2. Les marchés de permis constituent un instrument efficient sous certains conditions
À
l'instar des taxes, les marchés de permis sont en théorie un
instrument efficient : les réductions d'émissions ont lieu
là où leur
coût
est le plus
faible
. En effet,
les agents ayant les coûts marginaux de maîtrise des
émissions les plus faibles ont intérêt à
procéder à des investissements de dépollution pour vendre
des permis d'émission aux agents ayant des coûts plus
élevés. Inversement, ces derniers peuvent acheter des permis
plutôt que de procéder à des réductions
d'émissions trop coûteuses.
Pour que les marchés de permis soient efficients, il est toutefois
nécessaire que le
nombre
de
participants
effectifs soit
limité
, sinon les coûts de transaction sont trop
élevés : il est donc exclu que chaque automobiliste
achète des permis d'émission pour son véhicule. Mais le
nombre de participants doit aussi être
suffisant
, sinon les
échanges sont peu concurrentiels.
En outre, le fonctionnement des marchés de permis doit être
transparent.
En effet, les transactions occultes favorisent les
rapports de force
politique et les abus de position dominante.
La transparence des marchés pourrait
a priori
reposer sur une
obligation déclarative, mais il semble préférable que les
transactions s'effectuent plutôt par l'intermédiaire d'une ou
plusieurs
bourses d'échanges
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*
)
:
- chaque État ou entreprise demandeur de permis aurait ainsi un
accès équitable, mais concurrentiel, à toutes les offres
de permis . Cela éviterait les arrangements
privilégiés et exclusifs qui réserveraient le
bénéfice des échanges les plus prometteurs à
certains États ou grandes entreprises, en fonction de relations
d'allégeance ou de dépendance ;
- la mise en concurrence la plus large des offres et des demandes favoriserait
un prix économiquement significatif qui, rendu public, fournirait une
information
précieuse à tous les opérateurs, y
compris ceux qui ne sont pas partie à l'échange ;
- l'information ainsi donnée sur le prix de transaction permettrait
d'évaluer aisément par la suite les conditions selon lesquelles
les gouvernements rétrocéderaient des permis à leurs
entreprises (une rétrocession à un prix inférieur au prix
d'acquisition se révélant comme une subvention
déguisée) ;
- enfin, la liquidité du marché serait accrue, tandis que les
coûts de transaction seraient réduits.
Par ailleurs, si l'offre et la demande sont instables ou inertes, ce qui est le
cas de l'énergie, le rationnement induit par les quotas
d'émissions peut se traduire par une forte
volatilité des
prix
, préjudiciable aux décisions des agents
économiques. Les quotas d'émission CO
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doivent donc
comporter des mécanismes de flexibilité intertemporelle (mise en
réserve des permis excédentaires à une période
donnée, calcul des émissions en moyenne, possibilité
" d'emprunter " des permis). Ces mécanismes, qui
favoriseraient l'apparition de marchés dérivés permettent
en retour une meilleure
efficience intertemporelle
: les
réductions d'émissions sont effectuées au moment où
elles sont collectivement les moins coûteuses.
Il existe toutefois un dilemme entre l'efficience économique (qui invite
à une grande flexibilité dans le temps), et la
crédibilité
du système (il ne doit pas être
possible de repousser trop longtemps ses obligations).
Enfin, pour que les marchés de permis fonctionnent, il est
nécessaire que les permis aient une valeur, c'est-à-dire qu'il
existe un mécanisme de
sanction
dissuasif en cas de non respect
des quotas et que le respect des quotas ne soit pas difficile à
contrôler.