C. REVOIR LES MODALITÉS DE LA COUPE PATHOS : UN ACTE NÉCESSAIRE POUR LA SANTÉ FINANCIÈRE DES EHPAD
1. Les modalités de calcul de la coupe PATHOS
La grille PATHOS a été créée en 2001 par le syndicat national de gérontologie clinique et le service médical de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts). Depuis 2007176(*), cette grille est devenue un outil de tarification visant à déterminer le niveau de soins nécessaire à chaque résident d'Ehpad et donc la dotation de cet établissement par le tarif soins. Elle a deux objectifs : garantir le juste niveau de soins à chaque résident et assurer l'efficacité de la dépense publique.
La coupe PATHOS correspond à une photographie à un moment donné des besoins d'une population âgée. Cette coupe est réalisée tous les trois ans lors de la conclusion ou du renouvellement du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens. Elle est préparée par le médecin coordonnateur et confirmée par le médecin valideur de l'ARS. Elle donne des points individuels PATHOS à chaque résident, mais elle évalue également les besoins en soins médicaux de la population de l'établissement via le PATHOS moyen pondéré (PMP).
La grille PATHOS se décompose en trois étages : les états pathologiques, le profil de soins et les postes de ressources. Le premier correspond à un thésaurus de 50 états pathologiques. À partir de celui-ci, le profil de soins est déterminé à partir de 12 profils proposés. Puis, l'algorithme PATHOS va déterminer le niveau de soins requis. Ce dernier point est décomposé en 8 postes de ressources par personne : gériatrie, psychiatrie, actes médico-infirmiers, rééducation, psychologie, biologie, explorations, pharmacie et petit matériel. Tous sont calculés en minutes par semaine à l'exception des trois indicateurs. L'ensemble de ces données est collecté dans le logiciel Galaad de la CNSA.
2. Les limites de la coupe PATHOS : une charge administrative et une médicalisation excessives
a) Une charge administrative paralysante
La coupe PATHOS représente une charge administrative qui peut se révéler paralysante. En effet, elle nécessite la mobilisation de l'ensemble des soignants de l'établissement pour une durée de six mois177(*). Cet engagement implique une démobilisation du personnel sur d'autres tâches.
De plus, la pénurie de médecins coordonnateurs complique la mise en place de ces coupes. Un tiers des Ehpad ne dispose pas d'un médecin coordonnateur178(*). Or, en l'absence de médecin coordonnateur, et si aucun médecin coordonnateur d'un autre établissement n'accepte de pratiquer cette coupe, aucune validation ne peut être effectuée179(*). L'Ehpad ne peut bénéficier des nouvelles modalités de tarification.
La LFSS pour 2024 a toutefois étendu aux infirmiers la possibilité de valider les coupes180(*). D'après les renseignements transmis par la DGCS, des travaux administratifs sont programmés afin de rendre cette mesure opérationnelle, les infirmiers n'ayant actuellement pas accès aux dossiers médicaux.
b) Des biais méthodologiques
En outre, la coupe PATHOS présente des biais méthodologiques majeurs. En premier lieu, elle ne valorise pas l'amélioration de l'état de santé des résidents : toute amélioration conduit à une baisse de la dotation en soins de l'établissement. Ensuite, la coupe PATHOS étant construite uniquement sur les besoins médicaux, elle incite à la médicalisation du profil des patients. Les directeurs d'Ehpad sont incités à garder des profils très médicalisés plutôt que des profils ayant une perte légère d'autonomie. Si les deux profils nécessitent le même temps de prise en charge, le premier permettra à l'établissement d'avoir la dotation afférente.
Enfin, la FFAMCO déplore que les ARS, chargées de former les médecins coordonnateurs à la grille PATHOS, ne dispensent pas les informations nécessaires, conduisant à une sous-évaluation structurelle des coupes181(*).
c) Pour un changement complet de méthode
La coupe PATHOS semble donc être devenue un outil dysfonctionnel de tarification pour les Ehpad. Il est nécessaire d'instaurer un climat de confiance entre les établissements et les autorités de contrôle. Dans un contexte de tension en matière de ressources humaines, le personnel ne peut être mobilisé aussi longtemps sur une tâche administrative.
Face à ce constat, il pourrait être envisagé de transformer la coupe PATHOS en un système déclaratif, soumis à un contrôle a posteriori et hiérarchisé de la part des ARS. À défaut, le processus d'évaluation pourrait être uniquement collectif, en lieu et place de l'évaluation individuelle, comme le propose le think tank Matières grises. À cette condition, il sera possible de réduire le délai entre deux coupes et donc mieux prendre en compte les besoins réels de l'établissement.
En second lieu, le référentiel PATHOS doit être adapté pour intégrer la prévention et les thérapies non-médicamenteuses, mais aussi valoriser l'amélioration de l'état des résidents. L'éventuelle généralisation de la fusion des tarifs soins et dépendance rend cette évolution d'autant plus nécessaire.
Proposition n° 9 : Simplifier les coupes PATHOS en mettant en place un processus annuel d'évaluation collective des besoins en soins des résidents ou en allant vers un processus annuel d'auto-évaluation avec contrôle hiérarchisé ou aléatoire réalisé par les ARS.
* 176 Article 56 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
* 177 Eve Guillaume, La coupe PATHOS en Ehpad : un enjeu stratégique à piloter, 2019.
* 178 Rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales sur l'enquête de la Cour des comptes sur la prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad, 2022.
* 179 CNSA, « Méthode de validation des coupes AGGIR et PATHOS », 2022.
* 180 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 - Article 79.
* 181 Planète grise, « Médecins coordonnateurs, autorités de contrôle, le grand malentendu », 2018.