2. Les réserves de la Commission Européenne
L'émergence de ces filières non alimentaires
utilisant
des produits agricoles suscite l'intérêt des consommateurs et des
industriels. Ces filières de production sont récentes mais la
mission d'information estiment qu'elles sont vouées à progresser.
Il existe des débouchés significatifs pour ces productions
agricoles de l'Union Européenne, qu'elles soient excédentaires
(sucre, céréales) ou déficitaires (bois, tabac).
Mais
il est évident que si l'Europe ne met pas à la disposition de ces
industries des hydrates de carbone d'origine agricole nécessaires
à un prix compétitif, de nombreux investissements seront
réalisés dans les pays tiers.
L'Europe doit poursuivre ses
efforts afin de préserver ces acquis.
Or, la Commission se montre fort réservée sur ce sujet dans ses
propositions de juillet 1997 et mars 1998.
Tout au plus maintient-elle les dispositions en vigueur concernant les cultures
non alimentaires sur les terres gelées "
sous réserve que
des systèmes de contrôle efficaces soient
appliquées
" ; il en est de même des dispositions
concernant les aides nationales pour les cultures pluriannuelles
destinées à la production de biomasse sur les terres en
jachère.
Interrogé sur cette question, M. Franz Fischler a indiqué
que "
la Pac est disposée à apporter sa pierre à
cet édifice, mais que cela ne pourrait se faire que dans le cadre d'une
politique globale, associant l'énergie, l'environnement et la
fiscalité
". Toutefois, si le Commissaire à
l'agriculture sous-entend ainsi que Bruxelles continuera à soutenir ces
productions, la forme que prendra cette aide et l'origine des fonds restent
flous. Tout au plus a-t-il indiqué que la Commission poursuivra le
financement des projets pilotes et la promotion des matières
renouvelables issues de l'agriculture, ces productions étant
créatrices d'emplois au niveau local. Mais dans le même temps, le
commissaire a souligné qu'il est "
inconcevable d'introduire de
nouvelles aides alors que nous souhaitons réduire les
anciennes
". Cette affirmation est renforcée par le fait que
Franz Fischler semble convaincu que ces productions nécessiteront dans
l'avenir moins de subsides pour être viables, et ce pour deux
raisons : la baisse des prix garantis des céréales et des
oléagineux planifiée par l'Agenda 2000, qui devrait leur
apporter une compétitivité accrue face aux matières
synthétiques, et le développement des plantes
transgéniques, qui permettra d'augmenter la productivité.
Cette attitude de la Commission est doublement préoccupante.
En premier lieu,
le programme auto-oil
adopté récemment
par le Parlement Européen sur les émissions automobiles
constitue aux yeux de la mission d'information, le signe indéniable
d'une prise de conscience de l'importance de l'utilisation des produits
agricoles à des fins non alimentaires
, afin notamment de lutter
contre les effets de serre et d'encourager le développement des
matériaux biodégradables. Or, si le marché existe et si
l'industrie est prête, la mise en place d'un tel programme
nécessitera des incitations nationales ou communautaires.
En second lieu, le respect des engagements pris au Sommet de Kyoto devrait
nécessiter l'emploi de 18 millions de tonnes d'équivalent
pétrole de biocarburants.
Afin que l'Europe soit prête pour cet enjeu planétaire que
constitue le legs aux générations futures d'un air propre, la
mission d'information considère que les autorités communautaires
doivent donner un signal fort à l'ensemble des Européens. Des
mesures incitatives sont nécessaires et il est urgent que soit
engagée une approche commune sur le plan législatif et fiscal,
quant à l'utilisation des produits agricoles à des fins non
alimentaires.