C. LA DIRECTIVE DU 5 AVRIL 2011

La traite des êtres humains fait l'objet de la directive 2011/36/UE du 5 avril 2011, qui succède, en intégrant ses dispositions, à la décision-cadre 2002/629/JAI du 19 juillet 2002.

• La décision-cadre 2002/629/JAI du 19 juillet 2002

La décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil du 19 juillet 2002 est relative à la lutte contre la traite des êtres humains. Ce texte imposait aux États membres d'incriminer, avant le 1 er août 2004, la traite des êtres humains à des fins d'exploitation de leur travail ou de leurs services ou à des fins de prostitution et d'autres formes d'exploitation sexuelle, ainsi que l'instigation, la participation, la complicité et la tentative. Étaient visées aussi bien les personnes physiques que morales. Elle imposait également aux États membres de prévoir que ces infractions soient passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives, en particulier une peine privative de liberté d'au moins huit ans lorsque l'infraction principale a été commise dans certaines circonstances aggravantes (mise en danger de la vie de la victime, victime particulièrement vulnérable, recours à des violences graves ou ayant causé un préjudice particulièrement grave à la victime, organisation criminelle). La protection des victimes était également prévue.

Toutefois, avant le traité de Lisbonne en 2009, les politiques dites JAI « justice et affaires intérieures » faisaient l'objet d'une coordination moins forte, et la Commission, qui ne pouvait attaquer les États membres en manquement, a jugé la transposition de cette décision-cadre globalement insuffisante.

• La directive 2011/36/UE du 5 avril 2011

La directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes remplace la décision-cadre. Cette directive reprend la Convention de Varsovie relative à la traite des êtres humains du 25 octobre 2007 afin d'en intégrer les stipulations dans le droit de l'Union, en les renforçant sur certains points.

La définition de la traite adoptée par la directive est plus large que celle qui figurait dans la décision-cadre. Elle englobe notamment l'exploitation d'activités criminelles et le prélèvement d'organes. Les niveaux de sanction sont aggravés par rapport à la décision-cadre : l'infraction principale doit être punie d'une peine maximale d'au moins cinq ans d'emprisonnement (la décision-cadre ne fixait pas de minimum). La peine maximale doit être d'au moins dix ans (au lieu de huit ans) lorsque l'infraction a été commise dans les mêmes circonstances aggravantes.

Les autorités nationales compétentes doivent avoir le pouvoir de ne pas poursuivre les victimes de l'exploitation et ne pas leur infliger de sanctions pour avoir pris part elles-mêmes à des activités criminelles. Les enquêtes ou les poursuites ne doivent pas dépendre de la plainte ou de l'accusation émanant d'une victime. Des outils d'investigations similaires à ceux utilisés dans les affaires de criminalité organisée doivent être mis à la disposition des autorités chargées des enquêtes ou des poursuites.

En raison du caractère souvent international de ces phénomènes, et pour les combattre plus efficacement, les États membres doivent établir leur compétence à l'égard des infractions commises en tout ou partie sur leur territoire ou lorsque l'auteur de l'infraction est l'un de leurs ressortissants. Dans ce cas, leur compétence ne doit pas être subordonnée à la règle dite « de la double incrimination », et l'engagement des poursuites ne doit pas être conditionné à une dénonciation de l'État sur le territoire duquel l'infraction a été commise.

Des dispositions spécifiques sont prévues en matière d'aide et d'assistance aux victimes. Ces mesures d'assistance et d'aide peuvent prendre la forme d'un hébergement adapté et sûr, d'une assistance matérielle, de soins médicaux et de services de traduction et d'interprétation. Au cours de l'enquête et de la procédure pénale, les victimes doivent recevoir une protection, comprenant notamment des conseils juridiques et une représentation juridique, gratuits si la victime ne dispose pas des ressources financières suffisantes. Tout traumatisme supplémentaire doit leur être évité, notamment en leur épargnant tout contact avec l'accusé. Les enfants victimes de la traite doivent faire l'objet de mesures de protection spécifiques, entre autres en ce qui concerne leurs conditions d'audition.

En particulier, les États membres doivent désigner un tuteur ou un représentant pour l'enfant victime de la traite des êtres humains lorsqu'un conflit d'intérêts avec l'enfant victime empêche les titulaires de l'autorité parentale de défendre ses intérêts supérieurs ou de le représenter. Les États membres doivent aussi veiller à ce que les enfants victimes aient accès à des conseils juridiques gratuits et à une représentation juridique gratuite.

Les États membres doivent aussi prendre les mesures nécessaires pour permettre que les infractions de traite des êtres humains donnent lieu à des poursuites pendant une période suffisamment longue après que la victime a atteint l'âge de la majorité (augmentation des délais de prescription).

L'enfant victime devra pouvoir être accompagné par un représentant légal ou, le cas échéant, par une personne majeure de son choix, sauf décision contraire motivée prise à l'égard de cette personne.

La directive devait être transposée dans le droit interne des États membres au plus tard le 6 avril 2013. On peut considérer qu'il n'y a donc pas de retard dans cette transposition.

L'Europe agit également directement contre la traite des êtres humains : le Conseil « Justice et affaires intérieures » du 25 octobre 2012 a approuvé une stratégie de l'Union européenne en vue de l'éradication de la traite des êtres humains pour la période 2012-2016 et la Commission a nommé un coordinateur européen de la lutte contre la traite des êtres humains.

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