TITRE Ier -
ARMES CHIMIQUES
Bien qu'il s'intitule " armes
chimiques ", ce titre
a trait non seulement à ces dernières, mais aussi à leurs
installations de fabrication, ainsi qu'aux produits chimiques du tableau 1 que
le Gouvernement a initialement souhaité soumettre dans certains cas, au
même régime que celui des armes chimiques.
Par symétrie avec le titre II du projet de loi, qui s'intitule
"
Contrôle de certains produits chimiques
",
votre
commission a adopté un amendement qui tend à harmoniser la
rédaction en appelant le titre Ier "
Suppression des armes
chimiques
".
CHAPITRE IER -
Interdictions
Article 2 -
Interdiction des armes chimiques
Cet article fixe une interdiction générale
d'emploi, de fabrication et d'utilisation des armes chimiques.
A titre liminaire, rappelons que, la Convention de 1993 ayant été
ratifiée par la France, ses dispositions -y compris l'interdiction des
armes chimiques- sont déjà, en vertu de l'article 55 de la
Constitution, intégrées au droit positif, avec une valeur
supra-législative.
Rappelons, en outre, que la France déclare de plus détenir ni
fabriquer d'armes chimiques et que l'entrée en vigueur de cet article a,
en quelque sorte, été anticipée par notre pays.
Le premier alinéa
du présent article détermine les
interdictions touchant les armes chimiques, qui s'étendent à :
- leur emploi : cette interdiction reprend le b) du 1) du
premier article de la Convention. Elle existait déjà, depuis
l'adoption du Protocole précité de Genève de 1925 sur
l'interdiction des armes chimiques ;
- leur mise au point, leur fabrication, leur stockage, leur conservation,
leur acquisition : ces termes figurent au a) du 1) du premier article de la
Convention. Ces interdictions n'existaient pas sous le régime de 1925.
En outre, le texte de loi précise que sont interdits
leur
détention, leur cession, leur importation, leur exportation, leur
transit, leur commerce, leur courtage
, alors que la Convention fait
référence à l'interdiction de "
transfert, direct
ou indirect (...) à qui que ce soit
". Les rédacteurs du
projet de loi ont, en effet, souhaité retenir des termes ayant
déjà un sens en droit français. C'est pourquoi le terme de
" transfert " a été remplacé par les termes
" cession ", " importation ",
" exportation ",
" transit ", " commerce " et
" courtage ".
En outre, le Gouvernement a souhaité que le terme de
" détention " soit ajouté par rapport au texte
international car l'énumération, par la Convention, des
activités interdites ne lui semblait pas couvrir toutes les situations
(comme celle, par exemple, d'une détention temporaire d'armes dans un
véhicule). S'agissant d'un article relatif aux armes chimiques, votre
commission ne voit pas d'inconvénient majeur à une telle
rédaction.
Le deuxième alinéa
fixe deux interdictions :
- la première concerne les préparatifs "
quels
qu'ils soient
" en vue de l'emploi des armes chimiques. Cette
interdiction est plus large que celle de la Convention qui ne s'applique qu'aux
préparatifs "
militaires
"
30(
*
)
.
Ce choix résulte de la
volonté du Gouvernement de
viser le terrorisme dit
" chimique ",
dont les incidents survenus dans le métro
de
Tokyo, à l'instigation de la secte " Aoun ", ont
récemment fait redouter l'émergence ;
- la deuxième interdiction concerne l'aide, l'encouragement ou
l'incitation à entreprendre des activités interdites par le texte
de loi. Cette interdiction reprend, quant à elle, fidèlement la
formulation de l'article premier, 1) d), de la Convention.
Le troisième alinéa
instaure une exception,
limitée, à ces interdictions, visant à permettre aux
services de l'Etat de détenir, de stocker et de conserver des armes
chimiques en vue de leur destruction ou de leur élimination, dans des
conditions fixées par décret.
La juxtaposition des termes " destruction " et
" élimination " est redondante. Elle résulte, comme
l'ont indiqué les contacts établis avec les rédacteurs du
texte, de la volonté de viser les processus de dégradation les
plus aboutis pour les substances chimiques concernées.
Cette répétition a paru inutile à votre commission.
En effet, la Convention, qui par ailleurs prévoit une obligation de
désarmement très contraignante, très
détaillée et très complète, a jugé suffisant
l'emploi de terme de " destruction ". Et pour cause :
d'après le dictionnaire
31(
*
)
, la
destruction signifie
"
action de jeter bas, de faire disparaître (....) action
d'altérer profondément (une substance) (...) action de faire
disparaître (....) le fait de dégrader jusqu'à
disparaître ".
Votre commission ne juge donc pas utile de viser, en plus,
l'élimination, et a adopté un amendement tendant à ne se
référer qu'à la " destruction " des armes
,
comme c'est le cas dans la Convention. D'ailleurs, l'article 5 du
présent projet de loi relatif à la destruction des armes
chimiques, ne mentionne pas leur " élimination ".
En outre, il est prévu que l'administration puisse confier ces
opérations à des "
personnes
agréées
".
Notons que, comme le rappelle le tableau récapitulatif annexé au
présent rapport, l'article 55 du présent projet de loi (voir
commentaire ci-après) punit de la réclusion criminelle à
perpétuité et de 50 millions de francs d'amende, l'emploi
d'une arme chimique, tandis que l'article 58 punit de 20 ans de
réclusion et de 20 millions de francs d'amende leur mise au point,
fabrication, stockage, détention, conservation et transfert.
L'article 63 dispose que la détention d'armes chimiques anciennes
ou d'armes chimiques abandonnées est, quant à elle, punie de 2
ans de prison et de 200.000 francs d'amende, sauf déclaration
à l'autorité compétente (cf. supra).
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.