M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
Mme Sonia de La Provôté. Enfin, l’article 4 ajoute la réhabilitation des constructions existantes au champ de l’intérêt public associé à l’architecture. Permettez-moi à cet égard d’insister sur les problèmes qui se posent, sur le terrain, au sujet de la rénovation énergétique du bâti à caractère patrimonial, mes chers collègues.
M. Pierre Ouzoulias. Eh oui !
Mme Sonia de La Provôté. Prendre en compte les spécificités du bâti ancien pour atteindre l’objectif de rénovation énergétique est indispensable.
Pour ne donner qu’un exemple concret, à peine caricatural, poser un bardage sur du torchis ou des colombages revient à détruire le bâti, sans tenir compte du confort d’été. Évidemment, je ne parle même pas des goûts et des couleurs !
L’ajout proposé peut nous permettre d’adopter enfin une vision patrimoniale de la rénovation thermique.
Madame la ministre, vous l’avez compris, le groupe UC soutiendra ce texte qui améliore le rôle des ABF, sans remettre en cause leurs missions.
Toutefois, je ne peux conclure sans évoquer l’un des problèmes principaux rencontrés par ce corps de métier : le manque flagrant d’effectifs dans les fameuses Udap (unités départementales de l’architecture et du patrimoine), que nous connaissons bien.
Mme Marie-Pierre Monier. Oui !
Mme Sonia de La Provôté. Plus d’ABF, c’est plus de temps sur le terrain, plus de temps pour négocier, concilier, expliquer, bref, plus de temps pour faire apprécier – voire aimer – les ABF et leurs compétences.
Or leurs conditions d’exercice n’ont cessé de se dégrader au cours des dernières années, avec des effectifs quasi stables et une charge de travail exponentielle. Cette surcharge administrative ne leur laisse pas assez de temps pour leurs tâches de conseil et d’accompagnement qui, en amont des décisions, permettraient d’assurer à celles-ci une plus grande lisibilité et une meilleure acceptabilité. Cela ne pourra se résoudre qu’en traitant la question des moyens.
Mme Marie-Pierre Monier. Tout à fait !
Mme Sonia de La Provôté. Cette discussion aura donc lieu de nouveau dans cette enceinte, à l’autonome prochain. Je vous donne rendez-vous, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la qualité de l’architecture de notre quotidien et la préservation du patrimoine bâti sont des politiques menées de longue date par le ministère de la culture. Elles constituent le fondement de son action publique et sont célébrées comme constitutives de l’identité culturelle de notre pays. Cependant, elles sont également trop souvent la source de tensions entre les élus et l’État, l’intervention de ce dernier étant parfois considérée comme une entrave à la liberté de construire.
Il existe ainsi une tension paradoxale entre, d’une part, les demandes de plus en plus nombreuses de classement au titre des monuments historiques, notamment quand il s’agit d’édifices religieux, et, d’autre part, les réticences à accepter les contraintes liées à la protection de leurs abords.
Au contact direct des élus, les architectes des Bâtiments de France tentent de gérer ce paradoxe au quotidien. Ils sont souvent tenus responsables de l’inertie ministérielle, quand il s’agit de reconnaître le caractère unique des bâtiments revendiqué par les maires, et des tracasseries bureaucratiques liées aux autorisations d’urbanisme.
Il est donc crucial de rendre hommage à leur travail, à leur dévouement et à leurs efforts sincères pour tenter de concilier les obligations imposées par une législation protectrice et les souhaits souvent contradictoires des pétitionnaires et des autorités chargées de délivrer les permis.
Soulignons-le, les maires n’ont aucun intérêt à un affaiblissement de l’avis conforme des architectes des Bâtiments de France, car cela les exposerait à des contentieux actuellement assumés par l’État.
La mission d’information, dont le rapport a été rédigé par Pierre-Jean Verzelen – je salue la qualité de votre travail, mon cher collègue –, a démontré qu’il fallait relativiser l’impression de ressentiment général contre les avis des ABF. Partout où un dialogue constructif s’est instauré entre les services des ABF et ceux de la collectivité qui sont chargés de l’urbanisme, les conflits sont rares et résolus par la négociation.
En revanche, des différends peuvent surgir lorsque les ABF peinent à assumer pleinement leur mission de conseil auprès d’élus de communes démunis face à la complexité du droit du patrimoine. Ce constat n’est pas nouveau.
Dans un rapport remis en octobre 2018 à la ministre de la culture, M. Philippe Bélaval, aujourd’hui conseiller du Président de la République, faisait cette mise en garde : « Mais le fait est que la réduction des effectifs et des moyens des Udap amène très souvent les architectes des Bâtiments de France à donner une priorité, dans la répartition de leur temps, aux avis, débouchant sur une restriction de l’exercice de leurs autres compétences. Le déséquilibre ainsi créé est fâcheux : en enfermant trop les Udap dans un rôle d’empêchement, il pèse très négativement sur l’image, non seulement des architectes des bâtiments de France, mais aussi des dispositifs de protection eux-mêmes ; en outre, il affaiblit le rôle que le ministère de la culture est susceptible de jouer sur les territoires pour la préservation d’un cadre de vie de qualité. » Tout est dit !
Sur le fondement de cette analyse, toujours d’actualité, vous aviez, madame la ministre, proposé dans votre plan présenté en juillet 2024, intitulé Printemps de la ruralité, de renforcer les effectifs des Udap dans les départements ruraux, afin que ceux-ci disposent d’au moins deux architectes des Bâtiments de France. Il est maintenant temps de mettre ce plan en œuvre ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – Mme Marie-Pierre Monier et M. Michel Laugier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « l’architecture est quelque chose de dangereux. C’est un art socialement dangereux parce qu’imposé à tous. L’architecture impose une immersion totale. Ce n’est pas comme composer de la musique ou écrire une comédie. […] Une musique laide, on peut ne pas l’écouter ; un tableau laid, on peut ne pas le regarder, mais un immeuble laid reste là, devant nous, et nous sommes bien obligés de le voir. »
Ces quelques mots d’avertissement de l’architecte Renzo Piano justifient à eux seuls les missions des architectes des Bâtiments de France : veiller à ce que les lubies immobilières de quelques-uns ne défigurent pas les perspectives architecturales du plus grand nombre.
Pourtant, depuis quelques années, les architectes des Bâtiments de France font l’objet de vives critiques. C’était déjà le cas lors de l’examen de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. On leur reproche des décisions opaques, variables, coûteuses. Les dispositions de la proposition de loi permettront de répondre aux deux premières critiques.
Les travaux de la mission d’information sur les ABF auront permis de démystifier les conditions d’exercice de leurs compétences. Nos auditions ont en effet permis de comprendre que, au regard de l’ensemble des avis, le taux de refus est assez faible, puisqu’il s’élève à 7 %.
En outre, une décision défavorable ne fait pas totalement obstacle à un projet, car elle peut toujours donner lieu à un échange. Ainsi, en définitive, seulement 0,1 % des projets seraient refusés, ce qui conduirait à moins d’une dizaine de contentieux par an. Ce chiffre est très faible en comparaison du contentieux de l’urbanisme et de l’aménagement porté devant les tribunaux administratifs – 12 700 affaires jugées en 2024 – ou du contentieux de la construction porté devant le juge judiciaire – 33 500 affaires en 2024. C’est le signe de l’efficacité de cette procédure, fondée sur l’échange.
On sait que l’on bâtit pour des années, voire des siècles – je n’ose dire pour des millénaires –, cela mérite bien quelques discussions préalables. Gardons-nous donc de tenir les architectes des Bâtiments de France pour responsables de ces lenteurs nécessaires.
Les modifications prévues dans le texte permettent d’aboutir à un bon équilibre. Elles instaurent un peu de flexibilité, avec la généralisation des périmètres délimités des abords, et une meilleure compréhension de la « jurisprudence » des ABF, grâce à la publicité des avis.
Il est parfois également reproché aux ABF de faire obstacle à l’adaptation des bâtiments à la rénovation énergétique. C’est exact. Pourtant, il existe des exemples à l’étranger. L’Italie offre une piste intéressante pour concilier conservation, rénovation et production d’énergie renouvelable : savez-vous que des panneaux photovoltaïques ont été installés dans la maison de Cérès, sur le site de Pompéi, ainsi que dans le parc archéologique Appia Antica à Rome ? Ce qui est possible en Italie devrait l’être aussi en France, madame la ministre !
Je tiens à remercier nos collègues d’avoir pris en considération la nécessité d’inscrire la notion de réhabilitation dans la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture. Choisir de réhabiliter plutôt que de démolir permet de préserver les ressources naturelles, de réduire les déchets et les émissions de CO2 et d’optimiser l’empreinte écologique de nos milieux habités. Réhabiliter, ce n’est pas seulement rénover, restaurer et mettre aux normes ; c’est un travail subtil de transformation, par lequel l’acte architectural permet de conjuguer mémoire, performance et usage.
Aujourd’hui, la beauté de nos territoires urbains et ruraux peut être mise en danger par des constructions court-termistes. Dans la Grèce antique, les élus athéniens commençaient leur mandat par ce serment : « Je vous promets, Athéniens, de vous rendre Athènes plus belle que vous me l’avez donnée. » L’architecture participe au bien-être de nos concitoyens, renforce le désir d’appartenir à une société.
M. le président. Il faut conclure, chère collègue.
Mme Monique de Marco. En tant qu’élus, il est de notre devoir de nous entourer d’architectes dans la conception, mais aussi dans la réalisation de grands projets d’urbanisme dont nous rêvons pour nos territoires, dans l’intérêt de tous. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « l’architecture est le grand livre de l’humanité, l’expression principale de l’homme à ses divers états de développement, soit comme force soit comme intelligence », disait Victor Hugo.
Les architectes des Bâtiments de France, qui œuvrent au quotidien pour assurer la préservation de notre patrimoine et de notre cadre de vie, sont les précieux gardiens de ce récit commun. Il suffit, pour en avoir la certitude, de se promener dans les si belles rues d’une commune comme Figeac, exemple souvent cité de coopération efficace entre ABF et élus. Son architecture attire chaque année, dans le département du Lot, des centaines de milliers de touristes venus du monde entier.
Nous le savons, néanmoins, le rôle des architectes des Bâtiments de France a parfois suscité des débats au sein de notre hémicycle. Notre plaisir est donc encore plus grand de nous retrouver aujourd’hui, à la faveur d’un espace transpartisan, pour examiner une proposition de loi sur ce sujet.
La mission d’information qui a été menée, sur l’initiative de son rapporteur, Pierre-Jean Verzelen – je vous remercie d’avoir pris cette initiative, mon cher collègue –, et que j’ai eu l’honneur de présider est une illustration parfaite, à mon sens, des consensus auxquels peut parvenir le Sénat. Partis de positions initiales parfois divergentes, nous avons su aboutir, à l’issue d’un travail rythmé – vingt auditions, quatre déplacements, 1 500 témoignages d’élus locaux –, à des propositions communes, nourries par une approche pragmatique collant au plus près du terrain.
Il en est ressorti plusieurs mesures d’ordre législatif, encore affinées par le travail du rapporteur, qui a tenu à faire un nouveau tour d’horizon des acteurs clés concernés par leur mise en application.
L’article 1er du texte encourage la généralisation des périmètres délimités des abords. Ces périmètres, dits intelligents, créés par la loi de 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, avaient pour vocation de rationaliser la protection patrimoniale aux abords des monuments, afin de limiter l’intervention des ABF aux emplacements où la covisibilité fait consensus.
Pour passer le cap de la massification de l’application des PDA sur le territoire, cet article simplifie les procédures administratives nécessaires qui y sont associées – l’obligation de conduire une enquête publique et de consulter le propriétaire ou l’affectataire du monument historique concerné –, source de nombreuses lourdeurs administratives.
À l’issue de l’examen en commission, lorsqu’il s’est agi de définir un périmètre, le rapporteur a finalement choisi, pour des raisons de sécurité juridique et constitutionnelle du dispositif, de supprimer l’enquête publique dans l’ensemble des cas où le PDA réduit le périmètre automatique des 500 mètres autour du monument historique et de la conserver dans les cas où le PDA étend le périmètre de la protection au-delà de 500 mètres.
Afin d’améliorer la prévisibilité des décisions prises par les ABF, cet article permettra également aux élus qui le souhaitent d’élaborer un règlement du PDA en lien avec l’ABF. La rédaction initiale prévoyait que ce règlement serait autonome, dans un souci de rationalisation des outils réglementaires ; finalement, il est prévu que le règlement du PDA s’inscrira dans le plan local d’urbanisme.
L’article 2 répond au même objectif d’accroissement de la prévisibilité pour les porteurs de projet et les élus locaux, en instaurant la publicité des décisions prises par les ABF. La dématérialisation de la procédure, au cours des dernières années, facilitera du point de vue technique cette mise à disposition, qui sera accompagnée d’éléments visant à assurer leur compréhension par le plus grand nombre.
L’article 3 crée une commission de conciliation permettant un examen collégial des dossiers, afin de favoriser l’émergence de solutions concertées sur les dossiers litigieux, avant l’engagement de procédures de recours. Il s’agit de généraliser à l’ensemble du territoire national de bonnes pratiques qui existent déjà dans certains départements, où se réunissent, sur l’initiative du préfet, ABF, maires et porteurs de projet, afin de lever, par le dialogue, les difficultés rencontrées en amont de la procédure de recours.
Cette mesure a suscité de nombreuses interrogations de la part des acteurs entendus en audition, ce qui a conduit à une réécriture significative du dispositif par le rapporteur, notamment pour préciser sa composition et son articulation avec la procédure de recours.
Enfin, l’article 4 ajoute à la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture la notion de réhabilitation, afin d’intégrer celle-ci parmi les activités architecturales d’intérêt public, dans le dessein de répondre à la préoccupation de faire de la réhabilitation du bâti ancien un objectif partagé par l’ensemble des acteurs du secteur de la rénovation. C’est une dynamique déjà amorcée, qu’il convient d’encourager.
Je tiens pour conclure à souligner que, tant lors des travaux de la mission d’information que pendant les auditions préparatoires à cette proposition de loi, la problématique du manque de moyens humains et d’ingénierie dans les territoires pour préserver notre patrimoine a été abondamment soulignée. Je l’ai moi-même rappelée lors de l’examen du budget, au moment où le Sénat a adopté un amendement visant à recruter un ABF supplémentaire par département. Nous ne pouvons éluder ce sujet si nous voulons diminuer de façon significative leur charge de travail afin de leur permettre d’augmenter le temps qu’ils consacrent à leurs missions de conseil et d’accompagnement.
Les sénateurs et sénatrices socialistes voteront en faveur de ce texte, qui s’inscrit pleinement dans la continuité de la mission d’information dont il est issu : il prévoit des solutions concrètes pour faciliter la vie de nos élus sans fragiliser ce qui fait la force de notre politique de préservation du patrimoine. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Gérard Paumier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi transpartisane, issue de la mission d’information sur les architectes des Bâtiments de France, comporte des avancées permettant de renouveler les conditions de dialogue entre les ABF, les élus locaux et nos concitoyens.
Héritiers de Prosper Mérimée et du corps des architectes ordinaires des monuments historiques créé en 1907, les ABF sont confrontés à l’inflation patrimoniale des dernières décennies et à l’élargissement progressif des espaces protégés.
À l’image du dieu Janus, ayant une face tournée vers le passé et l’autre vers l’avenir, les ABF – les « acteurs de la beauté de la France » – ont, dans la réalité quotidienne de nos territoires, le visage de la confiance pour certains maires et particuliers et celui de la méfiance pour d’autres. Dans le département dont je suis élu, l’Indre-et-Loire, qui a un riche patrimoine historique, j’ai été témoin de ces deux facettes.
D’un côté, le dialogue confiant, exigeant et permanent de notre ancien collègue sénateur Yves Dauge, alors président de sa communauté de communes rurales, avec le service départemental d’architecture a permis, au prix d’une patiente pédagogie, d’entraîner les neuf maires concernés à préserver et à protéger le patrimoine et les paysages ruraux du pays de Rabelais, théâtre des guerres picrocholines. Le résultat est le premier classement national, toujours en cours, d’un territoire géographique – la « Rabelaisie » –, berceau d’une œuvre littéraire, Gargantua et Pantagruel, symbole de l’humanisme de la Renaissance.
D’un autre côté, tout en reconnaissant le rôle majeur des ABF dans la protection du patrimoine remarquable, notamment historique, de nombreux maires regrettent un manque de dialogue et considèrent parfois l’ABF avec méfiance, comme un censeur, sans possibilité de facto de faire appel de ses décisions. Ils critiquent aussi des prescriptions – choix de matériaux, de clôtures ou de couleurs – subjectives, puisque ces choix varient d’un ABF à l’autre sur le même territoire, et pouvant entraîner des surcoûts importants pour les collectivités et les particuliers.
Cette proposition de loi contient des évolutions positives, telles que la généralisation des périmètres délimités des abords, qui permettra une approche plus fine des protections à opérer, ou la publication des décisions rendues par les ABF, afin d’objectiver en toute transparence les motivations de leurs décisions.
La commission départementale de conciliation, pour examiner les dossiers litigieux avant contentieux, marquerait le retour d’une plus grande proximité, l’appel régional actuel étant largement illusoire et peu utilisé. Si sa composition, qui devra rester limitée, est à l’image de celle de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, ses membres seront éclairés, assidus, et permettront, à mon avis, de résoudre de nombreuses difficultés.
Toutefois, ces avancées législatives ne régleront pas tous les problèmes des relations des ABF avec les maires et nos concitoyens. Il conviendrait aussi, à mon avis, comme cela a été évoqué lors de la visite de notre commission à la Cité de l’architecture et du patrimoine au palais de Chaillot, que la formation des ABF intègre un module sur la vie et la gestion locales, afin que les étudiants s’imprègnent des contraintes des maires, notamment en milieu rural.
Les guides nationaux de l’insertion architecturale et paysagère ne doivent plus être le fruit de la seule réflexion des ABF des départements, comme ce fut le cas en décembre 2024 en région Centre pour le guide relatif aux panneaux solaires. Ces guides et ces référentiels doivent être travaillés en liaison étroite avec les collectivités. Ils doivent avoir des déclinaisons départementales adaptées aux territoires et travaillées conjointement avec les services de l’État, les associations de maires et les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), qui jouent un rôle si important auprès des élus et du grand public dans de nombreux territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à l’exercice des missions des architectes des bâtiments de france
Article 1er
L’article L. 621-31 du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du premier alinéa, les mots : « enquête publique, consultation du propriétaire ou de l’affectataire domanial du monument historique et, le cas échéant, de la ou des communes concernées » sont remplacés par les mots : « consultation des communes concernées et enquête publique lorsque le périmètre dépasse la distance de cinq cents mètres à partir d’un monument historique » ;
2° Au troisième alinéa, après la première occurrence du mot : « abords », sont insérés les mots : « est soumis à enquête publique en application du premier alinéa et qu’il » ;
3° (Supprimé)
4° (nouveau) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de l’élaboration ou de la révision du plan local d’urbanisme, l’autorité compétente peut consulter l’architecte des Bâtiments de France sur les dispositions réglementaires de ce plan applicables au sein du périmètre délimité des abords et portant sur l’architecture des constructions neuves, rénovées ou réhabilitées, sur la protection du patrimoine et sur les prescriptions de nature à en assurer la conservation, la restauration et la mise en valeur, en application des articles L.151-18 et L.151-19 du code de l’urbanisme. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. de Legge, Panunzi et Karoutchi, Mme Aeschlimann, MM. Mandelli, Burgoa et Saury, Mme Dumont, MM. P. Vidal, Bouchet, Somon et Naturel, Mmes Josende et Lassarade, M. de Nicolaÿ, Mme Hybert, MM. Lemoyne et Delia, Mme Pluchet et M. Genet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
après les mots :
consultation des communes concernées
insérer les mots :
et du propriétaire ou de l’affectataire domanial du monument historique,
La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Avant toute chose, je tiens à dire combien je soutiens cette proposition de loi, qui va dans le bon sens, celui de la simplification et de la clarification.
Pour autant, il demeure un petit souci. Ce texte est excellent, mais ses auteurs ont, selon moi, oublié un élément : prévoir la consultation, à un moment ou à un autre, du propriétaire ou de l’affectataire du monument classé. Il me semble pourtant qu’il faudrait les inclure « dans la boucle », parce que, en entretenant ces bâtiments, ils contribuent à l’attractivité du territoire et aux éventuelles retombées économiques qui en découlent.
Je crois savoir que vous allez émettre un avis défavorable sur cet amendement et sur l’amendement n° 12 rectifié, que je vais défendre dans un instant, monsieur le rapporteur, mais vous pouvez choisir entre mes deux amendements et ceux de mon excellent collègue Lemoyne la formule qui vous conviendra. Je le redis, nous sommes un certain nombre ici à être attachés au fait de mettre ceux qui gèrent ces bâtiments dans la boucle.
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par M. Lemoyne, Mmes Duranton, Havet, Aeschlimann, Saint-Pé, Evren et de La Provôté, MM. de Legge, de Nicolaÿ, Henno, P. Vidal et Grand, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme Drexler, M. Fouassin, Mmes Sollogoub, Vermeillet et Romagny, MM. A. Marc et Théophile, Mme Perrot, MM. Rambaud, Buis, Delia et Buval, Mmes Jouve et Guidez et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
consultation des communes concernées
insérer les mots :
, information du propriétaire ou de l’affectataire domanial du monument historique
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que ceux de mon excellent collègue Dominique de Legge, puisque nous avons tous les deux déposé plusieurs amendements sur le sujet.
Au travers de sa proposition de loi, notre collègue Verzelen propose d’alléger la procédure de création des PDA. Nous pouvons le comprendre, mais il nous semble qu’il faut concilier cette nécessité avec la consultation, ou à tout le moins l’information, des propriétaires du monument concerné. Tel est précisément l’objet de cet amendement, qui vise à prévoir, à défaut d’enquête publique, puisque l’article 1er supprime celle-ci, l’information des propriétaires.
Cet amendement est assez largement soutenu sur toutes les travées de l’hémicycle ; il suffit de regarder la liste de ses signataires pour s’en convaincre. Dans notre pays en 2025, on devrait être capable de procéder à cette information. Je conçois qu’il y ait des problèmes pour établir la liste des propriétaires, mais, si nous n’y arrivons pas, la France n’est pas la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Mes chers collègues, je vous remercie de votre soutien à ce texte.
Sur le principe, nous sommes tous d’accord ; ceux qui ont participé aux travaux préparatoires recommanderaient la consultation ou, en tout cas, l’information des propriétaires ou des affectataires.
Toutefois, dans la réalité, il y aurait beaucoup de perte en ligne en raison des nombreux bâtiments concernés par une indivision importante, dont on ne peut retrouver tous les membres. Dans ce cas, on ne peut ni les consulter ni les informer.
Bref, si nous sommes d’accord sur le fond, il y aurait en réalité, j’y insiste, trop de perte en ligne. D’ailleurs, nombre de PDA sont aujourd’hui bloqués à cause de ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Je m’associe aux arguments du rapporteur.
Le PDA constitue une servitude située aux abords d’un monument classé, et le propriétaire de ce dernier n’en possède pas les abords. Il s’agit d’une servitude constituée dans l’intérêt général.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.