M. le président. L’amendement n° 169, présenté par Mme Jacques, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation à l’article L. 181-12 du code rural et de la pêche maritime, la reconstruction ou la réfection, à l’identique ou avec des adaptations ou des modifications, dans la limite d’une augmentation de 5 % de leur gabarit initial, des constructions, aménagements ou installations nécessaires à l’exploitation agricole et forestière, ou au stockage et à l’entretien de matériel agricole, ou liés à une exploitation agricole et destinés au commerce ou à la restauration, lorsque les produits commercialisés ou consommés sont majoritairement issus de l’exploitation, ayant pour conséquence la réduction des surfaces agricoles et des surfaces forestières dans les communes disposant d’un document d’urbanisme, ou entraînant la réduction des espaces non encore urbanisés dans une commune soumise au règlement national d’urbanisme, doivent faire l’objet d’un avis simple de la commission mentionnée à l’article L. 181-10 du même code.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement vise à lever temporairement l’avis conforme de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), afin de faciliter et d’accélérer la reconstruction des bâtiments et installations agricoles mahorais détruits par le cyclone Chido.
Comme vous le savez, mes chers collègues, dans les outre-mer, l’accord de la CDPENAF est requis pour tout projet d’aménagement susceptible d’entraîner une consommation d’espace naturel, agricole ou forestier.
Il ne s’agit pas de remettre en question cette règle de manière générale, surtout dans un territoire insulaire surpeuplé, où la protection de ces espaces constitue un majeur. Cependant, l’interprétation parfois très extensive que fait la CDPENAF de la notion de consommation d’espace naturel, agricole ou forestier pourrait, dans certains cas, bloquer la reconstruction ou la réfection avec des modifications mineures des bâtiments et infrastructures agricoles, ainsi que des bâtiments directement liés à l’activité agricole.
Ainsi, nous proposons, à titre dérogatoire et pour une durée de deux ans – soit la durée de l’ensemble des mesures dérogatoires prévues au chapitre III du présent projet de loi – de supprimer l’avis conforme de la CDPENAF, au profit d’un avis simple.
Sont concernés les opérations et les travaux de reconstruction ou de réfection à l’identique ou quasi à l’identique des bâtiments et autres infrastructures agricoles, dès lors que la modification n’excède pas 5 % de leur gabarit initial.
Par nature, les reconstructions strictement à l’identique n’impliquent aucune consommation d’espace et ne sont donc pas soumises à l’avis de la CDPENAF.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le cyclone Chido a eu un impact fort sur l’agriculture mahoraise. Le secteur des récoltes, qui œuvre à la fois à la production végétale et animale, accuse ainsi une perte financière de 168 millions d’euros.
Les pertes de fonds agricoles, qui comprennent les bâtiments agricoles, le remplacement des plants et la remise en état du foncier, s’élèvent quant à elles à 75,7 millions d’euros.
Enfin, les pertes de revenus liées à la durée nécessaire pour reconstituer le potentiel agricole atteignent, selon une première estimation, un montant compris entre 132 millions et 160 millions d’euros.
J’en viens à l’amendement de la commission. La CDPENAF émet des avis sur différents documents d’urbanisme ou d’aménagement et peut être consultée sur toute question relative à la réduction des surfaces naturelles, agricoles ou forestières.
Je tiens à le souligner, l’avis conforme garantit la protection des terres agricoles et assure que les projets soumis à la commission présentent un véritable lien avec le développement agricole. Il agit comme un verrou ou un rempart face au déclassement ou à la disparition des terres agricoles.
Notez que la CDPENAF rend peu d’avis défavorables pour la reconstruction de bâtiments agricoles préexistants, dès lors que le professionnel déclare une activité agricole conforme et déjà connue des services de l’État.
Il me paraît essentiel de conserver de manière globale le principe d’un avis conforme pour protéger les activités agricoles. Mais, compte tenu de l’urgence, je comprends le sens de cet amendement, d’autant que la mesure proposée a un caractère temporaire, comme l’ensemble des dérogations prévues par ce texte en matière d’urbanisme, et un champ d’application limité à 5 % de l’emprise.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet sur cet amendement un avis de sagesse positive.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis d’accord avec tout ce que le ministre vient d’affirmer, mais il y a quelque chose que je ne comprends pas.
Depuis le début de nos débats, le Gouvernement et la commission invoquent le caractère d’urgence du présent texte pour faire échec à nos amendements et nous renvoient au projet de loi pour la refondation de Mayotte, qui sera sans doute présenté en mars prochain.
Or, soudain, la commission propose de déroger à l’avis conforme de la CDPENAF de façon temporaire, alors même que celui-ci agit comme un garde-fou et remplit un rôle parfaitement légitime. En se référant à une période de deux ans, elle prend le maximum de ce qu’il est possible d’envisager en matière de dérogation !
Puisque nous discutons d’un texte d’urgence, pourquoi ne pas nous borner à lever l’avis conforme pour six mois et remettre à plus tard les réflexions sur ce sujet ? Certains conçoivent l’avis conforme comme une contrainte, alors qu’il est destiné à protéger les surfaces agricoles.
Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe votera contre cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Ma chère collègue, je vous ferai remarquer que, depuis le début de la soirée, nous n’avons cessé de parler d’inégalités et d’injustices.
Or il n’y a que dans les territoires ultramarins que la CDPENAF émet un avis conforme ; dans l’Hexagone, elle rend un avis simple. Dans ces conditions, où se trouve l’égalité ?
Au travers de cet amendement, la commission demande simplement que l’on fasse confiance aux agriculteurs de l’outre-mer, en particulier ceux du territoire mahorais.
Je puis vous le garantir, des agriculteurs profondément amoureux de leur métier, j’en ai rencontré ! Je suis certaine qu’ils ne voudraient pas remettre en question leur outil de travail.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.
Article 8
Sans préjudice du second alinéa de l’article L. 651-3 du code de l’environnement, lorsque la délivrance de l’autorisation d’urbanisme ou la décision de non-opposition à déclaration préalable nécessaire pour réaliser des travaux mentionnés à l’article 5 de la présente loi requiert une mise à la disposition du public du dossier en application du premier alinéa de l’article L. 651-3 du même code, l’autorité compétente pour prendre la décision en vue de laquelle l’enquête est requise ou, lorsque la participation du public porte sur le projet d’une collectivité territoriale, d’un établissement public de coopération intercommunale ou d’un des établissements publics qui leur sont rattachés, le président de l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement, peut, le cas échéant, avec l’accord du ou des maires de la commune d’implantation, décider de soumettre le projet à la procédure de participation du public par voie électronique mentionnée à l’article L. 123-19 dudit code, en lieu et place de la mise à la disposition du public du dossier.
Jusqu’au 1er juillet 2025, le dossier soumis à la procédure prévue au même article L. 123-19 est mis en consultation sur support papier, aux horaires d’ouverture dans la préfecture et la mairie de la commune d’implantation du projet s’agissant des décisions des autorités de l’État, y compris des autorités administratives indépendantes et des établissements publics de l’État, ou au siège de l’autorité et dans la mairie de la commune d’implantation du projet s’agissant des décisions des autres autorités. Les observations et les propositions du public sont consignées dans un registre prévu à cet effet – (Adopté.)
Article 9
Les opérations et les travaux de démolition ou de déblaiement ainsi que la mise en place des constructions ou installations temporaires directement nécessaires à la conduite des travaux de reconstruction ou de réfection peuvent être engagés dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme ou de la déclaration préalable.
M. le président. L’amendement n° 55, présenté par Mme Corbière Naminzo, M. Xowie, Mme Margaté, MM. Gay, Lahellec et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Remplacer le mot :
dès
par les mots :
dans les quinze jours suivant
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Afin d’accélérer la reconstruction de Mayotte dans un contexte d’urgence, l’article 9 prévoit que les opérations de démolition du bâti et de terrassement peuvent être engagées dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme ou de la déclaration préalable.
Ce procédé semble légèrement démesuré. Nous savons pouvoir compter sur la bonne foi des habitants de Mayotte, mais je vous laisse imaginer, mes chers collègues, comment les choses pourraient se dérouler dans un territoire où, selon les estimations actuelles, les trois quarts des bâtiments ont été abîmés.
Conformément à l’article 9, le chantier peut démarrer avant même que la demande d’autorisation d’urbanisme n’ait fait l’objet de la moindre observation. Comment dire à la personne concernée que la destruction du bâtiment et le terrassement ne sont pas adaptés ou ne correspondent pas aux règles d’urbanisme en vigueur, une fois l’opération terminée ?
Par cet amendement, nous proposons que l’autorité compétente, pendant une durée de quinze jours, puisse réaliser un tri des dossiers en amont. Ainsi, elle pourra examiner rapidement les demandes déposées et empêcher, si nécessaire, les démolitions qui paraissent inadaptées.
Ce délai de quinze jours peut sembler long. Étant donné l’urgence dans laquelle se trouvent les Mahorais, nous serions d’avis de raccourcir ce délai, mais cela nécessiterait des moyens humains dont nous ne disposons pas à ce jour.
Nous déplorons le manque de moyens, mais ce n’est pas cette réalité qui doit présider à l’élaboration du présent texte. C’est bien la loi et les besoins de la population qui doivent déterminer les moyens à mettre en œuvre, sans quoi on risque de reproduire les erreurs politiques qui participent aux catastrophes naturelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Introduire un délai de quinze jours pour engager des travaux de démolition, de déblaiement et d’installation du chantier revient à vider l’article de sa substance.
En outre, la commission a supprimé la possibilité de réaliser des travaux qui pourraient causer des dommages irréversibles en retirant du texte la mention des terrassements et des fondations.
Quant aux craintes liées aux démolitions, elles devraient être levées par un amendement qui sera examiné dans quelques instants.
En attendant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 69, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsque les opérations et les travaux portent sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques en application de l’article L. 621-25 du code du patrimoine.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement a pour objet d’exclure la possibilité de commencer les travaux en urgence lorsqu’ils concernent un immeuble inscrit sur la liste des monuments historiques, comme il en existe à Mayotte.
L’article 9 vise à accélérer les reconstructions après le passage du cyclone Chido en permettant aux demandeurs de commencer les travaux préparatoires dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme, tout en s’assurant que les travaux les plus structurants ne peuvent être engagés qu’après la délivrance de cette dernière.
Le Gouvernement propose d’améliorer ce dispositif en tenant compte de la particularité des quatorze monuments historiques de Mayotte. Il convient ainsi d’interdire les démolitions ou les déblaiements en urgence, sans entraver significativement l’effort de reconstruction de logements.
Par cet amendement, nous concilions la défense du patrimoine présent à Mayotte et la nécessaire célérité que requiert sa reconstruction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La restriction proposée ici paraît parfaitement justifiée et concerne un nombre très limité de cas.
En conséquence, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Nous revenons à l’examen de l’article 2, précédemment réservé.
Article 2 (précédemment réservé)
À Mayotte, jusqu’au 31 décembre 2027, par dérogation à l’article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales et aux articles L. 212-1, L. 212-4 et L. 212-5 du code de l’éducation, l’État ou un de ses établissements publics désigné par le ministre chargé de l’éducation nationale peut assurer la construction, la reconstruction, la rénovation, la réhabilitation, l’extension, les grosses réparations et l’équipement des écoles publiques des communes désignées par arrêté du ministre chargé de l’éducation nationale au regard des dégâts subis par les écoles à la suite du cyclone Chido, à la demande des communes concernées.
Le service de l’État ou l’établissement public chargé de la mission définie au premier alinéa du présent article s’assure du respect de la réglementation, notamment en matière de prévention des risques naturels, d’hygiène et de santé, ainsi que du caractère adapté des équipements aux spécificités de la situation mahoraise.
Le service de l’État ou l’établissement public chargé de la mission définie au même premier alinéa consulte la commune sur l’implantation des écoles publiques et sur le nombre de classes.
Dans la mesure nécessaire à la mission définie audit premier alinéa, les biens affectés aux écoles sont mis, de plein droit, à la disposition de l’État ou de l’établissement public précité, qui assume alors l’ensemble des droits et obligations du propriétaire. Il exerce en tant que de besoin les attributions du maître d’ouvrage définies à l’article L. 2421-1 du code de la commande publique.
Toutefois, la collectivité conserve les droits et obligations résultant de contrats déjà conclus dans le champ défini au premier alinéa du présent article, sauf accord avec l’État ou l’établissement public pour substituer celui-ci à la collectivité. La collectivité propriétaire conserve en outre la charge des emprunts qu’elle avait contractés au titre des biens mis à disposition.
L’échéancier de remboursement des emprunts souscrits par les collectivités territoriales de Mayotte auprès des établissements de crédit ou des sociétés de financement peut être renégocié. Les collectivités territoriales de Mayotte peuvent bénéficier de l’assistance des services ou des agences de l’État compétents pour mener ces négociations.
Au plus tard à la date mentionnée au même premier alinéa, l’État ou l’établissement public remet les biens à leurs propriétaires ou, pour les biens nouvellement construits, aux collectivités territoriales compétentes. Cette remise met fin à la mise à disposition prévue au cinquième alinéa et, le cas échéant, emporte transfert de la propriété des biens nouvellement construits et de l’ensemble des droits et obligations qui s’y attachent. Toutefois, l’État ou l’établissement public conserve les droits et obligations résultant des contrats qu’il a conclus, sauf accord avec la collectivité pour lui substituer celle-ci.
Par dérogation à l’avant-dernier alinéa, si les opérations ne sont pas achevées au 31 décembre 2027, la commune et l’État ou l’établissement public peuvent, par convention, prolonger la mission définie au présent article.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Isabelle Florennes, rapporteure pour avis. Avant de passer à l’examen des amendements à l’article 2, j’appelle l’attention du Gouvernement sur la situation des écoles privées de Mayotte. En effet, celles-ci ne sont pas concernées par le présent article, qui prévoit uniquement une intervention temporaire de l’État, en lieu et place des communes, pour reconstruire les écoles publiques de Mayotte.
J’ai été alertée sur la situation de deux établissements privés, dont une école tout juste ouverte à la rentrée 2024, qui, comme tous les établissements scolaires de Mayotte, ont subi de lourds dégâts matériels ne permettant toujours pas une reprise rapide des enseignements.
Il convient de ne pas oublier ces établissements privés sous contrat avec l’État. Ils doivent, eux aussi, bénéficier d’un accompagnement, afin de pouvoir de nouveau accueillir les élèves dès que possible.
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, sur l’article.
M. Saïd Omar Oili. Avec 117 000 enfants scolarisés à Mayotte, dont près de 55 % sont inscrits à l’école primaire, l’éducation est un enjeu majeur pour l’avenir de notre territoire. Il est absolument impératif de s’occuper de la jeunesse et d’en finir avec la rotation dans les établissements scolaires.
Des personnels remarquables mettent tout en œuvre pour accueillir un maximum d’enfants dans un laps de temps réduit, mais il manquait déjà 1 200 classes avant le passage de cyclone Chido.
La situation s’est encore aggravée depuis lors : plus de la moitié des établissements scolaires sont hors service, tandis que d’autres ont servi à l’hébergement d’urgence. J’ai appris tout à l’heure que le collège de Kwalé avait été évacué et que les enfants pourraient peut-être retourner à l’école.
L’article 2 apporte une première réponse pour accélérer et faciliter la reconstruction des écoles de Mayotte en permettant à l’État d’assurer temporairement la compétence de construction et d’entretien des écoles publiques, en lieu et place des communes qui le demanderaient.
L’étude d’impact indique que cette mission est confiée à l’établissement public chargé de la reconstruction. Même si mes amendements ont été déclarés irrecevables, je souhaiterais que M. le ministre clarifie ce point. Quel sera exactement le rôle de l’établissement précité dans la construction, la reconstruction et la rénovation des écoles publiques, lorsque les collectivités en feront la demande ? Ce dispositif pourrait-il s’appliquer aussi aux collèges et aux lycées ?
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, sur l’article.
Mme Audrey Bélim. À l’occasion de l’examen de l’article 2, nous devons tenir compte de l’aspect humain.
En effet, malgré nos nécessaires discussions sur la reconstruction, l’humain doit rester au centre de tout. Des centaines d’élèves mahorais poursuivent ou poursuivront leur scolarité en étant éloignés de leurs familles, de leurs amis, de leurs territoires et de leurs repères, soit en résidant en pension, soit en étant hébergés par des membres ou des amis de leur famille qu’ils n’avaient peut-être jamais vus auparavant.
Les Ultramarins que nous sommes savent combien cet éloignement soudain est difficile pour un adulte et entraîne parfois un sentiment d’isolement ; il peut être dangereux d’un point de vue psychologique et causer des surcoûts financiers. Je vous laisse donc imaginer les effets qu’il peut avoir pour un enfant.
C’est la raison pour laquelle je souhaiterais, monsieur le ministre d’État, que l’on discute au plus tôt du suivi moral et financier des élèves mahorais.
Dans quel état psychique se trouvent-ils ? Leur éloignement est-il volontaire ou résulte-t-il du choix de leurs parents ? Les personnes qui les accueillent ont-elles les ressources nécessaires pour fournir ce qui est nécessaire à leur épanouissement ?
Les professeurs sont-ils avisés des situations passées et présentes de leurs élèves ? Connaissent-ils leur état d’esprit, pour mieux appréhender leur épanouissement personnel et améliorer leur intégration dans les classes ?
L’intérêt de ces enfants exige de mettre en place des enquêtes et des suivis psychosociaux le temps nécessaire, en tenant compte de toutes les conditions de cet éloignement. Il faudra sans doute formaliser les suivis dans le projet de loi de refondation, le présent texte ne permettant pas d’y pourvoir.
Quoi qu’il en soit, nous devons prendre toutes ces questions au sérieux : il y va de l’intérêt de l’enfant.
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Vous n’ignorez pas, monsieur le sénateur Omar Oili, que l’État est déjà responsable de la construction des collèges et des lycées à Mayotte.
Vendredi matin, aux côtés de la ministre de l’éducation nationale, j’ai visité un collège datant de 1989, dont les formes de construction étaient totalement adaptées à l’époque : en témoigne la présence d’une végétation abondante. Il se trouve qu’il a été très endommagé par le cyclone et même détruit à certains endroits. Pour des raisons liées à la température environnante, notamment, il devra être entièrement reconstruit.
Il est évident que les projets de reconstruction devront faire l’objet d’une concertation avec les élus dans chacune des communes concernées et tenir compte du nombre d’élèves.
J’en profite pour mettre le doigt sur une légère contradiction que j’ai ressentie lors de ma visite à Mayotte : je ne dénoncerai personne, mais dans ce territoire nombre d’élus, notamment des maires, m’ont indiqué qu’il ne fallait pas construire de nouvelles classes, parce que cela risquait de « créer une pompe aspirante » pour l’immigration. Il faudra donc faire des choix.
Si l’on examine la situation dans le détail, on s’aperçoit qu’il manque 1 200 à 1 300 classes. La réalisation de projets de groupes scolaires paraît évidente pour des raisons démographiques. Rien qu’à Petite-Terre, la population passera de 30 000 à 60 000 habitants d’ici à dix ans. Il faudra donc construire des équipements capables de répondre à la demande en matière scolaire, bien sûr, mais aussi sanitaire.
L’État pourra confier à l’établissement public chargé de la reconstruction la maîtrise d’ouvrage des écoles lorsque les communes lui demanderont de les reconstruire ou de les rénover. Cela se fera très certainement de cette manière, dans une étroite collaboration entre les communes et le maître d’ouvrage, du moins l’État.
Cette question fait partie des dossiers que le général Pascal Facon est en train d’examiner avec les maires. L’intervention de l’établissement public précité permettra sans doute d’accélérer les constructions, en parallèle du fonds du ministère en faveur des communes.
Au moins en ce qui concerne les travaux de réparation et de rénovation, je souhaite que les choses aillent vite, car 20 % à 30 % des écoles ou des classes sont détruites. Il faudra accélérer le dispositif de reconstruction : il me paraît important de le rappeler, car il est question, par ce biais, de soutenir les entreprises mahoraises et l’économie locale.
Je suis d’accord avec vous, madame la sénatrice Bélim : à ce stade, nous devons tous garder à l’esprit l’aspect humain. Si je ne me trompe pas, entre 400 et 500 élèves ont quitté Mayotte après le passage du cyclone Chido, voire juste avant, soit moins de 1 % du nombre total d’élèves.
Je veux bien vérifier ces chiffres, mais il n’empêche que, pour ces familles qui bénéficient d’ailleurs des aides que j’ai annoncées, nous devrons rester très attentifs aux questions soulevées. Bien entendu, je ne manquerai pas de les évoquer avec ma collègue Élisabeth Borne.
M. le président. L’amendement n° 121, présenté par Mme Florennes, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Après le mot :
Chido
insérer les mots :
ou des événements climatiques survenus pendant une période de cinq mois à compter du 13 décembre 2024
II. – Alinéa 5
1° A la première phrase, remplacer les mots :
pour substituer celui-ci
par les mots :
pour que celui-ci se substitue
2° Compléter la seconde phrase par les mots :
en application du quatrième alinéa du présent article
III. – Alinéa 7, troisième phrase
Remplacer les mots :
pour lui substituer celle-ci
par les mots :
pour que celle-ci se substitue à lui
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Isabelle Florennes, rapporteure pour avis. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 63, présenté par Mme Corbière Naminzo, M. Xowie, Mme Margaté, MM. Gay, Lahellec et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
et pour améliorer le taux de scolarisation antérieur au cyclone
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à préciser que l’État prend en charge la construction des écoles, non seulement pour réparer les destructions causées en décembre dernier, mais aussi pour résoudre le problème de la déscolarisation qui touchait déjà gravement l’archipel avant le passage du cyclone Chido.
Le Conseil d’État l’a rappelé, la situation du parc immobilier scolaire était déjà extrêmement tendue avant la survenue des événements météorologiques que l’on sait, rendant impossible un accueil satisfaisant des enfants en âge d’être scolarisés.
La Fondation Jean-Jaurès mettait elle aussi en lumière la question de la surpopulation scolaire à Mayotte, où les élèves représentent entre 35 % et 40 % de la population, alors que la moyenne nationale s’élève à 18 %.
Par ailleurs, il est probable, d’après les informations disponibles, qu’environ la moitié des établissements sont détruits ou inutilisables. Ainsi, la moitié de ce qui était déjà insuffisant est désormais hors d’usage dans le département le plus jeune de France. En raison du manque de classes et d’enseignants, la plupart des élèves n’ont cours que par rotation et sur des demi-journées.
Mayotte manquait d’écoles bien avant le cyclone. Il ne suffit pas de réparer les dégâts causés par celui-ci : il faut faire un peu plus. Le présent amendement vise non pas à rattraper le retard, mais seulement à améliorer le taux de scolarisation antérieur au passage du cyclone.