II. LA POSITION DE LA COMMISSION : UN TEXTE DONNANT DES GAGES À L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE MAIS DES POINTS DE VIGILANCE

A. LES PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION : PRÉSERVER LA SPÉCIFICITÉ DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE, RENFORCER SA CONNAISSANCE PAR L'ÉDUCATION NATIONALE ET MODERNISER LA PROCÉDURE DISCIPLINAIRE

1. Préserver la spécificité de l'enseignement agricole

Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-642 supprimant l'article 2 ter. Introduit par l'Assemblée nationale, cet article permet à titre expérimental, dans trois régions et pour trois ans, la signature de conventions entre un lycée de l'éducation nationale et un lycée de l'enseignement agricole pour permettre à un élève de seconde de suivre une spécialité non présente dans son établissement.

Pour le rapporteur, une telle disposition est de nature à remettre en cause la spécificité de l'enseignement agricole qui est le seul à proposer l'option « écologie, agronomie, territoire et développement durable » ou encore la spécialité « biologie-écologie ».

Par ailleurs, dans le contexte budgétaire actuel, la tentation sera grande pour les DRAAF d'avoir recours à ce conventionnement et de s'appuyer sur l'éducation nationale pour proposer certaines options et spécialités indispensables dans de nombreux métiers auxquels prépare l'enseignement agricole : SVT, option mathématiques expertes ou mathématiques complémentaires par exemple. Or, loin de renforcer l'enseignement agricole, une telle pratique risque de l'affaiblir
- les élèves faisant au final le choix de retourner dans un établissement de l'éducation nationale.

Enfin, une telle disposition interroge quant à sa mise en oeuvre. En effet, les établissements de l'enseignement agricole sont souvent éloignés des lycées de l'éducation nationale.

2. Mieux définir les missions du représentant départemental de l'enseignement agricole

Reprenant une recommandation de la mission d'information sénatoriale sur l'enseignement agricole, l'Assemblée nationale a créé un délégué de l'enseignement agricole à l'échelle départementale (art. 3). Toutefois, cette rédaction pose plusieurs problèmes.

Le texte prévoit actuellement que ce correspondant de l'enseignement agricole « assiste le directeur des services départementaux de l'éducation nationale en matière d'orientation». La commission estime qu'il ne peut pas y avoir de hiérarchie entre l'éducation nationale et l'enseignement agricole. Le rôle de ce délégué ne peut pas non plus être restreint uniquement à l'orientation.

Par ailleurs, le représentant départemental de l'enseignement agricole ne serait compétent que pour l'enseignement agricole public. Or, le rapporteur rappelle que l'enseignement privé sous contrat est un partenaire essentiel et historique de l'enseignement agricole : il accueille plus de 60 % des élèves, étudiants et apprentis.

Sur proposition du rapporteur COM-643, la commission a supprimé toute notion de hiérarchie entre éducation nationale et enseignement agricole au profit d'un renforcement de la coopération à l'échelle locale entre ces deux ministères. Elle a également élargi les compétences de ce délégué à la promotion des métiers auxquels prépare l'enseignement agricole et permet d'associer à celle-ci les établissements d'enseignement agricole privés sous contrat ainsi que l'enseignement agricole supérieur. Elle a également renforcé ses missions vis-à-vis de l'ensemble des personnels de l'éducation nationale en charge de l'orientation : psychologues de l'éducation nationale, centres d'orientation et d'information, établissements scolaires.

3. Moderniser la procédure disciplinaire dans l'enseignement agricole supérieur

Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-644 visant à moderniser la procédure disciplinaire applicable dans l'enseignement agricole supérieur. Il permet de renforcer l'impartialité des conseils disciplinaires en prévoyant une procédure de récusation en cas de doute sur l'impartialité d'un de ses membres ou en instaurant un dépaysement de la procédure.

Afin de renforcer la sécurité juridique des décisions disciplinaires, il confie la présidence du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole, agroalimentaire et vétérinaire (CNESERAAV) statuant en matière disciplinaire à un conseiller d'État. Il permet également au ministre en charge de l'agriculture de suspendre un personnel de l'enseignement supérieur agricole de ses fonctions pour une durée maximale d'un an, sans perte de salaire.

La procédure disciplinaire est ainsi alignée sur celle applicable dans l'enseignement supérieur depuis sa réforme en 2019 par la loi pour la transformation de la fonction publique.

4. Supprimer toute référence au service national universel dans ce texte

L'article 2 prévoit l'organisation d'actions de découverte des métiers du vivant dans le cadre du service national universel (SNU).

Résultant d'une volonté présidentielle, le SNU n'a eu de cesse de prendre de l'ampleur - augmentations annuelles des crédits, volonté présidentielle de le généraliser à toute une classe d'âge - sans que la représentation nationale n'ait été associée. De manière constante, la commission a demandé l'organisation d'un débat devant le Parlement sur la finalité du service national universel. Alors qu'il s'agit d'un dispositif coûteux qui ne parvient pas à attirer les jeunes en dehors d'une minorité intéressée par l'engagement en uniforme, la volonté d'élargir le SNU à la promotion des métiers du vivant témoigne de l'absence de cohérence de ce dispositif et de vision claire sur ses objectifs.

Par ailleurs, lors de l'examen du PLF 2025, la commission s'est prononcée en faveur de la fin du SNU.

Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-641 visant à supprimer toute référence au SNU dans ce texte.

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