B. DES DÉTERMINANTS CONNUS
1. L'offre de soins : un investissement rentable et sûr
L'offre de soins représente un investissement rentable. Dans le secteur de l'imagerie, qui exige des investissements technologiques conséquents et réguliers, les valorisations des groupes peuvent atteindre 13 à 15 fois l'excédent brut d'exploitation. Dans le champ de la biologie médicale, le taux de rentabilité a atteint 23 % en 2021 et la valorisation des groupes sur le marché a conduit la Cnam à évoquer un risque de « bulle spéculative ». L'hospitalisation privée présente quant à elle des indicateurs plus contrastés, en dégradation ces dernières années.
Rentabilité moyenne de différents secteurs (EBE / CA) en 2019
Source : commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données de la Cnam
Les restructurations, par la recherche d'un effet « taille critique » et la concentration des plateaux techniques, permettent aux sociétés de réaliser des économies d'échelle et de mieux résister aux baisses tarifaires, qu'absorbent plus difficilement les opérateurs indépendants.
L'offre de soins représente, de plus, un investissement sûr, du fait de l'accroissement continu de la demande en soins et du haut niveau de socialisation de la dépense. Investir dans la santé répond, ainsi, à une logique de diversification des portefeuilles des acteurs financiers.
2. Un processus favorisé par le cadre de régulation
Les assouplissements successifs du cadre juridique ont favorisé la financiarisation en permettant à des investisseurs n'exerçant pas au sein des sociétés d'exercice libéral (SEL) d'entrer au capital. La réglementation autorise, ainsi, l'ouverture du capital des SEL de médecins et de sages-femmes à toute personne physique ou morale, exerçant ou non dans la société, dans la limite de 25 %.
La régulation des dépenses a également pu constituer un facteur propice au développement de la financiarisation, dans un contexte de déficit récurrent de la branche maladie. Dans la biologie médicale, des protocoles d'accord successifs ont permis, par une régulation couplée des prix et des volumes, de contenir la croissance annuelle des dépenses à 0,9 % entre 2014 et 2021. Cette régulation, permise par les gains de productivité réalisés par les groupes de laboratoires, favorise en retour une poursuite de la concentration du secteur en fragilisant les structures indépendantes.
Les exigences de qualité des soins et les procédures visant à contrôler leur bonne application peuvent également constituer des facteurs de financiarisation. L'obligation d'accréditation mise en place par l'ordonnance « Ballereau » de 2010, qui s'est avérée coûteuse pour les laboratoires, a ainsi constitué une incitation puissante à leur regroupement.
Enfin, les aspirations des professionnels de santé à des modalités de travail collectives et à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée ont pu constituer un facteur favorable au développement de structures financiarisées, en encourageant le regroupement des professionnels ou en les déchargeant de tâches administratives et de gestion.