C. LES NOUVELLES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DANS LE CADRE D'UN NOUVEL ACCORD INTERINSTITUTIONNEL SUR LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE
Dans un document du 29 avril 1998 (SEC (1998) 698 final), la Commission a proposé au Conseil un nouvel accord interinstitutionnel sur " la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire ". Ce document vise, non seulement au renouvellement du précédent accord du 29 octobre 1993, mais également " à la consolidation de l'ensemble des déclarations communes et accords interinstitutionnels conclu en matière budgétaire depuis 1982 ". Parmi les propositions de la Commission pour améliorer la collaboration interinstitutionnelle au cours de la procédure budgétaire, certaines sont consacrées aux bases légales.
Projet de la Commission en date du 29 avril 1998
BASES
LEGALES
En règle générale, l'exécution des crédits
inscrits au budget pour toute action communautaire nécessite l'adoption
préalable d'une base légale.
Toutefois, peuvent être exécutés en l'absence de base
légale :
- les crédits relatifs aux actions autonomes,
menées par
la Commission dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues
par le traité ;
- les crédits inscrits sur les lignes dotées de moins de 5
millions d'euros, à condition qu'elles respectent le principe de
spécialité budgétaire ;
- les crédits relatifs aux actions préparatoires et aux projets
pilotes, dont la durée de vie n'excède pas deux ans.
Si, au
terme de ce délai, la Commission soumet à l'autorité
législative une proposition d'acte de base, les crédits
correspondants peuvent être exécutés sans base
légale pendant une année supplémentaire à titre
d'actions préparatoires ou de projets pilotes.
Toutefois, pour deux catégories d'actions préparatoires
spécifiques, les institutions conviennent des dispositions
particulières suivantes :
(a) lorsque deux programmes sont appelés à se succéder
dans un domaine déterminé, la Commission peut exécuter
sans base légale des crédits pour la mise en oeuvre d'actions
expérimentales durant une année, de manière à
tester des éléments novateurs pour ce programme
parallèlement au lancement de la procédure législative
pour son adoption ;
(b) les " lignes laboratoires ", qui financent des actions
préparatoires à l'élaboration de la législation de
mise en oeuvre de certaines politiques communautaires dont les instruments se
renouvellent et s'adaptent en permanence, sont dispensées de base
légale.
La simple lecture de ces propositions montre que la Commission semble avoir
pour seul souci d'élargir autant qu'il est possible sa marge de
manoeuvre. Mais on doit aussi remarquer que certaines de ses propositions vont
à l'encontre de la toute récente décision de la Cour de
Justice. En effet, alors que la Cour de Justice mentionne que
" rien ne
permet d'exclure qu'une action communautaire significative engendre des
dépenses limitées ",
la Commission propose
d'exonérer de bases légales
" les crédits inscrits
sur les lignes dotées de moins de 5 millions d'euros ".
Cela
signifie purement et simplement que certaines actions significatives pourraient
désormais être dépourvues de bases légales, ce qui
est contraire au traité.
De plus, la notion nouvelle que propose la Commission sous l'expression
" Crédits relatifs aux actions autonomes menées par la
Commission dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues
par le traité "
semble davantage ouvrir la voie à des
contentieux ultérieurs qu'à mettre un terme aux désaccords
entre les institutions. Quelles seraient ces actions autonomes que la
Commission pourrait mener sans l'aval du Conseil ? S'il s'agit seulement de
permettre à la Commission d'exercer pleinement son pouvoir d'initiative,
il suffit de prévoir des exceptions au profit des actions
préparatoires et des projets pilotes. Mais, puisque ces actions
préparatoires et ces projets pilotes sont mentionnés par ailleurs
dans l'énumération de la Commission, il est clair que, dans son
esprit, ces actions autonomes recouvrent autre chose. Encore conviendrait-il
d'en préciser la nature afin de juger si elles sont compatibles avec les
exigences du traité. Et, si cela était le cas, de mentionner
très précisément leur contenu afin d'éviter les
différends ultérieurs entre institutions.
Il faut en effet
avoir présent à l'esprit que dispenser de bases légales
des actions en les qualifiant d'autonomes aurait pour effet de réduire
à néant toute modalité de contrôle du Conseil
à leur égard dès lors que le Parlement dispose du dernier
mot sur leurs montants, c'est-à-dire dès lors qu'il s'agit de
dépenses non obligatoires.
C'est pourquoi on ne pourra qu'être attentif au contenu du futur accord
interinstitutionnel budgétaire, lorsqu'il viendra en négociation,
car
il ne conviendrait pas que cet accord permette le maintien d'une
pratique explicitement condamnée par la Cour de Justice.