PJL lutte contre les exclusions
OUDIN (Jacques) ; LORIDANT (Paul)
AVIS 478 (97-98) - COMMISSION DES FINANCES
Table des matières
- I. INTRODUCTION
- II. UN PROBLÈME MÉTHODOLOGIQUE
- III. UN CHIFFRAGE CRITIQUABLE
-
IV. UN ENGAGEMENT BUDGÉTAIRE DE L'ETAT DE 15,9 MILLIARDS DE FRANCS
SUR TROIS ANS
-
A. DES CREDITS CONCENTRES SUR LES AIDES À L'EMPLOI
- 1. Les mesures destinées à favoriser l'accès à l'emploi bénéficient de 12,769 milliards de francs de crédits, soit 80,10% du montant total de l'engagement de l'Etat
- 2. Les mesures destinées à faciliter l'accès au logement bénéficient de 854 millions de francs de crédits, soit 5,36 % du montant total
- 3. Le renforcement de l'accès aux soins bénéficie de 590 millions de francs, soit 3,70 % du montant total
- 4. Les droits sociaux et les moyens d'existence des plus démunis sont destinataires de 280 millions de francs
- 5. L'accès à la culture : 801 millions de francs, soit 5,02 % du montant total
- 6. Le renforcement de l'efficacité des acteurs sociaux : 648 millions de francs
- B. UNE MONTÉE EN CHARGE FORTEMENT PROGRESSIVE
-
A. DES CREDITS CONCENTRES SUR LES AIDES À L'EMPLOI
- V. L'IMPORTANCE DES COFINANCEMENTS
- VI. LE COÛT DES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
- VII. UN FINANCEMENT PAR REDEPLOIEMENT BUDGETAIRE
- I. LE DISPOSITIF LÉGISLATIF DE LUTTE CONTRE LE SURENDETTEMENT
- II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI
- I. LES DISPOSITIONS FISCALES ET FINANCIÈRES
-
II. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU SURENDETTEMENT
-
ARTICLE 25 bis (nouveau)
Exonération de la taxe d'habitation pour les locaux loués par des organismes logeant des personnes défavorisées -
ARTICLE 26
Exonération de droit de bail pour les sous-locations consenties à des personnes défavorisées - ARTICLE 28 ter (nouveau)
-
ARTICLE 29
Modification des conditions d'exonération de taxe foncière -
ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 42
Interdiction de la rémunération des services rendus aux débiteurs dans le cadre de la procédure de traitement du surendettement devant la commission de surendettement -
ARTICLE 42
Composition de la commission de surendettement -
ARTICLE 43
Fixation des ressources minimales du ménage par la commission de surendettement -
ARTICLE 43 bis (nouveau)
Fixation d'un plancher de ressources minimales correspondant au montant du revenu minimum d'insertion -
ARTICLE 44
Procédure applicable devant la commission -
ARTICLE 45
Saisine du juge de l'exécution par la commission en cas de difficulté sur la validité des créances -
ARTICLE 46
Saisine du juge de l'exécution par le président de la commission de surendettement, en cas d'urgence, aux fins de suspension des procédures d'exécution -
ARTICLE 47
Compétences de la commission en cas d'échec de la conciliation - Parmi les recommandations que peut formuler la commission se trouve la possibilité de " prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux d'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. "
-
ARTICLE 48
Mise en place d'un moratoire des dettes en cas d'échec des phases de conciliation et de recommandation - Le texte proposé par le gouvernement dispose que " lorsque la commission constate l'insolvabilité du débiteur caractérisée par l'absence de ressources ou de biens saisissables de nature à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, elle peut recommander la suspension de l'exigibilité des créances. ".
- Ces remarques étant faites, votre rapporteur ne conteste pas à l'Assemblée nationale sa volonté d'éviter qu'une éventuelle intransigeance de l'administration ne conduise à l'échec des plans et empêche les débiteurs de bonne foi de sortir de leur situation de surendettement, tout en contestant la solution que cette dernière a adoptée.
-
ARTICLE 49
Pouvoirs du juge en cas de contestation des recommandations
de la commission -
ARTICLE 50
Effets de l'effacement d'une créance -
ARTICLE 51
Inscription au fichier des incidents de paiement -
ARTICLE 51 bis (nouveau)
Fixation par décret des tarifs applicables aux huissiers de justice -
ARTICLE 51 ter (nouveau)
Suppression de la taxe sur les actes d'huissier -
ARTICLE 52
Conditions d'entrée en vigueur du chapitre premier du livre III,
titre III du code de la consommation -
ARTICLE 52 bis (nouveau)
Information de la caution sur l'ouverture d'une procédure de traitement du surendettement -
ARTICLE 52 ter (nouveau)
Mention dans le contrat de cautionnement du montant maximum
de la caution, à peine de nullité -
ARTICLE 52 quater (nouveau)
Fixation d'un plancher pour les ressources à la disposition de la caution équivalent au revenu minimum d'insertion -
ARTICLE 57 bis (nouveau)
Interdiction de l'offre ou du consentement d'un prêt à un mineur -
ARTICLE 72
Fourniture minimum d'énergie, d'eau et de téléphone -
ARTICLE 73
Droit au compte bancaire -
ARTICLE 73 bis (nouveau)
Légalisation du dispositif expérimental des titres spéciaux de paiement dénommés " chèques d'accompagnement personnalisé "
- I. AUDITION DE Mme MARTINE AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ, LE JEUDI 28 MAI 1998
- II. EXAMEN EN COMMISSION
N°
478
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 4 juin 1998
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions ,
Par MM.
Jacques OUDIN et Paul LORIDANT,
Sénateurs.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart,
Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, René
Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel Hamel,
Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy
Cabanel, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques
Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert
Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc
Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.)
:
780
,
856
et T.A.
136.
Sénat
:
445
,
450
(1997-1998).
Politique sociale.
AVANT-PROPOS
Votre
commission des finances a confié à
M. Jacques Oudin
le
soin d'apprécier le cadrage budgétaire général du
présent projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les
exclusions, ainsi que d'examiner certaines de ses dispositions à
caractère fiscal ou financier, dont elle s'est saisie pour avis.
Par ailleurs, elle a chargé
M. Paul Loridant
d'examiner les
dispositions du présent projet de loi relatives au surendettement des
ménages.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
CHAPITRE PREMIER
ANALYSE DU FINANCEMENT DU PROJET DE LOI
D'ORIENTATION
I. INTRODUCTION
A titre
liminaire, votre rapporteur pour avis tient à rappeler que la politique
de lutte contre les exclusions ne saurait se substituer à la politique
de l'emploi. En effet, la privation durable d'emploi reste la principale cause
d'exclusion. Le présent texte, aussi nécessaire soit-il, ne fait
qu'apporter des solutions palliatives aux conséquences d'une politique
de l'emploi impuissante, ou du moins insuffisamment efficace.
Or, les choix faits par le Gouvernement en matière de politique de
l'emploi ne sont pas ceux de votre commission des finances, ni de la
majorité du Sénat. Cette divergence d'appréciation s'est
déjà exprimée sur trois sujets différents.
Premièrement, votre commission des finances a exprimé son
désaccord, lors du dernier débat d'orientation budgétaire,
avec la priorité donnée à l'emploi public. Cette
priorité se traduit par l'arrêt du mouvement de réduction
des effectifs de la fonction publique amorcé par le Gouvernement de M.
Alain Juppé, le solde des créations et suppressions d'emplois
civils redevenant positif en 1998.
Elle se traduit également par la création des emplois-jeunes, par
la loi du 16 octobre 1997. Votre commission des finances admet l'urgence d'agir
sur le chômage des jeunes, mais elle doute de la viabilité
économique de ces emplois parapublics et craint qu'ils ne puissent
être pérennisés à terme autrement que par une
intégration dans la fonction publique.
Deuxièmement, votre commission des finances s'est opposée
à la restriction du dispositif d'allégement des charges sociales
sur les bas salaires résultant de l'article 115 de la loi de finances
pour 1998. Ce mécanisme, bien que lourd pour les finances publiques, est
vertueux car il modifie structurellement les comportements d'embauche des
employeurs et a vraisemblablement contribué à enrichir le contenu
de la croissance en emplois.
Le Gouvernement, qui a voulu gager par cette mesure d'économie le
financement des emplois jeunes, reconnaît aujourd'hui implicitement son
erreur en admettant les difficultés qui en sont résultées
pour les entreprises d'aide à domicile. Mais beaucoup d'autres secteurs
d'activité rémunérant leur personnel à des niveaux
voisins du SMIC ont été touchés.
Troisièmement, votre commission des finances partage entièrement
l'opinion de la commission des affaires sociales sur le caractère
néfaste de l'imposition autoritaire d'une réduction de la
durée du travail. L'impact effectif, en termes de créations
d'emplois, de cette mesure antiéconomique est pour le moins douteux.
Elle est rendue transitoirement incitative par un coûteux dispositif de
primes, source d'inégalités entre entreprises et d'effets
d'aubaine.
Votre rapporteur pour avis estime important de prendre date pour l'avenir sur
chacune de ces trois orientations du Gouvernement, car la croissance
actuellement retrouvée ne suffira pas toujours à en effacer les
conséquences.
Si les choix de la politique de l'emploi sont sujets à débat, il
existe indéniablement un consensus sur les modalités d'une action
plus efficace en matière de lutte contre les exclusions.
A cet égard, il est significatif que le présent texte reprenne
pour une large part les dispositions du projet de loi d'orientation relatif au
renforcement de la cohésion sociale présenté au nom de M.
Alain Juppé par M. Jacques Barrot. L'audition de Mme Martine Aubry
devant votre commission des finances a également confirmé une
certaine convergence de vues.
Fort de ce consensus, le gouvernement a fait de la lutte contre l'exclusion
l'une des priorités budgétaires, dans le cadre de la
préparation de la prochaine loi de finances.
Toutefois, votre commission des finances estime être dans son rôle
en rappelant que le consensus sur la nécessité d'agir plus
efficacement en matière de lutte contre les exclusions ne saurait
justifier n'importe quel niveau de dépense publique. La contrainte
financière s'impose ici comme ailleurs, et il ne s'agit pas tant de
dépenser plus, que de dépenser mieux.
D'autre part, ce serait une dangereuse facilité de penser qu'une
dépense publique est justifiée du seul fait qu'elle a une
finalité sociale. Votre rapporteur pour avis renvoie sur ce point aux
observations critiques de la Cour des comptes dans ses derniers rapports
publics, portant sur le revenu minimum d'insertion, les aides de l'Etat au
maintien et à la création d'emplois, les contrats emplois
solidarité, l'insertion des jeunes, et la politique d'intégration
des populations immigrées.
Le récent rapport de Mme Join-Lambert au Premier ministre se montre
également assez critique sur le fonds d'urgence sociale mis en place au
début de cette année en faveur des chômeurs, qui a
été abondé de 1 milliard de francs par un décret
d'avance en date du 16 janvier 1998. Par le biais de ce fonds, des sommes
importantes ont été dépensées en un temps record,
sans critères d'attribution définis, sans examen sérieux
des cas individuels et sans conditions, au risque de déstabiliser le
travail de terrain accompli depuis des années par les intervenants
sociaux.
Votre rapporteur pour avis n'hésite donc pas à affirmer que le
présent projet de loi d'orientation doit aussi répondre à
des préoccupations de bonne gestion des deniers publics.
L'accent mis sur la prévention des exclusions par des actions en amont
devrait réduire les situations dramatiques nécessitant un
traitement financièrement plus lourd.
La relance de l'insertion et l'encouragement à la sortie des dispositifs
d'assistance visent à amorcer une décrue du nombre des
bénéficiaires de minima sociaux.
L'évaluation et la mise en cohérence des actions devraient
permettre d'éliminer certaines dépenses inutiles et limiter les
possibilités d'optimisation ou de fraude à partir des dispositifs
existants.
De manière plus générale, votre rapporteur pour avis
considère que le financement de la lutte contre les exclusions doit
être gagé sur une véritable rigueur budgétaire.
C'est pourquoi, dans les développements qui suivent, il s'est
attaché à évaluer le coût exact du présent
projet de loi d'orientation et à examiner ses modalités de
financement.
Le présent projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre
les exclusions représente un coût budgétaire pour l'Etat de
15,9 milliards de francs sur trois ans.
Eu égard à ses incidences financières, il appelle de la
part de votre commission certaines précisions et observations tenant
tant au fond qu'à la présentation qui en a été
faite par le gouvernement.
II. UN PROBLÈME MÉTHODOLOGIQUE
A. UNE CONFUSION ENTRE LE PROJET DE LOI ET LE PROGRAMME
Soucieux
de clarté et de rigueur, votre rapporteur pour avis regrette la
confusion volontairement entretenue par le gouvernement entre le projet de loi
d'orientation et le "programme de prévention et de lutte contre les
exclusions" qui a été présenté en conseil des
ministres le 4 mars 1998.
En effet, le programme auquel fait référence le gouvernement
comprend, outre le projet de loi d'orientation, des "mesures déjà
annoncées" notamment dans le cadre de la loi de finances pour 1998, mais
pas toujours détaillées ou précisées, ainsi que des
projets de loi non encore déposés par le gouvernement, notamment
ceux relatifs à la couverture maladie universelle (CMU) et à
l'accès au droit
1(
*
)
.
Le gouvernement a joué de cette confusion. L'exposé des motifs
du présent projet de loi, ainsi que le tableau général
recensant les moyens financiers affectés figurant à la fin de
l'étude d'impact annexée au projet, font référence
au "programme de prévention et de lutte", tandis que le contenu
même de l'étude d'impact ne concerne que le projet de loi stricto
sensu.
De la même façon, présentant ce texte à
l'Assemblée nationale, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et
de la solidarité, a fait référence au programme pour
évoquer son coût financier, négligeant ainsi le montant
réel de l'engagement budgétaire de l'Etat au titre du
présent projet de loi.
Déroulement dans le temps du programme de
prévention
et de lutte contre les exclusions
Automne 1997
: Mesures déjà annoncées
notamment dans le cadre de la loi de finances pour 1998
Printemps 1998
: Projet de loi d'orientation relatif
à la lutte contre les exclusions
Automne 1998
: Mesures à venir notamment dans le
cadre des projets de loi sur la CMU et l'accès au droit
Votre rapporteur pour avis s'étonne de cette confusion et tient
à la dissiper : conformément à sa mission
2(
*
)
, il n'analysera donc ici que le seul coût
budgétaire du projet de loi dont a été saisi le
Sénat, qu'il s'agisse des charges directement ou indirectement
supportées par l'Etat. Ce projet de loi est un effet un "projet de loi
d'orientation" : il aura donc nécessairement des mesures
réglementaires d'application.
Cet examen précis et détaillé apparaît d'autant
plus indispensable que le rapport présenté à
l'Assemblée nationale au nom de la commission spéciale
3(
*
)
ne semble pas de nature à dissiper cette
ambiguïté. Il contribue, en effet, à entretenir la confusion
entre le projet et le programme et n'y consacre que de brefs commentaires
financiers
4(
*
)
, bien que le rapporteur ait tenu
à relever le caractère "peu précis" de certains
financements.
B. DES ÉVALUATIONS AMBIGUËS
Le
passage en revue des différentes mesures du présent projet de loi
d'orientation fait apparaître des contradictions, à l'image de
l'assouplissement de l'exonération de taxe foncière prévue
par l'article 29 du projet de loi : cette
"mesure n'a pas d'incidence
financière pour l'Etat"
selon l'étude d'impact alors que le
dossier de presse du programme fait référence à un montant
de 135 millions de francs sur trois ans.
De façon plus générale, cet examen fait ressortir des
lacunes qui conduisent votre rapporteur pour avis à s'interroger sur les
ambiguïtés de certaines évaluations de coûts.
La plupart des chiffrages reposent sur des hypothèses de limitation
quantitative des bénéficiaires, qui semblent fragiles au regard
de l'importance des besoins : 60.000 jeunes pour le programme TRACE ; 70.000
contrats emplois consolidés ; 30.000 emplois supplémentaires en
entreprises d'insertion ; 25.000 contrats de formation en alternance pour
adultes ; 20.000 logements aidés au titre de la
médiation locative ; etc.
Même s'il ne s'agit pas, juridiquement, de dispositifs "à guichet
ouvert", il sera difficile de refuser des demandes en cours d'année
simplement parce que les crédits initialement prévus seront
épuisés. Les dépenses à caractère social
constituent traditionnellement de gros postes d'ajustement en lois de finances
rectificative.
Certains dispositifs sont expérimentaux, mais leur
généralisation n'est pas chiffrée bien que
présentée comme certaine. C'est notamment le cas du dispositif de
lutte contre l'illettrisme, et des antennes régionales de l'Observatoire
national de la pauvreté et de l'exclusion.
D'autres mesures sont réputées n'avoir aucun coût, alors
même qu'elles tendent à créer des dispositifs nouveaux ou
à élargir le champ de dispositifs existants. C'est notamment le
cas de la nouvelle procédure de réquisition de logement avec
attributaire, et de l'extension du champ des emplois jeunes dans les DOM.
De même, les charges de gestion supplémentaires pour les
administrations publiques sont systématiquement minimisées, voire
considérées comme nulles, alors qu'elles impliquent parfois des
créations de postes. C'est notamment le cas du rétablissement des
bourses des collèges et de la mise en place de l'Observatoire national
de la pauvreté et de l'exclusion. Dans ce dernier cas, l'étude
d'impact estimait, en effet, que
"la création de postes
budgétaires est indispensable pour réaliser des recrutements de
qualité".
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis souligne qu'il ne faut pas
sous-estimer l'effet potentiellement inflationniste de l'amélioration de
l'information des populations concernées sur leurs droits. Dans son
principe, cet objectif du projet de loi est tout à fait louable. Mais
l'expérience prouve que, indépendamment de toute extension
juridique, le seul renforcement de l'accès effectif aux droits sociaux
existants contribue à accroître considérablement les
dépenses afférentes.
Enfin, le présent projet de loi d'orientation propose d'harmoniser et
d'étendre les mécanismes dits "d'intéressement", qui
permettent de cumuler dans certaines limites une rémunération
d'activité avec un minimum social. Ce dispositif est judicieux car il
facilite les processus de réinsertion par l'emploi en corrigeant les
effets pervers des "trappes à inactivité", créées
par la faiblesse de l'écart entre les revenus de remplacement et les
revenus d'activité en bas de l'échelle des salaires.
Néanmoins, il est susceptible de générer des effets
d'aubaine et des fraudes pures et simples, tant de la part des
bénéficiaires que de celle des entreprises qui les emploient. Le
décret prévu devra donc le calibrer soigneusement, en
prévoyant une réduction progressive du cumul, et des
délais de carence entre deux cumuls. A cet égard, on peut
s'inquiéter de la mesure votée par les députés
contre l'avis du gouvernement, tendant à permettre le cumul d'un contrat
emploi solidarité (CES) avec une activité à mi-temps. En
effet, comme l'a fait observer avec raison Mme Martine Aubry, les CES devraient
être, par définition, réservés aux personnes inaptes
à assurer un emploi ordinaire, même à mi-temps.
Par ailleurs, ce mécanisme d'intéressement est
considéré par le gouvernement comme n'ayant aucun coût, car
l'accroissement des dépenses de minima sociaux
généré dans un premier temps serait compensé, dans
un second temps, par la sortie des bénéficiaires des dispositifs
d'assistance.
Ce raisonnement repose sur un pari dont on ne peut que
souhaiter le succès, mais qui reste assez audacieux.
III. UN CHIFFRAGE CRITIQUABLE
Sur la base des chiffres fournis par le gouvernement 5( * ) concernant le coût du programme, votre rapporteur pour avis a mis en évidence certains écarts entre le chiffrage présenté par le gouvernement et celui recalculé par votre commission 6( * ) .
A. LES MESURES DÉJÀ ANNONCÉES : 19,2 ET NON 15,8 MILLIARDS DE FRANCS
Le
gouvernement ne fait état que de 15,815 milliards de francs de
mesures "déjà annoncées", mais il a omis d'y inclure le
montant du cofinancement apporté par le Fonds social européen
(FSE) au titre de l'ingénierie des "emplois-jeunes" (225 millions de
francs), des mesures de développement des partenariats culturels locaux
votées lors de la dernière loi de finances (90 millions de
francs), le coût de la loi instaurant une allocation spécifique
pour les chômeurs ayant cotisé plus de 40 annuités
7(
*
)
, soit 963 millions de francs, ainsi que la
revalorisation de l'allocation spécifique de solidarité au
1
er
janvier 1998 soit 2,571 milliards de francs sur trois ans.
Le coût total s'élève ainsi à 19,242 milliards
de francs.
Récapitulation des mesures déjà
annoncées figurant dans le programme de prévention
et de
lutte contre les exclusions
(En millions de francs)
|
|
|
|
Coût cumulé 1998-2000 |
Programmes nouveaux services nouveaux emplois |
920 |
3.220 |
5.520 |
9.660 |
Ingénierie emplois jeunes |
18 |
64 |
110 |
192 |
Ingenierie emplois-jeunes (cofinancement FSE) |
75 |
75 |
75 |
225 |
Fonds cantine (PLF 1998) |
290 |
290 |
290 |
870 |
Accroissement des moyens du FSL (PLF1998) |
65 |
65 |
65 |
195 |
PLA intégration (PLF 1998) |
670 |
670 |
670 |
2.010 |
Plans de partenariat culturel locaux (PLF 1998) |
30 |
30 |
30 |
90 |
Allocation spécifique d'attente |
263 |
350 |
350 |
963 |
Revalorisation de l'ASS et de l'AI |
1.177 |
1.177 |
1.177 |
3.531 |
Contrats déjà affectés au TRACE |
137 |
548 |
821 |
1.506 |
Total |
3.645 |
6.489 |
9.108 |
19.242 |
B. LES MESURES À VENIR : 8,4 ET NON 5 MILLIARDS DE FRANCS
Le gouvernement n'intègre en effet dans les "mesures à venir" que le coût du projet de loi sur la couverture maladie universelle (CMU) et oublie celui du projet sur l'accès au droit ( 132 millions de francs), des mesures relatives à l'action sociale (380 millions de francs), des mesures en faveur de l'éducation (50 millions de francs), les conséquences du cumul entre l'allocation parentale pour jeune enfant (APJE) et le revenu minimum d'insertion (RMI) (333 millions de francs), et le développement de la formation en alternance (2.483 millions de francs), pour un total de 3,378 milliards de francs.
Récapitulation des mesures à venir figurant
dans le programme de prévention et de lutte contre les exclusions
(En millions de francs)
C. LES COFINANCEMENTS : 7,5 ET NON 8,1 MILLIARDS DE FRANCS
L'écart avec le chiffre du gouvernement provient de deux mesures. D'une part, des exonérations de charges sociales non compensées à la sécurité sociale, qui seront versées au titre de mesures à venir relatives au développement de la formation en alternance, pour un montant de 378 millions de francs. D'autre part, 225 millions de francs consacrés à l'ingénierie des emplois-jeunes, c'est à dire qui servent à cofinancer des mesures déjà été annoncées par le gouvernement.
D. LE COÛT BUDGÉTAIRE POUR L'ETAT : 15,9 ET NON 22,4 MILLIARDS DE FRANCS
Le montant des mesures nouvelles à la charge de l'Etat figurant dans le présent projet de loi d'orientation est obtenu par différence, une fois opérés tous les reclassements précédents.
Récapitulation
(En millions de francs)
|
Chiffres du Gouvernement |
Chiffres recalculés par la commission des finances |
|
Mesures déjà annoncées |
15.815 |
19.242 |
+ 3.427 |
Mesures à venir |
5.000 |
8.378 |
+ 3.378 |
Mesures nouvelles à la charge de l'Etat : coût budgétaire du projet de loi |
|
|
|
Cofinancement du projet de loi |
8.151 |
7.549 |
- 602 |
Coût total |
51.412 |
51.111 |
- 301 |
IV. UN ENGAGEMENT BUDGÉTAIRE DE L'ETAT DE 15,9 MILLIARDS DE FRANCS SUR TROIS ANS
A. DES CREDITS CONCENTRES SUR LES AIDES À L'EMPLOI
1. Les mesures destinées à favoriser l'accès à l'emploi bénéficient de 12,769 milliards de francs de crédits, soit 80,10% du montant total de l'engagement de l'Etat
Ces crédits sont principalement consacrés,
pour 8,504 milliards de francs, au recentrage des contrats emploi
solidarité sur les personnes les plus en difficulté et au
développement du rôle en matière d'insertion des contrats
emploi consolidé. Une somme de 1,271 milliard de francs est
affectée au développement de la formation en alternance au profit
des adultes ; 1,081 milliard de francs sont destinés au
renforcement du secteur de l'insertion par l'activité économique,
et 400 millions à la mise en place d'un fonds de soutien à
l'insertion par l'activité économique, tandis que
761 millions bénéficient au programme TRACE (trajet
d'accès à l'emploi).
Par ailleurs, 670 millions de francs sont affectés à des
mesures destinées à l'accompagnement vers l'emploi.
2. Les mesures destinées à faciliter l'accès au logement bénéficient de 854 millions de francs de crédits, soit 5,36 % du montant total
Il s'agit principalement, pour une somme de 320 millions de francs, de crédits nouveaux affectés au fonds de solidarité logement. En outre, 150 millions sont destinés à développer la médiation locative, 150 millions sont affectés à la modernisation des procédures de réquisition, 123 millions sont consacrés à la lutte contre le saturnisme, tandis que 56 millions sont destinés aux Centres communaux d'action sociale (CCAS).
3. Le renforcement de l'accès aux soins bénéficie de 590 millions de francs, soit 3,70 % du montant total
Ces crédits sont destinés à la généralisation des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins (PRAPS).
4. Les droits sociaux et les moyens d'existence des plus démunis sont destinataires de 280 millions de francs
1,76 % du montant total est ainsi affecté au titre du mécanisme d'intéressement des bénéficiaires de l'allocation de parent isolé (API).
5. L'accès à la culture : 801 millions de francs, soit 5,02 % du montant total
Il s'agit pour l'essentiel du rétablissement des bourses scolaires (450 millions de francs) et de mesures diverses en faveur de la jeunesse, des sports ou du tourisme.
6. Le renforcement de l'efficacité des acteurs sociaux : 648 millions de francs
Ces crédits correspondent au renforcement de l'accueil en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), pour 505 millions de francs, et au développement de la formation des acteurs sociaux, pour 130 millions, tandis que 13 millions sont consacrés à la mise en place de l'Observatoire national de la pauvreté.
B. UNE MONTÉE EN CHARGE FORTEMENT PROGRESSIVE
La montée en charge du coût budgétaire du projet de loi est rapide : en l'espace de trois ans, les crédits décuplent en passant de 1,092 milliard de francs en 1998 à 5,450 milliards en 1999, et 9,400 milliards de francs en 2000. Le coût en année pleine s'élève ainsi à près de 10 milliards de francs, montant qu'il n'est pas inintéressant de rapprocher de celui du récent accord salarial dans la fonction publique, qui est estimé à 12 milliards de francs.
Pour la première année, le coût d'un milliard de francs pour l'Etat peut, par ailleurs, être comparé au coût prévisionnel du projet de loi d'orientation relatif au renforcement de la cohésion sociale dont la discussion fut interrompue en avril 1997. Celui-ci avait été évalué 8( * ) à 2,5 milliards de francs, dont 1,7 milliard sur le budget du logement et 768 millions sur le budget des affaires sociales.
V. L'IMPORTANCE DES COFINANCEMENTS
A. UN APPORT REPRÉSENTANT LA MOITIÉ DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE DE L'ETAT
Le
projet de loi repose sur une forte complémentarité entre l'action
budgétaire de l'Etat et celle des collectivités locales
(3,476 milliards), du fonds social européen (1,940 milliard),
des fonds de la formation professionnelle (961 millions), des opérateurs
privés (879 millions), et des organismes de sécurité
sociale (293 millions).
Il convient par ailleurs de souligner que ces cofinancements sont
particulièrement importants, voire prépondérants, pour
certaines des " mesures phares " de ce projet de loi.
Ainsi, le coût annoncé du programme TRACE est de
5,132 milliards, mais l'Etat n'en financera au titre du présent
projet que 761 millions, soit moins de 15%. De même, les programmes
locaux pour l'insertion par l'emploi (PLIE), d'un montant total estimé
à 1,620 milliard, sont entièrement cofinancés,
à parts égales, par le FSE et les collectivités locales.
|
1998 |
1999 |
2000 |
Cumul 1998/2000 |
Coût du programme TRACE |
417 |
1.906 |
2.809 |
5.132 |
Dont contrats |
304 |
1.495 |
2.243 |
4.042 |
Mesures déjà annoncées |
137 |
548 |
821 |
1.506 |
Cofinancement collectivités locales |
|
|
|
|
Coût net pour l'Etat |
0 |
0 |
0 |
0 |
Dont mesures d'accompagnement |
|
|
|
|
Cofinancement FSE |
30 |
90 |
90 |
210 |
Cofinancement collectivités locales |
|
|
|
|
Coût net total pour l'Etat |
77 |
283 |
401 |
761 |
B. UNE FORTE CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS LOCALES
La charge supportée par les collectivités locales est particulièrement lourde : elles sont sollicitées à hauteur de 45 % des cofinancements.
Cette
complémentarité entre l'action de l'Etat et celle des
cofinanciers est affichée, recherchée et espérée
par le gouvernement. Elle ne semble cependant pas toujours
avérée.
Ainsi, les financements du FSE ne sont connus que jusqu'en 1999, année
d'échéance des programmes en cours. Leur estimation recoupe la
présentation faite par le gouvernement de la participation de ces fonds,
dans le cadre de son "plan national d'action pour l'emploi".
Il apparaît que les négociations avec les régions n'ont pas
encore commencé, l'Association des présidents de conseils
régionaux n'ayant pas même été consultée au
moment de l'élaboration de ce projet, ni associée à sa
préparation alors même qu'elle s'est déclarée
désireuse de participer à cette consultation. Or les
régions doivent, en principe, financer à elles seules près
de la moitié du programme TRACE (2,655 milliards de francs sur
5,132 milliards de francs, soit 51,7 %).
De même, l'Association des présidents de conseils
généraux constatait que les cofinancements des partenaires
étaient
"à ce jour"
mal définis et étaient
"souvent la conséquence indirecte de mesures qui sont à
l'initiative de l'Etat".
La répartition, par type de mesures, de la
part respective des crédits de l'Etat et de ceux cofinancés
souligne bien cette importance tant quantitative que qualitative de l'apport
financier des "cofinanceurs".
Moyens
financiers affectés au projet de loi d'orientation
relatif à la lutte contre les exclusions
Tableau récapitulatif
(En millions de francs)
|
1998 |
1999 |
2000 |
Coût cumulé 1998-2000 |
I - Mesures d'accès à l'emploi |
||||
Crédits d'Etat |
552 |
4.226 |
7.991 |
12.769 |
Cofinancement |
521 |
2.386 |
3.470 |
6.377 |
Total |
1.073 |
6.612 |
11.461 |
19.146 |
II - L'accès et le maintien dans le logement |
||||
Crédits d'Etat |
143 |
355 |
356 |
854 |
Cofinandement |
262 |
349 |
349 |
960 |
Total |
405 |
704 |
705 |
1.814 |
III - L'accès aux soins |
||||
Crédits d'Etat |
90 |
250 |
250 |
590 |
Cofinancement |
17 |
61 |
61 |
139 |
Total |
107 |
311 |
311 |
729 |
IV - Les droits sociaux |
||||
Crédits d'Etat |
56 |
112 |
112 |
280 |
Cofinancement |
15 |
29 |
29 |
73 |
Total |
71 |
141 |
141 |
353 |
V - L'accès à l'éducation et à la culture |
||||
Crédits d'Etat |
155 |
275 |
371 |
801 |
Total |
155 |
275 |
371 |
801 |
VI - L'efficacité des acteurs sociaux |
||||
Crédits d'Etat |
96 |
232 |
320 |
648 |
Total |
96 |
132 |
320 |
648 |
Total crédits d'Etat |
1.092 |
5.450 |
9.400 |
15.942 |
Total cofinancements |
815 |
2.825 |
3.909 |
7.549 |
Total général |
1.907 |
8.275 |
13.309 |
23.491 |
VI. LE COÛT DES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Nonobstant les dispositions constitutionnelles ou organiques
limitant l'initiative parlementaire en matière financière, le
coût budgétaire du projet de loi a été accru en
première lecture par l'Assemblée nationale. Celle-ci s'est par
ailleurs désintéressée de l'impact financier global de ce
texte, ainsi que votre rapporteur pour avis l'a déjà
relevé.
D'après les informations que votre rapporteur pour avis a pu obtenir du
gouvernement, trois dispositions votées par l'Assemblée nationale
lui apparaissent susceptibles de générer des coûts
budgétaires significatifs.
Outre la transformation en dégrèvements de certaines
exonérations de taxe foncière, pour un coût de l'ordre de
20 millions de francs, et l'extension de l'aide aux chômeurs
créateurs d'entreprise aux salariés reprenant leur
société, pour un coût de 45 millions de francs, une mesure
présente un coût financier particulièrement
conséquent.
Il s'agit de la suppression de la taxe forfaitaire sur les frais d'huissier qui
s'élève, selon les services du ministère de
l'économie et des finances, à 360 millions de francs. Cette
mesure a été votée contre l'avis du gouvernement. Votre
rapporteur pour avis s'interroge d'ailleurs sur la pertinence et le
caractère réaliste de son gage, qui aboutit à tripler les
droits sur les métaux précieux.
Le montant total annuel des modifications apportées par
l'Assemblée nationale peut ainsi être chiffré à 425
millions de francs, soit 1,275 milliard de francs sur trois ans, soit un
surcoût de 8 % du montant total des crédits
budgétaires affectés initialement par le gouvernement au
présent projet de loi.
VII. UN FINANCEMENT PAR REDEPLOIEMENT BUDGETAIRE
A. UN PRINCIPE ADMIS PAR LE GOUVERNEMENT
Mme
Martine Aubry a indiqué, lors de son audition par votre commission le
jeudi 28 mai 1998, que le présent projet de loi d'orientation serait
financé par des redéploiements de crédits, et qu'elle en
espère notamment des économies sur les dépenses pour
l'emploi ainsi que sur les crédits consacrés aux minima sociaux.
Votre commission ne peut que se féliciter de la position de principe
ainsi adoptée par le gouvernement, qui rejoint avec quelque retard celle
qu'elle-même avait défendue lors de la discussion de la
dernière loi de finances à l'automne 1997.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, il devrait
être procédé en 1998 à des redéploiements sur
les crédits de l'emploi, mais pas sur ceux consacrés à
l'action sociale. On rappellera par ailleurs qu'une provision de 225 millions
de francs a été inscrite au budget de l'emploi pour couvrir,
très partiellement, le coût du présent projet de loi lors
de sa première année d'application.
Pour 1999 et 2000, les redéploiements s'effectueraient dans le cadre
d'un redéploiement général sur l'ensemble du budget de
l'Etat.
B. UNE APPLICATION EFFECTIVE À CONFIRMER
Au-delà des déclarations d'intention, votre
commission
s'attachera à vérifier la réalité des
redéploiements budgétaires annoncés.
Or elle ne peut qu'exprimer la plus vive inquiétude devant les
orientations retenues par le ministre de l'économie et des finances pour
le prochain budget. Après des années d'une certaine rigueur,
qui ont permis à la France de se qualifier pour l'euro dans un contexte
difficile et portent aujourd'hui leurs fruits, le gouvernement s'apprête
à laisser dériver à nouveau les dépenses de l'Etat.
En effet, selon le rapport présenté par le gouvernement pour le
débat d'orientation budgétaire, les crédits du budget
général augmenteraient de 2,2 % en 1999. Ce pourcentage
correspond à un accroissement des dépenses de 35 milliards de
francs, dont 23 milliards de francs sont d'ores et déjà
préemptés par la fonction publique, l'accord salarial
récemment signé coûtant à lui seul 12 milliards de
francs.
De ce fait, seul le dynamisme des recettes fiscales résultant de la
croissance économique permettrait d'abaisser le déficit
budgétaire à 2,7% du PIB. Toutefois, ce niveau resterait encore
insuffisant pour enrayer la croissance spontanée de la dette publique.
Le ministre de l'économie et des finances a indiqué devant la
commission des finances de l'Assemblée nationale que les
redéploiements de crédits civils porteraient en 1999 sur 20
milliards de francs, ce qui est faible au regard de la masse du budget. Ces
redéploiements apparaissent insuffisants pour le financement de toutes
les priorités retenues, qui serait assuré principalement par des
recettes nouvelles, à hauteur de 30 milliards de francs.
Ces questions seront évoquées plus en détail dans le cadre
du prochain débat d'orientation budgétaire.
Néanmoins, ce retour à un certain laxisme financier, sous
couvert d'une croissance spontanée des recettes, conduit à douter
sérieusement de la réalité des redéploiements
budgétaires annoncés pour financer le présent projet de
loi d'orientation.
CHAPITRE
II
LE TRAITEMENT DES SITUATIONS DE SURENDETTEMENT
I. LE DISPOSITIF LÉGISLATIF DE LUTTE CONTRE LE SURENDETTEMENT
A. LA LOI DU 31 DÉCEMBRE 1989
La fin
des années quatre-vingt a vu la montée d'un
phénomène inquiétant : le surendettement. Ainsi, en
1989, quelque 200.000 ménages se trouvaient dans l'incapacité de
faire face aux échéances de remboursement des prêts qu'ils
avaient contractés.
En outre, faute d'une procédure permettant de traiter l'ensemble des
créances, les débiteurs défaillants devaient assigner
séparément chacun de leurs créanciers sur le fondement de
l'article 1244-1 du code civil pour obtenir du juge autant de moratoires.
La loi du 31 décembre 1989, relative à la prévention et au
règlement amiable des difficultés liées au surendettement
des particuliers et des familles a rompu avec cette démarche
bilatérale et a institué un dispositif offrant une vue d'ensemble
de la situation du débiteur et des possibilités de traitement
global.
Cette loi institue, dans chaque département, au moins une commission de
surendettement des particuliers, composée de cinq membres : le
représentant de l'Etat dans le département,
président ; le trésorier-payeur général,
vice-président ; le représentant local de la Banque de
France qui en assure le secrétariat, ainsi que deux personnalités
choisies par le représentant de l'Etat dans le département,
l'une sur proposition de l'Association française des
établissements de crédit et l'autre sur proposition des
associations familiales de consommateurs.
Cette commission est chargée de parvenir à la conclusion d'un
plan amiable de règlement du passif accepté par le
débiteur et ses créanciers.
En cas d'échec de la phase de conciliation, le juge peut être
saisi par le débiteur ou par les créanciers d'une demande de
redressement judiciaire civil. Le plan établi par le juge est alors
imposé aux parties.
B. LA LOI DU 8 FÉVRIER 1995
Si la
loi du 31 décembre 1989 s'est heurtée, au début de sa mise
en oeuvre, à certains blocages liés notamment à l'attitude
peu coopérative de certains créanciers, elle a été
globalement efficace puisque le taux de conclusion des plans amiables s'est
régulièrement accru.
Le dispositif a toutefois été amélioré par la loi
du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et
à la procédure civile, pénale et administrative qui a
renforcé le rôle des commissions de surendettement.
En effet, la loi précitée a pris en compte l'engorgement des
tribunaux et a, en conséquence, recentré le dispositif sur les
commissions de surendettement.
La phase de conciliation est maintenue, mais en cas d'échec, c'est la
commission qui, à la demande du débiteur, formule des
recommandations afin d'apurer les dettes du débiteur. Le juge se
contente alors de conférer force exécutoire à ces
recommandations.
En revanche, si les mesures recommandées sont contestées dans les
quinze jours de la notification, le juge retrouve pour statuer la
plénitude de ses pouvoirs. Il peut retenir tout ou partie des mesures
recommandées par la commission, les compléter et prévoir
des mesures nouvelles dans les limites fixées par l'article L. 331-7 du
code de la consommation.
Cette procédure a connu un grand succès. Entre le 1
er
mars 1989 et le 31 décembre 1997, 619.389 dossiers ont été
transmis aux commissions.
Rythme des dépôts de dossiers auprès des commissions de surendettement |
||||||||
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Dossiers déposés |
91.000 |
68.000 |
64.000 |
69.000 |
68.000 |
70.000 |
87.000 |
96.000 |
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI
A. LES LIMITES DU DISPOSITIF ACTUEL
Pourtant, ce dispositif semble aujourd'hui atteindre ses
limites du
fait du changement de nature du surendettement.
En effet, les personnes visées par la loi de 1989 étaient
essentiellement ce que l'on appelle communément des "surendettés
actifs", c'est-à-dire des ménages qui s'étaient
endettés au-delà de leur capacité de remboursement.
Depuis 1993, le nombre de "surendettés passifs", c'est-à-dire de
ménages surendettés suite à une chute de leurs revenus
tend à augmenter.
Dans son rapport d'information, rédigé avec notre collègue
Jean-Jacques Hyest
9(
*
)
, votre rapporteur
pour avis faisait état d'analyses préoccupantes sur
l'évolution de la capacité de remboursement des ménages.
Plusieurs études étaient citées.
Selon la Banque de France, "
auprès de la commission du surendettement
du Maine-et-Loire, la part des dossiers dans lesquels la capacité de
remboursement est inexistante est passée de 9 % en 1992 à
24 % en 1996.
En outre, l'aggravation de la crise sociale augmente le nombre de situations
inextricables auxquelles sont confrontées les commissions. Ainsi,
CETELEM, qui représente les professionnels du crédit dans 22
commissions départementales, estime à près de 40 % le
nombre de dossiers concernant des particuliers sans ressources.
"
Or, l'évolution de la nature même du surendettement "grippe" le
dispositif.
En effet, le nombre de dossiers déposés augmente fortement depuis
la fin de 1994.
Nombre
de dossiers déposés pour les trois premiers mois
|
|
Année |
Dossiers déposés |
1991
|
19.570
|
Le
tableau ci-dessus révèle ainsi que le premier trimestre 1998 est
celui qui connaît le nombre de dépôts le plus
élevé depuis l'entrée en vigueur de la procédure.
Or, cette augmentation du nombre des dossiers déposés semble
liée au développement des moratoires. En effet, faute de revenus
suffisants de la part des débiteurs, les commissions de surendettement
doivent recourir de plus en plus souvent à cette
procédure.
Part
des plans de surendettement comportant des moratoires
|
|||||||||||||
|
1997 |
1998 |
|||||||||||
|
mars |
avril |
mai |
juin |
juil. |
août |
sept. |
oct. |
nov. |
déc. |
janv. |
févr. |
mars |
Phase amiable |
25,1 |
33,3 |
33,3 |
31,7 |
31,5 |
33,1 |
34,1 |
34,0 |
34,8 |
37,3 |
33,5 |
37,1 |
39,4 |
Phase de recommandation |
65,1 |
61,4 |
52,0 |
57,7 |
58,7 |
59,4 |
60,7 |
62,2 |
56,6 |
59,6 |
59,9 |
65,1 |
64,1 |
Phase amiable + phase de recommandation |
33,5 |
39,8 |
37,9 |
37,7 |
37,5 |
38,2 |
39,8 |
39,7 |
39,7 |
42,6 |
39,5 |
43,0 |
44,6 |
Ainsi,
il apparaît qu'en 1997, la part des plans de redressement comportant des
moratoires, phase amiable et phase de recommandation confondues, est
passée de 33,5 % en mars à 42,6 % en décembre.
Or, la multiplication des moratoires risque de conduire le système
actuel de traitement du surendettement vers une impasse. Les cas
d'amélioration de la situation du débiteur ne sont pas
très fréquents. En conséquence, lorsque la période
fixée par le moratoire est écoulée, le dossier est
généralement déposé de nouveau auprès des
commissions de surendettement qui n'ont guère d'autre solution que de
proposer un nouveau moratoire. La multiplication des réexamens risque
d'engorger les commissions sans pour autant apporter une solution
définitive à ces cas difficiles.
B. LE NOUVEAU DISPOSITIF
Devant
ce phénomène, le Gouvernement a présenté un nouveau
dispositif qui tient compte de l'insolvabilité de certains
débiteurs et en tire les conséquences.
Le dispositif proposé par le présent projet de loi maintient la
phase amiable et la phase de recommandations. Toutefois, la nature des
recommandations varie selon la situation du débiteur. Ainsi, lorsque la
commission constate l'insolvabilité du débiteur
caractérisée par l'absence de biens saisissables de nature
à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, elle peut recommander
la suspension de l'exigibilité des créances autres
qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder trois ans.
A l'issue de cette période, la commission réexamine la situation
du débiteur. Si sa situation le permet, la commission recommande tout ou
partie des mesures prévues dans l'actuel dispositif : report ou
rééchelonnement des dettes, imputation des paiements d'abord sur
le capital, réduction des taux d'intérêt relatifs aux
sommes correspondant aux échéances reportées ou
rééchelonnées et, en cas de vente forcée,
réduction du montant de la fraction des prêts immobiliers restant
due aux établissements de crédit après la vente.
En revanche, si le débiteur reste insolvable, la commission recommande,
par une proposition spéciale et motivée, la réduction et
l'effacement de tout ou partie des dettes autres qu'alimentaires.
Ce dispositif doit donc permettre de résoudre les cas les plus
désespérés. Il est cependant strictement encadré
pour éviter tout détournement de la procédure. Ainsi,
l'effacement des dettes n'intervient qu'après un double examen de la
situation du débiteur à deux instants éloignés dans
les temps. En outre, cette procédure est sous le contrôle du juge,
qui doit homologuer la décision de la commission et peut revenir sur les
propositions de celle-ci s'il estime qu'elles ne sont pas adaptées
à la situation du débiteur. Enfin, le débiteur ayant
bénéficié d'un effacement de dettes est inscrit au fichier
des incidents de paiement pendant huit ans et ne peut bénéficier
d'un nouvel effacement durant cette période.
Votre rapporteur tient à faire remarquer que le texte initial
proposé par le gouvernement excluait les dettes fiscales, parafiscales
ou envers les organismes de sécurité sociale non seulement du
moratoire, mais également de la réduction ou de l'effacement des
dettes.
L'Assemblée nationale a supprimé cette mesure afin
d'établir une égalité entre les créanciers,
satisfaisant ainsi une revendication de longue date des établissements
de crédit et des professions bancaires.
Votre rapporteur pour avis rejette cette banalisation des dettes fiscales alors
même que celles-ci sont insignifiantes dans les dossiers des
débiteurs susceptibles de bénéficier du nouveau dispositif
et que l'administration fiscale dispose d'une procédure
spécifique de remise gracieuse.
Votre rapporteur souhaiterait également présenter quelques
remarques sur le présent projet de loi.
Tout d'abord, il se félicite que ce texte se soit largement
inspiré du rapport sur le surendettement qu'il a rédigé
avec notre collègue Jean-Jacques Hyest. Toutefois, ce constat
n'empêche pas certaines critiques.
D'une part, la dimension sociale n'est pas assez prise en compte, aussi bien
dans l'instruction des dossiers que dans le suivi du plan de redressement.
A cet égard, votre rapporteur souhaiterait rappeler certaines
propositions faite dans le rapport précité :
• prévoir la présence d'un travailleur social
siégeant aux réunions de la commission de surendettement avec
voix consultative ;
• développer une coopération plus étroite entre les
secrétariats des commissions de surendettement et l'ensemble des acteurs
sociaux dans la phase d'instruction des dossiers de surendettement ;
• instaurer un mécanisme contractuel de suivi de la mise en oeuvre
des plans confié à un conseiller en économie sociale et
familiale.
En effet, un plan peut durer huit ans, et exige de gros sacrifices de la part
des ménages. L'absence de suivi augmente de manière notable les
risques d'incidents de paiement et, à terme, l'abandon du plan.
D'autre part, votre rapporteur pour avis s'étonne qu'aucune mesure ne
soit prise pour remédier à l'absence de statistiques. Le rapport
d'information avait soulevé le manque d'éléments
statistiques en quantité et en qualité suffisantes. Or, les
auditions menées pour analyser le présent projet de loi et
rédiger ce rapport ont montré que cette lacune était loin
d'être compensée et que le gouvernement prend des dispositions
sans connaître véritablement leur impact, faute de statistiques
fines et pertinentes.
Enfin, votre rapporteur est persuadé que ce texte aurait
mérité de constituer un projet de loi à part
entière.
A cet égard, votre rapporteur estime que son incorporation dans le
projet de loi d'orientation sur la lutte contre les exclusions risque de
conduire à des confusions. Certes, la nature du surendettement a
évolué et le nombre de surendettés passifs a fortement
augmenté. La réalité du surendettement reste cependant
complexe et mêle les deux composantes, surendettement passif et actif.
Il résulte de ces considérations que les surendettés sont
loin d'être tous des exclus, et que seuls 7 % des dossiers laissent
apparaître un endettement non bancaire.
Dès lors, et même si votre rapporteur défend avec vigueur
la nécessité d'aider les débiteurs surendettés
à sortir de cette situation difficile, il ne faudrait pas confondre
traitement du surendettement et assistanat. La procédure collective
n'est pas un droit acquis et les débiteurs ont des devoirs, comme celui
d'être de bonne foi, celui de n'accomplir aucun acte qui aggraverait leur
insolvabilité et celui de faire preuve d'un esprit de compromis dans
l'élaboration du plan.
En contrepartie, il est indispensable pour le succès de la
procédure que les commissions de surendettement laissent à la
disposition des débiteurs les ressources nécessaires aux
dépenses courantes minimales du ménage.
CHAPITRE III
LES PROPOSITIONS DE LA
COMMISSION
I. LES DISPOSITIONS FISCALES ET FINANCIÈRES
A
l'exception du volet relatif au traitement des situations de
surendettement
, les dispositions à portée financière
ou fiscale du présent projet de loi d'orientation dont votre commission
s'est saisie pour avis présentent une cohérence d'ensemble
faible. De fait, ces différentes mesures constituent en quelque sorte un
volet portant diverses dispositions d'ordre économique et financier
" ciblé "
, principalement, sur des objectifs relatifs,
d'une part, à la promotion du logement en faveur des personnes
défavorisées et, d'autre part, à la prévention de
l'aggravation des situations d'exclusion pouvant résulter des coupures
d'accès à l'énergie, à l'eau ou au
téléphone, des difficultés à disposer d'un compte
bancaire ou encore de l'impossibilité à accéder à
des produits de première nécessité.
Sur cet ensemble de mesures hétéroclites, votre commission des
finances ne pouvait disposer d'une véritable " philosophie "
d'amendement. La plupart des modifications qu'elle vous soumettra à
l'occasion de l'examen des articles s'ordonnent cependant, autour d'un certain
nombre d'objectifs :
•
Refuser des dispositions marquées par un fort
caractère d'affichage politique
: la taxe sur les logements vacants,
prévue à l'article 30 du présent projet de loi, est
apparue à votre commission abusivement considérée comme
une mesure destinée à lutter contre l'exclusion,
inégalitaire, et de surcroît inapplicable en l'absence de tout
outil de recensement de la vacance volontaire. Elle a donc adopté un
amendement de suppression de cet article.
•
Prévoir la compensation des allégements de
fiscalité locale
d'autant plus généreusement
accordés par l'Etat qu'ils n'entraînent pour lui aucune perte de
ressources ; il s'agit par là de confirmer l'hostilité de
principe de la commission des finances envers la propension des gouvernements
successifs à faire financer des politiques nationales par les
collectivités locales.
C'est pourquoi elle vous proposera des
amendements tendant à prévoir la compensation des pertes de
recettes résultant des allégements de taxe d'habitation et de
taxe foncière sur les propriétés bâties
prévus respectivement par les articles 25 bis et 29 du présent
projet de loi.
Cette " correction " est apparue d'autant plus
nécessaire que les pertes de recettes résultant de ces mesures
seront probablement concentrées sur les collectivités où
les phénomènes d'exclusion sont les plus importants et où
les bases fiscales sont souvent faibles.
•
Limiter à leur objectif de lutte contre l'exclusion
les
allégements ainsi redéfinis : tel est le sens de deux des
amendements présentés à l'article 29.
•
Revenir en tout ou partie sur la rédaction un peu
hâtive de certains articles
introduits au cours de la discussion de
ce projet à l'Assemblée nationale, tel est, notamment, des
amendements proposés aux articles 28 ter, 40 C et 73 bis. Il s'agit de
mieux cibler certaines de ces dispositions qui, accordant en apparence des
avantages fiscaux, pénaliseraient en fait certains contribuables
(article 28 ter) ou laisserait une marge d'appréciation trop importante
à l'administration pour que l'avantage fiscal soit véritablement
opérant (article 40 C)
•
Laisser une place aux négociations contractuelles
plutôt que d'imposer par la loi des mesures trop contraignantes.
C'est l'objet des deux amendements que votre commission a adopté
à l'article 73 relatif au droit au compte bancaire, supprimant la
fixation par décret des tarifs de services bancaires de base et
l'obligation d'une notification motivée pour l'ensemble des
clôtures de comptes.Comme pour la taxe sur les logements vacants, elle a
souhaité que l'objectif de lutte contre les exclusions ne soit pas
l'occasion d'adopter des mesures trop directives, dont la portée
dépasserait largement l'ambition de répondre aux besoins des
personnes les plus défavorisées.
II. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU SURENDETTEMENT
S'agissant des dispositions relatives au traitement des
situations de surendettement
dont votre commission s'est saisie pour avis,
la plupart des amendements soumis à l'approbation de la commission
visent à supprimer des dispositions votées par l'Assemblée
nationale dont l'objet paraît louable à première vue mais
qui,
in fine
, risquent d'aboutir au résultat contraire de
l'objectif recherché. Les amendements adoptés par la commission
s'ordonnent autour de cinq objectifs :
•
Ne pas interdire aux créanciers et aux débiteurs de
rémunérer la personne de leur choix pour les aider
dans la
procédure de surendettement devant la commission, sous prétexte
de vouloir lutter contre les officines de dettes (article 44 et à
article 48). En effet, les dispositions votées par l'Assemblée
nationale conduiraient en réalité à empêcher la
rémunération d'un avocat. Conscient toutefois du problème
soulevé par les cabinets de gestion des dettes, la commission a
adopté un amendement créant un article additionnel avant
l'article 42 et visant à interdire
de facto
les activités
de ces derniers.
• Ne pas restreindre les pouvoirs de la commission en cas
d'échec de la conciliation
en rétablissant la
possibilité, pour les commissions, de recommander le report d'une partie
des dettes (article 47). Votre commission a également craint que la
disposition votée par l'Assemblée nationale qui consiste à
abaisser automatiquement le taux d'intérêt des prêts au taux
légal en phase de recommandation conduise au rejet systématique
par les débiteurs de la phase amiable au profit de la phase de
recommandation, puisque cette dernière leur est plus favorable. Elle a
donc adopté un amendement de suppression de cette disposition (article
47).
•
Eviter la banalisation des dettes fiscales, parafiscales et envers
les organismes de sécurité sociale
(article 48) tout en
s'assurant que les recommandations des commissions soient
systématiquement prises en compte par tous les directeurs des services
fiscaux (article additionnel après l'article 48).
•
Prendre en compte la situation respective des créanciers
pour, en équité, prendre les mesures de réduction ou
d'effacement des dettes (article 48).
•
Eviter que la cause de l'endettement détermine les
décisions de moratoire
, qui ne doivent tenir compte que de la
gravité de la situation financière des débiteurs (article
48).
EXAMEN
DES ARTICLES
TITRE PREMIER
DE L'ACCÈS AUX DROITS
CHAPITRE II
ACCÈS AU LOGEMENT
Section 1
Mise en oeuvre du droit au logement
ARTICLE 25
Exonération de la taxe d'habitation pour certains
logements en sous-location
Commentaire : cet article consistait initialement en une
exonération de la taxe d'habitation pour certains logements en
sous-location bénéficiant à des personnes
défavorisées, à laquelle l'Assemblée nationale a
substitué le principe d'un dégrèvement qui garantit la
compensation par l'Etat des pertes de recettes résultant pour les
collectivités locales de la présente disposition.
Initialement, ce dispositif prévoyait de compléter la
rédaction du II de l'article 1408 du code général des
impôts relatif aux personnes exonérées de taxe d'habitation
par un 4° destiné à faire bénéficier de cette
exonération certains logements en sous-location occupés par des
personnes défavorisées.
A cet égard, si l'Assemblée nationale a approuvé cet
objectif, elle a cependant considéré que les pertes de recettes
pour les collectivités locales résultant de cette disposition
devaient être compensées par l'Etat et, par conséquent,
elle a " transformé " cette exonération en un
dégrèvement d'office inscrit à l'article 1414 du code
général des impôts.
I. - LE DISPOSITIF INITIAL
Le présent article vise
en premier lieu
à dispenser de
l'acquittement de la taxe d'habitation,
les gestionnaires de foyers de
jeunes travailleurs migrants et des résidences-foyers
dénommés résidences sociales
, que l'article
R. 351-55 du code de la construction et de l'habitation définit
comme étant destinés aux personnes ou familles éprouvant
des difficultés particulières pour accéder à un
logement décent et indépendant
10(
*
)
, pour les logements situés dans ces foyers.
A cet égard, il convient de rappeler les termes de l'article
R. 351-55 précité, qui figure parmi les dispositions
consacrées aux conditions d'assimilation des logements-foyers à
des logements à usage locatif :
" Sont
considérés comme logements-foyers des établissements
à caractère social qui assurent le logement dans des immeubles
comportant à la fois des locaux privatifs et des locaux communs
meublés ainsi que, le cas échéant, diverses prestations
annexes telles que blanchissage, service de soins ou services sociaux
éducatifs moyennant une redevance ".
En
second lieu
, cette exonération doit bénéficier
aux organismes à but non lucratif agréés par le
préfet, pour les logements qu'ils sous-louent aux personnes
défavorisées
mentionnées à l'article 1er de la
loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du
droit au logement. Sur ce point, il convient de noter que l'agrément du
préfet est accordé dans les conditions prévues à
l'article 92 L du code général des impôts qui vise les
agréments donnés en vue d'obtenir l'exonération de
l'impôt sur le revenu pendant trois ans des produits des sous-locations
consenties à des personnes défavorisées.
11(
*
)
Il convient de noter que ce dispositif est cohérent par rapport
à celui approuvé récemment par le Sénat à
l'article 111 de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique
et financier.
Ce dernier vise en effet à étendre le dispositif voté
dans les lois de finances pour 1997 et 1998 en faisant entrer les
logements-foyers de jeunes travailleurs et les logements-foyers
assimilés dans le champ du taux réduit de TVA.
12(
*
)
II. - UNE SUBSTITUTION D'UN DÉGRÈVEMENT À UNE
EXONÉRATION QUI RESTE À CONFIRMER
A. LE DISPOSITIF INITIAL
Dans son texte initial, le Gouvernement avait choisi de satisfaire cet
objectif dans le cadre des dispositions de l'article 1408 du code
général des impôts dont le II comporte une liste de
personnes exonérées
ès qualité
de la taxe
d'habitation :
1° Les établissements publics scientifiques, d'enseignement et
d'assistance ;
2° Les habitants reconnus indigents par la commission communale des
impôts directs, d'accord avec l'agent de l'administration fiscale ;
3° Les ambassadeurs et autres agents diplomatiques de nationalité
étrangère dans la commune de leur résidence officielle et
pour cette résidence seulement, dans la mesure où les pays qu'ils
représentent concèdent des avantages analogues aux ambassadeurs
et agents diplomatiques français.
A cette liste venait donc s'adjoindre un 4° faisant
bénéficier de cette exonération les gestionnaires de
foyers de jeunes travailleurs migrants et des résidences-foyers
dénommés résidences sociales ainsi que les organismes
à but non lucratif agréés par le préfet, pour les
logements qu'ils sous-louent aux personnes défavorisées.
A cet égard, il convient de rappeler que le Conseil d'Etat
possédait une jurisprudence restrictive au sujet de
l'interprétation des conditions de l'imposition de ce type de logements
à la taxe d'habitation. Dans un arrêt du 24 mars 1982, il avait en
effet rappelé
" qu'aux termes de l'article 1407 du code
général des impôts " la taxe d'habitation est due :
1°) pour tous les locaux meublés affectés à
l'habitation " ; qu'aux termes de l'article 1408 du même code
" la taxe est établie au nom des personnes qui ont, à
quelque titre que ce soit, la disposition ou la jouissance des locaux
imposables " ; que l'association gère un centre où elle
met à la disposition de jeunes travailleurs des chambres ou des studios
individuels, moyennant le paiement d'un loyer et l'engagement de respecter les
dispositions du règlement intérieur de
l'établissement ;
que si le règlement intérieur de
la résidence prévoyait certaines dispositions destinées
à préserver l'ordre, la tranquillité et la
sécurité des locataires, ces dispositions
n'étaient pas
de nature à retirer à chacun des intéressés la
disposition personnelle du logement
qui lui était attribué ;
qu'ainsi les locataires doivent être regardés comme ayant eu a
leur disposition un logement meublé ; qu'en conséquence, ils
étaient passibles, pour ce logement, de la taxe d'habitation. "
B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Contestant l'absence de compensation des pertes de recettes résultant
pour les collectivités locales de cette disposition, l'Assemblée
nationale, sur l'initiative de M. Jean-Pierre Brard reprise par sa
commission spéciale, a " transformé " cette
exonération en un dégrèvement d'office inscrit à
l'article 1414 du code général des impôts, disposition
à laquelle le présent article se rattache beaucoup plus
logiquement qu'à l'article 1408 du même code.
Il convient en effet de noter que l'article 1414 du code
général des impôts, prévoit notamment
l'exonération de taxe d'habitation d'un certain nombre de contribuables
que le niveau de revenu rend non-imposables. Il s'agit de ceux
âgés de plus de 60 ans (I, 2°), ainsi que les veufs
et veuves et les contribuables
" atteints d'une infirmité ou
d'une invalidité les empêchant de subvenir par leur travail aux
nécessités de l'existence "
(I, 3°). Il inclut
en outre les titulaires de l'ex Fonds national de solidarité
(I, 1°) ainsi que les bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion.
Sur ce dernier point, il faut rappeler les termes du III et du IV de l'article
1414 du code général des impôts qui disposent :
" III Les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion
sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation afférente
à leur habitation principale lorsqu'ils occupent cette habitation dans
les conditions prévues à l'article 1390. IV Les contribuables
visés au 2° du I ci-dessus sont également
dégrevés de la taxe d'habitation afférente à leur
habitation principale lorsqu'ils occupent cette habitation avec leurs enfants
majeurs lorsque ceux-ci sont inscrits comme demandeurs d'emploi et ne disposent
pas de ressources supérieures au revenu minimum d'insertion. "
Outre le caractère logique de ce rattachement, votre commission des
finances, soucieuse de la protection des ressources des collectivités
locales, ne peut qu'approuver la " transformation " par
l'Assemblée nationale de l'exonération de taxe d'habitation
initialement proposée en un dégrèvement permettant aux
collectivités locales d'obtenir la compensation des pertes de recettes
qui résulteraient pour elles de l'application de cette disposition.
Cette modification était d'autant plus nécessaire que cet
allégement entrait en vigueur de façon rétroactive au
1
er
janvier 1998.
Dans cette démarche cependant, l'absence d'accord du Gouvernement a
conduit l'Assemblée nationale à voter la présente
disposition accompagnée du gage dont elle était assortie pour ne
pas contrevenir aux règles de la recevabilité financière.
A cet égard, votre commission des finances
souhaite voir le
Gouvernement donner son accord de principe au vote de l'Assemblée
nationale
. C'est pourquoi elle donnera un avis favorable à
l'adoption du présent article tout en déposant un amendement
destiné à supprimer le gage retenu par les députés
dont l'objet est de permettre au Gouvernement de lever le gage involontairement
voté à l'Assemblée nationale.
Faisant droit aux observations de M. Michel Charasse, la commission a en
effet jugé que cet amendement, prévoyant la suppression du gage
que comporte le présent article, ne méconnaissait pas les
exigences de la recevabilité financière. A cet égard, elle
a estimé que la compensation de cet allégement de taxe
d'habitation n'était pas de nature à créer une charge pour
le budget de l'Etat, dans la mesure où les contribuables susceptibles
d'en bénéficier font l'objet de décisions individuelles de
remises gracieuses dont le coût est déjà supporté
par le budget de l'Etat. De ce fait la suppression du gage ne saurait
être à l'origine d'une perte de recettes pour l'Etat.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 25 bis (nouveau)
Exonération de la
taxe d'habitation pour les locaux loués par des organismes logeant des
personnes
défavorisées
Commentaire : cet article prévoit
l'exonération de la taxe d'habitation pour les locaux loués par
des organismes logeant les personnes défavorisées percevant
l'aide au logement temporaire.
Le présent article résulte d'un amendement déposé
à l'origine par M. Daniel Marcovitch et adopté par la
commission spéciale de l'Assemblée nationale. Le dispositif
initialement proposé a été sous-amendé par le
Gouvernement, afin de préciser la définition des
bénéficiaires de cette exonération de taxe d'habitation.
Le
dispositif initialement
adopté par la commission
spéciale visait en effet à exonérer de la taxe
d'habitation les locaux loués par des associations reconnues
d'utilité publique pour héberger à titre temporaire des
personnes en difficulté.
Le Gouvernement, qui a approuvé cette initiative, a cependant refondu
le dispositif en substituant à la notion d'" associations reconnues
d'utilité publique pour héberger à titre temporaire des
personnes en difficulté qu'elles prennent en charge " une
rédaction plus précise fondée sur la
référence aux organismes logeant à titre temporaire les
personnes défavorisées percevant l'aide au logement temporaire
définie à l'article L. 851-1 du code de la
sécurité sociale.
Cet article du code de la sécurité sociale relatif à
l'aide aux associations logeant à titre temporaire des personnes
défavorisées dispose en effet que :
" Les associations à but non lucratif dont l'un des objets est
l'insertion ou le logement des personnes défavorisées et qui ont
conclu une convention avec l'Etat bénéficient d'une aide pour
loger, à titre transitoire, des personnes
défavorisées ; lorsque celles-ci sont
étrangères, elles doivent justifier d'une résidence
régulière en France.
" La convention fixe chaque année le montant de l'aide
attribuée à l'association qui est déterminé de
manière forfaitaire par référence, d'une part, au plafond
de loyer retenu pour le calcul de l'allocation de logement définie
respectivement par les livres V, VII et VIII du présent code et, d'autre
part, aux capacités réelles et prévisionnelles
d'hébergement offertes par l'association.
" Pour le calcul de l'aide instituée par le présent
article, ne sont pas prises en compte les personnes bénéficiant
de l'aide sociale prévue à l'article 185 du code de la famille et
de l'aide sociale et les personnes hébergées titulaires des aides
prévues aux articles L. 351-1 du code de la construction et de
l'habitation et L. 542-1, L. 755-21 et L. 831-1 du
présent code. "
Votre commission des finances ne peut qu'approuver la correction
apportée par le Gouvernement au dispositif initial, dans la mesure
où elle permet de mieux garantir les conditions d'application de la
présente disposition. La référence à l'article
L. 851-1 du code de la sécurité sociale permettra de mieux
contrôler la reconnaissance de ce droit à exonération de
taxe d'habitation dans la mesure où l'hébergement à titre
temporaire des personnes en difficulté est clairement identifié
par l'ouverture du bénéfice de l'aide au logement temporaire.
Cette nouvelle rédaction est de nature à limiter les risques
d'abus dans ce domaine.
Il convient enfin de noter que cette disposition, introduite au cours de la
discussion du présent projet de loi ne prévoit pas, à la
différence des autres dispositions relatives à des
allégements de fiscalité locale, de date d'entrée en
vigueur. A défaut de cette précision, cette exonération de
taxe d'habitation, qui vient compléter la liste des locaux
exonérés figurant au II. de l'article 1407 du code
général des impôts
13(
*
)
n'entrera en vigueur qu'au 1
er
janvier 1999.
S'agissant d'une disposition complémentaire de celle figurant à
l'article 25 du présent projet de loi, il semble souhaitable d'aligner
les modalités de mise en oeuvre de l'allégement de taxe
d'habitation qu'elle prévoit sur la précédente de telle
sorte que soit évitée l'institution de deux dispositifs
similaires, ayant le même objet, sous deux formes différentes.
Aussi, votre commission vous propose-t-elle une nouvelle rédaction
visant : en
premier lieu,
à " transformer " cette
exonération de taxe d'habitation en dégrèvement dont les
pertes de recettes pour les collectivités locale seront
compensées par l'Etat ; en
deuxième lieu,
à
prévoir l'entrée en vigueur au 1
er
janvier 1998, car
si cette date n'est pas précisée, l'allégement ne
s'appliquera qu'au 1
er
janvier 1999 ; en
troisième
lieu,
à remplacer les termes " locaux loués " par
ceux de " logements mis à disposition " dans la mesure
où, dans le cas visé par le présent article, les
bénéficiaires de ces logements sont le plus souvent des personnes
ne pouvant acquitter un loyer.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article, sous réserve de la
nouvelle rédaction qu'elle vous soumet.
ARTICLE 26
Exonération de droit de bail
pour les sous-locations consenties à des personnes
défavorisées
Commentaire : le présent article a pour objet de
prévoir l'exonération de droit de bail pour les sous-locations
consenties à des personnes défavorisées.
Le présent article vise à éviter que les sous-locations
consenties par des organismes à but non lucratif, agréés
par le préfet, à des personnes défavorisées aient
à supporter la " double imposition " au titre du droit de bail
qui résulte de l'application de l'article 736 du code
général des impôts
14(
*
)
.
En application de cette disposition, les baux mais aussi les sous-baux sont
assujettis l'un et l'autre à un droit d'enregistrement de 2,50 %.
Dans le cas des sous-locations consenties à des personnes
défavorisées, cette double imposition apparaît
contradictoire avec la situation de ces personnes qui, par définition,
ne sont pas en mesure d'accéder directement à un logement locatif
ordinaire.
La détermination des bénéficiaires de cette
exonération de droit de bail est définie selon des
modalités identiques à celles retenues pour le
dégrèvement de taxe d'habitation prévu à l'article
25 du présent projet.
Cette exonération doit en effet bénéficier
aux
organismes à but non lucratif agréés par le préfet,
pour les logements qu'ils sous-louent aux personnes
défavorisées
mentionnées à l'article 1er de la
loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du
droit au logement.
Sur ce point, il convient de noter que l'agrément du préfet est
accordé dans les conditions prévues à l'article 92 L du
code général des impôts qui vise les agréments
donnés en vue d'obtenir l'exonération de l'impôt sur le
revenu pendant trois ans des produits des sous-locations consenties à
des personnes défavorisées.
15(
*
)
Le coût pour le budget de l'Etat est évalué à 8,16
millions de francs à raison de 20.000 logements faisant l'objet d'un
loyer mensuel de 1.360 francs supportant un droit de bail de 2,5 %.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
Section
2
Accroissement de l'offre de logement
ARTICLE 28 ter (nouveau)
Exonération d'impôt pour la valeur des travaux
réalisés par le preneur à bail d'un logement faisant
l'objet d'un bail à
réhabilitation
Commentaire : le présent article a pour objet
d'exonérer d'impôt le revenu représenté par la
valeur des travaux réalisés par le preneur d'un logement faisant
l'objet d'un bail à réhabilitation.
I. - PRÉSENTATION DU DISPOSITIF EXISTANT
A. LA DÉTERMINATION DU REVENU NET FONCIER IMPOSABLE
Le revenu foncier imposable à l'impôt sur le revenu est
égal, chaque année, à la différence entre le
montant du revenu brut foncier et le total des charges de la
propriété
(article 28 du code général des
impôts)
Le revenu brut
des propriétés louées est
constitué par le montant des recettes de toute nature perçues par
le propriétaire.
Au montant des recettes brutes, il faut ajouter les dépenses incombant
normalement au propriétaire (ex : réparations autres que
réparations locatives, taxe foncière...) mais dont le paiement
est, par l'effet des conventions, mis à la charge des locataires
(article 29 du code général des impôts).
Les charges déductibles
du revenu foncier comprennent les
dépenses de réparation et d'entretien, les dépenses
d'amélioration, les frais de gérance ...
Par ailleurs, il est appliqué au revenu brut foncier une
déduction forfaitaire de 14% représentant les frais de gestion et
l'assurance (article 31.I 1° e. du CGI).
B. L'APPLICATION DE CES DISPOSITIONS DANS LE CADRE D'UN BAIL A
RÉHABILITATION
1. Le bail à réhabilitation
Les modalités de conclusion d'un bail à réhabilitation
sont précisées aux articles L 252-1 à L. 252-4 du code de
la construction et de l'habitation introduits par la loi n° 90-449 du 31
mai 1990.
L'article L. 251-1 définit les catégories de personnes
habilitées à prendre un bail à réhabilitation : les
organismes d'habitation à loyer modéré, les
sociétés d'économie mixte dont l'objet est de construire
ou de donner à bail des logements, les collectivités
territoriales, les organismes agréés dont l'objet est de
contribuer au logement des personnes défavorisées.
Ces personnes s'engagent à réaliser dans un délai
déterminé des travaux d'amélioration sur l'immeuble du
bailleur
et à le conserver en bon état en vue de louer
l'immeuble à usage d'habitation pendant la durée du bail.
Le bail à réhabilitation est conclu pour une durée
minimale de douze ans.
2. Le régime fiscal
L'article 33
quinquies
du code général des impôts
dispose que les loyers et prestations de toute nature qui constituent le prix
d'un bail à réhabilitation ont le caractère de revenu
foncier
, c'est-à-dire entrent dans le champ des revenus imposables
permettant la détermination du revenu global net annuel servant de base
à l'impôt sur le revenu.
Pour les travaux qui doivent lui revenir sans indemnité en fin de
bail,
le bailleur est imposable sur la base du prix de revient des travaux.
Cette imposition est due au titre de l'année au cours de laquelle le
bail a pris fin (terme initial ou résiliation),
et non pas lors de
l'exécution des travaux par le locataire.
3. Un régime fiscal défavorable lorsque les travaux sont
qualifiés de travaux de construction, reconstruction et agrandissement
par l'administration fiscale
Dans la mesure où elles ont pour le propriétaire le
caractère de charges déductibles,
les sommes correspondant
à des dépenses d'amélioration
16(
*
)
sont ultérieurement retranchées du
revenu brut pour la détermination du revenu net (b. du 1° du I de
l'article 31 du CGI)
En revanche,
les sommes correspondant à des travaux de construction,
reconstruction
17(
*
)
ou agrandissement
sont
explicitement exclues des sommes susceptibles de venir en déduction du
revenu brut (b. du 1° du I de l'article 31 du CGI).
Or, en fin de bail à réhabilitation,
les travaux
effectués sur l'immeuble du bailleur
qui, selon les dispositions de
l'article L. 251-1 du code de l'habitation et de la construction sont des
travaux d'amélioration,
peuvent être requalifiés en
travaux de construction, reconstruction ou agrandissement, pour lesquels le
régime fiscal est moins favorable.
Cette situation résulte du fait que la notion de travaux
d'amélioration figurant dans le Code de la construction et de
l'habitation a une portée différente de la définition
prévue en matière de revenus fonciers.
Ainsi, constituent notamment des travaux d'amélioration au sens du code
de la construction et de l'habitation (annexe I de l'arrêté du 5
juillet 1982, JO du 30 juillet 1982), les travaux de mise en conformité
du logement avec les normes minimales d'habitabilité. Parmi ces travaux
peuvent figurer des travaux qui ne sont pas considérés comme des
dépenses d'amélioration déductibles du revenu foncier au
sens de l'article 31 du CGI, mais représentent des dépenses de
construction, agrandissement ou reconstruction non déductibles.
Il en résulte une incertitude quant au régime fiscal de sortie
du bail.
II. - LE DISPOSITIF PROPOSE PAR LE PRÉSENT ARTICLE
A. L'EXONÉRATION DES TRAVAUX RÉALISÉS DANS LE CADRE
D'UN BAIL À RÉHABILITATION
Le présent article modifie l'article 33
quinquies
du code
général des impôts en prévoyant d'exonérer
d'impôt le revenu représenté par la valeur des travaux
réalisés par le preneur d'un logement faisant l'objet d'un bail
à réhabilitation.
Les travaux réalisés par le preneur ne sont donc ni imposables ni
déductibles.
L'objectif de l'article est d'améliorer le régime fiscal en fin
de bail à réhabilitation, puisque le prix de revient des travaux
est pris en compte en fin de bail.
B. UN DISPOSITIF FISCAL QUI SERAIT MOINS FAVORABLE POUR LES LOGEMENTS
AYANT BÉNÉFICIÉ DE TRAVAUX D'AMÉLIORATION
Les travaux d'amélioration réalisés dans le cadre d'un
bail à réhabilitation sont déjà déductibles
du revenu foncier.
L'administration admet aussi que le propriétaire peut, s'il le
désire, faire purement et simplement abstraction desdites sommes, tant
en recettes qu'en dépenses,
ce qui revient à une
exonération.
Mais le propriétaire a intérêt
à ne pas utiliser cette faculté et par conséquent à
procéder aux deux opérations, afin de ne pas réduire la
base de calcul de la déduction forfaitaire.
Le nouveau régime d'exonération serait donc pénalisant
puisque les sommes correspondant aux travaux d'amélioration ne
pourraient plus être comptées en charges déductibles,
permettant de leur appliquer la déduction forfaitaire de 14%.
Exemples de déductions dans le cadre d'un bail
à
réhabilitation
REGIME ACTUEL
(tous les chiffres sont entièrement fictifs, seuls les travaux sont
comptés comme charges)
Cas
n° 1 :
Soit l'exemple d'un propriétaire ayant
bénéficié de
dépenses d'amélioration
pour un prix de revient de 100 alors que son revenu brut foncier est de 300.
En recettes
, le revenu brut foncier est majoré du prix de
revient de 100, soit au total 400 de revenu brut foncier, avant
déduction forfaitaire.
En charges
, il peut imputer ces mêmes dépenses
d'amélioration, soit 100.
La déduction forfaitaire, égale à 14% des revenus bruts
(400), est de 56.
Son revenu foncier net imposable est donc de 244
(400-100-56).
Cas n° 2
: Soit l'exemple d'un propriétaire ayant
bénéficié de
dépenses qualifiées comme
dépenses de construction
pour un même prix de revient de 100
alors que son revenu brut foncier est de 300.
En recettes
, le revenu brut foncier est majoré du prix de
revient de 100, soit au total 400 de revenu brut foncier, avant
déduction forfaitaire.
En charges
, les dépenses de construction ne sont pas
déductibles.
La déduction forfaitaire, égale à 14% des revenus bruts,
est de 56.
Son revenu foncier net imposable est donc de 344
(400-56).
REGIME PROPOSE
Les
dépenses d'amélioration comme les dépenses de
construction, reconstruction et agrandissement sont exonérées du
revenu foncier, c'est-à-dire qu'elles ne sont portées ni en
recettes, ni en charges. Ainsi :
Dans le cas n° 1 (travaux d'amélioration), le revenu net
foncier imposable est de 258 après déduction forfaitaire, au lieu
de 244 : il y a une perte fiscale pour le contribuable.
Dans le cas n° 2 (travaux de construction) , le revenu net foncier
imposable est de 258 après déduction forfaitaire, au lieu de 344
: il y a un gain fiscal pour le contribuable.
Seuls les travaux de construction, reconstruction ou agrandissement au sens du
code général des impôts, qui ne sont pas
déductibles, bénéficieront donc du nouveau
mécanisme, soit une faible part des travaux réalisés dans
le cadre des baux à réhabilitation, qui dans leur grande
majorité, mettent en oeuvre des travaux d'amélioration.
Afin de ne pas pénaliser les dépenses d'amélioration, qui
constituent l'essentiel des dépenses engagées lors d'un bail
à réhabilitation, il est donc proposé un amendement
précisant
que seuls les travaux de construction, reconstruction et
agrandissement
, c'est-à-dire les travaux qui n'entraient pas dans le
champ des charges déductibles du revenu foncier brut entreront dans le
dispositif de l'exonération.
Bien qu'en apparence contradictoires avec les termes utilisés pour le
bail à réhabilitation dans le code de l'habitat et de la
construction (ce type de bail ne concernant que des travaux
d'amélioration), il faut comprendre les termes de travaux de
construction, reconstruction et agrandissement comme faisant
référence aux travaux considérés comme tels par
l'administration fiscale mais respectant les obligations du bail à
réhabilitation.
Les travaux d'amélioration pourront ainsi rester dans l'ancien
dispositif, plus favorable.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 29
Modification des conditions
d'exonération de taxe
foncière
Commentaire : le présent article vise à
assouplir
les conditions d'exonération de la taxe foncière sur les
propriétés bâties
Le présent article vise à étendre le champ d'application
des exonérations de quinze ans de taxe foncière sur les
propriétés bâties
pouvant bénéficier
à un certain nombre d'opérations liées au logement social.
A cette fin, le présent article prévoit, d'une part, de
compléter la rédaction de l'article 1384 A du code
général des impôts et, d'autre part, d'insérer un
nouvel article 1384 C dans le code général des
impôts destiné à rendre obligatoire une exonération
de taxe foncière sur les propriétés bâties de longue
durée, jusqu'alors facultative, et à en étendre le champ
d'application.
I. - LA PRISE EN COMPTE DES PRÊTS CONSENTIS AU TITRE DU
" 1 % LOGEMENT " POUR LA DÉTERMINATION DU
BÉNÉFICE DE L'EXONÉRATION DE QUINZE ANS DE TAXE
FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES
Le paragraphe I complète l'article 1384 A du code général
des impôts
18(
*
)
, en prévoyant la
prise en compte des prêts accordés au titre de la participation
des employeurs à l'effort de construction dans les conditions
d'appréciation du financement des opérations de construction
réalisées par des associations agréées par le
préfet.
Ce paragraphe doit ainsi permettre la prise en compte des prêts
consentis par le système du " 1 % logement " pour la
détermination du bénéfice de l'exonération de
quinze ans de taxe foncière sur les propriétés
bâties qui, actuellement, est réservée aux
opérations de construction neuve financées à plus de
50 % à l'aide de prêts accordés par la Caisse des
dépôts et consignations.
Or, en pratique, les associations qui contribuent au logement de personnes
défavorisées, dont le présent article précise
qu'elles sont agréées à cette fin par le préfet,
n'accèdent pas aux prêts sur 32 ans accordés aux autres
catégories d'opérateurs par la Caisse des dépôts et
consignations, qui considère, non sans raison, que le statut associatif
n'offre pas des garanties suffisantes pour des prêts à si long
terme.
Les associations sont donc, de ce fait, exclues du bénéfice de
l'exonération de quinze ans de taxe foncière sur les
propriétés bâties, alors même qu'elles contribuent
à la satisfaction du même objectif que d'autres organismes :
la construction de logements destinés aux personnes
défavorisées. Le I de cet article remédie donc à
cette situation, le II prévoyant l'application de cette disposition aux
constructions achevées à compter du 25 mars 1998
19(
*
)
.
Il convient de noter que
les pertes de recettes résultant pour les
collectivités locales de cet élargissement du champ d'application
de l'article 1384 A du code général des impôts, sont
compensées de droit
en application de l'article L. 2335-3 du
code général des collectivités territoriales qui dispose
que :
" Lorsque les exonérations de taxe foncière
sur les propriétés bâties, prévues aux articles 1384
et 1384 A du code général des impôts et aux I et II bis de
l'article 1385 du même code, entraînent pour les communes une
perte de recettes substantielle, ces collectivités ont droit à
une compensation par l'Etat
dans les conditions fixées par
décret en Conseil d'Etat. "
20(
*
)
Cette précision est d'importance dans la mesure où les autres
dispositions du présent article ne relèvent pas, en l'état
actuel de sa rédaction, de ce droit à compensation.
II. - LES NOUVELLES EXONÉRATIONS DE TAXE FONCIÈRE SUR
LES PROPRIÉTÉS BÂTIES
A. ANALYSE DU DISPOSITIF
Le nouvel article 1384 C que le présent article se propose
d'insérer dans le code général des impôts est
destiné à rendre obligatoires certaines exonérations de
taxe foncière sur les propriétés bâties, jusqu'alors
facultatives et à en étendre le champ d'application.
En prévoyant l'exonération de taxe foncière sur les
propriétés bâties
des logements acquis, en vue de
leur location, avec le concours financier de l'Etat en application des 3°
et 5° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation,
le présent article rend obligatoire une exonération facultative
préexistante et en étend le champ d'application à une
nouvelle catégorie de logements.
Les collectivités locales étaient en effet autorisées
à exonérer de taxe foncière sur les
propriétés bâties
les logements acquis en vue de
leur location avec le concours financier de l'Etat en application du
3°
de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation
. Il
s'agit des logements à usage locatif construits, acquis ou
améliorés au moyen d'aides de l'Etat ou de prêts (il s'agit
en pratique d'opérations faisant l'objet, soit d'une subvention de
l'Etat ouvrant droit à un prêt accordé par la Caisse des
dépôts et consignations, soit d'un prêt aidé par
l'Etat accordé par le Crédit foncier de France) par des
propriétaires qui s'engagent à respecter certaines obligations
relatives à l'attribution des logements sous conditions de ressources et
au montant des loyers.
Cette faculté a été instituée pour les
départements
par l'article 10 de la loi n° 90-449 du 31 mai
1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, elle est
codifiée à
l'article 1586 B du code général des
impôts
.
En ce qui concerne les
communes et les groupements de communes
à
fiscalité propre c'est l'article 30 de la loi du n° 94-624 du 21
juillet 1994 relative à l'habitat, modifié par l'article 27 de la
loi de finances rectificative n° 94-1163 du 29 décembre 1994,
qui a codifié cette faculté à
l'article 1384 B du code
général des impôts
.
Enfin l'article 100 de la loi de finances pour 1997, a inséré un
article 1599 ter E dans le code général des impôts
ouvrant aux régions cette même faculté et reprend, dans les
mêmes termes, le dispositif prévu pour les communes et les
départements. Il convient de préciser que cette faculté
d'exonération porte en outre sur la taxe spéciale
d'équipement additionnelle à la taxe foncière sur les
propriétés bâties perçue au profit de la
région Ile-de-France.
A cet égard, il faut noter que le V du présent article
prévoit, par coordination, que les trois dispositions du code
général des impôts relatives à cette faculté
d'exonération de la taxe foncière sur les
propriétés bâties
précitées, ne sont
plus applicables aux logements mentionnés à l'article 1384 C
du même code acquis depuis le 1
er
janvier 1998.
Le présent article prévoit donc une exonération de
principe de taxe foncière sur les propriétés bâties
pendant une durée de quinze ans à compter de l'année qui
suit leur acquisition en faveur de ces logements et étend en outre son
bénéfice aux
logements visés
au 5° de
l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation
.
Cette exonération bénéficiera ainsi aux logements-foyers
de jeunes travailleurs et aux logements-foyers assimilés notamment aux
logements à usage locatif appartenant à des organismes
d'habitations à loyer modéré ou gérés par
eux construits, acquis ou améliorés au moyen d'aides de l'Etat ou
de prêts par des propriétaires qui s'engagent à respecter
certaines obligations relatives à l'attribution des logements sous
conditions de ressources et au montant des loyers.
En outre, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du
Gouvernement prévoyant l'extension de cette exonération de taxe
foncière sur les propriétés bâties
aux
logements acquis sans l'aide de l'Etat par des organismes, visés
4° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de
l'habitation,
ayant pour objet de contribuer au logement de personnes
défavorisées et qui sont améliorés avec l'aide de
l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH)
.
Cette adjonction a, en pratique pour objet d'étendre le
bénéfice de cette exonération à certains logements
dépendant du mouvement PACT-ARIM
21(
*
)
.
La rédaction du deuxième alinéa de l'article 1384 C
que le III du présent article propose d'insérer dans le code
général des impôts doit cependant être
précisée sur deux points. C'est pourquoi votre commission vous
demande d'adopter
deux amendements
. Il s'agit,
d'une part
, de
préciser que les logements sont seulement améliorés avec
l'aide de l'ANAH et non pas acquis et améliorés comme il est
actuellement proposé et,
d'autre part
, d'indiquer que cette
exonération ne doit profiter qu'aux logements loués ou sous
loués à ces personnes défavorisées. En effet, la
rédaction actuelle laisse à penser que sont
exonérés de taxe foncière sur les propriétés
bâties
tous les logements appartenant à des associations
ayant dans leurs objectifs le logement des personnes défavorisées.
B. LA LÉGITIMITÉ DU DROIT À COMPENSATION
Votre commission des finances relève que ni le droit actuel ni le droit
proposé ne prévoient la compensation des pertes de recettes
qu'entraîneront pour les collectivités locales ces
exonérations de taxe foncière sur les propriétés
bâties. Or, celles-ci s'inscrivent directement dans la filiation des
exonérations de la taxe foncière sur les propriétés
bâties de longue durée pour lesquelles une compensation partielle
est prévue.
D'ailleurs, le Gouvernement interrogé sur ce point en séance
publique à l'Assemblée nationale, par la voix de son
secrétaire d'Etat au logement M. Louis Besson, a
déclaré au sujet du présent article :
" il
s'agit d'étendre aux opérations d'acquisition-amélioration
le dispositif en vigueur depuis les années 50 pour les constructions
neuves, c'est à dire
une exonération de quinze ans avec une
compensation
qui n'est pas tout à fait intégrale - il y a un
léger abattement. "
22(
*
)
A cet égard, votre commission des finances note que
cette
déclaration démontre que l'intention du gouvernement
n'était pas de déroger au principe légal de la
compensation prévue par l'article L. 2335-3 du code
général des collectivités territoriales.
En conséquence, votre commission vous propose de remédier
à ce qui apparaît comme une simple lacune, en incluant dans le
texte de l'article L. 2335-3 précité une
référence au nouvel article 1384 C inséré
dans le code général des impôts par le III du
présent article.
Ainsi, le dispositif de l'article L. 2335-3 du code général
des collectivités territoriales, précédemment
décrit, couvrirait aussi les pertes de recettes résultant de
cette nouvelle exonération de taxe foncière sur les
propriétés bâties. Cette inclusion paraît
d'autant
plus légitime qu'il s'agit d'éviter des pertes de recettes aux
communes sur le territoire desquelles ces différents
" opérateurs " agissent en faveur du logement des personnes
défavorisées, dont on peut supposer
a priori
qu'elles ne
disposent pas d'un excès de bases fiscales.
Paradoxalement, un tel amendement se trouve aux limites de la
recevabilité financière dans la mesure où ces
compensations sont financées à partir des crédits inscrits
au chapitre 41-51 (article 50) du budget du ministère de
l'intérieur. Le paradoxe tient au fait qu'un amendement
" maximaliste ", consistant à prévoir une compensation
intégrale des pertes de recettes par un relèvement à due
concurrence de la dotation globale de fonctionnement serait, pour sa part,
recevable dans la mesure où il s'agit d'un prélèvement sur
recettes. C'est pourquoi votre commission a adopté deux amendements
tendant chacun à compléter la rédaction du présent
article par un VI selon les modalités alternatives qui viennent
d'être décrites.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 30
Création d'une taxe sur les logements
vacants
Commentaire : le présent article modifie l'article
232 du
code général des impôts en instaurant une taxe sur les
logements vacants depuis plus de deux ans, à l'exclusion des logements
appartenant à des organismes d'habitations à loyer
modéré ou à des sociétés d'économie
mixte, dans les zones de plus de 200.000 habitants où existe un
déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de
logements.
I. PRÉSENTATION DU DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT
ARTICLE
-
le paragraphe I
du nouvel article 232 du code général
des impôts institue une nouvelle taxe annuelle sur les logements vacants
à compter du 1er janvier 1999.
Le champ d'application géographique de la taxe est défini comme
suit: il s'agit des communes appartenant à des zones d'urbanisation
continue de plus de 200.000 habitants, où existe un
déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de
logements.
Un décret fixera les zones concernées et selon l'étude
d'impact du projet de loi, les zones seront "calquées sur les listes de
communes déjà établies pour la réglementation des
rapports locatifs".
Les agglomérations potentiellement concernées par la nouvelle
taxe sont : Paris, Lyon, Marseille, Aix-en-provence, Lille, Bordeaux, Toulouse,
Nice, nantes, Toulon, Grenoble, Strasbourg, Rouen, Valenciennes,
Antibes-Cannes, Grasse, Nancy, Lens, Saint-Etienne, Tours, Béthune,
Clermont-Ferrand, Le Havre, Montpellier, Rennes, Orléans, Dijon,
Mulhouse, Angers, Reims et Brest.
-
le paragraphe II précise les catégories de logements vacants
touchés par la nouvelle taxe
.
Il s'agit des logements vacants depuis au moins deux ans à l'exclusion
des logements appartenant à des organismes d'habitation à loyer
modéré ou à des sociétés d'économie
mixte et destinés à être attribués sous condition de
ressources.
-
le paragraphe III précise la personne redevable de la taxe
: il
s'agit du propriétaire, de l'usufruitier, du preneur à bail
à reconstruction ou à réhabilitation ou de
l'emphytéote.
-
le paragraphe IV fixe l'assiette et le taux de la taxe
.
L'assiette est constituée de la valeur locative du logement (article
1409 du code général des impôts).
Le taux est progressif suivant la durée de vacance : il est de 10 % la
première année d'imposition, 12,5 % la deuxième
année et 15 % la troisième année.
-
le paragraphe V précise la définition des logements vacants
depuis deux ans
: il s'agit de logements n'ayant pas été
occupés plus de trente jours au cours de chacune des deux années
de référence. On peut s'interroger sur la pertinence de cette
définition, notamment s'agissant des résidences secondaires dont
l'occupation peut être légitimement inférieure à
trente jours par an. Toutefois, il semble que les propriétaires de
résidences secondaires, acquittant déjà la taxe
d'habitation, ne seront, pour cette raison, pas touchés par la nouvelle
taxe.
-
le paragraphe VI indique que la taxe n'est pas due en cas de vacance
indépendante de la volonté du contribuable
. Aucune
précision n'est donnée quant à l'application de cette
disposition.
-
le paragraphe VII
précise les modalités de
contrôle, de recouvrement et de contentieux liés à la taxe.
-
le paragraphe VIII
désigne l'Agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat (ANAH) comme bénéficiaire du
produit net de la taxe.
II. UN DISPOSITIF TROP COERCITIF, QUI NE TIENT PAS COMPTE DES RAISONS DE LA
VACANCE DE LOGEMENTS
Le taux de vacance dans le parc immobilier français est
élevé. C'est un phénomène contre lequel il faut
évidemment lutter, mais en prenant en compte les caractéristiques
et les raisons de cette vacance.
On ne peut donc que partager le souci de remettre en location des logements
vacants. Mais la mise en place d'un dispositif contraignant doit, au minimum,
être précédé d'études approfondies sur les
modalités et les conséquences de sa mise en oeuvre et être
accompagné de mesures positives, destinées à donner un
signal encourageant aux propriétaires.
A. LES CARACTÉRISTIQUES DU PARC DE LOGEMENTS VACANTS N'ONT PAS
ÉTÉ PRISES EN COMPTE DANS LES CRITÈRES RETENUS POUR LA
TAXE
1. Un taux de vacance élevé, qui concerne l'ensemble du
territoire, mais en relative stabilité sur les quinze dernières
années
D'après la dernière étude en date du ministère de
l'Equipement, des transports et du logement ("le compte du logement" 1996), le
nombre de logements vacants s'élevait en 1994 à 2,08 millions sur
un parc immobilier total de 27, 6 millions de logements, soit un taux de
vacance de 7,56 %, bien supérieur à celui de 1954 (3,7%).
Depuis 15 ans, on constate toutefois une relative stabilité de ce
taux de vacance
. Il n'y donc pas d'aggravation importante du
phénomène de la vacance, même si le retrait de 2 millions
de logements du parc immobilier locatif pose évidemment toujours
problème.
|
1984 |
1988 |
1992 |
1996 |
taux de vacance en % |
7,8 |
8,4 |
7,4 |
7,9 |
Une
analyse plus fine du phénomène de la vacance
réalisée en 1992 montre en outre que le phénomène
de la vacance touche davantage les unités urbaines de moins de 100.000
habitants et les communes rurales
: le taux de vacance dépassait les
8 % dans ces communes en 1992, alors qu'il était de 6,75% dans les
grandes agglomérations de plus de 100.000 habitants et de 6,3% dans
l'agglomération parisienne
23(
*
)
.
La taxe qui est proposée vise les zones d'urbanisation continue de plus
de 200.000 habitants, alors même que si ces zones sont effectivement
concernées, le phénomène de la vacance est plus
général et mérite une attention particulière,
notamment dans le cas des zones rurales.
Répartition des logements vacants suivant la localisation en 1992 (en
milliers)
catégorie de commune |
parc de résidences principales |
parc total de logements |
logements vacants |
taux de vacance |
% du parc vacant |
agglomération parisienne |
3 876 |
4 280 |
269 |
6,29% |
13,47% |
unités urbaines de 100.000 habitants et plus |
6 422 |
7 231 |
488 |
6,75% |
24,44% |
unités urbaines de moins de 100.000 habitants |
6 493 |
7 960 |
585 |
7,35% |
29,29% |
communes rurales |
5 339 |
7 505 |
655 |
8,73% |
32,80% |
ensemble |
22 130 |
26 976 |
1 997 |
7,40% |
100,00% |
(Enquête logement 1992, INSEE)
Par
ailleurs, les études menées en 1995 et 1996 par l'Agence
nationale pour l'amélioration de l'habitat ont montré que
les
logements vacants présentaient un profil particulier
: les petits
logements sont sur-représentés dans cette catégorie (les 1
à 2 pièces représentent 40,9% du parc vacant), ainsi que
les logements anciens (77% des logements vacants ont été
construits avant 1948) et inconfortables (24% du parc vacant).
2. Une rupture de l'égalité entre les propriétaires
La taxe s'appliquera aux logements vacants depuis plus de deux ans à
l'exclusion des logements détenus par des organismes d'habitation
à loyer modéré et des sociétés
d'économie mixte.
Il est vrai que le taux de vacance dans le parc HLM est sensiblement
inférieur au taux de vacance des logements dans le parc privé.
Toutefois, il est en augmentation continue depuis quelques années et
représente de ce fait plusieurs dizaines voire centaines de milliers de
logements.
Si l'objectif poursuivi par l'instauration d'une taxe sur les logements vacants
est bien de remettre en location le plus rapidement possible des logements, il
conviendrait de ne pas exclure de la taxe certaines personnes morales.
Il semble d'ailleurs que la distinction opérée ne corresponde
pas strictement à un objectif d'intérêt
général, ni à une différence de situation
objective, qui légitimerait une rupture de l'égalité entre
les contribuables : le principe d'égalité est un principe
à valeur constitutionnelle qui s'applique en matière fiscale.
En effet, une des justifications données pour exclure du champ de la
taxe les organismes d'HLM et les sociétés d'économie mixte
réside dans le fait que la vacance de leurs logements se justifie
très souvent par la programmation d'opérations de
démolition ou de réhabilitation. Mais cet argument est
irrecevable car, selon les termes mêmes de l'article, la vacance
indépendante de la volonté du contribuable n'est pas
pénalisée. Sinon, il faudrait supposer que des opérations
de démolition pourraient entraîner une imposition des
contribuables concernés par la nouvelle taxe.
B. UNE MISE EN OEUVRE INAPPLICABLE
1. Un possible effet de substitution avec la taxe d'habitation
Si le recensement de la population et l'enquête logement permettent une
description physique du parc de logements vacants, aucune source d'information
ne permet de connaître sur l'ensemble du territoire les causes de vacance
et la part de logements susceptibles d'être remise sur le marché.
Or, la nouvelle taxe vise expressément les logements vacants depuis plus
de deux ans.
Un des critères objectifs pourrait être l'exonération
de taxe d'habitation. En vertu de l'article 1407 du code général
des impôts, seuls les locaux meublés sont imposables à la
taxe d'habitation.
On peut alors se demander pourquoi créer cette nouvelle taxe : les
propriétaires pourront tout simplement payer la taxe d'habitation pour
échapper à la nouvelle taxe.
Dans la région parisienne notamment, le montant de la taxe d'habitation
devrait être inférieur à la nouvelle taxe
créée. Loin d'aboutir à la remise en location de logements
vacants, l'annonce d'une nouvelle taxe, de surcroît avec un taux
progressif, devrait avoir pour effet d'augmenter le nombre de redevables de la
taxe d'habitation.
2. Une incertitude totale sur la mise en application du critère de la
vacance involontaire
Le paragraphe VI du nouvel article 232 du code général des
impôts indique que la taxe n'est pas due en cas de vacance
indépendante de la volonté du contribuable.
Il faut donc supposer que seule la vacance volontaire sera taxée mais la
manière dont sera déterminée cette "vacance involontaire"
n'est pas définie.
La notion de "vacance indépendante de la volonté du
contribuable" figure déjà à l'article 1389 du code
général des impôts
24(
*
)
: les contribuables peuvent obtenir le dégrèvement de la taxe
foncière en cas de vacance d'une maison normalement destinée
à la location, ou d'inexploitation d'un immeuble utilisé par le
contribuable lui-même à usage commercial ou industriel.
Cependant, tous les cas de vacances involontaires ne sauraient être
couverts
par les dispositions d'un article ayant pour objet de compenser
une perte de revenus. La vacance involontaire peut être
interprétée plus restrictivement dans le cadre de l'octroi d'un
avantage fiscal que pour une exonération de taxe spécifique.
D'une manière générale, la distinction entre vacance
volontaire et involontaire ne va pas de soi
. De nombreux
événements peuvent amener un propriétaire à laisser
son logement vacant : problèmes de succession, travaux
d'amélioration, manque de locataires ou expériences malheureuses
de location...
C. LA QUESTION DE L' AFFECTATION DES RESSOURCES
Le produit de la taxe doit être versé à l'ANAH.
Or, la taxe additionnelle au droit de bail, acquittée uniquement par les
bailleurs privés, et dont le produit représente 3,5 milliards de
francs par an, avait déjà cet objectif. Mais l'ANAH ne
perçoit annuellement que 2,2 milliards de francs, si bien que plus d'un
milliard de francs collecté originairement dans un objectif, sert
à alimenter d'autres priorités du budget général.
Il résulte de cette situation que l'écart s'accroît entre
les réalisations de l'ANAH et la contribution imposée aux
propriétaires-bailleurs. En cinq ans, de 1991 à 1996, la taxe
additionnelle au droit de bail a progressé de 50,78% alors que les
subventions de l'ANAH n'ont que faiblement progressé.
D. LE RISQUE DE PORTER ATTEINTE A LA VOCATION LOCATIVE DES
PROPRIÉTAIRES
1. Une mesure fiscale vexatoire en direction des propriétaires ne ferait
qu'aggraver la crise de l'investissement locatif
L'idée de taxer l'inhabitation de logements n'est pas une idée
nouvelle, mais elle avait jusqu'à présent été
écartée pour son inadaptation aux réalités du
phénomène de la vacance immobilière et pour ses
difficultés de mise en pratique.
Un amendement de MM. Tardito, Thiémé, Brard,
députés, et les membres du groupe communistes et apparenté
à l'Assemblée Nationale, ayant pour objet d'introduire une taxe
sur les logements vacants, avait été rejeté lors de la
discussion de la loi de finances pour 1991.
M. Alain Richard, alors rapporteur général à
l'Assemblée nationale, avait clairement fait valoir les
inconvénients de la création d'une taxe d'inhabitation : "
de
telles formules, tendant à inciter, voire à contraindre les
propriétaires de logements temporairement vacants à les vendre
ont démontré leur inconvénient : tendre à une
réduction progressive du parc locatif, phénomène contre
lequel nous devons lutter
."
Le gouvernement précise que l'objet de la nouvelle taxe sera d'inciter
les propriétaires de logements vacants à les remettre sur le
marché, si bien qu'elle n'aurait, en définitive, aucun
caractère pénalisant.
Or, le produit de la taxe est estimé par l'administration fiscale
à 200 millions de francs par an, pour Paris et les trois
départements de la petite couronne, ce qui démontre a contrario,
que son application est bien envisagée.
De plus, il faut souligner que cette taxe entrant en vigueur à compter
du 1er janvier 1999, elle pourra s'appliquer aux logements vacants depuis le
1er janvier 1997. Elle comportera donc une dimension rétroactive.
2. L'échec des mesures incitatives s'explique par leur inadaptation
au problème de la vacance et nécessite une réflexion
approfondie plutôt qu'un abandon
Jusqu'à présent, les mesures destinées à lutter
contre la vacance de logements avaient toujours été
incitatives.
On peut évidemment regretter qu'elles n'aient pas eu plus
d'efficacité, mais cela tient à la modestie de leurs dispositions
et surtout à leur méconnaissance des caractéristiques des
logements vacants.
Des exonérations temporaires d'impôt sur le revenu sont
prévues aux articles 15 ter et 15 quater du code général
des impôts en faveur des logements vacants remis en location.
L'article 15 ter
issu de la loi de finances rectificative pour 1991 et
reconduit par l'article 55 de la loi n°95-115 du 4 février 1995
exonérait de l'impôt sur le revenu les produits des deux
premières années de location des logements remis en location
avant le 1er juillet 1996, lorsqu'ils étaient vacants depuis plus de
deux ans et situés dans une commune de moins de 5.000 habitants. Le
logement devait être loué pour 9 ans à des personnes
répondant à des conditions de ressources et pour un loyer
plafonné.
L'article 15 quater
issu de la loi de finances pour 1993 et reconduit
par les lois de finances pour 1995 et 1996 exonérait d'impôt sur
le revenu les produits des deux premières années de location d'un
local vacant depuis plus d'un an au 31 décembre 1995. La location devait
avoir pris effet avant le 31 décembre 1996. Les conditions
étaient plus souples que celles définies à l'article 15
ter : vacance requise d'un an seulement, engagement de location de six ans et
non neuf ans, aucune condition relative au montant des loyers ou des ressources
du locataires.
Le coût de ces deux dispositifs a été modeste : 30 millions
de francs par an en 1995,1996 et 1997 pour l'article 15 ter, 60 millions de
francs en 1996 et 50 millions de francs en 1997 pour l'article 15 quater.
Si ces dispositifs ont été limités dans leurs effets,
cela tient à l'absence de prise en compte de certains
éléments
: de nombreux logements sont vacants parce qu'ils
nécessitent des travaux de réparation ou d'amélioration,
or l'exonération prévue aux articles 15 ter et 15 quater du CGI
prive les contribuables de la possibilité de déduire les charges
locatives afférentes au logement remis en location et d'imputer sur le
revenu global l'éventuel déficit qui serait né de ces
charges. Les déficits fonciers sont imputables sur le revenu global dans
la limite de 70.000 francs et peuvent être reportés sur les
revenus fonciers ultérieurs dans un délai porté de cinq
à dix ans depuis l'imposition des revenus de 1996.
Si ces mesures n'ont pas été reconduites, c'est en raison de
leur inadaptation aux difficultés rencontrées par les
propriétaires de logements vacants et il n'est donc pas légitime
de dire que toute mesure incitative serait, par construction, vouée
à l'échec, à condition que celle-ci soit bien
pensée
.
Il faut d'ailleurs compter au nombre des dispositions incitatives les
réalisations de l'ANAH.
3. Le rôle décisif de l'ANAH dans la remise en location de
logements vacants, doit être développé
Jusqu'à fin 1991, les logements vacants, ainsi que les logements acquis
depuis moins de deux ans, n'étaient recevables aux aides de l'ANAH
qu'à titre dérogatoire.
En 1995, au total, 81.700 logements ont été
améliorés grâce aux subventions de l'ANAH et 42.200
logements ont été remis sur le marché
. Les logements
vacants remis sur le marché font l'objet de travaux importants avec un
montant minimum de travaux subventionnés de 166.000 F par logement.
Par ailleurs, dans le cadre du plan d'urgence en faveur des plus
démunis, le gouvernement avait demandé à l'ANAH de
développer une offre nouvelle de logements locatifs à vocation
sociale.
Lors de son conseil d'administration du 11 juillet 1995, l'ANAH a pris des
mesures plus favorables pour les logements vacants et les logements
loués à des personnes défavorisées.
Ainsi, lorsqu'un propriétaire réalise des travaux
d'amélioration dans un logement vacant qu'il s'engage à
conventionner, la subvention qui lui est versée est majorée d'un
montant forfaitaire de 20.000 francs, sous conditions.
Lorsque le propriétaire d'un logement vacant réhabilite un
logement pour le louer dans le cadre d'un programme social thématique,
en plus de la subvention de l'ANAH, il bénéficie également
d'une prime de 20.000 francs.
En 1995, 2.541 logements vacants conventionnés ont
bénéficié de ce dispositif et 2.078 logements vacants ont
été financés dans le cadre des programmes sociaux
thématiques.
A une petite échelle (environ 4.000 logements par an),
l'expérience des programmes sociaux thématiques montre qu'il est
possible de donner des réponses adaptées au problème de
l'exclusion sociale sans recourir à des mesures coercitives. Les
logements des PST étaient dans leur grande majorité vacants (85%)
et très dégradés, nécessitant des travaux
élevés. L'offre, constituée de petits logements,
correspond bien à une demande caractéristique des populations
fragilisées sur le plan social.
A contrario, la taxe sur les logements vacants est abusivement
qualifiée de disposition destinée à la lutte contre
l'exclusion
car elle vise à contraindre les propriétaires
à remettre en location ou à vendre des logements qui, une fois
réhabilités, sont susceptibles de faire l'objet de loyers plus
élevés et d'être occupés par des personnes sans
condition de ressources particulière.
Très récemment encore, le rapport introductif du groupe de
travail sur le parc privé et ses fonctions économiques et
sociales, mis en place sous l'égide du Conseil national de l'habitat,
présidé par M. Michel Delebarre, pour la rencontre nationale du
logement le 5 juin 1998, a souligné le très faible potentiel que
représente le parc vacant pour un éventuel accroissement de
l'offre de logements en faveur des plus démunis.
Il a ajouté que "
toute mesure coercitive de taxation a des effets
psychologiques auprès des populations concernées
désastreux et irrémédiables sur le volume
d'activité"
.
Or, l'on oublie souvent que le parc immobilier privé loge des personnes
défavorisées. Depuis quelques années, ce "parc social de
fait" est en diminution : la politique de réhabilitation se traduit par
un changement de la nature des occupants, et ce, en dépit des politiques
de solvabilisation par les aides à la personne.
Dans le même temps, les loyers du secteur HLM augmentent plus rapidement
que ceux du secteur locatif privé (avec un différentiel de 1,5%
environ).
Il apparaît donc urgent, plutôt que de pénaliser les
propriétaires par l'instauration d'une nouvelle taxe, de donner les
moyens au parc immobilier privé de loger les personnes à faibles
revenus en lui accordant des avantages en matière de fiscalité et
de sécurité des loyers.
A cet égard, il est à espérer que le futur statut du
bailleur privé puisse donner de véritables réponses au
problème de l'exclusion en matière de logement.
Décision de la commission
:
votre commission
émet un avis défavorable à l'adoption de cet article, et
vous propose de le supprimer.
CHAPITRE
IV
EXERCICE DE LA CITOYENNETÉ
ARTICLE 40 C (nouveau)
Modalités d'exonération du
timbre fiscal exigé pour la délivrance d'une carte nationale
d'identité
Commentaire : le présent article insère un
nouvel
article 947
bis
dans le code général des impôts
(CGI) ayant pour objet d'accorder une faculté d'exonérer de
timbre fiscal pour la délivrance d'une carte nationale d'identité
les personnes qui ne peuvent apporter la preuve d'une domiciliation fixe, sur
production d'une attestation établissant un lien avec un organisme
d'accueil.
I. - LE DISPOSITIF EXISTANT
Aux termes de l'article 947 du code général des impôts, les
cartes d'identité délivrées par les préfets et les
sous-préfets sont assujetties, soit lors de délivrance, soit lors
de leur visa, de leur validation ou de leur renouvellement, lorsque ces
formalités sont obligatoires d'après les règles en
vigueur, à un droit de timbre.
Le "c" de l'article 947 du CGI prévoit la perception d'un droit de
timbre de 160 francs, depuis le 15 janvier 1998, pour les cartes
d'identité autres que celles visées au "a" du même article,
c'est-à-dire autres que les cartes d'identité professionnelle des
voyageurs ou représentants de commerce.
Le droit de timbre de 160 francs concerne donc principalement la carte
nationale d'identité, qui a été instituée par le
décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 et a une
durée de validité de dix ans, le timbre étant dû
lors de sa délivrance ou de son renouvellement.
II. - LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE
Le présent article insère un nouvel article 947
bis
dans
le code général des impôts qui instaure
la
faculté d'exonérer du droit de timbre
pour la carte nationale
d'identité les personnes qui n'ont pas la possibilité d'apporter
la preuve d'une domiciliation, sur présentation d'une attestation
établissant un lien entre le demandeur et un organisme d'accueil.
Cet article va dans le bon sens
: le droit de timbre est un
élément dissuasif pour les personnes sans domicile fixe
souhaitant se faire délivrer une carte d'identité.
Les personnes sans domicile fixe, ne possédant pas de carte
d'identité, ou plus souvent ayant une carte périmée ou
perdue, doivent pouvoir se voir délivrer gratuitement ce document qui
les aidera dans leurs démarches ultérieures, notamment
auprès des organismes publics.
Il faut toutefois que cette exonération soit bien ciblée afin
d'éviter tout abus, la seule déclaration de non-domiciliation
n'étant pas suffisante.
En particulier, des personnes ne disposant pas de domicile connu mais ayant des
ressources suffisantes pourraient entrer dans le champ de l'exonération.
Les articles 952 et 955 du code général des impôts
prévoient des exonérations pour les cartes de séjour et
les passeports et visas de passeports délivrées aux personnes
indigentes.
Le critère de l'indigence n'a pas été retenu
25(
*
)
, mais celui de l'absence de domicile fixe. Même
si la délivrance d'une carte d'identité prend une importance
toute particulière pour ces personnes,
il est possible de regretter
l'absence totale de prise en compte des ressources dans l'exonération
prévue.
Par ailleurs,
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a
clairement exprimé son souhait
d'exonérer du timbre fiscal
exigé pour la délivrance de la carte nationale d'identité
toutes les personnes sans domicile fixe
, sous réserve qu'elles
soient présentées par un organisme d'accueil figurant sur une
liste qui sera établie par le représentant de l'Etat dans le
département et à Paris par le Préfet de police.
Or, la formulation actuelle de l'article 947
bis
nouveau n'accorde
qu'une faculté d'exonération, dont on ne sait qui l'exercera et
sur quels critères.
Les conditions posées pour l'exonération sont suffisamment
précises pour ôter toute marge de manoeuvre à
l'administration.
Il vous est donc proposé un amendement tendant à :
- remplacer la faculté d'exonération en exonération,
conformément à la rédaction existante en
matière de cartes de séjour et de passeports,
- introduire une condition de ressources
(les personnes dont les ressources
ne dépassent pas le montant du revenu minimum d'insertion),
- insérer cet article dans le chapitre relatif aux
exonérations
et non dans celui relatif au régime normal.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
TITRE
II
DE LA PRÉVENTION DES EXCLUSIONS
CHAPITRE PREMIER
PROCÉDURE DE TRAITEMENT DES SITUATIONS DE
SURENDETTEMENT
ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE
42
Interdiction de la rémunération des services rendus aux
débiteurs dans le cadre de la procédure de traitement du
surendettement devant la commission de
surendettement
Commentaire : cet article vise à interdire la
rémunération des services rendus aux débiteurs dans le
cadre de la procédure de traitement du surendettement devant la
commission de surendettement.
I. LE DISPOSITIF ACTUEL
La montée du surendettement a entraîné le
développement des officines de dettes, appelées également
cabinets de gestion de dettes qui, en échange d'une
rémunération très élevée pour le service
rendu et disproportionnée par rapport à la situation
financière déjà très compromise du débiteur,
leur proposent de les aider à sortir de leur situation de
surendettement.
Le législateur s'est inquiété de l'apparition de ces
organismes et a adopté toute une série de dispositions visant
à réglementer l'activité d'intermédiaire pour le
règlement des dettes.
Ainsi, l'article L. 321-1 du code de la consommation dispose :
"Est nulle de plein droit toute convention par laquelle un
intermédiaire se charge ou se propose moyennant
rémunération :
"1° soit d'examiner la situation d'un débiteur en vue de
l'établissement d'un plan de remboursement ;
"2° soit de rechercher pour le compte d'un débiteur l'obtention de
délais de paiement ou d'une remise de dette."
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Lors de l'examen en première lecture du projet de loi d'orientation
relatif à la lutte contre les exclusions, l'Assemblée nationale a
adopté plusieurs amendements visant à renforcer le dispositif de
lutte contre ces officines de gestion des dettes.
Elle a ainsi voté une disposition qui prévoit que toute personne
entendue par la commission de surendettement intervient à titre gratuit.
Par ailleurs, elle a complété l'article L. 331-10 du code de la
consommation qui dispose que "
les parties peuvent être
assistées devant la commission par toute personne de leur
choix
" afin de préciser que cette assistance ne peut
être payante.
Pourtant, si l'intention de l'Assemblée nationale est louable, aucun des
amendements proposés ne paraît satisfaisant car ils risquent de
contrevenir au principe selon lequel chacun, même le plus démuni,
doit avoir la faculté de connaître ses droits et d'être
assisté et défendu.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose plutôt de compléter
l'article L. 321-1 du code de la consommation précité en ajoutant
un alinéa qui interdit la rémunération d'une intervention
pour le compte du débiteur, sous quelque forme que ce soit, pour les
besoins de la procédure de surendettement devant la commission.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter le présent article additionnel.
ARTICLE 42
Composition de la commission de
surendettement
Commentaire : cet article vise à modifier la
composition
de la commission de surendettement
I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
La commission de surendettement introduite par l'article L. 331-1 du code
de la consommation a pour mission de traiter la situation de surendettement des
personnes physiques. Après avoir dressé l'état
d'endettement, elle s'efforce de concilier les parties en vue de
l'élaboration d'un plan conventionnel de redressement approuvé
par le débiteur et les créanciers.
La loi "Neiertz" avait limité sa composition à cinq
personnes :
• le représentant de l'Etat dans le département, qui la
préside ;
• le trésorier-payeur, vice-président ;
• le représentant local de la Banque de France qui assure le
secrétariat ;
• deux personnalités choisies par le représentant de l'Etat
dans le département, l'une sur proposition de l'Association
française des établissements de crédit et l'autre sur
proposition des associations familiales ou de consommateurs.
Le texte proposé par le Gouvernement et discuté en
première lecture par l'Assemblée nationale ajoutait deux nouveaux
membres :
• le directeur des services fiscaux pour permettre un double
échange d'informations : d'une part, en direction des membres de la
commission, pour faire valoir les efforts que l'Etat consent à propos de
certains débiteurs dont les dossiers sont examinés par la
commission et porter à la connaissance de cet organisme les informations
jugées utiles et d'autre part, en direction des services fiscaux pour
les informer des difficultés rencontrées par certains
débiteurs ;
• le président du conseil général pour
développer les liens entre les services sociaux du département et
la commission.
II. LE TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a rejeté l'idée de faire participer
le président du conseil général aux réunions de la
commission de surendettement en estimant que la nature de celle-ci, à
savoir administrative, serait dénaturée.
En revanche, elle a estimé que la composition actuelle de la commission
de surendettement ne permettait pas d'assurer le lien nécessaire avec
les organismes chargés du logement et notamment, les
représentants des locataires. Elle a donc ajouté une
troisième personnalité choisie par le représentant de
l'Etat dans le département sur proposition du fonds de solidarité
pour le logement parmi les représentants des locataires ou, à
défaut, un membre du conseil départemental de la consommation
représentant les locataires.
Votre rapporteur estime cependant que le texte adopté par
l'Assemblée nationale n'est pas satisfaisant.
Au printemps 1997, pour faire suite à une suggestion de votre
rapporteur, la commission des Lois et la commission des Finances ont
décidé de constituer un groupe de travail chargé de
dresser un bilan de la loi n°89-1010 relative à la
prévention et au règlement des difficultés liées au
surendettement des particuliers et des familles. Cette mission a
été confiée à M. Jean-Jacques Hyest et à
votre rapporteur. Le groupe de travail avait réfléchi sur la
modification de la composition des commissions de surendettement en essayant de
concilier deux impératifs :
• d'une part, la nécessité de mieux prendre en compte la
dimension sociale des dossiers ;
• d'autre part, la nécessité de ne pas trop alourdir le
processus de décision de la commission en augmentant de manière
significative le nombre de ses membres.
A l'époque, le groupe de travail avait préconisé la
présence d'un travailleur social siégeant aux réunions de
la commission de surendettement avec voix consultative. Il apparaît
aujourd'hui que cette mesure serait difficilement applicable en raison de la
charge de travail des travailleurs sociaux.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose d'introduire un septième
membre au sein de la commission de surendettement qui aurait les mêmes
fonctions que celles dévolues à l'origine au travailleur social,
mais qui serait un représentant des services sociaux du
département désigné par le président du conseil
général.
Une telle configuration offrirait de nombreux avantages :
La présence de ce représentant conduirait à une plus
grande collaboration entre les commissions et les acteurs sociaux, y compris le
fonds de solidarité pour le logement puisque le département en
est, avec l'Etat, le bailleur. Désormais, il existerait au sein de la
commission une personne compétente pour orienter le débiteur vers
le service social susceptible de répondre à ses besoins et
à ses attentes. La présence de ce représentant devrait
donc contribuer à mieux informer le débiteur surendetté
sur les aides dont il peut bénéficier et, par là
même, rendre le plan de redressement plus supportable. En outre, lorsque
le dossier ne peut manifestement pas être traité par la commission
mais relève de l'aide sociale, ce représentant pourrait
réorienter le dossier vers les services sociaux compétents.
Par ailleurs, la présence de ce représentant permettrait de
supprimer la personnalité choisie par le représentant de l'Etat
dans le département sur proposition du fonds de solidarité pour
le logement parmi les représentants des locataires ou, à
défaut, un membre du conseil départemental de la consommation
représentant les locataires.
Cette disposition a été votée par l'Assemblée
nationale pour palier les carences observées par l'ODAS
26(
*
)
en matière de coordination des interventions
de la commission de surendettement et du fonds de solidarité pour le
logement. Or, si le lien entre l'aide au logement et le surendettement reste
à développer dans certains départements, ce
résultat peut être obtenu sans imposer la présence d'un
représentant du fonds de solidarité pour le logement. Ainsi, le
représentant des services sociaux du département peut avoir
également pour mission d'assurer la liaison entre la commission et le
fonds de solidarité pour le logement et, en conséquence,
d'orienter le débiteur vers ce dernier lorsque sa situation le
nécessite.
En effet, l'orientation du surendetté vers le fonds de solidarité
pour le logement est loin d'être toujours utile puisque la situation
sociale de ces derniers varie fortement d'une personne à l'autre :
les surendettés ne sont pas tous des exclus qui éprouvent de
grandes difficultés pour se loger.
En outre, le choix, pour représenter le fonds de solidarité pour
le logement, d'un représentant des locataires ne correspond pas à
l'objectif recherché par l'Assemblée nationale, à savoir
le renforcement des liens institutionnels entre les commissions de
surendettement et les organismes chargés du logement.
La question de savoir s'il faut donner au représentant des services
sociaux du département une voix délibérative ou une voix
consultative n'a pas été tranchée par votre rapporteur qui
souhaitait recueillir préalablement l'avis de la commission des
finances. Deux logiques s'affrontent :
• les partisans d'une voix délibérative font remarquer que
les six autres membres de la commission ont déjà un tel
pouvoir ; ce système permettrait qu'une majorité puisse
toujours se dégager ;
• les défenseurs d'une voix consultative craignent que le fait que
le représentant puisse trancher dans les cas difficiles renforce les
pressions sur le département pour augmenter son rôle dans la lutte
contre le surendettement et, en conséquence, sa participation
financière.
A l'issue d'un long débat, la commission des finances a modifié
l'amendement proposé par son rapporteur afin de laisser au
président du conseil général le choix de nommer un
représentant qualifié des services du département.
Par ailleurs, la commission a donné à ce représentant une
voix délibérative, estimant inopportun que le représentant
du conseil général ne puisse pas disposer des mêmes
pouvoirs que les autres membres de la commissions et faire valoir, le cas
échéant, son accord ou son opposition.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 43
Fixation des ressources minimales du
ménage par la commission de
surendettement
Commentaire : cet article vise à définir la
part
des ressources minimales nécessaires aux dépenses du
ménage qui ne peut être utilisée pour le remboursement des
dettes.
I. LE DISPOSITIF PRÉSENTÉ PAR LE GOUVERNEMENT
L'article L. 331-6 du code de la consommation dispose que "
la
commission a pour mission de concilier les parties en vue de
l'élaboration d'un plan conventionnel de redressement approuvé
par le débiteur et ses principaux créanciers. Le plan peut
comporter des mesures de report ou de rééchelonnement des
paiements des dettes, de remises de dettes, de réduction ou de
suppression du taux d'intérêt, de consolidation, de
création ou de substitution de garantie.
".
En revanche, aucune disposition ne précise la manière dont la
commission de surendettement définit, à partir des ressources du
débiteur, la part que celui-ci peut consacrer au remboursement de ses
dettes par le biais du plan amiable et la part nécessaire pour faire
face à ses dépenses courantes minimales.
L'absence d'une règle nationale fixant une méthode de calcul de
ce que l'on appelle couramment " le reste à
vivre ", c'est-à-dire de ce qui, au-delà des
remboursements prévus, permet au débiteur d'assumer les charges
de la vie courante, constituait une volonté
délibérée du législateur lors de l'adoption de la
loi du 31 décembre 1989 relative à la prévention et au
règlement amiable des difficultés liées au surendettement
des particuliers et des familles.
En effet, le coût de la vie n'est pas le même selon que l'on habite
en zone urbaine ou en zone rurale. Il apparaît donc légitime de
laisser aux commissions une marge d'appréciation. Cette
préoccupation est d'ailleurs prise en compte dans la circulaire du
ministère de l'économie et des finances du 28 septembre 1995 qui
réserve aux commissions le soin d' "
apprécier librement
le montant des revenus devant être laissés à la disposition
des surendettés en fonction du niveau du coût de la vie dans
l'environnement géographique du demandeur et de sa situation personnelle
et familiale.
"
Selon les informations obtenus par votre rapporteur, deux méthodes sont
utilisés par les secrétariats des commissions de surendettement
pour calculer la détermination du " reste à vivre ".
La première méthode prend en compte les justificatifs
réels des charges de loyers, d'impôts et de certains frais fixes
atypiques (pensions alimentaires...) et calcule un forfait pour l'alimentation,
les charges d'électricité, de téléphone et
d'assurance.
La seconde méthode prend en compte les justificatifs réels de
tous les frais sauf ceux d'alimentation et d'entretien qui font l'objet d'un
forfait.
A partir d'un échantillon de 22 commissions, les résultats
concernant les " restes à vivre " calculés par les
commissions selon la première ou la seconde méthode sont les
suivants :
Méthode n o 1 |
|||
|
Minimum |
Maximum |
Moyenne |
Célibataire
|
1.800
|
3.500
|
2.927
|
Méthode n o 2 |
|||
|
Minimum |
Maximum |
Moyenne |
Célibataire
|
1.000
|
2.300
|
1.623
|
Il
résulte de ce tableau que les différences de revenu selon la
méthode utilisée sont loin d'être négligeables.
En outre, plus le revenu disponible après les remboursements est
limité, plus les risques d'incidents de paiement pendant la durée
du plan sont élevés.
Pour remédier à ces inconvénients liés aux
disparités des méthodes de calcul du reste à vivre, le
présent article propose de fixer un plancher de ressources en dessous
duquel les commissions ne peuvent descendre, afin de permettre au
débiteur ayant bénéficié d'un plan de redressement
de disposer d'un reste à vivre calculé par
référence à la quotité saisissable telle qu'elle
résulte de l'article L. 145-2 du code du travail.
II. LE DISPOSITIF VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale, tout en se déclarant favorable à
l'obligation imposée aux commissions de surendettement d'exclure du
montant des remboursements la part des ressources nécessaires aux
dépenses courantes du ménage, a regretté que le
mécanisme proposé définisse le " reste à
vivre " d'une manière résiduelle.
Elle a donc adopté un amendement visant à définir la
fraction du revenu pouvant donner lieu à remboursement dans le cadre
d'un plan amiable ou des recommandations de la commission, par
référence à la quotité saisissable du salaire telle
qu'elle résulte de l'article L. 145-2 du code du travail et de telle
sorte qu'une partie des ressources nécessaires aux dépenses
courantes du ménage lui soit réservée par priorité.
Par ailleurs, elle a adopté un amendement qui précise que le
montant minimal de ressources nécessaires aux dépenses de la vie
courante ne peut être inférieur à un montant égal au
revenu minimum d'insertion.
Votre rapporteur est assez sceptique devant le dispositif adopté par
l'Assemblée nationale qui lui paraît moins clair que celui
proposé initialement par le gouvernement.
Ainsi, le fait que le montant des remboursements soit calculé de
manière à ce qu'une partie des ressources nécessaires aux
dépenses courantes du ménage lui soit réservée par
priorité prête à confusion. Certes, votre rapporteur
comprend que le texte fasse référence à " une partie
des ressources " et non à " la partie des ressources "
dans la mesure où le calcul de la quotité saisissable devrait
être effectué sur les ressources du seul débiteur, alors
que la commission peut prendre en compte les ressources de l'ensemble du
ménage. Dans ce cas, le texte proposé ne résout cependant
pas le problème de la détermination de cette partie des
ressources nécessaires aux dépenses courantes.
En outre, votre rapporteur craint que ce système soit d'un maniement
complexe puisqu'il faudra fixer le montant des remboursements par rapport
à la quotité saisissable tout en tenant compte du revenu minimum
d'insertion.
A cet égard, votre rapporteur tient à faire remarquer que la loi
du 1
er
décembre 1988 relative au revenu minimum
d'insertion fait référence à la personne et non au
ménage. L'application de la disposition votée par
l'Assemblée nationale selon laquelle "
cette part de ressources,
qui ne peut être inférieure à un montant égal au
revenu minimum d'insertion dont disposait le ménage
" est donc
source de complications.
Votre rapporteur serait donc favorable à ce qu'une nouvelle
rédaction du présent article puisse être adoptée,
qui indiquerait de manière plus claire la méthode de calcul
retenue pour déterminer la part des ressources nécessaires aux
dépenses courantes.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 43 bis (nouveau)
Fixation d'un plancher
de ressources minimales correspondant au montant du revenu minimum d'insertion
Commentaire : cet article vise à fixer un plancher
de
ressources minimales à la disposition du débiteur correspondant
au montant du revenu minimum d'insertion.
I. LE DISPOSITIF EXISTANT
L'article L. 145-4 du code du travail dispose que le prélèvement
direct du terme mensuel courant et des six derniers mois impayés de la
pension alimentaire peut être poursuivi sur l'intégralité
de la rémunération. Toutefois, une somme est, dans tous les cas,
laissé à la disposition du bénéficiaire de la
rémunération.
En application de l'article R. 145-3 du code du travail, cette somme
correspond au montant mensuel du revenu minimum d'insertion.
En revanche, l'article L. 145-2 du code du travail relatif à la
détermination de la fraction saisissable sur rémunération
ne prévoit pas un plancher minimal de ressources insaisissables.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Afin d'éviter que la fraction insaisissable puisse être
inférieure au montant du revenu minimum d'insertion, l'Assemblée
nationale a adopté un amendement complétant l'article L. 145-2 du
code du travail et disposant que : "
il est en outre tenu compte
d'une fraction insaisissable, égale au montant de ressources dont
disposerait le salarié s'il ne percevait que le revenu minimum
d'insertion
".
Cet amendement constitue également un amendement de cohérence. En
effet, l'Assemblée nationale a également adopté un
amendement à l'article 43 du présent projet de loi qui
précise que la part des ressources du ménage débiteur,
calculé par référence à la quotité
saisissable du salaire telle qu'elle résulte de l'article L.145-2 du
code du travail, ne peut être inférieur à un montant
égal au revenu minimum d'insertion dont disposerait le ménage.
Le présent amendement vise donc à éviter que les
salariés ne puissent pas bénéficier des dispositions
relatives au "reste à vivre" prévues pour les ménages
surendettés.
Votre rapporteur n'est donc pas hostile à cette mesure même si
elle lui paraît plus être une "mesure d'affichage" qu'une mesure
susceptible d'être réellement appliquée.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 44
Procédure applicable devant la
commission
Commentaire : cet article vise à compléter la
procédure applicable devant la commission afin de permettre au
débiteur d'être entendu par la commission et de fixer un
délai limite durant lequel les créanciers peuvent contester
l'état du passif dressé par la commission.
I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
L'article L.331-3 du code de la consommation précise les règles
de procédure applicable devant la commission.
Une fois que la commission a jugé le dossier recevable, elle dresse
l'état d'endettement du débiteur à partir des
éléments d'informations contenus dans ledit dossier. Le
débiteur est tenu de lui déclarer les éléments
d'actif et de passif de son patrimoine.
Dans le texte actuellement en vigueur, il est précisé qu'
" elle peut entendre toutes les personnes dont l'audition lui
paraît utile
", y compris donc le débiteur.
Le paragraphe I du présent article transforme cette possibilité
en obligation. Désormais, si le débiteur le demande, la
commission doit l'entendre. Cette disposition doit permettre à ce
dernier de mieux faire valoir ses droits.
Par ailleurs, le paragraphe II du présent article introduit un nouveau
dispositif relatif aux créanciers. Dans le texte actuellement en
vigueur, il était précisé que "
la commission peut
faire publier un appel aux créanciers
", mais aucune
disposition n'était prévue en cas de contestation par les
créanciers de l'état d'endettement des débiteurs
fixé par la commission.
C'est pourquoi le paragraphe II autorise les créanciers à
contester le montant des créances déterminé par la
commission tout en limitant dans le temps ce droit de contestation, afin que
cette possibilité ne soit pas utilisée à des fins
dilatoires.
Ainsi, il dispose qu' "
après avoir été
informés par la commission de l'état du passif
déclaré par le débiteur, les créanciers disposent
d'un délai de quarante-cinq jours pour fournir, en cas de
désaccord sur cet état, les justifications de leurs
créances en principal, intérêts et accessoires. A
défaut, la créance est prise en compte par la commission au vu
des seuls éléments fournis par le débiteur
. "
II. LE TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a apporté trois modifications au texte
proposé par le gouvernement.
Elle a tout d'abord tenu à préciser que, si la commission peut
entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile, celle-ci doit
intervenir à titre gratuit.
L'Assemblée nationale a ainsi voulu éviter que la situation du
débiteur soit encore aggravée par la nécessité de
payer la personne choisie par lui pour l'accompagner.
Or, si l'intention de l'Assemblée nationale est louable, cette
disposition s'avère soit inutile, soit dangereuse.
Elle est inutile à chaque fois que la commission entend un travailleur
social, un établissement de crédit ou encore le débiteur
lui-même, puisqu'on peut difficilement imaginer que ces derniers exigent
de se faire rémunérer pour être auditionnés par la
commission.
En outre, elle est dangereuse dans la mesure où elle empêche et
le débiteur et les créanciers de rémunérer la
personne de leur choix pour se faire représenter devant la commission.
En pratique, cela signifie que la plupart des avocats refuseront d'intervenir,
ce qui se retournera non seulement contre les créanciers, mais
également contre les débiteurs que cette disposition est
censée protéger.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement qui vise à
supprimer cette disposition.
L'Assemblée nationale a également réduit de quarante-cinq
à trente jours le délai imparti aux créanciers pour
contester l'état du passif déclaré. Votre rapporteur est
favorable à cette mesure qui tient compte de la situation d'urgence du
débiteur surendetté et évite que des délais trop
longs ne rallongent inconsidérément la conclusion d'un plan de
redressement.
Enfin, l'Assemblée nationale a voté une disposition qui oblige
les créanciers qui contestent la validité d'une créance
à indiquer si la créance en cause a donné lieu à
une caution et si celle-ci a été actionnée. Votre
rapporteur ne peut qu'être favorable à cette mesure qui devrait
mettre un terme à la pratique illégale et pourtant bien
réelle de certains créanciers qui consiste à se faire
rembourser deux fois les sommes dues, à la fois en actionnant la caution
et en incluant les dettes dans le plan amiable.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 45
Saisine du juge de l'exécution
par la commission en cas de difficulté sur la validité des
créances
Commentaire : cet article vise à donner au
débiteur
un délai de vingt jours, à partir du moment où il a
été informé de l'état du passif que la commission a
dressé, pour faire saisir le juge de l'exécution afin de
vérifier la validité des titres de créance et le montant
des sommes réclamées.
I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
L'article L. 331-4 du code de la consommation dispose que "
la
commission peut saisir, en cas de difficulté, le juge de
l'exécution d'une demande de vérification de la validité
des titres de créance et du montant des sommes
réclamées.
".
Cette disposition vise à mettre un terme dès le début de
la procédure à toutes les contestations portant sur le montant
des créances afin qu'elles n'entravent pas ultérieurement la
recherche d'une solution amiable.
Le texte proposé par le présent article transforme la
possibilité, pour la commission, de saisir le juge de l'exécution
en une obligation dès lors que cette demande émane du
débiteur. En outre, pour éviter que le débiteur ne soit
privé du droit de saisir la commission par ignorance de l'état de
son passif dressé par la commission, le présent article oblige
cette dernière à informer le débiteur de l'état
d'endettement retenu. Le débiteur dispose alors d'un délai de
vingt jours pour demander à la commission la saisine du juge de
l'exécution, aux fins de vérification de la validité des
titres de créance et du montant des sommes réclamées.
II. LE TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a tenu à préciser que
"
passé ce délai de vingt jours, le débiteur ne
peut plus formuler une telle demande. La commission informe le débiteur
de ce délai. "
.
Votre rapporteur est favorable à cette mesure qui limite dans le temps
la possibilité de contester la validité des titres de
créance et empêche ainsi que des débiteurs peu scrupuleux
puissent utiliser la possibilité de contestation à des fins
dilatoires.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 46
Saisine du juge de l'exécution
par le président de la commission de surendettement, en cas d'urgence,
aux fins de suspension des procédures
d'exécution
Commentaire : cet article vise à autoriser le
président de la commission à saisir le juge de
l'exécution, en cas d'urgence, aux fins de suspension des
procédures d'exécution.
I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
L'article L. 331-5 du code de la consommation dispose que
" la
commission peut saisir le juge de l'exécution aux fins de suspension des
procédures d'exécution diligentées contre le
débiteur et portant sur les dettes autres qu'alimentaires. ".
Cette mesure a pour objectif d'éviter que, pendant la phase
d'élaboration d'un plan amiable, la situation du débiteur ne soit
irrémédiablement compromise par les éventuelles
procédures de recouvrement forcé des dettes engagées par
certains créanciers. Toutefois, la pratique a
révélé que, dans certains cas, les délais de
saisine étaient encore trop longs, les commissions de surendettement ne
se réunissant que tous les quinze jours.
Le paragraphe I du présent article s'efforce de mieux répondre
à ces situations d'urgence en autorisant le président de la
commission à formuler seul la demande de suspension auprès du
juge sans avoir à attendre la réunion de la commission. Il est
toutefois précisé qu'il a le devoir d'informer cette
dernière.
Le paragraphe II du présent article vise à étendre la
durée de suspension des procédures d'exécution.
La rédaction actuelle du deuxième alinéa de l'article L.
331-5 du code de la consommation est assez restrictive puisqu'il est
prévu que la suspension des procédures d'exécution
"
n'est acquise que pour la durée de la procédure devant
la commission sans pouvoir excéder un an. Lorsque le débiteur
fait usage de la faculté que lui ouvre l'article L. 331-7, la
durée de la suspension provisoire est prolongée, jusqu'à
ce que le juge ait conféré force exécutoire aux mesures
recommandées, en application de l'article L.332-1, ou, s'il est saisi en
application de l'article L. 332-2, jusqu'à ce qu'il ait
statué.
".
La rédaction proposée par le présent article est plus
détaillée. Désormais, la suspension des procédures
d'exécution pourra couvrir :
• la phase d'élaboration du plan conventionnel de
redressement ;
• le délai dont dispose le débiteur pour demander à
la commission de formuler des recommandations en cas d'échec de la
conciliation.
Par ailleurs, si la commission propose des recommandations en application de
l'article L. 331-7 du code de la consommation ou la suspension de
l'exigibilité des créances en application de l'article 48 du
présent projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les
exclusions, la suspension des procédures d'exécution est acquise
jusqu'à ce que le juge ait conféré force exécutoire
aux mesures recommandées, ou, s'il est saisi d'une contestation des
mesures recommandées par la commission, jusqu'à ce qu'il ait
statué.
II. LE TEXTE VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a étendu le pouvoir de saisine du juge de
l'exécution en cas d'urgence à d'autres membres de la
commission : le délégué du président de la
commission, le représentant local de la Banque de France ou, encore, le
débiteur.
Votre rapporteur n'est pas favorable à cette mesure.
Ainsi, il estime que le débiteur ne devrait pas disposer de ce pouvoir.
En effet, en tant que partie, le débiteur dispose déjà de
procédures parallèles qui lui permettent de saisir le juge pour
faire suspendre les mesures exécutoires.
Ainsi, en droit commun, un débiteur qui fait l'objet d'une mesure
d'exécution forcée peut toujours en demander la suspension en
sollicitant des délais de grâce sur le fondement des articles
1244-1 et suivants du code civil. Cette demande est en principe portée
devant le juge de l'exécution, dès lors que le commandement ou
l'acte de saisie, selon le cas, a été signifié
antérieurement devant le juge des référés.
Ces dispositions sont applicables lorsque le débiteur est en situation
de surendettement et se combinent avec le régime spécifique de
suspension des poursuites à l'initiative des organes de la commission.
Cette suspension de droit commun à la demande du débiteur est
applicable à l'ensemble des mesures d'exécution forcée.
Toutefois, en matière de saisie immobilière, le juge de
l'exécution cesse d'être compétent au profit du juge de la
saisie à compter de la publication du commandement. Une fois la date
d'adjudication fixée, le report de la vente ne peut être
accordée que pour causes graves dûment justifiées.
Or, l'extension du pouvoir de saisine du juge de l'exécution en cas
d'urgence, par le débiteur, pour la suspension des procédures
d'exécution, risque de conduire à l'encombrement des
juridictions, dans la mesure où cette saisine a toutes les chances de
devenir rapidement automatique.
Par ailleurs, il n'est pas utile de préciser que le
délégué du président de la commission dispose
également de ce pouvoir.
Votre rapporteur vous propose donc un amendement précisant que
la saisine du juge ne puisse intervenir qu'à l'initiative du
président de la commission ou du représentant local de la Banque
de France.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 47
Compétences de la commission en
cas d'échec de la
conciliation
Commentaire : cet article vise à préciser les
compétences de la commission en cas d'échec de sa mission de
conciliation.
I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
L'actuel article L. 331-7 du code de la consommation autorise la commission,
en cas d'échec de la phase amiable, à recommander des mesures de
redressement qui deviennent exécutoires lorsqu'elles ont
été homologuées par le juge. Quatre types de dispositions
peuvent être prises :
le report ou le rééchelonnement des dettes autres que fiscales,
parafiscales ou envers les organismes de sécurité sociale, sans
que le délai de report ou de rééchelonnement puisse
excéder cinq ans ou la moitié de la durée de remboursement
restant à courir des emprunts en cours ; en cas de
déchéance du terme, le délai de report ou de
rééchelonnement peut atteindre la moitié de la
durée qui reste à courir avant la déchéance ;
l'imputation des paiements d'abord sur le capital ;
la réduction des taux d'intérêt au taux légal pour
les sommes correspondant aux échéances reportées ou
rééchelonnées, si la situation du débiteur
l'exige ;
la réduction des prêts immobiliers en cas de vente du logement
principal du débiteur, que la vente soit forcée ou amiable,
à condition que le débiteur en ait fait la demande dans les deux
mois suivant toute sommation d'avoir à payer le montant de la fraction
des prêts immobiliers restant due.
Le paragraphe I du présent article vise à limiter les
possibilités de recommandations de la commission. En effet, l'article 48
du présent projet de loi autorise la commission, lorsque celle-ci
constate l'insolvabilité du débiteur caractérisée
par l'absence de ressources ou de biens saisissables de nature à lui
permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, à recommander la
suspension de l'exigibilité des créances pour une durée
qui ne peut excéder trois ans. Pour éviter que les reports
prévus à la phase de recommandation ne soient confondus avec la
nouvelle phase dite moratoire, le paragraphe I ôte à la commission
de surendettement la possibilité de reporter les dettes.
Votre rapporteur estime cependant que cette disposition va réduire de
manière dommageable la marge de manoeuvre des commissions. En effet, il
n'est pas rare que dans leurs recommandations, ces dernières pratiquent
concomitamment le report et le rééchelonnement de certaines
dettes. C'est pourquoi il vous propose un amendement qui vise à
rétablir la possibilité, pour les commissions, de pratiquer les
reports précités. Toutefois, pour éviter toute confusion
avec les moratoires, votre rapporteur a choisi de ne pas utiliser le terme
" report ", mais de parler de rééchelonnement, " y
compris en différant le paiement d'une partie des dettes ".
En revanche, votre rapporteur se montre favorable à la mesure
introduite par le gouvernement qui vise à étendre la durée
de rééchelonnement des dettes de cinq à huit ans. Il tient
cependant à souligner les limites d'une telle mesure. Certes,
l'augmentation du délai de rééchelonnement maximal permet
d'établir des plans plus acceptables pour les débiteurs. Pour
autant, ces derniers doivent toujours consentir des sacrifices importants, qui
amputent leur niveau de vie. L'allongement de la durée des plans n'est
donc qu'un pis-aller.
Le paragraphe II du présent article précise par ailleurs
que la commission prescrit que les sommes correspondant aux
échéances reportées porteront intérêt
à un taux qui peut être inférieur au taux
d'intérêt légal non pas sur décision, mais sur
proposition spéciale et motivée. Cette modification vise à
prendre en compte le fait que la décision ne devient exécutoire
qu'après l'homologation du juge.
II. LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a introduit un paragraphe I
bis
qui tire
la conséquence de la suppression de la possibilité, pour la
commission et en phase de recommandation, d'autoriser le report de paiement de
dettes.
Dans la mesure où votre rapporteur estime que les commissions doivent
continuer de disposer de cette possibilité, il vous propose un
amendement visant à supprimer ce paragraphe I
bis
.
Parmi les recommandations que peut formuler la
commission se trouve la possibilité de " prescrire que les sommes
correspondant aux échéances reportées ou
rééchelonnées porteront intérêt à un
taux réduit qui peut être inférieur au taux
d'intérêt légal sur décision spéciale et
motivée et si la situation du débiteur l'exige. "
L'Assemblée nationale a introduit un paragraphe III qui dispose que
" quelle que soit le durée du plan de redressement, le taux ne peut
être supérieur au taux légal ".
Votre rapporteur est opposé à cette disposition qui, selon
lui, présente deux inconvénients.
D'une part, elle limite la liberté d'appréciation de la
commission alors que la situation des débiteurs varie
considérablement d'un cas à l'autre. Ainsi, la commission peut,
à juste titre, vouloir procéder à un traitement
différencié des créanciers pour tenir compte de leur
attitude lors de l'octroi des prêts ou encore moduler la
sévérité du plan selon la nature du surendettement (passif
ou actif) ou les capacités financières du débiteur.
D'autre part, cette mesure risque de remettre en cause le dispositif de
traitement du surendettement dont l'équilibre repose sur un
équilibre entre plans amiables et recommandations. Les débiteurs
auront en effet intérêt à refuser le plan conventionnel de
redressement pour faire l'objet de recommandations puisqu'ils pourront dans le
dernier cas bénéficier de taux d'intérêt ne pouvant
dépasser le taux légal.
Votre rapporteur vous propose donc un amendement qui vise la suppression du
paragraphe III de cet article.
L'Assemblée nationale a enfin adopté un
amendement
proposé par le gouvernement qui complète le quatrième
alinéa de l'article L.331-7 du code de la consommation et qui permet
d'imputer le produit de la vente forcée du logement principal en premier
lieu sur le capital restant dû, afin de donner au débiteur des
chances réelles de redressement.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 48
Mise en place d'un moratoire des
dettes en cas d'échec des phases de conciliation et de
recommandation
Commentaire : cet article vise à apporter une
solution aux
débiteurs insolvables en permettant aux commissions de surendettement
non seulement de recommander la suspension de l'exigibilité mais, si
à l'issue du moratoire la situation financière des
débiteurs ne s'est pas améliorée, de proposer la
réduction ou l'effacement de tout ou partie de ses dettes.
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
La loi du 31 décembre 1989 relative à la prévention et au
règlement des difficultés liées au surendettement des
particuliers et des familles, s'est révélée globalement
efficace pour remédier à la montée d'un surendettement
"actif", c'est-à-dire essentiellement lié à un endettement
des ménages supérieur à leurs capacités de
remboursement.
Elle semble toutefois avoir atteint ses limites : face à une
proportion croissante de situations dramatiques caractérisées par
l'absence totale de capacité de remboursement, les commissions de
surendettement sont contraintes de multiplier les moratoires
Or, cette pratique constitue à terme un risque sérieux
"d'engorgement" des commissions. En effet, les cas d'amélioration de la
situation du débiteur sont malheureusement rares. En conséquence,
lorsque la période fixée par le moratoire est
écoulée, le dossier est généralement
déposé de nouveau auprès des commissions de surendettement
qui n'ont guère d'autre solution que de proposer un nouveau moratoire.
Le nombre de dossiers déposés tend donc à augmenter sans
que les commissions puissent leur apporter une solution réelle et
définitive.
Ce constat, que votre rapporteur avait déjà eu l'occasion de
présenter dans le rapport rédigé avec M. Jean-Jacques
Hyest sur le surendettement, a incité le gouvernement à
compléter le dispositif en vigueur en prévoyant une
procédure spécifique applicable aux cas les plus
désespérés.
Ainsi, le présent article vise à insérer après
l'article L. 331-7 du code de la consommation un article L. 331-7-1 qui
instaure deux mécanismes nouveaux : un moratoire des dettes et,
à l'issue de celui-ci et si la situation du débiteur ne s'est pas
améliorée, la réduction ou l'effacement de tout ou partie
des dettes.
A. LE MORATOIRE
Le moratoire ne peut intervenir qu'après le constat d'échec des
négociations pour l'établissement d'un plan amiable.
Jusqu'à présent, en application de l'article L. 331-7 du code de
la consommation, la commission pouvait, en cas d'échec de sa mission de
conciliation, à la demande du débiteur et après avoir mis
les parties en mesure de fournir leurs observations, recommander quatre sortes
de mesures :
• le report ou le rééchelonnement des dettes ;
• l'imputation des paiements d'abord sur le capital ;
• la réduction des taux d'intérêt relatifs aux sommes
correspondant aux échéances reportées ou
rééchelonnées ;
• en cas de vente forcée, la réduction du montant de la
fraction des prêts immobiliers restant due aux établissements de
crédit après la vente.
Désormais, et uniquement lorsque la commission constate
l'insolvabilité du débiteur caractérisée par
l'absence de ressources ou de biens saisissables de nature à permettre
d'apurer tout ou partie de ses dettes et rendant inapplicable le
prononcé des recommandations précitées, la commission
dispose d'une solution alternative. Elle peut, en effet, recommander la
suspension de l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires,
fiscales, parafiscales ou envers les organismes de sécurité
sociale pour une durée qui ne peut excéder trois ans.
Le moratoire n'annule pas la dette, il en reporte seulement l'exécution.
Durant cette période, les sommes dues sont donc de plein droit
productives d'intérêts. Toutefois, pour éviter que ces
intérêts ne compromettent trop la situation financière des
débiteurs, ils sont déterminés au taux légal. En
outre, si la situation du débiteur l'exige, la commission peut
recommander la report du paiement des intérêts à l'issue de
la période.
B. LA RÉDUCTION OU L'EFFACEMENT DE TOUT OU PARTIE DES
CRÉANCES
Même si l'introduction d'un mécanisme permettant d'effacer les
dettes des débiteurs dont la situation financière semble
irrémédiablement compromise apparaît inévitable pour
éviter la remise en cause de l'efficacité du dispositif de
traitement du surendettement, elle doit s'accompagner de garanties de nature
à éviter toute dérive. En effet, la réduction ou
l'effacement unilatéral des dettes constitue une violation directe du
droit des contrats.
C'est pourquoi cette procédure est encadrée. Ainsi, à
l'issue du moratoire, la commission réexamine la situation du
débiteur. Deux solutions sont alors envisageables :
• soit la situation financière du débiteur s'est
améliorée pendant le moratoire : la commission peut alors
recommander tout ou partie des mesures prévues à l'article L.
331-7 du code de la consommation ;
• soit le débiteur reste insolvable : dans ce cas, la
commission peut recommander par une proposition spéciale et
motivée la réduction ou l'effacement de créances autres
qu'alimentaire, fiscales, parafiscales ou envers les organismes de
sécurité sociale.
Cette mesure ne peut toutefois être appliquée qu'une fois que le
juge de l'exécution lui a conféré force exécutoire.
Le présent article prévoit que la réduction ou
l'effacement peut être différencié en fonction de la
situation du créancier.
Par ailleurs, aucune dette contractée postérieurement à la
décision de réduction ou d'effacement ne peut faire l'objet d'une
nouvelle réduction ou d'un nouveau effacement sur une période de
dix ans afin d'éviter les abus (cette période a été
réduite à huit ans par l'Assemblée nationale en
première lecture).
II. LE DISPOSITIF VOTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a sensiblement modifié en première
lecture le texte proposé par le gouvernement. Or, votre rapporteur est
plutôt réservé sur la pertinence de ces modifications dont
la rédaction est souvent peu rigoureuse et qui sont parfois
inacceptables dans leurs principes.
Le texte proposé par le gouvernement dispose que
" lorsque la commission constate l'insolvabilité du débiteur
caractérisée par l'absence de ressources ou de biens saisissables
de nature à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, elle peut
recommander la suspension de l'exigibilité des créances. ".
L'Assemblée nationale a voté une disposition qui
élargit le champ d'application du moratoire aux situations de
surendettement qui résultent de la mise en cause d'un cautionnement
consenti par le débiteur.
Cette mesure paraît louable dans la mesure où elle est
destinée à éviter que la personne qui s'est portée
caution ne tombe elle-même, par ricochet, dans une situation de
surendettement. Pourtant, cette disposition est inacceptable.
En effet, les commissions de surendettement doivent opter pour un moratoire
ou pour des recommandations en fonction de la gravité de la situation
financière du débiteur et non en fonction de la nature du
surendettement.
En outre, cette mesure risque d'introduire une inégalité
injustifiée entre la caution et le débiteur principal, puisque
ce dernier ne bénéficiera pas automatiquement d'un moratoire.
Votre rapporteur vous propose un amendement qui vise à supprimer
cette disposition.
Le texte proposé par le gouvernement dispose que " lorsque la
commission constate l'insolvabilité du débiteur
caractérisée par l'absence de ressources ou de biens saisissables
de nature à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes, elle peut
recommander la suspension de l'exigibilité des créances autres
qu'alimentaires, fiscales, parafiscales ou envers les organismes de
sécurité sociale. ".
L'Assemblée nationale a refusé d'exclure lesdites dettes et a
imposé l'égalité de traitement entre tous les
créanciers. Pourtant, votre rapporteur estime que cette banalisation non
seulement est inutile, mais également dangereuse et contre-productive
pour les contribuables.
L'une des raisons évoquées pour justifier la banalisation des
dettes fiscales serait l'intransigeance de l'administration fiscale face aux
débiteurs faisant l'objet d'une procédure de surendettement.
Or, les statistiques recueillies par votre rapporteur montrent que
l'administration, tout en disposant d'une procédure spécifique de
remise des dettes, est loin d'être aussi intransigeante que d'aucuns le
soutiennent.
Ainsi, en 1997, les dégrèvements gracieux accordés en
matière d'impôt sur le revenu et de taxe d'habitation se sont
élevés à 1,1 milliard de francs. Par ailleurs, 600.000
demandes gracieuses portant sur les impôts précités ont
été examinées par la direction générale des
impôts et pour 94% d'entre elles dans un délai de moins de trois
mois. 70 % de ces demandes se sont traduites par une remise gracieuse.
De même, votre rapporteur s'est entretenu avec le directeur d'une
succursale de la Banque de France qui a souligné qu'en phase amiable, le
Trésor consentait des efforts au moins aussi importants que les
créanciers privés.
Le maintien des dettes fiscales en dehors de la compétence des
commissions de surendettement n'est donc pas de nature à entraver des
plans de redressement. Cette analyse est par ailleurs confirmée par les
faits : l'endettement fiscal représente moins de 5% de
l'endettement global des personnes surendettées.
En outre, la banalisation des dettes fiscales, parafiscales ou envers les
organismes de sécurité sociale est dangereuse. En effet, la
banalisation des dettes fiscales pose un problème de principe du fait de
la nature même de ces dernières, qui, contrairement aux dettes
privées, sont une contribution pour le financement des services publics.
Votre rapporteur tient, à ce titre, à rappeler
l'article XIII de la Déclaration des Droits de l'Homme et du
Citoyen du 26 août 1789 qui dispose : "Pour l'entretien de la
force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution
commune est indispensable. Elle doit être également
répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés".
En conséquence, votre rapporteur ne peut accepter que la
décision de suspendre l'exigibilité de cette contribution, voire
de l'effacer, puisse être transférée à une simple
commission administrative.
En outre, le refus de la part de l'administration fiscale d'accorder des
remises s'explique souvent par le caractère abusif des demandes, soit
que le débiteur ait organisé son insolvabilité, soit qu'il
ait systématiquement négligé de payer ses impôts,
privilégiant d'autres dépenses. De tels agissements constituent
une violation du pacte social, qui, s'ils se multipliaient, risqueraient de
menacer les fondements mêmes de notre société. Or, la
banalisation des dettes sociales va dans ce sens.
En effet, les personnes ayant volontairement accumulé des
impayés importants auprès des services fiscaux essaieront, au
travers des commissions de surendettement, de faire effacer ces dettes. Comme
ces dernières prendront uniquement en compte la situation
financière des débiteurs et non les raisons qui ont conduit
à une telle situation, elles risquent d'abonder dans leur sens alors
même qu'il s'agira d'une insolvabilité organisée. Or, ce
risque ne doit pas être sous-estimé. La société
française est confrontée à une contestation croissante de
l'impôt et à un affaiblissement de la citoyenneté qui
conduisent les débiteurs, en présence de dettes à la fois
privées et fiscales, à privilégier le remboursement des
premières aux dépens de ces derniers. La banalisation de
l'impôt ne fera qu'aggraver ce phénomène.
Par ailleurs, votre rapporteur craint que l'égalité de
traitement des créanciers se révèle contre-productive pour
les débiteurs surendettés. Sachant que les dettes fiscales
peuvent in fine être annulées par les commissions de
surendettement, l'administration fiscale risque de se montrer beaucoup plus
sévère dans l'examen des demandes gracieuses. En outre, le texte
amendé par l'Assemblée nationale prévoit que les
créances entrant dans le champ d'application de la loi et faisant
l'objet d'un premier effacement ne pourront plus faire l'objet d'un nouvel
effacement pendant huit ans. Supposons que le débiteur ayant
bénéficié de cette mesure ait accumulé des
arriérés en matière de taxe d'habitation. Certes, ces
derniers disparaîtront, mais il sera confronté au même
problème dès l'année suivante. Or, si l'effacement des
dettes fiscales a été décidé contre la
volonté de l'administration, il y a peu de chance que cette
dernière accorde une remise l'année suivante.
Enfin,
votre rapporteur tient à faire remarquer que la banalisation des dettes
fiscales ne manquait pas de soulever des conflits de compétence entre
les juridictions administratives et les juridictions judiciaires.
En effet, c'est la juridiction administrative qui est compétente en cas
de contentieux entre le contribuable et l'administration fiscale sur les
remises d'impôts directs accordées ou refusées. En
revanche, c'est le juge de l'exécution qui est compétent en cas
de contestation par l'administration fiscale des propositions de la commission
de surendettement relatives à la réduction ou à
l'effacement de dettes fiscales. Pour une même dette, on peut donc
aboutir à deux décisions différentes, car issues de deux
juridictions distinctes.
Ces remarques étant faites, votre rapporteur ne
conteste pas à l'Assemblée nationale sa volonté
d'éviter qu'une éventuelle intransigeance de l'administration ne
conduise à l'échec des plans et empêche les
débiteurs de bonne foi de sortir de leur situation de surendettement,
tout en contestant la solution que cette dernière a adoptée.
Votre rapporteur estime en effet indispensable le maintien des dettes
fiscales en dehors de la compétence des commissions, la plupart des
directeurs des services fiscaux se montrant très sensibles à la
situation des débiteurs surendettés, ainsi que cela a
déjà été souligné.
Toutefois, conscient de ce que le système est perfectible et
soucieux que les recommandations des commissions soient systématiquement
prises en compte par tous les directeurs des services fiscaux, il vous propose
un amendement qui modifie l'article L. 247 du livre des procédures
fiscales. Celui-ci prévoit que désormais, dans l'examen des
demandes gracieuses, l'administration se détermine en prenant en compte
les recommandations de la commission chaque fois qu'une procédure devant
cet organisme est ouverte parallèlement à celle engagée
devant la commission.
A cet égard, votre rapporteur tient à vous rappeler que le
texte proposé par le gouvernement et adopté par
l'Assemblée nationale prévoit que le directeur des services
fiscaux fait partie de la commission de surendettement. Cette modification de
la composition de la commission a pour objet de permettre un double
échange d'informations :
- en direction des membres de la commission pour faire valoir les
efforts que l'Etat consent à propos de certains débiteurs dont
les dossiers sont examinés par la commission et porter à la
connaissance de cet organisme les informations jugées utiles ;
- en direction des services fiscaux pour les informer des
difficultés rencontrées par certains débiteurs.
Par ailleurs, votre rapporteur a obtenu du ministre du budget la
rédaction d'une instruction sur les demandes gracieuses dans le cadre de
la procédure de traitement du surendettement des particuliers.
La rédaction définitive de cette instruction n'est pas encore
établie mais votre rapporteur a cependant obtenu un avant-projet qui
précise que les décisions gracieuses seraient prises au vu des
recommandations des commissions de surendettement et qui distinguerait deux
situations, selon que la décision de l'administration intervient avant
ou après les recommandations de la commission.
Si l'administration ne s'est pas encore prononcée lorsqu'une
commission formule ses recommandations, l'administration, prenant connaissance
du contenu des recommandations et de l'ensemble des renseignements
détenus par la commission accorde, s'il y a lieu, une remise ou une
modération gracieuse en fonction des critères traditionnels
d'octroi de ce type de mesure, de l'état et de la nature de l'ensemble
des dettes. Le directeur en informe ensuite la commission.
Si les recommandations de la commission sont postérieures à
la décision de l'administration fiscale, il convient de distinguer deux
hypothèses :
- si l'endettement fiscal ayant fait l'objet de la
précédente demande gracieuse est celui au vu duquel la commission
a formulé ses recommandations, l'administration réexamine la
situation du contribuable au vu des recommandations de la commission et de
l'évolution éventuelle de la situation de ressources de la
personne concernée. Elle peut, le cas échéant,
réviser sa décision et en informe en ce cas la commission ;
- si l'endettement fiscal au vu duquel la commission a formulé
ses recommandations n'est pas celui sur lequel a porté la
précédente demande gracieuse, le contribuable peut déposer
une nouvelle demande de remise ou de modération gracieuse qui sera
instruite en tenant compte des recommandations de la commission.
En conclusion, il apparaît donc que grâce à ce
dispositif, existe réellement une obligation de résultat pour les
directeurs des services fiscaux, qui leur laisse cependant seule
compétence pour accorder des moratoires ou des remises gracieuses.
Votre rapporteur vous propose donc la suppression de la disposition
votée par l'Assemblée nationale qui autorise la suspension de
l'exigibilité des dettes fiscales, parafiscales ou envers les organismes
de sécurité sociale ainsi que leur réduction ou leur
effacement.
L'Assemblée nationale a également supprimé la disposition
qui permet de tenir compte, pour la réduction ou l'effacement, de la
situation respective des créanciers lorsque l'équité le
commande.
Votre rapporteur vous propose un amendement qui vise son
rétablissement. En effet, les conséquences de ces mesures seront
tout à fait différentes selon qu'il s'agit d'un
établissement de crédit qui a provisionné la
créance douteuse ou d'un bailleur privé pour qui les loyers
représentent un complément de revenu indispensable.
Par ailleurs, l'Assemblée a adopté un amendement qui
précise que les parties peuvent être assistées devant la
commission par toute personne de leur choix mais que cette assistance ne peut
être payante.
Votre rapporteur ne peut accepter cette disposition qui aurait pour
conséquence d'interdire aux avocats de se faire rémunérer
s'ils interviennent devant la commission. Il s'agit d'une remise en cause du
principe selon lequel tout citoyen doit avoir la faculté de
connaître ses droits, d'être assisté et défendu.
C'est pourquoi il vous propose un amendement qui vise à la suppression
de la disposition précitée.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de l'article ainsi amendé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 48
Renforcement du lien
entre les recommandations des commissions de surendettement et les accords de
remises
Commentaire : cet article vise à renforcer le lien
entre
les recommandations des commissions de surendettement et les accords de remises
par les directeurs des services fiscaux.
L'Assemblée nationale a voté un dispositif qui autorise la
commission de surendettement à suspendre l'exigibilité des
créances fiscales, parafiscales ou envers les organismes de
sécurité sociale et, le cas échéant, à
réduire ou à effacer les créances précitées.
Votre rapporteur estime cette mesure inutile.
En effet, selon les statistiques obtenues par votre rapporteur sur les remises
partielles ou totales accordées par les directeurs des services fiscaux,
en 1997, 600.000 demandes gracieuses portant sur l'impôt sur le revenu ou
la taxe d'habitation ont été examinées par la direction
générale des impôts et 70% de ces demandes se sont
traduites par une remise gracieuse. En 1997, le coût de ces remises s'est
élevé à 1,1 milliard de francs.
Pour autant, il est conscient que certains directeurs des services fiscaux
peuvent se montrer réticents à accorder des remises, alors
même que ces dernières conditionnent le succès du plan de
redressement.
Il n'est pourtant pas souhaitable de remettre en cause le monopole de
l'administration fiscale.
En effet, cette dernière connaît le passé fiscal des
débiteurs et très souvent, sa réticence à accorder
une remise est liée à l'existence d'un risque de fraude.
Toutefois, votre rapporteur s'est attaché à concevoir un
dispositif qui renforce le lien entre les recommandations des commissions de
surendettement d'une part et les accords de remises par les directeurs des
services fiscaux d'autre part
.
Ainsi, le présent article additionnel se propose de compléter
l'article L. 247 du livre des procédures fiscales afin que les
remises totales ou partielles soient également prises au vu des
décisions ou des recommandations des commissions de surendettement.
La présence du directeur des services fiscaux au sein des ces
dernières devrait compléter le dispositif proposé afin
d'assurer son efficacité.
Décision de la commission : la commission vous propose d'adopter le
présent article additionnel
ARTICLE 49
Pouvoirs du juge en cas de
contestation des recommandations
de la
commission
Commentaire : cet article vise à préciser les
pouvoirs du juge en cas de contestation de l'issue des travaux de la commission.
I. LE DISPOSITIF EXISTANT
Dans la procédure actuelle du traitement du surendettement, en
application de l'article L. 331-7 du code de la consommation, la commission
peut faire des recommandations en cas d'échec de la procédure de
conciliation.
L'article L. 332-2 du code de la consommation précise cependant qu'une
partie peut contester devant le juge de l'exécution les mesures
recommandées par la commission dans les quinze jours suivant la
notification qui lui en est faite.
Les pouvoirs du juges varient donc selon que les
décisions de la
commission sont contestées ou non.
• Il donne force exécutoire aux recommandations de la commission
de surendettement si, dans les quinze jours, il n'est saisi d'aucune
contestation des créanciers. Dans ce cas, ces pouvoirs sont
limités puisqu'il a un simple rôle d'homologation,
c'est-à-dire qu'il s'assure que la procédure a bien
été respectée et que les recommandations correspondent
bien aux mesures pouvant être prescrites par la commission.
• Il retrouve la plénitude de ses pouvoirs dès lors qu'il y
a contestation. Il peut alors prescrire toute mesure d'instruction et obtenir
communication de tout renseignement lui permettant d'apprécier la
situation du débiteur. Il peut vérifier, même d'office, la
validité et le montant des créances. Il peut enfin ordonner par
provision l'exécution d'une ou plusieurs recommandations émanant
de la commission.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article tire la conséquence de l'introduction d'un
nouveau dispositif qui autorise les commissions de surendettement à
recommander la suspension de l'exigibilité des créances et, si
à l'issue du moratoire, la situation du débiteur ne s'est pas
améliorée, la réduction ou l'effacement de tout ou partie
des dettes.
En effet, ces nouvelles recommandations sont faites sous le contrôle du
juge qui, soit leur confère force exécutoire lorsqu'elles ne font
pas l'objet de contestation, soit retrouve la plénitude de ses pouvoirs
pour statuer sur la contestation.
Le juge est ainsi autorisé à revenir sur la décision de la
commission concernant les moratoires ou les effacements de dettes. Il pourra
donc estimer que la situation du débiteur ne justifie pas l'effacement
des dettes et imposer, à la place de cet effacement, une ou plusieurs
recommandations prévues à l'article L.331-7 du code de la
consommation.
Toutefois, votre rapporteur estime que la rédaction actuelle n'est pas
satisfaisante parce qu'elle n'interdit pas un éventuel panachage entre
les mesures prévues à l'article L. 331-7, à savoir les
recommandations et celles prévues à l'article L. 337-1-7,
à savoir le moratoire et, le cas échéant, l'effacement des
dettes.
Or, ces deux procédures doivent rester distinctes. En effet, le juge ne
doit pas avoir la possibilité de pouvoir, en phase de recommandation,
effacer certaines dettes tandis que d'autres se verraient
rééchelonnées.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose d'adopter un amendement de
clarification des pouvoirs du juge.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de l'article ainsi amendé.
ARTICLE 50
Effets de l'effacement d'une
créance
Commentaire : cet article vise à tirer les
conséquences de l'effacement des dettes en matière
d'émission de chèques.
L'article L. 331-7-1 du code de la consommation donne à la commission
de surendettement, si le débiteur demeure insolvable après la
période de moratoire, le pouvoir de recommander par une proposition
spéciale et motivée la réduction ou l'effacement des
créances.
Cette réduction ou cet effacement entre en vigueur lorsque le juge lui
a conféré force exécutoire ou, le cas
échéant, a statué sur le recours formé contre la
proposition de la commission.
Pour autant, cet effacement des dettes ne lève pas l'interdiction
d'émettre des chèques si ces dernières ont
été contractées par ce moyen de paiement.
En effet, en application de l'article 65-3 du décret-loi du 30 octobre
1935 unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux
cartes de paiement, "
le titulaire du compte recouvre la
possibilité d'émettre des chèques lorsqu'il justifie
avoir, à la suite de cette injonction adressée après un
incident de paiement :
"1° réglé le montant du chèque impayé ou
constitué une provision suffisante et disponible destinée
à son règlement par les soins du tiré ;
"2° payé une pénalité libératoire
, qui
est fixée à 120 francs par tranche de 1.000 francs ou
fraction de tranche.
L'article 65-3-1 du décret précité précise que
cette pénalité n'est cependant pas due lorsque le titulaire du
compte ou son mandataire n'a pas émis un autre chèque
rejeté pour défaut de provision dans les douze mois qui
précèdent l'incident de paiement et qu'il justifie, dans un
délai d'un mois à compter de l'injonction du banquier de ne plus
émettre de chèques, avoir réglé le montant du
chèque ou constitué une provision suffisante et disponible
destinée à son règlement par les soins du tiré.
Le présent article propose donc de considérer que l'effacement
d'une créance dans le cadre de la procédure de traitement du
surendettement vaut régularisation de l'incident de paiement au sens de
l'article 65-3 du décret du 30 octobre 1935 unifiant le droit en
matière de chèques et relatif aux cartes de paiement.
Cette mesure doit ainsi permettre d'éviter que les débiteurs
dont les dettes ont été effacées soient inscrits au
fichier central des chèques et ne puissent émettre de
chèques pendant dix ans, en application de l'article L. 65-3-4 du
décret précité qui dispose que
" s'il n'est pas
procédé à cette régularisation, il
[le
titulaire du chéquier]
ne recouvre la faculté d'émettre
des chèques qu'à l'issue d'un délai de dix ans qui court
à compter de l'injonction
".
Votre rapporteur tient toutefois à faire remarquer que la
possibilité d'émettre des chèques par cette
catégorie de débiteurs dépendra
in fine
de la seule
appréciation de la banque qui acceptera ou refusera de lui
délivrer un chéquier.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 51
Inscription au fichier des incidents
de paiement
Commentaire : cet article vise à préciser les
modalités encadrant l'inscription au fichier des incidents de paiement.
I. LE DISPOSITIF EXISTANT
L'article L. 333-4 du code de la consommation institue un fichier national
recensant :
• les informations sur les incidents de paiement
caractérisés
27(
*
)
liés aux
crédits accordés aux personnes ph
y
siques pour des besoins
non professionnels. Elles sont conservées pour une durée de cinq
ans pour les incidents postérieurs au 1
er
juin 1996 et de
trois ans pour les incidents antérieurs à cette date à
compter de la date d'enregistrement de l'incident ;
• les mesures conventionnelles ou judiciaires de traitement des
situations de surendettement (c'est-à-dire les recommandations
émises par la commission auxquelles le juge a conféré
force exécutoire et les mesures prises par le juge à la suite
d'une contestation). Ces informations sont conservées, le cas
échéant, pendant toute la durée du plan amiable de
redressement à compter de la conclusion du plan ou pendant la
durée d'application des mesures rendues exécutoires par le juge
à compter de la décision de ce dernier. La durée de
conservation ne peut toutefois dépasser cinq ans.
Ces informations sont conservées dans le fichier des incidents de
paiement qui est géré par la Banque de France et a pour objectif
de renseigner les établissements de crédit sur le risque
lié à l'octroi de crédits aux particuliers.
Les établissements de crédit au sens de la loi du 24 janvier 1984
relative à l'activité et au contrôle des
établissements de crédit ainsi que les services financiers de La
Poste sont tenus de déclarer à la Banque de France tous les
incidents de crédit précités.
L'octroi de crédit par les établissements de crédit n'est
cependant pas conditionné par les informations contenues dans le fichier
des incidents de paiement. Celui-ci ne constitue en effet qu'une aide à
la décision.
II. LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI
Le présent article apporte deux modifications au dispositif existant.
D'une part, il modifie la date d'inscription au fichier des incidents de
paiement et, d'autre part, il complète la liste des informations
figurant dans le fichier en y ajoutant les recommandations liées aux
deux nouvelles procédures introduites par le présent projet de
loi et en précisant la durée limite de conservation.
Votre rapporteur avait déjà souligné dans le rapport qu'il
avait rédigé avec M. Jean-Jacques Hyest
28(
*
)
sur le surendettement, les inconvénients
liés à l'inscription tardive du débiteur au fichier des
incidents de paiement qui n'intervient qu'après l'adoption du plan
conventionnel. Ainsi, ils avaient constaté des détournements de
procédure par certains débiteurs de mauvaise foi qui saisissent
la commission de surendettement à seule fin de gagner du temps, sans la
véritable intention de signer un plan conventionnel ou de fournir les
efforts financiers nécessaires à la réussite de ce dernier.
Le groupe du travail avait en conséquence proposé d'inscrire les
débiteurs au fichier des incidents de paiement dès le
dépôt du dossier devant la commission de surendettement. Il
estimait que cette mesure présentait deux avantages :
• elle dissuaderait les débiteurs mal intentionnés
d'encombrer les commissions de surendettement en les interdisant de
crédit dès le dépôt de leurs dossiers ;
• elle renforcerait la logique de bonne foi supposée des
débiteurs. En effet, le dépôt d'un dossier de
surendettement constitue une démarche volontaire de la part du
débiteur. Elle signifie que celui-ci s'estime en situation de
surendettement et cherche à en sortir en sollicitant l'aide des
commissions. La procédure est d'ores et déjà
condamnée si le débiteur aggrave son insolvabilité en
contractant de nouveaux prêts.
Le Gouvernement n'a pas retenu la date de dépôt du dossier pour
l'inscription du débiteur au fichier des incidents de paiement.
Toutefois, il a repris certaines des propositions du groupe de travail puisque,
désormais, la commission de surendettement informe la Banque de France
aux fins d'inscription au fichier dès que le dossier est jugé
recevable. Si la décision de recevabilité est contestée,
l'inscription au fichier est faite par l'intermédiaire du juge qui
statue sur le recours dirigé contre la décision. Dans ce cas, il
revient alors au juge d'informer la Banque de France.
Le présent article tire également les conséquences de la
possibilité pour la commission de surendettement de proposer de
nouvelles recommandations puisqu'il énumère les situations dans
lesquelles les procédures de surendettement sont recensées au
fichier des incidents de paiement. Il s'agit :
• des mesures du plan conventionnel ;
• des recommandations proposées par la commission en cas
d'échec de la phase amiable, prévues à l'article L. 331-7
du code de la consommation ;
• des mesures visant la suspension de l'exigibilité des
créances ainsi que la réduction ou l'effacement de tout ou partie
des dettes.
Le présent article prévoit que l'inscription au fichier des
incidents de paiement soit conservée pendant toute la durée
d'exécution des mesures précitées à l'exception de
la réduction ou l'effacement de tout ou partie des dettes. Dans ce cas
précis, la durée d'inscription est fixée à huit
ans.
Il serait toutefois opportun de préciser que, dans les autres cas, la
durée d'inscription ne peut excéder huit ans, pour éviter
que les débiteurs qui se conforment, soit à un plan
conventionnel, soit aux recommandations de la commission, ne soient soumis
à des règles plus strictes que les débiteurs dont les
dettes sont effacées.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 51 bis (nouveau)
Fixation par
décret des tarifs applicables aux huissiers de
justice
Commentaire : cet article vise à fixer par
décret
les tarifs applicables aux huissiers.
L'ordonnance n°45-2048 du 8 septembre 1945 relative aux tarifs des
émoluments alloués aux officiers publics ou ministériels
interdit la liberté des tarifs des émoluments alloués aux
officiers publics ou ministériels en subordonnant leur fixation à
un règlement d'administration publique.
En application de l'ordonnance précitée, le décret
n°96-1080 du 12 décembre 1996 fixe le tarif des huissiers de
justice en matière civile et commerciale.
Pourtant, une analyse erronée de ce décret a poussé
l'Assemblée nationale à estimer que les tarifs des huissiers
avaient été libérés.
En conséquence, elle a adopté une disposition prévoyant
qu'un décret fixe les tarifs applicables aux huissiers de justice
dès lors que la procédure concerne un ménage dont la
commission a reconnu le caractère surendetté.
Il s'agissait en effet de lutter ainsi contre l'augmentation des tarifs des
huissiers.
Dans la mesure où les tarifs n'ont pas été
libérés et restent fixés par décret, la mesure
votée apparaît inutile.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement visant à la
supprimer.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article et vous propose de le
supprimer.
ARTICLE 51 ter (nouveau)
Suppression de la taxe
sur les actes d'huissier
Commentaire : cet article vise à supprimer la taxe
sur les
actes d'huissier.
L'Assemblée nationale a voté une disposition qui abroge
l'article 302
bis
Y du code général des impôts qui
soumet les actes de justice à une taxe forfaitaire de 60 francs.
Cette mesure, qui a reçu un avis défavorable de la part du
gouvernement et un coût de 360 millions de francs : elle a
dû être gagée. Ainsi, la perte de recettes en
résultant devrait être compensée par une majoration
à due concurrence des droits visés à l'article 527 du code
général des impôts relatif au droit spécifique
perçu sur les ouvrages en or, en platine et en argent.
Votre rapporteur n'est pas favorable à cette mesure qui, lors de
l'examen du présent projet de loi à l'Assemblée nationale,
constituait un "amendement d'appel" destiné à sensibiliser le
Gouvernement à l'importance de certains frais d'huissier qui contribue
à compromettre davantage la situation financière du
débiteur. Toutefois, l'objet de cet amendement ne justifie pas son
intégration dans le présent projet de loi.
En outre, cette mesure entraîne un transfert de charge inopportun entre
les redevables de la taxe sur les actes d'huissiers et les redevables du droit
perçu sur les ouvrages en or, en platine et en argent.
En effet, la taxe sur les huissiers ne représente que 60 francs, ce qui
constitue une somme limitée eu égard au montant global des frais
d'huissiers. En revanche, le droit perçu sur les ouvrages en or, platine
et argent, qui représente déjà une somme significatif,
serait multiplié par trois. Ce gage n'apparaît pas réaliste.
Votre rapporteur n'est pas favorable à cette modification de la charge
respective de taxe à la seule fin d'adopter une mesure dont l'unique
objectif est un effet d'annonce.
En effet, on peut difficilement imaginer que la seule suppression de la taxe
sur les frais d'huissiers permette de lutter contre leur accroissement.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement visant la
suppression de cet article.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article et vous propose de le
supprimer.
ARTICLE 52
Conditions d'entrée en vigueur
du chapitre premier du livre III,
titre III du code de la
consommation
Commentaire : le présent article précise les
modalités d'entrée en vigueur du chapitre premier du livre III,
titre III du code de la consommation à un décret en Conseil
d'Etat.
Le présent article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat
fixe les conditions d'application du
chapitre premier du livre III,
titre III du code de la consommation. L'entrée en vigueur de ce texte
est subordonnée à la publication de ce décret. Celui-ci
abrogera les dispositions devenues obsolètes du décret
n° 95-680 du 9 mai 1995 relatif à la procédure du
traitement du surendettement des particulier pris en application du titre III
du livre III du code de la consommation et codifié par les articles R.
331-1 à R. 333-1 du code de la consommation, ainsi que celles de la
circulaire du 28 septembre 1995 prise pour l'application de ce texte.
Le texte proposé par le présent projet de loi nécessitera
également la révision complète du règlement n°
90-05 du 11 avril 1990 relatif au fichier des incidents de paiement.
Les nouvelles dispositions relatives au surendettement seront applicables aux
procédures en cours à condition que le juge n'ait pas
statué sur ces dernières.
Le présent article prévoit par ailleurs une entrée en
vigueur spécifique pour deux mesures :
• celle issue du paragraphe II de l'article 44 relative à la
possibilité offerte aux créanciers, en cas de désaccord
sur l'état d'endettement du débiteur et dans un délai de
trente jours, de fournir les justifications de leurs créances en
principal, intérêts et accessoires ;
• celle issue de l'article 45 relative à la possibilité
offerte au débiteur de demander à la commission de
surendettement, en cas de contestation de l'état d'endettement
dressé par cette dernière et dans un délai de vingt jours,
de saisir le juge de l'exécution aux fins de vérification de la
validité des titres de créances.
En effet, ces contestations sont soumises à des délais visant
à éviter qu'elles puissent être soulevées pendant
l'élaboration du plan amiable de redressement. C'est pourquoi le
présent article prévoit que les deux mesures
précitées ne sont pas applicables lorsque la commission a
déjà dressé l'état d'endettement du débiteur.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable pour l'adoption de cet article.
ARTICLE 52 bis (nouveau)
Information de la
caution sur l'ouverture d'une procédure de traitement du surendettement
ommentaire : le présent article vise à
informer la
caution de l'ouverture d'une procédure de traitement du surendettement
devant une commission.
Dans le rapport sur le surendettement
29(
*
)
rédigé avec M. Jean-Jacques Hyest, votre rapporteur
constatait avec inquiétude le développement du
" surendettement par ricochet ", c'est-à-dire un
surendettement qui affecte les particuliers de manière indirecte,
à travers les engagements qu'ils ont contractés.
En effet, "
le cautionnement peut avoir des conséquences
imprévisibles et désastreuses en faisant endosser à un
particulier des dettes dont le montant dépasse largement ses
capacités de remboursement. En outre, le facteur temps contribue pour
une part non négligeable au surendettement des cautions.
".
L'Assemblée nationale semble avoir été sensible à
ces remarques puisqu'elle a adopté une disposition selon laquelle,
lorsque la commission constate que le remboursement d'une ou plusieurs dettes
du débiteur principal est garanti par un cautionnement, elle informe la
caution de l'ouverture de la procédure.
En outre, la caution peut faire connaître par écrit à la
commission ses observations.
Votre rapporteur est très favorable à cette mesure qui permettra
une meilleure information de la caution et, le cas échéant, la
prise en compte de ses remarques pour l'élaboration d'un plan amiable
par la commission de surendettement.
Décision de la commission : la commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 52 ter (nouveau)
Mention dans le contrat
de cautionnement du montant maximum
de la caution, à peine de
nullité
Commentaire : le présent article vise à
obliger la
mention, dans le contrat de cautionnement, du montant maximum de la caution.
L'article 2013 du code civil dispose :
"
Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le
débiteur, ni être contracté sous des conditions plus
onéreuses.
"Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et
sous des conditions moins onéreuses.
"Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous
des conditions plus onéreuses, n'est point nul : il est
réductible à la mesure de l'obligation principale
."
L'Assemblée nationale a voté une disposition qui modifie
l'article 2013 du code civil et oblige, à peine de nullité,
que le contrat de cautionnement comporte mention du montant maximum à
l'égard de la personne cautionnée pour lequel il est consenti, y
compris les accessoires et autres frais
.
Votre rapporteur n'est pas favorable à cette mesure.
Il tient à faire remarquer qu'en matière de crédit
à la consommation et de crédit immobilier, le contrat de
cautionnement doit déjà comporter le montant maximum à
l'égard de la personne cautionnée pour lequel il est consenti.
Ainsi, l'article L. 313-7 du code de la consommation dispose :
"
La personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en
qualité de caution pour l'une des opérations relevant des
chapitres Ier ou II du présent titre doit, sous peine de nullité
de son engagement, faire précéder sa signature de la mention
manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : " en me
portant caution de X... , dans la limite de la somme de..., couvrant le
paiement du principal, des intérêts et, le cas
échéant, des pénalités ou intérêts de
retard et pour la durée de..., je m'engage à rembourser au
prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X.... n'y
satisfait pas lui-même.
".
En revanche, il existe des cas dans lesquels le montant maximum pour lequel la
caution s'engage ne peut être connu, notamment en matière de bail
lorsque son renouvellement est tacite. Les bailleurs risquent donc de demander
d'autres garanties. Cette mesure risque donc de se retourner contre les
personnes qu'elle est susceptible de protéger.
Enfin, cette mesure est trop générale puisqu'elle vise à
la fois les personnes physiques et les personnes morales ainsi que les cautions
à titre gratuit et les cautions à titre onéreux.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement visant à
supprimer cet article.
Décision de la commission : la commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article et vous propose de le
supprimer.
ARTICLE 52 quater (nouveau)
Fixation d'un
plancher pour les ressources à la disposition de la caution
équivalent au revenu minimum d'insertion
Commentaire : le présent article vise à fixer
un
plancher pour les ressources à la disposition de la caution
équivalent au revenu minimum d'insertion.
L'Assemblée nationale a voté une disposition visant à
compléter l'article 2024 du code civil afin que le montant des dettes
résultant du cautionnement ne puisse avoir pour effet de priver la
personne physique qui s'est portée caution d'un minimum de ressources
égal au revenu minimum d'insertion.
Votre rapporteur estime que cette mesure est inutile.
En effet, toute caution obligée de se substituer au débiteur
défaillant peut, si les sommes qu'elle doit rembourser sont telles que
sa situation financière se trouve gravement compromise, déposer
un dossier devant la commission de surendettement.
Or, il est évident qu'une personne surendettée parce qu'elle
s'est portée caution déposera un dossier devant la commission de
surendettement avant que sa situation financière se soit
dégradée au point de ne disposer que du revenu minimum
d'insertion.
L'application de cette mesure apparaît donc peu réaliste. C'est
pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement visant à supprimer
cet article.
Décision de la commission : la commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article et vous propose de le
supprimer.
CHAPITRE
II
SAISIE IMMOBILIÈRE ET INTERDICTION BANCAIRE
ARTICLE 57 bis (nouveau)
Interdiction de l'offre
ou du consentement d'un prêt à un
mineur
Commentaire : cet article vise à interdire, sous
peine
d'une amende fiscale d'un montant égal au quintuple du montant de la
créance figurant au contrat, l'offre ou le consentement d'un prêt
à un mineur.
L'Assemblée nationale a voté une disposition qui interdit
d'offrir ou de consentir un prêt ou un crédit personnalisé
à un mineur non émancipé et qui rend
l'établissement financier qui contrevient à cette disposition
redevable d'une amende fiscale d'un montant égal au quintuple du montant
de la créance figurant dans le contrat.
Votre rapporteur n'est pas favorable à cette disposition dans la mesure
où la loi encadre déjà de manière
sévère l'offre de crédit aux mineurs.
Ainsi, la loi du 28 décembre 1966 relative à l'usure, aux
prêts d'argent et à certaines opérations de
démarchage et de publicité interdit le démarchage
auprès des mineurs.
En effet, l'article 9 de la loi précitée
dispose qu' "
il est interdit à toute personne de se
livrer au démarchage en vue de conseiller ou d'offrir des
prêts d'argent
. "
L'article 11 de cette loi précise que
"
les
interdictions édictées aux articles 8 et 9 du présent
texte
(articles interdisant à toute personne de se livrer au
démarchage en vue de conseiller ou d'offrir des prêts d'argent, de
recueillir sous forme de dépôts des fonds du public, de conseiller
la souscription de plans d'épargne etc...)
ne sont pas applicables
ni aux banques ni aux établissements financiers,
ni aux
caisses d'épargne, ni aux sociétés de caution mutuelle
régies par la loi du 13 mars 1917, ni aux entreprises de crédit
différé bénéficiaires de l'agrément
spécial du ministre de l'économie et des finances prévu
par le décret n °53-947 du 30 septembre 1953,
sous
réserve qu'ils agissent dans le cadre de la réglementation qui
leur est propre et qu'ils ne s'adressent qu'à des personnes
majeures
".
En outre, l'article 16 de cette loi dispose que toute infraction aux
dispositions de l'article 11 sera punie d'une amende de 30.000 francs.
Par ailleurs, l'octroi de prêt aux mineurs, même s'il est
autorisé, est strictement encadré par la loi.
Ainsi, l'article 389-5 du code civil dispose :
"
Même d'un commun accord, les parents ne peuvent ni vendre de
gré à gré, ni apporter en société un
immeuble ou un fonds de commerce appartenant au mineur, ni contracter d'emprunt
à son nom, ni renoncer pour lui à un droit, sans l'autorisation
du juge des tutelles
. "
La nécessité de l'autorisation du juge des tutelles
apparaît une garantie suffisante pour éviter que
l'intérêt du mineur soit lésé.
En pratique, les prêts aux mineurs sont d'ailleurs extrêmement
rares.
C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement visant à
supprimer l'article 57
bis
.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article et vous propose de le
supprimer.
CHAPITRE
IV
MOYENS D'EXISTENCE
ARTICLE 68 A (nouveau)
Incessibilité et
insaisissabilité de l'allocation d'insertion et de l'allocation de
solidarité
spécifique
Commentaire : le présent article vise à rendre
incessibles et insaisissables l'allocation d'insertion et l'allocation de
solidarité spécifique prévues aux articles L 351-9 et L.
351-10 du code du travail.
I. - LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
En application de l'article 31 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion, modifiée par la loi n°
92-722 du 29 juillet 1992, l'allocation versée au titre du revenu
minimum d'insertion est incessible et insaisissable.
Le présent article reprend exactement les termes des trois premiers
alinéas de cet article pour en étendre le principe aux
allocations prévues aux articles L. 351-9 et L.351-10 du code du travail.
Il insère un article L. 351-10
bis
nouveau dans le code du
travail, comprenant trois alinéas :
-
le premier alinéa
rend les allocations incessibles et
insaisissables,
-
le second alinéa
prévoit que le blocage d'un compte
courant ne peut avoir pour effet de rendre ces allocations saisissables,
-
le dernier alinéa
permet des retraits mensuels sur un compte
courant du montant des allocations visées par l'article.
II. - LES PERSONNES VISÉES PAR CES DISPOSITIONS
Les allocations prévues aux articles L. 351-9 et L.351-10 du code du
travail sont perçues par les personnes privées d'emploi, qui ne
justifient pas de référence de travail suffisantes pour
être indemnisées et perçoivent l'allocation d'insertion
(article L. 351-9) ou qui ont épuisé leurs droits à
l'allocation d'assurance et satisfont à des conditions d'activité
antérieure et de ressources pour bénéficier de
l'allocation de solidarité spécifique (article L.351-10).
Au 15 janvier 1998,
l'allocation de solidarité spécifique
était de 72,49 F par jour (2.174 F par mois) soit un montant
légèrement inférieur au RMI pour une personne seule
(2.429,42 F), mais de 108,43 F par jour pour une personne de plus de 55 ans qui
justifie de vingt années d'activité, ou de plus de 57 ans et demi
qui justifie de 10 années d'activité (3.253 F), soit un montant
supérieur au RMI pour une personne isolée (2.429,42F).
L'allocation de solidarité spécifique est versée par
périodes de six mois, sous condition de ressources (les ressources
doivent être inférieures à 5.284,30 F pour une personne
seule et 8.303,9 F pour un couple).
Au 15 janvier 1998,
l'allocation d'insertion
, versée pendant un
an par périodes de 6 mois, était de 87,4 F par jour pour les
personnes seules avec enfant (2.622 F), et 43,7 F par jour pour les autres
bénéficiaires (1.311 F par mois), soit des montants
inférieurs au RMI.
Elle est versée sous condition de ressources (3.933 F pour une personne
seule, 7.866 F pour un couple).
Dans la mesure où les sommes envisagées sont
inférieures ou légèrement supérieures au RMI,
l'extension de l'incessibilité et de l'insaisissabilité
prévues dans la loi du 1er décembre 1988 pour le revenu minimum
d'insertion se justifie
.
Il n'en aurait pas été de même si l'écart avec le
revenu minimum avait été plus significatif car ces dispositions,
protectrices pour les individus concernés, sont pénalisantes pour
leurs créanciers. Surtout, elles pourraient avoir un effet
négatif, notamment pour des locations ou des prêts. Il convient en
effet de prendre garde que des mesures protectrices ne se retournent pas contre
ceux qu'elles sont censées protéger.
Ainsi, une généralisation de tels mécanismes aux autres
minima sociaux serait critiquable.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
ARTICLE 72
Fourniture minimum d'énergie,
d'eau et de
téléphone
Commentaire : le présent article énonce le
principe
du droit à une aide de la collectivité pour l'accès ou le
maintien d'une fourniture minimale d'énergie, d'eau ou de
téléphone et instaure un principe de non-coupure jusqu'à
la mise en oeuvre du mécanisme d'aide.
I. - LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article modifie les articles 43-5 et 43-6 du chapitre 3
("accès à une fourniture minimum d'eau et d'énergie") de
la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum
d'insertion, modifiée par la loi n° 92-722 du 29 juillet 1992.
-
le 1° du présent article modifie l'article 43-5 de la loi du
1er décembre 1988.
L'article 43-5 énonce le principe selon lequel "
toute personne ou
famille éprouvant des difficultés particulières du fait
d'une situation de précarité a droit à une aide de la
collectivité pour accéder ou préserver son accès
à une fourniture d'eau et d'énergie
".
Le 1° du présent article le modifie pour intégrer à
ces dispositions les services téléphoniques.
Il ajoute un alinéa garantissant la maintien de la fourniture
d'énergie et d'eau, mais non de services téléphoniques, en
cas de non-paiement des factures jusqu'à l'intervention des
mécanismes d'aide.
-
les 2° et 3° du présent article modifient l'article 43-6
de la loi du 1er décembre 1988.
L'article 43-6 a
complété
l'article 43-5 en
créant en faveur des familles et des personnes visées à
cet article un dispositif national d'aide et de prévention pour faire
face à leurs dépenses d'électricité et de gaz
Ce dispositif fait l'objet d'une convention nationale entre l'Etat,
Electricité de France et Gaz de France définissant notamment le
montant et les modalités de leurs concours financiers respectifs,
déclinée par département. Les collectivités
territoriales ou des centres communaux ou intercommunaux d'action sociale et
des organismes de protection sociale peuvent être associées
à ces conventions.
Les paragraphes 2° et 3° du présent article ont pour objet
d'inclure les distributeurs d'eau dans ce dispositif national d'aide et de
prévention.
II. - LE DISPOSITIF EXISTANT
A. ELECTRICITÉ DE FRANCE
Le présent article ne modifie pas les dispositions en matière de
fourniture minimum d'électricité et de gaz, mais étend les
principes déjà posés en matière d'énergie
à d'autres secteurs, et notamment l'eau.
1. La mise en place d'un dispositif de solidarité
Dès 1985, des dispositions ont été prises afin de ne plus
interrompre l'alimentation en énergie des personnes les plus
défavorisées, mais ces actions se sont renforcées
significativement à partir de 1996-1997.
Le dispositif de la loi du 29 juillet 1992 prévoit le maintien ou, le
cas échéant, le rétablissement de la fourniture
d'énergie aux personnes reconnues en situation de pauvreté ou de
précarité.
Plusieurs dispositifs conventionnels ont été mis en place pour
répondre aux deux objectifs de la loi : le principe de non-coupure pour
la fourniture d'énergie et le droit à une aide de la
collectivité.
a) Le principe de non-coupure
Afin de répondre à ce premier objectif,
une Charte
solidarité-énergie
a été établie le 6
novembre 1996 entre l'Etat représenté par le ministre
délégué au logement, M. Pierre-André
Périssol, Electricité de France et Gaz de France.
Cette charte pluriannuelle (1997-2000) avait pour objet, selon les termes de
son article premier, de mettre en oeuvre des mesures concrètes relatives
à la fourniture de gaz et d'électricité dans le cadre du
programme d'action lié à la loi de cohésion sociale.
Plusieurs actions ont été décidées : le maintien
de l'énergie pendant un délai nécessaire à
l'intervention des services sociaux (article 2-1), la limitation des coupures
pour non-paiement (article 2-2), différentes actions ayant pour objet de
répondre au mieux aux difficultés des familles les plus
défavorisées notamment par l'expérimentation de
prestations adaptées (articles 2-4 et 2-5).
b) La mise en place de fonds pauvreté-précarité
Pour mettre en oeuvre le second objectif, c'est-à-dire le principe
d'aide au paiement des factures, après un premier dispositif en 1985,
une convention 1997-2000
a été signée le 14 avril
1997 entre l'Etat et les représentants d'EDF et de GDF, puis un avenant,
ayant pour objet de définir pour 1998 les modalités
financières de la contribution d'EDF et de Gaz de France aux fonds de
solidarité-énergie.
Dans chaque département
, le Préfet et les responsables
d'EDF et de Gaz de France, auxquels peuvent être associés d'autres
partenaires (collectivités territoriales, centres communaux d'action
sociale, organismes de protection sociale..) ont signé une convention
annuelle pour mettre en oeuvre ce dispositif.
Au total, le financement des conventions
pauvreté-précarité pour 1997 s'établit à 142
millions de francs, dont une contribution de 16,5 millions de francs du
ministère de l'emploi et de la solidarité.
Pour 1998, EDF et Gaz de France contribuent à parité avec le
ministère de l'emploi et de la solidarité au financement des
conventions départementales, pour un montant de 16,5 millions de francs.
Cette contribution est majorée de 20 millions de francs versés au
fonds créé par la Fondation de France.
Un
"fonds solidarité énergie"
est constitué au
niveau départemental, financé par la direction
départementale des affaires sanitaires et sociales, et les
représentants locaux d'EDF et Gaz de France, avec d'éventuels
partenaires.
La part locale, versée directement dans les fonds solidarité
énergie des conventions départementales par les centres d'EDF
sera de 55 millions de francs.
La contribution globale, nationale et locale, d'EDF et de Gaz de France aux
fonds solidarité énergie sera donc de 75 millions de francs en
1998.
L'analyse des sources de financement des fonds de
pauvreté-précarité montre que sur la contribution de
l'Etat et d'EDF-GDF est significative,
les collectivités locales
participent à hauteur de 45% au financement des fonds de
solidarité.
c) Un nombre croissant de personnes concernées
Les commissions Pauvreté-Précarité, dans lesquelles ne
siège aucun représentant d'EDF ou de Gaz de France sont
chargées d'examiner les dossiers des clients démunis et sont les
seules à décider si le client peut bénéficier d'une
prise en charge partielle ou totale de sa facture d'énergie.
Ce dispositif a permis d'aider 146.000 foyers en 1997, soit une progression
très conséquente depuis 1993, puisque le nombre de foyers
concernés a triplé en 5 ans.
La progression du dispositif d'aide en matière d'électricité et de gaz
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Nombre de foyers aidés |
52 000 |
81 000 |
100 000 |
119 000 |
146 000 |
Montant de l'aide (en millions F) |
51 |
87 |
114 |
118 |
142 |
Part EDF-GDF (en millions F) |
20 |
20 |
37 |
37 |
42 |
2.
Des mesures de prévention
EDF privilégie la prévention à l'égard de ses
clients les plus défavorisés. Le service maintien énergie
leur permet de disposer d'une fourniture minimale d'électricité,
de 1kW à 3 kW selon le type de logement, avant l'intervention des
services sociaux. Ce dispositif concernait 68.500 personnes en 1997.
B. LA MISE EN OEUVRE DE LA SOLIDARITÉ EN MATIÈRE D'EAU
1. Les dispositions existantes
Le présent article vise à aligner le régime de
solidarité en matière de paiement des factures d'eau sur celui
existant en matière d'énergie : il étend à l'eau le
principe de la non-coupure dans l'attente de l'intervention de l'aide de la
collectivité et prévoit des conventions départementales
pour mettre en oeuvre cette aide ainsi que des opérations de
prévention.
Des dispositions en matière d'impayés de factures d'eau existent
déjà même si elles sont plus récentes que celles
concernant la fourniture d'énergie, car les dispositions de la loi du 29
juillet 1992 visaient essentiellement les opérateurs en matière
d'électricité et de gaz.
Le 6 novembre 1996 a été signée une
charte de
solidarité eau
en faveur du maintien des services publics de l'eau
pour les plus démunis. Cette charte associait l'Etat, l'Association des
maires de France, la Fédération nationale des
collectivités concédantes et régies, et enfin le syndicat
professionnel des entreprises de services d'eau et d'assainissement.
Elle ne concernait que les personnes abonnées directement aux services
publics de l'eau et de l'assainissement, celles qui payent l'eau dans leurs
charges ou habitent des logements locatifs continuant de voir leurs dossiers
traités par l'intervention des fonds de solidarité logement.
La charte solidarité eau s'articule autour de trois axes : le maintien
des services publics de l'eau et de l'assainissement pour les personnes
défavorisées, la prise en charge financière de tout ou
partie des factures d'eau, des actions d'information et de pédagogie.
Une commission de solidarité eau devait être créée
dans chaque département au sein du dispositif du Fonds de
solidarité logement.
La mise en place de ces mécanismes de solidarité est encore
à un stade précoce, compte tenu de la jeunesse du dispositif.
Dans plusieurs communes (Dreux, Calais, Villeneuve-Saint-Georges, Albertville,
Pessac..) ont été signées des chartes locales
prévoyant la constitution d'un fonds commun local de solidarité,
mais les conventions locales sont loin d'être
généralisées.
Une circulaire du 23 octobre 1997
a précisé aux
préfets de région et de département les modalités
d'application de la convention. Elle devrait donc permettre un
développement du dispositif en 1998.
2. La question du financement
Les distributeurs d'eau se sont engagés à prendre en charge
à hauteur de 15 millions de francs tout ou partie des factures d'eau des
plus démunis.
Cependant, par rapport à d'autres services publics, le cas de l'eau
est particulier car le distributeur d'eau collecte des sommes pour d'autres
organismes (agences de l'eau, collectivités locales, Etat) : la part lui
revenant représente moins de la moitié de la facture.
Si le mécanisme existant, par lequel l'émetteur de la facture
décide d'un abandon de créances, est simple et rapide, suivant la
nature du contrat entre la collectivité locale et le distributeur d'eau
(concession, régie, affermage), la charge financière
définitive sera diversement répartie.
Dans certains types de contrats, la collectivité locale pourrait
être amenée à supporter directement le coût du
non-paiement des factures.
Il est important de préciser que cet article élève
à un niveau législatif des dispositions conventionnelles dont on
ne mesure pas encore l'impact. Les collectivités locales devraient
notamment être mises à contribution dans le cadre de ces
conventions alors que l'étude d'impact indique un coût
budgétaire nul pour l'Etat.
Il vous est donc proposé un amendement tendant à permettre
à chaque collectivité territoriale concernée ou à
chaque distributeur d'eau d'être partie aux conventions locales.
Il s'agit de donner à chaque collectivité locale concernée
la possibilité d'être partie aux conventions qui la concerneront
financièrement sans toutefois l'y contraindre.
C. LES SERVICES TÉLÉPHONIQUES
1. Les dispositions du présent article
Le présent article pose le principe du droit à une aide de la
collectivité pour accéder ou préserver son accès
à une fourniture de services téléphoniques.
Les dispositions introduites sont moins contraignantes qu'en matière de
fourniture d'eau, puisqu'il n'y a pas de principe de non-coupure ni de
conventions prévues pour mettre en oeuvre concrètement un
dispositif d'aide financière.
2. Le dispositif existant
Des directives européennes relatives au service universel du
téléphone posent les obligations financières maximales que
les Etats peuvent imposer aux opérateurs de
télécommunications, notamment pour des raisons sociales et
organisent la possibilité de faire une péréquation entre
les opérateurs, selon leurs parts de marché, pour les financer.
La loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des
télécommunications les a transposées dans le droit
français.
L'article 8 de la loi de 1996 dispose que "le service universel est fourni dans
des conditions tarifaires et techniques prenant en compte les
difficultés spécifiques rencontrées dans l'accès au
service téléphonique par certaines catégories de personnes
en raison notamment de leur niveau de revenu ou de handicap".
Le service universel du téléphone comprend la mise en place de
tarifs minorés pour l'abonnement de base auprès de
l'opérateur chargé du service universel (en France, France
Telecom) pour permettre aux personnes défavorisées d'avoir
accès au service téléphonique.
Il comprend en outre la possibilité de préserver, en cas
d'impayés, un "service restreint" consistant dans le maintien de la
réception des appels et dans l'accès aux numéros verts ou
aux numéros d'urgence.
Le coût de l'obligation de mettre en place des tarifs minorés a
été évalué à 921 millions de francs pour
1998 et concernerait environ 10 % des abonnés.
Les opérateurs de radiocommunications mobiles; les opérateurs de
réseaux ouverts au public fournissant le service
téléphonique et d'autres services de
télécommunications, les opérateurs ouverts au public
fournissant d'autres services de télécommunication à
l'exception du service téléphonique, contribueront chacun au
fonds mis en place au prorata de leur trafic.
Selon les dispositions du décret n°97-475 du 13 mai 1997, les
personnes bénéficiaires de ces dispositions seraient
déterminées par les organismes sociaux agréés par
les départements.
Cette définition, encore peu opérationnelle, a ralenti la mise en
oeuvre concrète des dispositions de la loi.
Par ailleurs, il faut savoir que le coût global du service universel est
très supérieur au seul coût des mesures sociales. Il a
été évalué par l'Autorité de
régulation des télécommunications à 6 milliards de
francs pour 1998 dont 2,2 milliards pour le déséquilibre de la
structure courante des tarifs de France Telecom, 2,7 milliards pour le
coût de la péréquation géographique, 921 millions de
francs pour la péréquation sociale et 163 millions de francs pour
la couverture du territoire.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 73
Droit au compte
bancaire
Commentaire : le présent article modifie les
modalités d'exercice du droit au compte bancaire, telles qu'elles sont
définies à l'article 58 de la loi n°84-46 du 24 janvier 1984
relative à l'activité et au contrôle des
établissements de crédit
L'article 58 de la loi n°84-46 relative à l'activité et au
contrôle des établissements de crédit définit le
droit au compte bancaire. Il dispose que toute personne qui n'a aucun compte
peut, après s'être vue refuser l'ouverture d'un compte de
dépôt par plusieurs établissements de crédit,
demander à la Banque de France de lui désigner un
établissement de crédit ou les services du Trésor public,
de la Banque de France, de la Poste, de l'institut d'émission des
départements d'outre-mer ou de la caisse des dépôts et
consignations. L'établissement de crédit désigné
peut limiter les services liés au compte aux opérations de caisse.
Le présent article vise à modifier cet article sur plusieurs
points :
-
le premier alinéa
de la nouvelle rédaction
proposée pour l'article 58 de la loi du 24 janvier 1984
énonce
un principe général de droit au compte
bancaire
pour
toute personne physique résidant en France. Ce
principe n'est pas énoncé dans la rédaction actuelle de
l'article 58, même si cet article aménage déjà des
dispositions pour le mettre en pratique.
-
le second alinéa
précise les modalités
d'ouverture de ce compte
.
La personne doit remettre
une déclaration sur l'honneur
attestant
qu'elle ne dispose d'aucun compte. Il s'agit de la formalisation d'une pratique
existante.
Dès le premier refus, et non après plusieurs, la personne peut
saisir la Banque de France
pour se voir désigner un
établissement de crédit. Cette disposition permet d'éviter
des délais trop longs qui ne se justifiaient pas.
La Banque de France désigne un établissement, les services
financiers de la Poste ou le Trésor public
. Il s'agit d'actualiser
la liste des établissements visés à l'article 58 de la loi
du 24 janvier 1984 : l'abandon de la référence à la Banque
de France et aux instituts d'émission d'outre-mer s'explique par la
réforme du statut de la Banque de France par la loi n° 93-1444 du
31 décembre 1993 qui leur a ôté la possibilité
d'ouvrir des comptes de dépôts à la clientèle. La
Caisse des dépôts ne disposant pas de services de
proximité, elle a également disparu de la liste des
références.
-
le troisième alinéa
dispose que toute limitation des
services liés à l'ouverture d'un compte de dépôt aux
services bancaires de base ne peut l'être que dans des conditions
fixées par décret.
Cette rédaction diffère sensiblement tant des dispositions de
l'actuelle rédaction de l'article 58 de la loi de 1984 que du texte
initial du projet de loi.
L'article 58 de la loi de 1984 donne actuellement
à
l'établissement de crédit désigné par la Banque de
France, la possibilité de limiter les services liés à
l'ouverture du compte aux opérations de caisse
, sans autre
indication.
L'article 73 tel qu'il figurait initialement dans le projet de loi
présenté par le gouvernement, lui accordait cette même
possibilité, mais
dans des conditions définies par
décret
.
L'Assemblée Nationale a adopté un amendement restreignant la
liberté d'appréciation des établissements de
crédits. Ceux-ci ne peuvent plus limiter les services liés
à l'ouverture de n'importe quel compte qu'aux
services bancaires de
base
, qui sont plus larges que les seules opérations de caisse, et
ceci dans des conditions fixées par décret. Cette mesure concerne
donc toutes les ouvertures de comptes et non les seules ouvertures liées
à la mise en oeuvre du "droit au compte".
Les opérations de caisse sont les seuls versements et retraits de fonds.
La notion de services bancaires de base est plus large : elle figure notamment
dans la charte des services bancaires de base établie par le
Comité consultatif du Conseil National du Crédit et à
laquelle l'Association française des banques a adhéré le 9
juin 1992.
La Charte mentionne les instruments suivants :
-une carte de retrait,
- la faculté de procéder à des paiements à distance
(virements, avis de prélèvements ou titres interbancaires de
paiement)
- des relevés d'identité bancaire
- des formules de chèques. L'établissement peut en limiter le
nombre après appréciation avec le client de sa situation et de
ses besoins compte tenu des ressources versées au compte.
Il importe effectivement, en complément du droit au compte, de donner
des instruments de paiement suffisants.
Il convient toutefois que ces
instruments ne facilitent pas des situations de surendettement pour les
personnes aux ressources faibles
.
Ce risque doit être écarté : la charte des services
bancaires de base énonce d'ailleurs qu'un établissement de
crédit respecte l'esprit de la charte "
s'il se montre plus restrictif
dans le nombre de formules de chèques ou pour le fonctionnement de la
carte de paiement, y compris éventuellement pour le montant des
retraits, lorsque le titulaire du compte a saisi une commission de
surendettement ou est inscrit au fichier national des incidents
caractérisés de paiement
".
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites entreprises, au
commerce et à l'artisanat,
a indiqué que le décret
mentionné définira les services bancaires de base comme les
opérations courantes de retrait, de dépôt et de virement et
la détention d'une carte interbancaire de retrait
. Ces indications
sont une garantie suffisante pour interpréter ces dispositions comme ne
risquant pas de faciliter des situations de surendettement au détriment
de l'intérêt même des personnes les plus modestes.
-
le quatrième alinéa
précise que l'application
des dispositions prévues au troisième alinéa ne peut se
faire que dans des conditions tarifaires fixées par décret, pour
les seuls établissements de crédit désignés par la
Banque de France.
Alors que tout établissement de crédit qui décide de
limiter les services liés à l'ouverture d'un compte aux services
bancaires de base est tenu de respecter certaines conditions fixées par
décret, seuls les établissements désignés par la
Banque de France qui feraient cette démarche seraient contraints par une
grille tarifaire imposée par décret.
Cette disposition crée
une rupture d'égalité entre les
établissements de crédits
en fonction seulement de la
procédure par laquelle le compte a été ouvert.
Il s'agit de surcroît d'une
atteinte au principe de la liberté
tarifaire.
Comme l'a d'ailleurs clairement fait valoir à l'Assemblée
nationale Mme Marylise Lebranchu, le principe de la liberté tarifaire
est posé par l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986
relative à la liberté des prix et de la concurrence. L'article
premier de l'ordonnance dispose que les prix des biens, produits et services
antérieurement visés par l'ordonnance du 30 juin 1945, sont
librement déterminés par le jeu de la concurrence. Selon les
dispositions du premier alinéa de l'article 89 de la loi n° 84-46
du 24 janvier 1984, "l'ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986
relative à la liberté des prix et de la concurrence s'applique
aux établissements de crédit".
De plus, les tarifs des opérations bancaires de base sont très
réduits, voire nuls dans certains réseaux. La charte sur les
services bancaires de base énonce comme principe que les
établissements de crédits adhérant "
s'engagent à
offrir des services bancaires de base à tous, à des conditions
qui en permettent l'accès aux personnes les plus modestes
".
La fixation de tarifs par décret pourrait entraîner des
difficultés pratiques : si certaines prestations ne figuraient pas dans
le décret, les titulaires de comptes ne pourraient dès lors en
bénéficier.
Il est donc grandement préférable de laisser la question
tarifaire à la négociation en cours entre les banques et les
consommateurs
dans le cadre du comité consultatif du conseil
national du crédit.
Il vous est donc proposé un amendement supprimant cet
alinéa.
-
le
cinquième alinéa prévoit que tout
établissement de crédit décidant de la clôture d'un
compte doit adresser une notification écrite et motivée au client
et à la Banque de France pour information. Un délai de
quarante-cinq jours est accordé au titulaire du compte.
Cet alinéa, introduit à l'Assemblée Nationale, vise
à transmettre à la Banque de France des informations sur
l'ensemble des comptes clos à l'initiative des banques. Or,
l'administration fiscale dispose déjà d'informations sur les
clôtures de comptes.
S'il s'agit d'éviter que des comptes, sitôt ouverts par des
établissements de crédits dans le cadre du "droit au compte" ne
soient pas rapidement clos, il convient de limiter la notification
écrite et motivée aux seuls établissements de
crédit désignés par la Banque de France.
C'est l'objet du second amendement qui vous est présenté.
Cela permettra de motiver les décisions de clôture de compte pour
les seules personnes titulaires d'un compte, qui avaient essuyé un refus
dans le passé. Si la motivation était étendue à
l'ensemble des clôture de comptes, il faudrait considérer cette
disposition générale comme une atteinte au principe de
liberté contractuelle définissant les relations entre les banques
et leurs clients.
Le délai de 45 jours est un délai usuel, figurant
déjà dans la charte sur les services bancaires de base, il
pourrait toutefois poser des difficultés en cas de fraude et donc de
nécessité de clôturer rapidement le compte. Il faut donc
comprendre qu'il ne s'appliquera que dans les conditions normales d'utilisation
du compte.
-
le sixième alinéa précise que les nouvelles
dispositions de l'article 58 s'appliquent aux interdits bancaires.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
ARTICLE 73 bis (nouveau)
Légalisation du
dispositif expérimental des titres spéciaux de paiement
dénommés " chèques d'accompagnement
personnalisé "
Commentaire : le présent article vise à
consacrer
dans la loi le dispositif expérimental des titres spéciaux de
paiement dénommés " chèques d'accompagnement
personnalisé ".
Instituée à titre expérimental par deux circulaires du 29
août et du 23 décembre 1994, signées par
MM. Nicolas Sarkozy et Daniel Hoeffel, respectivement ministre du budget
et ministre délégué à l'aménagement du
territoire et aux collectivités locales, la formule,
dénommée " titres de service ", a pour objet d'aider
les services sociaux dans l'exercice de leur mission d'assistance aux personnes
en difficulté.
Ces titres de services, dont la valeur faciale est généralement
comprise entre 10 et 50 francs, étaient destinés à se
substituer aux traditionnels bons de secours que les services sociaux sont
habilités à distribuer aux personnes en situation de
précarité. Ces titres de paiement sont négociables
auprès des différents agents économiques
agréés par les émetteurs et offrent des
possibilités d'utilisation plus large que les bons de secours en
permettant de faire face non seulement aux achats de produits alimentaires et
d'hygiène, mais également aux soins médicaux et aux frais
de transport et d'hébergement.
En pratique les collectivités intéressées par cette
formule étaient tenues d'obtenir un agrément accordé
conjointement par la comptabilité publique et la direction
générale des collectivités locales. A cette date une
centaine de collectivités, souvent importantes, ont reçu un
agrément, la direction générale des collectivités
locales estimant qu'au moins une centaine d'autres recourent à cette
formule sans avoir reçu d'agrément.
La présente disposition vise donc à fixer dans la loi les
principes et les règles dans ce domaine, ce qui était
envisagé dès l'origine par les deux circulaires
précitées, lorsqu'elles évoquaient " la
définition [à une date ultérieure] d'un cadre juridique et
comptable adapté ".
Le dispositif proposé à cet effet comporte cependant deux
aspects contestables que votre commission des finances vous propose de corriger.
Il s'agit,
en premier lieu
, de
supprimer la possibilité qui
est reconnue par le texte du présent article aux associations de
remettre, en lieu et place des collectivités publiques, ces
chèques d'accompagnement personnalisés
. La reconnaissance de
cette faculté apparaît en contradiction avec les principes de la
comptabilité publique et semble de nature à favoriser des
situations de gestion de fait pour mandat fictif de dépenses. En effet,
une dépense d'une collectivité locale ne peut être
payée qu'au véritable destinataire, c'est à dire, en
l'espèce, au bénéficiaire du chèque. Or, ici
l'association se substituerait à la collectivité pour
réaliser une dépense publique.
En
second lieu
, votre commission des finances a considéré
qu'il convenait
d'éviter que l'émission de ces chèques
d'accompagnement personnalisés soit réservée à la
catégorie, juridiquement mal identifiée, des " entreprises
spécialisées ".
Outre l'incertitude juridique, votre
commission a estimé qu'il n'existait aucune raison d'accorder une
quelconque exclusivité dans ce domaine, c'est pourquoi elle vous propose
de substituer à cette notion celle, plus générale,
d'établissement de crédit au sens de l'article 18 de la loi
n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au
contrôle des établissements de crédit.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
CHAPITRE
V
DROIT À L'ÉGALITÉ DES CHANCES PAR
L'ÉDUCATION ET LA CULTURE
ARTICLE 78
Modulation des tarifs des services publics
locaux
Commentaire : le présent article autorise la
fixation de
tarifs différenciés pour les services publics administratifs
à caractère facultatif en fonction du niveau de revenu des
usagers et du nombre de personnes vivant au foyer.
I. - UNE CONSÉCRATION LÉGISLATIVE DE LA JURISPRUDENCE
ADMINISTRATIVE
Le dispositif proposé par cet article vient en effet consacrer au
niveau législatif et de façon générale la
jurisprudence du Conseil d'Etat dans le domaine de la modulation des tarifs des
services publics administratifs à caractère facultatif
30(
*
)
.
En pratique,
cette disposition ne semble pas devoir modifier pas de
façon substantielle l'ordonnancement juridique, tel qu'il résulte
de la jurisprudence administrative, puisqu'elle s'analyse très largement
en une confirmation dans la loi les principes dégagés par cette
jurisprudence
, qui jusqu'à une date récente n'excluait plus
de cette faculté de modulation des tarifs en fonction des ressources des
familles que les conservatoires de musique, les motifs de cette exclusion
valant
a priori
pour l'ensemble des services à vocation
culturelle.
A. UNE DIFFÉRENCIATION TARIFAIRE ADMISE POUR LES SERVICES À
VOCATION SOCIALE ...
Il convient en effet d'indiquer que
la jurisprudence administrative a
progressivement admis le principe de discriminations tarifaires
en fonction
du niveau de revenu des usagers pour la plupart des services publics
administratif à caractère facultatif. La validité de ces
pratiques a ainsi été admise de façon certaine pour les
services à vocation sociale
tels que les cantines scolaires, les
crèches municipales ou encore les centres de loisirs.
Au sujet de ces services à vocation sociale, le Conseil d'Etat a en
effet admis clairement qu'il existait des
considérations
d'intérêt général en rapport avec l'objet du
service
justifiant le fait que soient pratiqués des tarifs
différenciés en fonction du niveau des ressources des usagers.
En revanche, le Conseil d'Etat était longtemps resté
opposé à une extension de ce raisonnement aux services publics
administratifs facultatifs à vocation culturelle. C'est ainsi qu'il
avait considéré que les différences de ressources entre
les familles ne constituaient pas des différences de situations
justifiant l'institution d'une modulation tarifaire pour accéder
à une école de musique (Conseil d'Etat, Section, 26 avril 1985,
Ville de Tarbes).
B. ... RÉCEMMENT ÉTENDUE AUX SERVICES À VOCATION
SOCIALE
A l'occasion de deux décisions du 29 décembre 1997, (Conseil
d'Etat, Section : n° 157425 Commune de Gennevilliers,
n° 157500 commune de Nanterre), le Conseil d'Etat a en effet
opéré un revirement de jurisprudence sur ce point.
Ainsi, le Conseil d'Etat a admis que
" le fonctionnement du
conservatoire de musique [de la commune] constitue un service public municipal
administratif à caractère facultatif ; qu'eu égard
à
l'intérêt général qui s'attache à
ce que le conservatoire de musique puisse être fréquenté
par les élèves qui le souhaitent, sans distinction selon leurs
possibilités financières
,
le conseil municipal [...] a pu,
sans méconnaître le principe d'égalité entre les
usagers du service public, fixer des droits d'inscription différents
selon les ressources des familles
, dès lors notamment que les droits
les plus élevés restent inférieurs au coût par
élève du fonctionnement de l'école ".
Ces décisions ouvraient ainsi la perspective d'une unification des
règles applicables à la modulation des tarifs des services
publics administratifs à caractère facultatif, qui ne seraient
plus distingués selon qu'ils aient une vocation sociale ou culturelle.
Le présent article vient confirmer cette unification des règles.
II. - LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE
NATIONALE : UNE MEILLEURE GARANTIE DE CONSTITUTIONNALITÉ
Sans qu'il soit question ici d'analyser la théorie
générale du principe d'égalité ou même
seulement celle du principe d'égalité devant le service public,
il convient d'évaluer la conformité de la présente
disposition aux principe d'égalité devant les charges publiques
en tant que celles-ci concernent la tarification des services publics.
A cet égard, il convient tout d'abord de rappeler qu'au sujet du
principe d'égalité, le juge constitutionnel possède une
jurisprudence très proche de celle du juge administratif :
" le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le
législateur
règle de façon différente des
situations différentes
ni à ce qu'il
déroge
à l'égalité pour des raisons d'intérêt
général
pourvu que
, dans l'un et l'autre cas,
la
différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct
avec l'objet de la loi qui l'établit
".
S'agissant plus précisément de la tarification des services
publics, le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de se
prononcer par une décision DC n° 79-107 du 12 juillet 1979
portant sur la loi n° 79-591 relative à certains ouvrages
reliant les voies nationales ou départementales. A l'occasion de
celle-ci, il a considéré que
" si le principe
d'égalité devant la loi implique qu'à situations
semblables il soit fait application de solutions semblables, il n'en
résulte pas que des situations différentes ne puissent faire
l'objet de solutions différentes ; qu'en précisant [...] que
l'acte administratif instituant une redevance
sur un ouvrage d'art
reliant des voies départementales
peut prévoir des tarifs
différents ou la gratuité, selon les diverses catégories
d'usagers, pour tenir compte soit d'une nécessité
d'intérêt général
en rapport avec les conditions
d'exploitation de l'ouvrage d'art,
soit de la situation particulière
de certains usagers
, et notamment de ceux qui ont leur domicile ou leur
lieu de travail dans le ou les départements concernés, la loi
dont il s'agit
a déterminé des critères qui ne sont
contraires ni au principe de l'égalité devant la loi ni à
son corollaire, celui de l'égalité devant les charges
publiques
".
En adjoignant à la rédaction initiale du présent article
l'indication selon laquelle ces différenciations tarifaires ne peuvent
pas faire " obstacle à l'égal accès de tous les
usagers au service ",
l'Assemblée nationale est fort justement
venue préciser la limite dans laquelle ce pouvoir peut s'exercer
et,
par la même, a contribué à garantir la
constitutionnalité de cette disposition.
Ce
critère de principe
vient donc renforcer le critère
" quantitatif " retenu par le juge administratif dans les deux
décisions du 29 décembre précitées admettant les
modulations tarifaires "
dès lors notamment que les droits les
plus élevés restent inférieurs au coût par
élève du fonctionnement de l'école "
et dont le
principe est repris par le deuxième alinéa du présent
article qui dispose que " les droits les plus élevés ainsi
fixés ne peuvent être supérieurs au coût par usager
de la prestation concernée ".
Il appartiendra aux autorités locales de faire application de ces
critères sous le contrôle du juge administratif qui dispose donc
d'une base législative pour veiller au respect de l'égal
accès au service public.
Votre commission des finances ne peut qu'approuver l'analyse et la
modification apportée par l'Assemblée nationale qui constitue en
quelque sorte un " dispositif anti-abus " contre toute
éventuelle pratique discriminatoire.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article.
LES TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DE Mme MARTINE AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ, LE JEUDI 28 MAI 1998
Sous la
présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a
procédé à l'audition de Mme Martine Aubry, ministre de
l'emploi et de la solidarité, sur le projet de loi n° 445
(1997-1998), d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions.
M. Christian Poncelet, président, a souligné l'importance de la
venue de Mme Martine Aubry devant la commission des finances dans le cadre de
l'examen pour avis par la commission du projet de loi d'orientation relatif
à la lutte contre les exclusions. Il a souhaité obtenir à
cette occasion des précisions complémentaires sur le coût
et le mode de financement des mesures contenues dans ce projet de loi.
A titre liminaire, Mme Martine Aubry a fait part de son souhait que le texte,
notamment grâce au Sénat, puisse être adopté
définitivement avant l'été. Elle a ainsi
espéré que, grâce à ce projet de loi, une
réponse collective puisse être apportée au
phénomène de l'exclusion qui constitue une défaite pour
l'ensemble de la classe politique. Elle a également relevé que ce
projet était l'aboutissement d'un long travail effectué par les
associations, citant à cet effet les rapports du Professeur Pequignot,
du Père Wresinsky et de Mme Geneviève Anthonioz-De Gaulle.
Elle a estimé qu'il s'inscrivait dans la continuité de textes
antérieurs. Elle a considéré que les principes de base
contenus dans ce projet pouvaient rencontrer un accord général.
Il s'agit, d'une part, de faire sortir le plus rapidement possible de
l'exclusion les personnes qui en sont les victimes, mais aussi de donner
à chacun un accès aux droits fondamentaux que sont l'emploi, la
culture ou l'éducation et ainsi de ne pas créer de droits
particuliers pour les exclus, mais de les faire bénéficier
pleinement des droits déjà existant. Elle a souligné le
rôle que doit jouer la prévention, notamment en matière de
surendettement ou d'expulsion. Enfin, Mme Martine Aubry a rappelé la
nécessité de mobiliser tous les partenaires et de respecter leurs
attributions respectives, notamment celles des collectivités locales, en
mettant en place une plus grande coordination entre les différents
acteurs. Elle a ensuite détaillé les différents droits
définis par le texte.
S'agissant de l'emploi, elle a relevé que l'accueil et l'accompagnement
des jeunes et des adultes vers des formations qualifiantes et un emploi
allaient être développés. L'Agence nationale pour l'emploi
(ANPE) sera dotée à cet effet de moyens complémentaires.
Après avoir déploré que 100.000 personnes
bénéficient du revenu minimum d'insertion (RMI), sans
discontinuer, depuis son institution, elle a souhaité que l'ANPE puisse
trouver, pour chacun, la formation adéquate, et non plaquer un
dispositif préexistant. Elle a évoqué, à cette
occasion, la refonte des emplois de solidarité, avec un accent mis sur
les contrats emploi consolidé (CEC) qui sont des contrats de cinq ans,
la création d'un contrat de qualification pour adultes, et
insisté sur le nécessaire développement de l'insertion par
l'économique, qui devrait être ciblée vers les publics en
difficulté et ne pas concurrencer les entreprises artisanales.
Elle a relevé le rôle que jouerait pour les jeunes
éloignés de l'emploi le programme "trajet d'accès à
l'emploi" (TRACE), qui leur offrira un parcours alternant formation et
activités professionnelles, avant de les réintégrer dans
le circuit classique de l'emploi. S'agissant de la possibilité de
cumuler des minima sociaux avec un salaire d'activité, elle a
souhaité que ce cumul soit possible sur une année afin
d'éviter certaines situations paradoxales lors de la reprise d'une
activité rémunérée, où
l'intéressé voit diminuer ses ressources effectivement
disponibles.
En matière de logement, elle a confirmé que les moyens existants
seraient accrus et mobilisés, notamment grâce au dispositif
" PLA-intégration ", et qu'une taxe sur les logements vacants
serait instaurée. Elle a également indiqué qu'afin de
développer la mixité sociale dans le cadre de la politique de la
ville, les modalités d'attribution des logements sociaux seraient
réformées dans le sens d'une plus grande transparence et que des
conventions seraient signées par les préfets pour permettre aux
personnes les plus défavorisées d'accéder à ces
logements. Elle a enfin rappelé les modifications apportées en ce
domaine par l'Assemblée nationale en première lecture.
Elle a souligné que la mise en place de l'accés aux soins pour
tous consisterait à développer la mission sociale de
l'hôpital en mettant en place des lieux d'accueil et de permanence, ainsi
qu'à étendre les programmes régionaux d'accès
à la prévention et aux soins (PRAPS).
S'agissant du projet de loi relatif à la couverture maladie
universelle, elle a noté qu'il compléterait et
parachèverait le mouvement initialisé avec la mise en place de
l'aide médicale gratuite.
M. Christian Poncelet, président, tout en se félicitant de la
gratuité des soins pour les plus démunis, a insisté sur la
nécessité d'un contrôle vigilant afin d'éviter
d'éventuels abus.
Mme Martine Aubry, après avoir indiqué partager cette position,
a noté qu'en matière de prévention des expulsions il
importe de vérifier, avant l'expulsion, la bonne foi des locataires. De
façon plus générale, elle a rappelé que le projet
de loi d'orientation reposait sur la mobilisation de tous, que ce soit en
accroissant la formation des acteurs sociaux opérant sur le terrain ou
en développant la coordination des actions déjà
menées, plutôt qu'en créant de nouveaux dispositifs.
En conclusion, elle a rappelé que l'ensemble du projet de loi
d'orientation avait fait l'objet d'un chiffrage budgétaire, et que les
mesures seraient financées par un redéploiement global des
crédits sur l'ensemble des ministères.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a remercié
Mme la Ministre d'avoir exposé la cohérence d'ensemble
du dispositif et émis quatre observations. Sur le fond, il s'est
félicité du consensus général existant sur la
nécessité de lutter contre l'exclusion et a rappelé que
cette préoccupation était déjà présente dans
le projet de loi de cohésion sociale déposé par le
Gouvernement de M. Alain Juppé. Il a cependant souligné que
la lutte contre les exclusions ne pouvait ignorer la contrainte
budgétaire et, tout en approuvant le principe des redéploiements,
il a souligné la nécessité d'en vérifier la
réalité. De même, il a souligné que la lutte contre
l'exclusion ne pouvait se substituer à la politique de l'emploi et
rappelé les différences d'approche existant en ce domaine entre
le Sénat et le Gouvernement, qu'il s'agisse des risques résultant
de l'accroissement de la fiscalité pesant sur les entreprises ou des
dispositions législatives relatives aux emplois-jeunes et aux
" 35 heures ".
Enfin, il a fait part de son souhait que le financement de ce texte soit
gagé par une plus grande rigueur budgétaire, et que le
redéploiement soit effectué sur les crédits de l'emploi et
non sur ceux déjà consacrés à la lutte contre
l'exclusion. A ce titre, il a indiqué ne pas pouvoir se contenter des
brefs commentaires financiers figurant dans le rapport de M. Le Garrec,
qui avait cependant relevé dans son rapport fait au nom de la commission
spéciale de l'Assemblée nationale, le caractère "peu
précis" de certains financements.
Après avoir regretté la confusion existant dans
l'évaluation des coûts entre le projet de loi d'orientation
stricto sensu et le programme de prévention et de lutte contre
l'exclusion, il a souhaité pouvoir disposer de chiffres précis,
mesure par mesure, ainsi que d'éléments concernant le coût
du projet de loi relatif à la couverture maladie universelle.
Il s'est enfin interrogé sur les conséquences financières
de la nouvelle politique du Gouvernement en matière de minima sociaux,
et a déploré la mise en place d'une taxe sur les logements
vacants qui procède certes de bonnes intentions mais aboutira
inévitablement à de mauvais résultats.
Mme Martine Aubry a ensuite répondu aux questions du rapporteur pour
avis. S'agissant de l'articulation entre le projet de loi d'orientation et le
programme de lutte contre les exclusions, elle a indiqué que deux
projets de loi viendraient compléter ce projet : le premier,
relatif à la couverture maladie universelle, devrait être
examiné à l'automne 1998, et le second, relatif à
l'accès aux droits, sera déposé par Mme Elisabeth Guigou,
Garde des Sceaux.
En ce qui concerne le premier projet de loi, elle a indiqué qu'une
mission de concertation et de proposition avait été
confiée à M. Jean-Claude Boulard, député, pour
améliorer la situation des personnes qui ne bénéficient
pas du régime général de sécurité sociale et
combler les lacunes existant en matière de protection
complémentaire. Elle a estimé que le surcoût
engendré par ce texte pouvait être actuellement estimé
à près de 5 milliards de francs par an, même si des
incertitudes existent toujours en ce domaine, tenant au fait que la population
potentiellement concernée n'est pas connue de façon
précise. Elle a cependant espéré que les
négociations en cours, notamment avec les professions médicales,
permettraient d'en réduire le coût.
S'agissant du financement de la revalorisation des minima sociaux, elle a
indiqué que celui-ci s'opérera par des redéploiements,
mais aussi des économies budgétaires liées à la
baisse prévisible du nombre des chômeurs et des
bénéficiaires de ces minima. Après avoir rappelé
que la diminution de 55 à 40 % du pourcentage des chômeurs
indemnisés par l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le
commerce (UNEDIC) s'était traduite par un accroissement des charges de
l'Etat au titre de ces minima, elle a souligné que la réduction
actuelle du nombre de chômeurs générerait des
économies pour l'UNEDIC, dont le résultat devrait être
excédentaire pour 1998 à hauteur de 1,5 milliard de francs.
Elle a, de ce fait, souhaité que des négociations soient
menées avec l'UNEDIC, afin de pouvoir utiliser une partie de ses
excédents pour financer des mesures en faveur des jeunes. Elle s'est
également déclarée favorable à ce que soit accrue
la cohérence entre les aides destinées aux jeunes et les minima
sociaux, afin que ceux-ci ne soient pas détournés de leur
vocation et permettent effectivement à leurs bénéficiaires
de réintégrer le monde du travail, et non de vivre exclusivement
de mesures d'assistance.
A propos du programme TRACE, Mme Martine Aubry a indiqué que le
Comité de coordination de la formation professionnelle des
régions et le Conseil national des missions locales avaient donné
des avis favorables, et que le Gouvernement n'imposerait rien, mais passerait
des conventions avec les régions. Elle a estimé que celles-ci
avaient tout à gagner au programme, qui rendrait plus efficaces leurs
dépenses de formation professionnelle.
Pour financer la lutte contre l'illettrisme, elle a indiqué que
84 millions de francs par an étaient prévus.
Considérant que la politique actuelle de lutte contre l'illettrisme
était peu satisfaisante parce que trop centralisée et
dépassée pédagogiquement, elle a annoncé avoir
confié une mission à un expert pour la réformer.
S'agissant des soins gratuits à l'hôpital pour les personnes
dépourvues d'assurance maladie, elle a indiqué que
300 conventions existaient actuellement, et que leur nombre devrait
s'établir à 500 en 1999 et à 800 en l'an 2000. Elle a
considéré que le public concerné était voué
à diminuer à la suite de la mise en place de la couverture
maladie universelle, et que l'on pouvait donc considérer l'effort
consenti comme transitoire.
Pour les créations d'emplois dans les zones d'éducation
prioritaires, elle a indiqué que le ministère de
l'éducation nationale procéderait par redéploiement des
moyens existants.
Traitant du financement des mesures nouvelles contenues dans le projet de loi,
elle a déclaré espérer des économies sur
l'indemnisation du chômage, sur les dispositifs d'accompagnement des
licenciements, notamment les préretraites, et surtout sur les minima
sociaux. Elle a toutefois considéré que ces économies
attendues sont difficiles à chiffrer.
M. Christian Poncelet, président, a relevé que ces
redéploiements budgétaires confirmaient le bien-fondé de
la volonté manifestée par le Sénat, lors du dernier
débat budgétaire, de réaliser des économies sur
certains crédits du ministère des affaires sociales.
S'agissant du coût des dispositions nouvelles adoptées par
l'Assemblée nationale en première lecture, Mme Martine Aubry a
indiqué, tout d'abord, ne pas être d'accord avec toutes ces
mesures. Ainsi, elle a estimé que la possibilité de cumul entre
un contrat d'emploi-solidarité (CES) et un travail à mi-temps,
introduite par les députés, n'était pas opportune dans la
mesure où les CES devaient être réservés aux
personnes qui ne peuvent pas travailler dans un cadre classique. Elle a
toutefois admis qu'il pouvait être pertinent de prévoir une
possibilité de cumul dans les dernières semaines du CES, afin de
ménager une transition vers l'emploi ordinaire.
La ministre de l'emploi et de la solidarité a fait également
état de son désaccord sur l'élargissement de la
composition de la commission de surendettement aux élus et aux
représentants des associations, ce qui risquait de changer le sens des
décisions prises. Elle a considéré qu'il convenait
d'éviter toute démagogie en la matière, et donc de s'en
tenir à la composition restreinte proposée par le projet de loi.
Elle a estimé que l'extension du dispositif d'aide aux créateurs
d'entreprises pour les salariés faisant l'objet d'un licenciement
économique était la seule mesure réellement coûteuse
ajoutée par les députés, soit 45 millions de francs
par an sur la base de 1.500 personnes concernées.
Elle a indiqué que le coût des compensations de
l'exonération de la taxe pour dépassement du plafond légal
de densité des coefficients n'était pas chiffré, et que
celui de la compensation des exonérations de taxe foncière sur le
foncier bâti était estimé à 10 millions de
francs. De même, elle a indiqué que le coût de la
suppression de la taxe forfaitaire sur les frais d'huissiers de justice
n'était pas connu.
En réponse à M. Christian Poncelet, président, qui
l'interrogeait sur le pouvoir donné par l'Assemblée nationale
à la commission de surendettement d'effacer les dettes fiscales et
sociales, Mme Martine Aubry s'est prononcé contre l'automaticité
de telles mesures et a estimé indispensable que les services fiscaux,
tout en participant à la commission de surendettement, conservent toute
leur liberté d'appréciation pour décider des remises
gracieuses.
S'agissant du plancher correspondant au RMI fixé par les
députés pour le "reste à vivre" en matière de
surendettement, elle a estimé que cette règle
déterminerait des "reste à vivre" un peu plus importants
qu'auparavant, qui permettront de limiter les risques ultérieurs de
surendettement.
M. Michel Mercier, considérant qu'une augmentation des crédits
du fonds de solidarité logement (FSL) était prévue, a
demandé si le principe d'un cofinancement automatique par les
départements serait maintenu. Par ailleurs, il a regretté que la
gestion de ces fonds soit obligatoirement confiée à un groupement
d'intérêt public, à une caisse d'allocations familiales ou
à une association agréée par le préfet, alors que
l'expérience prouve qu'ils pouvaient parfaitement être
gérés directement par le département.
S'agissant de l'accès aux soins, il a regretté que le projet de
loi d'orientation de lutte contre les exclusions ne comporte pas
déjà le dispositif relatif à la couverture maladie
universelle. Il s'est également interrogé sur
l'opportunité de constituer un pôle de santé publique sous
la responsabilité de l'Etat.
S'agissant des centres d'hébergement et de réadaptation sociale
(CHRS), il a souhaité savoir si leur financement exclusif par l'Etat
serait maintenu, ou si l'on s'orientait vers un financement mixte
Etat-collectivités locales.
Il a enfin souhaité connaître les moyens budgétaires
prévus pour le financement de la formation des travailleurs sociaux.
M. Marc Massion, après avoir rappelé qu'il convenait
d'éviter toute concurrence déloyale entre les structures
d'insertion par l'économique et les entreprises ordinaires, a
relevé qu'il existait également une vive inégalité
entre les associations d'insertion, les entreprises d'insertion, et les
entreprises intérimaires d'insertion. Il a demandé si le projet
de loi d'orientation clarifiait leurs conditions d'intervention.
Mme Marie-Claude Beaudeau s'est inquiétée du financement du
projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions, et
notamment des redéploiements annoncés. Elle a souhaité
savoir comment l'Agence nationale pour l'emploi pourrait faire face à
ses nouvelles missions, et à quel coût. Elle a enfin
souhaité savoir si une augmentation de l'allocation veuvage et une
modification de ses plafonds étaient prévues, considérant
que les prestations versées actuellement correspondaient à
seulement un quart des prélèvements sur les salaires à ce
titre.
M. Emmanuel Hamel, après avoir rappelé la déception de
Mme Geneviève Anthonioz-de Gaulle suite à l'absence
d'unanimité de vote à l'Assemblée nationale, et fait
état des arguments de M. Philippe Séguin pour justifier le rejet
du texte par les députés de l'opposition, a demandé
à la ministre de l'emploi et de la solidarité d'apporter les
assurances sur le financement du projet de loi d'orientation nécessaires
pour rendre possible un vote unanime.
M. Jean Clouet, évoquant la taxe sur les logements vacants, a
rappelé que beaucoup de propriétaires relativement démunis
font déjà difficilement face aux charges et aux impôts
afférents à des logements qui sont devenus aussi bien invendables
qu'inlouables. Il s'est demandé s'il n'était pas possible de
concevoir un mécanisme d'abandon de tels logements au profit de l'Etat.
M. Claude Lise, a estimé que les agences départementales
d'insertion, créées en 1994 dans les départements
d'outre-mer sous la forme d'établissements publics administratifs
nationaux, portaient atteinte aux principes de la décentralisation et
constituaient des machines bureaucratiques inefficaces. Rappelant que tous les
élus des DOM en souhaitaient la réforme, il a demandé si
l'amendement en ce sens déposé puis retiré à
l'Assemblée nationale serait de nouveau présenté au
Sénat. Il s'est déclaré en faveur d'établissements
publics administratifs locaux, coprésidés par le préfet et
le président du conseil général ou, à
défaut, pour le retour au droit commun.
M. Jean Cluzel, après avoir rappelé que les aides prévues
pour accompagner la réduction du temps de travail ne seraient pas
applicables aux sociétés audiovisuelles bénéficiant
de la redevance, s'est inquiété du handicap qui risque d'en
résulter pour les sociétés publiques par rapport aux
sociétés privées.
Il a également appelé l'attention de la ministre sur la question
de la répartition de l'allocation veuvage, considérant qu'en la
matière l'Etat avait manqué à sa parole depuis des
années.
M. Michel Charasse, après avoir souhaité le succès du
projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions,
s'est interrogé sur la probabilité que plus personne ne soit
" privé d'un toit " au 1
er
janvier 2001.
M. Jacques Oudin, évoquant la taxe sur les logements vacants, a
estimé que la notion de "vacance involontaire" n'était pas
très opérante, a relevé que la taxe additionnelle au droit
de bail (TADB), déjà affectée en principe à
l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH), ne lui
était pas intégralement versée, et s'est interrogé
sur l'opportunité d'étendre la taxe sur les logements vacants aux
offices d'HLM.
Mme Martine Aubry, en réponse à M. Marc Massion, a
indiqué être convaincue de l'utilité de l'insertion par
l'économique, qui fait office de sas entre le chômage et l'emploi
ordinaire, en redonnant un sentiment d'utilité sociale aux personnes
concernées. Elle a néanmoins estimé que l'intervention de
l'Etat en la matière devait rester justifiée et cohérente,
en ne bénéficiant qu'à des publics réellement en
difficulté. Cet impératif implique de meilleurs contrôles
et une limitation des possibilités de mise à disposition au
profit d'entreprises ordinaires, qui donnent lieu à beaucoup d'abus,
dont certains sont portés devant les tribunaux. Elle a ainsi cité
le cas de deux entreprises créant une association intermédiaire
pour mettre à leur propre disposition réciproque des
salariés peu payés et subventionnés. Elle a estimé
que les associations intermédiaires qui souhaitaient
bénéficier des mêmes incitations que les entreprises
d'intérim d'insertion pouvaient toujours changer de statut.
En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, elle a indiqué
qu'il n'y aurait pas de redéploiement d'office au sein des
crédits consacrés à l'emploi et à l'aide sociale,
mais des économies spontanées résultant des sorties des
dispositifs de minima sociaux, et que, pour le reste, les redéploiements
seront globaux sur l'ensemble du budget de l'Etat.
En réponse à M. Michel Mercier, elle a indiqué que le
principe de parité du financement du FSL serait maintenu, mais que
l'évolution de ce fonds ferait l'objet d'une discussion entre l'Etat et
les départements. Elle a indiqué que les dispositions relatives
à l'assurance maladie universelle auraient pu figurer dans le projet de
loi d'orientation, mais que celles relatives à la couverture maladie
universelle ne sont pas encore arrêtées et ne pourront pas
être présentées plus tôt qu'à l'automne, en
liaison avec la loi de financement de la sécurité sociale. Elle
s'est déclarée favorable à un pôle de santé
publique relevant de la responsabilité de l'Etat pour les maladies
contagieuses, et a estimé que l'amendement adopté par
l'Assemblée nationale, en ce qui concerne la lutte contre la
tuberculose, constituait un premier pas en ce sens. Elle a affirmé que
le financement des CHRS par l'Etat n'était pas remis en cause,
même si l'aide sociale des départements peut intervenir lorsqu'il
s'agit de mères en charge d'enfants de moins de trois ans. Enfin, elle a
précisé que les crédits supplémentaires
consacrés à la formation des travailleurs sociaux
s'élèveront à 26 millions de francs en 1998 et
à 52 millions de francs en 1999, rendant possible une augmentation
de 10 % de leur effectif.
S'agissant de l'ANPE, la ministre de l'emploi et de la solidarité s'est
félicitée du changement de culture de l'agence , qui accepte
désormais d'aller vers les entreprises, portant ainsi sa part de
30 % à 50 % des offres d'emplois. Toutefois,
considérant que 15 % seulement des chômeurs de longue
durée sont reçus au moins une fois dans l'année, elle a
estimé que l'ANPE, après avoir fait l'effort nécessaire
pour être plus efficace sur le marché du travail, devait
aujourd'hui redonner la priorité au suivi des chômeurs en grave
difficulté.
S'agissant de l'allocation veuvage, elle a admis que la situation actuelle
n'était pas convenable, et s'est déclarée favorable
à une revalorisation de l'allocation pour les première et
deuxième années de versement.
En réponse à M. Emmanuel Hamel, elle a indiqué avoir
cherché à joindre les principaux dirigeants de l'opposition
à l'Assemblée nationale, mais que ceux-ci n'avaient pas
souhaité la rencontrer. Elle a souligné que, néanmoins,
70 amendements de l'opposition ont été acceptés en
première lecture. Elle s'est déclarée en désaccord
sur les chiffres avancés par M. Philippe Séguin, et a
rappelé que M. Jacques Barrot avait chiffré son propre
projet de loi de cohésion sociale à 3,5 milliards de francs
seulement la première année, intégralement financés
par la réforme de l'allocation sociale de solidarité. Elle a
également exprimé son désaccord avec les critiques
formulées par M. Philippe Séguin, qui considère que
le projet de loi d'orientation revêt un caractère étatiste,
relève d'une logique d'assistance et remet en cause la
propriété privée.
S'agissant de la taxe sur les logements vacants, elle a souligné que
les propriétaires qui se trouvent involontairement dans
l'incapacité de louer n'auront pas à la payer. Faisant
état d'une expérience conduite à Lille, elle a
indiqué qu'en écrivant à tous les propriétaires de
logements vacants pour les sensibiliser et les informer des aides auxquelles
ils ont droit, 40 % des logements vacants avaient pu être remis sur
le marché. Elle a affirmé qu'il était illogique de
continuer à construire des logements, alors que près de
2,5 millions de logements restent vacants dans le pays. Elle a
estimé que la taxe, incitative, ne léserait en rien le droit de
propriété.
M. Christian Poncelet, président, a fait observer que cette taxe serait
vraisemblablement difficile à recouvrer, notamment en cas d'indivision
du logement vacant, et son produit limité.
M. Michel Charasse a rappelé qu'une taxe comparable, votée en
1991, n'avait jamais été appliquée car trop
compliquée. Il a estimé que seules les commissions communales des
impôts ont la compétence requise pour recenser les logements
vacants, et a préconisé de les réunir spécialement
afin de déterminer l'assiette d'une taxe éventuelle.
M. Jacques Oudin a estimé qu'une aide financière est plus
efficace qu'une taxation, et s'est prononcé en faveur du rejet de la
taxe sur les logements vacants ou, à défaut, pour une
exonération du premier logement vacant de chaque propriétaire.
Mme Martine Aubry a rappelé que la vacance devrait être d'au
moins deux ans et qu'un délai serait prévu avant le recouvrement
effectif de la taxe. Tout en admettant la possibilité d'effets pervers,
elle a estimé indispensable une prise de conscience de la part des
propriétaires. Elle a craint qu'une extension de la taxe aux logements
HLM vacants n'ait simplement pour effet de reporter une charge sur les
locataires occupants, et observé que la vacance des HLM résultait
de la faiblesse de la demande dans certains quartiers.
M. Jacques Oudin a observé que certains offices publics d'HLM
sélectionnent leurs locataires, ce qui peut expliquer les vacances de
certains de leurs logements.
En réponse à M. Claude Lise, Mme Martine Aubry a estimé
que ce n'était pas rendre service aux départements d'outre-mer
que de les faire entrer dans une logique d'assistance. Considérant les
fortes pressions locales en matière de RMI, elle a jugé peu
prudent de confier la présidence des agences départementales
d'insertion (ADI) aux seuls élus. Elle a néanmoins admis que les
ADI nécessitaient une réforme pour être plus rapides et
plus souples dans leur fonctionnement.
En réponse à M. Jean Cluzel, elle a indiqué que les
sociétés audiovisuelles avaient été exclues de
l'aide à la réduction du temps de travail parce que cette
question doit être traitée dans le cadre de la subvention globale
qui leur est apportée par l'Etat.
II. EXAMEN EN COMMISSION
Au
cours d'une première séance tenue dans la matinée du
mercredi 3 juin 1998, sous la présidence de M. Christian
Poncelet, président la commission a procédé à
l'examen du rapport pour avis sur le projet de loi d'orientation
n° 445 (1997-1998) adopté par l'Assemblée nationale,
après déclaration d'urgence, relatif à la lutte contre les
exclusions, sur le rapport de M. Jacques Oudin.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a indiqué que, outre
17 dispositions relatives au surendettement, qui seraient
présentées ultérieurement par M. Paul Loridant, la
commission des finances s'était saisie, pour avis, de 13 articles
à caractère fiscal ou financier.
Il a proposé que la contribution de la commission porte sur deux
points : d'une part, resituer la politique de lutte contre l'exclusion
dans le cadre plus général de la politique économique du
Gouvernement ; d'autre part, apprécier le coût exact du
projet de loi d'orientation, ainsi que du programme de prévention et de
lutte contre les exclusions dans lequel ce texte s'inscrit.
Le rapporteur pour avis a tout d'abord souligné que la politique de
lutte contre les exclusions ne saurait se substituer à la politique de
l'emploi. La privation d'emploi est en effet la principale cause d'exclusion,
à laquelle le projet de loi d'orientation n'apporte que des solutions
palliatives.
Il a rappelé que les choix faits par le Gouvernement en matière
de politique de l'emploi ne sont pas ceux de la commission et de la
majorité sénatoriale sur au moins trois sujets
différents :
- la relance des emplois publics, à travers la fonction publique
de l'Etat et les emplois-jeunes, financée par une aggravation des
prélèvements obligatoires ;
- la restriction du dispositif d'allégement des charges sociales
sur les bas salaires, qui est pourtant un mécanisme structurellement
vertueux ;
- l'imposition autoritaire d'une réduction de la durée du
travail, rendue transitoirement incitative par un coûteux dispositif de
primes, pour un gain en emplois douteux.
Sur chacune de ces orientations, le rapporteur pour avis a estimé
important de prendre date pour l'avenir.
A l'inverse, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, est convenu qu'il
existe un consensus sur la nécessité de lutter contre les
exclusions et que le projet de loi de cohésion sociale
présenté par le Gouvernement de M. Alain Juppé, qui a
été largement repris par le Gouvernement actuel, en faisait foi.
Observant que la lutte contre l'exclusion avait été
déclarée priorité budgétaire par le Gouvernement
dans le cadre de la préparation de la prochaine loi de finances, le
rapporteur pour avis a estimé qu'il ne pouvait s'agir que d'une
priorité dérivée par rapport à la politique de
l'emploi, dont il faut bien pallier l'échec relatif.
Il a considéré que la commission était dans son
rôle en rappelant que ce consensus sur la nécessité d'agir
plus efficacement contre les exclusions ne saurait justifier n'importe quel
niveau de dépenses publiques. Il a affirmé que la contrainte
financière s'imposait, ici comme ailleurs, et qu'il ne s'agissait pas
tant de dépenser plus que de dépenser mieux. Il a estimé
qu'une dépense publique n'est pas justifiée du seul fait qu'elle
a une finalité sociale, comme le rappellent les observations de la Cour
des Comptes sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH), le revenu
minimum d'insertion (RMI) ou les dispositifs d'intégration des
populations immigrées.
Le rapporteur pour avis a également fait état des critiques du
rapport de Mme Join-Lambert sur le fonds d'urgence social mis en place en
début d'année, par le biais duquel 1 milliard de francs a
été dépensé en un temps record, sans
critères d'attribution définis, sans examen sérieux des
cas individuels et sans conditions.
Il a souligné que le projet de loi d'orientation devait aussi
répondre à des préoccupations de bonne gestion des deniers
publics :
- l'accent mis sur la prévention des exclusions par des actions en
amont devrait réduire les situations dramatiques nécessitant un
traitement financièrement plus lourd ;
- la relance de l'insertion et l'encouragement à la sortie des
dispositifs d'assistance vise à amorcer une décrue du nombre des
bénéficiaires de minima sociaux ;
- l'évaluation et la mise en cohérence des actions pourrait
permettre d'éliminer certains surcoûts non justifiés et de
limiter les possibilités d'optimisation ou de fraude à partir des
dispositifs existants.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a estimé que le
financement de la lutte contre les exclusions devait être gagé sur
une véritable rigueur budgétaire. A cet égard, il s'est
félicité que Mme Martine Aubry, lors de son audition par la
commission, ait précisé que le projet de loi d'orientation serait
financé par redéploiement de crédits, et qu'elle ait
annoncé des économies sur les dépenses pour l'emploi,
ainsi que sur les crédits des minima sociaux.
Toutefois, il s'est déclaré inquiet des orientations retenues
par le ministre de l'économie et des finances pour le prochain budget.
Selon celles-ci, après des années d'une certaine rigueur, le
Gouvernement s'apprête à laisser dériver à nouveau
les dépenses de l'Etat.
Le rapporteur pour avis a indiqué que les crédits du budget
général augmenteraient de 2,2 % l'an prochain, ce
pourcentage correspondant à un accroissement des dépenses de
35 milliards de francs, dont 23 milliards sont d'ores et
déjà préemptés pour la fonction publique. Seul le
dynamisme des recettes fiscales, résultant de la croissance
économique, permettrait une réduction du déficit
budgétaire à 2,7 % du PIB. Toutefois, ce niveau reste encore
insuffisant pour enrayer la croissance spontanée de la dette publique.
Il a déclaré que ce retour à un certain laxisme
financier, sous couvert d'une croissance spontanée des recettes, le
conduit à émettre des réserves sur la
réalité des redéploiements budgétaires
annoncés pour financer le projet de loi d'orientation.
Dans un second temps, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a
examiné le coût du projet de loi d'orientation relatif à la
lutte contre les exclusions.
Il a tout d'abord souhaité dissiper une confusion, volontairement
entretenue par le Gouvernement, entre le programme de prévention et de
lutte contre les exclusions et le projet de loi d'orientation.
Il a indiqué que, outre les mesures contenues dans le texte, le
programme inclut des mesures déjà annoncées par le
Gouvernement, notamment dans le cadre du projet de loi de finances pour 1998,
ainsi que des mesures à venir, de nature législative ou
réglementaire. Le coût global de ce programme est estimé
à 51,5 milliards de francs sur trois ans. Il a fourni les
précisions suivantes :
- les mesures déjà annoncées s'élèvent
à 19,2 milliards de francs ; le Gouvernement n'en annonce que
15,8 milliards de francs, mais il a omis notamment d'y inclure le
coût de la proposition de loi instaurant une allocation spécifique
pour les chômeurs ayant cotisé plus de 40 annuités,
soit 960 millions de francs, ainsi que le coût de la revalorisation
de l'allocation spécifique de solidarité au 1er janvier
1998, soit 2,5 milliards de francs ;
- les mesures à venir s'élèvent à
8,4 milliards de francs ; le Gouvernement en annonce 5 milliards
seulement, correspondant au projet de couverture maladie universelle ; il
convient d'y ajouter, notamment, le coût du projet de loi relatif
à l'accès aux droits, soit 132 millions de francs ; des
mesures réglementaires relatives à l'action sociale, pour
383 millions de francs ; le cumul prévu entre l'allocation
pour jeune enfant (APJE) et le RMI, soit 333 millions de francs ; et
le développement de la formation en alternance, pour un coût de
2,5 milliards de francs ;
- enfin, il convient de déduire du coût pour l'Etat le
montant des cofinancements apportés par les collectivités
locales, la sécurité sociale, des partenaires privés, les
fonds de la formation professionnelle et l'Union européenne, qui
s'élèvent à 7,6 milliards de francs ; le
Gouvernement en annonce 8,2 milliards, en intégrant une
exonération de cotisations sociales de 400 millions de francs, qui
en fait concerne une mesure à venir, et 225 millions
cofinancés par le Fonds social européen (FSE) au titre des
emplois-jeunes, qui est une mesure déjà annoncée.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, en a conclu, par soustraction, que le
coût budgétaire du projet de loi d'orientation, au sens strict,
s'élève à 16,3 milliards de francs sur trois ans, et
en réalité à 15,9 milliards en intégrant une
erreur majorant les crédits à hauteur de 400 millions de
francs.
Il a précisé que cet engagement de l'Etat est essentiellement
concentré sur les aides à l'emploi. Le programme TRACE, les
mesures de ciblage des contrats emploi solidarité (CES) et des contrats
emplois consolidés (CEC), ainsi que le développement de
l'insertion par l'économique, représentent 80 % des
crédits budgétaires.
Le rapporteur pour avis a relevé que la montée en charge du
coût budgétaire du projet de loi d'orientation serait rapide :
1,092 milliard de francs pour 1998, 5,650 milliards de francs pour
1999, et 9,600 milliards de francs pour 2000. Considérant que le
coût en année pleine de ce texte est donc un peu inférieur
à 10 milliards de francs, il a jugé intéressant de le
rapprocher du coût budgétaire en année pleine du
récent accord salarial dans la fonction publique, qui est estimé
à 12 milliards de francs.
Il a admis que, pour 1998, l'impact budgétaire restait modique et qu'il
semblait effectivement pouvoir être couvert par des
redéploiements, même si ce point demandait à être
confirmé par le projet de loi de finances rectificative de fin
d'année.
Le rapporteur pour avis a souligné que seul ce coût de
1 milliard de francs en première année d'application peut
être comparé au coût prévisionnel du projet de loi de
cohésion sociale, dont la discussion a été interrompue en
1997. Celui-ci avait été évalué à
2,5 milliards de francs, dont 1,7 milliard sur le budget du logement
et 768 millions sur le budget des affaires sociales.
Il a relevé que les cofinancements attendus sont importants : avec un
montant de 7,774 milliards de francs, ils représentent près
de la moitié de l'effort budgétaire de l'Etat. Il a
souligné que les négociations avec les régions n'ont pas
encore commencé, l'association des présidents de conseils
régionaux (APCR) n'ayant pas même été
consultée sur le projet de loi d'orientation. Par ailleurs, les
financements du Fonds social européen (FSE) ne sont connus que jusqu'en
1999, année d'échéance des programmes en cours.
Il a indiqué que la répartition des cofinancements entre les
partenaires de l'Etat est la suivante : 2,165 milliards pour le Fonds
social européen ; 3,476 milliards pour les
collectivités locales ; 879 millions pour les opérateurs
privés ; 961 millions de francs pour les fonds de la formation en
alternance ; et 293 millions pour la sécurité sociale. Il a
précisé que les collectivités locales sont
sollicitées pour apporter 45 % des cofinancements.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a indiqué que le coût
budgétaire du projet de loi d'orientation a été alourdi en
première lecture par les députés qui, par ailleurs, n'ont
pas procédé à une analyse détaillée de son
impact financier global.
Il a précisé que la seule mesure nouvelle financièrement
importante était la suppression de la taxe forfaitaire sur les frais
d'huissier de justice, dont le coût est estimé à
360 millions de francs. Il s'est interrogé sur la consistance du
gage prévu pour cette mesure, votée contre l'avis du
Gouvernement, qui aboutirait à tripler les droits sur les métaux
précieux.
Il a estimé le coût total annuel des modifications
apportées par l'Assemblée nationale à 400 millions de
francs au moins, soit 1,2 milliard de francs sur trois ans.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, s'est enfin interrogé sur la
sincérité des évaluations de coûts afférentes
au projet de loi d'orientation.
Il a relevé que la plupart des chiffrages reposent sur des
hypothèses de limitation quantitative des bénéficiaires,
qui semblent fragiles au regard de l'importance des besoins. Même s'il ne
s'agit pas, juridiquement, de dispositifs "à guichet ouvert", il a
estimé qu'il serait difficile de refuser des demandes en cours
d'année simplement parce que les crédits initialement
prévus seront épuisés. Il a rappelé que les
dépenses à caractère social constituent traditionnellement
de gros postes d'ajustement en loi de finances rectificative.
De même, le rapporteur pour avis a observé que certains
dispositifs étaient expérimentaux, mais que leur
généralisation n'était pas chiffrée, bien que
présentée comme certaine. C'est notamment le cas du dispositif de
lutte contre l'illettrisme, et des antennes régionales de l'Observatoire
national de la pauvreté et de l'exclusion.
Il a remarqué que d'autres mesures sont réputées n'avoir
aucun coût, alors même qu'elles tendent à créer des
dispositifs nouveaux ou à élargir le champ de dispositifs
existants. C'est notamment le cas de la nouvelle procédure de
réquisition de logements avec attributaire, et de l'extension du champ
des emplois jeunes dans les DOM.
Il a considéré que les charges de gestion supplémentaires
pour les administrations n'étaient pas prises en compte, alors qu'elles
impliquaient parfois des créations de postes. C'est notamment le cas du
rétablissement des bourses des collèges et de la mise en place de
l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion.
Enfin, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a affirmé qu'il ne
fallait pas sous-estimer l'effet inflationniste potentiel de
l'amélioration de l'information des populations concernées sur
leurs droits. L'expérience prouve que, indépendamment de toute
extension juridique, le seul renforcement de l'accès effectif aux droits
sociaux accroît les dépenses afférentes.
Il a enfin évoqué les mécanismes dits
"d'intéressement" prévus par le projet de loi d'orientation, qui
permettent de cumuler, dans certaines limites, une rémunération
d'activité avec un minimum social. Tout en estimant ce dispositif
judicieux dans son principe, il l'a estimé susceptible de
générer des effets d'aubaine voire des fraudes pures et simples,
tant de la part des bénéficiaires que de celle des entreprises
qui les emploient. Il a rappelé que Mme Martine Aubry avait
exprimé son désaccord sur la mesure votée par les
députés tendant à permettre le cumul d'un CES avec une
activité à mi-temps.
Tout en approuvant les grandes lignes du projet de loi d'orientation relatif
à la lutte contre les exclusions, M. Jacques Oudin, rapporteur pour
avis, a estimé que son financement appellerait des clarifications lors
des prochaines échéances budgétaires. La commission a
ensuite procédé à l'examen des articles.
A l'article 25 (exonération de taxe d'habitation pour certains
logements en sous-location), après un large débat au cours duquel
sont intervenus MM. Michel Charasse, Roland du Luart, Jacques Oudin, rapporteur
pour avis, et Christian Poncelet, président, la commission a
décidé d'adopter un amendement de suppression du gage qui
était associé à la nouvelle rédaction de cette
disposition résultant des travaux de l'Assemblée nationale.
La commission a jugé que cet amendement était conforme aux
règles de la recevabilité financière et, en
conséquence, elle a écarté l'idée d'un amendement
de repli prévoyant la substitution d'un gage fondé sur le
relèvement des droits sur le tabac à celui figurant dans le texte
de l'article.
Elle a ensuite donné un avis favorable à l'adoption de cet
article ainsi amendé.
A l'article 25 bis (exonération de taxe d'habitation pour les locaux
loués par des organismes logeant des personnes
défavorisées), la commission a adopté un amendement
tendant à une nouvelle rédaction de l'article, ayant pour objet
principal de transformer l'exonération de taxe d'habitation qu'il
prévoit en un dégrèvement afin de permettre aux
collectivités locales d'obtenir une compensation par l'Etat des pertes
de recettes qui résultent pour elles de cet allégement.
Puis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption sans
modification de l'article 26 (exonération de droit de bail pour les
sous-locations consenties à des personnes défavorisées).
A l'article 28 ter (exonération d'impôt pour le revenu
représenté par la valeur des travaux réalisés par
le preneur à bail d'un logement faisant l'objet d'un bail à
réhabilitation), après les interventions de MM. Michel
Moreigne, Michel Charasse, et Alain Lambert, rapporteur général,
la commission a adopté un amendement précisant que
l'exonération ne concernerait que les travaux de construction,
reconstruction, ou agrandissement, afin de ne pas pénaliser les travaux
d'amélioration qui bénéficient actuellement d'un
régime fiscal plus favorable. Puis elle a donné un avis favorable
à l'adoption de cet article ainsi amendé.
A l'article 29 (modification des conditions d'exonération de taxe
foncière sur les propriétés bâties), la commission a
adopté quatre amendements destinés, d'une part, à
préciser la portée du dispositif et, d'autre part, à
garantir la compensation par l'Etat des pertes de recettes résultant
pour les collectivités locales de cette exonération. Puis, elle a
donné un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi
amendé.
A l'article 30 (taxe sur les logements vacants), après les
interventions de MM. Christian Poncelet, président, et Michel
Charasse, la commission a décidé de donner un avis
défavorable à l'adoption de cet article et, en
conséquence, elle a adopté un amendement de suppression de
l'article.
A l'article 40 C (modalités d'exonération du timbre fiscal
exigé pour la délivrance d'une carte nationale
d'identité), la commission a adopté un amendement tendant
à une nouvelle rédaction de l'article, afin de transformer la
possibilité d'exonération en exonération, sous une
condition de ressources et d'insérer ces dispositions dans le chapitre
du code général des impôts relatif aux exonérations
de carte d'identité. Puis elle a émis un avis favorable à
l'adoption de l'article ainsi amendé.
A l'article 57 bis (interdiction d'accorder un prêt à un
mineur), M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a proposé un
amendement de suppression, estimant que la loi du 28 décembre 1966
relative à l'usure, aux prêts d'argent et à certaines
opérations de démarchage et de publicité interdisait
déjà l'offre de crédit à un mineur. A cet
égard, M. Michel Charasse a fait remarquer que cette interdiction
devrait être étendue aux cas où le prêt est consenti
à un mineur avec l'accord de ses parents.
La commission a alors décidé de donner un avis
défavorable à l'adoption de cet article et, en
conséquence, elle a adopté un amendement de suppression de
l'article.
Puis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption de
l'article 68 A (incessibilité et insaisissabilité
de l'allocation d'insertion et de l'allocation de solidarité
spécifique).
La commission a alors examiné les dispositions de l'article 72
(fourniture minimum d'énergie, d'eau, et de téléphone).
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a fait valoir que les
collectivités locales étant toujours concernées par les
impayés en matière d'eau, il était nécessaire
qu'elles soient toujours associées aux conventions signées au
niveau départemental et visant à mettre en oeuvre le principe de
solidarité en matière de paiement des factures d'eau.
M. Michel Charasse a approuvé les remarques du rapporteur pour
avis et a souhaité que chaque collectivité locale ou groupement
de collectivités locales puisse être partie prenante des
conventions passées au niveau départemental.
M. Christian Poncelet, président, a déclaré craindre
qu'une modification de l'article en ce sens contraigne les collectivités
locales à s'engager, même lorsqu'elles ne le souhaitaient pas.
Après l'intervention de M. Roland du Luart, la commission a
adopté un amendement précisant que les conventions signées
au niveau départemental pour la mise en oeuvre du principe de
solidarité en matière de fourniture d'eau ou d'énergie,
associeraient chaque distributeur d'eau ou chaque collectivité locale
concernée. Puis, elle a donné un avis favorable à
l'adoption de cet article ainsi amendé.
A l'article 73 (droit au compte bancaire), la commission a adopté deux
amendements de son rapporteur pour avis, le premier visant à supprimer
la fixation de conditions tarifaires par décret, et le second ayant pour
objet de limiter aux établissements de crédit
désignés par la Banque de France l'obligation d'adresser une
notification écrite et motivée au client et à la Banque de
France, en cas de clôture d'un compte à l'initiative de
l'établissement. Puis, elle a donné un avis favorable à
l'adoption de cet article ainsi amendé.
A l'article 73 bis (légalisation du dispositif expérimental dit
des "chèques d'accompagnement personnalisés"), la commission a
adopté trois amendements : l'un d'ordre rédactionnel, l'autre
excluant la possibilité pour les collectivités locales de
conférer à des associations la faculté de remettre ces
chèques d'accompagnement personnalisés à leur
bénéficiaire, le dernier étendant à l'ensemble des
établissements de crédit le pouvoir d'émettre ces titres.
La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption de
cet article ainsi amendé.
Enfin, elle a donné un avis favorable à l'adoption sans
modification de l'article 78 (modulation des tarifs des services publics
locaux).
Au cours d'une séance tenue le jeudi 4 juin 1998, sous la
présidence de M. Christian Poncelet, président, la
commission a procédé à la suite de l'examen du rapport
pour avis sur le projet de loi n° 445 (1997-1998) adopté par
l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
relatif à la lutte contre les exclusions, sur le rapport de M. Paul
Loridant.
M. Paul Loridant, rapporteur pour avis, a rappelé que, avant le vote de
la loi du 31 décembre 1989 relative à la prévention
et au règlement amiable des difficultés liées au
surendettement des particuliers et des familles, modifiée par la loi du
8 février 1995, le débiteur défaillant devait
assigner séparément chacun de ses créanciers sur le
fondement de l'article 1244-1 du Code civil pour obtenir du juge autant de
moratoires. La loi de 1989 dite "loi Neïertz" a rompu avec cette
démarche bilatérale et elle a institué un dispositif
offrant une vue d'ensemble de la situation du débiteur et des
possibilités de traitement global.
Il a constaté que ce dispositif semblait avoir atteint ses limites, du
fait d'un changement de nature du surendettement. Il a en effet rappelé
que les personnes visées par la loi de 1989 étaient, selon
l'expression consacrée, des "surendettés actifs"
c'est-à-dire des ménages s'étant endettés
au-delà de leurs capacités de remboursement mais disposant
toutefois d'une capacité de remboursement. Or, depuis 1993, et avec
l'aggravation de la crise économique, le nombre de "surendettés
passifs", c'est-à-dire de ménages surendettés suite
à une chute de leurs revenus, a fortement augmenté, cette
évolution ayant en partie rendu inopérant le dispositif de 1989.
M. Paul Loridant, rapporteur pour avis, a en effet rappelé la
forte augmentation du nombre de dossiers déposés auprès
des commissions de surendettement depuis 1995, ajoutant que, faute de revenus
suffisants, les commissions devaient recourir de plus en plus
fréquemment aux moratoires, ces derniers intervenant dans plus de
30 % des plans.
Il a dès lors expliqué que, face à ce
phénomène, le Gouvernement avait mis en place un nouveau
dispositif tenant compte de l'insolvabilité de certains débiteurs.
M. Paul Loridant, rapporteur pour avis, a présenté le
nouveau dispositif qui instaure un moratoire, et, si la situation du
débiteur n'a pas évolué, qui permet de réduire,
voire d'effacer entièrement ou partiellement ses dettes.
M. Paul Loridant, rapporteur pour avis, a ensuite formulé quatre
remarques relatives au texte proposé par le Gouvernement.
Il s'est félicité de ce que ce texte soit largement
inspiré des conclusions du rapport qu'il avait publié avec son
collègue de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest.
Toutefois, M. Paul Loridant, rapporteur pour avis, a estimé que le
projet de loi n'était pas exempt de toute critique.
D'abord, il a jugé que la dimension sociale n'était pas
suffisamment prise en compte, notamment dans le suivi du plan de redressement.
Il paraît regrettable que les ménages, en raison des sacrifices
impliqués par un plan pouvant durer huit ans, ne soient pas suivis
par une "conseillère en économie ménagère".
Ensuite, aucune mesure n'est prise pour remédier à l'absence de
statistiques. Or une meilleure information sur le profil des surendettés
comme sur la nature des plans proposés, permettrait d'améliorer
l'efficacité du dispositif.
Enfin, ce texte aurait mérité de constituer un projet de loi
à part entière, et non de ne représenter qu'une partie du
projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions,
cette incorporation risquant de conduire à des confusions. En effet, si
la nature du surendettement a évolué, les surendettés sont
loin d'être tous des exclus, seuls 7 % des dossiers laissant
apparaître un endettement non bancaire.
La commission a ensuite procédé à l'examen des articles.
La commission a adopté un amendement portant article additionnel avant
l'article 42, tendant à interdire la rémunération des
services rendus aux débiteurs dans le cadre de la procédure de
traitement du surendettement devant la commission de surendettement.
A l'article 42, relatif à la composition de la commission de
surendettement, un débat s'est engagé, au cours duquel sont
intervenus MM. Michel Charasse, René Ballayer, Paul Loridant,
rapporteur pour avis et Christian Poncelet, président. La commission a
donné un avis favorable à l'adoption d'un amendement tendant,
d'une part, à ajouter à la commission de surendettement un
septième membre en la personne d'un représentant qualifié
des services du département nommé par le président du
conseil général et ayant voix délibérative, et
d'autre part, à supprimer la personnalité choisie par le
représentant de l'Etat dans le département sur proposition du
fonds de solidarité pour le logement parmi les représentants des
locataires, ou à défaut le membre du conseil départemental
de la consommation représentant les locataires. Elle a ensuite
donné un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi
amendé.
Elle a donné un avis favorable à l'adoption sans modification
des articles 43, relatif à la fixation des ressources minimales du
ménage par la commission de surendettement, puis 43 bis (nouveau) fixant
un plancher à la fraction insaisissable du salaire correspondant au
revenu minimum d'insertion.
A l'article 44, relatif à la procédure applicable devant la
commission de surendettement, la commission a adopté un amendement
supprimant la référence à la gratuité de l'audition
de toute personne dont le témoignage peut paraître utile à
la commission, puis elle a donné un avis favorable à l'adoption
de cet article ainsi amendé.
Elle a donné un avis favorable à l'adoption sans modification de
l'article 45, relatif à la saisine du juge de l'exécution par la
commission en cas de difficultés sur la validité des
créances.
A l'article 46, relatif à la saisine du juge de l'exécution par
le président de la commission en cas d'urgence aux fins de suspension
des procédures d'exécution, la commission a adopté un
amendement tendant à limiter le nombre de personnes susceptibles
d'effectuer cette saisine. Puis elle a émis un avis favorable à
l'adoption de cet article ainsi amendé.
A l'article 47, relatif aux pouvoirs de la commission de surendettement en cas
d'échec de la conciliation, et après une intervention de
M. Christian Poncelet, président, la commission a adopté
trois amendements. Le premier tend à rétablir la
possibilité pour les commissions de surendettement, de pratiquer de
manière concomitante le report et le rééchelonnement de
certaines dettes, cette disposition ayant été supprimée
par l'Assemblée nationale. Le deuxième amendement réalise
une coordination avec le précédent. Le troisième supprime
le plafond correspondant au taux légal pour la détermination des
taux d'intérêt. Elle a ensuite donné un avis favorable
à l'adoption de cet article ainsi amendé.
A l'article 48, relatif à la mise en place d'un moratoire des dettes en
cas d'échec des phases de conciliation et de recommandation, et
après un débat auquel ont pris part MM. Michel Charasse et
Christian Poncelet, président, la commission a adopté cinq
amendements. Le premier tend à limiter le champ d'application du
moratoire. Le deuxième, voté à l'unanimité, vise
à exclure les dettes fiscales, parafiscales ou envers des organismes de
sécurité sociale du champ d'application des moratoires. Le
troisième permet d'exclure les mêmes dettes du champ d'application
de la réduction ou de l'effacement de tout ou partie des
créances. Le quatrième amendement supprime l'obligation de
gratuité concernant l'assistance aux parties. Le cinquième permet
de prendre en compte l'équité dans la réduction ou
l'effacement des créances. La commission a ensuite donné un avis
favorable à l'adoption de cet article ainsi amendé.
La commission a adopté un amendement portant article additionnel
après l'article 48, renforçant le lien entre les décisions
et les recommandations des commissions de surendettement et les accords de
remise gracieuse par les directeurs des services fiscaux.
A l'article 49, relatif aux pouvoirs du juge en cas de contestation des
recommandations de la commission de surendettement, la commission a
donné un avis favorable à l'adoption d'un amendement de
clarification empêchant le juge de pouvoir, en phase de recommandations,
effacer certaines dettes tandis que d'autres se verraient
rééchelonnées.
Elle a ensuite donné un avis favorable à l'adoption sans
modification des articles 50, relatif aux effets de l'effacement d'une
créance, et 51 concernant l'inscription au fichier sur les incidents de
paiement.
La commission a donné un avis favorable à un amendement de
suppression de l'article 51 bis (nouveau), relatif à la fixation des
tarifs applicables aux huissiers, et de l'article 51 ter (nouveau), relatif
à l'abrogation de la taxe applicable aux actes d'huissiers.
Elle a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des articles
52 concernant les conditions d'entrée en vigueur du chapitre premier du
livre III du titre III du code la consommation, et 52 bis (nouveau)
relatif à l'information de la caution.
Enfin, la commission a donné un avis favorable à l'adoption d'un
amendement de suppression de l'article 52 ter (nouveau) relatif à la
fixation du montant maximum de la caution dans les contrats de cautionnement,
puis après une intervention de M. Michel Charasse, elle a
donné à l'unanimité un avis favorable à l'adoption
d'un amendement visant également à supprimer l'article 52
quater (nouveau) concernant la fixation des ressources minimales dont
dispose la caution.
AMENDEMENTS ADOPTÉS
PAR LA COMMISSION
TITRE I
ER
DE L'ACCÉS AUX DROITS
CHAPITRE II
ACCÈS AU LOGEMENT
Section 1
Mise en oeuvre du droit au logement
ARTICLE 25
Amendement
Supprimer le III de cet article.
ARTICLE 25 bis
Amendement
Rédiger comme suit cet article :
I. L'article 1414 du code général des impôts est
complété par un VI ainsi rédigé :
" VI. Sont également dégrevés, à compter du
1
er
janvier 1998, les gestionnaires d'organismes visés
à l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale
pour les logements mis à disposition à titre temporaire des
personnes défavorisées mentionnées à l'article
1
er
de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la
mise en oeuvre du droit au logement. "
II. Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du I. ci-dessus
sont compensées par une majoration à due concurrence des droits
visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts.
Section 2
Accroissement de l'offre de logement
ARTICLE 28 ter
Amendement
I - Dans la seconde phrase du texte proposé par cet article pour
l'article 33 quinquies du code général des impôts,
après les mots :
des travaux
insérer les mots :
de construction, de reconstruction ou d'agrandissement
II - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus,
compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi
rédigé :
... Les pertes de recettes résultant de la modification du champ de
l'exonération d'impôt sur le revenu sont compensées par un
relèvement à due concurrence des droits prévus aux article
575 et 575A du code général des impôts.
ARTICLE 29
Amendement
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte
proposé par le III de cet article pour insérer un article 1384 C.
dans le code général des impôts supprimer les mots :
acquis et
Amendement
Compléter la première phrase du deuxième alinéa du
texte proposé par le III de cet article pour insérer un article
1384 C. dans le code général des impôts par les mots
suivants :
pour les logements loués ou sous-loués aux personnes
défavorisées mentionnées à l'article 1
er
de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre
du droit au logement.
Amendement
Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi
rédigé :
...- A. Les pertes de recettes résultant pour les
collectivités locales du III. du présent article sont
compensées par un relèvement à due concurrence de la
dotation globale de fonctionnement.
_ B. Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du A.
ci-dessus sont compensées par une majoration à due concurrence
des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts
Amendement
Compléter in fine cet article par deux paragraphes ainsi
rédigés :
...- Dans l'article L. 2335-3 du code général des
collectivités territoriales les mots : " et 1384 A du code
général des impôts " sont remplacés par les
mots : " , 1384 A et 1384 C du code général des
impôts ".
...- Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'extension
du droit à compensation en matière de taxe foncière sur
les propriétés bâties
sont compensées par une
majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et
575 A du code général des impôts.
ARTICLE 30
Amendement
Supprimer cet article.
CHAPITRE IV
EXERCICE DE LA CITOYENNETÉ
ARTICLE 40C
Amendement
Rédiger comme suit cet article :
Il est inséré, dans le code général des
impôts, un article 951
bis
ainsi rédigé :
"Art. 951 bis. - Les cartes nationales d'identité
délivrées aux personnes dont les ressources ne dépassent
pas le montant du revenu minimum prévu à l'article 3 de la loi
n°88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum
d'insertion et qui n'ont pas la possibilité d'apporter la preuve d'un
domicile ou d'une résidence dont elles seraient propriétaire ou
occupant ou auxquelles la loi n'a pas fixé une commune de rattachement,
sont exonérées du paiement de la somme prévue par le c. de
l'article 947, sur production d'une attestation établissant le lien
entre le demandeur et un organisme d'accueil figurant sur une liste
établie par le représentant de l'Etat dans le département
et, à Paris, le préfet de police."
TITRE
II
DE LA PRÉVENTION DES EXCLUSIONS
CHAPITRE 1
ER
PROCÉDURE DE TRAITEMENT DES
SITUATIONS DE SURENDETTEMENT
ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 42
Amendement
Avant
l'article 42 insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
L'article L.321-1 du code de la consommation est complété in fine
par un alinéa ainsi rédigé :
" 3° Soit d'intervenir, pour le compte du débiteur, sous
quelque forme que ce soit, pour les besoins de la procédure de
surendettement devant la commission. "
ARTICLE 42
Amendement
I. Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour
le deuxième alinéa de l'article L. 331-1 du code de la
consommation, après le mot :
vice-président,
insérer les mots :
un représentant qualifié des services du département
nommé par le président du conseil général, avec
voix délibérative,
II.
Dans la dernière phrase du texte proposé par cet
article pour le deuxième alinéa de l'article L. 331-1 du code de
la consommation :
A- remplacer le chiffre :
trois
par le chiffre :
deux
B- supprimer les mots :
, la troisième sur proposition du fonds de solidarité pour le
logement parmi les représentants des locataires ou, à
défaut, un membre du conseil départemental de la consommation
représentant les locataires
ARTICLE 44
Amendement
A la fin de la seconde phrase du texte proposé par le paragraphe I de
cet article pour le quatrième alinéa de l'article L.331-3 du
code de la consommation, supprimer les mots :
, sous réserve que celle-ci intervienne à titre gratuit
ARTICLE 46
Amendement
Rédiger comme suit la première phrase du texte proposé par
le paragraphe I de cet article pour compléter le premier alinéa
de l'article L. 331-5 du code de la consommation :
En cas d'urgence, la saisine du juge peut intervenir à l'initiative du
président de la commission ou du représentant local de la Banque
de France.
ARTICLE 47
Amendement
Rédiger comme suit le paragraphe I de cet article :
I. - Au début du deuxième alinéa (1°) de l'article L.
331-7 du code de la consommation, les mots : "Reporter ou
rééchelonner" sont remplacés par les mots :
"Rééchelonner, y compris, le cas échéant, en
différant le paiement d'une partie des dettes," et le mot : "cinq" est
remplacé par le mot : "huit".
Amendement
Supprimer le paragraphe I bis de cet article.
Amendement
Supprimer le paragraphe III de cet article.
ARTICLE 48
Amendement
Dans la
première phrase du premier alinéa du texte proposé par le
paragraphe I de cet article pour insérer un article L.331-7-1 dans le
code de la consommation, supprimer les mots :
ou si la situation de surendettement résulte de la mise en cause d'un
cautionnement consenti par le débiteur conformément aux articles
2011 à 2020 du code civil
Amendement
Dans la
première phrase du premier alinéa du texte proposé par le
paragraphe I de cet article pour insérer un l'article L. 331-7-1 dans le
code de la consommation, après les mots :
les créances autres qu'alimentaires
insérer les mots :
, fiscales, parafiscales ou envers les organismes de sécurité
sociale
Amendement
Compléter la 3
ème
phrase du second alinéa du
texte proposé par le I de cet article pour insérer un article
L.331-7-1 dans le code de la consommation, par les mots :
fiscales, parafiscales ou envers les organismes de sécurité
sociale
Amendement
Supprimer le paragraphe III bis de cet article.
Amendement
Après la troisième phrase du second
alinéa du
texte proposé par le I de cet article pour insérer un article
L.331-7-1 dans le code de la consommation, insérer une phrase ainsi
rédigée :
La réduction ou l'effacement peut être différencié
si, en équité, la situation respective des créanciers le
commande.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 48
Amendement
Après l'article 48 insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
Le 2
ème
alinéa (1°) de l'article L. 247 du livre
des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi
rédigée :
" Ces remises totales ou partielles sont également prises au vu des
recommandations de la commission visée à l'article L. 331-1 du
code de la consommation. "
ARTICLE 49
Amendement
Dans la
première phrase du texte proposé par cet article pour l'article
L. 332-3 du code de la consommation, remplacer les mots :
à l'article L. 331-7 ou à l'article 331-7-1
par les mots :
soit à l'article L. 331-7, soit à l'article L. 331-7-1
ARTICLE 51 bis
Amendement
Supprimer cet article.
ARTICLE 51 ter
Amendement
Supprimer cet article.
ARTICLE 52 ter
Amendement
Supprimer cet article.
ARTICLE 52 quater
Amendement
Supprimer cet article.
CHAPITRE II
SAISIE IMMOBILIÈRE ET INTERDICTION BANCAIRE
ARTICLE 57 bis
Amendement
Supprimer cet article.
CHAPITRE IV
MOYENS D'EXISTENCE
ARTICLE 72
Amendement
Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par
le 3° de cet article pour modifier le deuxième et troisième
alinéas de l'article 43-6 de la loi n°88-1088 du 1er
décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion :
"Dans chaque département, des conventions sont passées entre le
représentant de l'Etat, les représentants d'Electricité de
France, de Gaz de France, chaque distributeur d'eau ou chaque
collectivité territoriale ou groupement de collectivités
concerné et, le cas échéant, avec chaque centre communal
ou intercommunal d'action sociale, les organismes de protection sociale et les
associations de solidarité. Elles déterminent notamment les
conditions d'application des conventions nationales et les actions
préventives et éducatives en matière de maîtrise
d'énergie ou d'eau."
ARTICLE 73
Amendement
Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par cet
article pour l'article 58 de la loi n°84-46 du 24 janvier 1984 relative
à l'activité et au contrôle des établissements de
crédit.
Amendement
Dans la première phrase de l'avant dernier alinéa du texte
proposé par cet article pour l'article 58 de la loi n°84-46 du 24
janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des
établissements de crédit, après les mots :
de l'établissement de crédit
insérer les mots
désigné par la Banque de France
ARTICLE 73 bis
Amendement
Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article
pour insérer un article L. 1611-6 dans le code
général des collectivités territoriales, supprimer les
mots :
directement ou par l'intermédiaire d'associations agréées
Amendement
Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article
pour insérer un article L. 1611-6 dans le code
général des collectivités territoriales remplacer les
mots :
définies pour la collectivité
par les mots :
définies par la collectivité
Amendement
Dans le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet
article pour insérer un article L. 1611-6 dans le code
général des collectivités territoriales remplacer les
mots :
entreprises spécialisées
par les mots
établissements de crédit visés à l'article 18 de
la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à
l'activité et au contrôle des établissements de
crédit
1
Le projet de loi relatif à
l'accès au droit a été présenté en Conseil
des Ministres le mercredi 3 juin 1998.
2
L'article premier, alinéa 4 de l'ordonnance n°59-2 du
2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances dispose en
effet que : "lorsque des dispositions d'ordre législatif ou
réglementaire doivent entraîner des charges nouvelles, aucun
projet de loi ne peut être définitivement voté, aucun
décret ne peut être signé, tant que ces charges n'ont pas
été prévues, évaluées et autorisées
dans les conditions fixées par la présente ordonnance".
3
Rapport AN n°856 (XI° législature)
4
Ceux-ci, qui figurent aux pages 25 et 26 du tome I -
Présentation générale-, consistent essentiellement en
l'insertion du tableau de financement du programme, tel qu'il figure dans
l'étude d'impact du projet de loi
5
Qu'il s'agisse de ceux figurant dans le dossier de presse du
programme de prévention ou des informations complémentaires
obtenues par votre rapporteur pour avis.
6
Il semble y avoir, en outre, une erreur de totalisation de 402
millions de francs : la somme algébrique des 9 mesures
présentées par le Gouvernement dans son programme, page 19, au
titre des aides à l'emploi s'élève en
réalité à 33,129 milliards contre 33,531 milliards de
francs affichés par le Gouvernement.
7
Loi n° 98-285 du 17 avril 1998 ouvrant le droit à une
allocation spécifique aux chômeurs âgés de moins de
soixante ans ayant quarante annuités de cotisations d'assurance
vieillesse.
8
Rapport n° 3472 (Xème législature) de
Mme Bachelot-Narquin, page 30.
9
Surendettement : prévenir et guérir, de MM.
Jean-Jacques Hyest et Paul Loridant, 1997-1998, page 59
10
Au sens de l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990
visant à la mise en oeuvre du droit au logement
11
L'article 92 L du code général des impôts
dispose que " les personnes qui concluent un contrat de sous-location d'un
logement, conforme aux normes minimales définies par décret en
Conseil d'Etat, avec des bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion ou des étudiants bénéficiant d'une bourse
à caractère social ou avec un organisme sans but lucratif qui met
ce logement à la disposition de personnes défavorisées
mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31
mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement et qui est
agréé à cet effet par le représentant de l'Etat
dans le département sont exonérées, pendant les trois
premières années de location, de l'impôt sur le revenu pour
les produits de cette sous-location, sous réserve que le prix de
celle-ci soit inférieur à un plafond fixé par
décret. "
12
L'article 17 de la loi de finances pour 1997 a substitué
aux subventions associées aux prêts locatifs aidés (PLA) un
régime de TVA à taux réduit (5,5 %) sur les livraisons
à soi-même d'immeubles. Il portait exclusivement sur les
opérations de construction neuve et donc excluait les opérations
d'acquisition amélioration, pour lesquelles l'ancien régime de
subvention était maintenu. L'article 14 loi de finances pour 1998 a
poursuivi le processus d'assujettissement des investissements des bailleurs
sociaux à la TVA à taux réduit sous forme de livraison
à soi-même: il a assujetti à la TVA à taux
réduit (5,5 %) la livraison à soi-même des travaux
d'amélioration, de transformation ou d'aménagement des logements
locatifs sociaux.
13
Le II de l'article 1407 du code général des
impôts dispose que : " Ne sont pas imposables à la
taxe : 1° Les locaux passibles de la taxe professionnelle lorsqu'ils
ne font pas partie de l'habitation personnelle des contribuables ; 2°
Les bâtiments servant aux exploitations rurales ; 3° Les locaux
destinés au logement des élèves dans les écoles et
pensionnats ; 4° Les bureaux des fonctionnaires publics.
14
Le premier alinéa de cet article dispose en effet
que : " Lorsque leur durée est limitée, les baux,
sous-baux
et prorogations conventionnelles ou légales de baux
d'immeubles et de fonds de commerce ou de clientèles sont assujettis
à un droit d'enregistrement de 2,50 %. "
15
L'article 92 L du code général des impôts
dispose que " les personnes qui concluent un contrat de sous-location d'un
logement, conforme aux normes minimales définies par décret en
Conseil d'Etat, avec des bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion ou des étudiants bénéficiant d'une bourse
à caractère social ou avec un organisme sans but lucratif qui met
ce logement à la disposition de personnes défavorisées
mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31
mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement et qui est
agréé à cet effet par le représentant de l'Etat
dans le département sont exonérées, pendant les trois
premières années de location, de l'impôt sur le revenu pour
les produits de cette sous-location, sous réserve que le prix de
celle-ci soit inférieur à un plafond fixé par
décret. "
16
Les travaux d'amélioration des locaux d'habitation
s'entendent de ceux qui ont pour objet d'apporter à un local un
équipement ou un élément de confort nouveau sans modifier
la structure de l'immeuble.
17
Sont considérés comme des travaux de construction
ou de reconstruction les travaux comportant la création de nouveaux
locaux d'habitation, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une
modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les
travaux d'aménagement interne qui, par leur importance,
équivalent à une reconstruction
18
Art. 1384 A du code général des impôts :
" Les constructions neuves affectées à l'habitation
principale et financées à concurrence de plus de 50 % au moyen
des prêts aidés par l'Etat, prévus aux articles L 301-1 et
suivants du code de la construction et de l'habitation, sont
exonérées de la taxe foncière sur les
propriétés bâties pendant une durée de quinze ans
à compter de l'année qui suit celle de leur achèvement.
L'exonération s'applique aux constructions de logements neufs à
usage locatif et affectés à l'habitation principale,
mentionnés au 3° de l'article L 351-2 du code de la construction et
de l'habitation lorsqu'ils sont financés à concurrence de plus de
50 p 100 au moyen d'un prêt prévu à l'article R 331-1 du
même code, et qu'ils bénéficient des dispositions des 2 ou
3 du I de l'article 278 sexies. "
19
Il convient de noter que la mise en place du PLA à loyer
minoré et du PLA intégration est susceptible de favoriser le
développement de ces opérations.
20
A cet effet, l'article R. 235-1 du code des communes,
modifié par l'article 1
er
du décret
n° 92-745 du 29 juillet 1992 ( JORF du 4 août 1992) dispose
que : " Lorsque les exonérations de taxe foncière sur
les propriétés bâties prévues aux articles 1384 et
1384 A du code général des impôts et aux I et II bis de
l'article 1385 du même code entraînent pour les communes une perte
de recettes supérieure à 10 p 100 du produit communal total de la
taxe foncière sur les propriétés bâties, ces
collectivités reçoivent une allocation de l'Etat égale
à la différence entre ladite perte de recettes et une somme
égale à 10 p 100 du produit de la taxe
précitée. "
21
Le mouvement PACT-ARIM regroupe aujourd'hui 148 associations
adhérentes à la Fédération nationale des centres
PACT-ARIM (à l'origine PACT signifiait propagande et action contre le
taudis, devenu en 1975 protection amélioration transformation de
l'habitat, le sigle ARIM, signifiant association de restauration
immobilière).
22
J.O. débats de l'Assemblée nationale de la
2
e
séance du 13 mai 1998 page 3784 (J.O. du 14 mai 1998).
23
Seuls les centre-villes des grandes agglomérations
connaissaient des taux de vacance supérieurs à ceux des zones
rurales (notamment à Paris, Nice, Bordeaux et Marseille).
24
Art. 1389. - I. Les contribuables peuvent obtenir le
dégrèvement de la taxe foncière en cas de vacance d'une
maison normalement destinée à la location ou d'inexploitation
d'un immeuble utilisé par le contribuable lui-même à usage
commercial ou industriel, à partir du premier jour du mois suivant celui
du début de la vacance ou de l'inexploitation jusqu'au dernier jour du
mois au cours duquel la vacance ou l'inexploitation a pris fin.
Le dégrèvement est subordonné à la triple condition
que la vacance ou l'inexploitation soit indépendante de la
volonté du contribuable, qu'elle ait une durée de trois mois au
moins et qu'elle affecte soit la totalité de l'immeuble, soit une partie
susceptible de location ou d'exploitation séparée.
25
Un amendement présenté par Mme Bachelot-Narquin,
MM. Devedjian et Martin-Lalande, députés, prévoyait de
délivrer gratuitement les cartes d'identité "aux personnes
véritablement indigentes et reconnues hors d'état d'en acquitter
le montant".(Assemblée Nationale, 2ème séance du 14 mai
1998).
26
ODAS : les cahiers de l'ODAS, janvier 1997, page 23
27
Le règlement modifié du 11 avril 1990
définit l'incident de paiement caractérisé. Pour un
crédit comportant des échéances échelonnées,
l'incident caractérisé sera constitué lorsque les
défauts de paiement atteignent un montant cumulé au moins
égal pour les crédits remboursables mensuellement, au triple de
la dernière échéance due et dans les autres cas, à
l'équivalent d'une échéance, lorsque ce montant demeure
impayé pendant plus de quatre-vingt-dix jours. Pour les crédits
sans échéance échelonnée, l'incident
caractérisé sera constitué par le défaut de
paiement des sommes exigibles plus de 90 jours après la date de mise en
demeure de payer du débiteur, dès lors que la somme exigible est
au moins de 3.000 francs. Pour tous les autre types de crédit,
l'incident caractérisé sera constitué si, après
défaut de paiement, l'établissement de crédit engage une
procédure judiciaire ou prononce la déchéance du terme
après mise en demeure de débiteur restée sans effet.
28
Surendettement : prévenir et guérir, de MM.
Jean-Jacques Hyest et Paul Loridant, 1997-1998, page 72.
29
Surendettement : prévenir et guérir, de MM.
Jean-Jacques Hyest et Paul Loridant, 1997-1998, pages 36 et 37
30
Sont notamment regroupés sous l'appellation
générique " services publics administratifs à
caractère facultatif", les services à vocation sociale tels que
les cantines scolaires, les crèches municipales ou les centres de
loisirs ainsi que les services à vocation culturelle comme les
bibliothèques, les musées ou les écoles de
musique.