TITRE II -
CONTRÔLE DE CERTAINS PRODUITS CHIMIQUES
CHAPITRE Ier -
Produits chimiques du tableau 1 et leurs installations
Section I -
Produits chimiques
Cette section vise à instaurer un régime de contrôle (d'autorisation ou simplement déclaratif) des produits chimiques figurant au tableau 1 de " l'annexe sur les produits chimiques ".
Article 7 -
Régime d'autorisation des
utilisations licites des produits chimiques du tableau 1
Cet article détermine les utilisations licites des
produits chimiques du tableau 1 et instaure, pour ces dernières, un
régime d'autorisation.
La VIe partie de l'annexe précitée sur la
vérification précise le régime applicable aux produits
chimiques du tableau 1. Même si, contrairement aux armes chimiques,
une interdiction totale ne s'applique pas, dans la Convention, à ces
substances, leur utilisation et leur fabrication est néanmoins
très strictement contrôlée puisque le texte
international
38(
*
)
précise
qu'un Etat ne peut fabriquer, acquérir, conserver, transférer ou
utiliser ces produits que :
- à des fins de recherche, médicales, pharmaceutiques ou de
protection ;
- si les types et quantités sont limités à ce que
peuvent justifier ces fins ;
- si la quantité utilisée et annuellement acquise est
inférieure à une tonne.
Le présent projet de loi adopte une formulation différente
à celle de la Convention, puisqu'il pose le préalable de
l'interdiction de ces produits, dans le premier paragraphe, avant de
détailler, dans le paragraphe II, les exceptions à cette
interdiction.
Notons à titre liminaire, que le projet de loi n'a pas choisi
d'expression harmonisée pour désigner ces produits, qui sont
nommés tantôt " produits chimiques ", tantôt
" produits ". Votre commission a donc tout d'abord adopté un
amendement d'harmonisation rédactionnelle
tendant à mettre
en accord les rédactions en faisant référence aux
" produits chimiques " inscrits au tableau 1. Cette
situation se
retrouve, par ailleurs, plus loin dans le texte
39(
*
)
, pour les produits inscrits au tableau
2.
Le paragraphe I
du présent article pose une interdiction
des produits du tableau 1, tempérée par l'énonciation
des quatre fins, énumérées ci-dessus, d'utilisation
licite, qui doivent toutefois respecter le critère de
proportionnalité entre ces fins et les quantités de produit en
jeu.
Le paragraphe II
décrit le régime d'utilisation des
produits chimiques du tableau 1, lorsqu'elle n'est pas interdite au
paragraphe I.
- Le a) pose le principe de la délivrance d'une autorisation
administrative pour ces produits, pour les activités se déroulant
sur le territoire national.
Cette autorisation fixera des quantités
de produits autorisées.
Soulignons d'abord que, sur un plan purement formel, la liste des
activités soumises à autorisation donnée par cet
alinéa n'est pas dans le même ordre que celle du
paragraphe I, alors même que le paragraphe II se pose en
dérogation du premier paragraphe.
Ensuite, le projet de loi dispose que les produits détenus
"
avant
" la date d'entrée en vigueur de la loi,
feront
l'objet d'une demande d'autorisation
dans un délai d'un mois à
compter de la parution de la loi.
Cette disposition a semblé irréaliste à votre commission.
En effet, la possibilité de demander une autorisation est
subordonnée à la parution des textes réglementaires
décrivant la procédure à suivre et les pièces
à fournir. Or, chacun sait que les textes d'application des dispositions
législatives paraissent dans des délais relativement longs.
La communication du Président Jean François-Poncet du
8 octobre dernier
40(
*
)
sur
l'application des lois adoptées depuis 1988 par la Commission des
Affaires économiques a récemment rappelé que près
de quatre lois sur dix attendaient toujours la parution de mesures
d'application. D'ailleurs, pour la loi, à l'objet assez proche de celui
du présent texte, n° 96-542 du 19 juin 1996 relative
au contrôle de la fabrication et du commerce de certaines substances
susceptibles d'être utilisées pour la fabrication illicite de
stupéfiants ou de substances psychotypes, que votre rapporteur avait eu
l'honneur de rapporter,
le délai de parution des textes
d'application
(un décret en Conseil d'Etat et un
arrêté), pourtant moins nombreux que ceux envisagés pour le
présent projet de loi,
avait été de près de six
mois
.
En conséquence,
votre commission a supprimé la
référence au délai d'un mois posée par le
présent article, peu réaliste et qui relève en outre du
domaine réglementaire
. Il est en effet peu souhaitable que le
législateur fixe des obligations dont il sait par avance qu'elles ne
pourront pas être respectées. Une indication du délai
à respecter pour faire la dite déclaration relève, en tout
état de cause, des textes d'application.
Soulignons que l'article 67 du présent projet de loi (voir supra)
punit de trois ans de prison et de 300.000 francs d'amende la
détention ou la fabrication, sans autorisation, de produits du tableau 1.
- Le b)
du paragraphe II du présent article traite
du régime d'importation et d'exportation des produits du
tableau 1
(à des fins et dans des quantités permises par
le projet de loi).
Cet alinéa dispose que la réexportation de ces produits est
interdite, conformément aux dispositions de la Convention
41(
*
)
. L'article 67 du présent
projet de loi punit de 3 ans d'emprisonnement et de 300.000 francs
d'amende la violation de cette interdiction.
Il reprend, en outre, l'obligation posée par la Convention
42(
*
)
de ne transférer ces produits
qu'à
un Etat ayant ratifié cette dernière
.
D'ailleurs, l'article 66 (voir supra) punit de 7 ans d'emprisonnement
et de 700.000 francs d'amende le transfert des produits inscrits au
tableau 1 à des Etats non partie à la Convention.
En ce qui concerne
le régime d'autorisation du transfert de ces
produits à un Etat partie à la Convention
, le Gouvernement a
souhaité utiliser les procédures existantes pour le commerce
international des armes, plutôt que de créer un régime
spécifique aux armes chimiques.
Deux solutions étaient envisageables puisque deux procédures
existent : une pour l'autorisation des importations et exportations des
matériels de guerre (chars, avions, etc.), une pour l'autorisation des
exportations des biens dits à " double usage ", qui
résulte du règlement européen n° 3381/94 du conseil
du 19 décembre 1994 instituant un régime communautaire
de contrôle des exportations de biens à double usage
43(
*
)
, complété par la
décision du Conseil n° 94/942/PESC modifiée par la
décision n° 96/613/PESC.
C'est la première solution que le Gouvernement a choisie pour les
produits du tableau 1, en raison de leur proximité d'avec les armes
chimiques, la deuxième ayant été retenue pour les produits
des deux autres tableaux.
Pour les produits du tableau 1 concernés par le présent article,
la rédaction proposée fait référence aux
articles 11, 12 et 13 du décret loi du 18 avril 1939
fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions,
reproduits ci-dessous :
Décret loi du 18 avril 1939
Art - 11 -
L'importation
des
matériels des catégories 1, 2, 3, 4, 5 et 6 est
prohibée. Des dérogations à cette prohibition peuvent
être établies par décret. Dans ce cas, l'importation est
subordonnée à l'obtention d'une autorisation d'importation
délivrée dans les conditions définies par
arrêté interministériel.
Art - 12 - Il ne devra être accepté aucune commande
en vue de
l'exportation
des matériels visés à
l'article suivant sans agrément préalable donné dans des
conditions fixées par arrêté interministériel. Il ne
devra non plus, sans le même agrément, être
procédé, aux fins de cession ou de livraison ultérieure
à l'étranger, à aucune présentation ni à
aucun essai de ceux de ces matériels, visés ci-dessus, qui seront
définis par ledit arrêté. Il en sera de même pour la
cession des licences commerciales de fabrication et de tous les documents
nécessaires pour l'exécution des fabrications. Les prescriptions
du présent article ne font pas obstacle à l'application, s'il y a
lieu, des dispositions de l'article 2 de la loi du
26 janvier 1934 modifié par l'article 3 du décret
du 17 juin 1938 relatif à la répression de l'espionnage.
Art. 13 (Ord. n° 58-917, 7 oct. 1958,
art. 1er) -
L'exportation
sous un régime douanier
quelconque, sans autorisation, des matériels de guerre et
matériels assimilés est prohibée.
Des arrêtes interministériels définiront :
1° La liste des matériels visés ci-dessus ;
2° Les dérogations à l'obligation d'autorisation
préalable ;
3° La procédure de délivrance des autorisations
d'exportation.
Les contestations en douane portant sur la prohibition d'importation ou
d'exportation édictée par le présent décret sont
déférées à un comité siégeant
auprès du ministre de la défense nationale et tranchées
par lui souverainement.
L'organisation et le fonctionnement de ce comité sont
déterminés par arrêté interministériel.
Deux produits sont toutefois dans une situation particulière :
la ricine et la saxitoxine
. Ces produits figurant au tableau 1, leur
exportation et leur importation devra donc en vertu du présent projet de
loi, être autorisée suivant le
régime applicable au
matériel de guerre
. Or, ils figurent à l'annexe du
règlement européen sur les biens à double usage, et sont
donc soumis par la législation européenne à ce
régime particulier d'autorisation
.
Se pose dès lors un problème de compatibilité entre la
rédaction proposée et la législation communautaire, qui a
amené votre commission à
adopter un amendement qui
précise que la disposition du présent alinéa s'applique
sans préjudice des dispositions communautaires.
En outre, chaque importation et exportation est soumise à une
déclaration préalable, distincte des éventuelles
déclarations douanières existantes. En effet, l'Etat est tenu, en
vertu de la Convention
44(
*
)
,
d'effectuer une déclaration à l'OIAC. Il doit donc disposer des
informations nécessaires à l'établissement de cette
déclaration.
- Le c)
du paragraphe II impose des obligations
pour le commerce et le courtage de ces produits avec des Etats
étrangers.
L'article 67 punit de trois ans
d'emprisonnement et de 300.000 francs d'amende le commerce et le courtage
avec des pays parties à la Convention, effectué sans autorisation.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.