D. LES CARENCES DES ACTEURS NATURELS DE LA PRÉVENTION
De
manière générale, et malgré la multiplicité
précédemment évoquée des dispositifs existants,
l'ensemble des intervenants a, chacun dans son domaine
privilégié, très largement insisté devant la
commission sur la
faiblesse des moyens et des actions mis en oeuvre en
matière de prévention contre la drogue
. Le système
français de lutte contre la drogue s'est en effet essentiellement
construit autour de la loi du 31 décembre 1970 dont le seul
intitulé indique quelles ont été les orientations
privilégiées : répression de l'usage et du trafic et
prise en charge sanitaire et sociale des usagers.
Cette double démarche, à laquelle s'ajoute
l'absence d'une
véritable culture de la prévention en France
(que l'on
constate dans les principaux autres champs de la santé publique),
a
eu pour conséquence de reléguer à la portion congrue
l'approche préventive du problème des drogues
. L'ancienne
présidente de la MILDT, Mme Nicole Maestracci, a également
reconnu lors de son audition par la commission qu'il était
«
évident que nous sommes dans un pays qui n'a pas de
culture de la prévention, qui n'a donc pas de cadre adapté, qui
n'a pas d'espace-temps dans les établissements scolaires consacré
à la prévention et qui n'a pas non plus de professionnels de la
prévention
».
La réalité révèle que certaines institutions
administratives, qui a priori n'étaient pas naturellement les mieux
placées pour mener des actions préventives s'y sont largement
investies, tandis que celles dont on attendait légitimement le plus en
la matière sont restées quasiment inertes.
1. La police et la gendarmerie, acteurs inattendus mais désormais essentiels de la prévention
Si policiers et gendarmes restent les symboles de l'application de l'interdit, leur intervention dans le champ de la prévention de la consommation des produits stupéfiants, et de l'information sur les risques qui y sont liés n'a cessé de croître depuis une quinzaine d'années, notamment auprès des populations les plus jeunes : la police et la gendarmerie sont sans doute aujourd'hui les structures administratives les plus impliquées dans les actions préventives contre les drogues.
a) La MILAD, coordinatrice et actrice de la prévention
La
Mission de lutte anti-drogue, au cabinet du directeur général de
la police nationale, est chargée de coordonner et d'orienter la
politique du ministère de l'intérieur en matière d'usage
de stupéfiants, de trafic et de blanchiment, mais aussi de
prévention. C'est dans ce cadre qu'elle anime le dispositif de la police
nationale, structuré autour des policiers formateurs anti-drogues
intervenant dans l'ensemble des domaines de la formation et de la
prévention. La MILAD assure notamment l'actualisation de leurs
connaissances par l'envoi d'ouvrages pédagogiques et met à leur
disposition sa documentation par l'intermédiaire de son site intranet.
La MILAD dispose à cet effet d'un camion podium pouvant recevoir une
quarantaine de personnes, à bord duquel le public est informé sur
les risques liés à l'usage de drogues et sur les facteurs de
protection. Les interventions sont assurées par des officiers de police
originaires de services de lutte contre les stupéfiants, qui ont
reçu une formation complète incluant une spécialisation
propre à l'intervention en milieu scolaire.
Durant la période estivale, ce dispositif embarqué sillonne les
routes de France à la rencontre des vacanciers, en partenariat avec
différentes structures (ministère de la jeunesse et des sports,
Agence nationale de prévention de l'alcoolisme ...). Pendant
l'été 2002, il s'est déplacé dans 21 villes de
France pour un public de 13 735 personnes.
Au total, ce sont environ 250 000 personnes qui sont ainsi
rencontrées chaque année par les policiers. La proportion de
jeunes s'élève à plus de 75 %. Quant aux adultes, il
s'agit surtout de membres de la communauté scolaire, d'acteurs
socio-sanitaires et de parents d'élèves.
b) Les policiers formateurs anti-drogues et les formateurs relais antidrogues de la gendarmerie nationale, spécialistes de la prévention de terrain
• Les PFAD
Au nombre de 266, issus généralement de commissariats de
sécurité publique, recrutés sur la base du volontariat et
bénéficiant d'une formation spécifique, ils interviennent
dans tous les domaines, de la formation continue de leurs collègues
à la prévention en milieu scolaire en passant par l'information
de publics très variés (parents, enseignants, travailleurs
médicaux et sociaux ...). En 2002, ils ont ainsi réalisé
212 actions de formation auprès de 3 413 fonctionnaires de
police et ont participé à 4 677 séances d'information
touchant un public de 157 352 personnes.
Depuis une circulaire ministérielle du 13 septembre 1999
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*
)
, leur action a été
réorientée pour l'essentiel vers les établissements
scolaires, où ils interviennent à travers les Comités
d'éducation à la santé et à la citoyenneté
(CESC). Dans ce cadre, ils informent sur les produits licites et illicites, les
comportements de consommation qui y sont liés, leurs conséquences
individuelles et sociales, les dispositions de la loi dans le domaine du trafic
et de l'usage ainsi que sur les divers dispositifs de prise en charge. En 2002,
ils ont ainsi consacré 3 355 séances d'information à
82 608 élèves et 540 séances de ce type à
15 169 enseignants et parents.
• Les FRAD
Au nombre de 530 au niveau national, soit environ un par arrondissement, ces
sous-officiers reçoivent une formation spécifique
dispensée par le Centre national de formation de la police judiciaire
(CNFPJ) fondée sur l'apprentissage des techniques de communication
orale, de la législation sur les stupéfiants et de la psychologie
du toxicomane. Comme pour les policiers formateurs antidrogue, leur action vise
essentiellement les jeunes élèves (à plus de 70 %) et
leurs parents, mais aussi des responsables sociosanitaires ainsi que des
militaires.
Ces militaires sont affectés au sein des 41 brigades de
prévention de la délinquance juvénile, à raison de
trois ou quatre par structure. Ces brigades agissent en partenariat avec les
élus, les administrations concernées et les services du Procureur
de la République. Le ministère de l'éducation nationale et
les milieux associatifs engagés dans la lutte contre la toxicomanie font
un appel croissant à leurs services.
En 2002, ils ont assuré environ 9 000 interventions au cours
desquelles ils ont rencontré quelques 408 000 personnes. Un
enfant sur deux bénéficie de ce fait d'une information
complète sur les drogues illicites. Au total, ce sont près de
quatre millions de personnes qui ont bénéficié d'actions
d'informations provenant de la gendarmerie nationale.