Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Étant moi aussi usager de cette ligne, je me joins à votre appel, madame Assassi, à ce que l’état des gares et les services aux voyageurs s’améliorent. Cela dit, je ne suis pas certain que l’amendement puisse y contribuer, l’abandon du projet du Charles-de-Gaulle Express pouvant paraître démesuré par rapport à la question des services en gare. Je vous donne volontiers crédit de votre constance sur ce sujet, mais le Gouvernement et les assemblées ont adopté une position et ce projet avance.
Mme la ministre avait souhaité s’assurer, à la demande de nombreux élus locaux et parlementaires, que les travaux du CDG Express ne viennent pas contraindre davantage encore la circulation du RER B et la réalisation des programmes de rénovation. C’est à ce titre que le Gouvernement a décidé de décaler les travaux du CDG Express, pour accorder la priorité aux travaux sur la ligne B du RER.
L’article 76 bis, tel qu’il est rédigé, prend en compte le décalage des travaux du CDG Express et de la mise en œuvre de la taxe destinée à les financer annoncé par Mme la ministre. Je pense donc qu’il faut laisser cet article en l’état. L’avis sur l’amendement est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je salue également la constance de votre position, madame Assassi, mais je pense que nous accordons vraiment la priorité aux transports du quotidien. Un programme d’investissements très important est prévu pour le RER B, portant à la fois sur la nouvelle signalisation, les travaux à réaliser sur l’infrastructure pour accueillir les nouvelles rames ou la mise en accessibilité des gares. Compte tenu de cet important programme de travaux, nous avons fait le choix, comme vient de le rappeler M. le sénateur Capo-Canellas, de décaler la mise en service du CDG Express, dont je souligne qu’il n’est financé par aucune subvention publique et qu’il contribue à un programme d’investissements de 500 millions d’euros qui permettra lui aussi d’améliorer le fonctionnement du RER B. Avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 76 bis.
(L’article 76 bis est adopté.)
Article 76 ter (nouveau)
I. – À la première phrase du premier alinéa du IV de l’article 1609 quatervicies A du code général des impôts, après la seconde occurrence du mot : « aérodrome », sont insérés les mots : « , ou au remboursement du principal des avances consenties par les exploitants d’aérodrome mentionnés au second alinéa de l’article L. 571-14 du code de l’environnement, dans les conditions prévues au même alinéa, ».
II. – L’article L. 571-14 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les exploitants des aérodromes pour lesquels le nombre annuel des mouvements d’aéronefs de masse maximale au décollage supérieure ou égale à vingt tonnes a dépassé deux cent mille lors de l’une des cinq années civiles précédentes peuvent engager une avance aux mêmes fins que celles citées au précédent alinéa, sur avis conforme des ministres chargés de l’aviation civile, de l’économie et du budget portant notamment sur le montant et les modalités de remboursement de cette avance, en ce compris le délai maximal de remboursement. »
Mme la présidente. L’amendement n° II-11, présenté par M. Capo-Canellas, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Après le mot :
principal
insérer les mots :
et des intérêts
II. – Alinéa 3
Après le mot :
compris
insérer les mots :
le taux des intérêts dus aux exploitants d’aérodromes et
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Nous avons très longuement débattu de ce sujet à l’occasion de l’examen du projet de loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dont le rapporteur était Jean-François Husson. Le ministre de l’économie et des finances s’était alors engagé à ce qu’Aéroports de Paris consente une avance substantielle au bénéfice des riverains de l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle afin d’accélérer les travaux d’insonorisation de leurs logements.
L’article 76 ter du projet de loi de finances vient concrétiser cet engagement. L’avance consentie par Aéroports de Paris sera remboursée a posteriori grâce au produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes. Toutefois, Aéroports de Paris étant une société anonyme comptant un actionnaire majoritaire, à savoir l’État, il est plus sûr de prévoir que l’avance sera remboursée avec des intérêts – faibles puisque les taux sont bas aujourd’hui –, afin d’éviter qu’un actionnaire minoritaire ne vienne ensuite reprocher à l’État, actionnaire majoritaire, d’avoir bénéficié d’un avantage. Ce n’est pas le seul cas où Aéroports de Paris fait une avance à l’État : des intérêts sont toujours prévus.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Le dispositif de l’article 76 ter constitue une avancée très importante pour les riverains de l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle, puisqu’il permettra d’accélérer les travaux d’insonorisation, grâce à l’avance de 77 millions d’euros consentie par Aéroports de Paris. Il existe un stock important de dossiers en attente, qui pourront ainsi être traités.
Le dispositif de l’article, tel qu’il a été voté, exclut la prise en compte des intérêts, qui ne paraît pas être un enjeu très important, au moins à court terme, en raison des taux très bas. Néanmoins, la prise en compte des intérêts pourrait contribuer à motiver Aéroports de Paris à accorder cette avance. Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 76 ter, modifié.
Article 76 quater (nouveau)
Au VII de l’article 136 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, l’année : « 2019 » est remplacée par l’année : « 2024 ». – (Adopté.)
Article 76 quinquies (nouveau)
I. – Le ministre chargé de l’économie est autorisé à abandonner les créances détenues sur la Société internationale de la Moselle au titre de diverses mises en jeu de garantie de l’État, accordées entre 1977 et 1981, et imputées sur le compte 2761000000, dans la limite de 72 090 344,75 €, auxquels peuvent s’ajouter les intérêts contractuels courus et échus.
II. – Le ministre chargé de l’économie est autorisé à abandonner les créances détenues sur la Société internationale de la Moselle au titre des prêts participatifs accordés entre 1960 et 1979 et imputés sur le compte de prêts du Trésor n° 903-05, dans la limite de 49 903 648,20 €, auxquels peuvent s’ajouter les intérêts contractuels courus et échus.
III. – Les abandons de créances mentionnées aux I et II sont accordés par arrêté publié au Journal officiel. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 76 quinquies
Mme la présidente. L’amendement n° II-66, présenté par M. Sol, est ainsi libellé :
Après l’article 76 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er juillet 2020 un rapport faisant le bilan de la situation des réserves naturelles nationales et présentant leurs perspectives de développement. Ce rapport étudie également l’opportunité de la création d’un fonds d’intervention consacré à l’amélioration des actions de sensibilisation et d’éducation à la nature par les réserves naturelles et les autres espaces protégés.
La parole est à M. Jean Sol.
M. Jean Sol. Les moyens prévus dans le projet de loi de finances pour 2020 pour les 167 réserves naturelles nationales existantes s’élèvent à 22,86 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 22,91 millions d’euros en crédits de paiement.
Ces réserves naturelles nationales, véritables poumons pour notre pays, sont des acteurs incontournables de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité. L’Association des réserves naturelles de France indique que les moyens attribués aux réserves pour assurer leurs missions de connaissance, de gestion et de surveillance n’ont pas été réévalués depuis 2012, ce qui les met en difficulté pour atteindre les objectifs qui leur sont assignés. Elles estiment à 25 millions d’euros les besoins pour réaliser leurs missions pleinement et dans de bonnes conditions et les sécuriser.
L’article 55 de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité reconnaît aux réserves naturelles nationales le rôle d’animation, de représentation, de mise en réseau et de coordination technique des réserves naturelles en métropole et outre-mer.
Bien que j’aie cru comprendre que la commission n’était pas favorable aux demandes de rapport, cet amendement prévoit la remise d’un rapport dressant le bilan de la situation des réserves naturelles nationales. Un tel bilan n’a pas été réalisé depuis 2012…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Mon cher collègue, la commission n’est effectivement pas favorable à la multiplication des rapports. J’entends votre argumentation, inspirée par l’Association des réserves naturelles de France. Le sujet n’est pas négligé : nous l’avons abordé à plusieurs reprises à propos de tous les sujets touchant à la biodiversité, aux moyens et à l’animation, importante pour une bonne appropriation par les citoyens. Je ne suis pas sûr qu’il faille établir un rapport annuel. Par contre, je souhaite que le Gouvernement puisse dresser, en 2020, un état des lieux de la situation depuis 2012, pour faire droit à votre demande et tracer les perspectives. Il conviendrait de réunir dans un tableau de bord des éléments objectifs, partagés avec l’Association des réserves naturelles de France.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Nous allons faire encore mieux, puisque nous sommes en train de réviser notre stratégie nationale pour les aires protégées, en termes de périmètre et de modalités de gestion, en particulier dans la perspective d’atteindre l’objectif fixé par le Président de la République de 30 % de notre territoire en aires protégées, dont 10 % sous protection forte, notion qui donne lieu à débats.
Je présiderai demain un comité de pilotage pour lancer l’élaboration de notre nouvelle stratégie nationale pour les aires protégées. Dans ce cadre, nous aurons notamment l’occasion de faire le bilan de la gestion de nos réserves naturelles. Tous ces éléments doivent aboutir à une proposition de nouvelle stratégie nationale pour les aires protégées au début de l’année 2020, l’objectif étant que cette stratégie puisse être adoptée d’ici au congrès de l’IUCN qui se tiendra au mois de juin à Marseille. Tous les éléments seront sur la table au premier trimestre de l’année 2020.
Dans cette attente, monsieur le sénateur, je vous propose de retirer votre amendement, qui me semble pleinement satisfait.
Mme la présidente. Monsieur Sol, l’amendement n° II-66 est-il maintenu ?
M. Jean Sol. Compte tenu de l’argumentation de M. le rapporteur et de votre engagement, madame la ministre, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-66 est retiré.
budget annexe : contrôle et exploitation aériens
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », figurant à l’état C.
ÉTAT C
(En euros) |
||
Mission/Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et exploitation aériens |
2 140 979 213 |
2 140 979 213 |
Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 501 062 470 |
1 501 062 470 |
Dont charges de personnel |
1 217 506 516 |
1 217 506 516 |
Navigation aérienne |
595 421 800 |
595 421 800 |
Transports aériens, surveillance et certification |
44 494 943 |
44 494 943 |
Mme la présidente. L’amendement n° II-1, présenté par M. Capo-Canellas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Soutien aux prestations de l’aviation civile dont charges de personnel |
72 000 000 |
72 000 000 |
||
Navigation aérienne |
||||
Transports aériens, surveillance et certification |
||||
TOTAL |
72 000 000 |
72 000 000 |
||
SOLDE |
- 72 000 000 |
- 72 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Nous avons adopté lundi, sur l’initiative du rapporteur général, un amendement, auquel j’ai eu le plaisir de contribuer, qui visait à atténuer l’effet sur la compétitivité du transport aérien de l’éco-contribution proposée par le Gouvernement.
Plutôt que de supprimer ou de moduler cette éco-contribution, nous avons préféré la laisser telle quelle, mais en en atténuant fortement l’impact. À cet effet, nous avons souhaité réduire la taxe de l’aviation civile (TAC) de 72 millions d’euros, sachant que, en raison de l’augmentation du trafic, son produit progresse d’un peu plus de 29 millions d’euros cette année et que la dette inscrite au budget annexe, qui avait crû fortement après la crise de 2008, a très nettement diminué – d’à peu près 40 % – pour, de mémoire, être ramenée à quelque 600 millions d’euros.
Nous proposons donc de réduire de 72 millions d’euros l’effort de désendettement cette année pour abaisser la taxe de l’aviation civile. Cette somme viendra en partie compenser, pour les compagnies aériennes, les 230 millions d’euros de taxes supplémentaires prévus par le Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Sans surprise, le Gouvernement est opposé à la diminution de 72 millions d’euros de la taxe de l’aviation civile. Une telle diminution des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » signifierait une baisse des remboursements d’emprunts de même montant. Or les remboursements d’emprunts prévus dans le projet de loi de finances correspondent exactement aux échéanciers contractés avec l’Agence France Trésor. Ces remboursements participent de l’équilibre global de la gestion de la dette, dont le non-remboursement de 72 millions d’euros renchérirait immanquablement le coût. En conséquence, l’avis est défavorable !
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », figurant à l’état C.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale |
360 000 000 |
360 000 000 |
Électrification rurale |
355 200 000 |
355 200 000 |
Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées |
4 800 000 |
4 800 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs |
312 700 000 |
312 700 000 |
Exploitation des services nationaux de transport conventionnés |
246 100 000 |
246 100 000 |
Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés |
66 600 000 |
66 600 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : transition énergétique
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Transition énergétique |
6 309 900 000 |
6 309 900 000 |
Soutien à la transition énergétique |
5 413 100 000 |
5 413 100 000 |
Engagements financiers liés à la transition énergétique |
896 800 000 |
896 800 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et « Transition énergétique ».
7
Communication relative à une commission mixte paritaire
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
8
Loi de finances pour 2020
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2020.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Enseignement scolaire
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire » (et articles 76 septies et 76 octies).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, une malédiction s’abat sur l’examen du budget de l’enseignement scolaire, qui, chaque année, intervient un peu plus tard, donne lieu à des interventions un peu plus courtes, porte sur des sommes plus élevées et est marqué par des difficultés croissantes… (M. Stéphane Piednoir rit.) Nous avons donc à relever un défi, celui de la sobriété dans le propos, qui ne correspond pas à mon tempérament naturel !
M. Stéphane Piednoir. C’est vrai !
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, à la demande de son rapporteur, à savoir votre serviteur, la commission des finances propose au Sénat d’adopter votre projet de budget en l’amendant d’une façon extrêmement modeste.
Pourquoi la commission des finances a-t-elle fait ce choix, que nous souhaitons faire partager à nos collègues ?
La première raison, c’est que vous vous placez, monsieur le ministre, dans la continuité de l’année précédente et répondez à une demande constante du Sénat en soutenant le primaire, qui a parfois été sacrifié dans notre pays, comme l’établissent clairement les comparaisons internationales.
La deuxième raison, c’est que les effectifs sont maîtrisés. Vous ne les diminuez pas vraiment – leur diminution se limite à un peu moins de 1 000 emplois sur deux exercices –, mais vous les gérez utilement, puisque le primaire voit ses effectifs augmenter d’une façon significative, au détriment de ceux du secondaire, qui était doté très convenablement.
La troisième raison, c’est que vous avez pris l’initiative de réformer et de rénover le baccalauréat réformé et que, manifestement, ce défi audacieux semble porter ses fruits, ainsi qu’en témoigne la restructuration des options choisies par nos élèves de terminale : une quinzaine de triplés représentent 80 % des choix des élèves. Cette plasticité leur permettra d’aborder l’étape de Parcoursup, et donc de l’intégration dans l’enseignement supérieur, dans des conditions plus favorables.
La quatrième raison, c’est que vous soutenez d’une façon significative l’effort, engagé depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, en faveur de l’inclusion des élèves handicapés. En particulier, vous avez consolidé le statut matériel des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). C’est un effort méritoire, dans un secteur pour lequel se posent des questions d’une autre nature : si l’éducation nationale assure la prise en charge, ce n’est pas elle qui décide, situation inconfortable s’il en est.
La cinquième raison, qui m’importe particulièrement en tant qu’ancien président de région et de l’Association des régions de France, c’est que vous avez décidé de transférer l’orientation professionnelle aux régions. Cela représente un changement important, tant il est vrai que l’enseignement s’organise notamment à raison de ses débouchés, à condition, naturellement, de les connaître.
Pour autant, tout va-t-il pour le mieux dans le meilleur des mondes ? La réponse est, naturellement, négative ; nous avons des interrogations très légitimes, même si elles ne nous interdisent pas de soutenir votre action. Vous aurez, j’en suis certain, à cœur d’y répondre.
La première de nos questions concerne l’effort consenti en faveur de l’enseignement primaire, au travers du dédoublement des classes en cours préparatoire et en première année de cours élémentaire dans les zones d’éducation prioritaires et des évaluations suivies des élèves : avez-vous déjà des indications significatives sur l’effet du dédoublement des classes dans les zones d’éducation prioritaires ? Pouvez-vous déceler de vraies évolutions dans les aptitudes des élèves de primaire qui bénéficient de ces dédoublements ? C’est une question extrêmement importante pour la commission des finances, car le dédoublement des classes n’est bien entendu pas gratuit. S’il est productif de réussite, nous l’accompagnerons plus volontiers encore. Il faut en avoir la confirmation.
Notre deuxième question touche au statut des enseignants. J’évoquais tout à l’heure la maîtrise des effectifs, mais on s’aperçoit que le mouvement le plus significatif, dans le projet de budget, tient aux mesures catégorielles, que vous n’avez pas décidées, puisque vous en avez hérité. Je parle ici du célèbre protocole PPCR – parcours professionnels, carrières et rémunérations –, dont l’impact sur la progression du budget s’élève à près de 400 millions d’euros pour 2020, soit trois fois plus qu’en 2019.
Payer mieux, pourquoi pas, à condition de payer mieux ceux qui sont le plus exposés et ceux dont on a le plus besoin. Or, avec le PPCR, c’est exactement le contraire : c’est une mesure sympathique, généreuse, payée par le contribuable, mais qui, par l’effet de proportionnalité absolue, aboutit à soutenir des enseignants en fin de carrière alors que nous avons surtout besoin de jeunes enseignants qui s’engagent, surtout dans certaines filières où les étudiants sont tentés, à juste titre, par d’autres débouchés professionnels.
Les effectifs des enseignants sont donc maîtrisés, ce qui est une bonne chose, mais nous n’avons pas une vision très claire de la politique salariale que vous souhaiteriez mettre en place à moyen terme.
En outre, la politique des effectifs doit tenir compte de la démographie française. Rien n’étant plus prévisible que la démographie, nous savons que les chiffres vont connaître une évolution négative. Comment en tiendrez-vous compte ?
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Il est vrai que 78 milliards d’euros de budget, compte d’affectation spéciale compris, cela fait 10 milliards d’euros la minute de temps de parole…
Je sais bien, madame la présidente, que vous avez l’obligation d’assumer les décisions de la conférence des présidents, mais, très honnêtement, je trouve que ce n’est pas une bonne façon de traiter l’enseignement et l’éducation dans notre pays que d’accorder au rapporteur spécial un temps de parole aussi limité, dont il n’abuse pas ! (Marques d’approbation sur plusieurs travées.)
Je confirme que la gestion des effectifs d’enseignants est un problème majeur.
J’en terminerai – pour vous faire plaisir, madame la présidente –, en évoquant le transfert de l’orientation professionnelle aux régions. L’éducation nationale assumera-t-elle les conséquences de décisions qu’elle ne maîtrisera plus ? Quand on connaît la difficulté que l’on a à remplir les centres de formation et d’alternance,…
Mme la présidente. J’en suis vraiment désolée, mais je dois vous inviter à conclure, monsieur le rapporteur spécial !
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Eh bien, vous n’avez qu’à me couper la parole et je me tairai !
Mme la présidente. Tous les rapporteurs doivent respecter le temps de parole qui leur est imparti.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Oui, mais tous les budgets n’ont pas la même importance, madame ! (M. le rapporteur spécial quitte brusquement la tribune.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis, pour trois minutes.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Trois minutes ! Ne trouvez-vous pas cela un peu scandaleux ? Heureusement que les Français ne savent pas que nous travaillons dans ces conditions !
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le ministre, j’ai été, l’année dernière, quelque peu injuste envers vous ; j’essaierai d’adopter une attitude plus équilibrée cette année.
Les trois minutes qui me sont accordées me permettront uniquement de vous poser quelques questions.
Le Président de la République a annoncé une priorité forte au primaire, avec le plafonnement de l’effectif des classes à vingt-quatre élèves en grande section, CP et CE1, sur l’ensemble du territoire, d’ici à la rentrée de 2022, ainsi que le dédoublement des classes de grande section de maternelle en réseau d’éducation prioritaire (REP) et en REP+. Votre engagement, en tant que ministre de l’éducation nationale a été déterminant !
L’effort à consentir est important : 26 000 classes seront concernées par le plafonnement des effectifs à vingt-quatre élèves et 10 000 postes ont été nécessaires pour le dédoublement des classes de CP et de CE1. Certes, la démographie des élèves est à la baisse, mais il me semble que la création de plusieurs milliers de postes sera nécessaire pour concrétiser ces annonces. Or seulement 440 emplois dans l’enseignement primaire seront créés au travers du budget pour 2020. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, revenir sur le schéma précis d’emploi pour les rentrées de 2020, de 2021 et de 2022, afin de nous rassurer ?
Par ailleurs, de nombreuses communes s’interrogent sur les conséquences financières des récentes annonces relatives à l’éducation : abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire et coût du « vrai forfait », dédoublement des classes en REP et en REP+, dans des zones souvent densément peuplées où il n’est pas facile de construire, plafonnement des effectifs à vingt-quatre élèves, plan Pauvreté…
Selon les informations qui nous ont été transmises, la rentrée de cette année a été, dans certains endroits, tendue pour le dédoublement de classes en REP et en REP+ : en raison du manque de bâtiments, certaines communes ont dû recourir à des locaux destinés à d’autres usages, comme l’accueil périscolaire, d’autres ont avancé des sommes importantes pour rénover ou construire de nouveaux locaux scolaires. Dans l’attente d’un remboursement par l’État, ce sont autant de moyens financiers actuellement gelés, au détriment d’autres investissements de la collectivité. Pour la ville de Grenoble, par exemple, le montant en jeu serait de 600 000 euros.
Monsieur le ministre, nous avons été contactés par plusieurs maires qui s’interrogent sur les modalités pratiques de remboursement des dépenses auxquelles ils doivent faire face du fait de ces annonces. Vous connaissez les contraintes budgétaires qui pèsent sur les collectivités locales. Je souhaite que des directives détaillées et claires soient rapidement transmises aux préfectures, afin d’éclairer les élus locaux sur la marche à suivre.
Malgré ces inquiétudes, nous constatons que le budget dédié à l’enseignement scolaire est en hausse, avec un accroissement de 1,37 milliard d’euros, hors enseignement agricole. Cela traduit l’engagement du Gouvernement en faveur de l’acquisition des savoirs fondamentaux en primaire, ainsi que la priorité accordée à l’école inclusive. Je reconnais en cela votre engagement, monsieur le ministre. Ainsi, 220 millions d’euros supplémentaires, soit un bond de 14 %, sont consacrés à la scolarisation des élèves en situation de handicap. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
C’est la raison pour laquelle la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».