilà seulement quelques mois, aux inondations dans la région de Valence, en Espagne –, l'intervention sur le terrain est très difficile. Pourtant, dès le samedi 14 décembre, soit dès après la fin de l'alerte violette, une mission était lancée pour rouvrir les routes et aller au contact des populations.
Une sous-préfète a été chargée de recenser les victimes, en lien avec les maires et les autorités religieuses – c'est la fameuse « mosquée au milieu du village » que vous avez évoquée, monsieur le sénateur.
Je répète que nous pouvons avoir des indications sur le bilan humain grâce à la démarche d'« aller vers » – 15 000 soins ont été prodigués – et aux passages à l'Élément de sécurité civile rapide d'intervention médicale (Escrim) – il y a eu 5 739 prises en charge.
Beaucoup ont dit que la rentrée scolaire serait le grand moment de vérité, puisque les enseignants seraient alors amenés à compter les chaises vides des enfants des familles mahoraises en situation régulière et, surtout, irrégulière.
Comme je l'ai déclaré hier, je veux rester prudent. Toutefois, à l'heure actuelle, le taux d'absence recensé par le rectorat est faible. Nous verrons si des informations remontent du terrain.
Je le redis, cette question du bilan humain demande humilité et respect – c'est d'ailleurs sur ce ton que vous l'avez abordée, monsieur le sénateur. Bien évidemment, ni vous ni moi ne voulons polémiquer sur le sujet. Les chiffres sont là : il y aurait quarante morts. Nous n'avons absolument rien à cacher.
Au fond, l'absence de transparence de l'État est un autre débat. Vous êtes déjà intervenu sur ce sujet, monsieur le sénateur, y compris dans les médias. Honnêtement, le préfet ne saurait être accusé d'installer une distance, surtout avec les élus locaux. Le travail du préfet est forcément difficile ; il l'est d'autant plus dans les circonstances que nous avons connues. Je répète que sa méthode, axée sur les revues de territoire, repose sur un lien avec les communes et une prise de pouls régulière de chacune d'entre elles. J'ai encore pu le constater sur place, avec les maires. Ces revues de territoire permettent également de rendre compte de l'action de l'État.
Je pense également aux conférences de sécurité, organisées régulièrement pour rendre compte de l'action de l'État en matière de lutte contre l'insécurité, contre l'économie souterraine, contre l'immigration clandestine, auxquelles les maires sont conviés.
Ces deux exemples parmi d'autres illustrent que l'État rend compte de son action.
Pour refonder Mayotte, il faut de la cohésion et de l'unité. Si la défiance existait avant Chido – non pas à l'égard du préfet, mais entre les Mahorais, les élus et l'État hexagonal –, essayons de ne pas jouer cette carte, qui serait mortifère en ce moment où il faut reconstruire.
Pour ce qui me concerne, ma confiance est pleine et entière. Lorsque j'étais ministre de l'intérieur, sauf dans certaines circonstances qui ont pu s'imposer, j'ai toujours soutenu les services de l'État et les préfets. En tout état de cause, à Mayotte, je leur fais confiance pour communiquer les informations que demande un élu de la Nation.
Bien évidemment, s'il y a un problème, nous en parlons. Mais sur le sujet des victimes, l'État n'a rien à cacher. La façon dont on nous interroge donne le sentiment que nous aurions quelque chose à cacher ou que nous serions gênés par le nombre de victimes. Monsieur le sénateur, s'il y avait beaucoup plus de victimes, je serais non pas « gêné », mais horrifié de ces pertes humaines ! Il serait évidemment inacceptable que nous ne donnions pas le véritable chiffre, mais je ne vois pas pourquoi nous agirions ainsi. Si, demain, nous nous apercevons qu'il y a des absences, que nous ne parvenons pas à repérer certaines personnes – Mme la sénatrice en a parlé hier –, nous en rendrons compte.
Je ne pense pas que mon ton soit particulièrement vif lorsque je réponds sur ce sujet : je dis tout simplement et très honnêtement que cette question ne mène à rien d'essentiel. Il est nécessaire que l'État soit transparent sur les chiffres relatifs aux victimes et il le sera. La transparence s'impose à tous, dans tous les domaines.
J'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, je ne comprends pas votre acharnement à refuser ce rapport.
Vous craignez la défiance, mais il faut plutôt rétablir la confiance ! C'est une autre démarche : si vous ne rétablissez pas la confiance, vous alimentez la défiance…
Après la valse des chiffres, y compris de la part des représentants de l'État et des secouristes, il n'est pas tout à fait irrationnel qu'un bilan de quelques dizaines de morts fasse naître un doute.
Il est nécessaire de dresser un bilan. De fait, il est bien normal qu'il soit difficile d'établir le chiffre exact des blessés ou des tués quand une grande partie de la population n'est pas recensée. Il faut rappeler que, par peur d'être piégés, contrôlés, expulsés, de nombreux habitants en situation irrégulière ne se sont pas rendus dans les abris. L'État, aux yeux d'un grand nombre de personnes sans papiers, n'a pas été protecteur. (M. le ministre d'État le conteste.)
L'Agence France-Presse (AFP) l'a souligné : beaucoup ont pensé que l'alerte était un piège qu'on leur tendait pour les ramasser et les reconduire à la frontière. Ces gens sont restés où ils étaient jusqu'à la dernière minute. C'est face à l'intensité du phénomène qu'ils ont commencé à paniquer, à chercher un endroit où se réfugier. Mais il était déjà trop tard : les tôles commençaient à s'envoler…
D'une certaine manière, l'État a manqué à son devoir de protection en ce qu'il a incarné le danger, l'insécurité, la menace et la violence.
Pour ma part, il ne me semble pas tout à fait étonnant que nous rencontrions des difficultés à établir un bilan. Or l'on avance un chiffre à l'unité près, comme si la situation à Mayotte était d'une rationalité totale !
(Mme Sylvie Robert remplace M. Didier Mandelli au fauteuil de la présidence.)