M. Laurent Burgoa. Si, dans le Tarn, le long de l'A69 !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. C'est en tout cas rarement le cas !
Pourtant, selon vous, il faudrait « lutter ». Je ne nie pas l'évolution du climat, mais il faut mettre un terme à cette stigmatisation !
Appuyons-nous sur les forces de l'agriculture, qui, pendant des siècles, a toujours évolué face au changement. Au lieu de leur imposer une méthode, laissons faire les agriculteurs : ils se sont toujours adaptés. L'agriculture est performante en la matière.
D'ailleurs, s'ils n'avaient pas su faire preuve de cette qualité, les agriculteurs ne travailleraient pas 70 heures par semaine quand le reste de la société n'en travaille que 35… (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Et sans avoir à grimper aux arbres !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. La lecture de cet amendement donne le sentiment que les agriculteurs seraient les acteurs du changement climatique,...
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Vous avez tout à fait raison.
Mme Annie Genevard, ministre. ... le terme de « lutte » que vous souhaitez introduire donnant l'impression qu'ils devraient lutter contre eux-mêmes pour empêcher le changement climatique. Tout cela me dérange.
Je ne veux pas laisser prospérer cette ambiguïté. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Roger Karoutchi. Parfait !
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Le précédent débat m'avait laissé l'impression que nous étions tous d'accord pour sortir de l'obscurantisme et de la négation des tabous et que nous étions prêts à regarder les réalités en face, en faisant montre d'un esprit un tant soit peu scientifique.
Quelle absurdité que de considérer que l'agriculture serait finalement la seule activité économique dans notre société qui n'émettrait pas de gaz à effet de serre et qui ne participerait pas au changement climatique !
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Nous n'avons pas dit cela !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cela n'a rien à voir !
M. Jean-François Husson. C'est une déformation des propos tenus !
M. Ronan Dantec. Nous retombons dans l'obscurantisme.
J'aurais cru que tout le monde était prêt à faire preuve de sérieux dans nos débats. Je pourrais moi aussi m'exprimer longuement sur la mammite. Au fond, c'est un peu ma jeunesse !
Comment ne pas reconnaître que l'agriculture représente une part significative des émissions de gaz à effet de serre de notre pays ? Ce n'est pas stigmatiser les agriculteurs que de le dire. Au contraire, c'est en refusant de le reconnaître que nous ouvrons la voie à la stigmatisation.
Nous touchons là au cœur de ce débat : soit l'agriculture assume la totalité de ses externalités, comme le reste de la société française, et alors nous pouvons chercher des améliorations, soit nous refusons de mettre les mots sur cette réalité. Je citerais bien Camus, mais, à force de répéter ses phrases justes, on finit par en éteindre la portée.
Refuser d'inscrire la lutte contre le changement climatique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture française dans le texte, c'est refuser l'approche scientifique dans laquelle vous souhaitiez nous engager collectivement il y a un instant.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Du dogmatisme scientifique !
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Passons au vote !
M. Daniel Salmon. Mes chers collègues, cela vaut le coup de poursuivre la discussion.
M. Jean-François Husson. Il n'y a que vous qui le dites !
M. Daniel Salmon. L'agriculture n'est pas en dehors de la société. Ce secteur doit assumer sa part dans la lutte contre le réchauffement climatique, à moins de considérer que cet enjeu n'a pas d'importance…
L'agriculture produit des gaz à effet de serre : on ne peut pas dire le contraire.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Personne ne le prétend !
M. Daniel Salmon. C'est une affirmation que je lis partout et qui me paraît tout à fait scientifiquement fondée !
Quand on plante des haies – je prends bien sûr cet exemple au hasard ! (Sourires sur les travées du groupe GEST.) –, on stocke du carbone et, ce faisant, on lutte contre le réchauffement climatique.
Quand on maintient des prairies, on stocke également du carbone et, ce faisant, on lutte contre le réchauffement climatique.
Quand on fait évoluer la ration alimentaire de ses animaux, en promouvant la polyculture-élevage et en renforçant l'élevage herbager, on importe moins de soja brésilien, et, là encore, on lutte contre le réchauffement climatique.
Exclure l'agriculture de cette lutte me paraît donc préjudiciable, à la fois pour la société dans son ensemble et pour les agriculteurs. En effet, nombre d'entre eux sont totalement conscients que cela fait partie de leur travail, en tant qu'agriculteurs, mais aussi en tant que citoyens.
Ce débat me paraît donc complètement hors-sol, ce qui est bien dommage s'agissant d'un projet de loi sur l'agriculture…
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je veux nuancer ce qui vient d'être dit.
Si je partage l'esprit qui préside aux propos qui viennent d'être tenus, il me semble que nous avons trop souvent tendance à prêter attention davantage aux émissions de gaz à effet de serre qu'au bilan global.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Et surtout aux besoins !
M. Franck Montaugé. Certes, l'agriculture émet des gaz à effet de serre, mais elle recourt aussi à des techniques qui permettent, à l'inverse, de capter du carbone.
Plutôt que de rentrer dans une logique d'affrontement, regardons les études et raisonnons en termes de bilan net. Cela apportera à ce débat davantage de sérénité. Ainsi pourrons-nous ouvrir la voie à des techniques appropriées pour réduire le bilan net de la contribution au réchauffement climatique. Voilà comment nous devrions aborder le sujet.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je veux revenir sur les gaz à effet de serre. Ces dernières années, la Commission européenne a poussé les États membres à diminuer leur cheptel.
Dans le même temps, les membres du Mercosur ont augmenté leur cheptel, qui est en quelques années devenu, dans chacun de ces pays, comparable à celui de la France !
De fait, les gaz à effet de serre qui ne sont plus émis en Europe le sont sur le continent sud-américain.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Eh oui, c'est le problème !
M. Daniel Chasseing. Au lieu de cela, nous devrions renforcer notre cheptel pour garantir notre souveraineté. Dans tous les cas, ces gaz à effet de serre sont bien émis, même si c'est en Amérique du Sud !
Plutôt que d'importer du cheptel de ces pays, augmentons notre production, en France comme en Europe.
M. Franck Menonville, rapporteur. Bravo !
M. Vincent Louault. Enfin la bonne parole !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sans chercher à alimenter le débat, je tiens à rappeler, notamment à ceux qui nous regardent, que l'amendement dont il est question ne contient pas un seul mot sur les gaz à effet de serre !
M. Jean-François Husson. C'est vrai.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Son objet se réduit aux trois mois suivants : « de lutte et ». Il s'agit donc seulement de lutter contre le changement climatique. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
M. Ronan Dantec. C'est exactement la même chose !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ces réactions sont en réalité symptomatiques : dès lors que vous manquez d'arguments (Protestations sur les travées du groupe GEST.), par effet cocktail, vous déplacez le sujet du débat pour tenter de culpabiliser toute une profession.
Certes, les agriculteurs émettent des gaz à effet de serre et certains consomment peut-être du gazole non routier (GNR). À quoi voulez-vous revenir ?
M. Ronan Dantec. À la bougie !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je le répète, cet amendement ne fait aucune mention des gaz à effet de serre.
M. Roger Karoutchi. Eh voilà !
M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.
M. Michaël Weber. Ces propos sont excessifs, donc assez insignifiants.
Personne ne considère que le monde agricole est seul responsable du réchauffement climatique. Ce n'est absolument pas ce que nous avons dit, …
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ce n'est pas ce que j'ai dit non plus.
M. Michaël Weber. … et personne non plus ne souhaite revenir aux chevaux de trait ou à la bougie, contrairement à ce que vous vous plaisez à laisser croire.
Le constat est partagé par tous, y compris par le monde agricole. Les agriculteurs contribuent au réchauffement et au dérèglement climatiques, ainsi qu'aux émissions de gaz à effet de serre. Non seulement ils en sont conscients, mais ils souhaitent avoir les moyens d'inverser la situation en contribuant à la transition.
C'est le sens de nos amendements.
Monsieur le rapporteur, vous vous honoreriez à soutenir notre démarche, car, là encore, c'est de l'avenir de l'agriculture qu'il est question, un avenir que nous souhaitons tous meilleur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 302 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 303 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Après les mots :
changement climatique
insérer les mots :
et à la raréfaction des ressources naturelles
La parole est à M. Lucien Stanzione.
M. Lucien Stanzione. Cet amendement vise également à préciser l'alinéa 26, en ajoutant que la recherche de « solutions techniques et scientifiques » doit non seulement concerner l'« adaptation au changement climatique », mais également porter sur l'anticipation et l'adaptation « à la raréfaction des ressources naturelles ». En effet, celle-ci aura dès demain un impact sur tous les pans de notre économie, notamment sur l'agriculture.
Nous pensons bien entendu particulièrement à la question de l'eau et à la nécessité de trouver des modes de production plus sobres et plus résilients face à la récurrence de la sécheresse dans nos territoires. Nous avons notamment en tête la viticulture qui, dans certains territoires, pourrait disparaître purement et simplement du fait du manque de précipitations.
Nous n'oublions pas non plus l'appauvrissement de nos sols, victimes d'une agriculture trop intensive qui entraîne une chute de la biodiversité, une perte de rendement, mais également une diminution de la valeur nutritionnelle des aliments.
L'ensemble de ces facteurs doit nous pousser à des efforts accrus en matière de recherche pour rendre notre agriculture plus résiliente.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. La rédaction actuelle des alinéas 26 et 31 répond déjà à cet objectif, sans qu'il soit nécessaire d'en alourdir la rédaction.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 303 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 877, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Remplacer les mots :
nationale et à son approvisionnement alimentaire
par les mots :
et à l'approvisionnement alimentaire nationaux ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 692, présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 26
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …°D'adapter les pratiques agricoles à la raréfaction de la ressource en eau ;
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. L'esprit de cet amendement rejoint le précédent. Il s'agit d'ajouter aux priorités de la politique en faveur de la souveraineté alimentaire, à la suite de l'alinéa 26, l'adaptation des « pratiques agricoles à la raréfaction de la ressource en eau ».
Cette précision me semble indispensable. Cela va d'ailleurs dans le sens des propos de M. le rapporteur, qui a très bien expliqué les problématiques liées à la raréfaction de la ressource en eau pour le monde agricole. Nous en avons notamment observé les effets dans les Pyrénées-Orientales.
Il est donc nécessaire d'adapter les pratiques, notamment au travers du choix des cultures. Aussi est-il essentiel de faire figurer cette précision dans un nouvel alinéa.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Sur mon exploitation, je dispose d'une retenue collinaire de 40 000 mètres cubes, que je remplis assez aisément et qui permet de soutenir les cultures l'été, pendant environ un mois et demi.
Le 17 octobre, à Brives-Charensac, juste en dessous de chez moi, le débit de la Loire a atteint 2 000 mètres cubes par seconde. Le calcul est facile : ma retenue collinaire aurait été remplie en vingt secondes.
S'adapter au changement climatique, c'est aussi s'intéresser à notre capacité de stockage en cas d'excès d'eau, de façon à pouvoir la réutiliser ultérieurement.
Ni la rédaction de cet amendement ni sa présentation ne me donnent le sentiment que ses auteurs partagent ma vision sur ce sujet. C'est bien cela qui me gêne ! (Protestations sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, qui est satisfait.
Au-delà des propos du rapporteur, les agriculteurs ont compris l'enjeu de l'adaptation à la raréfaction de la ressource en eau. Le choix de cultures moins gourmandes en eau est bien entendu une voie vers laquelle nous devrons nous diriger.
Cependant, monsieur le sénateur, dans les Pyrénées-Orientales, le problème n'est pas l'adaptation à la raréfaction de la ressource en eau. De l'eau, il n'y en a tout simplement pas !
Je me suis trouvée aux côtés d'un arboriculteur, face à son champ : ses arbres étaient morts de soif.
La question n'est pas celle du choix de cultures moins gourmandes en eau, mais c'est bien celle de l'accès à l'eau !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Bien sûr !
Mme Annie Genevard, ministre. Nous aurons d'ailleurs une nouvelle fois ce débat lors de l'examen d'un autre amendement.
L'accès à l'eau est le principal problème. Je le répète : sans eau, il n'y a pas d'agriculture, il n'y a pas de vie !
Nous devons sortir de ce débat idéologique infernal qui ne fait que condamner les agriculteurs. C'est un drame absolu.
Lors de ce déplacement dans les Pyrénées-Orientales, j'ai été particulièrement marquée par la dignité de cet arboriculteur, face à la destruction totale de son outil de travail, simplement parce que l'accès à l'eau lui est interdit.
M. Akli Mellouli. Alors, comment fait-on ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il faut construire le canal qui est prévu depuis si longtemps !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. La loi Climat et Résilience a opposé un grand nombre de difficultés à l'installation de retenues collinaires. (M. Vincent Louault acquiesce.)
Dans les Pyrénées-Orientales comme dans le reste de nos territoires, les retenues collinaires sont nécessaires pour diversifier les cultures, dans nos champs et dans nos vergers. C'est essentiel.
Ces retenues collinaires ne posent aucun problème vis-à-vis de la ressource en eau. Seule l'eau qui est tombée du ciel est retenue. Il ne s'agit pas de bassines !
Il est indispensable que nous sortions de ce débat, tant pour la diversification que pour l'avenir de l'agriculture. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Nous discutons d'un projet de loi d'orientation agricole, c'est-à-dire d'un texte qui nous donne l'occasion de décider collectivement, en toute lucidité, des défis qui sont devant nous et de la façon d'y répondre. L'alinéa 26 a précisément trait au renforcement de la recherche et de la réflexion collective pour faire face à ces enjeux.
On constate aujourd'hui une augmentation des températures en France d'environ 2 degrés Celsius, ce qui correspond à une augmentation de 1,5 degré Celsius à l'échelon mondial. À l'unanimité, le Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui compte en son sein des représentants de la FNSEA, a émis un avis favorable sur l'élaboration d'une trajectoire d'adaptation à +4° C en 2100 pour la France métropolitaine, c'est-à-dire demain... – +4° , cela va taper très fort, et ce sont les scientifiques qui nous le disent !
Dès lors, se retrouver tétanisé au moment de réfléchir aux solutions techniques envisageables face à la raréfaction inéluctable de la ressource en eau est bien loin l'approche lucide que, compte tenu de la gravité de la situation, l'on est en droit d'attendre de la représentation nationale et du Gouvernement.
Si l'on veut sauver l'agriculture française, la gravité et la rapidité du réchauffement ne sauraient être taboues. Ce que nous devons faire désormais n'a rien à voir avec les lentes adaptations de l'agriculture française au cours des siècles, puisque nous sommes face à une situation inédite !
Refuser de mobiliser la recherche et la capacité collective à trouver des solutions face à des événements pourtant parfaitement identifiés et qui ne manqueront pas de survenir, comme vous le faites à chaque fois que nous proposons un amendement en ce sens, revient à envoyer un signal extrêmement négatif, d'abord aux agriculteurs eux-mêmes, sur la connaissance des problèmes à venir.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Le rapporteur a raison : oui, l'agriculture s'est constamment adaptée aux changements climatiques.
C'est bien ce que nous demandons : accompagner les agriculteurs pour qu'ils puissent s'adapter à un changement climatique sans précédent – une augmentation de 2, 3, voire 4 degrés Celsius, comme vient de le rappeler Ronan Dantec –, qui entraînera une raréfaction de la ressource en eau.
Cet amendement ne vise absolument pas à empêcher un travail de recherche sur les retenues collinaires ou les questions d'irrigation. En revanche, il convient de réfléchir aussi à l'adaptation des cultures à la raréfaction de l'eau. Mme la ministre a d'ailleurs donné un très bon exemple de cette situation et elle a posé la bonne question : comment faire quand il n'y a pas d'eau ? Même si l'on peut envisager des pompages çà ou là, l'absence d'eau pose de véritables problèmes !
Je note, par ailleurs, que la réflexion sur l'adaptation de l'agriculture à la raréfaction de la ressource en eau avance très rapidement dans un certain nombre de pays. Je ne comprends donc pas cette opposition stérile à cet amendement, qui ne vise qu'à ajouter ces quelques mots.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. La situation dans les Pyrénées-Orientales que vous avez décrite est en effet effroyable, madame la ministre. C'est justement pour cela que nous voulions ajouter la lutte contre le réchauffement climatique dans le texte. S'il y a bien une urgence, c'est bien cette lutte !
Tout en luttant, il faut aussi s'adapter. Ce que nous vivons aujourd'hui et ce que nous vivrons dans les prochaines décennies n'a rien à voir avec ce qui s'est passé lors des siècles précédents. Il faut se rendre à cette évidence : nous devrons faire le deuil du climat que nous avons connu.
Il est vrai qu'en ce moment il pleut beaucoup ; la Bretagne, notamment l'Ille-et-Vilaine, n'a pas manqué d'eau ces derniers jours... Pour autant, cela ne veut pas dire qu'il y aura suffisamment d'eau l'été prochain.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Vous disiez la même chose en 2022, quand le climat était sec !
M. Daniel Salmon. La hausse des températures entraîne en effet une augmentation de l'évaporation. Il faudra bien adapter les cultures à ces données pédoclimatiques !
Nous devons absolument prendre en compte la raréfaction de la ressource en eau, qui surviendra quoi qu'il arrive. Même s'il y a des épisodes très pluvieux, nous connaîtrons aussi des sécheresses ; lorsque les températures sont plus élevées, on a davantage besoin d'eau.
Il est tout de même terrible de se dire que l'on est une fois de plus en train de refuser l'obstacle en ne se mettant pas en position de répondre, demain, au défi climatique !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Votons !
M. Daniel Salmon. Même en anticipant et en préparant ces situations, nous serons confrontés à des difficultés. Dans ces conditions, ne rien faire en pensant que l'agriculture de demain sera simplement la perpétuation de celle d'hier nous expose à de sérieuses déconvenues !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 613 rectifié ter, présenté par M. M. Weber, Mme Bonnefoy, MM. Gillé, Mérillou et Pla, Mme S. Robert, MM. Lurel, Bourgi, Ros, Fichet et Devinaz, Mmes Linkenheld et Poumirol et M. Chantrel, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Après le mot :
agriculture
Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et de l'apiculture, en matière de services environnementaux et d'aménagement du territoire, notamment ceux fournis par la pollinisation entomophile ;
La parole est à M. Michaël Weber.
M. Michaël Weber. Cet amendement vise à inscrire le rôle de l'apiculture, via la pollinisation entomophile, parmi les externalités positives de l'agriculture.
L'apiculture assure un service de pollinisation au profit des cultures et de la flore sauvage. Sans pollinisation, 80 % des plantes cultivées en Europe ne survivraient pas. Cette branche de l'agriculture est peut-être celle qui est la plus sensible aux dégradations environnementales.
Cette filière est un indicateur de biodiversité. À ce titre, elle doit jouer un rôle prépondérant dans l'orientation des politiques agricoles.
M. le président. L'amendement n° 528 rectifié bis, présenté par MM. Masset, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Après le mot :
agriculture
insérer les mots :
, et particulièrement de l'apiculture,
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. L'importance de la pollinisation entomophile pour la pérennité, la diversité et la qualité de notre alimentation est indiscutable. La production de semences, l'arboriculture fruitière, la viticulture, la production maraîchère et l'horticulture, entre autres, dépendent de l'activité pollinisatrice des insectes. Celle-ci est nécessaire à la survie de 84 % des plantes cultivées en Europe et améliore les rendements à l'échelle mondiale de 20 % à 30 % en moyenne.
La reconnaissance des services environnementaux rendus par l'apiculture étant essentielle, il convient de mentionner explicitement cette activité dans le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Tout le monde aime les abeilles et connaît leur rôle irremplaçable. Pour autant, si l'on commence à énumérer toutes les espèces qui sont des indicateurs de bonne santé en matière de biodiversité, nous n'avons pas fini, car la liste est longue... (Marques d'approbation au banc des commissions.)
Par ailleurs, ces amendements sont satisfaits. En effet, aux termes de l'article L.311-1 du code rural et de la pêche maritime, « sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation ».
Cet article répond pleinement à la préoccupation qui est exprimée au travers de ces amendements et à laquelle nous souscrivons tous : la préservation des abeilles. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 613 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 528 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié, présenté par MM. Daubet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Compléter cet alinéa par les mots :
et d'entretien des paysages
La parole est à M. Raphaël Daubet.
M. Raphaël Daubet. Cet amendement a pour objet de préciser et compléter les finalités de la politique menée en faveur de l'agriculture et de l'alimentation. À cette fin, il vise à citer explicitement l'objectif « d'entretien des paysages », externalité incontournable au croisement de plusieurs politiques publiques incluant le tourisme, le cadre de vie et la sécurité incendie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'article 8 du projet de loi, relatif aux orientations programmatiques en matière d'installation des agriculteurs et de transmission des exploitations, dont l'objet est notamment de « maintenir un nombre d'exploitants agricoles suffisant sur l'ensemble du territoire pour répondre aux enjeux d'aménagement du territoire, d'accessibilité, d'entretien des paysages, de biodiversité et de gestion foncière ». Peut-être cette rédaction vous conviendra, mon cher collègue.
C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. J'inverse la charge de la preuve : c'est parce qu'il y a des activités agricoles que les paysages sont entretenus. En effet, leur entretien est non pas l'une des finalités de ces activités, mais leur conséquence. Aussi, tous ceux qui considèrent que l'élevage est mauvais pour l'environnement, pour la santé humaine, ou que sais-je encore, compromettent la beauté et l'entretien de nos paysages !
Pour cette raison, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement. Pour autant, je vais simplement en demander le retrait, car, comme l'a rappelé M. le rapporteur, l'entretien des paysages est déjà reconnu, notamment à l'alinéa 27 de l'article 1er de ce projet de loi.
M. Raphaël Daubet. Je retire l'amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié est retiré.
L'amendement n° 693, présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …°D'accompagner les agriculteurs pour limiter l'utilisation de produits phytosanitaires, d'engrais de synthèse et d'intrants chimiques ;
La parole est à M. Guillaume Gontard.