M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Etienne, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au a) du III de l'article 220 sexies du code général des impôts, les mots : « sous forme d'avances à valoir sur les recettes d'exploitation des œuvres » sont supprimés.
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis. Les rémunérations des auteurs d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelles peuvent prendre des formes très diverses : il peut s’agir d’avances sur recettes, qui sont éligibles pour le calcul du crédit d’impôt, mais également de rémunérations forfaitaires, de prime d’inédit ou de prime d’exclusivité, lesquelles ne sont pas éligibles au dispositif de crédit d’impôt.
Il est donc proposé, au travers de cet amendement, de viser les rémunérations des auteurs au sens large, et non exclusivement celles qui prennent la forme d’avances à valoir sur les recettes d’exploitation des œuvres.
En effet, dans la pratique, les auteurs sont de plus en plus rétribués sous la forme d’avances à valoir sur les recettes d’exploitation des œuvres, ce qui vient introduire un biais considérable dans les rapports entre les auteurs et les producteurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cher collègue, sauf erreur de ma part, cet amendement a déjà été proposé par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication lors de l’examen du troisième projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Nous nous en étions remis à la sagesse du Sénat. Je réitère cette position, en rappelant que l’assouplissement sollicité n’a qu’un impact en trésorerie et n’accroît pas le coût global du crédit d’impôt.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je suis un peu dubitatif, parce qu’il s’agit de l’extension d’un crédit d’impôt dont on modifierait l’assiette, si je comprends bien.
M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis. Oui, c’est bien cela.
M. Éric Woerth, ministre. Je considère que l’assiette peut d’ailleurs être plus importante. Je ne sais pas si ce changement n’a aucun impact sur le plan financier. Un tel changement peut en avoir un. Mais tout cela est relativement peu important, puisque cette disposition semble être adaptée à la manière dont les auteurs sont rémunérés aujourd’hui.
À l’instar de M. le rapporteur général, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur le ministre, levez-vous le gage ?
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 31 rectifié, présenté par M. Etienne, au nom de la commission de la culture, et qui est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au a) du III de l'article 220 sexies du code général des impôts, les mots : « sous forme d'avances à valoir sur les recettes d'exploitation des œuvres » sont supprimés.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8.
L'amendement n° 32 rectifié, présenté par M. Etienne, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le e quater du 1 de l'article 238 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« e quater) Des éditeurs de services de communication audiovisuelle au sens de l'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et affectés au financement de programmes éducatifs et culturels au sens de l'article 28 de la loi précitée. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis. Le présent amendement vise à élargir à l'ensemble des chaînes la disposition relative au renforcement du mécénat en faveur des sociétés nationales de programmes que le Sénat avait adoptée dans la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de télévision.
L'édifice juridique est en effet assez fragile du fait d'une distorsion de concurrence entre les chaînes publiques et privées au regard du droit européen et il paraît urgent de le consolider afin de permettre à France Télévisions de bénéficier davantage du mécénat.
L’amendement proposé a en outre pour grand intérêt d'inciter les grandes chaînes privées à investir davantage dans les programmes culturels – c’est ce qui a été débattu et largement soutenu à la commission de la culture – et de ne pas laisser France Télévisions être le seul responsable de la diffusion de ce type de programmes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce sujet est un peu complexe. L’amendement vise à étendre le dispositif du mécénat des programmes culturels audiovisuels, qui avait été prévu pour les sociétés nationales de programmes, à l’ensemble des chaînes privées.
Il faut rappeler que ce régime est récent, puisqu’il a été créé par la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de télévision.
Il permet aux entreprises de bénéficier d’une réduction d’impôt égale à 60 % des montants versés pour financer les programmes audiovisuels culturels des « sociétés nationales de programmes » : France Télévisions, Radio France, France 24, TV5 Monde et RFI.
À mon avis, le Gouvernement va avoir un problème juridique assez délicat à résoudre. En effet, il existe une ambiguïté sur la conformité au droit communautaire du dispositif du mécénat des émissions culturelles des sociétés nationales de programmes.
Le domaine de l’audiovisuel étant très concurrentiel, cette nouvelle mesure de mécénat pourrait être qualifiée d’aide d’État sélective si elle introduit une distorsion de concurrence non justifiée, notamment entre France Télévisions et les chaînes privées.
Ce risque empêche la mise en œuvre effective du dispositif, privant ainsi France Télévisions, qui n’a plus de publicité, d’un financement utile, alors que ses contraintes de programmation culturelle sont importantes et que son déficit peine à se résorber dans le cadre du nouveau modèle économique.
France Télévisions a déposé une demande de rescrit fiscal le 10 juin 2009 afin de lever toute incertitude sur la nouvelle disposition, demande restée pour le moment sans réponse.
La solution proposée par la commission de la culture face à cette insécurité juridique consiste à supprimer l’éventuelle distorsion de concurrence en étendant le dispositif à l’ensemble des chaînes privées.
Avant même de proposer l’extension du dispositif, dont le coût se situerait entre deux et trois millions d’euros s’agissant d’Arte, et à un million d’euros pour les chaînes privées, je souhaiterais vous interroger, monsieur le ministre, sur la position du Gouvernement vis-à-vis de Bruxelles.
La mesure relative au mécénat audiovisuelle a-t-elle bien été notifiée à la Commission européenne ?
Est-il possible qu’elle soit jugée compatible, dans la mesure où elle compense une contrainte financière particulière, à savoir celle de la suppression de la publicité ?
Le mérite de l’amendement présenté par M. Etienne serait en effet de vous permettre de répondre à ces questions, afin que nous soyons capables de comprendre dans quelle situation nous nous trouvons et que France Télévisions dispose d’un peu plus de visibilité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je ne suis pas du tout en mesure de répondre aux questions que vous avez posées sur France Télévisions et l’aide d’État, monsieur le rapporteur général. Je veillerai à vous fournir les renseignements nécessaires, mais, pour l’heure, je ne sais pas où en est le rescrit, ni s’il s’agit ou non d’une aide d’État. Je n’ai aucun élément à vous communiquer sur le sujet.
En tout cas, s’agissant de l’amendement lui-même, le Gouvernement émet un avis défavorable.
En effet, à l’origine, le mécénat a été admis pour France Télévisions dans le cadre de la suppression de la publicité, et constitue donc une ressource supplémentaire possible pour le groupe. En revanche, la question ne se pose pas pour les chaînes privées, qui disposent de leurs propres sources de financement. La mesure prévue dans cet amendement constituerait donc une extension abusive du régime du mécénat aux sociétés privées.
S’agissant de la télévision publique, le sujet est en cours de discussion à Bruxelles, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le groupe France Télévisions n’a pas encore reçu de réponse quant à sa demande de rescrit.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8.
L’amendement n° 91, présenté par MM. Arthuis, C. Gaudin et Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le III de l'article 244 quater B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, les mots : «, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables » sont supprimés ;
2° La dernière phrase est supprimée.
II. - Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - Les I et II s'appliquent aux crédits d'impôt calculés au titre des dépenses de recherche exposées à compter du 1er janvier 2010.
IV. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'inclusion des dépenses de recherche soutenues par des avances remboursables dans l'assiette du crédit d'impôt recherche est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dois vous avouer que j’ai beaucoup hésité avant de déposer cet amendement avec mes collègues Christian Gaudin et Philippe Adnot. Cette mesure crée, en effet, un prélèvement sur le budget de l’État que l’on peut chiffrer à 75 millions d’euros. Toutefois, à terme, son impact budgétaire est absolument neutre.
Il s’agit d’inclure dans l’assiette du crédit d’impôt recherche les avances d’OSEO dont bénéficient les entreprises, généralement des PME et souvent des jeunes entreprises innovantes, comme c’était le cas jusqu’à la loi de finances pour 2008. Nous avions modifié le dispositif existant, au travers de l’article 69 de cette loi de finances, sur les recommandations pressantes de la Cour des comptes. Auparavant, les avances étaient comprises dans l’assiette des dépenses prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt recherche. Or la Cour des comptes avait relevé que l’Agence nationale de valorisation de la recherche, l’ANVAR, rencontrait des difficultés pour assurer le suivi des avances et qu’il existait un risque de mauvaise utilisation des fonds publics.
Le législateur ayant tiré les conséquences de ces constatations, l’avance a donc été soustraite de l’assiette du crédit d’impôt recherche. Autrement dit, lorsque son projet aboutissait, l’entreprise restituait le montant de l’avance qui était, dès lors, pris en compte dans le calcul du crédit d’impôt recherche. Lorsque la recherche échouait, en revanche, l’entreprise conservait l’avance et ne pouvait prétendre au bénéfice du crédit d’impôt recherche sur le montant de cette avance.
Afin de stimuler la recherche et de privilégier l’innovation en donnant un surcroît d’oxygène à ces entreprises, qui sont généralement des PME et de jeunes entreprises innovantes, nous proposons que cette avance – qui n’est pas une subvention puisqu’elle n’apparaît pas dans les fonds propres de l’entreprise, mais une dette ! – soit neutre, et que le crédit d’impôt recherche soit calculé sur le montant effectif du projet. Si la recherche aboutit, l’entreprise rembourse l’avance ; dans ce cas, l’assiette a été judicieusement calculée pour établir le montant du crédit d’impôt recherche. En revanche, si le projet échoue, l’entreprise conserve l’avance et doit rembourser le crédit d’impôt recherche qu’elle a perçu, pour un montant sans doute supérieur à l’avance consentie.
Il s’agit donc de donner un nouveau souffle à l’effort de recherche fourni par de nombreuses petites entreprises, en particulier de jeunes entreprises innovantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette proposition est tout à fait judicieuse, car les jeunes entreprises innovantes bénéficiaires d’avances remboursables d’OSEO sont les plus pénalisées par l’exclusion de leurs dépenses de recherche de l’assiette de leur crédit d’impôt recherche. La Cour des comptes avait toutefois considéré que l’intégration des avances remboursables dans l’assiette du crédit d’impôt recherche revenait à accorder une aide sur une aide ; ce point de vue a également sa logique.
Il me semble donc indispensable, face à cette contradiction, de connaître la position du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je rappelle que le crédit d’impôt recherche est déjà coûteux : 4 milliards d’euros ! Quant au régime proposé, qui consiste à revenir au mode de calcul antérieur, il avait été critiqué en son temps par la Cour des comptes, qui avait relevé un certain nombre de dérives. Certaines sociétés, par exemple, ne remboursaient jamais l’avance. C’est pourquoi il a été décidé, ensuite, que l’on pouvait bénéficier du dispositif du crédit d’impôt recherche au moment du remboursement et non lors du versement de l’avance remboursable.
J’ignore si le dispositif existant pose de réels problèmes de trésorerie aux entreprises ; elles touchent tout de même bien, à un moment donné, cette avance. Je rappelle en effet qu’il ne s’agit pas d’un décaissement, qui intervient au moment du remboursement.
J’ajoute que, dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement a fait un pas en avant : il a accordé une aide de trésorerie aux entreprises en proposant que le crédit d’impôt recherche soit immédiatement remboursable.
Je ne dispose pas du chiffrage de cette proposition, mais elle ne me semble pas souhaitable. Je suppose qu’elle doit avoir un certain coût à un moment donné, dans la mesure où il s’agit d’une anticipation. Quoi qu’il en soit, la Cour des comptes a estimé qu’un tel dispositif pouvait donner lieu à des abus, certaines entreprises bénéficiant d’un crédit d’impôt recherche et ne remboursant jamais l’avance. Par ailleurs, dans le cas du plan de relance, les problèmes de trésorerie sont réglés par le dispositif même du crédit d’impôt recherche.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable, même si nous pouvons débattre des modalités de calcul de ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Je tiens à remercier le président de la commission des finances d’avoir surmonté ses hésitations et d’avoir accepté de déposer cet amendement avec Christian Gaudin et moi-même.
Il n’est pas seulement question ici d’une dépense, mais des résultats que celle-ci peut produire. On peut d’ailleurs observer qu’il existe des dépenses de même montant qui sont loin d’entraîner des effets équivalents.
Certes, la disposition que nous proposons augmentera de 75 millions d’euros les dépenses liées au crédit d’impôt recherche, qui coûte déjà 4 milliards d’euros. Mais l’enjeu est de taille : il s’agit d’aider les petites entreprises innovantes à franchir un cap décisif. Ces 75 millions sont sûrement plus productifs en termes d’emplois qu’une bonne partie du crédit d’impôt recherche !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Toujours plus !
M. Philippe Adnot. Lorsque nous avons modifié les règles du crédit d’impôt recherche, nous avons tous constaté un extraordinaire avantage compétitif pour les très grandes entreprises, puisqu’il y a eu déplafonnement et une importante consommation de crédits.
Si nous nous soucions vraiment de l’avenir, de ce qui va permettre à un certain nombre d’entreprises de provoquer le développement d’autres entreprises ou de se développer elles-mêmes, ces 75 millions d’euros sont essentiels, en termes de production de richesses. Nous ne devons donc pas considérer seulement la dépense que cette proposition induit.
Je me réjouis donc du dépôt de cet amendement, que j’avais déjà proposé, car il est fondamental dans le cadre du grand emprunt et permettra le développement d’entreprises.
J’aurai l’occasion de le redire, en présentant un autre amendement, rien ne serait plus grave que d’initier des recherches, de lancer et de valoriser des projets d’entreprises, puis d’être incapables d’accompagner leur développement parce que l’on aurait rejeté ce type de mesure.
Vous devez soutenir cet amendement, mes chers collègues, car il est porteur de croissance et d’avenir.
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, pour explication de vote.
M. Christian Gaudin. Nous avons beaucoup parlé d’excellence et des moyens de l’atteindre au cours de cette séance, notamment lors de l’examen de l’article 4. Il en est également question ici, puisque cet amendement tend à favoriser les petites et moyennes entreprises innovantes, celles qui bénéficient de l’avance remboursable d’OSEO et qui sont susceptibles de bénéficier du crédit d’impôt recherche.
Actuellement chargé d’une mission d’évaluation du crédit d’impôt recherche, je constate que les PME profitent d’une façon assez marginale de l’enveloppe de 4 milliards d’euros consacrés à ce dispositif. L’intégration de l’avance remboursable d’OSEO dans l’assiette du crédit d’impôt recherche nous permettra de faciliter l’accès des petites entreprises à ce dispositif.
Nous avons auditionné les représentants d’OSEO ; ils nous ont confirmé que cet organisme était tout à fait en mesure, désormais, d’assurer le suivi des avances accordées aux entreprises, notamment celles dont le projet a échoué afin qu’elles n’intègrent pas le montant de ladite avance dans le crédit d’impôt recherche. Il serait vraiment dommage de ne pas saisir cette occasion de favoriser l’accès des PME au crédit d’impôt recherche !
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Je rappelle, tout d’abord, que les critiques de la Cour des comptes s’appuyaient sur le constat d’une gestion calamiteuse des avances. L’ANVAR était en effet incapable d’assurer le suivi des opérations. Aujourd’hui, tout est en rentré dans l’ordre ; ces critiques n’ont donc plus d’objet.
Ensuite, l’enveloppe du crédit d’impôt recherche, qui représente en effet environ 4 milliards d’euros, bénéficie pour l’essentiel aux très grandes entreprises.
Notre collègue Christian Gaudin accomplit actuellement des diligences afin d’évaluer les résultats de ce dispositif. J’émets l’hypothèse, pour ma part, que certaines grandes entreprises, qui en ont bénéficié, ont largement externalisé leurs travaux de recherche, notamment dans des pays d’Europe centrale. J’aimerais avoir l’assurance que les dépenses prises en compte correspondent bien à des travaux menés en France. À l’inverse, les jeunes entreprises innovantes et les PME que nous souhaitons soutenir conduisent essentiellement leurs travaux sur le territoire national et participent au renforcement du potentiel économique de notre pays.
Enfin, l’avance d’OSEO est un prêt, qui ne se transforme en subvention que si le projet échoue.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons voulu déposer cet amendement. J’ajoute qu’au terme du délai de sept années prévu pour la restitution des avances lorsque le projet a abouti, l’opération est parfaitement neutre pour les finances de l’État.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je suis quelque peu surpris, pour ne pas dire plus. Au royaume de la subvention, la créativité est infinie ! On nous propose un crédit d’impôt sur une avance sans intérêt consentie par l’État. À un moment donné, il faut arrêter !
Le crédit d’impôt recherche est un dispositif très puissant, puisque les dépenses éligibles ont été multipliées. Je sais bien que l’on peut toujours aller plus loin. Le déficit n’est jamais que de 149 milliards d’euros !
Je ne comprends pas votre raisonnement. OSEO accorde une avance, sans intérêt. L’entreprise n’effectue donc un décaissement et ne supporte une charge qu’au moment où elle rembourse cette avance. Si l’on opte pour votre solution, l’entreprise qui ne rembourse jamais ou qui cesse ses activités pour une raison quelconque aura tout de même bénéficié du crédit d’impôt recherche. Ce n’est pas normal ! Je ne peux pas être favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Hier soir, lorsque nous avons présenté un amendement concernant le crédit d’impôt recherche, il nous a été opposé que ce n’était pas le moment et qu’on n’allait pas recommencer à « bricoler ». Notre amendement a donc été rejeté.
Le présent débat, finalement identique à celui d’hier soir, quoique plus long en raison de la qualité du premier signataire de l’amendement n° 91, montre qu’il est urgent de faire la clarté sur le crédit d’impôt recherche.
Cette mesure coûte au budget de l’État 4 milliards d'euros, mais, contrairement aux promesses faites, rien ne garantit qu’elle touche sa cible, à savoir les PME innovantes, exportatrices, celles dont manque cruellement notre appareil productif.
M. le rapporteur général a souligné dans son rapport écrit que ce coût est équivalent aux dépenses financées annuellement par l’emprunt sur la période 2010-2014. Le crédit d’impôt recherche était donc peut-être le moteur suffisant pour propulser la recherche, pour autant qu’il atteigne sa cible, je le répète, et cela reste à démontrer.
Ce sujet est systématiquement abordé à chaque discussion d’un projet de loi de finances. Lors de l’examen de la loi de finances initiale, le Sénat a demandé un rapport sur le crédit d’impôt recherche.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous allons l’avoir !
Mme Nicole Bricq. Il est grand temps que nous en disposions, sinon, chaque fois que nous examinerons un texte financier, ce débat resurgira, et à juste titre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Madame Bricq, les lois de finances étant nombreuses, les occasions sont multiples de rouvrir le débat. Quoi qu’il en soit, le dispositif actuel date de 2008.
Mme Nicole Bricq. Non, il a été réformé en 2008, mais il date d’avant !
M. Éric Woerth, ministre. Je parle en l’occurrence du dispositif puissant qui offre un avantage fiscal dégressif pouvant atteindre 50 %. Sur ce dispositif-là, nous n’avons pas beaucoup de recul.
Le Gouvernement a bien l’intention de procéder à une évaluation, dont s’occupe d’ores et déjà M. Christian Gaudin. Comme l’a indiqué M. le président de la commission des finances, il faut vérifier l’absence d’abus, de contournements. Globalement, les entreprises considèrent que le dispositif est positif. Par conséquent, ne nous en privons pas ! Cependant, s’il peut être amélioré, faisons-le, et vérifions qu’il n’est pas source d’abus.
L’amendement n° 91 compliquerait au contraire la situation. Pour l’instant, conservons le crédit d’impôt recherche tel qu’il est. Nous aviserons au moment de son évaluation.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8.
Article 9 (nouveau)
Le I de l’article 1723 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du troisième alinéa, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « douze » ;
2° À la seconde phrase du même alinéa, le mot : « trente-six » est remplacé par le mot : « vingt-quatre » ;
3° Au quatrième alinéa, les mots : « de dix-huit mois en dix-huit mois » sont remplacés par les mots : « de douze mois en douze mois ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
M. le président. L'amendement n° 55 rectifié, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase du 2 du VI de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, la date : « 31 décembre 2010 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2013 ».
II. - Dans la deuxième phrase du VI bis de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, la date : « 31 décembre 2010 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2013 ».
III. - Dans la première phrase du 3ème alinéa du VI ter de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, la date : « 31 décembre 2010 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2013 ».
IV. - La perte de recettes résultant pour l'État des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Quoi que nous en pensions les uns et les autres, le grand emprunt peut être une occasion importante pour le développement de l’activité économique, sous réserve que la recherche, sa valorisation, le financement des jeunes entreprises, bref, toute la chaîne soit assurée d’une manière régulière et continue.
Or la date limite de l’ensemble des instruments financiers d’accompagnement des entreprises est aujourd’hui proche, ce qui est inquiétant. L’amendement n° 55 rectifié a donc pour objet de prolonger la durée des véhicules d’investissement.
Si demain, grâce au grand emprunt, la recherche et différents projets pouvaient être dynamisés mais qu’à la suite des premiers tours de table les financements adéquats n’étaient pas dégagés, les entreprises concernées rechercheraient une valorisation à l’étranger, ce qui est déjà très souvent le cas à l’heure actuelle.
Il s’agit d’assurer la continuité de la chaîne de financement et de prolonger la durée de vie des instruments financiers de capital-risque.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?