B. DES INFLÉCHISSEMENTS LIMITÉS MAIS POSITIFS

1. Un élargissement des objectifs de la coopération en matière de défense

Le traité d'Amsterdam s'efforce de donner un contenu plus précis à la coopération en matière de défense : il intègre en effet les missions dites de Petersberg et la coopération dans le domaine de l'armement.

a) La prise en compte des missions de Petersberg

L'Union européenne élargit ses responsabilités aux missions définies par l'UEO dans sa déclaration de Petersberg du 19 juin 1992 (art. 17§2) :

- les missions humanitaires et d'évacuation,

- les missions de maintien de la paix,

- les missions de forces de combat pour la gestion des crises, y compris les missions de rétablissement de la paix.

Tous les Etats membres de l'Union européenne désireux d'apporter une contribution aux missions menées par l'UEO dans ce domaine, à la demande de l'Union européenne, pourront " participer pleinement et sur un pied d'égalité " à la planification et à la prise de décision au sein de l'UEO.

Depuis le Conseil des ministres de l'UEO d'Erfurt de novembre 1997, les Etats observateurs à l'UEO (Finlande, Suède, Autriche, Irlande, Danemark) qui sont membres de l'Union européenne peuvent participer, sur un pied d'égalité, avec les membres pleins, aux opérations de l'UEO conduites à la demande de l'Union européenne.

Ainsi, les Etats observateurs participeront désormais de droit aux réunions du Conseil de l'UEO et aux groupes de travail et comités relatifs à la mise en oeuvre des missions de Petersberg. En outre, l'Etat observateur qui a informé le Conseil de son intention de contribuer à une opération en y engageant des forces, a désormais le droit de participer, avec les mêmes droits et les mêmes obligations que les membres de plein droit, à la planification et à la prise de décision , au sein de l'UEO, concernant l'opération en question.

Si l'accord des Etats neutres de participer à ce type d'opérations représente à coup sûr un changement significatif et très positif, il n'en revêt pas moins un caractère paradoxal. En effet, comme le notait judicieusement M. Maurice Ligot dans un remarquable rapport de la Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale 14( * ) , les Etats neutres " accepteraient d'intervenir même militairement pour aider des peuples en difficulté au nom de la solidarité humaine mais refuseraient d'intervenir militairement pour aider des pays européens agressés avec lesquels ils sont en train de construire une communauté de destin, notamment au plan économique et militaire ". Du moins, cette contradiction de principe conduira-t-elle peut-être à terme à une évolution progressive des positions des Etats neutres vis-à-vis du principe d'une garantie de défense collective.

b) Une coopération dans le domaine de l'armement

La définition progressive d'une défense commune peut s'appuyer sur une coopération en matière d'armements dans la mesure où les " Etats membres le jugent approprié " (art. 17§1).

En vérité, le traité d'Amsterdam innove moins qu'il ne consacre, sous les auspices de l'Union européenne, plusieurs initiatives entreprises dans d'autres cadres : l'organisation de l'armement de l'Europe occidentale ou encore, l'organisme conjoint de coopération en matière d'armement (OCCAR), créé le 12 novembre 1996 par l'Allemagne, la France, l'Italie et le Royaume-Uni sur une proposition franco-allemande.

2. Un rapprochement entre l'UEO et l'Union européenne

A défaut de procéder à une intégration de l'UEO au sein de l'Union européenne, le traité d'Amsterdam pose les bases d'un rapprochement entre les deux institutions, même s'il ne règle pas toutes les difficultés liées à ce processus.

a) Les bases d'un rapprochement

L'UEO assume une double vocation à l'égard de l'Union européenne : d'une part, elle doit donner une capacité opérationnelle à l'Union et lui servir ainsi de bras armé, d'autre part, elle joue le rôle de conseil pour le volet défense de la PESC (art. 17§1).

En conséquence, le Conseil européen a autorité sur l'UEO pour toutes les questions pour lesquelles l'Union a recours à cette institution (art. 17§3).

La déclaration de l'UEO, reprise dans l'une des déclarations jointes au traité d'Amsterdam, précise les modalités de ce rapprochement. Elle prévoit en effet des arrangements entre les deux institutions afin d'améliorer la coordination du processus de prise de décision dans des situations de crise, l'harmonisation de la succession des présidences de l'UEO et de l'Union européenne, une coordination étroite entre les secrétariats des deux institutions avec des détachements croisés des personnels, la mise en oeuvre d'une coopération avec la Commission européenne etc.

b) Les difficultés à surmonter

Trois interrogations demeurent :

- L'UEO pourra-t-elle, comme le prévoient des accords entre les deux organisations de défense, disposer des moyens (logistique, communication) de l'OTAN, alors même qu'elle agit à l'initiative de l'Union européenne dans le cadre d'opérations auxquelles ont été associés des Etats membres de l'Union européenne n'appartenant pas à l'Alliance Atlantique ? Un accord supplémentaire pourrait à cet égard se révéler nécessaire ;

- L'UEO conservera-t-elle une autonomie de décision dans les situations de crise ?

- Les Etats membres de l'Union -y compris les simples observateurs à l'UEO- pourront-ils s'accorder pour participer au renforcement des capacités opérationnelles de l'UEO indispensable si l'on souhaite vraiment que cette institution remplisse les missions qui lui sont assignées ?

Malgré ces quelques avancées, le bilan de la PESC dans le domaine de la sécurité apparaît très modeste. Il manquera encore à la politique de défense la dimension essentielle que seule pourrait procurer une clause de solidarité en cas d'agression. La plupart des Etats ont refusé au moment de la CIG l'élargissement de la clause d'assistance de l'UEO à l'ensemble des pays de l'Union européenne. Faut-il réfléchir sur un assouplissement de cette clause -beaucoup plus stricte en effet que celle prévue par l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord ?

Faut-il ouvrir d'autres voies à la réflexion ? Quoi qu'il en soit, le dispositif actuel du traité d'Amsterdam peut difficilement servir de support à l'affirmation d'une identité européenne de défense.

Les dispositions en matière de sécurité pourront toutefois être révisées à l'initiative d'un Etat membre et sur avis favorable du Conseil, après consultation du Parlement européen, par la réunion d'une conférence des représentants des gouvernements des Etats membres (art. 17§5). En revanche, les Quinze n'ont pu s'accorder sur une "clause de rendez-vous" identique à celle prévue par le traité de Maastricht -fixant à une date déterminée la révision du volet du traité consacré à la sécurité.

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