M. Pascal Martin, rapporteur. Il reste favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Duplomb. C’est l’harmonie totale ! (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 2307 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 62 bis, modifié.
(L’article 62 bis est adopté.)
Section 2
Autres dispositions
Article 63 (priorité)
I. – Un décret définit une trajectoire pluriannuelle, précisée par des objectifs annuels, de réduction des émissions de protoxyde d’azote et d’ammoniac du secteur agricole permettant d’atteindre progressivement l’objectif d’une réduction de 13 % des émissions d’ammoniac en 2030 par rapport à 2005 et l’objectif d’une réduction de 15 % des émissions de protoxyde d’azote en 2030 par rapport à 2015.
II. – (Supprimé)
Mme la présidente. L’amendement n° 1932, présenté par MM. Labbé, Dantec, Fernique, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, puis annuellement, le Gouvernement présente au Parlement un rapport consacré au suivi de la trajectoire de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote du secteur agricole et des moyens mis en œuvre pour la respecter.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. La mise en place d’une redevance sur les engrais azotés, accompagnée d’un surcroît de moyens et d’aides à la transition pour les agriculteurs, est essentielle. Afin de permettre au Parlement de se prononcer sur les moyens d’accompagnement et les modalités de mise en place de cette redevance sur les engrais azotés minéraux, cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport de suivi de la trajectoire de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote et des moyens mis en place pour la respecter.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement tend à revenir sur la position de la commission, qui a supprimé cette énième demande de rapport du Gouvernement au Parlement. Nous disposons d’autres moyens pour suivre le respect de cette trajectoire, en lien avec l’article 62, tel qu’il a été réécrit par le Sénat : auditions de ministres ou de représentants des services d’administration, questionnaires… La remise d’un tel rapport me paraîtrait un peu formelle. Nous aurons l’occasion de suivre la trajectoire mentionnée.
Monsieur Labbé, il ne faut pas trop vous habituer à ce que vos amendements reçoivent un avis favorable (Sourires.) : pour celui-ci, la commission vous en demande le retrait, faute de quoi son avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre. Pour ma part, monsieur Labbé, j’émets un avis favorable sur votre amendement !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 63.
(L’article 63 est adopté.)
Article 63 bis (priorité)
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le titre Ier du livre Ier est complété par un article L. 110-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 110-5. – En vue de mettre fin à l’importation de matières premières et de produits transformés dont la production a contribué, directement ou indirectement, à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la dégradation d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national, l’État élabore et met en œuvre une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée actualisée au moins tous les cinq ans.
« Cette stratégie est élaborée en concertation avec des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, d’acteurs socio-économiques, en particulier les grandes entreprises mentionnées à l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, d’organisations de protection de l’environnement ainsi que de membres de la communauté scientifique.
« La plateforme nationale de lutte contre la déforestation importée mise en place dans le cadre de la stratégie mentionnée au premier alinéa du présent article vise à assister les entreprises et les acheteurs publics dans la transformation de leurs chaînes d’approvisionnement vers des matières plus durables, traçables et plus respectueuses des forêts tropicales et des écosystèmes naturels, ainsi que des communautés locales et des populations autochtones qui en vivent. Elle met à leur disposition des données économiques et cartographiques sous forme électronique dans un format ouvert librement utilisable et exploitable par un système de traitement automatisé. » ;
2° (nouveau) Le deuxième alinéa du II de l’article L. 222-1 B est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour chacune des périodes mentionnées au même article L. 222-1 A, il indique également un plafond indicatif des émissions de gaz à effet de serre provoquées par la déforestation associée à la production et au transport vers la France de biens et de services importés. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2047, présenté par Mmes Schillinger et Havet et MM. Lévrier, Marchand et Rambaud, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
actualisée au moins tous les cinq ans
par les mots :
en concertation avec l’ensemble des parties prenantes
II. – Alinéas 4 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Frédéric Marchand.
M. Frédéric Marchand. L’article 63 bis complète le code de l’environnement pour y inscrire la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI), en concertation avec l’ensemble des parties prenantes. Ces dernières sont précisées dans les alinéas 4 à 6 de cet article. Or il est mentionné dans les cinq orientations de la SNDI que l’implication de l’État, couplée à l’action du secteur privé et des organisations de la société civile, est essentielle.
La SNDI établit par ailleurs un dispositif de concertation, d’orientation et de suivi au sein du groupe national sur les forêts tropicales, afin de faciliter la mise en œuvre de cette stratégie, son évaluation annuelle et ses révisions à venir.
Par conséquent, il est inutile de mentionner dans la loi la composition des parties prenantes, ainsi que la plateforme déjà prévue dans la SNDI. L’objet de cet amendement est donc de supprimer ces mentions superflues.
Mme la présidente. L’amendement n° 1463, présenté par MM. Montaugé, Gillé, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans le respect des règles applicables au secret industriel et commercial, les données présentes sur cette plateforme sont également accessibles au public.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Les informations figurant sur la plateforme de soutien aux acheteurs qui peuvent avoir un impact sur les importations et la déforestation doivent pouvoir être portées à la connaissance des consommateurs qui le souhaiteraient, dans un souci de transparence et de bonne information des citoyens, pourvu que cela se fasse dans le respect des obligations liées au secret des affaires et du commerce : tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’amendement n° 2047 vise à supprimer de nombreux éléments ajoutés en commission grâce à l’adoption de cinq amendements identiques présentés par des membres de plusieurs groupes politiques. Rappelons que ces modifications constituaient la traduction de propositions inscrites dans le rapport du groupe de travail Alimentation durable et locale, commun à notre commission et à celle des affaires économiques.
Cet amendement vise en particulier à supprimer, au sein de la stratégie nationale bas-carbone, l’indicateur spécifique au suivi des émissions associées à la déforestation importée, indicateur qui constitue pourtant une avancée notable pour le pilotage de notre empreinte carbone nationale.
Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que je ne peux pas être favorable à votre amendement : la commission en demande le retrait, faute de quoi son avis sera défavorable.
Quant à l’amendement n° 1463, il me semble quelque peu prématuré. La plateforme de lutte contre la déforestation importée doit dans un premier temps permettre aux entreprises d’adapter leur chaîne logistique. Rendre ces données accessibles au public exigerait un nouveau traitement extrêmement laborieux.
Votre préoccupation, monsieur Montaugé, est en outre partiellement satisfaite par les éléments qui ont été introduits en commission à l’article 64 ter et qui seront adaptés, à la marge, si notre assemblée veut bien adopter l’amendement n° 2304, que je lui présenterai lors de l’examen de cet article.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis ravie de vous retrouver à l’occasion de l’examen de cet article, qui introduit dans le projet de loi la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. Cet article est donc extrêmement important et nous y sommes très attachés.
L’amendement n° 2047 vise à simplifier sa rédaction en la resserrant autour d’éléments purement législatifs, sans exclure aucune partie prenante. La rédaction est ramenée à sa version la plus large possible, de manière à prendre en compte tous les acteurs, notamment le comité de suivi de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, que je reverrai dans quelques jours pour m’assurer du suivi des engagements que nous avons pris il y a quelques mois.
La mention de la plateforme n’est pas non plus nécessaire, dans la mesure où celle-ci existe déjà. Nous travaillons actuellement à la rendre plus riche et opérationnelle. Je vous confirme que l’échange de données entre douanes et agents du ministère de la transition écologique prévu à l’article 64 y contribuera, en offrant aux entreprises une information croisée entre les données douanières et les données satellitaires d’importation. La recherche des émissions de gaz à effet de serre sera facilitée, alors qu’elle reste à ce jour difficile à évaluer.
La rédaction que vous proposez dans cet amendement me semble donc de nature à simplifier le propos, en le rendant opérationnel et en le ramenant à ce qui relève du domaine législatif. L’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 2047 est donc favorable.
L’amendement n° 1463 vise pour sa part à rendre les données présentes sur la plateforme accessibles au public. Je vous confirme qu’il est satisfait, puisque nous avons déjà mis en ligne cette plateforme, que nous enrichirons au fur et à mesure. Un groupe de travail s’applique à améliorer la lisibilité des données pour que tous les acteurs, citoyens et entreprises, puissent se les approprier. Il nous appartient cependant de préserver des règles de confidentialité ; nous y reviendrons.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 424, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
incluant l’exclusion ou le retrait de la France de tout accord commercial ou de libre-échange avec les pays ou groupes de pays concernés
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 63 bis prévoit la mise en place, tous les cinq ans, d’une stratégie de lutte contre la déforestation importée. Le Fonds mondial pour la nature, mieux connu sous son sigle anglais WWF, estime en effet que la France contribue par ses importations au déboisement de 5 millions d’hectares de forêt chaque année dans le monde.
Rappelons que cette stratégie de lutte contre la déforestation importée ne date pas du dépôt de ce projet de loi : elle a été décidée en 2018, mais est restée sans effet, faute de mesures concrètes.
Or il est déjà tard, puisque près de 20 % des émissions de gaz à effet de serre sont dues à la destruction des forêts vierges. La seule forêt amazonienne stocke environ 120 milliards de tonnes de CO2, soit l’équivalent des émissions annuelles des États-Unis, qu’elle risque de libérer à cause de l’agriculture et de l’élevage intensifs mis en œuvre pour nos importations. Selon la FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, 65 % de la déforestation constatée chaque année au Brésil est due à l’élevage intensif. Selon le gouvernement brésilien lui-même, depuis les années 1950, l’élevage est responsable à lui seul de 80 % de la déforestation dans ce pays.
On pourrait encore évoquer le soja, l’huile de palme, ou les biocarburants, dont l’importation sera facilitée par la ratification du traité de libre-échange avec le Mercosur. Cet accord accélérera la déforestation de près de 5 % chaque année, selon le rapport remis au Gouvernement par M. Stefan Ambec, à la demande de M. Édouard Philippe. Ce rapport conclut que les risques environnementaux de ce traité outrepassent les bénéfices économiques à en attendre.
Nous proposons donc, par cet amendement, une mesure concrète pour lutter contre la déforestation : nous y demandons la suspension des traités de libre-échange avec les pays pratiquant l’exportation de produits qui accélèrent la déforestation, afin de préserver, pour eux comme pour nous, leurs forêts et leurs milieux naturels.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Nous devons, me semble-t-il, trouver un équilibre entre le renforcement de la lutte contre la déforestation importée à l’échelon national, d’une part, et la continuité des relations diplomatiques avec les pays concernés, d’autre part. Interdire par principe la conclusion de tout accord commercial ou de libre-échange me paraît excessif : je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, ma chère collègue, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. À la suite de la publication du rapport Ambec, que vous avez évoqué, madame la sénatrice, nous nous sommes engagés à ne plus accepter d’accords commerciaux ou de libre-échange qui contreviendraient à nos engagements, que ce soit ceux qui ont été pris dans le cadre de l’accord de Paris ou ceux qui sont destinés à lutter contre la déforestation et ses conséquences.
Il n’est évidemment pas question de revenir sur cet engagement. La preuve en est que la France est très impliquée dans ce dossier, à la fois dans ses négociations internationales et dans son travail avec la Commission européenne. La déforestation sera d’ailleurs l’un des sujets clés de la présidence française de l’Union européenne, au premier semestre 2022.
À compter de juillet prochain, nous prendrons également la présidence du partenariat des déclarations d’Amsterdam. Nous jouerons donc un rôle moteur dans ces discussions.
En tout état de cause, la France pèsera de tout son poids pour que les propositions faites soient des plus ambitieuses. Dans la mesure où notre pays se propose de peser à l’échelon européen, qui est le plus adapté, il me semble que votre amendement est satisfait ; l’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 63 bis.
(L’article 63 bis est adopté.)
Article 64 (priorité)
(Non modifié)
Le chapitre III du titre II du code des douanes est complété par un article 59 quindecies ainsi rédigé :
« Art. 59 quindecies. – Les agents du ministère chargé de l’environnement désignés pour mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, prévue à l’article L. 110-5 du code de l’environnement, et les agents de la direction générale des douanes et droits indirects peuvent se communiquer, spontanément ou sur demande, tous renseignements, données et documents utiles à l’amélioration de la transparence et de la traçabilité des chaînes d’approvisionnement en matières premières agricoles. »
Mme la présidente. L’amendement n° 1457, présenté par MM. Montaugé, Gillé, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ils doivent informer les autorités compétentes s’ils constatent des atteintes à l’environnement contrevenantes au respect de la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. L’article 64 a pour objet d’encourager l’échange d’informations entre les agents de la direction générale des douanes et droits indirects et ceux qui, au ministère chargé de l’environnement, auront été désignés pour mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée.
Notre amendement vise à rendre plus efficient l’objectif 11 de cette stratégie, qui consiste à améliorer l’analyse de risque et le rapportage des entreprises en matière de lutte contre la déforestation. Nous proposons ainsi d’imposer un devoir d’alerte aux agents chargés de la mise en œuvre de cette politique.
Les agents des douanes devraient également effectuer un signalement lorsque des atteintes graves à l’environnement, telles qu’elles sont définies à l’article 1er de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, sont portées à leur connaissance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Le dispositif proposé dans cet amendement a une portée plus large que la seule lutte contre la déforestation importée.
Par ailleurs, l’amendement est déjà satisfait, car c’est justement le rôle et le devoir des agents d’informer leur hiérarchie dans les cas de figure que vous évoquez, mon cher collègue.
Enfin, l’article 40 du code de procédure pénale trouve à s’appliquer dès lors qu’un agent acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit. À défaut, la responsabilité civile de l’organisme concerné pourrait également être engagée sur le fondement des dispositions de l’article 64 ter du présent texte.
La commission vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, mon cher collègue ; à défaut, son avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je rejoins l’avis de M. le rapporteur : il existe déjà un cadre favorisant l’engagement volontaire ou incitant les entreprises à supprimer toute importation de biens qui pourraient amplifier la déforestation. J’ajoute qu’une évolution de la législation est en cours de préparation à l’échelon européen.
C’est pourquoi le Gouvernement vous demande également le retrait de cet amendement, monsieur le sénateur ; à défaut, il y sera défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1889, présenté par MM. Labbé, Dantec, Fernique, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les agents de la direction générale des douanes et droits indirects communiquent, avant le 1er janvier 2022, aux agents du ministère chargé de l’environnement désignés pour mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, prévue à l’article L. 110-5 du code de l’environnement, les données dont ils disposent sur les importations de matières premières présentant un risque lié à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la dégradation d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national, ou pour les droits humains des personnes qui y habitent. Ces données sont utilisées pour la mise en place d’un mécanisme d’alerte et d’un système d’analyse du risque à l’échelle nationale dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée prévue au même article L. 110-5. Un décret définit les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement a pour objet de limiter le fonctionnement en silo qui caractérise les relations entre les douanes et les services du ministère de la transition écologique. Les douanes disposent pourtant de beaucoup de données, dont certaines – on ne le dit pas assez – proviennent du réseau extrêmement dense de nos ambassades.
Aujourd’hui, la collaboration entre le ministère de la transition écologique, qui est chargé de la lutte contre la déforestation importée et mène les négociations à l’échelon international, et Bercy qui, au travers des douanes, dispose des données, est mauvaise : les ponts ne fonctionnent pas. J’ai pu constater à plusieurs reprises sur le terrain à quel point les informations circulaient mal d’un ministère à l’autre.
Le présent amendement vise donc à garantir l’efficacité de l’action de l’État. Le dispositif que nous proposons constituerait un véritable atout stratégique.
Mme la présidente. L’amendement n° 833, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les agents de la direction générale des douanes communiquent avant le 1er janvier 2022 aux agents du ministère chargé de l’environnement désignés les données dont ils disposent sur les importations de matières premières présentant un risque pour les forêts tropicales et les écosystèmes naturels, ainsi que pour les communautés locales et les populations autochtones qui y vivent, afin de permettre la mise en place d’un mécanisme d’alerte et d’un système d’analyse du risque à l’échelle nationale dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. Un décret fixe la liste des matières premières concernées ainsi que les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à limiter les importations d’oléoprotéagineux ou, en tout cas, à mieux les maîtriser. Notre objectif, cohérent avec ceux que notre collègue Ronan Dantec a exposés à l’instant, est de rendre les opérations de contrôle plus efficaces et d’obtenir une parfaite connaissance et une parfaite maîtrise de ces importations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’amendement n° 1889 est satisfait : l’article 64 a précisément pour objet de régulariser et de sécuriser les procédures d’échange de données. Il était nécessaire de modifier le code des douanes, compte tenu des exigences applicables à ces agents. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, mon cher collègue, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
Pour les mêmes raisons, je demande le retrait de l’amendement n° 833 ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je suis du même avis que M. le rapporteur. Je partage évidemment l’intention des auteurs de ces amendements, mais je les considère comme des amendements d’appel.
Les données douanières ne nous permettent pas aujourd’hui d’évaluer la gravité des atteintes aux droits humains. Nous pouvons déjà croiser ces données avec les images satellitaires, mais elles ne sont sans doute pas suffisantes pour caractériser les risques encourus. Nous trouverons sans doute d’autres moyens de le faire ; du moins, je le souhaite.
Nous serons de nouveau amenés à évoquer ce sujet, notamment demain, quand nous aborderons la question des peuples autochtones et de la stratégie nationale pour les aires protégées.
En tout état de cause, ce projet de loi n’est sans doute pas le meilleur véhicule législatif pour débattre de l’objet de l’amendement n° 1889, non plus que du problème des communautés locales et des populations autochtones soulevé dans l’amendement n° 833. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Il est extrêmement important que Bercy et les services des douanes deviennent un acteur clé de notre stratégie de lutte contre la déforestation, mais aussi contre l’ensemble des trafics d’espèces.
On sait à quel point les pouvoirs publics sont mobilisés face à certains types de criminalité, comme le terrorisme ou le trafic de drogue. Or on ne constate pas du tout le même niveau de mobilisation pour les enjeux liés aux risques environnementaux.
En créant des ponts, en favorisant l’échange de données, on pourrait mobiliser et sensibiliser une administration absolument cruciale dans la lutte contre les atteintes à l’environnement et, partant, les atteintes aux droits humains, puisque les deux enjeux sont liés.