B. LES AIDES À LA DÉCARBONATION DE L'INDUSTRIE MISES EN PLACE DANS LE CADRE DU PLAN DE RELANCE SONT PROLONGÉES ET AMPLIFIÉES PAR LES AIDES DU PLAN FRANCE 2030 À HAUTEUR DE 4,5 MILLIARDS D'EUROS
1. Le plan « France Relance » a mobilisé un milliard d'euros de crédits budgétaires conventionnels pour financer des aides publiques à la décarbonation de l'industrie
a) Les crédits du plan « France Relance » ont co-financé les actions soutenues par le « Fonds chaleur » à hauteur de 420 millions d'euros
Le fonds de soutien au développement de la production et de la distribution de chaleur d'origine renouvelable, ou « Fonds chaleur », a été créé par l'article 19 de la loi du 3 août 200947(*) relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dite « loi Grenelle I ».
Entre 2009 et 2022, le Fonds chaleur a versé des aides publiques à hauteur de 3,7 milliards d'euros qui ont permis de financer des projets correspondant à 12,4 milliards d'euros d'investissement au total correspondant à 7 100 installations.
Les aides versées par le Fonds chaleur sont des subventions à l'investissement qui permettent aux bénéficiaires de remplacer des sources de production de chaleur émettrices de gaz à effet de serre par des solutions de production de chaleur renouvelable.
La sélection des bénéficiaires du Fonds chaleur repose sur deux modes d'intervention : d'une part le Fonds chaleur régionalisé, géré par les directions régionales de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), d'autre part pour les installations biomasses de grande taille, les bénéficiaires sont identifiés par l'appel à projet national annuel « Biomasse Chaleur Industrie Agriculture Tertiaire » (BCIAT).
Les crédits du plan France Relance ont servi à financer les aides versées en 2021 et 2022 aux bénéficiaires de 'l'appel à projets (AAP) BCIAT à hauteur de 424 millions d'euros. Les aides versées ont notamment permis de financer partiellement des investissements de remplacement ou d'adaptation d'une chaudière ou d'un générateur existant pour passer d'un combustible fossile à la biomasse.
Selon le rapport final du comité d'évaluation du plan France Relance, publié en janvier 2024, les aides de l'AAP BCIAT financées par le plan de relance ont permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 1,78 MtCO2éq.
Le comité d'évaluation souligne par surcroît qu'un lien causal peut être établi entre l'octroi des aides BCIAT et l'augmentation des investissements des entreprises bénéficiaires48(*).
b) Le Fonds de décarbonation de l'industrie du plan France Relance a financé des projets de renforcement de l'efficacité énergétique et de transformation des procédés industriels
Le cofinancement des appels à projet BCIAT ne constitue qu'un des volets du soutien public à la décarbonation de l'industrie financé par le plan France Relance à travers le « Fonds de décarbonation de l'industrie » (FDI).
Si le montant total du Fonds de décarbonation de l'industrie prévu dans le plan « France Relance » était de 1,2 milliard d'euros49(*), le rapport final d'évaluation du comité d'évaluation du plan de relance retrace le versement de subventions pour un montant total d'un milliard d'euros.
Répartition des aides du Fonds de
décarbonation de l'industrie
du plan France Relance
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données de France Stratégie
Outre les 424 millions d'euros financés pour les bénéficiaires de l'AAP BCIAT, le FDI a financé trois dispositifs d'aides publiques entre 2020 et 2022.
En premier lieu, deux appels à projets (AAP) gérés par l'Ademe pour soutenir des projets d'amélioration de l'efficacité énergétique et de décarbonation des procédés industriels, pour un montant total de 552 millions d'euros, ont été financés par le plan « France Relance ».
L'AAP « INDUSEE », ouvert du 1er août 2020 au 20 octobre 2020, a permis le versement d'aides d'un montant total de 108 millions d'euros à 33 bénéficiaires. Les projets soutenus sont des investissements supérieurs à trois millions d'euros qui permettent de réduire la consommation en énergie primaire et les émissions à gaz à effet de serre des sites industriels. Les aides versées représentent, selon la taille des entreprises, entre 30 % et 50 % des surcoûts induits par le choix d'un investissement bas-carbone par rapport à un investissement de référence.
Deux exemples de projets financés par l'AAP « INDUSEE »
Le site métallurgique de Pamiers (Ariège), appartenant au groupe Eramet, a été soutenu pour réaliser un investissement permettant de remplacer un four à gaz d'ancienne génération par deux fours électriques et un four à gaz de nouvelle génération. Cet investissement doit permettre de diviser par quatre la consommation d'énergie finale du site.
Le site de production textile de Troyes (Aube) du groupe Petit Bateau a été soutenu pour réaliser un investissement de modernisation des machines de teinture et de récupération de chaleur pour réduire les émissions du site et réduire sa consommation d'énergie primaire de 2 590 MWh.
Source : commission des finances
L'AAP « DECARBIND », ouvert de mars 2021 à octobre 2021, a permis le versement d'aides d'un montant total de 444 millions d'euros à 107 bénéficiaires. Il reprend les principes de l'AAP « INDUSEE » en élargissant le périmètre des investissements éligibles aux investissements ayant pour objet l'électrification ou la modification des procédés industriels pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
En second lieu, des aides directes pour les projets d'efficacité énergétique de moins de trois millions d'euros d'investissement, pour un montant de 37 millions d'euros, gérées directement par l'Agence de services et de paiement (ASP) entre novembre 2020 et juin 2022, ont également bénéficié d'un financement par les crédits du plan de relance.
Il est à relever que les aides du Fonds pour la décarbonation de l'industrie (FDI) sont particulièrement efficaces quant à leur coût d'abattement, c'est-à-dire quant à l'efficacité de la dépense publique rapporté aux émissions de gaz à effet de serre évité.
Pour le milliard d'euros d'aides versées par le Fonds de décarbonation de l'industrie, la réduction annuelle d'émission de gaz à effet de serre est estimée à 4,5 MtCO2éq. En retenant une hypothèse de durée de vie de quinze ans des projets soutenus, le coût d'abattement associé aux aides à la décarbonation de l'industrie du plan France Relance est de 15 euros par tonne de carbone évitée.
Pour rappel, ces coûts sont particulièrement réduits au regard du coût d'abattement estimé à 110 euros par tonne de carbone évité dans le cadre du soutien public aux véhicules électriques ou à 70 euros par tonne de carbone dans le cadre de l'électrification et la rénovation vers la classe B d'un logement chauffé au gaz50(*).
Coûts d'abattement de différentes
politiques publiques sectorielles
de décarbonation
(en euros par tonne de carbone évitée)
Source : commission des finances, d'après les données de France Stratégie
Les aides publiques à la décarbonation de l'industrie financées par le plan France Relance ont marqué un tournant dans la politique de soutien de l'État à la décarbonation de ce secteur, et le volet 1 des aides à la décarbonation des petits sites industriels, doté d'une enveloppe initiale de 4 milliards d'euros, est présentée par France Stratégie comme des aides « destinées à poursuivre les appels à projet du plan France Relance »51(*).
2. Le plan France 2030 mobilise 4,5 milliards d'euros d'aides publiques pour la décarbonation de l'industrie
Lors du lancement du plan France 2030 à la fin de l'année 2021, l'objectif n°3 « décarboner notre industrie et la production d'intrants » bénéficiait d'une enveloppe initiale de 5,5 milliards d'euros52(*).
La reprogrammation du plan France 2030 réalisée à la fin de l'année 2023 s'est traduite par une réduction du budget de 19 % de l'objectif n°3, dont l'enveloppe actualisée au 1er janvier 2024 est de 4,5 milliards d'euros sur l'ensemble de la période couverte par le plan.
Les aides publiques financées dans le cadre de l'objectif n°3 du plan peuvent être réparties en deux branches selon qu'elles soutiennent l'offre de solution de décarbonation (448 millions d'euros) ou la demande de décarbonation, c'est-à-dire les investissements pour décarboner les sites industriels (4 milliards d'euros). La décomposition synthétique des aides de l'enveloppe de 4,5 milliards d'euros figure à l'annexe n°1 du présent rapport.
Pour assurer la régularité des aides publiques versées aux bénéficiaires finaux dans le cadre de l'objectif de décarbonation de l'industrie du plan France 2030, le SGPI et les opérateurs du plan s'appuient sur le régime des aides d'État consacré par le droit de l'Union européenne53(*) qui prévoit notamment la compatibilité de certaines aides d'État avec le marché intérieur. Les aides versées dans le cadre de l'objectif de décarbonation de l'industrie du plan France 2030 s'inscrivent notamment dans le périmètre du règlement général d'exemption par catégorie (RGEC)54(*), en application duquel les aides à la protection de l'environnement peuvent être, sous certaines conditions, compatibles avec le marché commun.
a) La stratégie de soutien au développement en France d'une offre de solutions de décarbonation de l'industrie bénéficie d'un financement de 450 millions d'euros du plan France 2030
La première branche du dispositif de soutien à la décarbonation de l'industrie du plan France 2030 est constituée par des aides ayant pour objectif de soutenir le développement sur le territoire français d'une offre de solutions de décarbonation de l'industrie correspondant au financement de la stratégie d'accélération (SA) « Décarbonation de l'industrie », présentée par le Premier ministre Jean Castex dans un discours à Dunkerque le 4 février 2022.
Le soutien public à la structuration de ces industries vertes est réparti entre plusieurs catégories d'aides selon le niveau de maturité, ou Technology Readiness Level (TRL), des projets soutenus par la puissance publique. Dans le cas de la stratégie d'accélération pour la décarbonation de l'industrie, l'enveloppe de 448 millions d'euros est répartie entre 100 millions d'euros, gérés par l'Agence nationale de la recherche (ANR), dédiés aux projets de recherche et de maturation de nouvelles solutions d'une part et 348 millions d'euros, gérés par l'Ademe, dédiés au développement et à l'industrialisation de solutions de décarbonation existantes d'autre part.
Répartition des aides de la stratégie d'accélération « Décarbonation de l'industrie »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du secrétariat général pour l'investissement (SGPI)
En parallèle du financement de la stratégie d'accélération à hauteur de 448 millions d'euros dans le cadre de l'enveloppe de l'objectif n°3 du plan France 2030, il est à relever que la stratégie est complétée par des subventions dans le domaine de la formation qui sont rattachées au programme transversal « compétences et métiers d'avenir » (CMA) et au levier n°4 « développer les talents en construisant les formations de demain » du plan.
Parmi les projets financés par le programme CMA, les projets dans le secteur de la décarbonation de l'industrie représentent un montant total de 39 millions d'euros pour cinq projets soutenus, dont notamment la création par l'université du Littoral Côte d'Opale (Dunkerque) d'une « Décarbo Industrie Académie » qui bénéficie d'une aide de 8 millions d'euros.
(1) Le plan France 2030 soutient à hauteur de 100 millions d'euros la recherche en matière de décarbonation de l'industrie
L'enveloppe de 100 millions d'euros du plan France 2030 dédié à la recherche et au transfert de technologie dans le domaine de la décarbonation de l'industrie se décompose en deux sous-enveloppes : 70 millions d'euros dédiés aux projets de recherche et 30 millions d'euros dédiés aux projets de transfert de technologie.
Décomposition des aides à la recherche et au transfert de technologie du plan France 2030 dans le domaine de la décarbonation de l'industrie
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du SGPI
L'enveloppe de 70 millions d'euros d'aide à la recherche finance le programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR) SPLEEN pour la décarbonation de l'industrie, co-piloté par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l'IFP Énergies nouvelles (IFPEN).
Les PEPR sont des programmes ayant pour objectif de « construire ou consolider un leadership français dans les domaines scientifiques liés ou susceptibles d'être liés à une transformation technologique, économique, sociétale, sanitaire ou environnementale et qui sont considérés comme prioritaires au niveau national ou européen »55(*).
La création du PEPR SPLEEN dédié à la décarbonation de l'industrie s'est concrétisé par la désignation par l'État en août 2021 de deux pilotes scientifiques, le CNRS et l'IFPEN.
Le comité exécutif (COMEX) du plan France 2030 a ensuite installé un comité scientifique et technologique de programme (CSTP), constitué d'experts de haut niveau et de représentants des établissements d'enseignement supérieur ou de recherche n'ayant pas la qualité de pilote du programme.
La sélection des projets de recherche financés par le plan France 2030 dans le cadre du PEPR SPLEEN est ensuite effectuée sur le fondement d'appels à projet (AAP) mis en place par les copilotes du PEPR conformément à un document de cadrage stratégique rédigé par les pilotes scientifiques et validé par le COMEX du plan France 2030 après avis du CSTP. Un AAP du PEPR SPLEEN a été ouvert entre janvier et mars 2024. Un autre AAP est programmé dans le courant de l'année 2025.
Parallèlement, les copilotes scientifiques du PEPR ont proposés dix projets ciblés qui ont bénéficié d'une enveloppe initiale de 34,8 millions d'euros, attribuée par décision du Premier ministre en date du 5 avril 2023. Ces projets ciblés sont répartis entre les quatre axes suivants :
- nouveaux outils de prévision et de suivi, trois projets de recherche sont financés à hauteur de 4,8 millions d'euros ;
- intégration des énergies à faible teneur en carbone, un projet de recherche est financé à hauteur de 2,4 millions d'euros ;
- décarbonisation et intensification des procédés, quatre projets de recherche sont financés à hauteur de 18,8 millions d'euros ;
- stockage et valorisation du dioxyde de carbone, deux projets de recherche sont financés à hauteur de 8,9 millions d'euros.
Un exemple de projet de recherche financé par le PEPR « décarbonation de l'industrie » : le projet PowerCO2
Le projet PowerCO2 est un des dix projets ciblés financés par le PEPR SPLEEN dans le cadre du plan France 2030. Il bénéficie d'une aide financière de 7,4 millions d'euros.
Ce projet, qui associe vingt-deux organismes de recherche différents56(*), a pour objectif la mise au point de solution de conversion du dioxyde de carbone. Les trois sous-objectifs du projet sont de maximiser l'absorption du carbone dans la production de carburants électriques (tâche 1), d'exploiter l'ensemble du spectre solaire dans la production de carburants solaires (tâche 2) et enfin la découverte de nouvelles voies de réactions pour le dioxyde de carbone (tâche 3).
L'enveloppe de 30 millions d'euros d'aide au transfert de technologie de la SA « Décarbonation de l'industrie » finance le programme de maturation et de prématuration « Cactus », qui a bénéficié d'une aide d'un montant de 22 millions d'euros attribué par décision du Premier ministre le 16 février 2022.
Le programme « Cactus »57(*), piloté par la société d'accélération du transfert de technologie (SATT) « Pulsalys », s'appuie sur un consortium composé d'universités, d'organismes de recherche et d'organismes de transfert de technologie. Il a pour objet de financer des actions de prématuration (par exemple la description des besoins technico-économiques nécessaires au développement du projet) et de maturation (par exemple la construction d'un prototype).
(2) Les projets de développement et d'industrialisation des solutions de décarbonation de l'industrie sont soutenus par le plan France 2030 à hauteur de 350 millions d'euros
L'enveloppe de 348 millions d'euros dédiée au développement et à l'industrialisation des solutions de décarbonation de l'industrie se décompose en trois sous-enveloppes.
En premier lieu, les projets d'innovation et de développement bénéficient d'une enveloppe de 120 millions d'euros. En deuxième lieu, les projets d'industrialisation bénéficient d'une enveloppe de 27 millions d'euros. En troisième lieu, les études préalables en matière de capture et de séquestration du carbone (CCS) et pour l'élaboration d'une trajectoire de décarbonation des zones industrialo-portuaires bénéficient d'une aide de 201 millions d'euros.
Décomposition des aides au
développement et à l'industrialisation
du plan France 2030
dans le domaine de la décarbonation de l'industrie
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du SGPI
L'ensemble de ces aides de soutien à l'offre de solutions de décarbonation de l'industrie sur le territoire français est géré par l'Ademe, qui sélectionne les porteurs de projets par l'organisation de plusieurs procédures compétitive de sélection dont notamment les appels à projet (AAP).
Les aides à l'innovation et au développement ont été attribuées à travers l'AAP « IBAC PME », destiné aux projets d'un budget d'au plus 1,5 million d'euros présentés par une petite ou moyenne entreprise (PME) pour le développement de démonstrateurs dans le domaine de la décarbonation de l'industrie, et l'AAP « DEMIBAC », destiné aux projets d'au moins 1,5 million d'euros pour le développement de démonstrateurs dans le domaine de la décarbonation de l'industrie.
Les aides à l'industrialisation ont été attribuées à travers l'AAP SOLINBAC destiné aux projets de massification de la production de solutions de décarbonation.
Les aides pour la réalisation d'études préalables nécessaires à l'élaboration d'une trajectoire de décarbonation pour les zones industrialo-portuaires ont été attribuées à travers l'AAP « Zone industrielle bas-carbone » (ZIBAC) qui a sélectionné des consortiums d'acteurs publics et privés pour chacune des onze zones industrialo-portuaires les plus émissives de France58(*). La première phase d'étude correspond à une aide de 37 millions d'euros pour l'ensemble des zones industrialo-portuaires, une seconde phase de réalisation d'études d'ingénierie de base59(*) devrait bénéficier d'une enveloppe globale de 138 millions d'euros.
Enfin, le SGPI a indiqué aux rapporteurs qu'une enveloppe de 26 millions d'euros gérée par l'Ademe serait dédiée à la réalisation d'études de faisabilité en matière de capture et de séquestration du carbone (CCS). Les opérateurs du plan ont toutefois indiqué aux rapporteurs qu'ils n'avaient pas de visibilité sur le calendrier prévisionnel d'attribution de ces aides.
b) Le plan France 2030 finance à hauteur de quatre milliards d'euros les aides à l'investissement pour soutenir la demande de décarbonation des sites industriels sur le territoire français
La seconde branche du dispositif de soutien à la décarbonation de l'industrie du plan France 2030 est constituée par des aides publiques au déploiement sur le territoire français des solutions de décarbonation des sites industriels. Ces aides au déploiement, par opposition aux aides de la stratégie d'accélération « Décarbonation de l'industrie » qui soutiennent la structuration d'une offre de solutions de décarbonation, ont pour objet de soutenir la demande des sites industriels vis-à-vis des solutions de décarbonation existantes.
Ces aides au déploiement de solutions de décarbonation de l'industrie s'inscrivent dans l'élargissement du périmètre de financement du plan France 2030 par la loi de finances initiale pour 202260(*) qui a consacré la possibilité pour le plan de financer, en complément des projets innovants, « des projets de développement et de transformation de la base industrielle du pays »61(*).
Dans le cadre du soutien à la décarbonation de l'industrie, les aides au déploiement bénéficient d'une enveloppe totale de 4 milliards d'euros qui est divisée en deux volets : un premier volet dédié à la décarbonation des petits sites industriels (670 millions d'euros) et un deuxième volet dédié à la décarbonation profonde des sites industriels très émetteurs (3,4 milliards d'euros).
Répartition des aides au déploiement
des solutions de décarbonation
des sites industriels
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du SGPI
(1) Les investissements de décarbonation des petits sites industriels bénéficient d'une enveloppe de près de 700 millions d'euros
Le premier volet des aides au déploiement des solutions de décarbonation de l'industrie a pour objet de soutenir des projets de décarbonation et des sites industriels de petite taille. Il regroupe les aides du plan France 2030 jusqu'à un montant de 30 millions d'euros qui financent le déploiement sur des sites industriels d'investissements permettant la réduction des émissions de gaz à effet de serre par l'électrification des sites ou l'utilisation de la biomasse ou de l'hydrogène pour réduire les émissions énergétiques et non-énergétiques.
Au 31 janvier 2024, soit plus de deux ans après le lancement du plan France 2030, les aides du volet 1 ont été attribuées à hauteur de 331 millions d'euros, soit 49 % de l'enveloppe totale, pour soutenir 258 projets.
Aides du volet 1 attribuées aux
bénéficiaires
finaux au 31 janvier 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du SGPI
En premier lieu, le volet 1 de soutien au déploiement des solutions de décarbonation de l'industrie du plan France 2030 sert à financer, concurremment au « Fonds chaleur » et aux crédits du plan « France Relance », les aides versées aux bénéficiaires sélectionnés dans le cadre de l'appel à projet annuel « Biomasse chaleur industrie agriculture tertiaire » (BCIAT).
Cet appel à projet, géré par l'Ademe depuis 2009, a pour objet de soutenir le financement des installations biomasse de grande taille. Dans le secteur industriel, les investissements soutenus par l'AAP BCIAT correspondent en général au remplacement ou à l'adaptation d'une chaudière ou d'un générateur pour passer d'une alimentation au gaz naturel à une alimentation à la biomasse.
Les aides ordinaires, c'est-à-dire en excluant les abondements exceptionnels en provenance du plan France Relance puis du plan France 2030, versées aux bénéficiaires de l'AAP BCIAT sont financées par le « Fonds chaleur », abondé par les crédits conventionnels du programme 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
Le complément de financement apporté par le plan France 2030, d'un montant total de 296 millions d'euros, a pour objet de financer, uniquement dans le secteur industriel, des projets identifiés à l'occasion de l'AAP BCIAT 2022 (171 millions d'euros de financement complémentaire) et de l'AAP BCIAT 2023 (125 millions d'euros de financement complémentaire).
En second lieu, le volet 1 s'appuie sur plusieurs procédures spécifiques de sélection pour identifier des projets de décarbonation de petits sites industriels, pour lesquels l'aide demandée s'élève au plus à 30 millions d'euros. L'AAP « DECARBFLASH », organisé en 2022, a permis de soutenir les sites industriels de moins de 500 salariés pour la réalisation d'investissements de décarbonation dont le montant total atteint au plus 3 millions d'euros. L'AAP « DECARBIND », conduit en 2022 et en 2023, et qui devrait être reconduit en 2024, a pour objectif de soutenir les investissements de décarbonation des sites industriels pour lesquels le montant d'aide demandé se situe entre 3 et 30 millions d'euros.
(2) La décarbonation profonde des sites industriels les plus émetteurs est soutenue à hauteur de 3,4 milliards d'euros
Le second volet des aides au déploiement des solutions de décarbonation du plan France 2030 est constitué par des aides orientées vers la décarbonation des sites industriels les plus émetteurs, et notamment vers les 50 sites les plus émetteurs ayant conclu avec l'État un contrat de transition écologique (CTE). Il est par ailleurs à relever que certains des 50 sites les plus émetteurs sont susceptibles de percevoir des aides versées dans le cadre du volet 1 dans l'hypothèse où ils bénéficieraient d'une aide d'un montant inférieur à 30 millions d'euros.
Le volet 2 repose sur trois dispositifs de soutien. En premier lieu, l'aide pour la décarbonation du site de Dunkerque d'ArcelorMittal pour un montant de 850 millions d'euros. En deuxième lieu, les aides à la décarbonation des sites industriels par le renforcement de l'efficacité énergétique ou l'électrification des procédés, d'un montant compris entre 30 et 200 millions d'euros, pour une enveloppe prévisionnelle de 700 millions d'euros, dont les bénéficiaires seront identifiés par l'AAP « DECARBIND+ » ouvert de juin 2023 à mars 2024. Enfin en troisième lieu, le SGPI a indiqué au rapporteur qu'un autre dispositif (« dispositif futur ») d'appel d'offres, d'un montant prévisionnel de 1,8 milliard d'euros, devrait être ouvert au deuxième semestre 2024.
L'aide pour la décarbonation du site de Dunkerque d'ArcelorMittal constitue un cas particulier dès lors que le projet de demande d'aide avait été déposé par la société dans le cadre d'un appel à manifestation d'intérêt (AMI) lancé en janvier 2020 sur les « projets innovants d'envergure européenne ou nationale sur la conception, la production et l'usage de systèmes à hydrogène », dont l'objet était notamment d'identifier les acteurs sur le territoire français susceptibles de participer à un « projet important d'intérêt européen commun » (PIIEC) dans le domaine de l'hydrogène. L'aide a été autorisée par la Commission européenne le 20 juillet 2023 et elle a été réorientée vers l'objectif n°3 « décarbonation de l'industrie » du plan France 2030.
L'aide attribuée au site de Dunkerque d'ArcelorMittal, d'un montant de 850 millions d'euros, est la seule aide du volet 2 attribuée à un bénéficiaire final à la date du 29 février 2024. Le montant de l'enveloppe restant à répartir à cette date est par conséquent de 2 525 millions d'euros, soit 75 % de l'enveloppe totale.
Aides du volet 2 attribuées aux
bénéficiaires
finaux au 29 février 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les données du SGPI
* 47 Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
* 48 France Stratégie, Comité d'évaluation du plan France Relance, janvier 2024, Rapport final, volume II, évaluation des dispositifs, chapitre 9, Le soutien à la décarbonation de l'industrie.
* 49 Gouvernement, septembre 2020, Dossier de presse France Relance.
* 50 France Stratégie, mai 2023, Les coûts d'abattement en France.
* 51 France Stratégie, Comité d'évaluation du plan France Relance, janvier 2024, Rapport final, volume II, évaluation des dispositifs, chapitre 9, Le soutien à la décarbonation de l'industrie, p. 18.
* 52 Cour des comptes, avril 2023, Analyse de l'exécution budgétaire 2022, Mission « Investir pour la France de 2030 », p. 94.
* 53 Art. 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).
* 54 Règlement (UE) n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.
* 55 Convention du 2 juin 2021 entre l'État et l'Agence nationale de la recherche relative au programme d'investissements d'avenir (action « Programmes et équipements prioritaires de recherche »), point 1.2.
* 56 Dont notamment l'IFPEN, douze laboratoires du CNRS et quatre laboratoires du commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).
* 57 Consortium pour l'accélération décarbonée et le transfert pour l'industrie.
* 58 Bordeaux, Saint-Avold, Chalampé, Lacq, Strasbourg, Lyon, Thionville-Florange, Seine-Normandie, estuaire de la Loire, Fos-sur-Mer et Dunkerque.
* 59 Front-End Engineering Design (FEED).
* 60 Art. 187 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, b du 2°.
* 61 Art. 8 de la loi n °2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificatives pour 2010, 1° du B du I.