M. Dominique de Legge. Monsieur le rapporteur, si vous êtes d’accord avec nos amendements, je ne comprends pas que vous émettiez en fin de compte un avis défavorable à leur sujet…
Je suis désolé, votre argument ne tient pas – je vous le dis en toute amitié. Vous n’allez pas me faire croire que le problème de la protection des abords des monuments historiques tient aux indivisions ! Vous savez aussi bien que moi que c’est faux.
En général, ces bâtiments sont la propriété d’une personne morale ou d’une personne physique. Ce n’est pas parce qu’il existe quelques cas d’indivisions qu’il faut supprimer la possibilité pour tous les propriétaires de s’exprimer.
Tôt ou tard, nous devrons affirmer que ce n’est pas parce que les extérieurs n’appartiennent pas à ceux qui ont la charge de l’entretien d’un bâtiment classé que ces derniers n’ont pas un avis autorisé à donner sur la protection générale du site.
Néanmoins, je retire mon amendement au profit de celui de M. Lemoyne.
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. J’entends bien les explications du rapporteur et de la ministre.
Nous sommes au stade de la première lecture de la première chambre saisie. Pour ma part, je crois vraiment à l’intelligence collective ; honnêtement, si nous ne sommes pas capables de concevoir un dispositif permettant d’associer les propriétaires de monument dans la démarche d’élaboration des PDA, c’est que nous ne sommes pas bons !
Adoptons l’amendement n° 4 rectifié bis – je remercie Dominique de Legge de son soutien –, qui tend à prévoir l’information des propriétaires. Nous aurons le temps d’y retravailler d’ici à la première lecture du texte à l’Assemblée nationale. Simplement, manifestons, à titre conservatoire, notre attachement à mettre les propriétaires dans la boucle ; ce n’est pas grand-chose.
Cette proposition de loi constitue un progrès considérable du point de vue de la simplification, mais ne laissons personne au bord de la route, notamment les propriétaires.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.
Mme Monique de Marco. Le PDA permettra de le réduire le périmètre de 500 mètres qui existe actuellement. Quel est donc l’intérêt de consulter le propriétaire, dont le bien se situe déjà dans un périmètre restreint ? (M. le président de la commission acquiesce.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 15 rectifié ter, présenté par Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Omar Oili, Burgoa, D. Laurent, Pointereau et Henno, Mme Evren, MM. Sido, Bouchet, Mizzon, Brisson et Klinger, Mmes Puissat, Drexler, P. Martin et Chain-Larché, MM. Savin, Favreau et J.P. Vogel, Mmes Lassarade et Aeschlimann, M. Belin et Mme M. Mercier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
enquête publique lorsque le périmètre dépasse la distance de cinq cents mètres à partir d’un monument historique
par les mots :
consultation du public par voie électronique
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
enquête publique
par les mots :
consultation du public par voie électronique
La parole est à Mme Catherine Belrhiti.
Mme Catherine Belrhiti. Cet amendement vise à dématérialiser l’exercice de la démocratie locale. Nous vivons dans un monde numérique, dans lequel nos concitoyens attendent plus de transparence et de simplicité dans leurs interactions avec les institutions.
C’est pourquoi je propose de remplacer l’enquête publique par une consultation du public par voie électronique. Cette démarche permettrait de réduire les coûts administratifs, de renforcer la participation citoyenne et de simplifier le traitement des observations recueillies.
Avec votre soutien, mes chers collègues, nous œuvrons en faveur d’une administration plus moderne, plus proche des citoyens et plus respectueuse de leurs attentes.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3 est présenté par M. Lemoyne.
L’amendement n° 12 rectifié est présenté par MM. de Legge, Panunzi et Karoutchi, Mme Aeschlimann, MM. Mandelli, Burgoa et Saury, Mme Dumont, MM. P. Vidal, Bouchet, Somon et Naturel, Mmes Josende et Lassarade, M. de Nicolaÿ, Mme Hybert, M. Delia, Mme Pluchet et M. Genet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Supprimer les mots :
lorsque le périmètre dépasse la distance de cinq cents mètres à partir d’un monument historique
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour présenter l’amendement n° 3.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.
M. Dominique de Legge. Je le retire !
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Le sujet de ces amendements est similaire à celui des précédents amendements.
Nous avons constaté que, partout où ils sont mis en place, les PDA fonctionnent. La principale difficulté rencontrée réside, notamment pour les communes rurales, dans le fait de devoir assumer les procédures administratives. C’est pourquoi nous proposons de ne plus recourir à l’enquête publique quand on réduit le périmètre et de la maintenir quand on étend ce dernier, en raison d’une contrainte d’ordre constitutionnel.
J’entends votre volonté, mes chers collègues, de définir des procédures plus souples, mais celles-ci restent des procédures. Or qui dit procédure dit formalisme, ce qui peut conduire à des recours. Encore une fois, je crains que cela n’entraîne de la perte en ligne et que l’on n’atteigne pas notre objectif à tous : développer le plus possible les PDA.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je retire mon amendement !
M. le président. L’amendement n° 3 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
Le I de l’article L. 632-2 du code du patrimoine est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les avis rendus par les architectes des Bâtiments de France dans le cadre de la procédure prévue au présent I, ainsi que les éléments de nature à favoriser leur compréhension, sont publiés dans un registre national gratuitement mis à la disposition du public au format numérique. »
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié ter, présenté par Mmes Josende et Joseph, MM. Frassa et Reichardt, Mme Belrhiti, M. Panunzi, Mme Ventalon, M. Burgoa, Mmes P. Martin et Dumont, MM. Michallet et Sido, Mmes Bellurot et Puissat, MM. Lefèvre et P. Vidal, Mme Evren, M. Brisson, Mme Goy-Chavent, M. Sol, Mme Canayer, MM. Belin, Rojouan et Sautarel et Mme Bellamy, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« Dans le cadre de la procédure prévue au présent I, les architectes des Bâtiments de France sont tenus de respecter leurs décisions antérieures ainsi que celles de leurs prédécesseurs à l’échelle communale et départementale, sous réserve du dernier alinéa de l’article L. 632-1 du présent code. »
La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Cet amendement, proposé par Mme Josende, s’appuie sur son expérience locale : elle a constaté qu’un même ABF peut, au fil du temps, juger différemment deux situations totalement analogues. Par ailleurs, il arrive que l’avis rendu par un ABF puisse être remis en cause par son successeur.
L’objet du présent amendement est d’apporter une véritable sécurité juridique aux avis des ABF, en limitant leur caractère subjectif et en assurant leur cohérence ainsi que leur continuité temporelle, tant à l’échelle de la commune que du département.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Nous partageons tous l’objectif qui sous-tend cet amendement. Cet objectif a d’ailleurs constitué l’angle d’attaque de notre travail : nous avons voulu améliorer la prévisibilité et rendre les avis plus cohérents.
La transparence des décisions passe par la possibilité offerte à chacun, grâce à l’article que nous examinons, de consulter les avis qui ont été rendus – il faut d’abord que le dossier soit compréhensible ! – sur les travaux dans son secteur géographique. Cette transparence permet d’établir une référence, située dans le temps, et d’élaborer en quelque sorte une jurisprudence qui peut être utilisée dans le cadre de la contestation d’une décision devant la commission de conciliation.
En l’occurrence, cet amendement me paraît un peu rigide, contraignant les ABF à s’aligner sur une décision précédente d’un de leurs collègues alors que tout change : les matériaux, les sources d’énergie, notamment renouvelables comme le photovoltaïque… J’insiste sur la rigidité de l’amendement. Par ailleurs, ni la période couverte ni les secteurs concernés ne sont précisés.
Encore une fois, même si l’amélioration de la prévisibilité et de la cohérence est tout le sens de ce que nous proposons aujourd’hui, cette mesure trop rigide ne permettra pas d’atteindre le but fixé.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Brulin et Apourceau-Poly, MM. Bacchi, Basquin et Brossat, Mme Corbière Naminzo, M. Corbisez, Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, M. Lahellec, Mme Margaté, M. Savoldelli, Mmes Silvani et Varaillas et M. Xowie, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’avis défavorable de l’architecte des Bâtiments de France, celui-ci est tenu de proposer des solutions alternatives permettant la réalisation du projet si cela est possible, tout en respectant les exigences patrimoniales et architecturales. »
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Par cet amendement, nous proposons que l’avis négatif d’un ABF soit assorti de conseils, afin de trouver des solutions qui permettent d’aller au-delà de l’avis et d’avancer sur les projets.
Malheureusement, nous avons souvent affaire à des avis couperets qui conduisent à l’annulation de la réhabilitation d’un site ou de la requalification d’un bâtiment, lesquels deviennent de véritables verrues au sein de nos communes, parfois même aux abords immédiats d’un patrimoine très intéressant.
J’ai bien conscience que ce rôle de conseil, qui est déjà celui des ABF, nécessite, pour être mené à bien, des effectifs importants. Je rejoins les propos des collègues qui ont indiqué, à plusieurs reprises depuis le début de ce débat, le besoin de revoir à la hausse les effectifs pour accompagner les collectivités lorsqu’elles élaborent leurs projets, dans le respect du patrimoine. Je pense aux architectes des Bâtiments de France, mais il faudrait aussi parler des agents des Udap.
L’idée qu’il faudrait développer une vision globale dans les territoires qui disposent de plusieurs sites patrimoniaux remarquables sous-tend également cet amendement. Sans établir une hiérarchie qui n’aurait pas de sens, nous pouvons comprendre qu’une commune bénéficiant d’un théâtre gallo-romain et de bâtiments néogothiques cherche à conserver ce patrimoine plutôt que des maisons des ouvriers du textile, lorsque ces dernières existent dans de nombreuses autres communes du département.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Les refus sont, en réalité, assez peu nombreux : ces décisions sont en général motivées, et nous n’avons pas eu beaucoup de remontées sur ce point. La grande partie des problèmes relève des cas où l’ABF répond par un « oui, mais », assorti d’une liste de recommandations telle que l’avis est finalement reçu comme un rejet.
Aussi, madame la sénatrice, votre amendement visant à obliger les ABF à préciser les conditions de réalisation d’un projet est-il déjà satisfait. J’y insiste, sur les quelques dossiers qui font l’objet d’un refus, l’avis est motivé.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Les avis sont, bien sûr, motivés, fort heureusement ! Pour mettre tout le monde à l’aise, j’indique qu’il s’agissait d’un amendement d’appel, que je vais retirer.
Je souhaitais insister sur le rôle de conseil que doivent avoir les ABF, mais aussi les Udap, rôle que, trop souvent, ils ne jouent pas. Peut-être certains d’entre eux n’en ont-ils pas envie, mais cela s’explique souvent parce le fait qu’ils ne sont pas assez nombreux.
Vous considérez, monsieur le rapporteur, que mon amendement est satisfait. J’entends votre propos. Toutefois, vous indiquiez tout à l’heure que ce qui marche sur le papier peut en réalité ne pas fonctionner. Je vous renvoie à vos mots : en réalité, les Udap et les architectes des Bâtiments de France n’exercent malheureusement pas assez leur fonction de conseil aux collectivités.
Pourtant, des solutions sont souvent envisageables. Selon moi, certaines contraintes exigeantes sont susceptibles de donner lieu à des travaux intéressants sur le plan architectural, à condition que les communes, notamment les plus petites, qui ne disposent pas d’un architecte ou d’un urbaniste, soient accompagnées.
Mme Rachida Dati, ministre. Je comprends, madame la sénatrice, votre volonté d’interaction avec les ABF, et d’obtenir de leur part des conseils et des explications ; j’en ai parlé dans mon propos introductif.
Dans la majorité des cas, le système fonctionne bien, même si, parfois, il peut y avoir des difficultés. Aussi, je comprends l’enjeu démocratique derrière cet article, mais attention à l’excès de transparence ! Celui-ci peut conduire – je le rappelle en tant qu’élue locale – à la délation, à des règlements de compte ou à la récupération d’informations stratégiques à des fins qui ne sont pas forcément patrimoniales.
De la même manière, la création d’un nouveau registre doit être appréciée au regard de la charge financière et administrative qu’il représenterait. En effet, plus de 500 000 avis étant rendus par an, nous en aurions, en peu de temps, des millions à traiter et à gérer. Les ABF auraient donc moins le temps de recevoir les propriétaires ou les porteurs de projet, d’autant qu’ils fournissent déjà plus de 200 000 conseils par an.
Monsieur le sénateur Ouzoulias, vous évoquiez tout à l’heure les effectifs. Vous avez raison de rappeler cet enjeu. Comme je l’indiquais, là où, en ruralité, un seul architecte est présent, il y en aura bientôt un deuxième. Cette mesure commence à être déployée puisque le plan France Ruralités a vu son financement sanctuarisé et que le nombre d’agents, y compris dans les Udap, a été maintenu, voire a augmenté, malgré les contraintes budgétaires qui sont les nôtres. Par conséquent, nous ne réduisons absolument pas les effectifs ni les moyens dans ce secteur.
Je partage l’objectif qui sous-tend l’amendement n° 7 rectifié, même si, matériellement, il est compliqué à atteindre. J’y insiste, une trop grande transparence peut conduire à une utilisation qui ne serait pas forcément saine de certaines données.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, mon intervention portera sur un sujet annexe à cet article.
La discussion le montre bien, nous aurions besoin d’une gradation supplémentaire dans la procédure de classement. De fait, entre le non-classement et le classement comme monument historique, il manque un niveau intermédiaire, plus simple. Celui-ci permettrait aux élus, aux ABF et aux services de l’État d’attirer l’attention des pétitionnaires sur l’importance architecturale d’un bâtiment sans nécessairement le classer, ce classement produisant, comme vous le savez, celui des abords.
J’ai été jeune conservateur à l’École nationale du patrimoine, une époque qui commence à dater… (Sourires.) J’ai travaillé à l’époque sur ce qui était appelé la protection du troisième type. Celle-ci était partagée entre les directions régionales des affaires culturelles (Drac) et les départements, qui devaient absolument être associés. Madame la ministre, il serait très intéressant de rouvrir ce débat pour proposer autre chose aux élus que le classement aux monuments historiques.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison, certaines situations sont en quelque sorte intermédiaires, c’est-à-dire qu’elles ne nécessitent pas d’aller jusqu’au classement aux monuments historiques. Il est alors assez simple d’intervenir par le biais des plans locaux d’urbanisme. La protection au titre des sites patrimoniaux remarquables existe aussi – Paris est d’ailleurs fortement concerné.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Belrhiti, M. Reichardt, Mme Aeschlimann, MM. Daubresse, Paccaud et Mizzon, Mme Dumont, MM. de Legge, Lefèvre et Burgoa, Mmes Lopez et Josende, MM. Bouchet et Panunzi, Mmes Guidez et Dumas, MM. Omar Oili et Somon, Mme Drexler, MM. Sido, P. Vidal, Levi et Brisson, Mme Evren, MM. Savin, J.P. Vogel, Favreau et Allizard, Mmes Lassarade, Berthet, Jacquemet, Perrot et Chain-Larché et MM. de Nicolaÿ et Delia, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 632-2-1 du code du patrimoine, il est inséré un article L. 632-2-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 632-2-1-…. – La mission de contrôle des architectes des Bâtiments de France s’exerce dans le respect des pratiques et critères définis au sein d’un référentiel national élaboré par une commission, elle-même composée de représentants des architectes des Bâtiments de France, d’experts en matière d’urbanisme et d’élus locaux. »
La parole est à Mme Catherine Belrhiti.
Mme Catherine Belrhiti. Cet amendement, qui me semble essentiel, vise à harmoniser les pratiques des architectes des Bâtiments de France dans le cadre de leur mission de contrôle, par la création d’un document référentiel national, élaboré par une commission d’experts et centralisant un ensemble de critères d’intervention standardisés.
Cette initiative est une réponse à une inquiétude croissante : nombreux sont les élus et les porteurs de projet qui déplorent l’imprévisibilité et l’incohérence des décisions rendues par les ABF, lesquelles varient d’un département à l’autre. La protection de notre patrimoine commun doit répondre à des objectifs partagés.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à soutenir cet amendement qui permettra de guider les ABF dans leur mission de contrôle et d’assurer une application homogène des normes sur notre territoire.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Pas bête !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Je partage totalement, sur le fond, l’ambition qui est la vôtre, ma chère collègue. Vous devez vous dire : « Le rapporteur est sympa, il partage tout le temps nos idées, mais, à la fin, il n’est pas pour ! » (Rires.)
En premier lieu, je considère – madame la ministre, vous nous le confirmerez – que l’amendement est satisfait. En effet, le ministère est en train de travailler sur la mesure proposée.
En second lieu, s’il est positif d’avoir un tel guide, quels seront néanmoins son périmètre et son niveau de détail ? S’il s’agit de tracer de grandes lignes à l’échelle nationale, soit, mais s’il s’agit d’indiquer comment procéder dans toutes les communes de France, un problème se posera : le bâti dans l’Aisne n’est pas le même que dans la Moselle, à Biarritz, dans les Hauts-de-Seine, dans la Drôme ou en Normandie. Les réalités patrimoniales sont totalement différentes. Jusqu’à quel niveau de précision faudra-t-il donc aller dans le document ?
Même si nous partageons sur le fond son objet, nous estimons, je le redis, que l’amendement est satisfait : l’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Belrhiti, l’amendement n° 6 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Catherine Belrhiti. Je le maintiens !
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je trouve que l’avis de Mme la ministre, pourtant appelée à donner son point de vue, mériterait un supplément d’explication. En effet, le rapporteur nous indique qu’il n’est pas possible de descendre dans le détail.
Nous ne serions pas là ce soir si nous n’étions pas des plus favorables aux ABF. Nous savons le rôle qu’ils jouent dans nos villes. Ils empêchent parfois des erreurs importantes. Nous les comprenons largement, ce qui n’est pas le cas de tous les élus, comme cela a été dit tout à l’heure.
Pourtant, nous voyons aussi se succéder des ABF aux positions très différentes. La différence entre eux est telle que nous nous demandons parfois s’il existe des lignes directrices ou une vision commune : chacun décide-t-il dans son coin de ce qu’est le beau à un moment donné ?
Madame la ministre, puisqu’il nous a été indiqué qu’un référentiel était en cours de préparation, pourrions-nous en savoir davantage ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. Le Gouvernement prévoit la publication d’un guide et la mise à disposition de fiches, à l’échelle départementale et régionale. Ces documents prendront véritablement en compte l’hétérogénéité patrimoniale. En effet, nous ne pouvons pas mettre en place un référentiel figé, compte tenu de la diversité de nos territoires.
Je le répète : nous aurons un guide et des fiches pratiques auxquels les porteurs de projets pourront se référer. Si ces documents ne figurent pas dans cette proposition de loi, c’est parce qu’ils ne sont pas de nature législative.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. La question de fond que pose cet amendement est souvent revenue au cours des auditions : comment améliorer la prévisibilité des avis rendus par les ABF ? Je suis tout à fait d’accord avec M. le rapporteur et Mme la ministre, une doctrine nationale unique ne correspondrait pas aux situations locales. En effet, les matériaux sont différents selon les territoires et les bâtiments ne sont pas construits de la même façon. Ces divergences sont le fruit de notre histoire.
Pour assurer cette prévisibilité qui tracasse les élus – Mme Brulin en parlait aussi –, nous avons besoin de concertation. Dans toutes les villes et tous les villages disposant d’un riche patrimoine, un important travail a été réalisé en ce sens entre élus et ABF. Mais encore faut-il en avoir les moyens !
Mme la ministre a donné, à deux reprises, le nombre d’avis rendus par ABF par an. Il faut savoir que ce chiffre représente treize avis par jour ouvré. Ce n’est tout simplement pas possible ! Les ABF sont très contraints. Si nous leur donnons plus de moyens – Mme la ministre a évoqué la possibilité d’augmenter leur nombre –, le travail de concertation et de coconstruction des projets avec les élus aura lieu.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. J’ai été confronté à une telle demande en tant qu’archéologue. J’étais conservateur du patrimoine avant de travailler dans l’archéologie…
M. Max Brisson. C’est la vie de Pierre Ouzoulias ! (Sourires.)
M. Pierre Ouzoulias. … et de finir ici ! Le niveau d’exécration à l’égard des archéologues était l’équivalent de celui que connaissent les ABF. Nous nous retrouvions entre persécutés de la culture, en permanence mis au pilori ! (Nouveaux sourires.)
Les critères et les normes portent un nom : l’état de l’art, c’est-à-dire l’état des connaissances à un moment donné. Laissez-moi vous donner un exemple concret. Nous nous posons actuellement la question de la conservation des églises de la seconde partie du XIXe siècle. Celles-ci, en ciment armé et de style néogothique, n’ont pas beaucoup de valeur artistique selon l’opinion commune. Le risque est donc qu’elles disparaissent toutes et que nous n’ayons plus du tout de trace de ce qui aura été un moment fondamental de la construction des églises en France.
Il faut absolument, suivant l’état de l’art, nous adapter aux connaissances de l’époque. Un service fondamental se chargeait de ces adaptations : celui de l’inventaire général du patrimoine culturel. Il était placé sous la direction du ministère de la culture ; à présent, il dépend des régions.
Madame la ministre, les unités départementales de l’architecture et du patrimoine, les ABF et les services régionaux de l’inventaire sont-ils en lien pour analyser les potentialités patrimoniales ? J’ai le sentiment que ce lien est très faible. Les services régionaux de l’inventaire ont des pratiques extrêmement différentes : certains sont parfois très efficaces, d’autres le sont moins. Il faut donc réfléchir de nouveau aux interactions de ces acteurs.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour explication de vote.
Mme Catherine Belrhiti. La réponse que vous nous donnez, madame la ministre, me semble incomplète : vous nous annoncez des fiches à l’échelle des départements et des régions, mais on ne voit pas trop où l’on va. En ce qui me concerne, peu importe le nom que nous lui attribuons, y compris « l’état de l’art », chaque personne doit pouvoir consulter un document indiquant le schéma à suivre. Pour le moment, ce n’est pas le cas.
Voilà ce que je demande au travers de cet amendement. Il faut une référence à l’échelle nationale et que celle-ci ne soit pas trop stricte, de telle sorte que nous l’aménagions dans les départements.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.
Mme Monique de Marco. Je partage les interrogations du rapporteur sur le périmètre et le niveau de détail. Plutôt qu’un guide national identique du Pays basque à la Bretagne en passant par l’outre-mer, il pourrait s’agir d’un référentiel minimal, indiquant simplement quelques consignes. Il ne peut s’appliquer exactement de la même façon à tous les territoires !
Comme je suis pour la décentralisation, et donc pour que tout ne se joue pas à Paris, je ne suis pas du tout favorable à un tel guide.