III. LES MOTEURS À L'ORIGINE DES FAUSSES CROYANCES

De nombreuses études se sont intéressées aux facteurs susceptibles de favoriser l'adhésion aux fausses informations et leur partage. Outre des facteurs sociodémographiques, le rôle des comportements informationnels, des connaissances, des croyances, de facteurs cognitifs et socio-affectifs mais aussi de la confiance dans la science, les institutions et les gouvernements a été mis en évidence404(*).

A. UN MANQUE D'INFORMATION ET DE CONNAISSANCES

La mésinformation et la désinformation se bâtissent sur un terreau d'acceptation alimenté notamment par un déficit d'information. Les questionnements restés sans réponse, particulièrement nombreux lors de l'émergence d'un nouveau pathogène, peuvent se traduire en inquiétudes, qui constituent autant d'opportunités à exploiter par les désinformateurs. Or, la crise sanitaire a été marquée par un sentiment de manque d'information chez la population, résultant notamment d'un décalage entre les temporalités médiatique et scientifique. À titre d'exemple, 33,7 % des Français estimaient au printemps 2022 ne pas avoir été bien informés sur les vaccins contre la covid-19405(*).

L'étude sur la désinformation en santé menée par Laurent Cordonier pour la Fondation Descartes a montré que le recours fréquent à des sources réputées fiables pour s'informer sur l'actualité médicale était corrélé à une plus faible adoption de comportements de santé à risque.

De même, à l'échelle internationale, il a été constaté que le bon fonctionnement des médias traditionnels est l'un des paramètres liés à une meilleure résilience face aux fausses informations406(*).

En termes d'information médicale, les professionnels de santé - qui jouissent d'une confiance importante - jouent un rôle essentiel. L'étude de la Fondation Descartes a montré une forte corrélation entre le fait de disposer d'un médecin traitant et la possession de bonnes connaissances en santé, soulignant le rôle majeur de cet interlocuteur dans la lutte contre les fausses informations.

Parallèlement au manque d'information, le manque de connaissances scientifiques et médicales augmente la sensibilité aux fausses informations. Des travaux expérimentaux ont montré que les personnes ayant un faible niveau de connaissances scientifiques étaient plus susceptibles de croire à de fausses informations sur la covid-19407(*). De même, au cours de la crise, de plus grandes compétences en littératie médicale408(*) et en numératie409(*) se sont montrées protectrices contre les fausses informations.

Enfin, outre les connaissances purement scientifiques, une bonne compréhension de la démarche scientifique protège également contre les fausses informations410(*) : l'acceptation des incertitudes et des éventuelles controverses inhérentes à la construction des savoirs permet de se prémunir contre les explications simplistes proposées comme alternatives par la désinformation.


* 404 X. Nan et al., Soc. Sci. Med. 2022, 314, 115398 ( https://doi.org/10.1016/j.socscimed.2022.115398).
Pour une revue de l'influence de ces différents facteurs sur la croyance et le partage de fausses informations sur la covid-19, voir : H. Bruns
et al., Covid-19 misinformation: Preparing for future crises, 2022 ( https://doi.org/10.2760/41905).

* 405 ORS PACA, Enquête COVIREIVAC Vague 2 - SLAVACO Vague 4 : Rappels et vaccination des enfants en période de décrue de l'épidémie, 2022 ( http://www.orspaca.org/sites/default/files/note-covireivac-v2-slavaco-v4.pdf).

* 406 E. Humprecht et al., Int. J. Press/Politics 2020, 25, 493 ( https://doi.org/10.1177/1940161219900126).

* 407 G. Pennycook et al., Psychol. Sci. 2020, 31, 770 ( https://doi.org/10.1177/0956797620939054).

* 408 a) M. Duplaga, Int. J. Environ. Res. Public Health 2020, 17, 7818 ( https://doi.org/10.3390/ijerph17217818) ; b) K. Pickles et al., J. Med. Internet Res. 2021, 23, e23805 ( https://doi.org/10.2196/23805).

* 409 D'après l'OCDE, la numératie se définit comme la capacité à utiliser, appliquer, interpréter et communiquer des informations et des idées mathématiques. Voir : J. Roozenbeek et al., R. Soc. Open Sci. 2020, 7, 201199 ( https://doi.org/10.1098/rsos.201199).

* 410 V. Èavojová et al., J. Health Psychol. 2022, 27, 534 ( https://doi.org/10.1177/1359105320962266).

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