B. L'OPPORTUNITÉ DE LA RÉVISION GÉNÉRALE DE LA POLITIQUE FRANÇAISE D'AIDE
La logique de moyens, pour importante qu'elle soit (en particulier dans les secteurs de la santé et de l'éducation), tend toutefois à s'effacer au profit d'une démarche de coordination, de complémentarité et d'efficacité des bailleurs, dans le cadre de la « Déclaration de Paris » du 2 mars 2005. La RGPP, déclinée pour l'APD française, traduit cette orientation et ne réduit plus la politique française au seul respect d'objectifs de volume d'aide. De même, l'établissement d'un budget pluriannuel doit contribuer à réduire l'incertitude pesant sur les concours de la France , quand bien même ils s'inscriraient en baisse.
L' « examen par les pairs » des politiques et programmes de la France, mené sous l'égide du CAD et achevé en mai 2008, n'a pas abouti à des conclusions particulièrement innovantes et insiste, dans la continuité du précédent examen mené en 2004, sur le renforcement de l'approche stratégique, la rationalisation du dispositif institutionnel (pilotage unifié et attribution d'un mandat clair à chaque acteur), une plus forte concentration géographique sur les pays les moins avancés, un renforcement des synergies entre les canaux bilatéral et multilatéral, et la sécurisation de l'augmentation du volume d'aide.
Les orientations de la RGPP, telles qu'elles ressortent des Conseils de modernisation des politiques publiques des 4 avril et 11 juin 2008, reposent sur le constat d'un environnement profondément remanié , en particulier :
- le caractère particulièrement concurrentiel de cette politique publique ;
- la confirmation de l'existence d'un potentiel de croissance élevé et du développement d'un secteur privé productif dans les pays bénéficiaires ;
- l'intervention croissante des grands bailleurs émergents (Chine en particulier) et le rôle nouveau des fondations et fonds souverains , qui ignorent les conditionnalités des pays occidentaux ;
- un besoin accru de consolidation des sorties de crise ;
- une transformation importante des modalités d'octroi de l'aide (mécanismes dits « innovants », aide-programme et aide-budgétaire, mixité des concours bi-multilatéraux).
Les axes privilégiés répondent aux préoccupations du CAD comme à certaines de celles déjà exprimées par votre rapporteur spécial , et augurent d'une nouvelle étape dans la réforme stratégique, institutionnelle et technique de l'aide, au travers de :
- l'achèvement de la réforme du dispositif institutionnel : recentrage de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) sur des fonctions de stratégie et de pilotage des opérateurs, conformément aux préconisations que votre rapporteur spécial et notre collègue Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'État », ont formulées à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2008 ; achèvement du transfert de certains secteurs auprès de l'Agence française de développement (AFD) et renforcement de la tutelle politique et stratégique sur cet établissement ; nouvel opérateur chargé de la mobilité internationale et de la promotion de l'assistance technique ;
- la concentration géographique et sectorielle des moyens , en fonction des intérêts mutuels et de la capacité à peser sur les résultats. Des partenariats différenciés , selon trois cercles concentriques, se substitueront ainsi à l'actuelle Zone de solidarité prioritaire, dont votre rapporteur spécial a à plusieurs reprises relevé le caractère extensif. Un tableau de bord consolidé et interministériel de l'ensemble des engagements et échéances sera soumis annuellement à l'examen du CICID, qui validera également cinq secteurs prioritaires ;
- la mise en place d'un instrument spécifique et à décaissement rapide, dédié aux sorties de crise ;
- le renforcement de la position française dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la politique européenne de développement ;
- le développement des financements innovants et associant de nouveaux acteurs (partenariats public-privé, épargne des migrants, secteur privé) ;
- l'insertion de nouveaux indicateurs de résultats , reposant sur les pays bénéficiaires, en complément des actuels indicateurs de moyens, concentrés sur les donateurs.
Votre rapporteur spécial juge que ces orientations sont a priori opportunes mais appellent davantage d'éclaircissements.