M. Jean-Pierre Moga. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, je connais votre attachement au principe de l’école inclusive et je salue le fait que vous ayez élevé au rang de priorité un meilleur accompagnement à l’école des enfants en situation de handicap. Cette politique est partagée par tous les maires, notamment par ceux des plus petites communes.
Toutefois, l’arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 2020 vient fragiliser une telle politique. En effet, le Conseil d’État considère que c’est à la collectivité locale, et non plus à l’État, d’assurer le financement des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sur le temps méridien et périscolaire.
Dans le Lot-et-Garonne, par exemple, cette évolution s’appliquera au 1er janvier 2022. C’est brutal, surtout pour les plus petites de nos communes, les maires n’ayant été prévenus qu’à la fin du mois de novembre.
Se pose aussi la question de leur capacité à supporter cette nouvelle charge, notamment sur le plan financier. In fine, cette évolution pourrait remettre en cause l’équité territoriale en matière d’accueil des enfants handicapés, qui ne peut dépendre de la seule capacité financière des communes.
Une école réellement inclusive ne peut pas et ne doit pas faire l’impasse sur la continuité des temps scolaires et périscolaires.
Monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il contrer cette jurisprudence du Conseil d’État pour revenir au statu quo ? N’est-il pas possible, au moins, de repousser la mise en œuvre de cette décision du 1er janvier 2022 à la rentrée scolaire de 2023 ? Enfin, peut-on envisager de prendre le temps de clarifier les financements permettant un accompagnement pérenne des élèves en situation de handicap, afin que ceux-ci ne dépendent pas uniquement des communes ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. - M. Alain Richard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Moga, je partage bien entendu la vision que vous avez exposée : nous voulons tous une école inclusive, prenant en compte l’ensemble des temps de l’enfant, c’est-à-dire le temps scolaire et le temps périscolaire.
Une telle école suppose aussi une réalité humaine, car il faut, si possible, que l’AESH soit le même tout au long de la journée, de la semaine, voire de l’année. C’est d’ailleurs l’un des objectifs que nous avons cherché à atteindre en pérennisant le statut des AESH. Pratiquement tous disposent désormais de contrats à durée déterminée ou indéterminée, et non plus de contrats aidés, comme par le passé.
Dans ce contexte et avec cette volonté, l’arrêt du Conseil d’État soulève effectivement des questions particulières.
Bien entendu, je ne saurai le commenter ou le critiquer. Par définition, le Conseil d’État donne un état du droit. Sa lecture est par ailleurs assez cohérente et nul doute que vous respectiez aussi cette décision, monsieur le sénateur, puisqu’il s’agit de tirer les conséquences du fait que les collectivités locales ont la compétence sur le temps méridien. Il est donc assez normal de considérer que l’État est responsable sur le temps scolaire et la collectivité sur le temps périscolaire. Néanmoins, il faut faire en sorte que les conséquences ne soient pas nuisibles pour l’enfant.
Sur un plan strictement juridique, on peut envisager différents montages : un contrat avec l’État, assorti d’une mise à disposition auprès de la collectivité locale ; un contrat avec la collectivité locale, complémentaire du contrat passé avec l’État ; un contrat conjoint avec l’État et la collectivité locale. Cela pourrait engendrer une certaine complexité, mais notre nouvelle organisation au plus près du terrain, à travers les pôles inclusifs d’accompagnement localisés – ou PIAL – me semble à même de nous permettre de trouver des solutions pragmatiques.
Au-delà des enjeux juridiques, il y a bien évidemment des enjeux financiers. Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et moi-même avons la ferme intention de trouver des solutions à ce problème, en concertation avec l’ensemble des représentants des collectivités.
Bien entendu, notre objectif est qu’il n’y ait pas de rupture sur le terrain, y compris au mois de janvier prochain. Aucun enfant ne doit se trouver dans une situation désavantageuse du fait de cette nouvelle définition juridique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Notre prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 15 décembre, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Alain Cadec.
M. Alain Cadec. Monsieur le président, à l’occasion du scrutin public n° 56 portant sur l’ensemble de la proposition de loi interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne, je souhaitais voter pour, ainsi que mon collègue Jean-François Rapin.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
5
Remplacement d’une sénatrice décédée
M. le président. Conformément à l’article 32 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, M. le ministre de l’intérieur m’a fait connaître que, en application de l’article L.O. 320 du code électoral, Mme Amel Gacquerre est appelée à remplacer, en qualité de sénatrice du Pas-de-Calais, Catherine Fournier, décédée le 7 décembre 2021.
Son mandat a débuté le mercredi 8 décembre 2021, à zéro heure.
6
Communication d’un avis sur un projet de nomination
M. le président. En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des affaires économiques a émis, lors de sa réunion de ce jour, un avis favorable – 27 voix pour, 2 voix contre – sur la nomination de Mme Anne-Claire Mialot en tant que directrice générale de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.
7
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
8
Candidature à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
9
Accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer
Discussion d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Union Centriste, de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à l’accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer (proposition n° 490 [2020-2021], texte de la commission n° 248, rapport n° 247).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens d’abord à vous dire mon plaisir d’être parmi vous aujourd’hui et à vous remercier d’avoir inscrit à l’ordre du jour de vos travaux ce sujet qui m’est cher, comme vous le savez peut-être, et auquel personne ne peut rester indifférent.
Nous avons eu l’occasion de débattre régulièrement, dans cet hémicycle comme à l’Assemblée nationale, d’une meilleure prise en charge des enfants malades et de l’accompagnement de leurs familles.
Nous avons ainsi abordé le financement de la recherche sur les cancers pédiatriques et débattu d’un texte, que j’ai défendu en tant que députée, visant à renforcer la prise en charge de ce type de cancers par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels ou encore le droit à l’oubli.
Nous avons été plusieurs à porter au débat national les sujets si nécessaires à l’accompagnement des familles en situation de fragilité. Je pense notamment à Guy Bricout, qui a déposé une proposition de loi visant à instaurer un congé de deuil pour le décès d’un enfant mineur. Je pense aussi à Paul Christophe, dont la proposition de loi est venue corriger quelques écueils du texte que j’avais défendu pour permettre, notamment, le doublement de l’allocation journalière de présence parentale (AJPP). Ces textes ont permis de véritables avancées et amélioré l’accompagnement des malades et de leurs proches.
Je souhaite bien sûr saluer le travail remarquable et l’engagement de Béatrice Descamps et de Jocelyne Guidez, qui ont toutes deux porté le travail parlementaire sur ces textes dans leur assemblée respective.
La proposition de loi visant à l’accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer tend à ouvrir des jours de congé aux parents et à faciliter le parcours de santé et la scolarité des enfants malades.
Sur ce sujet si douloureux, l’éducation nationale n’est pas en reste. Elle prend toute sa part pour accueillir ces élèves et les quelque 11 000 d’entre eux qui sont scolarisés dans des établissements hospitaliers ou sanitaires. Ainsi, des dispositions sont prévues pour permettre aux enfants et aux adolescents dont l’état de santé rend nécessaire l’administration de traitements médicaux particuliers de poursuivre une scolarité dans les meilleures conditions possible. Il s’agit d’ailleurs d’une obligation légale, prévue dans le code de l’éducation.
Des outils précis existent, comme le projet d’accueil individualisé (PAI), qui permet de définir les adaptations nécessaires, telles que l’aménagement des horaires de l’élève, des dispenses de certaines matières et activités ou encore l’organisation des soins.
Les modalités en matière d’examens et de concours des candidats sont définies dans une circulaire de décembre 2020, qui assure une cohérence entre les aménagements de scolarité inscrits dans le PAI et les demandes d’aménagement des épreuves d’examen.
Enfin, nous ne pouvons aborder cette proposition de loi sans évoquer les remarquables progrès enregistrés au cours des dernières années en matière de scolarisation des enfants porteurs d’un handicap, pour une école plus inclusive. Je veux saluer, à cet égard, la politique volontariste de Jean-Michel Blanquer et de ma collègue Sophie Cluzel.
Dans certains cas, les enfants malades ne peuvent pas se rendre en milieu scolaire, parce qu’ils sont hospitalisés ou contraints de rester à leur domicile. Il existe alors plusieurs solutions.
Parfois, c’est l’école qui vient à eux. Ainsi, près de 800 enseignants spécialisés sont affectés dans les hôpitaux ou dans des maisons d’enfants à caractère sanitaire.
À cet instant, je ne peux m’empêcher de penser à l’hôpital d’enfants de Margency, un établissement de soins de suite situé dans le Val-d’Oise, où je suis élue, qui accueille des enfants âgés de quelques semaines à 18 ans. Il héberge en son sein, au milieu d’un magnifique parc, une très belle école, colorée comme toutes nos écoles, à la différence près que les élèves arrivent le matin en classe en fauteuil roulant ou avec une perfusion au bras. Je profite de cette intervention pour les saluer, mais aussi pour saluer et remercier leurs professeurs.
Lorsque les élèves doivent rester à leur domicile, ce sont les enseignants qui viennent à eux afin de leur permettre de conserver un lien avec leur école et leur classe.
Et puis, dans le cadre du programme R2T2, il y a Thymio ou Poppy. Il s’agit ici non pas de programmes visant à vous envoyer sur Mars ou sur la lune, mais des noms de deux robots. L’intelligence artificielle est désormais mise au service des enfants malades dans le cadre du programme Travailler ensemble à distance et en interaction, ou TED-i, que notre ministère et le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ont lancé. Jean-Michel Blanquer et Brigitte Macron se sont rendus dans une école, voilà quelques jours, pour échanger avec les enfants qui peuvent, grâce à ces robots, rester connectés à leurs classes.
Ce programme est destiné aux élèves empêchés par une maladie grave ou de longue durée et désireux de suivre des cours à distance à l’hôpital, en établissement de soins ou à domicile, voire sur leur lieu de convalescence. Il est destiné à améliorer l’accompagnement pédagogique et la socialisation des jeunes élèves ou des étudiants éloignés de leur classe. Il prend des formes diverses, depuis une petite caméra posée sur le bureau du professeur, jusqu’à un robot, de la taille d’un enfant, placé au milieu de la classe.
Vous l’aurez compris, le ministère de l’éducation nationale prend toute sa part et répond aux besoins des élèves présentant des particularités de santé ou des maladies graves, comme le cancer. C’est notre responsabilité, bien sûr, et ce qui fait la grandeur de l’école de la République.
Au-delà des normes juridiques, textes, règlements, outils, mesures, dispositifs, nous avons, avant tout, une obligation morale.
Épreuve intime et douloureuse qui bouleverse des familles et des fratries, la maladie, particulièrement le cancer, suscite un sentiment d’injustice, qui se transforme souvent en révolte lorsqu’elle touche nos enfants. Nous ne saurions être indifférents à la charge psychologique des parents concernés, qui deviennent des aidants familiaux, ni à la fragilité et aux difficultés des enfants.
Je l’évoquais dans mon propos introductif, à travers ces textes successifs – s’il fallait en apporter la preuve, je crois que c’est fait –, nous sommes tous plus que jamais mobilisés pour lutter contre les inégalités, pour soutenir les plus fragiles, nos enfants malades et leur famille. C’est aussi ce qui fait l’honneur et la grandeur de notre société.
J’aime beaucoup cette citation de Pythagore : « Un homme n’est jamais si grand que lorsqu’il est à genoux pour aider un enfant ». Ce sera mon propos conclusif et, dans cet esprit, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite à soutenir ce texte.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Duffourg, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à m’associer à l’hommage qui a été rendu par le président Larcher à notre collègue Catherine Fournier, qui nous a quittés hier.
La proposition de loi que nous examinons vise à faciliter la scolarisation et l’accompagnement par leur famille des enfants atteints d’une pathologie chronique ou d’un cancer.
Déposée par notre collègue députée Béatrice Descamps, elle a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en première lecture le 25 mars dernier. Son premier objectif est d’accorder un congé immédiat aux parents sans perte de salaire ni de jour de congé afin de leur permettre de faire face à l’annonce de la maladie de l’enfant.
Le droit existant permet déjà aux salariés et aux agents publics de s’absenter de leur travail pour faire face à diverses situations liées à la maladie ou au handicap d’un enfant. Les salariés disposent ainsi, depuis la loi de 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, d’un congé d’au moins deux jours à l’annonce de la survenue d’un handicap chez leur enfant. Il est rémunéré par l’employeur et assimilé à du temps de travail effectif pour la détermination des congés annuels.
Par ailleurs, lorsque l’enfant est atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité rendant indispensable une présence soutenue et des soins contraignants, les salariés bénéficient, d’une part, du mécanisme de don de jours de repos non pris créé par la loi du 9 mai 2014 permettant le don de jours de repos à un parent d’un enfant gravement malade et, d’autre part, d’un congé de présence parentale.
Rappelons également que, lorsque l’état de santé de l’enfant nécessite une hospitalisation immédiate après sa naissance, la première période de quatre jours de congé de paternité et d’accueil est prolongée de droit dans la limite de trente-deux jours consécutifs.
Enfin, le salarié bénéficie de trois jours par an en cas de maladie ou d’accident de l’enfant à charge de moins de seize ans. Cela permet à un parent salarié de s’absenter en cas d’annonce de la maladie de son enfant, mais l’employeur n’est pas tenu de le rémunérer.
Les agents publics bénéficient quant à eux d’autorisations spéciales d’absence liées à la parentalité et à certains événements familiaux.
Par ailleurs, le congé de présence parentale est également prévu pour les fonctionnaires et le don de jours de repos leur a été étendu par décret.
La survenance d’une maladie chez l’enfant est un choc brutal et imprévisible, qui nécessite une réaction immédiate de sa famille. Pour les parents, qui ont besoin d’un temps pour s’organiser et appréhender la pathologie, le travail constitue le premier obstacle : si la majorité des employeurs se montrent compréhensifs, il existe des inégalités qui justifient la création d’un congé spécifique.
L’article 1er de la proposition de loi crée donc un nouveau motif d’absence pour événement familial au bénéfice des salariés en étendant le congé de deux jours accordé pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez l’enfant aux cas de pathologie chronique nécessitant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer.
Il inscrit par ailleurs dans la loi le principe d’une autorisation spéciale d’absence pour les fonctionnaires dans les mêmes cas.
Le décret qui précisera la liste des pathologies chroniques concernées devra être pris rapidement – j’insiste sur ce point.
Comme les autres congés pour événement familial, celui-ci serait à la charge de l’employeur. Ce dispositif, qui constitue l’apport le plus substantiel de la proposition de loi, permet de combler une lacune des différents congés existants. La commission vous propose donc de l’approuver.
Le deuxième objectif de ce texte est de développer des échanges entre les parents et l’équipe éducative afin d’améliorer les conditions de travail de l’enfant à l’école.
Conformément au principe de scolarisation inclusive de tous les enfants sans aucune distinction, les enfants, adolescents et adultes présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant peuvent être scolarisés au sein de dispositifs adaptés.
En particulier, un projet d’accueil individualisé peut être mis en place lorsque la scolarité de l’élève nécessite des aménagements. Ce document précise la nature de ces aménagements, notamment la conduite à adopter en cas d’urgence. Les principales pathologies concernées sont l’asthme, les allergies, le diabète et l’épilepsie. Les cancers, leucémies et tumeurs, plus rares, représentent une bien moins grande proportion des PAI.
Ces aménagements sont élaborés avec le concours du médecin scolaire ou de la protection maternelle et infantile, à la demande de la famille ou, en accord et avec la participation de celle-ci, par le directeur d’école ou le chef d’établissement.
Les échanges entre parents, enseignants, médecins scolaires, nécessaires à cette élaboration, ont été récemment renforcés par la circulaire du 10 février 2021, laquelle prévoit notamment des réunions d’information censées impliquer l’ensemble des parties prenantes. Elles peuvent pourtant parfois être insuffisamment inclusives et se tenir dans un délai trop long, entraînant retard et incompréhension chez certains professionnels, qui peuvent, en fin de compte, refuser de signer le PAI.
Pour répondre à ces difficultés, l’article 2 prévoit l’organisation d’une réunion portant sur les modalités de mise en œuvre du PAI. Celle-ci devra rassembler l’élève, ses responsables légaux, le directeur ou le chef d’établissement, ainsi que l’enseignant ou le professeur principal. Pourront y prendre part d’autres professionnels accompagnant l’enfant sur le temps scolaire ou périscolaire, un représentant de la collectivité territoriale compétente, ainsi qu’un professionnel de santé ou de la médecine scolaire. Elle devra se tenir si possible dans un délai de vingt et un jours à compter de l’annonce du diagnostic ou en amont de l’arrivée de l’enfant dans l’établissement.
L’article 2 améliore en outre l’information des enseignants grâce à une documentation ad hoc.
Le retour à l’école peut être difficile pour l’enfant, surtout lorsque son aspect physique est modifié par la maladie. Les progrès considérables déjà observés, grâce notamment aux robots de téléprésence, seraient utilement complétés par le temps d’échange prévu à l’article 2 quater, mené conjointement par un intervenant du secteur médical ou associatif et le professeur et organisé à la demande des parents. L’enjeu est de préparer la classe au retour de l’enfant à la suite d’une hospitalisation ou d’une absence prolongée à cause d’une pathologie chronique ou d’un cancer.
Au-delà de ces dispositions, j’attire l’attention du Gouvernement sur l’amélioration de l’équipement des établissements du premier degré en stylos auto-injecteurs. Ces dispositifs, déjà imposés dans les établissements du second degré, sont très utiles en cas de réaction anaphylactique et peuvent empêcher la survenance de décès.
Un dernier volet du texte vise à améliorer les conditions d’accueil et d’encadrement par les équipes éducatives des enfants atteints de pathologies chroniques. À cette fin, la sensibilisation et la formation des enseignants constituent un axe d’amélioration certain.
L’article 2 bis prévoit donc d’étendre aux maladies chroniques la formation spécifique des enseignants de l’éducation physique et sportive sur les différentes formes de handicap, tandis que l’article 2 ter complète les formations de sensibilisation à la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers délivrées par les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), pour y inclure les élèves atteints de pathologies chroniques.
Ces dispositions s’appuient sur les outils existants pour combler les lacunes de la formation du personnel enseignant et d’éducation.
En pratique, il serait pertinent d’ouvrir aux enseignants chargés d’enfants malades certains modules de formation, très complets, destinés aux enseignants spécialisés dans le cadre du certificat d’aptitude professionnelle aux pratiques de l’éducation inclusive.
En ce qui concerne les conditions de passation des examens, sujet important, des aménagements particuliers sont déjà prévus pour les élèves en situation de handicap ou atteints de troubles de la santé invalidants. Ces contextes de fort stress sont propices aux crises, face auxquelles il faut savoir réagir. Pourtant, les centres d’examen ne sont pas toujours informés de la présence d’élèves bénéficiant d’un PAI ni du contenu de celui-ci.
L’article 3 prévoit donc la communication du PAI au centre d’examen lorsque celui-ci est distinct de l’établissement d’origine de l’élève. Il peut y être indiqué si la présence d’un professionnel de santé est nécessaire.
Mes chers collègues, comme l’a relevé la commission, cette proposition de loi soulève d’importantes questions, auxquelles elle n’apporte que des réponses modestes. Ses dispositions concernant l’école n’ont, en réalité, pas besoin d’un texte législatif pour être mises en œuvre, et l’on peut se demander, madame la secrétaire d’État, ce qui empêche le Gouvernement de s’y employer, alors qu’il soutient cette proposition de loi. Celle-ci s’ajoute à une série d’autres textes ponctuels portant sur des sujets connexes sur lesquels une vision globale semble encore faire défaut.
Ce texte représente néanmoins une avancée et répond à une certaine urgence pour les associations de parents. Son adoption conforme permettra l’entrée en vigueur rapide de l’article 1er et facilitera, en définitive, la vie des familles concernées par la maladie chronique d’un enfant. La commission vous propose donc de l’adopter sans modification.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui prévoit un accompagnement des parents d’enfants atteints d’une pathologie chronique ou d’un cancer lors de l’annonce de la maladie en ouvrant droit à deux jours de congé minimum.
Une telle disposition existe déjà pour l’annonce de la survenue d’un handicap depuis l’adoption de la loi du 8 août 2016.
L’extension de ce congé exceptionnel à l’annonce d’une maladie chronique telle que le diabète ou d’un cancer permettra de laisser quelques jours à la famille pour s’organiser et effectuer l’apprentissage thérapeutique nécessaire à la compréhension de la maladie.
Cette annonce est souvent brutale et nécessite un temps d’adaptation et d’échange spécifique avec l’enfant et les professionnels.
Ce congé serait rémunéré par l’employeur et les maladies concernées seraient précisées par décret.
La proposition de loi prévoit également d’améliorer l’accompagnement de l’enfant dans sa scolarité après l’annonce de sa maladie. Ce sont des dispositions de nature réglementaire, mais nous comprenons parfaitement la volonté de l’auteure de ce texte, la députée nordiste Béatrice Descamps, que je félicite de son initiative, et de ses cosignataires de le voir adopté sans modification afin qu’il puisse entrer en vigueur rapidement.
L’article 2 inscrit dans la loi le projet d’accueil individualisé mis en place pour accompagner l’élève qui présente une maladie nécessitant des adaptations dans sa vie scolaire. Ce dispositif prendra la forme d’une réunion entre l’élève, les parents et l’équipe pédagogique dans les vingt et un jours à compter de l’annonce du diagnostic. Il me paraît particulièrement important, compte tenu du manque de formation et d’information des enseignants sur la prise en charge d’enfants atteints de maladies graves ou de certaines pathologies chroniques méconnues, telles que l’épilepsie.
Si le quotidien des familles est bouleversé par l’annonce de la maladie, les enseignants sont souvent désemparés, notamment les professeurs d’éducation physique et sportive. La prise en charge de l’enfant doit être anticipée, organisée et adaptée, tout comme l’accompagnement des enseignants. Ces enfants doivent faire l’objet d’une attention particulière, en raison de leur maladie, mais également pour prévenir toute situation de harcèlement ou de mise à l’écart à la suite d’une crise.
L’article 3 prévoit l’information systématique du centre d’examen de la présence d’élèves disposant d’un projet d’accueil individualisé afin qu’il puisse prendre ses dispositions en amont de leur accueil et prévoir, par exemple, la présence d’un professionnel de santé.
Ces dernières années, de nombreuses mesures ont contribué à renforcer l’accompagnement des enfants atteints de maladies graves. Le Sénat a ainsi adopté récemment la proposition de loi de Paul Christophe, député du Nord, visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d’un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu. Je pense également à la proposition de loi de mon collègue nordiste Guy Bricout.
Au même moment, le Gouvernement a revalorisé à hauteur du SMIC le montant de l’allocation journalière versée dans cette situation.
Ces démarches participent, d’un même tenant, à rendre notre société plus juste et plus solidaire. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera cette proposition de loi.