M. le président. Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable à l'ensemble des amendements en discussion commune.
Je mets aux voix l'amendement n° 714 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 300 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 301 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 99 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° En orientant les politiques alimentaires, dans le respect de la programmation pluriannuelle de l'agriculture française, de la stratégie nationale pour la biodiversité et de la stratégie nationale bas carbone définie à l'article L. 222-1 B du code de l'environnement ;
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement de Henri Cabanel a pour objet de remédier à une omission dans les différentes finalités des politiques traduisant les priorités en matière de souveraineté alimentaire, en y ajoutant le respect de la stratégie nationale bas-carbone, aux côtés de la stratégie nationale pour la biodiversité.
M. le président. L'amendement n° 565, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 30
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° D'orienter les politiques alimentaires, dans le respect de la stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat définie au III de l'article L. 1, de la stratégie nationale bas carbone définie à l'article L. 222-1 B du code de l'environnement et de la stratégie nationale pour la biodiversité ;
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à préciser que les politiques alimentaires doivent être orientées de manière à atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat (Snanc), comme dans le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, mais aussi la stratégie nationale bas-carbone, ainsi que la stratégie nationale pour la biodiversité, largement absente, afin de reconnaître le rôle essentiel de ces dernières dans l'engagement de l'indispensable transition environnementale.
À l'heure où la filière bio connaît une crise sans précédent, plusieurs engagements ont été pris par les pouvoirs publics, dont le déploiement de la stratégie nationale biodiversité 2030, qui en constitue un pan essentiel, puisqu'elle prévoit que la part de la surface agricole utile de la France sera portée à 21 % à l'horizon 2030, contre 10 % actuellement.
Il nous paraît nécessaire d'intégrer ces politiques publiques à l'article 1er pour refléter l'importance de ces piliers fondamentaux de la politique environnementale.
Il s'agit là, bien entendu, d'un élément central pour notre souveraineté alimentaire. En effet, lorsque nous aurons perdu l'ensemble des pollinisateurs, c'est 30 % de notre production qui disparaîtra également !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 99 rectifié, qui est satisfait par l'article L. 4 du code rural et de la pêche maritime que nous n'avons pas modifié.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 565, la stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat étant l'objet du III de l'article L. 1 du même code, que nous n'avons pas modifié non plus.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Les dispositions de l'amendement n° 99 rectifié recoupent celles de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et Résilience. Par définition, la Snanc tient compte des objectifs climatiques. Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Monsieur Salmon, l'amendement du Gouvernement prenait en compte votre proposition, puisqu'il avait pour objet d'intégrer l'ensemble des actions à conduire dans le cadre de la politique de l'alimentation tout en contribuant à un objectif plus global de souveraineté alimentaire. Cette politique a notamment pour finalité d'assurer à la population l'accès à une alimentation sûre, saine, diversifiée, produite de façon durable. Hélas, le rapporteur et la majorité de cette assemblée se sont prononcés défavorablement sur notre amendement.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 565.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. La France est tout de même assez cynique : l'alinéa 24 mentionne le principe de réciprocité, alors que nous continuons à exporter, à hauteur d'à peu près 7 000 tonnes par an, des pesticides interdits dans le monde entier, produits dans des usines bien françaises et provoquant des rejets très importants dans nos eaux – des articles sont parus sur le sujet.
On envoie des pesticides interdits à l'autre bout du monde, notamment au Brésil, et, quand on importe des produits issus de ces pays, on se dit surpris de récupérer des résidus… Et que dire des populations que l'on empoisonne !
Avant de parler de principe de réciprocité, il faudrait déjà commencer par être un peu plus exigeant sur nos exportations ! Ce qui est interdit en Europe ne devrait pas être exporté à l'autre bout du monde. C'est une question de responsabilité.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante.)
M. le président. La séance est reprise.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 727 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Margaté, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 4° De protéger les filières agricoles des concurrences déloyales en utilisant les clauses de sauvegarde activables dans l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce ainsi que dans les accords bilatéraux dont la France ou l'Union européenne sont parties, sans exclusion d'autres dispositifs dérogatoires au droit de la concurrence,
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Par cet amendement, nous proposons d'utiliser tous les instruments disponibles pour protéger les filières agricoles des concurrences déloyales.
M. le président. L'amendement n° 563, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 4° De veiller à garantir que les produits alimentaires issus d'importations respectent les normes sociales, sanitaires, environnementales et relatives au bien-être animal en vigueur dans l'Union européenne ;
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à renforcer la rédaction de l'alinéa 24, qui reste insuffisamment ambitieuse au regard des enjeux de protection des agriculteurs contre la concurrence déloyale des produits importés moins-disants d'un point de vue social, environnemental et sanitaire.
Alors que les normes de production dans les pays tiers autorisent des produits interdits dans l'Union européenne – pesticides, hormones de croissance, etc. –, dans un contexte de hausse des importations et alors que la protection des consommateurs est essentielle, la mise en place de mesures miroirs à l'échelle européenne est plus que nécessaire.
Je sais que cette nécessité fait consensus sur l'ensemble de nos travées, à la réserve près de nos exportations de pesticides interdits, que je viens d'évoquer.
Cet amendement vise à ce que la politique agricole se dote d'outils permettant de garantir que les produits alimentaires issus d'importations respectent les normes sociales, sanitaires, environnementales et relatives au bien-être animal en vigueur dans l'Union européenne.
Alors que la nécessaire mise en place des mesures miroirs à l'échelle européenne annoncée par le Gouvernement ne semble pas se concrétiser, il est essentiel de réaffirmer l'importance de cet objectif.
M. le président. L'amendement n° 718, présenté par MM. Lahellec et Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 24
1° Au début
Insérer une phrase ainsi rédigée :
De promouvoir la reconnaissance d'une exception agricole dans les négociations commerciales internationales, fondée sur l'importance essentielle de l'agriculture pour les sociétés humaines et la nécessité de préserver la diversité alimentaire et agricole ainsi que celle des écosystèmes, notamment avec l'arrêt de la conclusion d'accords de libre-échange et
2° Après les mots :
libre-échange
Insérer les mots :
au rétablissement de mécanismes de régulation publics des marchés agricoles au niveau européen et international,
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Les biens alimentaires ne sont pas des biens comme les autres.
Dans le terme « agriculture », il y a « culture », et, comme la culture, l'agriculture ne doit pas être une simple marchandise ! C'est l'un des piliers de notre souveraineté.
Néanmoins, je ne veux pas refaire maintenant le débat que nous avons eu hier soir, notamment à propos du poulet brésilien. C'est la raison pour laquelle je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 718 est retiré.
L'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Remplacer le mot :
comparables
par les mots :
n'allant pas au-delà des exigences minimales des normes européennes
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement a pour objet de préciser que des accords de libre-échange ne peuvent être conclus s'ils ne respectent pas les exigences minimales des normes européennes et françaises, notamment en matière environnementale, sociale et sanitaire, afin qu'ils n'apportent pas une concurrence déloyale à nos agriculteurs en permettant l'écoulement de denrées qui ne respectent pas les méthodes de production européennes et françaises.
Cette précision apportée aux dispositions prévues à l'article 1er sur les accords de libre-échange semble essentielle dès lors que la Commission européenne s'apprête à faire ratifier par le Parlement son accord sur le Mercosur.
Je rappelle, d'ailleurs, que le RDSE a déposé, au mois d'octobre 2024, une proposition de résolution visant à réaffirmer et à clarifier son opposition ferme à la conclusion de cet accord, négocié dans la plus grande opacité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. L'alinéa 24 affirme déjà tout ce que réclament les auteurs de ces amendements. Je ne vois donc pas l'intérêt d'en rajouter.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. À l'alinéa 24, il est déjà question d'un degré élevé d'exigence en matière de normes sociales, environnementales, sanitaires, relatives au bien-être animal, toujours plus protectrices envers les consommateurs et préservant des modèles et des filières agricoles.
Je crois, comme M. le rapporteur, que tout est dit.
La rédaction issue de la commission des affaires économiques me semble à la fois opérationnelle et lisible.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. Vincent Louault. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 805, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Remplacer les mots :
en luttant
par les mots :
en contribuant à la lutte
La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Je propose une légère modification afin de rendre le texte conventionnel.
Il s'agit de remplacer « en luttant contre la faim dans le monde » par « en contribuant à la lutte contre la faim dans le monde », considérant que la France ne peut à elle seule garantir la sécurité alimentaire mondiale et lutter contre la faim dans le monde.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. L'amendement n° 417 rectifié ter, présenté par MM. Montaugé et Tissot, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 25
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° D'organiser un maillage territorial d'abattoirs de proximité sur le territoire national pour chaque filière d'élevage concernée, en soutenant notamment le développement de structures multi-espèces ;
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Cet amendement vise à préciser les finalités de nos politiques publiques agricoles, en abordant la question de la présence des abattoirs dans nos territoires.
Face à l'évolution des besoins, il est essentiel d'investir dans la rénovation et la restructuration de ces infrastructures pour qu'elles restent viables, fonctionnelles et adaptées aux défis de demain.
Des démarches de ce type sont en cours, comme dans mon département, à Auch. Elles devraient être soutenues dans l'ensemble du territoire national, en particulier dans les territoires de polyculture-élevage.
Je précise que les abattoirs doivent être mono-espèce ou multi-espèces en fonction des élevages que l'on trouve sur les territoires.
Leur rénovation est une condition sine qua non de la poursuite du développement des filières animales, qui concourent également à notre souveraineté nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur, votre demande est légitime, mais satisfaite.
En effet, un plan d'action global pour consolider le maillage en abattoirs de boucherie a été lancé en 2023. Il est actuellement décliné territoire par territoire.
En conséquence, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Les boucheries ne sont pas seules concernées. Pensons aussi aux filières ovine, caprine et porcine. Nous avons intérêt à développer sur le territoire des abattoirs multi-espèces pour répondre aux attentes. Derrière, il y a des emplois.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 417 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 691, présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Supprimer les mots :
techniques et scientifiques
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Comme chacun le sait, notre modèle de développement se trouve à la croisée des chemins : l'évolution économique ne suit plus de manière linéaire le progrès technologique. Je ne vous apprends pas que la croissance est un outil limité…
Face au retard important que nous avons accumulé en matière de protection de l'environnement, il n'est pas viable de limiter nos actions d'adaptation au changement climatique, qui reste le plus grand défi du siècle, à des solutions « techniques et scientifiques », puisque c'est bien à cela que vous le réduisez à l'alinéa 26. Il est totalement illusoire d'envisager une réponse à partir de ces seuls outils !
Par conséquent, nous tenons à supprimer ces deux termes. Évidemment, la technique participera de la solution, mais ne pas prendre en considération l'agroécologie est une vision quelque peu obtuse ! Nous devons adapter nos cultures à la pluviométrie et à l'état de nos sols, ainsi qu'adopter une certaine sobriété. En somme, le technosolutionnisme ne pourra pas suffire. Placer une telle restriction dans notre droit est donc dangereux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. C'est justement grâce à la recherche et à l'innovation que nous pourrons réduire l'usage de certains produits phytosanitaires. Nier cette évidence témoigne d'une vision inexacte de l'avenir de notre agriculture.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Je partage l'idée selon laquelle l'adaptation de l'agriculture au changement climatique doit s'appuyer sur un panel diversifié d'outils. Toutefois, la terminologie retenue par la commission des affaires économiques, à savoir la « recherche de solutions techniques et scientifiques », paraît suffisamment large pour couvrir la diversité des réponses envisagées.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Nous parlons beaucoup de souveraineté. Je pense pourtant que nous sommes en train de l'hypothéquer en embrassant la technologie, d'autant que celle-ci est de plus en plus importée. Imaginez tous ces drones qui fonctionneront à partir de logiciels venus d'autres pays !
Même si, heureusement, nous avons évité les plants génétiquement modifiés, les nouvelles technologies génomiques accroîtront elles aussi la dépendance de notre agriculture. Auparavant, nous réutilisions les semences, à présent, il faut les racheter systématiquement. Nous nous tournons toujours vers des solutions qui nous rendent prisonniers et qui altèrent notre souveraineté !
Nous ne nous opposons pas à la technologie.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ce n'est pas ce que nous avons dit !
M. Daniel Salmon. Certes, celle-ci peut jouer un rôle important, mais nous nous reposons uniquement sur elle et oublions que ce sont les pratiques agronomiques qui nous aideront à surmonter nos handicaps.
Attention à l'abandon de souveraineté en nous jetant dans les bras de la technologie ! (M. le rapporteur fait non de la tête.)
Monsieur le rapporteur, je vois que vous secouez la tête.
Vous souvenez-vous du début de l'invasion de l'Ukraine ? Des tracteurs ont été volés par les Russes avant d'être bloqués peu de temps après parce que le constructeur américain en avait la possibilité.
En outre, nous connaissons des vols de GPS sur les tracteurs. Bientôt, l'agriculture sera dépendante des satellites.
Eu égard au contexte géopolitique, je peux vous assurer que ce constat ne me rassure guère.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Dans mon exploitation, j'utilise la traite robotisée depuis quinze ans. Monsieur Salmon, il faudrait que vous veniez, mon épouse vous en expliquerait le fonctionnement. Elle vous ferait comprendre que lever les bras deux fois par jour pour brancher environ cent vaches aux trayons n'est pas forcément ce que le métier offre de plus passionnant.
Disposer de la technologie de la traite robotisée lui permet de redoubler d'attention envers ses animaux. En effet, elle consacre à ses vaches le temps qu'elle aurait passé au fond de la fosse à brancher les trayons. Ainsi, elle observe leur manière de se comporter et leur apporte tous les soins nécessaires.
La technologie et l'innovation ne doivent pas être niées. Au contraire, elles permettent d'accompagner les éleveurs dans le cœur même de leur métier en diminuant les pratiques répétitives et usantes. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Nous sommes totalement d'accord avec vos propos, monsieur le rapporteur : la technologie doit servir à travailler mieux en réalisant moins d'efforts. En effet, comme vous le reconnaissez vous-même, le problème est que nos agriculteurs travaillent 70 heures par semaine. Une telle situation n'est pas acceptable !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ils ne s'en plaignent pas !
M. Guillaume Gontard. Il faut donc œuvrer à mieux répartir les tâches. Nous pointons précisément du doigt cet état de fait : la technologie doit être accompagnée de changements de pratique.
M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. De toute manière, sur ce sujet, nous ne nous entendrons pas. Comme M. le rapporteur vient de bien l'expliquer en prenant l'exemple de la traite des vaches laitières, la technologie apporte des réponses et c'est valable pour de nombreuses productions.
Les écologistes veulent enlever le mot « scientifiques ». Je les retrouve bien là ! Ils pourront ainsi raconter tout ce qu'ils veulent et faire passer les légendes urbaines pour des vérités. (M. Guillaume Gontard s'exclame.) Au bout du compte, ils porteront atteinte à notre agriculture, qui souffre énormément de ces discours répétés en permanence.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Mon intervention n'aura pas la saveur de celle de M. le rapporteur, qui parlait d'expérience. Je tiens toutefois à mettre en avant à quel point la technique a facilité le travail de nos éleveurs et de nos agriculteurs.
M. Guillaume Gontard. On vient de le dire ! Je vous remercie d'appuyer nos propos, madame la ministre !
Mme Annie Genevard, ministre. Il ne faut pas adopter une vision antitechniciste, qui serait selon moi inappropriée.
Je crois énormément aux apports que représenteront à l'avenir les technologies.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Bien sûr !
Mme Annie Genevard, ministre. De fait, il existe déjà des dispositifs qui permettent par leur précision de réaliser des économies de consommation d'intrants phytopharmaceutiques, sur lesquels vous exprimez souvent votre préoccupation, messieurs Gontard et Salmon. Ces outils répandent le produit de manière parcimonieuse aux endroits qu'il faut. L'arrachage mécanique est également une technique d'avenir.
En revanche, si vous demandez l'origine des technologies agricoles dans quelque exploitation que ce soit, vous découvrirez – je le concède – qu'elle est souvent étrangère. Nous avons perdu de la souveraineté en la matière (M. Guillaume Gontard acquiesce.) et pouvons d'autant plus le déplorer que je suis convaincue que la technique sera amenée à se développer plus encore.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je vais me faire un peu plaisir... (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Laissez-moi vous expliquer pourquoi l'association de la technologie, de la robotisation et de l'innovation à l'expérience de l'éleveur permet à tout le monde d'y gagner.
Dans une salle de traite traditionnelle, lorsqu'une vache est atteinte de mammite, c'est-à-dire d'une infection de la mamelle, la maladie est constatée lors de l'apparition des signes cliniques de l'infection, à savoir au moment où l'on tire le lait et que l'on y trouve des caillots. Il faut alors se débarrasser de ce liquide impropre à la consommation humaine, et ce tant que la vache lutte contre la maladie.
La traite robotisée permet d'intervenir bien avant l'apparition des signes cliniques, et pour une raison simple : la traite robotisée a ceci de particulier que la vache se rend d'elle-même à la machine. Comme nous, lorsque nous commençons à souffrir d'un rhume ou d'une grippe, si elle est malade, la vache limite ses déplacements ou reste couchée. Le matin, en voyant sur son ordinateur que telle vache n'est pas passée dans le robot, mon épouse lui portera une attention toute particulière. Dans une salle de traite traditionnelle, elle ne s'en rendrait compte que le lendemain ou le surlendemain, une fois que seraient apparus les signes cliniques.
Voilà donc les avantages de l'expérience, de la robotisation et de l'innovation. Il faut non pas les opposer, mais trouver, au contraire, tous les moyens de les exploiter au maximum. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Vincent Louault et Bernard Buis applaudissent.)
M. Laurent Burgoa. Très bien !
M. Roger Karoutchi. Bravo !
M. Jean-François Husson. On sent le vécu !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je n'aurais jamais pensé parler de mes vaches dans l'hémicycle…
M. le président. L'amendement n° 302 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Après les mots :
techniques et scientifiques
insérer les mots :
de lutte et
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à compléter l'alinéa 26, en indiquant que la recherche de « solutions techniques et scientifiques » doit participer tout autant à l'« adaptation au changement climatique » qu'à la lutte contre ce phénomène.
Ce faisant, il s'agit de préciser que notre agriculture doit contribuer, au même titre que d'autres pans de notre économie, à la lutte contre le changement climatique et à l'atténuation de ses effets.
Selon nous, cette précision, qui peut apparaître à la marge, reflète l'attitude que nous devons adopter face au changement climatique actuel : soit nous adoptons une attitude passive, qui aurait l'adaptation pour seul objectif, soit nous choisissons une attitude plus active, en recherchant des solutions pour lutter contre ce changement et en atténuer les conséquences.
À titre d'illustration, le virage agroécologique de notre agriculture, que nous appelons de nos vœux, serait une solution active.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. (Marques de surprise feinte sur les travées du groupe SER.)
L'agriculture s'est toujours adaptée aux évolutions du climat, quelle qu'ait été leur nature.
Lutter, c'est résister à un phénomène négatif. Or le changement climatique ne va pas s'opérer de manière identique sur l'ensemble du territoire.
Chez moi, à 850 mètres d'altitude, le changement climatique élargit les périodes de culture et améliore les stocks fourragers, apportant ainsi une solution à un problème qui s'est posé pendant des siècles. Rappelez-vous qu'au début du XIXe siècle il arrivait que des agriculteurs perdent leurs vaches en pleine sécheresse, car ils n'avaient plus les moyens de les nourrir !
Je suis issu d'un territoire où, il fut un temps, il fallait couper les branches des frênes et récupérer leurs feuilles pour éviter que les vaches ne meurent de faim ! Aujourd'hui, plus personne ne grimpe aux arbres pour nourrir ses troupeaux !