Budget européen
BADRE (Denis)
RAPPORT D'INFORMATION 489 (97-98) - DELEGATION DU SENAT POUR L'UNION EUROPEENNE
Table des matières
- I. L'ORIGINE DU PROBLÈME DES BASES LÉGALES
- II. L'APPLICATION DU PRINCIPE DES BASES LÉGALES
- III. LE BILAN ACTUEL DE LA SITUATION DU BUDGET EUROPÉEN AU REGARD DE LA REGULARITÉ JURIDIQUE DES DÉPENSES ENGAGÉES
- IV. L'ARRET DE LA COUR DE JUSTICE ET LES NOUVELLES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
- CONCLUSION
- ANNEXE
Mesdames, Messieurs,
A l'occasion de l'examen de la proposition d'acte communautaire E 925
concernant "
le développement et la consolidation de la
démocratie et de l'état de droit ainsi que le respect des droits
de l'homme et des libertés fondamentales
", la
délégation pour l'Union européenne avait été
amenée à évoquer un problème plus
général : celui de l'existence, dans le budget
communautaire, de crédits portant sur des montants souvent importants
qui sont inscrits sans base légale, c'est-à-dire sans
autorisation formelle du Conseil.
Or, pour qu'une dépense communautaire puisse être
engagée, il faut, d'une part, qu'un crédit soit inscrit à
cet effet dans le budget communautaire, et, d'autre part, qu'un acte de base,
relevant de l'autorité législative, autorise cette
dépense
; en d'autres termes, il faut à la fois une
décision budgétaire et une décision normative.
Cette double exigence a été reconnue par les institutions
communautaires dans une "
déclaration commune du Parlement
européen, du Conseil et de la Commission
" en date du 30 juin
1982 qui précise que "
l'exécution de crédits
inscrits au budget pour toute nouvelle action communautaire significative
nécessite l'arrêt préalable d'un règlement de
base
". Cette déclaration a ensuite été
confirmée par une nouvelle déclaration, annexée à
l'accord interinstitutionnel signé entre le Parlement européen,
le Conseil et la Commission le 29 octobre 1993, et qui indique que
"
les trois institutions confirment leur attachement aux principes
énoncés au chapitre IV, paragraphe 3 b) et c) de la
déclaration commune de 1982, concernant les montants maximaux et
l'exigence d'une base légale, et s'engagent à en améliorer
la mise en oeuvre
".
Mais, en dépit de ce nouvel engagement de 1993, la déclaration
de discipline budgétaire de 1982 n'a pas été
respectée.
C'est la raison pour laquelle la délégation
a adopté, le 4 décembre 1997, à l'occasion de l'examen de
la proposition d'acte communautaire E 925, des conclusions dans lesquelles elle
s'étonnait que, pendant plusieurs années, l'Union
européenne ait pu financer, sans base juridique, des actions importantes
comme celle en faveur des droits de l'homme.
Or, cette question connaît une nouvelle actualité avec
l'arrêt rendu par la Cour de Justice des Communautés
européennes le 12 mai 1998, ainsi qu'avec les nouvelles propositions
d'exceptions au principe des bases légales que la Commission a rendues
publiques le 29 avril dernier.
Après avoir rappelé l'origine du problème des bases
légales nécessaires à l'inscription des crédits
dans le budget communautaire, le présent rapport décrit les
conditions dans lesquelles ce principe a été appliqué par
la Commission européenne ; il fournit ainsi le bilan actuel de la
situation du budget communautaire au regard de la régularité des
crédits inscrits au budget ; il évoque enfin les nouvelles
propositions d'exceptions proposées par la Commission après sa
condamnation par la Cour de Justice.
I. L'ORIGINE DU PROBLÈME DES BASES LÉGALES
Jusqu'en
1979, année d'élection au suffrage universel direct du Parlement
européen, c'est-à-dire tant que le Conseil a exercé seul
le pouvoir budgétaire, le budget européen a été
établi sans conflit majeur entre les institutions européennes. En
revanche, dès 1980, le Parlement rejetait pour la première fois
le budget qui avait été arrêté avec six mois de
retard. C'est à l'occasion de ce premier conflit qu'est apparue la
question des bases légales des dépenses communautaires.
Ceci s'explique par le fait que la question des bases légales n'est que
la traduction juridique des rapports entre le pouvoir législatif et le
pouvoir budgétaire dans le système institutionnel de la
Communauté.
Le problème essentiel que recouvre cette expression étrange de
" base légale "
peut être ainsi
résumé : dès lors qu'un crédit est inscrit dans le
budget de la Communauté, la dépense peut-elle être
engagée, même s'il n'existe aucun texte normatif
définissant et autorisant l'action communautaire ainsi financée ?
Cette question n'est pas particulière à la Communauté et
on en retrouve peu ou prou la traduction dans les systèmes
institutionnels des Etats membres. Toutefois, elle se pose d'une manière
totalement spécifique dans la Communauté en raison des
particularités du système institutionnel communautaire. On sait
en effet que, dans le système institutionnel de la Communauté :
- le pouvoir normatif est partagé entre les trois institutions : la
Commission qui a un pouvoir d'initiative, le Conseil et le Parlement qui ont le
pouvoir de décision,
- le pouvoir exécutif est partagé entre deux institutions : la
Commission et le Conseil.
Mais, et c'est là que le système montre toute sa
complexité, la répartition des pouvoirs de décision entre
le Conseil et le Parlement n'est pas la même dans le domaine normatif et
dans le domaine budgétaire. En effet, dans le domaine budgétaire,
le Parlement peut, dans le cas des dépenses non obligatoires, faire
prévaloir ses demandes même si le Conseil n'est pas d'accord ; il
peut donc obtenir l'inscription de certains crédits en dépit de
l'opposition du Conseil. En revanche, dans le domaine normatif, le Parlement ne
peut jamais faire adopter une action si le Conseil y est totalement
opposé et si un accord ne se dégage pas entre Conseil et
Parlement.
Pour illustrer ce mécanisme par un cas concret, on peut citer l'exemple
qui a donné lieu au dernier arrêt de la Cour de Justice en
matière de base légale, il y a moins d'un mois. En septembre
1993, la Commission a présenté une proposition de décision
du Conseil portant adoption d'un programme d'action à moyen terme de
lutte contre l'exclusion et de promotion de la solidarité portant sur la
période 1994-1999, intitulé
" Pauvreté
4 ".
Dès la fin du mois de juin 1995, il est apparu que la
proposition
" Pauvreté 4 "
ne serait pas adoptée
par le Conseil. Le budget européen pour l'exercice 1995 prévoyait
néanmoins 20 millions d'écus en faveur de la lutte contre la
pauvreté et l'exclusion sociale. Or, dans un communiqué de presse
du 23 janvier 1996, la Commission a annoncé l'octroi de subventions
à 86 projets de lutte contre l'exclusion sociale pour un montant total
de 6 millions d'écus. C'est bien là un exemple précis de
crédit budgétaire engagé par la Commission alors qu'il
n'existait pas d'acte de droit dérivé autorisant l'action que ce
crédit doit financer.
Et l'on comprend toute l'importance de cette question sous l'angle
institutionnel : il s'agit en fait de savoir si, lorsque le Conseil a
refusé une action proposée par la Commission, celle-ci a quand
même le droit d'engager cette action du seul fait qu'il existe des
crédits dans le budget à cette fin.
*
A. LA CRISE BUDGÉTAIRE DE 1982 ET LE PREMIER ACCORD INTERINSTITUTIONNEL
Cette question n'est pas nouvelle. Elle est apparue dans le débat entre les institutions dès le début des années 1980. Elle figurait d'ailleurs au milieu de nombreuses autres questions à propos desquelles les institutions se sont alors affrontées. Le point culminant de la crise est apparu à la fin de 1981. Le budget pour 1982 fut même arrêté par le Président du Parlement sans l'accord du Conseil sur la classification des dépenses en dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires. Pour sauvegarder ses compétences, le Conseil a alors engagé une action devant la Cour de Justice. Mais, parallèlement, un dialogue s'est mis en place entre les trois institutions. Et ce dialogue a abouti, en 1982, à un accord qui a été signé sous la forme d'une déclaration commune du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.
Déclaration commune du Parlement européen,
du Conseil et de la Commission du 30 juin 1982
L'exécution de crédits inscrits au budget pour
toute
nouvelle action communautaire significative nécessite l'arrêt
préalable d'un règlement de base. Dans le cas où de tels
crédits seraient inscrits au budget avant qu'une proposition de
règlement ait été soumise, la Commission est
invitée à présenter une proposition pour la fin de janvier
au plus tard.
Le Conseil et le Parlement prennent l'engagement de tout mettre en oeuvre afin
que le règlement en question soit arrêté au plus tard
à la fin mai.
Dans le cas cependant où le règlement ne pourrait être
arrêté dans ce délai, la Commission soumet des propositions
de rechange (virements) permettant d'assurer l'utilisation pendant
l'année budgétaire des crédits dont il s'agit.
Que contenait cette déclaration commune ?
1° - Elle affirmait d'abord avec netteté l'exigence d'un
règlement de base, c'est-à-dire d'un acte de droit
dérivé, pour l'exécution des crédits inscrits au
budget pour une "
nouvelle action communautaire
significative
". Pour exécuter de tels crédits, il faut
donc, d'une part, qu'ils soient inscrits au budget et, d'autre part, qu'ils
correspondent à une action définie par un acte communautaire. Et
la déclaration commune ajoutait que ce règlement de base devait
être "
préalable
".
2° - Pour le cas où des crédits seraient inscrits au budget
sans qu'il y ait un règlement de base préalable, elle invitait la
Commission à présenter une proposition et elle prenait acte de
l'engagement du Conseil et du Parlement à tout mettre en oeuvre pour que
le règlement soit adopté rapidement.
On comprend bien la logique qui sous-tend cette déclaration commune.
Elle pose d'abord clairement le principe qu'une action communautaire nouvelle
et significative exige à la fois des crédits et un acte
communautaire. Elle précise que l'acte communautaire doit être
préalable à l'inscription des crédits. Pour le cas
où l'inscription des crédits se ferait avant l'adoption d'un acte
communautaire, elle demande que cet acte communautaire soit adopté
rapidement. Mais, tant que l'acte communautaire n'est pas adopté, il est
clair que les crédits ne peuvent être
exécutés.
B. LES RÉSERVES DE LA COMMISSION
Dans une
déclaration inscrite au procès-verbal de la réunion du
28 juin 1982 entre le Conseil, le Parlement européen et la
Commission, la Commission avait cependant introduit une exception au principe
des bases légales : "
L'exigence de l'adoption d'un acte
législatif préalable à l'exécution de
crédits inscrits au budget pour toute nouvelle action communautaire
significative permet à la Commission, conformément à
l'usage, d'assumer les tâches inhérentes à ses fonctions et
notamment à l'exercice de son pouvoir d'initiative en lançant
sous sa propre responsabilité
les études ou
expériences nécessaires à l'élaboration de ses
propositions
"
.
Cette marge de manoeuvre de la Commission s'est notamment traduite dans les
"
projets-pilotes
" et les "
actions
préparatoires
", qu'elle considère comme des
actions
non significatives
ne réclamant donc pas une " base
légale ".
1. Les " projets pilotes "
Les " projets-pilotes " sont, pour la Commission européenne, des actions ponctuelles qui se caractérisent par leur caractère exploratoire ; le " projet-pilote " constitue à ce titre une expérience spécifique et limitée, une opération de sondage et d'essai qui se distingue donc des actions permanentes " par son caractère individuel et par essence éphémère " ; les " projets-pilotes " sont de ce fait exonérés, selon l'interprétation du Parlement européen et de la Commission, de l'exigence de bases légales.
2. Les " actions préparatoires "
Les " actions préparatoires ", à la différence des " projets-pilotes ", s'inscrivent dans une perpective future en vue de préparer un programme à venir, " par exemple en explorant la possibilité de recourir, pour une intervention nouvelle, à un instrument existant, ou en étudiant l'opportunité et l'utilité d'un instrument nouveau ". Dans la mesure où une action préparatoire peut revêtir des formes plus variées et une durée plus longue que le projet pilote, elle rend plus facile l'engagement de crédits souvent renouvelés sans bases légales.
C. LES CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION DU SÉNAT POUR LES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES LE 3 NOVEMBRE 1982
Le
rapporteur de la délégation du Sénat pour les
Communautés européennes, M. Georges SPENALE, s'était
penché à l'époque sur cet accord ; il avait
analysé le mécanisme mis en place pour assurer le lien entre le
pouvoir budgétaire et le pouvoir normatif.
Le rapporteur avait notamment insisté sur la divergence des
thèses en présence avant l'accord du 30 juin 1982, le Conseil
maintenant que l'inscription d'une ligne au budget n'a que la valeur d'une
autorisation budgétaire qui doit être relayée par une
réglementation à valeur législative, le Parlement
considérant à l'inverse que le budget constitue la condition
nécessaire et suffisante de l'engagement des crédits, la
Commission pour sa part estimant être habilitée à engager
des dépenses nouvelles lorsqu'elles correspondent à des actions
ponctuelles.
Le rapport de la délégation soulignait que des divergences
d'interprétation à propos de l'accord conclu entre les trois
institutions pourraient surgir sur deux points : d'une part sur la notion
de nouvelles actions communautaires significatives où la position du
Parlement et de la Commission étaient déjà sensiblement
différentes ; d'autre part sur les conditions d'utilisation par la
Commission des crédits devenus éventuellement disponibles, le
Parlement risquant de vouloir engager l'intégralité des
crédits inscrits au budget.
En conclusion, la délégation s'inquiétait de ce que le
texte "
à certains égards ambigu, ait déjà
fait l'objet de divergences d'interprétation sur des points
essentiels
". Mettant en particulier l'accent
" sur
l'ambiguïté du compromis élaboré en matière de
plafonnement de certains crédits par voie normative
", elle
craignait à cet égard "
l'apparition de sérieux
différends entre l'Assemblée et le Conseil
".
L'histoire ne l'a pas détrompée. Il suffit
d'énumérer les arrêts que la Cour de Justice a dû
rendre à ce propos pour comprendre que la querelle institutionnelle sur
ce point n'a pas cessé depuis lors :
- arrêt du 11 juillet 1985,
- arrêt du 23 avril 1986,
- arrêt du 30 mai 1989,
- arrêt du 24 octobre 1989,
- arrêt du 12 mai 1998.
II. L'APPLICATION DU PRINCIPE DES BASES LÉGALES
A la
suite des controverses persistantes sur les bases légales, la Commission
s'est engagée, dans une communication du 6 juillet 1994, à
proposer une base juridique pour un certain nombre de lignes budgétaires.
Elle a distingué à cet effet les actions significatives et les
actions non significatives dans le budget communautaire pour 1995.
A. LES ACTIONS DITES SIGNIFICATIVES
Dans le cadre des actions dites " significatives ", la Commission a alors distingué les lignes budgétaires pour lesquelles des propositions de bases légales avaient été faites mais n'avaient pas encore été adoptées, et les lignes budgétaires sans règlements pour lesquelles elle était disposée à faire des propositions de bases légales.
1. Lignes pour lesquelles la Commission a proposé une base légale qui n'a pas encore été adoptée
N°
de ligne
|
Intitulé |
Montant en CE |
Date de la proposition |
B2-517 |
Ressources génétiques végétales et animale |
3.500.000 |
07.09.93 |
B2-604 |
Contribution de la Communauté au Fonds international pour l'Irlande |
15.000.000 |
03.03.94 |
B3-1001 |
SOCRATES |
155.900.000 |
03.02.94 |
B3-101 |
Jeunesse pour l'Europe |
22.000.000 |
04.11.93 |
B3-1021 |
LEONARDO |
117.300.000 |
21.12.93 |
B3-4004 |
Rencontres transnationales entre représentants de salariés d'entreprises et déployant leurs activités sur une base transfrontalière |
8.000.000 |
12.12.90 |
B3-4103 |
Actions de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale |
22.000.000 |
22.09.93 |
B3-4300 |
Santé publique, promotion de la santé, information sur la santé, éducation à la santé et formation en matière de santé publique |
6.000.000 |
24.11.93 |
B3-4303 |
Aspects sanitaires de l'abus de drogues |
3.500.000 |
24.11.93 |
B4-1000 |
THERMIE II (Programme communautaire de soutien financier pour la promotion de technologies énergétiques européennes |
30.000.000 |
13.04.94 |
B5-321 |
Economie sociale |
1.400.000 |
16.02.94 |
B5-700 |
Soutien financier aux projets en matière d'infrastructure des transports à l'intérieur de la Communauté |
216.000.000 |
02.03.94 |
B5-710 |
Soutien financier aux infrastructures énergétiques |
15.000.000 |
02.03.94 |
B5-720 |
Réseaux transeuropéens dans le domaine des télécommunications |
30.000.000 |
02.03.94 |
B5-721 |
IDA (Réseau pour l'échange de données entre administrations) |
65.000.000 |
12.03.93 |
B7-4031 |
Quatrième protocole financier avec la Turquie |
13.000.000 |
janvier 89 |
B7-4083 |
Actions communautaires liées à l'accord de paix conclu entre Israël et l'Organisation de libération de la Palestine |
52.000.000 |
10.01.94 |
B7-5023 |
Compensation pour les produits bananiers des pays ACP |
40.000.000 |
03.12.92 |
B7-5025 |
Programme de diversification et de développement au bénéfice de certains pays latino-américains producteurs de bananes |
10.000.000 |
25.11.92 |
B7-5041 |
Forêts tropicales |
50.000.000 |
28.01.94 |
2. Lignes pour lesquelles la Commission est disposée à proposer une base légale
N°
Ligne
|
Intitulé |
Montant en CE |
B2-600 |
Promotion d'actions de coopération interrégionale |
6.300.000 |
B2-601 |
Centres européens d'entreprises et innovation |
8.000.000 |
B2-704 |
Mise en place et développement de la politique commune des transports |
6.500.000 |
B3-2000 |
Sauvegarde et mise en valeur du patrimoine culturel européen |
8.100.000 |
B3-2001 |
Actions d'encouragement aux initiatives culturelles de rayonnement européen |
5.500.000 |
B3-4010 |
Marché du travail et emploi |
9.500.000 |
B4-1040 |
Observation des marchés et programmation énergétique |
5.000.000 |
B4-1041 |
Charte européenne de l'énergie et coopération énergétique avec pays tiers |
9.000.000 |
B4-306 |
Sensibilisation et subventions |
8.000.000 |
B5-401 |
Définition et mise en oeuvre de la politique communautaire des télécommunications et des postes |
9.000.000 |
B5-411 |
Actions dans le domaine industriel |
5.000.000 |
B7-215 |
Aide humanitaire aux populations des Etats indépendants de l'ancienne Union Soviétique |
46.700.000 |
B7-216 |
Aide humanitaire aux pays tiers |
12.100.000 |
B7-302 |
Aide en vue de l'autosuffisance des réfugiés et personnes déplacées |
60.000.000 |
B7-4082 |
Mesures exceptionnelles destinées à favoriser la création d'emplois au Maghreb |
37.000.000 |
B7-5010 |
Participation communautaire à des actions en faveur de PVD exécutées par des ONG |
135.000.000 |
B7-5022 |
Promotion des exportations de la Comm. à destination des pays-tiers, notamment le Japon |
10.750.000 |
B7-5040 |
Environnement dans les PVD |
13.200.000 |
B7-5046 |
Programmes sanitaires et lutte contre le sida dans les PVD |
12.500.000 |
B7-5050 |
Aides aux politiques et programmes démographiques dans les PVD |
6.000.000 |
B7-5070
|
Programmes d'actions concernant l'Afrique du Sud |
100.000.000 |
B7-5071 |
Programmes de réhabilitation en Afrique australe |
15.000.000 |
B7-5076 |
Actions de réhabilitation et de reconstruction en faveur des PVD |
55.000.000 |
B7-5077 |
Coopération décentralisée dans les PVD |
5.000.000 |
B7-5080 |
Coopération Nord-Sud dans la lutte contre les drogues et la toxicomanie |
10.000.000 |
B. LES ACTIONS DITES NON-SIGNIFICATIVES
Pour les
actions dites non significatives, pour lesquelles un acte normatif n'est pas
indispensable, la Commission a cependant accepté un encadrement dans
trois domaines :
- les aides d'urgence ;
- les actions autonomes ;
- les actions ponctuelles, c'est-à-dire inférieures à 5
millions d'écus.
1. Les aides d'urgence
B4-3400 |
Aide
à des populations de la Communauté victimes de catastrophes
|
B7-210 |
Aide à des populations de PVD et d'autres pays tiers victimes de catastrophes ou de crises graves (41 MioECU) |
B7-217 |
Aide d'urgence aux réfugiés et personnes déplacées dans des PVD et d'autres pays tiers (6 MioECU) |
2. Les actions autonomes pour lesquelles la Commission n'estime pas nécessaire de prévoir une base légale spécifique
B2-514 |
Formation et information (en agriculture) (2,2 MioECU) |
B3-300 |
Actions générales d'information (27,5 MioECU) |
B3-301 |
Relais d'information (8,5 MioECU) |
B3-302 |
Programme d'information vers les pays tiers (7 MioECU) |
B3-303 |
Actions générales de communication (12,5 MioECU) |
B3-306 |
Actions d'information pour des politiques spécifiques (2,5 MioECU) |
B3-4000 |
Relations industrielles et dialogue social (7,04 MioECU) |
B5-102 |
Information du consommateur et tests comparatifs (6,55 MioECU) |
3. Les actions ponctuelles (dotées de crédits d'engagement supérieurs à 5 millions d'écus)
N°
de ligne
|
Intitulé |
Montant en CE |
Remarques |
B7-4092 |
Travaux préparatoires à la reconstruction des républiques issues de l'ancienne Yougoslavie |
5.000.000 |
Actions préparatoires |
B7-5020 |
Accords de coopération économique et commerciale avec des pays tiers |
8.250.000 |
Actions ponctuelles découlant des accords |
III. LE BILAN ACTUEL DE LA SITUATION DU BUDGET EUROPÉEN AU REGARD DE LA REGULARITÉ JURIDIQUE DES DÉPENSES ENGAGÉES
Il
convient à présent d'examiner si les derniers budgets permettent
de constater une amélioration notable en ce domaine.
On doit d'abord constater que les documents budgétaires, du fait du
manque de continuité dans la nomenclature des lignes de crédits,
ne permettent pas de retrouver toutes les actions qui avaient été
mentionnées par la Commission dans sa communication relative aux bases
légales. Sous réserve d'investigations plus poussées, il
est possible cependant d'établir une liste des projets ayant
été régularisés et une liste des projets non
régularisés.
A. LES PROJETS AYANT REÇU UNE BASE LÉGALE DEPUIS LA DERNIÈRE COMMUNICATION DE LA COMMISSION
Il
s'agit des projets ou programmes suivants :
- " SOCRATES " en faveur de l'
enseignement
;
- Jeunesse pour l'Europe
;
-
Santé publique
, promotion de la santé, information sur
la santé, éducation à la santé et formation en
matière de santé publique ;
- soutien financier aux projets en matière d'
infrastructure des
transports
à l'intérieur de la Communauté ;
- actions communautaires liées à l'
accord de paix entre
Israël et l'OLP
;
- compensation pour
les produits bananiers
ACP ;
- forêts tropicales
;
- aide en vue de l'autosuffisance des
réfugiés
et des
personnes déplacées (règlement du 20 juin 1996 sur l'aide
humanitaire) ;
-
environnement
dans les pays en voie de développement
(règlement du 22 avril 1997) ;
- programmes sanitaires et
lutte contre le SIDA
dans les pays en voie
de développement (règlement du 24 mars 1997) ;
- aides aux politiques et
programme démographique
dans les pays
en voie de développement (règlement du 22 juillet 1997) ;
- programmes de réhabilitation en
Afrique australe
(règlement du 22 novembre 1996) ;
- actions de réhabilitation et de
reconstruction
en faveur des
pays en voie de développement (règlement du 22 novembre
1996) ;
-
coopération
décentralisée en faveur des pays en
voie de développement (règlement du 11 juillet 1995) ;
- actions d'encouragement aux
initiatives culturelles
de rayonnement
européen (Programme Kaléidoscope : décision du 29
mars 1996) ;
- charte européenne de l
'énergie
et programmation
énergétique avec les pays tiers (Programme
" synergy " : règlement du 14 avril 1997) ;
-
sensibilisation
et subventions : proposition modifiée de
décision du 4 décembre 1996 ; position commune du
17 avril 1997 ; proposition modifiée du 6 février
1997 ; position commune du 24 avril 1997 ;
- définition et mise en oeuvre de la politique communautaire des
télécommunications
et des postes : proposition du
11 avril 1996 ;
- aide humanitaire
aux populations des Etats indépendants de
l'ancienne Union soviétique : règlement du 20 juin
1996 ;
-
aide humanitaire
aux pays tiers : règlement du 20 juin
1996 .
B. LES PROJETS N'AYANT PAS REÇU DE BASE LÉGALE DEPUIS LA DERNIÈRE COMMUNICATION DE LA COMMISSION
Il s'agit des projets ou programmes suivants :
- action de
lutte contre la pauvreté
et l'exclusion
sociale ;
- THERMIE II ;
- Economie sociale
;
- Programme de diversification et de développement au
bénéfice de certains pays latino-américains
producteurs
de banane
;
- quatrième protocole financier avec la
Turquie
;
- participation communautaire à des actions en faveur des pays en voie
de développement exécutées par des
ONG
(proposition
de règlement du 11 juillet 1995 non adopté dans le budget pour
1998) ;
- sauvegarde et mise en valeur du
patrimoine culturel
européen
(proposition du 29 mars 1995 non adoptée) ;
- observation des marchés et
programmation
énergétique
;
- action dans le
domaine industriel
;
- programmes d'action concernant l'
Afrique du Sud
;
- marché du
travail et emploi
;
- promotion d'actions de
coopération interrégionale
;
- centres européens d'entreprises et
innovation
;
- mise en place et développement de la politique commune des
transports
;
- mesures exceptionnelles destinées à favoriser la
création d'emplois au
Maghreb
.
IV. L'ARRET DE LA COUR DE JUSTICE ET LES NOUVELLES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
A la suite d'un dernier contentieux, la Cour de Justice vient de rappeler, dans son arrêt du 12 mai 1998, le régime des bases légales du budget européen.
A. LE CONTEXTE DU RECOURS DU ROYAUME-UNI
Par une
décision du 22 juillet 1975,
le Conseil avait adopté un
programme de projets pilotes et d'études pilotes pour combattre la
pauvreté
; reconduit à plusieurs reprises, le dernier
programme d'action communautaire à moyen terme concernant
l'intégration économique et sociale des groupes de personnes
économiquement et socialement moins favorisées et intitulé
" Pauvreté 3 " couvrait la période comprise entre le
1
er
juillet 1989 et le 30 juin 1994.
Le 22 septembre 1993, la Commission a présenté une proposition de
décision du Conseil portant adoption d'un programme d'action à
moyen terme de lutte contre l'exclusion et de promotion de la solidarité
portant sur la période 1994-1999 intitulé " Pauvreté
4 ".
Dès la fin du mois de juin 1995, il est apparu que la
proposition " Pauvreté 4 " ne serait pas adoptée par le
Conseil. Mais le poste de dépense B3-4103 du budget
général de l'Union européen pour l'exercice 1995
prévoyait néanmoins 20 millions d'écus en faveur de la
lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale
.
Par un communiqué de presse du 11 août 1995,
complété par une note d'information du 16 août 1995
intitulée "
financement européen de projets d'action
contre l'exclusion sociale
", la Commission avait annoncé un
programme dans ce domaine pour l'année 1995 ; dans un communiqué
de presse du 23 janvier 1996, la Commission avait ainsi annoncé l'octroi
de subventions à 86 projets de lutte contre l'exclusion sociale pour un
montant total de 6 millions d'écus. Le Royaume Uni, soutenu dans sa
démarche par la République fédérale d'Allemagne, le
Conseil et le Royaume de Danemark, a alors demandé à la Cour de
Justice l'annulation des décisions visées dans ce dernier
communiqué ; la Commission était soutenue, de son
côté, par le Parlement européen.
B. L'ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE
La
Commission, soutenue par le Parlement européen, tout en admettant que
seules les actions communautaires non significatives peuvent être
financées sur la seule base de l'inscription du crédit
correspondant au budget, estimait que les projets litigieux relèvent de
cette catégorie, de sorte qu'elle aurait été
compétente pour décider leur financement
.
A l'inverse, le Royaume-Uni, soutenu par l'Allemagne, le Danemark et le
Conseil, estimait que la Commission n'avait pas compétence pour engager
les dépenses de financement des 86 projets litigieux au titre de la
ligne budgétaire B3-4103, car, selon le traité et l'accord
interinstitutionnel de 1982,
"
toute dépense
communautaire nécessiterait une double base légale, à
savoir son inscription au budget, et, en règle générale,
l'arrêt préalable d'un acte de droit dérivé
autorisant la dépense en question
. Seul ferait exception
à cette seconde exigence le financement d'actions non significatives,
à savoir les études pilotes et les actions préparatoires
destinées à évaluer le pour et le contre, du point de vue
politique, d'une proposition d'acte de base. Dans cette dernière
hypothèse, la base légale résiderait dans le pouvoir
d'initiative de la Commission, qui découlerait directement du
traité.
Or, les projets litigieux ne feraient manifestement
pas partie de telles actions non significatives, alors que par ailleurs aucun
acte de base autorisant leur financement n'aurait été
adopté par le Conseil. "
Se référant explicitement à la déclaration commune
du 30 juin 1982, la Cour de Justice a finalement estimé que
"
l'exécution des dépenses communautaires relatives
à toute action communautaire significative suppose non seulement
l'inscription du crédit correspondant au budget de la Communauté,
qui relève de l'autorité budgétaire, mais encore
l'adoption préalable d'un acte de base autorisant lesdites
dépenses, qui relève de l'autorité
législative
, alors que l'exécution des
crédits budgétaires pour les actions communautaires qui ne
relèvent pas de cette catégorie, à savoir les actions
communautaires non significatives, ne nécessite pas l'adoption d'un tel
acte de base
".
La Commission avait certes fait observer que les projets litigieux
constituaient des actions non significatives car visant des activités
à court terme, d'une durée maximale d'un an, non
coordonnées entre elles et qui engendrent des dépenses beaucoup
moins importantes que les actions pluriannuelles visées par les
programmes Pauvreté 3 et 4, lesquels prévoyaient la mise en place
d'un "
Observatoire des politiques nationales de lutte contre
l'exclusion sociale
".
Mais la Cour n'a pas retenu cet argument, car de son point de vue
" rien ne permet d'exclure qu'une action communautaire significative
engendre des dépenses limitées, ni que ses effets soient
limités dans le temps. Admettre le contraire reviendrait par ailleurs
à permettre à la Commission de tenir en échec
l'application du principe de l'adoption préalable d'un acte de base
simplement en limitant la portée de l'action en question tout en la
reconduisant d'année en année ".
Dès lors,
pour la Cour, la Commission n'était pas compétente pour engager
les dépenses nécessaires au financement des projets en
cause.
C. LES NOUVELLES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DANS LE CADRE D'UN NOUVEL ACCORD INTERINSTITUTIONNEL SUR LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE
Dans un document du 29 avril 1998 (SEC (1998) 698 final), la Commission a proposé au Conseil un nouvel accord interinstitutionnel sur " la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire ". Ce document vise, non seulement au renouvellement du précédent accord du 29 octobre 1993, mais également " à la consolidation de l'ensemble des déclarations communes et accords interinstitutionnels conclu en matière budgétaire depuis 1982 ". Parmi les propositions de la Commission pour améliorer la collaboration interinstitutionnelle au cours de la procédure budgétaire, certaines sont consacrées aux bases légales.
Projet de la Commission en date du 29 avril 1998
BASES
LEGALES
En règle générale, l'exécution des crédits
inscrits au budget pour toute action communautaire nécessite l'adoption
préalable d'une base légale.
Toutefois, peuvent être exécutés en l'absence de base
légale :
- les crédits relatifs aux actions autonomes,
menées par
la Commission dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues
par le traité ;
- les crédits inscrits sur les lignes dotées de moins de 5
millions d'euros, à condition qu'elles respectent le principe de
spécialité budgétaire ;
- les crédits relatifs aux actions préparatoires et aux projets
pilotes, dont la durée de vie n'excède pas deux ans.
Si, au
terme de ce délai, la Commission soumet à l'autorité
législative une proposition d'acte de base, les crédits
correspondants peuvent être exécutés sans base
légale pendant une année supplémentaire à titre
d'actions préparatoires ou de projets pilotes.
Toutefois, pour deux catégories d'actions préparatoires
spécifiques, les institutions conviennent des dispositions
particulières suivantes :
(a) lorsque deux programmes sont appelés à se succéder
dans un domaine déterminé, la Commission peut exécuter
sans base légale des crédits pour la mise en oeuvre d'actions
expérimentales durant une année, de manière à
tester des éléments novateurs pour ce programme
parallèlement au lancement de la procédure législative
pour son adoption ;
(b) les " lignes laboratoires ", qui financent des actions
préparatoires à l'élaboration de la législation de
mise en oeuvre de certaines politiques communautaires dont les instruments se
renouvellent et s'adaptent en permanence, sont dispensées de base
légale.
La simple lecture de ces propositions montre que la Commission semble avoir
pour seul souci d'élargir autant qu'il est possible sa marge de
manoeuvre. Mais on doit aussi remarquer que certaines de ses propositions vont
à l'encontre de la toute récente décision de la Cour de
Justice. En effet, alors que la Cour de Justice mentionne que
" rien ne
permet d'exclure qu'une action communautaire significative engendre des
dépenses limitées ",
la Commission propose
d'exonérer de bases légales
" les crédits inscrits
sur les lignes dotées de moins de 5 millions d'euros ".
Cela
signifie purement et simplement que certaines actions significatives pourraient
désormais être dépourvues de bases légales, ce qui
est contraire au traité.
De plus, la notion nouvelle que propose la Commission sous l'expression
" Crédits relatifs aux actions autonomes menées par la
Commission dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues
par le traité "
semble davantage ouvrir la voie à des
contentieux ultérieurs qu'à mettre un terme aux désaccords
entre les institutions. Quelles seraient ces actions autonomes que la
Commission pourrait mener sans l'aval du Conseil ? S'il s'agit seulement de
permettre à la Commission d'exercer pleinement son pouvoir d'initiative,
il suffit de prévoir des exceptions au profit des actions
préparatoires et des projets pilotes. Mais, puisque ces actions
préparatoires et ces projets pilotes sont mentionnés par ailleurs
dans l'énumération de la Commission, il est clair que, dans son
esprit, ces actions autonomes recouvrent autre chose. Encore conviendrait-il
d'en préciser la nature afin de juger si elles sont compatibles avec les
exigences du traité. Et, si cela était le cas, de mentionner
très précisément leur contenu afin d'éviter les
différends ultérieurs entre institutions.
Il faut en effet
avoir présent à l'esprit que dispenser de bases légales
des actions en les qualifiant d'autonomes aurait pour effet de réduire
à néant toute modalité de contrôle du Conseil
à leur égard dès lors que le Parlement dispose du dernier
mot sur leurs montants, c'est-à-dire dès lors qu'il s'agit de
dépenses non obligatoires.
C'est pourquoi on ne pourra qu'être attentif au contenu du futur accord
interinstitutionnel budgétaire, lorsqu'il viendra en négociation,
car
il ne conviendrait pas que cet accord permette le maintien d'une
pratique explicitement condamnée par la Cour de Justice.
CONCLUSION
Ainsi
que la Cour de Justice l'a rappelé le 12 mai dernier, et
conformément à sa jurisprudence constamment
réaffirmée au cours des dix dernières années,
" dans le système du traité, l'exécution d'une
dépense par la Commission suppose en principe, outre l'inscription au
budget du crédit y afférent, un acte de droit
dérivé (communément appelé " acte de
base "), dont découle cette dépense ".
Cette double exigence d'un acte de base et d'un crédit budgétaire
résulte directement du système institutionnel mis en place par le
traité, selon lequel
" les conditions d'exercice du pouvoir
normatif et celles du pouvoir budgétaire ne sont pas les
mêmes "
.
Or, l'on constate qu'
un grand nombre d'actions budgétaires en cours
d'engagement demeurent dépourvues de bases légales. Il convient
donc tout d'abord que le Gouvernement français insiste au sein du
Conseil pour qu'il soit mis fin à cette situation qui est contraire tout
à la fois au traité, aux dispositions de la déclaration
commune du Conseil, du Parlement et de la Commission du 30 juin 1982, et
à la jurisprudence constante de la Cour de Justice.
De plus, il importe que le Gouvernement s'attache, dans le cadre des
discussions qui vont s'engager à propos du nouvel " accord
interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et
l'amélioration de la procédure budgétaire ", au
respect de l'équilibre défini par le traité entre le
pouvoir normatif et le pouvoir budgétaire. Dès novembre 1982, la
délégation du Sénat avait signalé
l'imprécision des termes de la déclaration commune du 30 juin
1982 et souligné que les ambiguïtés de ce texte
annonçaient des
" divergences d'interprétation sur des
points essentiels ".
Le nouvel accord interinstitutionnel devrait
s'attacher à dissiper ces ambiguïtés, notamment en
précisant la notion d'actions non significatives. Il ne saurait, sans
méconnaître les dispositions et l'esprit du traité,
introduire des exceptions qui reviendraient à permettre à la
Commission de tenir en échec l'application du principe de l'adoption
préalable d'un acte de base.
A cet égard, les propositions formulées par la Commission le
29 avril dernier paraissent de nature à multiplier les
ambiguïtés - et par là même les sources de contentieux
- plutôt qu'à les dissiper. Il est vrai que ces propositions ont
été rendues publiques par la Commission avant le dernier
arrêt de la Cour de Justice et que la réaffirmation par cette
dernière de l'équilibre découlant du traité est
sans doute de nature à amener la Commission à modifier celles-ci.
En tout état de cause,
il convient que le Gouvernement manifeste
clairement sa volonté qu'il ne soit pas porté atteinte à
l'équilibre défini par le traité et qu'il informe le
Sénat du déroulement des négociations sur ce point.
Enfin, il convient de noter que la question des bases légales n'est
qu'un point particulier dans l'ensemble des propositions formulées par
la Commission pour le nouvel accord interinstitutionnel et que ce nouvel accord
aura une influence déterminante sur la répartition des pouvoirs
entre les institutions en matière budgétaire. Cela montre une
fois de plus qu'
il importe qu'à l'avenir l'Assemblée nationale
et le Sénat soient saisis par le Gouvernement, dans le cadre de
l'article 88-4 de la Constitution, des projets d'accords interinstitutionnels.
La délégation s'était déjà
prononcée en ce sens à l'occasion du rapport de notre
collègue Lucien Lanier sur une réforme de l'article 88-4 de la
Constitution. L'étude des bases légales montre une fois de plus
qu'il convient de modifier la Constitution afin que les conclusions que nous
pouvons tirer sur des sujets aussi importants que celui-ci puissent être
portées à la connaissance du Gouvernement au travers d'une
résolution.
ANNEXE
Arrêt de la Cour de Justice des Communautés
européennes
en date du 12 mai 1998
(extraits)
" En vue de répondre à l'argumentation
des
parties, il convient de rappeler à titre liminaire que, en vertu de
l'article 205 du traité CE, la Commission exécute le budget,
conformément aux dispositions du règlement pris en
exécution de l'article 209 du même traité, sous sa propre
responsabilité et dans la limite des crédits alloués.
Il ressort, par ailleurs, de la jurisprudence de la Cour (...) que, dans le
système du traité, l'exécution d'une dépense par la
Commission suppose en principe, outre l'inscription au budget du crédit
y afférent, un acte de droit dérivé (communément
appelé " acte de base "), dont découle cette
dépense.
Adopté sur le fondement de l'article 209 du traité, le
règlement financier, du 21 décembre 1977, applicable au budget
général des Communautés européennes, tel que
modifié par le règlement n° 610/90 du Conseil, du 13 mars
1990, précise, en son article 22, paragraphe 1, deuxième
alinéa, que "
L'exécution des crédits inscrits au
budget pour toute action communautaire significative nécessite
l'arrêt préalable d'un acte de base, conformément à
la procédure et aux dispositions du titre IV, paragraphe 3, point c), de
la déclaration commune du 30 juin 1982
".
Le titre IV, paragraphe 3, sous c) de la déclaration commune du
Parlement européen, du Conseil et de la Commission, du 30 juin 1982,
relative à différentes mesures visant à assurer un
meilleur déroulement de la procédure budgétaire
énonce que :
"
L'exécution de crédits inscrits au budget pour toute
nouvelle action communautaire significative nécessite l'arrêt
préalable d'un règlement de base. Dans le cas où de tels
crédits seraient inscrits au budget avant qu'une proposition de
règlement ait été soumise, la Commission est
invitée à présenter une proposition pour la fin de janvier
au plus tard.
Le Conseil et le Parlement prennent l'engagement de tout mettre en oeuvre afin
que le règlement en question soit arrêté au plus tard
à la fin de mai.
Dans le cas cependant où le règlement ne pourrait être
arrêté dans ce délai, la Commission soumet des propositions
de rechange (virements) permettant d'assurer l'utilisation pendant
l'année budgétaire des crédits dont il s'agit
".
Dans une déclaration annexée à l'accord
interinstitutionnel, du 29 octobre 1993, sur la discipline
budgétaire et l'amélioration de la procédure
budgétaire, le Parlement européen, le Conseil et la Commission
ont confirmé leur attachement à ces principes, tout en
s'engageant à en améliorer la mise en oeuvre.
Il résulte de ce qui précède que l'exécution des
dépenses communautaires relatives à toute action communautaire
significative suppose non seulement l'inscription du crédit
correspondant au budget de la Communauté, qui relève de
l'autorité budgétaire, mais encore l'adoption préalable
d'un acte de base autorisant lesdites dépenses, qui relève de
l'autorité législative, alors que l'exécution des
crédits budgétaires pour les actions communautaires qui ne
relèvent pas de cette catégorie, à savoir les actions
communautaires non significatives, ne nécessite pas l'adoption
préalable d'un tel acte de base.
Certes, ni le règlement financier ni les déclarations
interinstitutionnelles précitées de 1982 et de 1993 ne donnent
une définition de la notion d'action communautaire significative.
Toutefois, il convient de rappeler à cet égard que l'exigence de
l'adoption d'un acte de base préalablement à l'exécution
d'un crédit inscrit au budget découle directement du
système du traité, dans lequel les conditions d'exercice du
pouvoir normatif et celles du pouvoir budgétaire ne sont pas les
mêmes.
D'ailleurs, selon une déclaration inscrite au procès-verbal de la
réunion du 28 juin 1982 entre le Conseil, le Parlement européen
et la Commission dans le cadre du Trilogue interinstitutionnel, qui a
précédé l'adoption, deux jours plus tard, de la
déclaration interinstitutionnelle précitée de 1982,
l'exigence de l'adoption d'un acte de base préalable à
l'exécution de crédits inscrits au budget en ce qui concerne les
actions communautaires significatives doit permettre à la Commission,
conformément à l'usage, d'assumer les tâches
inhérentes à ses fonctions et notamment à l'exercice de
son pouvoir d'initiative en lançant sous sa propre responsabilité
les études ou expériences nécessaires à
l'élaboration de ses propositions.
" En outre, comme la Commission l'a d'ailleurs admis dans sa
communication, du 6 juillet 1994, à l'autorité budgétaire
sur les bases légales et les montants maximaux (SEC (94) 1106 final), il
résulte de la circonstance que l'exécution d'une dépense
sur la base d'une simple inscription au budget des crédits
correspondants déroge à la règle fondamentale de
l'adoption préalable d'un acte de base que le caractère non
significatif d'une action communautaire ne se présume pas, de sorte
qu'il appartient à la Commission d'apporter la preuve du
caractère non significatif de l'action envisagée.
" Or, en l'occurrence, la Commission n'a pas réussi à
infirmer l'affirmation du Gouvernement du Royaume-Uni, selon laquelle les
projets visés par le communiqué litigieux recouvrent, en
réalité, des actions qui étaient déjà
visées par le programme Pauvreté 3 et auraient pu être
adoptées au titre du programme Pauvreté 4, programmes dont il
n'est pas contesté qu'ils visent des actions communautaires et qui,
partant, nécessitaient l'adoption d'un acte de base pour
l'exécution des crédits correspondants . "
(...)
" Dès lors, contrairement aux allégations de la
Commission, les projets précités n'avaient pas pour objet de
préparer une action communautaire future ou de lancer des actions
pilotes, mais étaient, en raison des activités envisagées,
des objectifs poursuivis et de leurs bénéficiaires,
destinés à poursuivre les initiatives visées par le
programme Pauvreté 3, à un moment où il était
manifeste que le Conseil n'allait pas adopter la proposition Pauvreté 4
visant à poursuivre et à étendre l'action communautaire de
lutte contre l'exclusion sociale.
" Pour étayer sa thèse, selon laquelle les projets litigieux
constituent des actions non significatives, la Commission observe toutefois que
ceux-ci visent des activités à court terme, d'une durée
maximale d'un an, non coordonnées entre elles et qui engendrent des
dépenses beaucoup moins importantes que les actions pluriannuelles
visées par le programme Pauvreté 3 et la proposition
Pauvreté 4 prévoyant la mise en place d'un Observatoire des
politiques nationales de lutte contre l'exclusion sociale devant assurer la
coordination de ces actions.
" Cette argumentation doit être rejetée. En effet, rien ne
permet d'exclure qu'une action communautaire significative engendre des
dépenses limitées ni que ses effets soient limités dans le
temps. Admettre le contraire reviendrait par ailleurs à permettre
à la Commission de tenir en échec l'application du principe de
l'adoption préalable d'un acte de base simplement en limitant la
portée de l'action en question tout en la reconduisant d'année en
année. Pareillement, le caractère significatif d'une action ne
saurait dépendre du degré de coordination dont elle fait l'objet
au niveau communautaire .
" Il y a lieu dès lors de conclure que la Commission n'était
pas compétente pour engager les dépenses nécessaires au
financement des projets visés par le communiqué litigieux au
titre de la ligne budgétaire B3-4103 et qu'elle a violé l'article
4, paragraphe 1, du traité, de sorte que la décision d'engager
ces dépenses doit être annulée. "