M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mieux protéger ceux qui nous protègent, les sapeurs-pompiers volontaires comme professionnels, tel est l’objectif la proposition de loi par laquelle nous inaugurons cet espace transpartisan.
Les sapeurs-pompiers suscitent souvent l’unanimité de nos décisions, en écho à l’attachement et à la gratitude légitimes que nos concitoyens leur manifestent ; je ne doute pas qu’il en ira ainsi aujourd’hui.
Cette proposition de loi de nos collègues Poumirol et Nédélec vise à améliorer la reconnaissance des cancers professionnels des sapeurs-pompiers, ces derniers étant particulièrement exposés aux substances toxiques dégagées par les feux – des agents cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques.
C’est encore plus vrai lors d’un incendie hors norme – et dont on souhaite qu’il le reste – tel que celui qui a emporté l’usine Lubrizol de Rouen, le 26 septembre 2019, et au cours duquel près de 10 000 tonnes de produits, dont environ 7 000 tonnes de produits dangereux, sont parties en fumée. Quelque deux cent quarante sapeurs-pompiers du département de la Seine-Maritime et des départements voisins ont alors été exposés à ces substances cancérogènes, toxiques ou irritantes.
Plus globalement, du fait des expositions qu’emportent les interventions sur les incendies, le risque pour un pompier de développer un mésothéliome est plus élevé de 58 % que dans la population générale, ce ratio s’élevant à 16 % pour un cancer de la vessie.
Le rapport d’information du Sénat a formulé dix propositions visant à renforcer l’effort de prévention des risques liés à la lutte contre les incendies et à favoriser la reconnaissance des cancers comme maladies professionnelles.
La présente proposition de loi prévoit l’inscription dans la loi de l’obligation d’élaborer un modèle national de fiche d’exposition aux facteurs de risque, obligation préconisée par ce rapport, lequel a d’ailleurs conduit la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à émettre une circulaire rappelant les impératifs en matière de traçabilité et fournissant des modèles de synthèse annuelle d’exposition et d’attestation d’activités potentiellement exposantes.
Cette proposition de loi apporte donc une première réponse pour améliorer la reconnaissance des cancers professionnels. Elle doit être complétée par le renforcement des actions de prévention, le rehaussement des protections des sapeurs-pompiers et l’amélioration des réparations accordées aux malades.
Le suivi médical des sapeurs-pompiers doit être perfectionné, notamment par l’instauration d’un scanner annuel et obligatoire des poumons.
La mission sénatoriale souligne que « le développement d’équipements de protection individuelle adaptés aux risques se fait toujours attendre ». Elle préconise d’ailleurs le versement d’une dotation exceptionnelle aux Sdis pour acquérir des équipements de protection individuelle, notamment le nouveau modèle de cagoule filtrante, efficace contre les particules fines et les composés chimiques.
Madame la ministre, l’État devrait a minima s’engager à financer ces nouvelles protections, d’autant que cette année comme les trois prochaines années, les Sdis subiront une hausse du taux de leur cotisation à la CNRACL qui affectera leurs budgets de fonctionnement et d’investissement.
Le groupe CRCE-K votera bien évidemment cette proposition de loi et œuvrera avec vous tous, j’en suis certaine, mes chers collègues, afin de poursuivre l’amélioration de la prévention des risques cancérogènes.
En effet, au-delà de la reconnaissance des risques auxquels sont confrontés les sapeurs-pompiers, au-delà de l’ouverture des droits et des prises en charge auxquels ils doivent évidemment accéder, nous devons aussi les protéger, comme ils nous protègent au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Anne Souyris. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer Émilienne Poumirol et Anne-Marie Nédélec, auteures de la présente proposition de loi, qui nous proposent d’inscrire dans la loi les préconisations de leur rapport sur les cancers imputables à l’activité de sapeur-pompier, ainsi que Françoise Dumont, rapporteure particulièrement investie sur ce sujet.
Je salue également l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de ce premier espace transpartisan. J’espère que l’on y verra un symbole de la reconnaissance de l’importance de la santé environnementale.
À toutes celles et ceux qui mettent chaque jour leur vie en péril pour protéger celle des autres, je veux dire : merci, nous sommes à vos côtés. Pour autant, comme nous le rappelle cette proposition de loi, ces remerciements ne suffisent pas.
Exposés à des produits de combustion dangereux, les sapeurs-pompiers font face, du fait de leur activité, à des substances cancérogènes avérées et à un niveau de risque qui a conduit le Centre international de recherche sur le cancer à classer, sans ambiguïté, cette activité comme « cancérogène pour l’homme ».
Je prendrai un exemple : les (PFAS), que les écologistes combattent de longue date.
Les sapeurs-pompiers étant largement exposés à ces substances dangereuses utilisées pour leurs propriétés ignifuges – elles entrent dans la composition des tenues dont ils sont équipés, mais aussi des mousses anti-incendie qu’ils utilisent – le groupe écologiste avait appelé le Sénat à interdire les PFAS dans ces mousses, du moins de celles utilisées lors des sessions d’essais et d’entraînement.
Je regrette que la Haute Assemblée n’ait pas adopté notre amendement visant à instaurer cette interdiction, mais les sapeurs-pompiers étant extrêmement exposés aux PFAS, je suis certaine que nous y reviendrons.
Les Écologistes ont testé la présence de PFAS chez des sapeurs-pompiers volontaires en présence des organisations syndicales représentant cette profession : le plus jeune d’entre eux était le plus contaminé ! Et sur tous, sans exception, la présence de ces substances a été détectée.
Par ailleurs, l’Agence européenne des produits chimiques (AEPC) a proposé d’interdire les PFAS dans les mousses anti-incendie à l’horizon 2027.
Madame la ministre, vous dites faire de cette alerte une priorité. Je vous appelle donc à défendre cette interdiction au niveau européen, dès la révision, à l’autonome, du règlement européen sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et la restriction des substances chimiques (Reach) et, le cas échéant, à la soumettre à notre examen afin que nous puissions protéger dans les meilleurs délais les sapeurs-pompiers français de ces mousses dont la dangerosité est avérée.
S’il nous faut réduire l’exposition des sapeurs-pompiers à ces cocktails de toxiques en agissant sur la présence desdites substances dans l’environnement, nous devons également renforcer la prévention en santé de cette profession. Cette proposition de loi pose un premier jalon, et je m’en réjouis.
La médecine préventive doit également être renforcée, madame la ministre. J’avais d’ailleurs interrogé le ministre de l’intérieur sur la transmission au conseil médical du rapport de médecine préventive pour les sapeurs-pompiers.
Face au risque probable d’une sous-déclaration d’ampleur des maladies professionnelles des sapeurs-pompiers, la construction des tableaux des maladies professionnelles doit être révisée au regard des dernières connaissances scientifiques.
En France, seuls deux cancers sont reconnus comme des maladies professionnelles présumées chez les sapeurs-pompiers, ce qui est bien sûr insuffisant. Puisque nous ne pouvons pas légiférer pour chaque maladie, c’est le système dans son entier qui doit être revu. Cette proposition de loi, en améliorant le recensement des maladies, constitue un préalable.
Par ailleurs, nous demandons que l’exposition des sapeurs-pompiers aux produits toxiques soit reconnue, en vue de leur retraite, comme un facteur de pénibilité. J’espère que les discussions en cours permettront cette juste reconnaissance.
Je nous invite enfin à porter une attention particulière à la situation des femmes sapeurs-pompiers, mes chers collègues.
Lors d’une conférence que j’ai organisée au Sénat le 10 mars dernier, les scientifiques Robert Barouki et Claire Philippat ont rappelé que l’exposition à ces produits pouvait avoir des effets particuliers sur les organismes féminins. Je compte donc sur vous, mes chers collègues, pour soutenir les travaux de recherche qui nous permettront de disposer d’informations supplémentaires sur les risques spécifiques auxquels la santé des femmes sapeurs-pompiers est exposée.
En conclusion, cette proposition de loi étant utile et nécessaire, le groupe écologiste votera pour. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi visant à garantir le suivi de l’exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction soumise à notre examen est le fruit d’un travail transpartisan, qui traduit notre capacité à transcender les clivages pour témoigner de notre attachement commun aux sapeurs-pompiers, ces femmes et ces hommes qui risquent leur vie au quotidien pour sauver celle des autres.
Je tiens à saluer tout particulièrement le travail, précieux et éclairant, mené par Émilienne Poumirol et Anne-Marie Nédélec sur les maladies professionnelles dont souffrent les sapeurs-pompiers.
Nos deux collègues ont mis en lumière les lacunes qui existent dans la prise en charge des risques sanitaires auxquels ces professionnels sont confrontés. Il nous appartient de remédier à cette situation.
Dès 2022, le Centre international de recherche sur le cancer a reconnu le lien entre certaines formes de cancer et l’exercice du métier de sapeur-pompier, évoquant des risques accrus de développer d’autres formes de cancer, comme ceux du côlon et de la prostate.
Les risques liés à la profession de sapeur-pompier doivent être pris en compte de manière concrète et efficace, au travers d’un suivi médical post-professionnel et d’une reconnaissance des cancers imputables à l’exercice de ce métier.
L’une des principales difficultés auxquelles nous sommes confrontés est l’absence de données scientifiques fiables sur ces risques. En 2003, le rapport Pourny recommandait déjà la création d’une véritable veille sanitaire pour les sapeurs-pompiers, notamment par la mise en place d’une banque nationale de données permettant de réaliser des études épidémiologiques.
Hélas, aujourd’hui encore, aucun réel suivi médical coordonné n’existe et les études disponibles sont souvent contradictoires, ce qui empêche une prise en charge efficace. Dans un rapport datant de 2019, l’Anses recommandait pourtant de mieux prendre en compte les risques chroniques auxquels les sapeurs-pompiers sont exposés, pendant et après leurs interventions.
Madame la ministre, mes chers collègues, il faut arrêter de lanterner et de tergiverser : ce serait irresponsable, tant juridiquement que moralement. Nous parlons de la santé, et, partant, de la vie de ces femmes et de ces hommes ! Il est urgent de mettre en place un suivi médical post-professionnel pour prévenir les risques à long terme.
La CNRACL joue à cet égard un rôle central, notamment au travers de son fonds national de prévention qui met à la disposition des employeurs publics locaux le logiciel Prorisq, dédié au suivi des risques professionnels, ainsi que des documents informatifs. Cette caisse finance en outre des études épidémiologiques qui alimentent la recherche médicale et scientifique.
Depuis 2017, les fonctionnaires bénéficient d’une présomption d’imputabilité pour toute maladie inscrite dans l’un des tableaux des maladies professionnelles, ce qui leur donne droit à des congés pour invalidité et au remboursement des frais médicaux.
Cependant, en France, seuls deux types de cancer sont actuellement présumés imputables à l’activité de sapeur-pompier. Ce risque demeure bien inférieur à celui observé dans d’autres pays, comme viennent de le rappeler plusieurs de nos collègues.
De plus, la gestion des risques est fragmentée, chaque Sdis étant autonome et agissant à sa guise. Sur une période de dix ans, la CNRACL a enregistré seulement vingt et une demandes d’ATI liées à des cancers professionnels, dont aucune n’avait été adressée par un sapeur-pompier. En 2022, seules trente et une maladies professionnelles ont été répertoriées dans ce corps de métier.
Ces chiffres faibles laissent penser qu’il existe une sous-déclaration importante, probablement due aux difficultés pour prouver l’exposition, à l’absence de prise en compte de la polyexposition, ou encore à la complexité de la procédure de demande d’ATI. Cette situation entrave la traçabilité systématique des expositions et un suivi national uniforme de celles-ci. Il est donc impératif de renforcer la prévention des risques, d’uniformiser les bonnes pratiques et de généraliser les dispositifs de suivi.
Avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je me réjouis que cette proposition de loi contribue à l’amélioration de la traçabilité des expositions. En imposant la mise en place d’une fiche d’exposition pour chaque intervention, elle favorisera l’amélioration de la protection de nos sapeurs-pompiers et facilitera la reconnaissance des maladies professionnelles.
Cette proposition de loi a donc un double objectif : améliorer le suivi médical des sapeurs-pompiers et mieux garantir la reconnaissance de leur exposition aux risques cancérogènes.
Si ce texte va dans le bon sens, il reste encore des progrès à faire. Je pense notamment à la généralisation des bonnes pratiques sur l’ensemble du territoire. Au-delà de la reconnaissance des maladies professionnelles, il est également nécessaire de renforcer la prévention des risques.
Je salue les efforts accomplis pour améliorer les équipements de protection individuelle, comme la mise au point d’un nouveau modèle de cagoule filtrante. Ces équipements ont toutefois un coût pour les Sdis. Il conviendrait que les investissements nécessaires, de même que la certification des nouveaux équipements, soient accompagnés par l’État. Nous évoquons souvent les pactes capacitaires relatifs au matériel de lutte contre les incendies ; il serait bon de nous inspirer de ce dispositif pour ce qui concerne la santé et la protection de ces professionnels.
Par ailleurs, dans une circulaire du 14 janvier 2025, le directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises a rappelé aux Sdis leur obligation de tenir un relevé des expositions des sapeurs-pompiers aux agents toxiques lors de chaque intervention.
Cette circulaire comporte également un modèle national de fiche d’exposition, ce qui répond à l’une des préoccupations qui ont présidé à cette proposition de loi. L’adoption, en commission, d’un amendement tendant à tirer les conséquences de cette circulaire, permettra de ne pas perdre de temps, puisque le texte renvoie non plus à la publication d’un nouvel arrêté, mais au modèle de fiche déjà disponible.
Les sénatrices et sénateurs de mon groupe voteront cette proposition de loi. Nous nous associerons, par ailleurs, à toute démarche visant à témoigner notre reconnaissance aux sapeurs-pompiers et à accorder des moyens tant budgétaires que matériels à ces femmes et à ces hommes auxquels nous ne rendrons jamais suffisamment hommage, et qui – j’y insiste – œuvrent chaque jour sur le terrain pour sauver des vies et veiller à la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Consommables, de la passion au poison, tel est le titre du documentaire choc réalisé par des sapeurs-pompiers du département dont je suis élue, les Alpes-Maritimes, et diffusé sur l’excellente chaîne Public Sénat. Loin du cliché des héros infaillibles, ce film immersif évoque l’enjeu de la reconnaissance des maladies professionnelles de nos sapeurs-pompiers, plus particulièrement des cancers causés par leur exposition répétée à des produits de combustion reconnus comme cancérogènes.
Ce sujet est au cœur de mes travaux et de mes interventions auprès des gouvernements successifs depuis de nombreuses années. Ceux-ci s’inscrivent dans la droite ligne de l’excellent rapport d’information de mes collègues Anne-Marie Nédélec et Émilienne Poumirol, et de cette proposition de loi, rapportée par Françoise Dumont, visant à garantir le suivi de l’exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, grâce à la mise en place d’un modèle national de fiche d’exposition. J’espère que nous la voterons unanimement, mes chers collègues.
Si un tel suivi est déjà effectué par certains Sdis de France, la généralisation du renseignement de ces fiches d’exposition est un symbole fort. Elle facilitera de plus la reconnaissance des maladies professionnelles et améliorera l’efficience du suivi sanitaire de nos soldats du feu.
Je tiens par ailleurs à saluer l’engagement du ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, qui, au travers d’une circulaire adressée aux Sdis, a instauré de manière uniforme sur l’ensemble du territoire national une traçabilité des expositions. Nous devons continuer à mener ce travail collectif pour protéger la santé de ceux qui, chaque jour, risquent leur vie pour sauver la nôtre.
À ce jour, seules deux maladies sont reconnues comme étant imputables à cette profession. Vous le savez, l’empoisonnement auquel sont exposés les pompiers ne s’effectue pas seulement par inhalation, quand ils sont au feu : l’absorption d’effluents d’incendie peut également se produire par voie cutanée, voire par ingestion, malgré les équipements de protection individuelle.
En décembre dernier, dans cet hémicycle, le Gouvernement m’avait indiqué que le ministère du travail avait entamé les démarches nécessaires à la révision des tableaux des maladies professionnelles, pour y intégrer les cancers que la recherche scientifique a d’ores et déjà reconnus comme imputables à la profession de sapeur-pompier. Vous venez de confirmer ces propos, madame la ministre. Je souhaite donc ardemment, puisqu’une telle décision relève de votre pouvoir réglementaire, que la prochaine étape soit la consécration pratique de cette évolution.
Le groupe Les Républicains votera en faveur de cette proposition de loi dont l’objet, j’en suis certaine, fera consensus au sein de cette assemblée.
En conclusion de ce propos, je tiens à rendre hommage aux 256 000 sapeurs-pompiers de France. Par leur engagement sans faille à protéger, secourir et sauver, ils incarnent les plus belles valeurs de solidarité et d’humanité. Le Sénat, j’en suis sûre, poursuivra ses travaux pour continuer à les défendre et à les accompagner à leur juste valeur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – Mme Isabelle Florennes applaudit également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à garantir le suivi de l’exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction
Article unique
Après l’article L. 813-1 du code général de la fonction publique, il est inséré un article L. 813-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 813-1-1. – L’autorité territoriale établit, pour chaque sapeur-pompier professionnel ou volontaire exposé, dans le cadre de ses fonctions, après une intervention présentant un risque d’exposition à un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction ou figurant sur l’un des tableaux mentionnés à l’article L. 461-2 du code de la sécurité sociale, une fiche d’exposition dont le modèle est fixé par voie réglementaire. »
Vote sur l’ensemble
M. le président. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
Je rappelle que le vote sur l’article vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi visant à garantir le suivi de l’exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.) (Bravo ! et applaudissements.)
M. le président. Belle unanimité !
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante.)
M. le président. La séance est reprise.
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Architectes des Bâtiments de France
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative à l’exercice des missions des architectes des bâtiments de France, présentée par M. Pierre-Jean Verzelen et plusieurs de ses collègues (proposition n° 195, texte de la commission n° 439, rapport n° 438).
Discussion générale
M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la proposition de loi et rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, examiner un texte relatif aux missions des architectes des Bâtiments de France (ABF) dans le cadre d’une niche transpartisane du Sénat, c’est une forme d’exploit, car on sait que ce sujet peut déchaîner les passions… Ce n’est possible qu’ici ! (Sourires.)
Cette proposition de loi s’inscrit à la suite à la mission d’information intitulée « Architectes des Bâtiments de France, périmètre et compétences », dont je fus le rapporteur.
J’avais proposé l’ouverture de cette mission parce que j’ai été le maire d’une commune rurale où se trouve un bâtiment classé ; j’ai donc été conduit à travailler avec les ABF, mais aussi avec les services de l’unité départementale de l’architecture et du patrimoine (Udap). À cette occasion, j’ai identifié ce sujet comme étant un bon exemple des incompréhensions qui peuvent exister entre les maires et l’État, et entre les citoyens et l’État.
Nous avons mené ce travail sous la présidence de notre collègue Marie-Pierre Monier, que je salue et remercie. Nous avons, en la matière, des expériences différentes… Comment vous dire ? Nous n’étions pas totalement alignés au début de cette entreprise. (Mme Marie-Pierre Monier sourit.) Nous avons fait en sorte de rendre le plus objectif possible un sujet, le patrimoine, qui est par nature subjectif.
Quel constat pouvons-nous faire ? Lorsque l’on se connaît et que l’on se parle, cela fonctionne. Dans une ville qui compte des services instructeurs, ou dans un village à fort enjeu patrimonial, des habitudes de travail sont prises et, globalement, cela fonctionne bien.
En revanche, dans une commune rurale où les services administratifs sont peu nombreux, lorsque le maire ne connaît pas les ABF ou n’y a pas directement accès, et lorsque l’intensité patrimoniale est – disons-le – moins évidente, alors les choses se compliquent, quelquefois sérieusement. Les réponses au questionnaire que le Sénat a envoyé à toutes les mairies de France, et qui a rencontré un grand succès, ont confirmé ce constat.
Les principaux sujets sur la table sont les suivants.
Premier sujet : le manque de prévisibilité, et donc de cohérence, des décisions rendues. Nous connaissons tous cette histoire : un avis peut changer selon les ABF, et parfois aussi lorsqu’il s’agit du même architecte, à quelques mois d’écart et dans un même secteur géographique…
Deuxième sujet : l’intensité patrimoniale n’est pas la même partout. Lorsque l’on souhaite changer ses fenêtres, les exigences ne sauraient être identiques dans le périmètre classé du château de Versailles et à 480 mètres de la tour de Crécy-sur-Serre, commune dont je fus maire…
Troisième sujet : le coût des travaux. Ce n’est évidemment pas au législateur de décider quelles matières doivent être utilisées à tel endroit, ou l’origine des produits, ou encore quelle PME doit être retenue pour faire les travaux. Pour autant, on ne peut pas faire abstraction de la réalité. Or dans les faits, les gens font parfois des travaux pour des questions esthétiques, certes, mais aussi pour améliorer la consommation énergétique du bâti, avec les moyens dont ils disposent. D’ailleurs, les questions relatives aux énergies renouvelables, à l’auto-consommation et au photovoltaïque sont revenues très souvent lors de nos échanges.
Notre mission d’information a émis vingt-quatre recommandations. Celles-ci ont été adoptées à l’unanimité des membres de la mission, elles ont été présentées à la commission de la culture le 25 septembre, puis remises à Mme la ministre de la culture en janvier dernier.
Dans le rapport de cette mission, nous proposons l’extension des périmètres délimités des abords (PDA), afin d’en finir avec la délimitation arbitraire des 500 mètres et de redessiner un « périmètre intelligent » lié à la réalité de l’intensité patrimoniale autour du site classé.
Les PDA, autorisés depuis la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP), sont une avancée unanimement saluée, tant par les élus que par les ABF. Le problème, c’est qu’il s’en crée trop peu, notamment dans les communes rurales, à cause des contraintes administratives – les procédures, l’enquête publique, le recours à des cabinets d’études, etc. Tout cela prend du temps, coûte de l’argent, et c’est un frein.
Nous proposons donc de ne plus recourir à l’enquête publique. En clair, si un maire souhaite restreindre le périmètre autour d’un édifice classé, il mène un travail en lien avec l’ABF ; puis une délibération du conseil municipal entérine cette décision.
Nous proposons de rendre publics et consultables en ligne les avis rendus par les ABF. Cela s’inscrit dans un mouvement global d’amélioration de la transparence des décisions prise par l’administration. (M. Jean-Baptiste Lemoyne opine.) J’ajoute que cette mesure permettra aux pétitionnaires, comme aux ABF, de disposer, par secteur et dans le temps, de références et, le cas échéant, d’une forme de jurisprudence.
L’article 3 de la proposition de loi prévoit la création d’une commission de conciliation départementale. À peu près tout le monde est contre, sauf les élus et les pétitionnaires !
Cette commission est inspirée d’exemples réels de territoires qui se sont déjà organisés, de manière plus ou moins officieuse. L’idée est de créer, et de rendre obligatoire, un moment de dialogue et d’échanges sur les décisions qui sont rendues. Non seulement cela fonctionne, mais cela fait un malheur ! En quelques heures, une grande partie des dossiers sont réglés.
L’article 4, qui s’inscrit dans la droite ligne des travaux de la mission d’information, vise à tracer un cap, une orientation, et à mettre en avant le sujet de la réhabilitation en l’insérant dans la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture.
Il y a ce qui relève, d’une part, du pouvoir législatif, et, d’autre part, du domaine réglementaire. Il s’agit notamment de répondre à la question récurrente de l’absence d’harmonisation des décisions des ABF, en nous dotant d’un guide, d’un cadre et d’orientations nationales sur un certain nombre de sujets. Quid, par exemple, du développement des énergies renouvelables, des matériaux à utiliser, de l’origine des produits utilisés ?…
Et il y a aussi ce qui relève des bonnes pratiques. Ainsi, un ABF qui arrive dans un département doit aller à la rencontre des élus, des conseils communautaires et partager un projet de service – un document simple expliquant comment il compte travailler avec ces élus.
Nous abordons également les sujets majeurs que sont la sensibilisation des plus jeunes au patrimoine au cours de la scolarité et la formation des ABF, en particulier l’élaboration de modules sur la relation avec les maires et la manière de travailler avec eux.
Nous aurons l’occasion de revenir sur ces sujets lors de l’examen des amendements. (Applaudissements.)