III. POURQUOI LES PAYS INDUSTRIALISÉS DOIVENT-ILS S'ENGAGER LES PREMIERS DANS LA MAÎTRISE DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE ?
1. Les pays en développement seront à l'avenir les principales victimes et les principaux responsables de l'accroissement des émissions de gaz à effet de serre
Les
estimations présentées supra suggèrent que le coût
du changement climatique rapporté au PIB sera plus élevé
pour les pays en développement que pour les pays industrialisés.
Les pays en développement tropicaux et subtropicaux concentreront
également l'immense majorité des victimes humaines liées
à la fréquence accrue des tempêtes et des cyclones.
Or, les pays en développement sont aujourd'hui et demeureront à
l'avenir les principaux responsables de l'
accroissement
des
émissions de gaz à effet de serre. En effet, leurs besoins
énergétiques augmentent fortement, en lien avec leur
développement économique et avec leur dynamisme
démographique.
En outre, ces besoins énergétiques risquent d'être
largement satisfaits à partir de
charbon
(l'énergie
fossile la plus polluante pour l'effet de serre), car il s'agit de la
principale ressource énergétique de nombre de pays en
développement, dont la
Chine
et l'
Inde
.
Selon l'OCDE, les émissions de CO
2
de la Chine et de l'Inde
pourraient représenter ainsi plus d'un tiers des émissions
mondiales de CO
2
en 2050, tandis que les pays de l'OCDE ne
représenteraient plus qu'un quart des émissions mondiales.
EMISSIONS ANNUELLES DE CO
2
:
L'IMPORTANCE
CROISSANTE DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT
PART DES ÉMISSIONS MONDIALES DE CO
2
(EN %)
|
1990 |
2050 |
OCDE |
48 |
25 |
dont Etats-Unis |
23 |
12 |
Europe de l'Est et ex-Union soviétique |
23 |
17 |
Chine et Inde |
13 |
38 |
Reste du monde |
16 |
20 |
Source : modèle GREEN de l'OCDE, 1998. |
A
l'échelle mondiale, la maîtrise des émissions de gaz
à effet de serre dépendra donc à très long terme
avant tout des choix énergétiques des pays en
développement.
Selon M. Michel PETIT, coordonnateur du GIEC pour la France, si les
pays industrialisés mettaient tous en oeuvre, dès aujourd'hui,
les politiques de maîtrise des émissions les plus rigoureuses qui
soient envisagées, le réchauffement de la planète ne
serait ainsi réduit que de 0,3°C à l'horizon 2100
(1,7°C au lieu de 2°C), si les pays en développement
n'infléchissent pas leur mode de croissance.
LES
INCERTITUDES RELATIVES À L'ÉVOLUTION
DE LA CONSOMMATION
D'ÉNERGIE DE LA CHINE
15(
*
)
Avec 1,3
milliards d'habitants (21 % de la population mondiale), la Chine ne
représente aujourd'hui que 10 % de la consommation mondiale
d'énergie, et moins de 5 % de celle de pétrole (sa
consommation de pétrole est à peine supérieure à
celle de l'Allemagne).
A ce jour, l'intensité énergétique (c'est-à-dire le
rapport consommation d'énergie/PIB) est ainsi deux fois plus faible que
dans la moyenne des pays en développement. Les causes de cette
sobriété " anormale " demeurent débattues :
surestimation du PIB, efficacité énergétique induite par
des pratiques contraignantes (comme les restrictions aux déplacements),
structure différente de l'économie ?
De même, l'évolution de la consommation d'énergie de la
Chine apparaît difficile à prévoir, la principale inconnue
portant sur les besoins énergétiques du secteur des
transports :
- selon certains " optimistes ", ces besoins pourraient demeurer
contenus, la progression du nombre de véhicules individuels (2 millions
aujourd'hui) étant limitée par le faible développement des
infrastructures routières, le faible degré d'urbanisation et la
densité du réseau ferroviaire ;
- à l'inverse, d'autres énergéticiens s'inquiètent
de ce que le mode de développement chinois ne rejoigne celui des autres
économies dynamiques d'Asie, à la faveur notamment de l'ouverture
croissante de l'économie. La consommation d'énergie par habitant
a en effet été multipliée entre 1971 et 1994 d'un facteur
4 à 6 en Indonésie, en Thaïlande et en Corée, dont le
niveau de développement économique
" précède " celui de la Chine.