B. LE NOUVEAU DISPOSITIF
Devant
ce phénomène, le Gouvernement a présenté un nouveau
dispositif qui tient compte de l'insolvabilité de certains
débiteurs et en tire les conséquences.
Le dispositif proposé par le présent projet de loi maintient la
phase amiable et la phase de recommandations. Toutefois, la nature des
recommandations varie selon la situation du débiteur. Ainsi, lorsque la
commission constate l'insolvabilité du débiteur
caractérisée par l'absence de biens saisissables de nature
à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, elle peut recommander
la suspension de l'exigibilité des créances autres
qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder trois ans.
A l'issue de cette période, la commission réexamine la situation
du débiteur. Si sa situation le permet, la commission recommande tout ou
partie des mesures prévues dans l'actuel dispositif : report ou
rééchelonnement des dettes, imputation des paiements d'abord sur
le capital, réduction des taux d'intérêt relatifs aux
sommes correspondant aux échéances reportées ou
rééchelonnées et, en cas de vente forcée,
réduction du montant de la fraction des prêts immobiliers restant
due aux établissements de crédit après la vente.
En revanche, si le débiteur reste insolvable, la commission recommande,
par une proposition spéciale et motivée, la réduction et
l'effacement de tout ou partie des dettes autres qu'alimentaires.
Ce dispositif doit donc permettre de résoudre les cas les plus
désespérés. Il est cependant strictement encadré
pour éviter tout détournement de la procédure. Ainsi,
l'effacement des dettes n'intervient qu'après un double examen de la
situation du débiteur à deux instants éloignés dans
les temps. En outre, cette procédure est sous le contrôle du juge,
qui doit homologuer la décision de la commission et peut revenir sur les
propositions de celle-ci s'il estime qu'elles ne sont pas adaptées
à la situation du débiteur. Enfin, le débiteur ayant
bénéficié d'un effacement de dettes est inscrit au fichier
des incidents de paiement pendant huit ans et ne peut bénéficier
d'un nouvel effacement durant cette période.
Votre rapporteur tient à faire remarquer que le texte initial
proposé par le gouvernement excluait les dettes fiscales, parafiscales
ou envers les organismes de sécurité sociale non seulement du
moratoire, mais également de la réduction ou de l'effacement des
dettes.
L'Assemblée nationale a supprimé cette mesure afin
d'établir une égalité entre les créanciers,
satisfaisant ainsi une revendication de longue date des établissements
de crédit et des professions bancaires.
Votre rapporteur pour avis rejette cette banalisation des dettes fiscales alors
même que celles-ci sont insignifiantes dans les dossiers des
débiteurs susceptibles de bénéficier du nouveau dispositif
et que l'administration fiscale dispose d'une procédure
spécifique de remise gracieuse.
Votre rapporteur souhaiterait également présenter quelques
remarques sur le présent projet de loi.
Tout d'abord, il se félicite que ce texte se soit largement
inspiré du rapport sur le surendettement qu'il a rédigé
avec notre collègue Jean-Jacques Hyest. Toutefois, ce constat
n'empêche pas certaines critiques.
D'une part, la dimension sociale n'est pas assez prise en compte, aussi bien
dans l'instruction des dossiers que dans le suivi du plan de redressement.
A cet égard, votre rapporteur souhaiterait rappeler certaines
propositions faite dans le rapport précité :
• prévoir la présence d'un travailleur social
siégeant aux réunions de la commission de surendettement avec
voix consultative ;
• développer une coopération plus étroite entre les
secrétariats des commissions de surendettement et l'ensemble des acteurs
sociaux dans la phase d'instruction des dossiers de surendettement ;
• instaurer un mécanisme contractuel de suivi de la mise en oeuvre
des plans confié à un conseiller en économie sociale et
familiale.
En effet, un plan peut durer huit ans, et exige de gros sacrifices de la part
des ménages. L'absence de suivi augmente de manière notable les
risques d'incidents de paiement et, à terme, l'abandon du plan.
D'autre part, votre rapporteur pour avis s'étonne qu'aucune mesure ne
soit prise pour remédier à l'absence de statistiques. Le rapport
d'information avait soulevé le manque d'éléments
statistiques en quantité et en qualité suffisantes. Or, les
auditions menées pour analyser le présent projet de loi et
rédiger ce rapport ont montré que cette lacune était loin
d'être compensée et que le gouvernement prend des dispositions
sans connaître véritablement leur impact, faute de statistiques
fines et pertinentes.
Enfin, votre rapporteur est persuadé que ce texte aurait
mérité de constituer un projet de loi à part
entière.
A cet égard, votre rapporteur estime que son incorporation dans le
projet de loi d'orientation sur la lutte contre les exclusions risque de
conduire à des confusions. Certes, la nature du surendettement a
évolué et le nombre de surendettés passifs a fortement
augmenté. La réalité du surendettement reste cependant
complexe et mêle les deux composantes, surendettement passif et actif.
Il résulte de ces considérations que les surendettés sont
loin d'être tous des exclus, et que seuls 7 % des dossiers laissent
apparaître un endettement non bancaire.
Dès lors, et même si votre rapporteur défend avec vigueur
la nécessité d'aider les débiteurs surendettés
à sortir de cette situation difficile, il ne faudrait pas confondre
traitement du surendettement et assistanat. La procédure collective
n'est pas un droit acquis et les débiteurs ont des devoirs, comme celui
d'être de bonne foi, celui de n'accomplir aucun acte qui aggraverait leur
insolvabilité et celui de faire preuve d'un esprit de compromis dans
l'élaboration du plan.
En contrepartie, il est indispensable pour le succès de la
procédure que les commissions de surendettement laissent à la
disposition des débiteurs les ressources nécessaires aux
dépenses courantes minimales du ménage.
CHAPITRE III
LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION