M. Daniel Fargeot. Bien sûr !

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Madame Corbière Naminzo, je ne tiens pas à avoir un débat désagréable avec vous, cela n’aurait aucun sens. C’est vous qui avez introduit le débat sur les victimes, ce n’est pas moi ! Pardon de vous le dire, mais c’est vous qui introduisez un doute !

Si, par malheur, il y avait eu des centaines de victimes, je vous assure que je le dirais ! Nous constaterions la catastrophe… Nous avons d’ailleurs organisé une journée de deuil national.

Durant les premières heures après le passage du cyclone, le silence qui régnait sur l’archipel nous a fait redouter un nombre beaucoup plus important de victimes. Si cela avait été le cas, pourquoi l’État l’aurait-il tu ? Parce qu’il se serait agi de personnes en situation irrégulière ?

Quelque 5 739 personnes ont été prises en charge à l’Escrim (Élément de sécurité civile rapide d’intervention médicale), l’hôpital militaire. Je m’y suis rendu et j’ai vu les gens malades et ceux qui devaient subir une opération après avoir eu un membre déchiré par une tôle. Pensez-vous que quelqu’un a regardé leur titre d’identité ?

Dans une démarche d’« aller vers », quelque 15 000 soins ont été prodigués. Pensez-vous qu’une seule personne a dû montrer ses titres d’identité ? Lorsque l’on vaccine contre la typhoïde ou le choléra, pensez-vous que la moindre personne regarde les titres d’identité des personnes vaccinées ? (Mmes Antoinette Guhl, Raymonde Poncet Monge et Émilienne Poumirol protestent.)

Lorsque les professeurs ont accueilli les élèves à la rentrée scolaire, pensez-vous que quelqu’un a regardé leurs titres d’identité ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Dans son action, l’État porte un regard attentif et humain sur la situation. Cela nous est d’ailleurs reproché sur place par des élus de toutes les couleurs politiques !

Pour faire face à la désespérance des Mahorais, nous ne pouvons faire fi de la question des migrants. Si nous n’apportons pas des réponses concrètes, à la fois sur les constructions en tôle et sur l’immigration, nous n’atteindrons pas nos objectifs.

Lorsque nous avons présenté la version initiale de la loi, qui ne comportait pas de mesure sur l’immigration – ce n’était pas le but –, on nous a reproché l’absence de mesures sur la question des bidonvilles. Le débat a fait que nous en avons introduit, car c’est une réalité à Mayotte !

La réalité étant difficile, nous essayons de la prendre par différents bouts, sans idéologie et sans faire preuve de je ne sais quelle préférence nationale, parce que nous devons une réponse à nos compatriotes mahorais, qui vivent une situation extrêmement difficile ! Que vous le vouliez ou non, 100 000 étrangers se trouvent sur ce territoire, dont une grande partie est en situation irrégulière. Comment ne pas reconnaître que c’est un problème majeur ?

Il y a incontestablement des questions à régler avec les Comores, comme certains d’entre vous l’ont pointé. Mais les Mahorais demandent des réponses, car ils éprouvent un sentiment d’impuissance à l’égard de l’action de l’État sur ces sujets. Nous commençons à apporter des réponses ; elles sont difficiles, mais il nous faudra continuer de les donner.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13, 53 et 107 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 81, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

d’une autorisation d’urbanisme

par les mots :

d’un justificatif de domicile

La parole est à M. le ministre d’État.

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Pour les réparations de faible envergure, la commission souhaitait remplacer la mention du justificatif de domicile par celle du récépissé de dépôt d’une déclaration de travaux.

En effet, le premier de ces deux documents ne semble pas tout à fait pertinent, quand on sait que les adresses ne sont pas toutes fixées et que de nombreuses fraudes sont constatées à ce titre. Cela étant, mon objectif n’est bien sûr pas de restreindre excessivement la vente de tôle.

J’ai bien entendu M. le ministre d’État sur ce sujet et, s’agissant de cet amendement, je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre d’État, j’ai pris part aux auditions organisées par la commission des affaires sociales et je m’interroge : êtes-vous certain que, après une telle catastrophe, l’on puisse produire facilement des justificatifs de domicile ? (M. le ministre dÉtat et Mme la présidente de la commission des affaires économiques acquiescent.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Il y a quelques instants, je citais un responsable qui s’est rendu plusieurs fois à Mayotte avant le cyclone et dont le témoignage, de ce fait, a une valeur particulière. Il y a bien un avant et un après ! C’est d’ailleurs tout le sens du travail de réparation.

En l’occurrence, on s’inquiète de la légalité de telle ou telle procédure ; mais le problème, c’est que les Mahorais sont très souvent condamnés à l’illégalité, même quand ils sont Français, par rapport à leurs concitoyens ultramarins et, plus encore, aux Français de l’Hexagone.

Ainsi, que l’on élève seul ses enfants ou que ces derniers soient privés de l’aide de leurs deux parents, l’allocation de soutien familial (ASF) n’est pas servie à Mayotte, alors qu’elle l’est partout ailleurs en France, en outre-mer comme dans l’Hexagone.

Il en est de même pour la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje). Prime à la naissance : non servie à Mayotte ; prime à l’adoption : non servie à Mayotte ; allocation de base au taux plein : non servie à Mayotte ; prestation partagée d’éducation de l’enfant : non servie à Mayotte !

Je poursuis la liste. Revenu de solidarité (RSO) : non servi à Mayotte ; prime de déménagement : non servie à Mayotte ; aide personnalisée au logement (APL) : non servie à Mayotte !

Mon but ici n’est pas de polémiquer, mais de rétablir la vérité des faits. Comme j’ai pu l’entendre, il ne s’agit pas seulement de reconstruire, mais de construire à Mayotte. Nous devons, plus largement, assumer un véritable passif.

Les Français mahorais sont victimes d’une injustice : ne jouons pas sur les mots en nous abritant derrière les questions d’immigration. Par rapport à l’Hexagone ou aux autres territoires ultramarins, Mayotte est en dehors du droit commun.

Il n’est a priori pas nécessaire d’être de gauche pour prôner la justice… Tous nos concitoyens doivent bénéficier du droit commun, quel que soit le département où ils habitent.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Mais il s’agit d’un projet de loi d’urgence !

M. Pascal Savoldelli. Je tenais à rappeler que les Mahorais sont privés de bon nombre de droits.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 81.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis, modifié.

(Larticle 4 bis est adopté.)

Chapitre III

Adapter les procédures d’urbanisme et d’aménagement aux enjeux de la reconstruction à Mayotte

Article 4 bis
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Article 6

Article 5

Le présent chapitre s’applique à la reconstruction ou à la réfection, à l’identique ou avec des adaptations ou des modifications, des constructions, des aménagements et des installations, notamment les infrastructures agricoles et les ouvrages des réseaux publics de distribution et de transport d’électricité, dégradés ou détruits à Mayotte en raison des événements météorologiques survenus pendant une période de cinq mois à compter du 13 décembre 2024. Il s’applique également, dans les mêmes conditions, aux constructions, aux installations et aux aménagements nouveaux nécessaires au fonctionnement des réseaux de télécommunications. Il ne s’applique pas aux locaux et installations constituant un habitat informel, au sens de l’article 1er-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement.

Il s’applique aux déclarations prévues par le I de l’article 7 de la présente loi et aux demandes d’autorisation d’urbanisme faites dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.

M. le président. L’amendement n° 5, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

dès lors que leurs occupants justifient d’une pièce d’identité française ou d’un titre séjour valide délivré par les autorités préfectorales

La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Je considère cet amendement comme satisfait par l’adoption de l’article 4 bis. Aussi, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 5 est retiré.

L’amendement n° 14, présenté par Mme Guhl, MM. Mellouli, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 1, dernière phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, et s’exerce dans le respect de la réglementation des risques naturels mentionnée à l’article L. 132-3 du code de la construction et de l’habitation et à l’article L. 563-1 du code de l’environnement

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à rétablir l’application de la réglementation relative aux risques paracycloniques pour la reconstruction des bâtiments de Mayotte.

Mes chers collègues, vous me répondrez sûrement : comment a-t-on pu oublier une telle disposition ? Mayotte vient d’être frappée par un énorme cyclone, et le présent texte dispense ce territoire de la réglementation prévue à cet égard.

J’en suis réellement stupéfaite. Une telle réglementation est indispensable, faute de quoi Mayotte risque fort de se retrouver tôt ou tard dans la même situation qu’aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Ma chère collègue, votre demande est pleinement satisfaite par le droit existant : les adaptations prévues aux articles 5 à 9 ne visent que les procédures d’urbanisme. Elles ne dispensent en rien de respecter les règles de construction, notamment en matière de sécurité.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 14.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 15, présenté par Mme Guhl, MM. Mellouli, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les projets d’ouvrages mentionnés au premier alinéa du présent article comportent le raccordement en eau potable et au réseau d’assainissement des bâtiments ainsi qu’à la réfection et à la modernisation de ces équipements.

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à assurer la prise en compte de l’accès à l’eau potable, ainsi que du raccordement à l’eau potable et aux réseaux d’assainissement, pour la reconstruction de Mayotte.

L’accès à l’eau potable est un droit humain fondamental et inaliénable. L’État se doit de le garantir à tous nos concitoyens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Ma chère collègue, les articles 5 et suivants ont pour objet de faciliter la reconstruction et la réfection des constructions, aménagements et installations mis à mal par le cyclone Chido. Il ne s’agit pas de modifier les procédures applicables aux constructions nouvelles ou à la réfection des équipements de manière générale.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.

Mme Antoinette Guhl. L’enjeu, c’est de sortir Mayotte du sous-développement – je pèse mes mots –, qu’il s’agisse d’éducation, de logement ou, bien sûr, de santé. Il faut donc assurer également l’accès à l’eau. Voilà pourquoi il faut modifier les règles en vigueur ! C’est l’évidence même.

Qui tolérerait ici qu’une ville de l’Hexagone ne soit pas raccordée à l’eau potable ? Personne. Pourquoi en irait-il autrement à Mayotte ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 5.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5
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Article 6 bis A

Article 6

I. – Par dérogation à l’article L. 111-15 du code de l’urbanisme, la reconstruction ou la réfection, à l’identique ou avec les adaptations ou les modifications prévues au présent article, des constructions, des aménagements et des installations dégradés ou détruits mentionnés à l’article 5 de la présente loi est autorisée, nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, y compris si la carte communale ou le plan local d’urbanisme en dispose autrement.

La dérogation prévue au premier alinéa du présent article est subordonnée, pour les constructions achevées après le 1er janvier 2013, au fait que la construction ait fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme. Elle ne s’applique pas aux bâtiments faisant l’objet d’un arrêté pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation, sauf si les travaux projetés permettent de remédier à la situation ayant entraîné la prise dudit arrêté.

II. – Les travaux nécessaires à la reconstruction des constructions ou des installations peuvent comporter des adaptations de la construction ou de l’installation initiale, dans la limite d’une diminution ou d’une augmentation de 5 % de son gabarit initial.

Lorsqu’elle est justifiée par un objectif d’intérêt général, notamment l’amélioration de la sécurité de la construction ou de l’installation, l’installation ou l’exercice d’une mission de service public ou la création de logements, cette diminution ou cette augmentation peut excéder 5 % du gabarit initial, à proportion des modifications de la construction nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués pour la justifier, sans toutefois pouvoir excéder 20 % du gabarit initial.

Ces adaptations et ces modifications ne peuvent avoir pour effet de modifier la destination ou la sous-destination initiale de la construction, excepté lorsque le changement de destination vise à créer des logements dans les secteurs où les règles d’urbanisme autorisent une telle destination.

III. – Le droit à reconstruction ou à réfection prévu au I, que cette reconstruction ou cette réfection comporte ou non des modifications de la construction ou de l’installation initiale, s’exerce dans la limite des règles applicables en matière de risques naturels, technologiques ou miniers, auxquelles la reconstruction ou la réfection ne peut contrevenir, et, le cas échéant, sous réserve des prescriptions de sécurité, d’accessibilité ou de salubrité publique dont l’autorité compétente peut assortir le permis.

Ce permis ne peut être accordé si le projet est de nature à porter atteinte à la salubrité et à la sécurité publique, sans qu’il soit possible d’assortir l’autorisation de prescriptions spéciales permettant de les garantir.

M. le président. L’amendement n° 166, présenté par Mme Jacques, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable

II. – Alinéa 3

1° Après le mot :

reconstruction

insérer les mots :

ou à la réfection

2° Après le mot :

adaptations

insérer les mots :

ou des modifications

III. – Alinéa 6

Remplacer les mots :

le permis

par les mots :

l’autorisation d’urbanisme ou la décision de non-opposition à déclaration préalable

IV. – Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 166.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 104 rectifié bis, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, M. Roiron, Mme Bélim, MM. Kanner et Fagnen, Mme Féret, M. Jacquin, Mme Narassiguin, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Redon-Sarrazy, Ros, Tissot, Bouad, Cardon, Pla, Mérillou, Michau, Montaugé, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer le taux :

5 %

par le taux :

20 %

II. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Saïd Omar Oili.

M. Saïd Omar Oili. À titre dérogatoire, les constructions doivent pouvoir être adaptées à Mayotte dans la limite d’une augmentation de 20 % de leur gabarit initial. Nous pourrons ainsi faire face aux besoins de logement constatés sur l’île.

Mes chers collègues, les bâtiments construits initialement sans permis, qui, vous le savez, sont très nombreux dans notre territoire, feront l’objet de mesures spécifiques. Je tenais à apporter cette précision.

Il s’agit donc selon moi d’un amendement de bon sens.

M. le président. L’amendement n° 31 rectifié bis, présenté par MM. Piednoir, Paccaud, Brisson et Bacci, Mmes Belrhiti et Richer, MM. Mandelli, Bouchet et Henno, Mme Dumont, M. Savin, Mmes Lassarade, Borchio Fontimp, L. Darcos, Joseph, Guidez et Evren, M. Panunzi, Mmes Perrot, Josende, Imbert et F. Gerbaud, MM. Klinger, Belin et H. Leroy, Mme Ventalon, M. Milon, Mme de La Provôté et M. Somon, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les travaux liés à la reconstruction répondent aux objectifs de lutte contre les effets du dérèglement climatique et suivent des standards de construction adaptés à la situation mahoraise par la conception de la construction et le choix des matériaux. L’amélioration de la performance énergétique, de l’accessibilité ou de la sécurité de la construction ou de l’installation, peut excéder par une diminution ou une augmentation de 5 % du gabarit initial, sans toutefois pouvoir excéder 20 % du gabarit initial.

La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Nous en sommes tous conscients, il est urgent de reconstruire les bâtiments détruits à Mayotte ; c’est l’enjeu même du présent texte. Il n’en faut pas moins faire preuve de vigilance, car il convient d’assurer la durabilité des édifices.

En ce sens, nous entendons promouvoir les matériaux écologiques et énergétiquement performants face aux conditions climatiques et météorologiques de l’île, qui ont été rappelées par de précédents orateurs. Sans prévoir de mesure contraignante, nous tenons à insister sur cet enjeu essentiel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Monsieur Omar Oili, l’article 6 garantit le droit à la reconstruction à l’identique, ou presque, pour les bâtiments qui ne sont pas conformes aux règles d’urbanisme en vigueur et qui ne peuvent être transformés en ce sens.

En permettant une modification de gabarit de 5 % sans aucune justification, un taux porté à 20 % sous certaines conditions, cet article est déjà bien plus permissif que le droit en vigueur.

Il ne me semble pas opportun d’étendre davantage les possibilités de modification : procéder ainsi reviendrait à dénier toute valeur aux règles d’urbanisme en vigueur, alors même que les intercommunalités mahoraises sont presque toutes engagées dans l’élaboration de plans locaux d’urbanisme (PLU).

La commission est donc défavorable à l’amendement n° 104 rectifié bis.

Monsieur Piednoir, je comprends bien l’objet de votre amendement…

M. Stéphane Piednoir. Alors, votons-le !

Mme Micheline Jacques, rapporteur. … et je soutiendrai naturellement, à long terme, l’application à Mayotte de standards de construction adaptés aux caractéristiques locales.

Comme vous le soulignez, il s’agit aussi d’un moyen de lutter, dans ce territoire, contre les effets du dérèglement climatique. J’observe d’ailleurs une nouvelle fois que les bâtiments construits en briques, selon les techniques traditionnelles, ont très bien résisté au cyclone.

Toutefois, les standards que vous évoquez n’existent pas pour l’instant, en tout cas pas dans les textes normatifs. Les dispositions de votre amendement sont donc inapplicables.

En outre, nous parlons de reconstruction d’urgence : nombre de Mahorais restent sans toit au-dessus de leur tête. Ils doivent pouvoir faire vite, sans pour autant faire mal, et avec ce qu’ils ont – je rappelle que, sur l’île, l’accès aux matériaux de construction est particulièrement difficile.

Toute mesure susceptible d’entraver ces chantiers urgents doit pour l’instant être évitée. La commission émet donc, malheureusement, un avis défavorable sur l’amendement n° 31 rectifié bis également.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre dÉtat. Mêmes avis défavorables.

M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.

M. Saïd Omar Oili. On parle de reconstruire à l’identique. Mais de quoi s’agit-il ? Dans notre territoire, la reconstruction à l’identique reste somme toute théorique…

J’ai longtemps été maire et président d’intercommunalité à Mayotte : nombre de particuliers déposent un permis de construire pour une maisonnette de deux pièces, qu’ils agrandissent bientôt en toute discrétion pour en faire une maison de cinq pièces. Quelle base faut-il retenir pour mener cette « reconstruction à l’identique » : le permis de construire déposé ou la maison réellement bâtie ?

Certains édifices n’ont plus de toit ; d’autres sont entièrement détruits… Dans le cas que je citais, si l’on ne retient que deux pièces, que fera-t-on des extensions ? Personne ne comprendra de telles mesures. On criera même à l’injustice.

J’y insiste : si nous ne tenons pas compte de la culture mahoraise, nous allons droit aux difficultés. C’est précisément pourquoi je maintiens mon amendement.

Si nous maintenons ce taux à 5 %, nous constaterons dans un an que les conditions de vie des Mahorais n’ont en rien été améliorées.

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Mon cher collègue, ce sujet mérite à l’évidence quelques précisions supplémentaires.

Certains bâtiments de Mayotte sont construits en dur : ils ont perdu leur toit, mais – j’ai pu le constater sur place – leurs murs, eux, ont tenu. Il suffit d’en reconstruire la toiture, évidemment de manière plus solide, pour qu’ils puissent résister à un autre événement cyclonique.

À l’inverse, d’autres bâtiments ont été rasés : ils devront faire l’objet d’une autorisation d’urbanisme pour être reconstruits.

Il faut bien faire la distinction entre les réparations mineures, qui peuvent être vite effectuées, et la reconstruction intégrale de bâtiments effondrés. Il va sans dire que l’on ne laissera pas qui que ce soit reconstruire n’importe comment.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 104 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 31 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 16, présenté par Mme Guhl, MM. Mellouli, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Ce droit à la reconstruction et réfection s’exerce dans le cadre de la protection des sites classés et ne peut s’exercer dès lors que le terrain est situé dans le périmètre des sites et paysages remarquables, au sens de l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme, de zones humides, au sens de l’article R. 211-108 du code de l’environnement, ou de zones naturelles, agricoles ou forestières au sens de l’article L. 151-11 du code de l’urbanisme.

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à prendre en compte la biodiversité et le patrimoine naturel pour l’ensemble des travaux de reconstruction de l’île.

Les espaces naturels et agricoles de Mayotte représentent près de 90 % de la superficie de l’archipel. Or les projets de reconstruction risquent d’y être menés au détriment des milieux naturels protégés. Ces derniers doivent faire l’objet d’une vigilance toute particulière.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. L’article 6 part du principe suivant : il faut autoriser la reconstruction même si le bâtiment considéré ne respecte pas les règles d’urbanisme en vigueur, y compris s’il se trouve dans des zones devenues inconstructibles. On peut penser, notamment, à certaines zones naturelles, agricoles ou forestières.

C’est tout l’intérêt d’une telle dérogation. Les seules restrictions prévues ont trait aux règles relatives à la gestion des risques.

Ma chère collègue, vous avez beaucoup insisté sur le rôle des maires et, plus largement, des élus locaux : ces derniers sont à l’évidence les mieux à même de déterminer ce qui peut être fait en pratique. Il convient de leur laisser la main. On ne saurait prendre de telles décisions à 8 000 kilomètres de distance. Les élus locaux de Mayotte sont pleinement à même de déterminer où les reconstructions doivent être autorisées.

La commission émet, en conséquence, un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?