CONCLUSION
Ainsi
que la Cour de Justice l'a rappelé le 12 mai dernier, et
conformément à sa jurisprudence constamment
réaffirmée au cours des dix dernières années,
" dans le système du traité, l'exécution d'une
dépense par la Commission suppose en principe, outre l'inscription au
budget du crédit y afférent, un acte de droit
dérivé (communément appelé " acte de
base "), dont découle cette dépense ".
Cette double exigence d'un acte de base et d'un crédit budgétaire
résulte directement du système institutionnel mis en place par le
traité, selon lequel
" les conditions d'exercice du pouvoir
normatif et celles du pouvoir budgétaire ne sont pas les
mêmes "
.
Or, l'on constate qu'
un grand nombre d'actions budgétaires en cours
d'engagement demeurent dépourvues de bases légales. Il convient
donc tout d'abord que le Gouvernement français insiste au sein du
Conseil pour qu'il soit mis fin à cette situation qui est contraire tout
à la fois au traité, aux dispositions de la déclaration
commune du Conseil, du Parlement et de la Commission du 30 juin 1982, et
à la jurisprudence constante de la Cour de Justice.
De plus, il importe que le Gouvernement s'attache, dans le cadre des
discussions qui vont s'engager à propos du nouvel " accord
interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et
l'amélioration de la procédure budgétaire ", au
respect de l'équilibre défini par le traité entre le
pouvoir normatif et le pouvoir budgétaire. Dès novembre 1982, la
délégation du Sénat avait signalé
l'imprécision des termes de la déclaration commune du 30 juin
1982 et souligné que les ambiguïtés de ce texte
annonçaient des
" divergences d'interprétation sur des
points essentiels ".
Le nouvel accord interinstitutionnel devrait
s'attacher à dissiper ces ambiguïtés, notamment en
précisant la notion d'actions non significatives. Il ne saurait, sans
méconnaître les dispositions et l'esprit du traité,
introduire des exceptions qui reviendraient à permettre à la
Commission de tenir en échec l'application du principe de l'adoption
préalable d'un acte de base.
A cet égard, les propositions formulées par la Commission le
29 avril dernier paraissent de nature à multiplier les
ambiguïtés - et par là même les sources de contentieux
- plutôt qu'à les dissiper. Il est vrai que ces propositions ont
été rendues publiques par la Commission avant le dernier
arrêt de la Cour de Justice et que la réaffirmation par cette
dernière de l'équilibre découlant du traité est
sans doute de nature à amener la Commission à modifier celles-ci.
En tout état de cause,
il convient que le Gouvernement manifeste
clairement sa volonté qu'il ne soit pas porté atteinte à
l'équilibre défini par le traité et qu'il informe le
Sénat du déroulement des négociations sur ce point.
Enfin, il convient de noter que la question des bases légales n'est
qu'un point particulier dans l'ensemble des propositions formulées par
la Commission pour le nouvel accord interinstitutionnel et que ce nouvel accord
aura une influence déterminante sur la répartition des pouvoirs
entre les institutions en matière budgétaire. Cela montre une
fois de plus qu'
il importe qu'à l'avenir l'Assemblée nationale
et le Sénat soient saisis par le Gouvernement, dans le cadre de
l'article 88-4 de la Constitution, des projets d'accords interinstitutionnels.
La délégation s'était déjà
prononcée en ce sens à l'occasion du rapport de notre
collègue Lucien Lanier sur une réforme de l'article 88-4 de la
Constitution. L'étude des bases légales montre une fois de plus
qu'il convient de modifier la Constitution afin que les conclusions que nous
pouvons tirer sur des sujets aussi importants que celui-ci puissent être
portées à la connaissance du Gouvernement au travers d'une
résolution.