C. DES RÔLES DIFFÉRENTS IMPARTIS À L'ASSURANCE MALADIE COMPLÉMENTAIRE SELON LES PAYS

Les exemples allemand et néerlandais soulignent des différences fondamentales de conception de l'AMC par rapport à la France.

En France, où un cofinancement public/privé existe pour la quasi-totalité des soins et biens médicaux, l'assurance privée est principalement complémentaire de l'AMO et vise à limiter les copaiements à la charge des assurés ; elle intervient également, de manière marginale, à titre supplémentaire pour des prestations dites de confort à l'hôpital (chambre seule...) ou le remboursement de prestations de pratiques thérapeutiques alternatives comme la sophrologie ou l'ostéopathie, non pris en charge par la sécurité sociale.

Aux Pays-Bas, 83 % des assurés avaient souscrit une assurance santé facultative en 2023, pour couvrir les dépenses de santé non couvertes par le panier de soins de base de l'AMO : lunettes et lentilles de contact, certains soins dentaires, orthodontie, kinésithérapie.

Au Pays-Bas, une AMC facultative peu encadrée

Contrairement à l'AMO, l'AMC facultative est peu encadrée aux Pays-Bas : les compagnies d'assurance déterminent elles-mêmes les conditions et les modalités de remboursement, ainsi que le montant des primes, variable selon la situation de chaque assuré. La prime d'assurance complémentaire est généralement plus élevée pour les personnes âgées.

Les compagnies d'assurance santé n'ont pas l'obligation d'accepter les demandes de souscription d'assurance complémentaire. Elles peuvent également appliquer des délais d'attente avant le premier remboursement (par exemple, une nouvelle couronne dentaire ne sera remboursée par l'assurance qu'après six mois et non pas immédiatement au premier jour du contrat). La vente liée (assurance de base et assurance complémentaire) est courante. Il est également souvent proposé un contrat additionnel à l'assurance facultative, couvrant spécifiquement les frais dentaires.

Certains frais de santé dits « spécifiques » (prothèses, certains médicaments, soins d'orthodontie) sont déductibles du revenu imposable à partir d'un certain seuil ou ouvrent droit à un crédit d'impôt pour les personnes ne payant pas ou très peu d'impôt sur le revenu.

Comme l'a relevé la Cour des comptes en 2015578(*), le développement de l'AMC en France s'inscrit dans une logique de concentration des prises en charge sur les soins les plus lourds et les pathologies les plus graves, parallèlement à une certaine « érosion de la prise en charge des soins courants des autres assurés », « dans un contexte de désengagement de l'assurance maladie des soins courants ». Ainsi, « le poids des affections de longue durée dans les dépenses de l'assurance maladie obligatoire de base et son corollaire, l'importance des autres dépenses laissées à la charge des assurés (tickets modérateurs, participations à la charge des assurés et dépassements de tarifs) créent le besoin d'une couverture complémentaire santé ». L'AMC couvre ainsi une très forte majorité des Français (environ 96 %).

À l'inverse, l'Allemagne a fait le choix d'un niveau plus élevé de prise en charge par l'AMO, mais sur un périmètre plus restreint : l'AMO prend en charge un panier de soins plus étroit qu'en France (sont exclus l'optique, les prothèses dentaires et une grande partie des transports sanitaires). Ainsi, la Cour des comptes notait que « les dispositifs d'assurance maladie strictement complémentaires ne prennent en charge en Allemagne que 2 % environ des dépenses de santé. Le niveau de remboursement par l'assurance maladie légale laisse en effet, contrairement à la France, peu d'espace pour des offres de couverture complémentaire dont les assurés ressentent par ailleurs moins le besoin ». 23 % environ seulement des Allemands sont concernés par cette couverture complémentaire579(*).


* 578 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, 2015.

* 579 Audrey Lafon et Alexis Montaut, « La place de l'assurance maladie privée dans six pays européens », Les dossiers de la Drees, n° 19, juin 2017.

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