M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je le répète : je ne suis pas favorable à l'amendement n° 800.

Premièrement, il est inutile de proposer une nouvelle définition de l'agriculture, puisqu'elle existe déjà, depuis des décennies, à l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime.

Mme Annie Genevard, ministre. Ce n'est pas la même chose !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Deuxièmement, l'amendement du Gouvernement ne mentionne pas le principe de non-régression, inclus dans notre rédaction. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter l'amendement n° 905. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. En ce qui concerne la non-régression économique, vous devez choisir, mesdames, messieurs les sénateurs, entre un principe incertain à faible assise constitutionnelle, d'une part, et l'assurance d'une déclinaison opérationnelle, d'autre part.

En effet, la notion de non-régression économique figure dans l'amendement n° 908, qui porte sur les conférences de la souveraineté alimentaire. Par conséquent, la raison devrait l'emporter : la certitude opérationnelle devrait être préférée à l'hypothèse de principe.

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. Monsieur le président, quels sont les dix-huit amendements qui seraient sans objet en cas d'adoption de l'amendement n° 905 ? En effet, faute de transparence, il est difficile de se déterminer.

Monsieur le rapporteur, au sujet de l'amendement n° 420 rectifié ter, que je défendais hier, vous disiez que la transition agroécologique était déjà mentionnée dans le projet de loi, m'invitant à un retrait. Cependant, au regard de la Constitution et vu l'orientation prise par le texte, je réaffirme l'importance du contexte général et européen, ainsi que de nos engagements en la matière. Je vous appelle donc à le voter.

M. le président. Mon cher collègue, si les amendements identiques nos 289 rectifié ter et 905 étaient votés, les amendements portant sur les alinéas 2 à 5 de l'article 1er deviendraient sans objet, c'est-à-dire l'ensemble des amendements suivants jusqu'à l'amendement n° 420 rectifié ter inclus. Le prochain amendement qui serait mis aux voix serait donc l'amendement n° 689 de M. Gontard.

La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. La notion de souveraineté alimentaire me semble juridiquement très précaire. Je me bornerai à prendre la parole sur la robustesse juridique des amendements que nous allons voter.

De ce seul point de vue donc, l'amendement gouvernemental est plus solide, en ce sens qu'il mentionne l'agriculture, la pêche et l'aquaculture, qu'il faut aussi développer. Ne prenons pas le risque de dresser un parallèle entre la souveraineté alimentaire et l'environnement, lequel est consacré au niveau constitutionnel.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.

M. Christian Redon-Sarrazy. Compte tenu de la confusion qui règne depuis hier soir, nous avons du mal à nous y retrouver… Les arguments que vient d'exposer Mme la ministre nous semblent plus pertinents que ceux du rapporteur.

Nous retirons donc l'amendement n° 289 rectifié ter, identique à l'amendement n° 905 de la commission.

M. le président. L'amendement n° 289 rectifié ter est retiré.

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Depuis hier soir, et l'arrêt un peu brutal de la séance – il faut se remettre dans le texte… –, le flou persiste : il est révélateur de l'article 1er et du flou juridique de ses dispositions que nous avons dénoncé. C'est le sens de l'amendement que j'ai déposé, lequel tendait à revenir à des notions juridiques plus claires.

Je m'étonne cependant du fait que la majorité gouvernementale, dont je pensais que M. Duplomb faisait partie, n'ait pas davantage débattu en amont. Nous avons l'impression de faire le texte d'une loi d'orientation agricole attendue depuis longtemps. Madame la ministre, vous êtes en poste depuis quatre mois : je pensais que ces discussions avaient eu lieu, et que les arbitrages avaient été faits. Cette méthode de travail m'inquiète quelque peu.

M. Michel Savin. C'est vrai.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Nous sommes tous d'accord pour dire que la discussion est difficile à suivre. Cependant, si j'ai bien compris les arguments des uns et des autres, je pencherai moi aussi en faveur des arguments de Mme la ministre. Mon groupe votera donc l'amendement n° 800 du Gouvernement.

Compte tenu des explications apportées par Mme la ministre, je retire mon amendement n° 88 rectifié.

M. le président. L'amendement n° 88 rectifié est retiré.

La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Hier soir, Laurent Duplomb nous invitait à lui faire confiance : cela aurait plutôt l'effet inverse chez moi... (Sourires.)

En réalité, je constate que le rapporteur et Mme la ministre ont tous les deux raison.

Je propose de voter l'amendement n° 905 du rapporteur. Par la suite, madame la ministre, peut-être aboutirons-nous, en examinant l'amendement n° 907, à une réécriture satisfaisante pour tous, que ce soit au travers de mes sous-amendements à ce dernier amendement ou de ceux que vous pouvez encore déposer.

En vue de la commission mixte paritaire, il est important de trouver un accord et de sortir de l'ornière. Je vous invite, mes chers collègues, à regarder les amendements nos 905 et 907 : ils sont très liés.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Dans ce flou terrible, il nous reste quelques certitudes. En particulier, on ne mesure pas la portée exacte des notions juridiques d'intérêt général majeur ou d'intérêt fondamental de la Nation.

Nous voterons donc contre les amendements mentionnant ces notions, tout comme celle de la non-régression de la production, pour éviter d'être conduits vers de terribles problématiques, sur lesquelles nous pourrons revenir. Nous défendons, en revanche, la notion de souveraineté alimentaire définie par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

J'espère que les conditions actuelles d'examen de ce texte ne présagent pas de la suite. Sinon, je crains que nous ne soyons pas au bout de nos peines…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Franck Menonville, rapporteur de la commission des affaires économiques. Au-delà des éléments sémantiques,…

Mme Annie Genevard, ministre. Juridiques !

M. Franck Menonville, rapporteur. … la non-régression de la souveraineté alimentaire est un principe fondamental qui doit être inscrit à l'article 1er. Cela permettra de consolider l'édifice que nous sommes en train de bâtir.

En conséquence, je vous invite à voter l'amendement n° 905, mes chers collègues.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. À quoi assiste-t-on ici, sinon à un clivage entre la droite et la gauche ? (Eh oui, une fois de plus ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

D'une part, la droite veut dire stop aux difficultés vécues par les agriculteurs. En érigeant l'agriculture en intérêt fondamental de la Nation, en reconnaissant que l'agriculture, la pêche et l'aquaculture sont d'intérêt général majeur et en consacrant le principe de non-régression de la souveraineté alimentaire, nous leur disons : « On vous a compris ! » (Nous aussi, nous les comprenons ! sur les travées du groupe SER.)

D'autre part, le groupe SER a déposé un amendement visant à supprimer ces trois axes,…

M. Franck Montaugé. Quid de Mme la ministre ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. … objet que reprend d'ailleurs le Gouvernement à l'amendement n° 800.

Le problème est simple, mes chers collègues : vous ne voulez pas de la non-régression ! (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Vous craignez que ce principe, qui a produit tellement d'effets d'un point de vue environnemental, entraîne des conséquences inverses dans le domaine de la souveraineté alimentaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Je ne fais pas tout à fait mienne l'analyse du rapporteur sur l'existence d'un clivage droite-gauche (Exclamations et applaudissements sur les travées du groupe SER.),…

M. Patrick Kanner. Bienvenue au club !

Mme Annie Genevard, ministre. … sauf à considérer que j'aurais changé d'appartenance politique sans le savoir. (Sourires.)

M. Michel Savin. On a eu peur !

Mme Annie Genevard, ministre. Je ne m'exprime pas au nom d'une quelconque appartenance politique, je suis là pour défendre un texte sur les agriculteurs et pour les agriculteurs. (Nous aussi ! sur les travées du groupe SER.)

La question de la non-régression de la souveraineté alimentaire est fondamentale, messieurs les rapporteurs. Sur le fond, il n'y a pas l'épaisseur d'un papier à cigarette entre nous.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Si, tout de même !

Mme Annie Genevard, ministre. Non, c'est une question de droit et nous sommes ici pour faire le droit.

J'ai déjà exposé la raison juridique pour laquelle il nous semblait peu solide d'introduire le principe de non-régression là où vous souhaitiez le faire figurer.

Je rappelle que cette notion sera très spécifiquement évoquée à l'alinéa 15, qui concerne les conférences de la souveraineté alimentaire, si l'amendement n° 908 du Gouvernement est adopté : « L'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer – FranceAgriMer –accompagne les interprofessions et les filières afin qu'elles définissent une stratégie assortie d'objectifs, notamment de production, à horizon de dix ans, en vue de l'amélioration de la souveraineté alimentaire de la Nation, ou tout du moins d'assurer sa non-régression. »

La notion de non-régression figurera bel et bien dans le texte, de façon opérationnelle, et non principielle, le principe étant mal assis juridiquement.

Je pense avoir été suffisamment claire et je ne reprendrai plus la parole sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il est important de bien comprendre la situation.

Selon Mme la ministre, il est préférable de ne pas introduire des éléments dans un article qui présente des risques d'un point de vue juridique. En réalité, nous répondons à la question qu'elle a soulevée.

À nos yeux, inscrire le principe de non-régression à l'article 1er a du sens. Si, toutefois, nous avions tort et que nous compromettions la portée juridique des dispositions concernées, le principe de non-régression figurera bien dans le texte puisque celui-ci mentionne les conférences de la souveraineté alimentaire.

En d'autres termes, vous pouvez voter l'amendement de la commission sans hésiter, car, même si nous commettons une erreur, celle-ci n'aura aucune conséquence. Bref, c'est ceinture et bretelles !

Mme Annie Genevard, ministre. L'arrachage de vignes ne sera plus possible !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. On pourra toujours procéder à des ajustements en commission mixte paritaire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 905.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 656 rectifié quater, 713 rectifié, 686, 800, 728 rectifié et 290 rectifié ter, les amendements identiques nos 253 rectifié bis et 793 rectifié, les amendements nos 291 rectifié ter et 228 rectifié ter, les amendements identiques nos 52 rectifié bis, 178 rectifié ter, 202 rectifié et 268 rectifié ter, ainsi que les amendements nos 292 rectifié ter, 293 rectifié ter et 420 rectifié ter n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 689.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois sous-amendements à l'amendement n° 908, présenté par le Gouvernement, dont je rappelle les termes :

Alinéas 15 à 18

Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :

« Des “Conférences de la souveraineté alimentaire”, réunissant les représentants des filières siégeant dans les conseils spécialisés mentionnés à l'article L. 621-5 et des organisations interprofessionnelles reconnues mentionnées à l'article L. 632-1 sont organisées en 2026 sous l'égide de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) mentionné à l'article L. 621-1.

« L'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer accompagne les interprofessions et les filières afin qu'elles définissent une stratégie assortie d'objectifs, notamment de production, à horizon de dix ans, en vue de l'amélioration de la souveraineté alimentaire de la Nation, ou tout du moins d'assurer sa non-régression.

« Ces travaux font l'objet d'une synthèse présentée lors d'une “Conférence nationale de la souveraineté alimentaire”, présidée par le ministre chargé de l'agriculture. Cette synthèse est accessible au public. Elle est actualisée au moins une fois tous les dix ans.

« Chaque année, l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer publie un rapport sur le niveau de réalisation des objectifs figurant dans la synthèse mentionnée au précédent alinéa. Ce rapport est public et remis au Parlement.

« Chaque stratégie par filière fait l'objet d'un rapport à mi-parcours. Ce rapport analyse les éventuelles raisons de l'écart aux objectifs déterminés dans la stratégie de la filière et formule des recommandations. Ces documents sont remis au ministre chargé de l'agriculture.

« Le ministre chargé de l'agriculture peut convoquer une nouvelle “Conférence nationale de la souveraineté alimentaire”, notamment s'il constate des écarts significatifs à la trajectoire dans plusieurs filières. » ;

Le sous-amendement n° 914 rectifié, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 908, alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle comporte une annexe spécifique relative aux filières des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi que de la Nouvelle-Calédonie.

Le sous-amendement n° 915 rectifié, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 908, alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Une synthèse, produite par l'Établissement national de produits de l'agriculture et de la mer, est remise au Parlement.

Le sous-amendement n° 913, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Amendement n° 908

Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

« En amont des négociations du cadre financier pluriannuel de l'Union européenne, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les priorités françaises compte tenu des stratégies de filières élaborées dans le cadre de la “Conférence nationale de la souveraineté alimentaire”. » ;

La parole est à M. le rapporteur, pour les présenter.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous sommes prêts à soutenir l'amendement n° 908, déposé par le Gouvernement, pourvu que nous puissions y apporter quelques corrections.

Conformément aux vœux de Mme la ministre, la commission a modifié les sous-amendements nos 914 et 915, désormais 914 rectifié et 915 rectifié. Je ne reviendrai pas sur le sous-amendement n° 913, qui reste inchangé et dont j'ai présenté l'objet hier soir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Je remercie la commission d'avoir rectifié les sous-amendements nos 914 et 915, à la demande du Gouvernement. Dans ces conditions, il émet un avis favorable.

Le sous-amendement n° 913, qui n'a pas été modifié, vise à informer le Parlement sur la manière dont le Gouvernement tiendra compte, dans le cadre de la PAC, des objectifs issus de la conférence nationale de la souveraineté alimentaire.

Ce dispositif n'est absolument pas réaliste à court terme, puisque la Commission européenne présentera très bientôt le prochain cadre financier pluriannuel. Les conférences de la souveraineté alimentaire ne seront mises en place qu'à partir de 2026, soit un an après cette présentation.

En outre, nous sommes déjà engagés dans la définition de la nouvelle PAC, qui prendra effet en 2027. Votre proposition n'est donc pas applicable.

Pour l'ensemble de ces raisons, comme il l'a fait hier, le Gouvernement demande le retrait du sous-amendement n° 913 ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Franck Menonville, rapporteur. On ne va jamais avancer !

M. Vincent Louault. Les bras m'en tombent !

À l'heure où nous souhaitons remettre de l'ordre dans les agences et les offices de l'État, on renforce ces instances et on affaiblit les services centraux, notamment la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE), qui fait pourtant la fierté du ministère de l'agriculture.

Ce n'est pas acceptable, d'autant que l'on n'a cessé de dévitaliser ce ministère au cours des douze dernières années – depuis l'entrée en fonction d'un certain ministre...

Dans des rapports restés secrets, certains responsables ont envisagé de découper le ministère en deux, une partie devant être confiée à la puissante direction générale des entreprises (DGE) de Bercy, une autre devant être cédée au ministère de l'environnement.

Par son amendement, le Gouvernement porte atteinte à la beauté de ce qu'était le ministère de l'agriculture en 1961, du temps d'Edgard Pisani. (Exclamations au banc des commissions.)

Je vous invite à lire les écrits d'Yves Tavernier sur l'histoire du ministère de l'agriculture. Edgard Pisani a entièrement configuré toutes les politiques dont nous sommes en train de parler. Les hauts fonctionnaires du ministère, qui étaient à l'époque les plus puissants, s'étaient d'ailleurs mis en grève pour protester, ce qui avait conduit à l'éviction du ministre.

Toutes ses politiques ont été mises en place ultérieurement par l'ensemble des ministres qui se sont succédé.

Pour ma part, je voterai contre cet amendement.

On a bousillé la DGPE au point qu'elle finira par devenir un bureau de la performance : elle n'aura plus aucune dimension économique et assurera seulement des missions environnementales. Elle ne sera même plus une direction, en dépit de la place qui lui a été faite dans l'histoire du ministère. Celui-ci était tout de même appelé le « petit Matignon », compte tenu de son importance et des compétences régaliennes qu'il exerçait.

Les agriculteurs nous observent. Étant donné le passif du ministère, notamment les 1,2 milliard d'euros d'amendes du service juridique qui ont été cachés aux ministres au fil des ans, il est temps d'y mettre de l'ordre !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 908, qui vise à réécrire les alinéas 15 et 18. Encore une fois, à la demande du Gouvernement, nous avons trouvé une écriture de compromis et avons rectifié nos deux premiers sous-amendements.

Nous prenons acte de l'avis défavorable du Gouvernement sur le sous-amendement n° 913 et c'est pourquoi nous le retirons.

Mme Annie Genevard, ministre. Merci.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. En conséquence, mes chers collègues, nous vous appelons à voter l'amendement du Gouvernement, modifié par les sous-amendements nos 914 rectifié et 915 rectifié.

M. le président. Le sous-amendement n° 913 est retiré.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Je vous remercie de cette position de bon sens, monsieur le rapporteur.

Monsieur Louault, l'établissement FranceAgriMer est composé de conseils spécialisés. Les conférences de la souveraineté alimentaire, que nous n'avions pas songé à introduire dans le texte lors de son examen à l'Assemblée nationale, ont ceci d'original qu'elles partent de la base, c'est-à-dire des producteurs et des professionnels.

Ce sont eux qui, via la DGPE, elle-même membre de FranceAgriMer, travailleront à définir une stratégie pour améliorer la souveraineté alimentaire des filières.

Je précise que l'établissement FranceAgriMer est présidé par un producteur de betteraves sucrières. Ce n'est donc pas un outil technocratique ou hors-sol : au contraire, il a été conçu par des professionnels, pour des professionnels ! Interrogez-les !

C'est à eux que nous demandons d'animer les conférences de la souveraineté alimentaire. Plus encore, nous leur demandons de les nourrir, de se les approprier et de proposer eux-mêmes une définition de la souveraineté alimentaire.

On ne procède à aucun démantèlement, monsieur le sénateur. Quant à la DGPE, qui constitue l'un des grands services du ministère, elle est entièrement associée aux travaux conduits par les professionnels.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. L'amendement du Gouvernement est intéressant, car il semble s'inspirer de l'esprit initial des États généraux de l'alimentation. C'est une bonne chose.

À l'origine, il était prévu de négocier les plans de restructuration et de production filière par filière. Cela s'est révélé trop lourd. Le dispositif devant être modifié, nous voterons cet amendement.

Lors de l'examen de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », j'ai alerté la ministre sur la nécessité d'accompagner financièrement les filières qui font l'objet d'une restructuration profonde, notamment celles qui sont organisées en coopératives – la viticulture, par exemple.

Bien que cette question soit sans lien avec l'objet du texte que nous examinons, je renouvelle mon appel, en particulier pour la viticulture organisée en coopératives, qui a besoin d'un accompagnement financier et dont le plan de restructuration s'inscrit parfaitement dans le dispositif proposé par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Les explications de la ministre n'ont fait que renforcer mes inquiétudes !

Nous allons confier aux filières la politique agricole de la France. C'est assez symptomatique de la façon dont se déroulent nos débats depuis le début de l'examen de ce texte : on formule des grands principes – notamment celui d'une non-régression de la souveraineté alimentaire –, qui, pour une bonne partie d'entre eux, sont erronés et ne s'appuient que sur des réalités partielles.

Plutôt que de confier l'orientation de l'agriculture aux filières, ce qui est très dangereux, il faut renforcer le rôle du Parlement, comme le texte le prévoyait dans sa première mouture.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Trop de filières ici, trop d'intervention de l'État là… Il va être difficile de réconcilier vos points de vue ! (M. Vincent Louault s'exclame.)

Les parlementaires sont-ils plus légitimes à parler de production que les producteurs ? (Marques de désapprobation sur plusieurs travées. – Rires au banc des commissions.) Sans doute, à moins qu'ils ne soient eux-mêmes producteurs – je sais qu'il y en a dans cet hémicycle.

Sachez que l'État ne sera pas absent du dispositif, puisque la DGPE intervient aux côtés de FranceAgriMer, laquelle est chargée, en lien avec les filières, de synthétiser divers travaux.

En ce qui me concerne, je suivrai les travaux conduits dans le cadre des conférences de la souveraineté alimentaire et y participerai. Ceux qui me connaissent le savent. N'ayez donc aucune crainte, monsieur Salmon.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 914 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Aux termes de l'amendement n° 908, « l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer accompagne les interprofessions et les filières afin qu'elles définissent une stratégie assortie d'objectifs, notamment de production, à horizon de dix ans, en vue de l'amélioration de la souveraineté alimentaire de la Nation ».

En clair, on confie notre stratégie en matière de souveraineté alimentaire à FranceAgriMer, alors qu'elle devrait être prise en charge par la DGPE : on marche sur la tête !

J'ignore d'où sort cet amendement du Gouvernement. Que cela vous plaise ou non, il n'est pas normal de retirer au ministère de l'agriculture la mise en œuvre de cette stratégie.

Je vous invite à méditer un seul exemple, madame la ministre. Il y a quinze ans, la filière du blé dur était exemplaire. Pourtant, les agriculteurs ont créé un oligopole dénommé Durum, qui assure désormais 99 % de la production de blé dur français. Ils ont fini par bousiller 60 % de cette production, parce qu'ils ont préféré importer le blé du Canada, vendu 30 % moins cher.

Bref, si nous laissons faire les filières, nous ne sommes pas sortis de l'ornière !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 915 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 908, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 740 rectifié, les amendements identiques nos 111 rectifié ter, 405 rectifié ter et 717, ainsi que l'amendement n° 298 rectifié ter n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 801, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

, et, pour cela, en facilitant l'installation, la transmission et la reprise d'exploitations

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Je l'ai dit lors de la discussion générale, je partage la position des sénateurs sur l'architecture globale de l'article 1er. En particulier, j'approuve leur volonté de compiler les éléments relatifs à l'installation et à la transmission au sein du titre III qui leur est spécifiquement consacré.

Je suis également favorable à l'idée de condenser l'écriture des priorités concernant les politiques en faveur de la souveraineté alimentaire.

Néanmoins, il me semble essentiel de compléter la première priorité. Ainsi, cet amendement vise à repositionner l'installation, la transmission et la reprise d'exploitations parmi les priorités des politiques en faveur de la souveraineté alimentaire, en lien avec le renouvellement des générations d'actifs.

Aux termes de l'article 1er, la souveraineté alimentaire a pour priorités « d'assurer la pérennité et l'attractivité de l'agriculture ainsi que le renouvellement de ses générations d'actifs ». C'est la raison pour laquelle nous proposons de faciliter et d'encourager l'installation et la transmission des exploitations agricoles, conformément à l'objectif à dix ans que nous nous sommes fixé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La ministre semble approuver la logique qui a prévalu à l'élaboration du texte de la commission. Nous souhaitons en effet clarifier un texte qui contenait, lorsqu'il nous est parvenu, beaucoup d'éléments et d'explications.

Nous avons initialement souhaité définir quatre grandes priorités, notamment le renouvellement des générations d'agriculteurs. Il s'agit bien d'une politique d'orientation, puisque l'article 1er a un caractère programmatique.

Le dispositif est redondant avec l'article 8, qui a trait aux politiques publiques liées à l'installation et à la transmission des exploitations.

L'Assemblée nationale a voté un texte, tout comme nous serons amenés à le faire d'ici quelques jours. Nous aurons l'occasion, lors de la commission mixte paritaire, d'améliorer certaines dispositions. En attendant, je vous propose de nous en tenir à la rédaction qui a été adoptée en commission pour rendre ce texte lisible.

Afin que nous puissions conserver un texte sobre, je vous demanderai de voter l'amendement n° 880 que j'ai déposé au nom de la commission, mes chers collègues.