Quelle réforme pour la politique agricole commune ?
FRANCOIS (Philippe), Président ; DENEUX (Marcel), rapporteur ; EMORINE (Jean-Paul), rapporteur
RAPPORT D'INFORMATION 466 (97-98) 2ème partie - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES
Table des matières
- AVANT-PROPOS
- RÉSUMÉ DU RAPPORT
-
PREMIÈRE PARTIE -
BILAN ET PERSPECTIVES :
RÉFORMER LA PAC, UNE NÉCESSITÉ-
I. LA RÉFORME DE 1992 : UN TOURNANT MAJEUR POUR LA PAC
-
A. UNE EVOLUTION GLOBALEMENT POSITIVE, A METTRE AU CRÉDIT DE LA
RÉFORME DE 1992 ?
- 1. La réforme " Mac Sharry " de 1992 : principes et mise en oeuvre
-
2. Un bilan globalement positif
- a) Une maîtrise relative des productions
- b) Une reconquête partielle du marché de l'alimentation animale
- c) Une amélioration des revenus agricoles
- d) Une incidence financière qui se traduit surtout par une recomposition des dépenses agricoles Européennes
- e) Des effets qui se traduisent surtout par une évolution de la structure des dépenses agricoles
- 3. Le rôle essentiel de la conjoncture dans le bilan de la PAC
- B. UNE LOGIQUE QUI N'A PAS ÉTÉ MENÉE À SON TERME
-
A. UNE EVOLUTION GLOBALEMENT POSITIVE, A METTRE AU CRÉDIT DE LA
RÉFORME DE 1992 ?
-
II. LES ENJEUX DE LA PAC À L'AUBE DE L'AN 2000
- A. UN PAYSAGE EUROPÉEN EN PLEIN BOULEVERSEMENT
- B. UN CONTEXTE INTERNATIONAL EN MUTATION
-
I. LA RÉFORME DE 1992 : UN TOURNANT MAJEUR POUR LA PAC
-
DEUXIÈME PARTIE -
PROJET ET RÉACTIONS-
I. VERS UN NOUVEAU CADRE COMMUNAUTAIRE ?
- A. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
- B. UNE COHÉRENCE PROBLÉMATIQUE
-
II. UN PROJET QUI SUSCITE DE NOMBREUSES RÉACTIONS
- A. AU NIVEAU EUROPÉEN
- B. LA POSITION DES DIFFÉRENTS ETATS MEMBRES
-
C. LA RÉACTION FRANÇAISE
- 1. Les fortes réserves des pouvoirs publics
-
2. " Un projet sans ambition " pour les organisations agricoles
- a) L'assemblée permanente des chambres d'agriculture : un véritable " réservoir " de contre propositions
- b) Un rejet catégorique des propositions de la Commission Européenne par les organisations syndicales agricoles
- c) La position des organisations spécialisées
- d) La CNMCCA et la coopération agricole
- e) La FNPA
- 3. La contribution d'autres organisations à la réforme de la PAC
-
I. VERS UN NOUVEAU CADRE COMMUNAUTAIRE ?
-
TROISIÈME PARTIE -
OFFRIR À L'AGRICULTURE EUROPÉENNE UNE VISION DYNAMIQUE ET MODERNE DE SON AVENIR-
I. CONSOLIDER L'UNITÉ DU MARCHÉ COMMUN AGRICOLE
- A. RÉUSSIR LA MISE EN PLACE DE L'EURO
- B. ÉTABLIR UNE VÉRITABLE ÉGALITÉ DE CONCURRENCE ENTRE LES PRODUCTEURS
- C. PRENDRE EN COMPTE TOUTES LES PRODUCTIONS AGRICOLES
- D. DÉVELOPPER LES USAGES NON ALIMENTAIRES DES PRODUITS AGRICOLES
- II. UNE APPROCHE PRAGMATIQUE DE L'AGRICULTURE EUROPÉNNE : POUR UNE DIFFÉRENCIATION DES PRODUCTIONS
-
III. REPLACER L'EMPLOI ET L'ESPACE AU COEUR DE LA RÉFORME
- A. ALLIER COMPÉTITIVITÉ ET MAINTIEN DU REVENU DES AGRICULTEURS
- B. UNE PRÉSENCE AGRICOLE NÉCESSAIRE SUR L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE
- C. METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DE DÉVELOPPEMENT RURAL
- D. PROMOUVOIR UNE POLITIQUE RÉALISTE EN FAVEUR DE L'INSTALLATION DES JEUNES AGRICULTEURS
-
IV. REDÉFINIR LE MODE DE PARTICIPATION DE L'UNION EUROPÉENNE
À LA RÉGULATION DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX
- A. AFFIRMER LA VOLONTÉ DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE DE SE PRÉPARER AUX PROCHAINES ÉCHÉANCES INTERNATIONALES TOUT EN RAPPELANT LES SPÉCIFICITÉS DE L'AGRICULTURE
- B. DIALOGUER DANS UN CADRE CLAIREMENT DÉFINI
- C. NÉGOCIER SUR LA BASE D'UNE CONCURRENCE LOYALE
- D. CONFORTER LE RAYONNEMENT DE " L'EUROPE VERTE " DANS LE MONDE
-
I. CONSOLIDER L'UNITÉ DU MARCHÉ COMMUN AGRICOLE
- CONCLUSION
- RAPPEL DES PRINCIPALES PROPOSITIONS
-
ANNEXE N° 1 -
EXAMEN EN COMMISSION -
ANNEXE N° 2 -
COMPOSITION DE LA MISSION D'INFORMATION SUR L'AVENIR DE LA PAC -
ANNEXE N° 3-
LISTE DES PERSONNALITÉS ENTENDUES PAR LA MISSION D'INFORMATION -
ANNEXE N° 4 -
COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE M. GUY LEGRAS, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGRICULTURE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
LE MERCREDI 29 AVRIL 1998 -
ANNEXE N° 5 -
COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE
M. LOUIS LE PENSEC, MINSITRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE
LE JEUDI 14 MAI 1998 -
ANNEXE N° 6 -
PROGRAMME DES DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LE PRÉSIDENT ET LES RAPPORTEURS
DE LA MISSION D'INFORMATION -
ANNEXE N° 7 -
L'AGRICULTURE ET L'UNION EUROPÉENNE -
ANNEXE N° 8
GLOSSAIRE DES SIGLES
N°
466
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 2 juin 1998
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) par la mission d'information (2) chargée, en application de l'article 21 du Règlement, d'étudier l'avenir de la réforme de la Politique agricole commune,
Par MM.
Marcel DENEUX et Jean-Paul EMORINE,
Sénateurs.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean François-Poncet,
président
; Philippe François, Henri Revol, Jean Huchon,
Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti,
vice-présidents
; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul
Émin, Louis Moinard,
secrétaires
; Louis Althapé,
Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard Barraux, Michel
Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean
Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel
Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré
Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe
Désiré, Michel Doublet, Bernard Dussaut
,
Jean-Paul
Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert Garcia, François
Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges
Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi
Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond Lauret,
Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber
Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni,
Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard
Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul
Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger
Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan,
Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.
(2) Cette mission d'information est composée de :
MM. Philippe
François,
président
; Bernard Barraux, Georges Berchet,
Louis Minetti, Jean-Marc Pastor,
vice-présidents
; Roland
Courteau, Jacques de Menou,
secrétaires
; MM. Marcel Deneux,
Jean-Paul Emorine,
rapporteurs
; Mme Janine Bardou, MM. Michel
Barnier, Jean Bizet, Désiré Debavelaere, Mme Josette Durieu, MM.
Jean François-Poncet, Jean Huchon, Louis Moinard, Bernard Piras, Paul
Raoult, Charles Revet, Roger Rigaudière.
Politique agricole commune.
" Le premier et le plus respectable
de tous les arts est l'agriculture "
Jean-Jacques Rousseau
Emile ou de l'éducation
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Quarante ans après Stresa, l'Union Européenne veut-elle encore
avoir une politique agricole commune ? Une telle interrogation peut
paraître surprenante, compte tenu de la place prépondérante
de la politique agricole commune (PAC) dans la construction Européenne
et dans le budget communautaire.
Rien ne semblait pourtant prédisposer l'agriculture à
s'intégrer dans le futur Marché commun, les unions
économiques régionales préférant laisser de
côté un secteur complexe et à haut risque. Or
l'agriculture, figurant seulement dans une dizaine d'articles du Traité
de Rome (articles 38 à 47), est apparue rapidement comme la clef de
voûte de l'édifice Européen.
La Communauté économique Européenne a, dès les
années 60, montré sa capacité d'initiative et de
décision en construisant une politique agricole commune originale. A
cette époque, l'agriculture Européenne, qui représentait
entre le quart et le cinquième de la population active Européenne
et environ 10 % du produit national brut des Six, était, dans
l'ensemble, peu performante, l'Europe étant largement dépendante
du reste du monde pour la plupart des produits alimentaires de base.
Initialement basée sur quelques principes simples comme la
liberté de circulation des produits entre les Etats membres, un niveau
commun de prix pour les producteurs, la solidarité financière et
la préférence communautaire, la PAC avait pour objectif
d'accroître la productivité de l'agriculture, d'assurer un niveau
de vie équitable à la population agricole, de permettre une
stabilisation des marchés, de garantir la sécurité des
approvisionnements et d'assurer des prix raisonnables aux consommateurs.
Au cours de ces quarante années, la PAC a été,
à de très nombreuses reprises, considérée comme
étant à un " tournant décisif ". Cette
expression, comme celle de " crise ", a été tellement
utilisée et banalisée dans le domaine agricole qu'il importe de
se poser effectivement la question de l'avenir de la PAC, notamment
après la présentation par la Commission Européenne des
nouvelles propositions de réforme de la PAC d'Agenda 2000,
formulées moins de six ans après la réforme
" Mac Sharry ".
Une esquisse de réponse suppose une présentation succincte de
l'histoire particulièrement riche de la PAC.
La période de lancement de la PAC s'est étalée de 1958
à 1970 avec la mise en place des organisations communes de
marchés (OCM) comme celle des céréales, du porc et des
oeufs, et les premières mesures financières (création du
FEOGA en 1962 et apparition d'un système de ressources propres).
Après cette phase transitoire, s'ouvre, de 1970 à 1980, une
période de consolidation de la PAC. Le développement des OCM
relatives au houblon (1971), aux produits de la pêche (1971), aux
fourrages séchés et déshydratés (1974) et à
la viande ovine (1980), ainsi que le lancement de la politique structurelle
avec les directives de 1972 et de 1975
1(
*
)
-qui
s'inspirent assez largement du plan Mansholt
2(
*
)
-
en sont les principaux éléments.
Dès la mise en place des premières OCM, la Communauté est
passée d'une situation déficitaire à une situation
excédentaire dans la plupart des productions agricoles, les
dépenses du FEOGA-garantie enregistrant une augmentation vertigineuse.
Malgré la réforme de 1977 dans le secteur laitier, la
décennie soixante-dix s'est achevée en faisant apparaître,
avec une particulière acuité, les dysfonctionnements de la PAC
(multiplication des excédents, accroissement des dépenses
budgétaires, baisse des revenus agricoles).
Les années 80 ont vu la politique agricole s'installer dans une
situation de crise permanente : l'incapacité à
maîtriser les excédents et la compétition avec les grands
pays producteurs en sont les raisons principales. Les tentatives de
résorption des excédents, l'évolution de la politique
structurelle et les relations avec les pays non-communautaires ont conduit les
Douze à adopter un ensemble de mesures donnant à la politique
agricole commune un visage profondément nouveau. Ce processus de
réforme a été amorcé dès 1984 avec
l'instauration des quotas laitiers, puis, en 1988, par la création des
stabilisateurs budgétaires. Le contexte Européen et international
a conduit le commissaire Mac Sharry dès 1990 à proposer une
réforme d'envergure de la PAC. Le compromis final a écarté
deux solutions extrêmes : celle d'une part de la
renationalisation de l'agriculture et celle, d'autre part, d'une
généralisation des quotas qui aurait réduit l'agriculture
Européenne à un second rôle sur le plan international en
bloquant tout développement de ses capacités exportatrices.
La réforme adoptée en mai 1992 repose sur le triptyque
suivant : baisse significative des prix garantis, compensation des pertes
de revenus par des paiements compensatoires et instauration d'un gel des terres
obligatoire.
Dès 1997, le Sénat avait constaté l'urgence d'une
réforme de la PAC
3(
*
)
.
La démarche actuelle de la mission d'information s'inscrit dans la
même logique : elle vise à effectuer un bilan des réformes
en cours, et notamment celle de 1992, à analyser les propositions de la
Commission Européenne de juillet 1997 et mars 1998 et, enfin,
à proposer quelques grandes orientations. Néanmoins, si la
mission sénatoriale de 1998 s'inscrit dans le prolongement de celle de
1987, le contexte en est radicalement différent, tant au niveau national
que communautaire et international.
Ainsi, la grande mutation de l'agriculture française n'a fait que
s'accélérer. De 1987 à 1997, le nombre d'exploitations est
passé de plus d'un million à moins de 700.000. De même, la
taille moyenne des exploitations agricoles a quasiment doublé,
atteignant 42 hectares. Enfin, le nombre d'actifs agricoles a
diminué d'un quart en dix ans. Les subventions nationales et
Européennes versées aux agriculteurs ont fortement
augmenté, notamment après la réforme de la PAC en
1992-1993. Les aides représentent aujourd'hui près de 40 %
du revenu agricole.
Par ailleurs, la dimension territoriale, environnementale et sociale de
l'agriculture ainsi que la valorisation des productions de qualité sont
devenues, aujourd'hui plus que jamais, un impératif.
Sur le plan Européen, les prévisions quant à
l'évolution future des stocks agricoles et les perspectives de
l'élargissement de l'Union Européenne aux pays d'Europe centrale
et orientale (PECO) sont mises en avant par la Commission pour justifier ses
propositions.
Enfin, les perspectives des marchés agricoles mondiaux, les relations
entre les Etats-Unis et l'Union Européenne ainsi que la prochaine
reprise des négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce
en faveur d'une libéralisation accrue des courants commerciaux,
pèsent fortement sur l'orientation des politiques agricoles des
différents Etats.
Dans ce contexte multipolaire de mondialisation des échanges agricoles,
la PAC a-t-elle encore un sens ? D'aucuns estiment au sein de l'Europe des
Quinze, que l'existence même d'une politique agricole Européenne
est devenue anachronique. L'alignement des prix Européens sur les prix
mondiaux est considéré comme l'unique modèle possible,
cédant ainsi aux tentations d'un soi-disant modèle
américain.
L'examen objectif des faits ne valide pas, a priori, une telle analyse.
Représentant plus de 372 millions de consommateurs à hauts
revenus et une production finale de plus de 200 milliards d'écus,
la Communauté à Quinze constitue le premier marché
alimentaire mondial. La France en est, avec 25 % de la production agricole
finale, le premier producteur. Les bénéfices que la France et
l'Europe toute entière tirent de l'organisation du marché
communautaire ont été à de maintes reprises
analysés (augmentation régulière du revenu des
agriculteurs, solde agro-alimentaire excédentaire, progression des
ventes hors de la Communauté ...).
Si l'agriculture communautaire a effectivement besoin d'un nouveau cadre pour
affronter les défis du troisième millénaire, l'Europe, et
particulièrement la France, ne doit pas vouer la PAC aux
gémonies. Il est souhaitable, au contraire, de défendre cette
politique, de la compléter, de la réformer, de la
préserver et, si possible, d'en valoriser les atouts.
Tâche assurément plus ardue, mais de toute évidence
indispensable pour construire une véritable identité agricole
Européenne.
C'est dans cet esprit que la mission d'information instituée à
l'initiative de la Commission des Affaires économiques du Sénat a
travaillé, sous la présidence de M. Philippe
François, Sénateur de Seine et Marne. Elle a
procédé à 60 auditions et effectué plusieurs
déplacements en Europe et aux Etats-Unis.
Le présent rapport, qui rend compte de ces quelques six mois de travaux,
s'efforce :
- de dresser le bilan de la réforme de 1992 et d'examiner les
arguments invoqués pour justifier une nouvelle réforme de la
Politique agricole commune ;
- d'analyser le nouveau cadre proposé par la Commission
Européenne pour l'agriculture communautaire;
n de dégager un projet alternatif, exprimant une vision moderne et
dynamique de l'agriculture Européenne, tout en prenant en compte les
contraintes budgétaires et internationales qu'il est désormais
impossible d'ignorer.
n
RÉSUMÉ DU RAPPORT
I. LA
PAC AUJOURD'HUI
A. LE BILAN CONTRASTÉ DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE DEPUIS 1992
La réforme de 1992 a constitué un tournant majeur pour la
PAC
, depuis sa mise en place dans les années 1960. Visant
à remédier au déséquilibre de certains
marchés, à l'augmentation des dépenses agricoles et
à l'érosion des revenus des agriculteurs, elle a consisté
en : une
baisse importante du prix
des produits agricoles, assortie
d'une compensation intégrale de ses effets par
un soutien direct aux
exploitants
, conditionnée à une
maîtrise accrue de
la production
(gel des terres). Des
mesures d'accompagnement
(environnement, préretraites) ont également été
mises en place.
Le bilan de cette réforme est contrasté
La production de
céréales
n'a été que
temporairement maîtrisée ; en viande bovine, la maîtrise
souhaitée de la production et l'extensification encouragée des
élevages
ne se sont qu'insuffisamment réalisées.
Bien plus, les
évolutions favorables
qui sont intervenues, telles
que la reconquête par les céréales Européennes du
marché de l'alimentation animale ou l'amélioration des revenus
agricoles tiennent presque autant à des
facteurs externes à la
réforme de la PAC
qu'à sa vertu intrinsèque.
Certains atouts, notamment en matière d'exportation de blé
Européen, n'ont pas été pleinement valorisés,
tandis que s'enclenchait
une logique lourde de conséquences pour le
rôle et le statut de l'agriculture en Europe
: le basculement du
financement du soutien collectif à l'agriculture du consommateur vers le
contribuable, avec pour corollaire
une dépendance accrue du revenu
agricole vis-à-vis du financement public
.
Certains défauts de la PAC n'ont pas été
corrigés
,
tels que
l'imparfaite prise en compte de
la diversité agricole Européenne (productions
méditerranéennes, d'Outre-mer, zones de montagne...) ou la
concentration excessive des crédits de la PAC sur certaines
exploitations et certaines zones.
La préférence communautaire
a, quant à
elle,
été mise à mal
, tant par la
transformation des mécanismes douaniers agricoles Européens,
induite par
les accords du GATT
de 1994, que par l'ouverture de
contingents d'importation
à tarif préférentiel ou
la négociation
d'accords d'association
entre l'Union
Européenne et les pays tiers.
B. LES ENJEUX DE LA PAC À L'AUBE DE L'AN 2000
Certains Etats membres souhaitent actuellement un
rééquilibrage des différences de contribution nette des
quinze pays au budget communautaire
, mettant ainsi en danger le
principe fondateur de solidarité financière entre les Etats
membres de l'Union Européenne.
Le citoyen Européen formule, quant à lui, des
exigences fortes
: qualité et sécurité des
produits, aménagement du territoire, protection de l'environnement. En
la matière, l'imposition de normes plus contraignantes ou de nouvelles
fonctions pour l'agriculture doit éviter de créer de nouvelles
distorsions de concurrence par rapport aux partenaires commerciaux de l'Europe.
L'élargissement de la Communauté aux pays de l'Est
Européen
pose à la PAC un défi sans
précédent
: l'agriculture des dix pays candidats emploie
en moyenne le
quart de leur population
active
(contre environ
6 % pour l'Europe des Quinze), soit plus d'agriculteurs que l'Union
Européenne actuelle, pour
une production égale au
dixième seulement
de la production des Quinze. Même si la
perspective de l'élargissement pose à terme la question de la
réforme des politiques Européennes (et notamment de la politique
structurelle), elle n'est toutefois pas un motif immédiat de
réforme de la PAC, vu le calendrier des négociations.
Les négociations agricoles multilatérales à venir
constituent une contrainte
dont la réflexion sur l'avenir de la
PAC ne peut s'affranchir, même si la question du choix tactique du
calendrier des deux négociations (communautaire puis
multilatérale) reste posée. Le précédent des
négociations du cycle de l'Uruguay, que présente le rapport, est
à cet égard instructif. Les auspices des futures
négociations de l'organisation mondiale du commerce (OMC), et notamment
la réforme de la politique agricole américaine, en 1996, ainsi
que la stratégie agricole mondiale de ce pays laissent présager
des
positions offensives de la part des partenaires commerciaux de
l'Europe
.
Les perspectives mondiales des marchés agricoles à moyen
terme,
dégagées par certaines organisations
internationales,
sont favorables
. L'augmentation importante de la
population mondiale d'ici à 2050 devrait s'accompagner d'une
augmentation plus que proportionnelle de la demande alimentaire -sous
réserve des évolutions technologiques- à l'accroissement
des niveaux de vie et à la diversification des régimes
alimentaires dans les zones émergentes.
La production, les
échanges et les prix des produits agricoles seraient ainsi globalement
tirés vers le haut
.
II. UN NOUVEAU CADRE COMMUNAUTAIRE QUI SUSCITE DE NOMBREUSES REACTIONS
A. LE NOUVEAU CADRE COMMUNAUTAIRE
Les propositions de la Commission Européenne
L'Agenda 2000
, présenté par la Commission
Européenne en juillet 1997, s'efforce de définir une
approche globale pour préparer l'Union Européenne à son
élargissement
.
La Commission a présenté,
en mars 1998
, les
propositions d'actes communautaires dans les secteurs des grandes cultures, de
la viande bovine, du lait, ainsi qu'en matière de développement
rural et de perspectives financières relatives au FEOGA-garantie.
La mission d'information a
synthétisé ces propositions
dont le détail figure dans la version intégrale du rapport.
Une cohérence problématique
La réforme de la PAC paraît, au total, procéder d'un double
mouvement : d'une part, un
approfondissement de la réforme de
1992
tendant, par de nouvelles baisses de prix, à permettre des
exportations sans restitution, de manière à libérer
l'agriculture Européenne des contraintes découlant des accords en
vigueur de l'OMC et à mettre les Européens en position plus
favorable lors de la reprise des négociations internationales ;
d'autre part,
un effort pour que la PAC
, qui reste vivement
contestée, notamment dans certains pays membres,
soit mieux
perçue par les opinions publiques
.
Ainsi, d'après la Commission Européenne, la PAC se trouverait
consolidée face aux facteurs externes et internes susceptibles de la
fragiliser.
De
très nombreuses critiques
ont été faites sur ces
propositions. Sans les reprendre en totalité, la mission d'information
relèvera, néanmoins, trois points importants :
le problème de la légitimité des aides
Dans ses propositions, la Commission Européenne a voulu tenir compte des
critiques récurrentes contre certains aspects de la PAC. L'exposé
général des motifs des propositions de règlement relatives
à la réforme précise même que
" réconcilier le citoyen, le consommateur avec la politique
agricole " est une des taches primordiales pour les années à
venir
.
Toutefois, les solutions envisagées pour y parvenir présentent
des faiblesses et des lacunes.
En effet, dans les propositions de la Commission, ces aides directes
représenteraient à l'avenir une part considérable du
revenu agricole et resteraient essentiellement
conçues par rapport au
processus productif
, calculées en fonction de la taille et des
activités de l'exploitation. De ce fait, leur justification reste trop
ambiguë pour qu'il soit aisé de convaincre les opinions publiques
de leur bien-fondé.
Les propositions de la Commission relatives au financement de la PAC
comportent des incertitudes
et des risques : en prévoyant
d'accroître la
part des aides directes dans les revenus des
agriculteurs
et en ouvrant simultanément la voie à un
droit de regard accru du Parlement Européen
sur leur devenir,
elles pourraient conduire à une plus grande fragilité de la PAC.
La Commission souligne
que la baisse des prix
qu'elle
préconise rendra les productions Européennes plus
compétitives
sur le marché communautaire comme sur le
marché mondial, réduira le risque de réapparition de
surplus invendables, facilitera l'adhésion des pays d'Europe de l'Est et
fortifiera la position Européenne dans le prochain cycle de
négociations commerciales multilatérales.
Toutefois, les effets bénéfiques attendus de la baisse
proposée des prix
sont plus incertains que ne le suppose la
Commission
, les modalités envisagées de la compensation de la
baisse des prix étant, en effet, susceptibles d'entraîner de
graves déséquilibres :
Dans le cas
des grandes cultures
, l'alignement des aides aux cultures
des
oléagineux
sur celles accordées aux cultures
céréalières pourrait conduire à des
distorsions ;
La forte baisse des prix prévue dans le cadre de la
viande
bovine
pourrait également susciter de graves
déséquilibres, sans pour autant permettre d'atteindre les
objectifs qui en principe la justifient ;
La cohérence des propositions pour les
productions
laitières
apparaît plus incertaine encore ;
On peut estimer que la démarche de la Commission tendant à
opérer
une réforme de la PAC préalablement aux
négociations
à l'OMC
revient à
déplacer unilatéralement le point de départ de la
négociation en défaveur de l'agriculture Européenne.
B. UN PROJET QUI SUSCITE DE NOMBREUSES RÉACTIONS
Depuis dix mois, les instances Européennes, les Etats membres ainsi que
les organisations professionnelles agricoles Européennes et nationales
ont pu prendre connaissance de ces propositions et les analyser. Ils les ont,
à de nombreuses reprises, commentées et n'ont pas manqué,
soit de les approuver, soit de les rejeter, soit de proposer des modifications.
La mission d'information tient tout d'abord à
saluer le travail
effectué par la Commission
Européenne, qui a rempli le
rôle d'initiative que lui confèrent les traités, et a
répondu à une demande du Conseil Européen de
décembre 1995, en présentant, dans un document global,
faisant directement suite à la Conférence intergouvernementale,
une
communication sur le futur cadre politique et financier de l'Union
,
compte tenu des perspectives de l'élargissement.
Toutefois, les propositions formulées suscitent des réactions
fort diverses.
Une forte opposition des organisations agricoles
Européennes
Plusieurs organisations professionnelles agricoles Européennes ont
exprimé
de fortes critiques à l'encontre des propositions de
la Commission
. Il s'agit du Comité des organisations
professionnelles agricoles (COPA), du Comité général de la
coopération agricole (COGECA), de la coordination paysanne
Européenne (CPE) et du Comité Européen des jeunes
agriculteurs (CEJA).
Pour l'ensemble de ces organisations, l'Agenda 2000 ne contient pas
d'élément vraiment porteur permettant de
défendre et
d'améliorer un modèle agricole Européen, qui devrait
être fondé sur un juste équilibre entre les exploitants,
les productions et les territoires.
La position des différents Etats membres
Si on constate un consensus parmi les Etats membres sur
le principe d'une
réforme de la PAC
, de profondes divergences d'appréciation
existent. Une première catégorie de pays regroupe les
Etats
globalement favorables au contenu de la réforme
: Royaume-Uni,
Suède et Danemark. Une seconde catégorie comprend les Etats qui,
tout en étant favorables au paquet " Santer ", souhaitent
certaines modifications
: Pays-Bas, Autriche. Une troisième
catégorie réunit les Etats qui ont actuellement une
démarche très pragmatique
: Grèce et Italie. Une
quatrième et dernière catégorie regroupe
l'ensemble des
autres Etats de l'Union, opposés aux propositions de la Commission
.
Les réactions françaises
La mission d'information a pu constater :
les
fortes réserves des pouvoirs publics français
,
et en particulier du Président de la République ;
le rejet par l'ensemble des
organisations professionnelles
agricoles
de ce projet.
III. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION DU SÉNAT
Au-delà des critiques qu'elle a faites sur telle ou telle proposition de
la Commission Européenne, la mission d'information a souhaité
présenter
de nouvelles perspectives pour la politique agricole
commune à l'aube de l'an 2000
.
Ce véritable projet alternatif préconisé par la mission
d'information s'articule autour de
quatre axes essentiels
qui doivent
permettre d'offrir à l'agriculture Européenne
une vision
dynamique et moderne de son avenir.
A. PREMIER PILIER DES PROPOSITIONS : CONSOLIDER L'UNITÉ DU
MARCHÉ COMMUN AGRICOLE
Les auteurs du Traité de Rome avaient considéré que
laisser l'agriculture en dehors des négociations conduirait
inévitablement à l'échec d'un marché commun
Européen.
La PAC a été
la véritable " locomotive " de
l'Europe communautaire
et " du grand marché unique ".
Celui-ci doit être consolidé, car toute fissure entraînerait
réciproquement la remise en cause de la PAC et donc, à terme, du
projet Européen voulu par les " Fondateurs ".
Si la mise en place de l'Euro présente des avantages
incontestables pour l'agriculture, d'importantes zones d'ombre
subsistent
.
Il s'agit notamment du maintien d'une zone " non Euro " et de
l'incertitude des relations entre l'Euro et le dollar.
La mission d'information considère :
la non-participation de certains Etats membres à la zone Euro comme
regrettable pour le bon fonctionnement du marché unique
. La mission
souhaite que ces Etats soient au minimum fortement incités à
participer au
dispositif qualifié de " SME bis ".
le renforcement de la coopération politique
entre Etats membres
comme indispensable, dans le
respect des identités nationales.
Renforcer le marché commun agricole passe aussi par
l'établissement d'une véritable égalité de
concurrence entre les producteurs
Européens
:
en rapprochant les
réglementations sociales
,
en harmonisant les
législations
fiscales
, notamment en
matière de transmission d'entreprises agricoles et de succession,
en contrôlant plus strictement les
aides nationales
,
en évitant une "
renationalisation
" de la PAC
(ce qui n'est pas incompatible avec un minimum de subsidiarité).
Il faut aussi constituer un véritable projet Européen
englobant toutes les productions agricoles ;
en premier lieu les
productions méditerranéennes
: la
mission s'associe pleinement aux propositions formulées par MM. Jean
Huchon et Louis Minetti dans leur récent rapport sur les relations
franco-espagnoles dans le secteur des fruits et légumes, avec,
notamment, la création d'un " front
méditerranéen " dans ce secteur ;
en second lieu celles
d'outre-mer
(par exemple la banane).
Il importe également de développer les usages non
alimentaires des produits agricoles.
L'Europe doit inciter au développement :
des
biocarburants
(Pourquoi ainsi appliquer le Taxe
intérieure sur les produits pétroliers sur les biocarburants
puisque ceux-ci ne sont pas des produits pétroliers).
du secteur
amidonnier
;
des
nouvelles sources d'énergie
à base de produits
agricoles.
B. DEUXIÈME PILIER DES PROPOSITIONS : UNE APPROCHE PRAGMATIQUE DE
L'AGRICULTURE EUROPÉENNE, QUI DIFFÉRENCIE LES
PRODUCTIONS
La mission souhaite renforcer la compétitivité des
céréales Européennes
: si ce renforcement
passe notamment par
une certaine baisse des prix, justifiée dans le
secteur des céréales
, des modifications substantielles
doivent toutefois être apportées aux propositions de la
Commission, pour assurer :
une baisse
raisonnable
des prix, limitée à 10 %
;
la suppression
des taxes à l'exportation
;
le maintien des
majorations mensuelles
;
le rétablissement des
surfaces de base maïs
.
L'indépendance protéique : un enjeu essentiel pour
l'agriculture de la Communauté, qui doit être mieux pris en
compte.
Face aux insuffisances des propositions de la Commission en matière
d'oléo-protéagineux, la mission d'information préconise :
un paiement complémentaire multiproduits
;
la mise en place d'un
filet de sécurité
dans ce
secteur.
Une gestion plus efficace des marchés de la viande bovine
Face à un scénario Européen qui, selon la mission
d'information, voue ce secteur à sa perte, deux logiques sont à
distinguer.
Il aurait été envisageable de mettre en place des
mesures de
maîtrise stricte de l'offre de viande bovine
, c'est-à-dire des
quotas. La mission d'information
regrette fortement
que le Gouvernement
français n'ait pas considéré opportun de
privilégier, dès la présentation des propositions de la
Commission, cette solution. Elle
est consciente que le retard pris
dans
les propositions gouvernementales françaises dans ce secteur
sera
difficile à rattraper
et qu'il est
désormais peu
probable
de parvenir à rallier une majorité d'Etats à
cette option.
Ainsi, la mission d'information
privilégie
plutôt
une
adaptation substantielle des mécanismes proposés par la
Commission Européenne
impliquant
:
la
défense du niveau de prix
dans un marché
équilibré et le maintien de
l'intervention publique
;
une
revalorisation de la prime à la vache allaitante
et un
meilleur accès au complément extensif ;
la préservation de la valeur ajoutée par le refus de
toute distorsion de concurrence
-notamment par l'intermédiaire d'une
subsidiarité trop importante- ; en outre, la mission d'information est
favorable à
l'instauration d'une prime unique à l'unité
de gros bétail alliant simplification administrative et
égalité de traitement entre les producteurs ;
une
gestion efficace du secteur
se traduisant notamment par une
organisation plus rationnelle de la production et de l'ensemble de la
filière ;
Il faut aussi préserver la filière laitière, afin
de prendre en compte ses particularités. La mission d'information
préconise à cet égard :
une réelle flexibilité dans la gestion des quotas par la
mise en place du
système de double quota/double prix
;
la reconnaissance de la
spécificité des signes et labels
de qualité.
C. TROISIÈME PILIER DES PROPOSITIONS : REPLACER L'EMPLOI ET
L'ESPACE AU COEUR DE LA RÉFORME
Tout
en refusant de remettre en question la fonction économique de
l'agriculture,
la mission d'information est consciente, cependant, de
l'importance de ses fonctions territoriales et sociales.
Elle suggère d'
allier compétitivité et
maintien du revenu de l'agriculteur
La mission s'est longuement penchée sur la question du
"
découplage des aides par rapport à la
production
". Elle a estimé que la PAC pourrait
bénéficier d'un découplage accru des aides, à
condition de maintenir celui-ci à un niveau raisonnable.
La mission d'information préfère à un dispositif de
plafonnement, l'instauration d'un
mécanisme de
dégressivité
en fonction de la taille des exploitations,
prenant en compte l'emploi et les territoires
.
La mission d'information estime indispensable et urgent d'étudier
et d'initier des
expériences à grande échelle en
matière de " garantie partielle de recettes ". Elle
considère qu'en la matière, aucun retard ne doit être
pris
.
Une présence et une activité agricole sont
nécessaires sur l'ensemble du territoire
une nouvelle impulsion doit être donnée à
l'agriculture de montagne
. Pour ce faire, la mission d'information
souhaite :
accentuer significativement
l'aide aux systèmes herbagers
,
notamment dans le cadre de
la prime à la vache laitière
,
supposée compenser les baisses de prix du lait, mais aussi par le
maintien de la prime à l'herbe
parmi les mesures de
développement rural ;
préserver les droits à produire pour les productions
montagnardes,
qui sont une condition sine qua non de la
pérennisation de cette agriculture, faute de quoi,
les gains de
productivité obtenus par la plaine
conduiront à affaiblir la
production montagnarde ;
ne pas conditionner à une contrepartie
l'attribution des
indemnités compensatrices de handicaps naturels,
ce qui en
l'état des propositions, n'apparaît pas clairement ;
instaurer au niveau Européen une
vraie politique d'aide à
l'investissement
pour les exploitations de montagne.
Il faut aussi pérenniser l'agriculture en
zone
périurbaine,
comme le propose
le
rapport récent
du Sénateur Gérard Larcher
4(
*
)
.
La mission souhaite une politique ambitieuse de développement
rural
La mission d'information, tout en approuvant l'argumentation
générale des propositions de la Commission en matière de
développement rural, souhaite que soient préservées :
l'horizontalité
de certains dispositifs. Ainsi, quelle sera
la part des interventions en faveur des structures agricoles et du
développement rural par rapport à la reconversion industrielle et
aux problèmes urbains dans l'objectif 2 ?
la diversité
des actions conduites.
L'intégrité du budget agricole Européen :
l'intégration de mesures de développement rural, qui
relèvent de la catégorie des dépenses " non
obligatoires " du budget communautaire, pourrait conduire à une
fragilisation de l'enveloppe budgétaire consacrée à la
PAC, jusqu'à présent constituée uniquement de
" dépenses obligatoires ".
Enfin, il est essentiel de promouvoir une politique réaliste et
menée avec détermination en faveur de l'installation de jeunes
agriculteurs :
au niveau Européen, en faveur de
l'installation et de la
formation
,
au niveau national, en renforçant, notamment, les installations de
jeunes non issus du milieu rural.
D. QUATRIÈME PILIER DES PROPOSITIONS : REDÉFINIR LE MODE
DE PARTICIPATION DE L'UNION EUROPÉENNE AUX ÉCHANGES
INTERNATIONAUX
Le projet alternatif de réforme de la PAC préconisé par la
mission d'information ne peut s'affranchir des contraintes internationales. Il
doit au contraire utiliser, au profit de l'ensemble de la Communauté
Européenne,
les opportunités offertes par l'avenir qui est
prédit aux marchés agricoles internationaux
.
Pour cela, il faut affirmer la
volonté de la
Communauté
Européenne de
se préparer aux
prochaines échéances internationales
,
tout en
rappelant la spécificité de son agriculture
:
La mission d'information estime
qu'il n'est pas possible de
considérer les produits agricoles comme n'importe quels autres produits
de base
, en raison non seulement des caractéristiques des facteurs
de production inhérents à l'agriculture mais aussi de l'enjeu
vital que constitue la sécurité alimentaire de la planète.
Ainsi, la mission d'information, tout en affirmant son souhait de voir la
Communauté participer activement aux négociations internationales
sur les questions agricoles, estime nécessaire que :
l'Europe se prépare à ces prochaines échéances en
adoptant des
positions claires et communes aux Etats membres
; la
Commission Européenne ne doit en la matière en aucun cas
outrepasser les limites et le contenu de son mandat,
fixés par
les traités et le Conseil des ministres ;
l'Europe doit aussi réaffirmer
la spécificité de
l'agriculture
, lors des négociations internationales.
La mission propose de dialoguer dans un cadre clairement
défini : celui de l'Organisation mondiale du commerce
La mission d'information considère qu'en tranchant sans
ambiguïté en faveur du multilatéralisme,
l'Europe pourra
affirmer son existence, voire son " leadership " au sein de
l'OMC
, mettant ainsi en conformité l'influence de la
Communauté et sa position de première puissance exportatrice. En
défendant l'OMC et le multilatéralisme, la Communauté
Européenne rallierait, en outre, à sa cause la plupart des pays
tiers.
Le dialogue, oui, mais sur la base d'une concurrence loyale
Pour la négociation à venir, la mission considère
que :
L'harmonisation (notamment au sein du " codex alimentarius ")
et le respect des
mesures sanitaires
ainsi que la
claire
information du consommateur
doivent être des préoccupations
fondamentales ;
la prise en compte du coût des
mesures environnementales
et
sociales (" clause sociale ") doit être mieux
assurée ;
les produits de qualité
doivent être justement
valorisés dans les échanges agricoles mondiaux ;
la communication et la promotion à l'exportation des produits
agricoles et agro-alimentaires Européens
doit devenir une
réelle priorité, à l'image du programme américain
d'aides à l'exportation.
La mission propose de conforter le rayonnement de l'Europe verte dans le
monde :
par
l'ouverture de l'Europe
en direction de l'Est :
la mission estime que l'élargissement en direction des PECO doit se
faire avec détermination
mais de manière très
progressive
;
la mission d'information souhaite profiter de cette occasion pour renouveler
son voeu de réformer
le fonctionnement institutionnel de l'Union
Européenne avant tout élargissement
.
par un renforcement de la
coopération internationale
:
La mission d'information estime indispensable que l'Europe, et notamment la
France, poursuive sa politique de coopération.
PREMIÈRE PARTIE -
BILAN ET PERSPECTIVES :
RÉFORMER LA PAC, UNE NÉCESSITÉ
I. LA RÉFORME DE 1992 : UN TOURNANT MAJEUR POUR LA PAC
La
réforme de 1992 a marqué, par rapport à l'évolution
qu'avait connu la PAC durant trente ans, une double rupture :
- la première entre la politique de gestion des marchés et
celle de revenus des agriculteurs, puisque désormais une part importante
du revenu est assuré moins par les prix payés par le consommateur
mais davantage par des aides directes payées par le contribuable. En
outre, la gestion des marchés repose sur des dispositifs de
maîtrise de l'offre ou de contingentement des aides directes.
- la seconde par la recherche d'une convergence entre agriculture,
environnement et territoire.
Or, moins de six ans après cette réforme la Commission
Européenne a engagé un nouveau processus de modification de la
PAC sans pour autant présenter un bilan détaillé de la
réforme de 1992.
La mission d'information estime, au contraire, indispensable d'effectuer le
bilan de réforme de 1992 avant d'engager tout nouveau
changement.
A. UNE EVOLUTION GLOBALEMENT POSITIVE, A METTRE AU CRÉDIT DE LA RÉFORME DE 1992 ?
1. La réforme " Mac Sharry " de 1992 : principes et mise en oeuvre
Au début des années 1990, alors que les négociations agricoles multilatérales dans le cadre du cycle de l'Uruguay étaient dans l'impasse, certains dysfonctionnements de la PAC ont conduit la Commission Européenne à proposer la première réforme d'envergure de cette politique depuis sa mise en place dans les années 1960.
a) Le contexte du début des années 1990
La PAC a
été, à plusieurs reprises, modifiée. C'est ainsi
qu'ont été décidées, en 1984, des mesures de
régulation des marchés telles que l'instauration des quotas
laitiers. En 1988, le régime des " stabilisateurs " (faisant
intervenir des quantités maximales garanties et une diminution
automatique des prix en cas de dépassement) et des
prélèvements dits de " coresponsabilité " ont
été mis en place, à côté d'actions
structurelles en faveur du boisement, de la protection de certaines zones
fragiles en matière d'environnement, de la diversification de
l'agriculture et d'incitations pour la mise en jachère de terres
cultivées.
A bien des égards, ces mesures correctrices n'ont pas suffi à
redresser une situation Européenne marquée à la fin des
années 1980 par :
-
le déséquilibre de certains marchés
: en ce
qui concerne notamment la viande bovine et les céréales,
l'écart allait croissant entre la production et la consommation
intérieure et conduisait à la constitution de forts
excédents ;
-
l'accroissement important des dépenses pour le budget
communautaire
: les dépenses du FEOGA-garantie ont cru en
15 ans 5 fois plus vite que la richesse communautaire, puisqu'elles
ont été multipliées par 2,5 alors que le PIB
Européen augmentait dans le même temps de 50 % seulement ;
-
l'érosion des revenus agricoles
: sur la même
période, les revenus agricoles stagnaient -voire régressaient-,
comme ce fut le cas entre 1990 et 1993.
b) La réforme de 1992
Les
principes
C'est dans ce contexte que la Commission a fait part, dès
février 1991, de sa volonté de changer plus
profondément le mode de fonctionnement de la PAC. Le
21 mai 1992, le Conseil des ministres Européen parvenait
à un accord, concrétisé le 30 juin 1992 par
l'adoption formelle des premiers règlements communautaires
entérinant la réforme.
Les trois principales innovations proposées par le Commissaire Mac
Sharry, puis adoptées par le Conseil, étaient les suivantes :
-
une baisse importante des prix des produits agricoles
afin de les
rendre plus compétitifs sur les marchés intérieurs et
extérieurs ;
-
une compensation intégrale et durable
des effets de cette
baisse par des montants compensatoires ou des primes non liées aux
quantités produites ;
-
une maîtrise de la production
par le recours à des
mesures limitant l'utilisation des moyens de production (gel des terres
arables, charge des animaux à l'hectare de surface fourragère...)
à côté du maintien de réglementations plus
drastiques, telles que les quotas.
Les nouvelles orientations de la PAC ont introduit un changement important dans
les modalités du soutien Européen au secteur agricole,
qui
n'est plus assuré essentiellement par une politique des prix, mais
repose aussi sur des aides directes aux producteurs
(compensations,
primes...).
Parallèlement, des
mesures d'accompagnement
,
décidées par le Conseil, visent à mieux protéger
l'environnement, à favoriser la cessation d'activité de certaines
catégories d'agriculteurs âgés et à
développer l'utilisation des terres agricoles pour la forêt ou les
loisirs.
Les outils utilisés
Ces principes d'action ont été concrètement
déclinés par secteurs de production.
Dans le secteur des grandes cultures
:
Un
gel des terres
conditionne l'accès aux paiements
compensatoires des baisses de prix. Les producteurs de céréales,
d'oléagineux, de protéagineux (et, à la suite de la
décision du Conseil de mai 1993, de graines de lin) ne
bénéficient des paiements compensatoires qu'à condition de
retirer de la culture une partie de leurs terres, fixée à
15 % à partir de 1993/94. Cette condition ne s'applique pas aux
petits producteurs, pour lesquels est prévu un régime
simplifié. Les paiements compensatoires sont effectués à
l'hectare et régionalisés en fonction des rendements
constatés au cours de la période 1986/87-1990/91.
Il reste toutefois possible de cultiver les hectares retirés, à
condition qu'il s'agisse d'une production à usage non alimentaire, (par
exemple pour les bio-carburants).
La politique des prix
est modifiée : une baisse
significative des prix d'intervention, étalée sur trois ans,
est décidée, corrélativement à la suppression des
prélèvements de " coresponsabilité ",
destinés à faire participer les producteurs au coût de
l'écoulement des excédents.
- Pour les céréales
,
la baisse
décidée des prix d'intervention a été la
suivante
:
LA
BAISSE DU PRIX DES CÉRÉALES DÉCIDÉE EN 1992
Source : Commission, DGVI graph1
Le paiement compensatoire à cette baisse des prix varie suivant le
rendement régional historique et un montant de base (de 25,35 puis
45 écus par tonne sur les trois années de transition).
-
Les graines oléagineuses
ne
bénéficient plus de prix garantis mais uniquement d'une aide
à l'hectare, fixée au niveau communautaire, puis
régionalisée en tenant compte des rendements historiques moyens.
S'agissant de la mise en oeuvre de la réforme à partir de
1993/94, le Conseil a décidé d'une aide de
359 écus/hectare, payée en deux parties, l'une en
début de campagne, l'autre à la fin, cette aide étant
ajustable selon l'évolution des prix constatée sur le
marché mondial.
Si la moyenne des prix mondiaux relevés pour les trois principales
graines oléagineuses (colza, tournesol, soja) variait de plus ou moins
8 % autour du prix de référence prévisionnel
(163 écus/tonne), aucun ajustement ne serait effectué. En
revanche, si les hausses ou les baisses de prix dépassaient ce
pourcentage, il y aurait diminution ou augmentation de la compensation
accordée à l'hectare.
-
En ce qui concerne les protéagineux
,
le
régime qui leur était antérieurement applicable est
remplacé par une aide compensatoire, à l'hectare cultivé,
égale au rendement régional, en tonnes par hectare,
multiplié par 65 écus.
Le régime des graines de lin était également
modifié, tout comme celui des fourrages séchés et du tabac.
Dans les productions animales
-
Pour le lait
, le régime des quotas, introduit en
1984, constitue toujours " la pièce principale " de la
politique laitière Européenne après 1992. Ceux-ci devaient
baisser de 2 %, de façon échelonnée, sur les
campagnes 1993/94 et 1994/95.
Cependant, dans le cadre du compromis pour " le paquet prix "
1993/94, ils ont été augmentés de 0,6 %, à
l'exception de l'Espagne, de la Grèce et de l'Italie où ils ont
été augmentés selon les conclusions d'un rapport sur
l'application effective du régime des quotas laitiers dans ces Etats
membres.
Le prix d'intervention du beurre était baissé de 5 %, sur
deux campagnes.
-
Pour la viande bovine
, la réforme a touché
à la fois le prix de la viande et le régime des primes et des
interventions. Elle a, en outre, tendu à encourager à
l'extensification des élevages.
Extensification
: pour l'octroi des primes, une nouvelle norme de
charge maximale de bétail à l'hectare de surface
fourragère a été imposée rapidement : elle est
passée de 3,5 unités de gros bétail (UGB) par hectare
fourrager en 1993 à 2 UGB en 1996.
Baisse des prix
: la baisse du prix d'intervention de la viande de
boeuf, échelonnée sur trois ans, a atteint 15 %, comme
détaillé ci-dessous :
BAISSE
DU PRIX D'INTERVENTION DE LA VIANDE BOVINE
Source : Commission, DG VI
graph1
Primes octroyées :
la prime aux bovins mâles, qui
était déjà instituée (pour maximum 90 animaux
par producteur), a été maintenue et augmentée à 60
et 75 écus respectivement pour 1993 et 1994, et à
90 écus à partir de 1995, payables au maximum deux fois dans
la vie de l'animal, lorsqu'il atteint l'âge de dix mois et lorsqu'il
atteint vingt-deux mois d'âge.
La prime à la vache allaitante a été également
maintenue, mais dorénavant limitée, pour chaque producteur, au
nombre de primes payées au titre de 1990, 1991 ou 1992. Son montant
était fixé à 70 et 95 écus par vache pour
respectivement 1993 et 1994 et à 120 écus à partir de
1995.
Afin de favoriser la production extensive, ces deux primes ont
été augmentées de 30 écus par tête dans
les exploitations où le taux de charge à l'hectare de fourrage
est inférieur à 1,4 UGB.
Enfin, les Etats membres, en fonction de leurs structures de production,
pouvaient instituer soit une prime à la transformation des veaux, soit
un régime d'intervention pour les animaux légers.
Il s'agissait, par ces moyens, de freiner une production de viande de boeuf
excédentaire lors des années précédentes, en
octroyant 100 écus par jeune veau mâle de race
laitière abattu avant l'âge de 10 jours ou, seconde
possibilité autorisée, en pratiquant, suivant des
modalités à déterminer et pendant une période
transitoire de trois ans, l'intervention sur des animaux présentant un
poids de carcasse compris entre 150 et 200 kg.
Régime d'intervention :
le régime des interventions sur
le marché de la viande bovine a également été
modifié, avec :
- la fixation de plafonds d'achat à l'intervention (de
750.000 tonnes en 1993 à 350.000 en 1997) ;
- la mise en place d'un filet de sécurité (en cas de prix de
marché inférieur à 60 % du prix d'intervention) ;
- la limitation de l'intervention aux bonnes qualités
bouchères.
-
Pour la viande ovine
, le système de primes en
vigueur a été maintenu mais, au-delà de plafonds par
producteur, seulement 50 % du montant unitaire des primes est
octroyé.
Les autres productions animales (volailles, porc, oeufs...) n'ont pas subi de
modification.
Les mesures d'accompagnement
Elles ont concerné l'environnement, ainsi que l'aide à la
restructuration des exploitations.
Le régime de préretraites
Les Etats membres peuvent accorder aux exploitants et travailleurs agricoles
âgés d'au moins 55 ans une aide à la
préretraite, sous forme de primes de départ, ou
d'indemnité annuelle non liée à la superficie, de prime
annuelle par hectare ou de complément de retraite, lorsque le montant de
celle-ci est trop faible pour inciter à la cessation d'activité.
Les dépenses liées à la mise en place des régimes
de préretraite sont financées à 50 % par le budget
communautaire, pourcentage porté à 75 % pour les zones
éligibles à l'objectif 1 (régions en retard de
développement).
L'aide au boisement
Pour les Etats membres qui mettent en place des programmes d'aide au boisement,
le financement communautaire atteignait les mêmes proportions que
ci-dessus.
Les mesures agri-environnementales
Dans une optique de meilleure protection de l'environnement, les Etats membres
ont pu mettre en place en faveur des exploitations agricoles des régimes
ouverts à la souscription pour 5 ans. Les exploitants
reçoivent, en contrepartie, des primes annuelles, financées par
la Communauté, dans les mêmes proportions que celles
évoquées ci-dessus.
Ces aides sont destinées à compenser les actions tendant à
un meilleur respect de l'environnement, telle que la protection des eaux,
l'extensification des cultures, mais aussi les mesures d'amélioration de
la gestion des terres pour l'accès du public et les loisirs.
Force est de constater, cinq ans après sa mise en oeuvre, que la
réforme de 1992 a permis de remédier à certains des
dysfonctionnements de l'ancienne PAC.
2. Un bilan globalement positif
a) Une maîtrise relative des productions
Dans le secteur des grandes cultures
En termes de maîtrise de la production, les outils mis en place,
notamment pour les céréales (gel des terres conditionnant
l'accès aux paiements compensatoires) se sont
révélés efficaces, surtout entre 1993 et 1995. La
" jachère " a initialement servi de régulateur de la
production Européenne de céréales.
La superficie céréalière a diminué, entre 1992 et
1994, de 13 % au Royaume-Uni et au Danemark, de 12 % en France, de
10 % en Espagne, de 6 % en Grèce et en Italie, de 3 % en
Allemagne.
En matière de céréales et
d'oléo-protéagineux, l'évolution de la surface
cultivée a été, en France, de 1992 à aujourd'hui,
la suivante :
ÉVOLUTION DES SURFACES CULTIVÉES EN FRANCE EN CÉRÉALES ET OLÉOPROTEAGINEUX (en millions d'hectares)
France |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997
|
Total blé tendre |
4652 |
4652 |
4290 |
4340 |
4516 |
4769 |
4850 |
Total blé dur |
495 |
425 |
223 |
234 |
230 |
270 |
267 |
Total orge |
1750 |
1802 |
1622 |
1405 |
1387 |
1530 |
1684 |
Total maïs |
1767 |
1873 |
1849 |
1663 |
1650 |
1729 |
1801 |
Maïs fourrage |
1664 |
1521 |
1486 |
1475 |
1556 |
1578 |
1539 |
Total Colza |
731 |
665 |
550 |
671 |
864 |
875 |
988 |
Tournesol |
1070 |
979 |
786 |
986 |
963 |
891 |
875 |
Soja |
66 |
43 |
57 |
100 |
102 |
86 |
97 |
Pois et protéagineux |
667 |
700 |
727 |
664 |
559 |
531 |
618 |
Source : Ministère de l'agriculture
Malgré une bonne maîtrise initiale, (en dépit de
l'augmentation observée des rendements), la production de
céréales est toutefois
repartie à la hausse depuis
1996
, sans pour autant que ne se reconstituent les stocks, ce secteur ayant
bénéficié d'une
évolution mondiale
favorable
, dont la Communauté n'a d'ailleurs pas tiré tout le
parti (les exportations de céréales observées vers les
pays-tiers ont baissé de 33 % sur la période). Le tableau
suivant retrace les évolutions en matière de
production et
d'utilisation des céréales Européennes
depuis la mise
en place de la réforme :
UTILISATION DES CÉRÉALES
EUROPÉENNES
(en
milliers de tonnes)
|
1992/1993 |
1997/1998 |
Évolution |
Production Européenne de
céréales,
|
179
|
204
|
+14%
|
Destination des
céréales Européennes :
|
84
|
106
|
+26 %
|
Évolution des
stocks de céréales :
|
40
|
36
|
-9 %
|
Source : ONIC, Service de l'information économique,
avril
1998
Ces chiffres laissent transparaître
une
certaine
frilosité dans la
gestion communautaire
: d'une part, en
raison d'un taux de gel des terres mal " calibré " pendant les
premières années de mise en oeuvre de la réforme, qui a,
dans un contexte de reconquête du marché intérieur de
l'alimentation animale, conduit les exportations vers les marchés
extérieurs à jouer le rôle de " variable
d'ajustement ", à la baisse. D'autre part, la
gestion
communautaire des exportations de céréales
a
été peu offensive. Elle a d'ailleurs été l'objet de
critiques, lors des dernières campagnes (notamment pour les exportations
d'orge).
Dans le secteur céréalier, l'objectif de 1992 d'une
maîtrise de la production n'a été ainsi rempli que
partiellement.
La mission d'information tient à souligner que l'Europe n'a que peu
saisi, dans le secteur céréalier, les opportunités
offertes par ces marchés sur le plan mondial, compte-tenu de la
rigidité des outils de maîtrise.
Pour la viande bovine
Bien que la Commission Européenne affirme
5(
*
)
qu'après la réforme de 1992 "
la
situation de marché a évolué favorablement
",
force est de constater que
cette réforme n'a que peu réussi
à rééquilibrer ce secteur en crise et à encourager
l'extensification de la production.
Notons que la réforme de 1992 n'a été confrontée,
dans le secteur de la viande bovine, qu'en 1995 à ses objectifs
initiaux, avant de faire face, en 1996, à l'affaire de
l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), qui a
précipité la crise, latente, de ce secteur, liée à
un excédent de capacité productive par rapport aux
débouchés.
La tendance à la régression de la consommation
intérieure
de viande bovine se confirme, au-delà des
perturbations conjoncturelles. De 22 kilogrammes par an et par habitant, la
consommation moyenne Européenne est en effet passée à 20
kilogrammes en 1995, dernière année avant le déclenchement
de la crise de l'ESB.
La compétitivité de la viande rouge par
rapport à la viande blanche
s'est, en outre,
détériorée suite à la baisse du prix des
céréales utilisées dans l'alimentation de ces animaux,
induite par la réforme de 1992.
La maîtrise de la production
n'a pas été
véritablement assurée
6(
*
)
, en
raison :
- de l'augmentation du prix moyen des carcasses de bovins, due à
une amélioration des performances d'engraissement (de 308 kg en 1992
à 313 kg en 1995) ;
- du système des primes à la vache allaitante, qui n'a pas
permis de maîtrise du cheptel au cours des premières années
d'application. La substitution de vaches allaitantes à des vaches
laitières s'est poursuivie et le cheptel de vaches allaitantes n'a pas
été contenu, le potentiel de production passant de
9,3 millions de vaches nourrices en 1991 à 11,2 millions en
1996 ;
- de la réduction de la production de veaux de boucherie, qui a
entraîné une production supplémentaire de taurillons
laitiers.
L'extensification
des systèmes de production n'a pas atteint de
proportion vraiment importante. De plus, la situation financière des
éleveurs extensifs est restée fragile : si le niveau moyen des
aides par unité de gros bétail (UGB) est plus élevé
dans les types d'élevage les plus extensifs, ces aides semblent
néanmoins insuffisantes pour inciter à l'extensification.
Pour la viande ovine
La réforme de 1992 a visé également à une
maîtrise de la production et à un arrêt de l'accroissement
des dépenses communautaires.
En dépit de résultats obtenus sur ces deux objectifs, un
problème majeur n'a pas été traité : il s'agit des
importations de viandes réfrigérées
(" chilled ") originaires de Nouvelle-Zélande, qui n'ont
cessé de croître depuis 1992 et concurrencent directement la
production intérieure.
b) Une reconquête partielle du marché de l'alimentation animale
Un accroissement indéniable de la consommation intérieure des
céréales communautaires
Le volume de céréales Européennes utilisé pour
l'alimentation animale est passé de 84 millions de tonnes en 1992
à 106 millions en 1997, soit une augmentation de 26 %.
Cette augmentation est liée :
- d'une part, à un facteur indépendant de la PAC : la
progression globale du
volume d'aliments
du bétail
consommés (+4 millions de tonnes environ) ;
- d'autre part, à un
accroissement (d'environ 8 %) de la
part des céréales
dans l'ensemble des matières
premières de l'alimentation animale, lui-même lié à
une amélioration de la compétitivité prix des
céréales par rapport aux produits de substitution des
céréales, riches en énergie (manioc, Corn Gluten Feed) ou
en protéines (tourteaux de soja...).
Une dépendance protéique qui subsiste
Cette évolution favorable n'a cependant pas réglé
l'ensemble des questions qui se posent en matière de nutrition animale.
D'après les données fournies par le syndicat national des
industriels de la nutrition animale, l'alimentation animale est, en moyenne,
principalement, composée des éléments suivants :
- céréales, à 42 % (blé 26 %,
maïs 10 %, orge 5%) ;
- tourteaux d'oléagineux, à 24 % qui apportent les
protéines indispensables, (soja 15 %, colza et tournesol 7 %) ;
- graines protéagineuses (7,5 %) et oléagineuses
(2,6 %) ;
- co-produits des industries céréalières (sons,
rémoulages, corn gluten feed...).
Or, le taux de suffisance Européen en ces différents produits
est très contrasté. S'il est presque égal à
100 % pour les céréales ou les sons, il est en revanche
particulièrement faible pour :
-
les sous-produits de la filière maïs
(Corn gluten
feed, taux de couverture de 20 %) ;
-
les tourteaux d'oléagineux
(le taux de couverture est de
16 % seulement).
Rappelons que les oléagineux représentent près de la
moitié des protéines végétales utilisées
dans l'alimentation du bétail (fourrage en vert exclu). Au total, le
taux d'autosuffisance Européen en matières riches en
protéines est faible, aux alentours de 30 %. Il s'est en outre
dégradé depuis 1991.
La réforme de 1992 n'a donc pas permis de rééquilibrer
significativement la situation de dépendance protéique
Européenne, compte-tenu du poids des oléagineux dans
l'alimentation animale, ces derniers continuant d'être massivement
importés dans l'Union.
c) Une amélioration des revenus agricoles
Une tendance positive...
En matière de revenu agricole, la situation des agriculteurs
français s'est améliorée depuis la réforme de
1992.
Un bilan du ministère de l'agriculture
7(
*
)
estime que sur 16,5 % d'augmentation du revenu brut agricole moyen entre
1991 et 1995,
la réforme a eu
un effet positif net expliquant
la moitié environ de la hausse du revenu agricole.
Cette analyse se décompose de la façon suivante : l'ensemble des
effets étroitement liés à la réforme de la PAC se
traduirait par une
augmentation de revenu d'un peu plus de 7 %
:
+1 % d'effet net des ressources [aides moins baisse des prix] ;
+4,9 % pour la réduction du prix des consommations
intermédiaires ;
+1,5 % de réduction des autres charges.
L'évolution des revenus agricoles en France a ainsi
été, en moyenne, la suivante ces dernières années :
ÉVOLUTION DU REVENU AGRICOLE FRANÇAIS
(en
%)
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997
|
-1,6 |
-7,6 |
+0,5 |
+13,6 |
+11,3 |
+2,1 |
+7 |
Source : Ministère de l'agriculture
...due en grande partie à la réduction du nombre
d'exploitations agricoles
La réduction du nombre d'exploitations a fortement favorisé
l'augmentation observée des revenus moyens. D'après les
renseignements communiqués par le ministère de l'agriculture, en
France, après une baisse annuelle moyenne de 2,4 % par an entre
1979 et 1988, puis de 4,7 % par an entre 1988 et 1993, le
taux annuel
de diminution du nombre d'exploitants agricoles entre 1993 et 1995 a
été de 4,2 %
, soit un rythme sensiblement
équivalent à celui précédemment observé.
Chaque année, sur les 51 000 départs environ d'exploitants
âgés, seulement un tiers sont remplacés.
30 000
exploitations disparaissent donc chaque année depuis 1993
. En
conséquence, la dimension moyenne des exploitations a augmenté.
On ne peut nier l'effet " mécanique " de ce
phénomène sur l'augmentation constatée des revenus
agricoles. L'étude précitée, qui porte sur la
période 1991-1995, fait, pour les secteurs français des grands
cultures et de l'élevage, l'analyse suivante :
- de 1991 à 1995, le revenu des exploitations de grandes cultures a
augmenté de 23,1 %. Hors effet de taille, le revenu avait
augmenté de 5,8 % ;
- pour les élevages bovins à viande, l'augmentation est de
37,8 % au total, mais de 28,5 % hors effet de taille.
Des défauts qui persistent
l'inégalité accrue des revenus agricoles
Si l'évolution moyenne du revenu a été positive, il existe
de fortes disparités entre les types d'exploitations, les productions
et, partant, entre les régions (sans parler des différences, au
niveau communautaire, entre les Etats-membres).
En France, certaines exploitations de grandes cultures ont notamment
bénéficié d'une augmentation supérieure à la
moyenne nationale.
ÉVOLUTION DU REVENU MOYEN PAR SECTEURS EN FRANCE
(exploitation à temps complet en termes réels)
en %
|
Grandes cultures |
Bovins lait |
Bovins viande |
1991
|
-0,9
|
-6,1
|
+4,7
|
(1)
Chiffres prévisionnels Source : SCEES
(2) Devrait être revu en légère baisse
La dépendance accrue à l'égard du contribuable
La réforme de la PAC de 1992 a profondément modifié la
nature du financement du soutien à l'agriculture,
qui a
été reporté sur le
contribuable
alors qu'il
était jusqu'alors assuré davantage par le
consommateur
, au
moyen d'un soutien par les prix.
En prévoyant une compensation de la baisse des prix des produits par des
paiements directs aux exploitations, elle a fait des ressources publiques un
élément essentiel du revenu des agriculteurs.
- Une forte progression des aides directes
Les aides directes aux agriculteurs existaient déjà avant 1992,
pour un montant (français) d'environ 10 à 12 milliards de
francs. Elles avaient en général un
caractère
structurel
: il s'agissait par exemple des indemnités compensatoires
de handicaps naturels (ICHN), mises en place dans les années 1970
représentant, avant 1990, 15 % des subventions d'exploitation
versées en France, soit le premier poste budgétaire en termes
d'aides directes.
Des aides directes liées à une production et
intégrées à une OCM existaient aussi déjà
dans le secteur bovin surtout et pour le blé dur.
La réforme de la PAC a modifié cette économie globale :
- en
généralisant les aides
, dont le montant a
été multiplié par plus de 4 depuis 1988 et qui touchent
désormais la quasi-totalité des exploitants et du territoire ;
- en leur conférant un caractère d'aide à
la
production,
et non plus d'aide socio-structurelle : en témoigne
leur concentration sur les grandes plaines céréalières au
détriment des zones fragiles ;
- en modifiant leur
origine
, désormais majoritairement
communautaire ;
- en en faisant bénéficier en premier lieu les
grandes
cultures,
et moins que par le passé le secteur animal.
En France, pays qui dispose de 26 % de la surface en
céréales et oléo-protéagineux communautaire
aidée, la recomposition des soutiens à l'agriculture qui a suivi
la réforme de 1992 a été particulièrement
marquée. D'après une étude de juillet 1997 du
ministère de l'agriculture
8(
*
)
, entre 1991
et 1995, les subventions d'exploitation reçues par la branche
agriculture française sont passés de
13 à 49
milliards de francs, soit de 21 à 68 % du total des concours bruts
à l'agriculture productive
. Dans le même temps, le soutien du
marché baissait de 25 milliards de francs, les aides directes
représentant en 1995, en moyenne française,
109.000 francs par
exploitation.
- Une répartition qui n'a pas entraîné de redistribution
En outre, ces aides ont été caractérisées par :
- une augmentation des subventions avec la
dimension
économique
de l'exploitation
: les principaux soutiens
directs étant liés à la taille du cheptel et aux surfaces
cultivées, leur montant moyen augmente avec la taille des exploitations ;
- une concentration sur
certains secteurs
: les
céréales et oléo-protéagineux ont concentré
le tiers du total des aides directes
9(
*
)
, les
grandes cultures herbivores 13 %, le secteur des bovins-viande 11 % ;
- une concentration sur
certaines exploitations
: l'étude
précitée montrait que, même au sein des
céréaliers, les disparités étaient importantes
puisque 8 % des producteurs percevaient en 1995 plus de 500 000 F
d'aides annuelles alors que 35 % avaient moins de 150 000 F.
-
Un revenu agricole de plus en plus dépendant des soutiens
directs
La réforme de 1992 a considérablement modifié le
rôle des aides directes dans la formation du revenu agricole des
producteurs français.
En prenant, pour indicateur de revenu, le revenu disponible (excédent
brut d'exploitation moins intérêts et remboursements en capital),
l'index de dépendance moyen des agriculteurs français est
d'environ 50 %
10(
*
)
.
Cette proportion atteint, ou dépasse, 90 % chez les producteurs
spécialisés en céréales,
oléo-protéagineux et viande bovine ou ovine. Elle est, en
revanche, de moins de 30 % pour les élevages laitiers et granivores.
INDEX
DE DEPENDANCE* DES EXPLOITATIONS FRANÇAISES
EN 1995
(en % du
revenu)
Céréales, oléo-protéagineux |
95 |
Autres grandes cultures |
50 |
Bovins-lait |
30 |
Bovins-viande |
89 |
Bovins-mixte |
48 |
Ovins-caprins |
88 |
Granivore |
24 |
Polyculture |
53 |
Polyélevage (herbivores) |
38 |
Polyélevages (granivores) |
35 |
Grandes cultures herbivores |
63 |
Autres combinaisons culture/élevage |
47 |
Autres orientations |
7 |
Moyenne |
50 |
* aides
directes/[EBE - Service de la dette]
Source : RICA, BEP du ministère de l'agriculture (chiffres
arrondis).
Ajoutons que, d'après la même étude,
sans aide,
près de la moitié des céréaliers et des
éleveurs bovins, viandes et ovins-caprins n'auraient pas de revenu.
L'accroissement du poids des aides directes dans le revenu agricole
inquiète vivement votre mission d'information, à plusieurs
titres :
- il
fragilise ce soutien
en le rendant plus visible -et donc moins
pérenne- pour un contribuable qui aura d'autant plus vite fait d'oublier
les baisses de prix imposées aux agriculteurs qu'il en aura peu senti
les effets ;
- il
transforme le rôle de l'agriculteur
: son revenu
dépendant moins de sa qualité de chef d'entreprise que de sa
propension à recevoir des aides, quel sera son métier demain
?
d) Une incidence financière qui se traduit surtout par une recomposition des dépenses agricoles Européennes
Une limitation des dépenses agricoles antérieure à la
réforme de 1992
Les dépenses agricoles ont toujours représenté le premier
poste de dépense de l'Union Européenne
11(
*
)
. A ce titre, le FEOGA garantie a
représenté jusqu'à 76 % du budget total de la
communauté.
Toutefois, cette part s'est réduite depuis les années 1980,
comme le montre le tableau suivant :
PART
DES DÉPENSES AGRICOLES DANS LE BUDGET COMMUNAUTAIRE
(EN MILLIARD DE FRANCS)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Budget UE |
65,27 |
59,91 |
66,76 |
81,94 |
83 |
Dépenses agricoles |
38,25 |
35,68 |
37,31 |
44,87 |
45,71 |
dont FEOGA garantie |
34,75 |
32,97 |
34,5 |
40,83 |
41,8 |
dont FEOGA orientation |
3,39 |
2,59 |
2,7 |
3,93 |
3,75 |
dont autres dépenses agricoles |
0,11 |
0,13 |
0,11 |
0,11 |
0,16 |
Perceptions au titre PAC |
2,14 |
2,3 |
2,4 |
2,18 |
2,24 |
dont prélèvements |
1,03 |
0,92 |
0,94 |
0,86 |
0,87 |
dont cotisations sucre |
1,15 |
1,38 |
1,46 |
1,32 |
1,37 |
Coût net de la PAC |
36,11 |
33,38 |
34,91 |
42,69 |
43,47 |
Part des dépenses agricoles dans le budget communautaire |
59% |
60% |
56% |
55% |
55% |
Source : " La situation de l'agriculture dans l'Union
Européenne ", Rapport 1996, Commission Européenne.
Certes, depuis 1992, la part des dépenses agricoles dans le budget de
l'Union Européenne a diminué. Toutefois,
le souci de
maîtrise des dépenses consacrées à l'agriculture
s'est manifesté bien avant la réforme de la politique agricole
commune de 1992.
Au Conseil Européen de Bruxelles de février 1988, la
volonté de limiter la part de l'agriculture dans le budget
Européen s'est inscrite dans le contexte plus général de
la définition d'un cadre financier pluriannuel pour 1998-1992, limitant
la croissance du budget Européen et définissant les
priorités budgétaires.
Elle s'est traduite par l'adoption d'un plafond financier,
la ligne
directrice agricole,
encadrant l'évolution des dépenses du
FEOGA-garantie, qui ne peuvent s'accroître de plus de 74 % du taux
de croissance du PNB communautaire,
ce qui conduit mécaniquement
à sa diminution relative dans les dépenses budgétaires.
Ce principe a été réaffirmé lors du Conseil
Européen d'Edimbourg en décembre 1992.
Une maîtrise qui va au-delà des objectifs
fixés
L'écart entre la ligne directrice et le FEOGA garanti voté
témoigne d'une progression des dépenses agricoles dans le budget
Européen plus faible que la progression autorisée.
L'écart, important en 1994 et 1995 (1 milliard de francs) s'est
réduit conjoncturellement en 1996 (lutte contre l'encéphalopathie
spongiforme bovine) et devrait de nouveau progresser à partir de 1998.
La discipline budgétaire est donc non seulement bien respectée
mais fait même apparaître une progression plus faible des
dépenses agricoles que la ligne directrice ne l'autorise.
Cet écart indique que toutes les ressources disponibles pour
l'agriculture Européenne ne sont pas utilisées : cette marge
financière est un des axes de réflexion pour l'avenir de la
politique agricole commune.
En définitive, si la réforme de 1992 a, certes,
prolongé les efforts de diminution de la part relative de l'agriculture
dans le budget Européen, elle a surtout engendré des effets de
structure et de recomposition des dépenses.
e) Des effets qui se traduisent surtout par une évolution de la structure des dépenses agricoles
Pour
le budget communautaire, la réforme de 1992 a principalement
engendré des effets de structure
: dans un contexte
général de diminution de la part relative des dépenses
agricoles dans le budget de l'Union, au profit d'autres priorités
budgétaires, la réforme a provoqué des changements
profonds dans les modalités d'aide à l'agriculture
Européenne.
Un changement de la structure des dépenses du
FEOGA-garantie
La section
" FEOGA garantie "
finance essentiellement les
organisations communes de marché agricole.
Elle assume les dépenses liées aux restitutions aux exportations
vers les pays tiers, et aux interventions destinées à la
régularisation des marchés agricoles (soutien des marchés
par les prix - achats à l'intervention - aides directes aux producteurs).
La réforme de 1992 a -on l'a vu- a étendu les aides directes aux
producteurs (aides à l'hectare, primes à la vache allaitante et
au bovin mâle) en échange d'une diminution de la production.
En conséquence, les aides liées à la réforme
représentent désormais le premier poste de dépense du
FEOGA garantie, avec 13,5 milliards de francs en 1995.
Les interventions du FEOGA garantie se sont élevées en 1995
à 26,2 milliards d'écus. L'immense majorité (93 %)
représentaient des aides compensatrices de prix (24,5 milliards
d'écus), alors que les aides aux stockage (339 millions d'écus),
les retraits (525 millions d'écus) et les primes orientatives (934
millions d'écus) ne représentaient au total que 7 % des
dépenses.
Les dépenses liées au stockage, qui s'élevaient
à plus de 6 milliards d'écus en 1991, se sont
réduites à 500 millions d'écus. Elles concernent
essentiellement les céréales (434 millions d'écus) et les
produits laitiers (29 millions d'écus).
En effet, Les stocks ont
chuté de 52 % entre 1993 et 1994 puis de 56 % entre 1994 et 1995. La
chute drastique des stocks a concerné tous les produits : les
céréales (-49%), les produits laitiers (-74%), la viande bovine
(-89 %).
Un faible développement des actions nouvelles
La réforme de 1992 avait également pour objectif d'orienter le
FEOGA-garantie vers le financement - total ou partiel - de certaines mesures
spécifiques de gestion des marchés agricoles
(distribution de
produits agricoles aux défavorisés de l'Union, actions de lutte
contre la fraude, mesures de promotion de la qualité, compensation de
certaines situations géographiques difficiles). Les mesures
d'accompagnement destinées aux producteurs réalisant des efforts
visant à protéger l'environnement ou cédant leur
exploitation devaient aussi être financées par le FEOGA-garantie.
Ces actions se sont développées mais ne représentent
pourtant que 5 % du total des dépenses du FEOGA-garantie, comme le
montre le tableau suivant :
ÉVOLUTION DES DÉPENSES DU FEOGA - GARANTIE
(EN
MILLIARDS D'ÉCUS)
|
1995 |
% |
1996 |
% |
1997 |
% |
Organisations communes de marché |
33,86 |
98% |
38,83 |
95% |
39,76 |
95% |
Autres mesures |
0,65 |
2% |
2,01 |
5% |
2,05 |
5% |
Total |
34,51 |
100% |
40,84 |
100% |
41,81 |
100% |
Parmi les autres mesures, les mesures d'accompagnement sont de loin les plus importantes (1,9 milliard d'écus en 1997). Les autres mesures sont négligeables à l'échelle du budget Européen, comme la lutte contre la fraude (44 millions d'écus) ou les restitutions pour l'aide alimentaire (97 millions d'écus).
3. Le rôle essentiel de la conjoncture dans le bilan de la PAC
La
Commission justifie notamment une nouvelle réforme de la PAC en
considérant que celle effectuée en 1992 a été une
réussite.
En effet, on a pu constater que certains dysfonctionnements présents au
début des années 1990 ont, peu à peu, disparu.
Mais doit-on imputer cette réussite, toute relative, à la
seule vertu intrinsèque des modalités du plan " Mac
Sharry " ou ne faut-il pas prendre en compte une conjoncture
favorable ?
Ainsi, dans le secteur céréalier, la diminution des
céréales s'explique en grande partie par une situation
conjoncturelle exceptionnellement favorable sur les marchés mondiaux,
qui s'est traduite par des prix plus élevés que prévus.
Dans le domaine de la viande bovine, le reflux significatif de la production de
12 %, observé entre 1992 et 1994 est largement dû à
des effets de cycle de la production bovine et non à la mise en place de
la réforme.
En ce qui concerne la reconquête partielle du marché de
l'alimentation animale, la mission d'information note que ce résultat a
été favorisé en grande partie par l'évolution
conjoncturelle à la hausse, sur les marchés mondiaux, des cours
des tourteaux, du soja et du maïs.
L'amélioration du revenu net des agriculteurs trouve aussi son origine
dans une conjoncture qui a entraîné
des
phénomènes de " surcompensation "
pour certains
secteurs, les agriculteurs ayant touché les primes compensatrices
à la baisse des prix d'intervention communautaires, alors qu'ils ne
subissaient que peu les effets de cette baisse en raison du cycle conjoncturel
des marchés mondiaux. La Commission Européenne a ainsi
chiffré, en juin 1997, à 8,4 milliards d'écus, pour
toute la communauté, la " surcompensation " perçue,
à son sens, par le secteur céréalier sur les 4 campagnes
d'après réforme.
La mission sénatoriale estime donc important de souligner le
rôle joué par la conjoncture dans les effets positifs dont a
bénéficié l'agriculture Européenne depuis
1992.
B. UNE LOGIQUE QUI N'A PAS ÉTÉ MENÉE À SON TERME
1. Une imparfaite prise en compte de la diversité agricole Européenne
a) La PAC : deux poids, deux mesures ?
La
réforme de 1992 n'a pas permis de rééquilibrer la
propension de la PAC à privilégier certains secteurs de
production et certaines zones géographiques.
Par exemple, certains secteurs, dits " ouverts ", comme les fruits et
légumes
12(
*
)
, ne
bénéficient en effet, traditionnellement, que de garanties de
prix, limitées, par le biais :
- de mécanismes de prélèvements et restitutions aux
frontières ;
- de retraits, qui servent plus de " filet de
sécurité " que de garantie de prix
rémunérateurs.
Cette situation s'oppose à celle d'autres secteurs,
bénéficiant soit de véritables
garanties de prix
(lait, betterave), soit
d'aides à la production
(oléagineux),
les deux types d'outils
se cumulant dans certains
cas (céréales, viande bovine...). Ces secteurs sont de
surcroît, encadrés dans certains cas, par des
disciplines de
production
(quotas de surface, de production, d'animaux...).
En termes budgétaires, mais aussi en termes de réglementation
et d'organisation, l'emprise de la PAC n'était donc pas proportionnelle
au poids des produits dans la production agricole totale de la
Communauté.
La réforme de 1992 n'a pas modifié cette donne ;
elle a
au contraire eu tendance à l'accentuer
: le choix, dans
certains secteurs, d'une baisse des prix d'intervention, compensée par
des aides directes s'est, en effet, logiquement traduit par une
réduction de la part relative des productions concernées dans la
production agricole finale, et par un accroissement des flux budgétaires
destinés à ces productions.
En conséquence, le " taux de retour " de certains Etats
membres, en fonction de leur spécialisation, par types de produits, a
été modifié :
votre président et vos
rapporteurs ont ainsi pu mesurer, en Italie, combien la réforme de 1992
avait été, pour cette raison, mal appréciée.
Force est de constater que
la PAC tarde à prendre en compte certaines
productions
: des réformes d'organisations communes de
marché (OCM) restent, surtout pour les productions
méditerranéennes, encore " au milieu du gué ",
même si certaines avancées timides, comme la réforme de
l'OCM fruits et légumes en 1996, ont été
réalisées.
b) Les productions méditerranéennes, parents pauvres de la PAC ?
En ce
qui concerne les productions méditerranéennes, l'organisation
commune du marché des
fruits et légumes
a
été réformée en 1996, par la voie d'une
modification du règlement de 1972.
Les fruits et légumes
Le tenants et aboutissants de cette réforme ayant été
remarquablement analysés par le rapport d'information
précité de votre Commission : "
Fruits et
légumes : une véritable ambition pour le
secteur
"
13(
*
)
, on se contentera ici
d'en rappeler les grands principes :
- une offre communautaire plus orientée vers le marché,
grâce au renforcement du rôle des organisations de producteurs et
de leur moyens techniques ;
- la reconnaissance des interprofessions ;
- une responsabilisation des producteurs par une réorganisation du
dispositif de soutien (mise en place de fonds opérationnels,
modification du système des retraits) ;
- une harmonisation et un renforcement des contrôles nationaux et
communautaires.
Cette réforme consacre un progrès, que votre mission
d'information juge toutefois insuffisant, eu égard aux
difficultés rencontrées par la filière fruits et
légumes
14(
*
)
.
Les propositions concernant le tabac
Les propositions de la Commission dans " Agenda 2000 "
rappellent qu'en décembre 1996, un rapport a été
établi sur le régime communautaire du tabac, proposant
"
un renforcement de l'orientation du marché de ce
secteur
"
.
Dans la logique de ce rapport, la Commission a
adopté, le 28 janvier dernier,
une proposition de
règlement
modifiant le règlement (CEE) n° 2075/92
portant organisation commune du marché dans le secteur du tabac brut.
Les principaux objectifs de cette proposition sont les suivants :
- encourager la production d'un tabac de meilleure qualité. La
Commission propose de
moduler une partie de la prime accordée
à chaque producteur
en fonction de la qualité de sa
production déterminée par son prix d'achat, la partie variable de
la prime représentant entre 35 et 45 % du montant total :
- mieux prendre en compte les impératifs de santé publique
et d'environnement grâce au
doublement de la retenue sur la prime
servant au financement du fonds communautaire de recherche et d'information sur
le tabac.
Des actions en faveur du respect de l'environnement devraient, de
plus, être financées par les groupements de producteurs au moyen
de l'aide spécifique qui leur est versée ;
- permettre la reconversion des producteurs grâce à un
système de
rachats de quotas
au bénéfice des
producteurs qui décident de quitter le secteur ;
- renforcer les contrôles par la mise en place d'un système
d'agrément des transformateurs afin de donner aux Etats membres la
possibilité de mieux sanctionner le non-respect du droit
communautaire ;
- flexibiliser le régime des quotas en facilitant les transferts de
quotas de production entre groupes de variétés, dans le respect
du principe de neutralité budgétaire. La Commission propose, en
outre, de faciliter la cession entre producteurs de leurs quotas de
production ;
- simplifier la gestion administrative du secteur en instaurant une
distribution des quotas aux groupements de producteurs sur une base triennale.
Les représentants des producteurs français de tabac
,
entendus par votre mission d'information, ont à ce sujet fait part de
deux inquiétudes majeures de la filière :
-
l'extinction des capacités productrices
Européennes
par la mise en place du système de rachat de quotas par la
Commission ;
-
l'alourdissement de la retenue Européenne
, sans que soient
précisées les utilisations de ces prélèvements, par
le fonds communautaire de recherche et d'information sur le tabac, qui en
bénéficiera.
Le délicat dossier de l'huile d'olive
En février 1997, la Commission a présenté un rapport
sur le régime communautaire de l'huile d'olive, qui est un sujet
conflictuel, notamment entre certains Etats membres producteurs du pourtour
méditerranéen. Rappelons que
l'Espagne est le premier
producteur mondial d'huile d'olive
, avec une production en augmentation
sensible ces dernières années.
Dans le cadre de la réforme de la PAC proposée, en
juillet 1997, par " Agenda 2000 ", seule une future
"
proposition plus précise
" de la Commission
était annoncée sur ce sujet. Le 18 mars dernier, la
Commission suggérait ainsi la mise en place d'un régime
transitoire, applicable du 1er novembre 1998 au
31 novembre 2001, en attendant une réforme définitive,
conditionnée à l'obtention de données fiables sur le
nombre d'arbres et les surfaces cultivées.
Ce système transitoire comprendrait une augmentation de 15,7 % de
la
quantité
maximale garantie communautaire
, et sa
répartition entre les 5 pays producteurs
, l'Espagne
disposant 40 % du total.
La Commission souhaite également supprimer les aides à la
consommation et aux petits producteurs qui ont été, à son
sens, d'importantes sources de la
fraude aux primes
communautaires
observée dans ce secteur.
Cette question -même si on constate de réels progrès lors
du Conseil Agriculture du 26 mai dernier- est toujours en suspens au niveau
communautaire, la proposition de la Commission ayant donné lieu dans
certains Etats à de vives contestations.
Ce sujet, abordé
" en marge " du " paquet " global, pourrait
hypothéquer l'issue de l'ensemble des négociations agricoles
d'Agenda 2000.
L'OCM vini-viticole, une réforme toujours en attente.
La volonté de réforme de cette OCM est déjà
ancienne puisqu'une proposition en ce sens a été
présentée en juin 1994 par la Commission.
Cette proposition de réforme, qui a fait l'objet d'une
résolution du Sénat, adoptée le 29 juin 1995,
sur le rapport de votre Commission, n'a pu, à ce jour, aboutir.
C'est dans ce contexte que la Commission Européenne indique seulement,
dans " Agenda 2000 ", qu'"
Eu égard à
l'évolution récente, et en particulier au nouveau contexte
créé dans ce secteur à la suite de l'accord du cycle de
l'Uruguay, la Commission a l'intention de réviser la proposition en
suspens et d'en présenter une nouvelle dès que l'analyse de la
situation en 1997 aura été totalement achevée
" .
Le Gouvernement français a, dans cette optique, présenté,
le 12 janvier dernier, un mémorandum à l'attention de la
Commission, définissant les trois grandes priorités
françaises :
Le maintien du potentiel de production Européen,
par la
mise en oeuvre d'aides à la rénovation du vignoble et par une
possibilité de développement pour les régions qui ont
encore des parts de marché à conquérir ;
Le renforcement de la compétitivité des entreprises
par l'amélioration de la qualité des vins et par des aides
à la modernisation des entreprises ;
Le développement de l'organisation des filières
viticoles
, par la reconnaissance du rôle des interprofessions.
Pour l'instant, ce dossier n'a pas connu d'avancée significative, ce
que votre mission d'information déplore.
Elle attend avec impatience les prochaines propositions de la Commission
annoncées dans les semaines à venir.
Le régime menacé de la production de chanvre à fibres
industriel
A la suite de la très forte augmentation du nombre d'hectares de chanvre
cultivé dans l'Union Européenne, parfois justifiée par le
seul comportement de " chasse à la prime communautaire ", la
Commission a proposé, dans le " Paquet prix " 1998/1999, une
réduction de 25 % de la prime compensatrice attribuée
à cette culture.
En effet, la réglementation actuelle précise que l'aide est
versée pour les superficies ensemencées et
récoltées pour lesquelles les travaux normaux de culture ont
été effectués, sans lier l'octroi de l'aide à une
exigence de transformation -comme c'est le cas pour le lin-. Cette insuffisance
réglementaire a incité de nombreux producteurs à ne
cultiver le chanvre que pour obtenir la prime.
Votre mission d'information est préoccupée par le fait que la
baisse proposée par la Commission risque de remettre en cause
l'activité des " authentiques " producteurs, sans pour autant
éradiquer totalement les comportements
dénoncés.
c) La montagne, une spécificité mal prise en compte
Les
contraintes physiques
très fortes de la géographie en zones
de montagne, la faiblesse de la productivité et les surcoûts qui
en résultent pour l'activité agricole, ainsi que
le rôle
fondamental de l'agriculture dans ces zones fragiles
doivent être
reconnues. Il s'agit là d'un impératif de toute politique rurale
et d'aménagement du territoire. L'instauration au niveau Européen
des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) à
répondu, en son temps, à cette logique.
Rappelons qu'en France plus de 100.000 exploitations agricoles sont
aujourd'hui situées dans les zones de montagne. Or, la montagne a
déjà perdu 80.000 exploitations en 15 ans et
près de 50 % de ses actifs. Aujourd'hui, si les agriculteurs sont
plus jeunes en moyenne en montagne que sur le reste du territoire, ils ont
moins de successeurs que la moyenne française (28 % des exploitants
n'ont pas de successeurs). C'est donc une source essentielle d'activité
qui risque de s'éteindre dans ces zones, si rien n'est fait pour l'y
maintenir.
Votre mission d'information a donc souhaité se pencher sur les effets
de la réforme de 1992 pour les zones de montagne. Le bilan est
clair : le maintien de l'agriculture en montagne, pourtant essentiel, n'a
pas été significativement encouragé.
Plus de cinq ans après la réforme de la PAC, le revenu courant de
l'agriculture de montagne est demeuré
inférieur à la
moyenne nationale
(121 400 F contre 187 200 F)
15(
*
)
.
L'écart ne s'est pas réduit
.
Bien plus, le système des aides directes compensant les baisses de prix
a
davantage bénéficié aux zones sans handicaps
naturels,
comme le montre le tableau suivant :
MOYENNE PAR EXPLOITATION DES AIDES DIRECTES PAR ZONES DE
HANDICAPS NATURELS
(en francs)
Moyennes par exploitation |
Plaine |
Montagne |
Zone défavorisée (hors montagne) |
Ensemble |
Aides grandes cultures |
88 439 |
15 988 |
82 665 |
75 182 |
Aides élevage |
11 979 |
36 643 |
40 844 |
21 555 |
Aides agri-environnemen-tales |
535 |
9 996 |
4 712 |
2 913 |
ICHN |
28 |
21 350 |
3 130 |
4 193 |
Total aides directes |
106 500 |
89 108 |
136 711 |
109 265 |
Aides par hectare |
1 845 |
1 672 |
1 916 |
1 835 |
Source RICA - Echantillon complet 1995
Malgré la discrimination positive mise en oeuvre en faveur des zones de
montagne par les ICHN,
la moyenne des aides perçues à
l'hectare reste plus élevée pour la plaine (1 845 F) que pour la
montagne (1 672 F) !
2. Une vocation exportatrice qui n'est pas pleinement valorisée
Les
perspectives des marchés mondiaux à moyen terme sont favorables,
notamment pour les produits entrant dans l'alimentation du bétail, en
raison du fort accroissement attendu de la demande -surtout asiatique- sous
l'effet cumulé de l'augmentation de la population et du niveau de vie.
La Communauté a une carte importante à jouer dans ce contexte,
notamment en matière de céréales (on pense au blé),
vu sa compétitivité pour ce type de productions. Or la politique
exportatrice communautaire a été peu offensive en la
matière ces dernières années.
La réforme de 1992
n'a pas permis de faire valoir cet atout.
Une étude du service de l'information économique de l'ONIC,
présentée à votre mission d'information, montre que, pour
un dollar à 6 francs,
une exportation sans restitution de
blé Européen ne nécessite qu'une faible baisse des prix
d'intervention communautaires
:
- pour un prix mondial du blé à : |
130 $ |
140 $ |
150 $ |
- la baisse nécessaire du prix Européen pour exporter sans restitution est de : |
17 % |
9 % |
2 % |
Ajoutons
qu'au-delà des prix, c'est aussi le mode de gestion communautaire des
exportations qui est en cause.
L'objectif d'une exportation de blé sans restitution est donc loin
d'être hors de portée. Il permettrait de tourner
définitivement le dos à la vie politique du gel des terres, et de
développer les débouchés extérieurs
communautaires.
3. Une préférence communautaire fragilisée
a) Un pilier essentiel de la PAC
Lors de
sa mise en place dans les années 1960, la politique agricole
Européenne s'est structurée autour d'un principe essentiel,
économique mais aussi symbolique :
la préférence
communautaire
.
Il s'est traduit, concrètement, par un mécanisme de
prélèvements aux importations agricoles extra-communautaires
permettant de maintenir le prix des produits importés au-dessus des prix
d'intervention communautaires, favorisant ainsi la consommation des produits
agricoles internes, en leur accordant une
" préférence ".
Réciproquement, à l'exportation, les producteurs communautaires
bénéficiaient d'une restitution attribuée par le FEOGA
selon certaines modalités (adjudication au moins offrant...),
égale à la différence entre le prix mondial et le prix
Européen.
Ce système,
en déconnectant les prix communautaires des prix
mondiaux, a été une option politique majeure et l'un des
principaux pivots de la construction Européenne, qui a garanti
:
- une amélioration considérable de
l'autosuffisance
alimentaire
Européenne ;
-
un revenu
aux agriculteurs Européens ;
- un
débouché communautaire
pour les productions des
Etats membres ;
- une participation à la
croissance du commerce mondial
: la
préférence communautaire n'a pas empêché l'Europe de
prendre part à la mondialisation des échanges. Elle est ainsi
devenue le premier importateur mondial de produits agro-alimentaires.
b) Une notion quelque peu dénaturée par les accords du GATT
La
transformation des mécanismes douaniers agricoles
Pendant près de 30 ans
et jusqu'en 1994, la
préférence communautaire
a fonctionné sur le
schéma initial. La plupart des produits agricoles communautaires
(céréales, sucre, produits laitiers, viande bovine...)
étaient protégés des baisses de prix mondiaux par ce
système de prélèvements, versés par l'importateur
au FEOGA. Ce prélèvement était
automatique,
immédiat et variable
, puisqu'égal à la
différence entre un prix d'entrée à la frontière
communautaire, fixé chaque année par règlement (prix de
" seuil " pour la plupart des produits ; prix de
" référence " pour certains fruits et légumes,
situés au-dessus du prix d'intervention) et le prix mondial.
Le prélèvement sur l'importation augmentait donc lorsque le prix
mondial diminuait (soit sous l'effet de la baisse du prix de la matière
première, soit sous l'effet de la baisse du dollar).
Soulignons toutefois que le système a été appliqué
plus ou moins efficacement : certains secteurs en ont plus
particulièrement bénéficié (céréales,
sucre, produits laitiers, viandes bovine et porcine, aviculture), de
préférence à d'autres (fruits et légumes, vin,
viande ovine, aliments du bétail...).
MÉCANISME DE LA PRÉFÉRENCE COMMUNAUTAIRE JUSQU'EN 1994
prélèvement variable
Après la signature de l'accord de Marrakech
, en avril 1994,
clôturant le cycle de négociations du GATT, un nouveau
mécanisme de protection aux frontières a dû être mis
en place, l'ancien système étant devenu incompatible avec
l'accord international.
L'accord du GATT transforme les prélèvements variables
communautaires en droits de douane fixes, appelés
"
équivalents tarifaires
". Ces droits sont, en outre,
réduits de 36 % en moyenne, de façon régulée
suivant les produits sur les six ans de mise en oeuvre initiale de l'accord.
LE NOUVEAU MÉCANISME ISSU DES ACCORDS DU GATT
équivalent tarifaire (fixe et réduit de 36%)
L'agriculture est donc " banalisée " puisque lui est
appliqué désormais un régime classique de droits de douane
fixes, comme pour les autres secteurs.
Elle a ainsi perdu la
spécificité de sa protection extérieure,
qui avait
été instaurée, au moment de la mise en place de la
Communauté, pour des raisons liées aux structures agricoles
Européennes et au rôle de ce secteur dans l'économie et la
société. Ce tournant de la PAC a consacré
la fin de
" l'exception agricole " Européenne
.
Une
clause dite " de sauvegarde
"
a toutefois
été prévue par l'accord du GATT, censée
éviter un trop fort démantèlement de la protection
communautaire.
Ce système est destiné à préserver un certain
" équilibre ", en n'accroissant pas le volume d'importations
d'un pays déjà fortement importateur et en corrigeant
partiellement les effets d'un trop fort différentiel de prix.
Deux conditions déclenchent l'imposition de
droits additionnels
:
- lorsque le prix mondial se situe au-dessous d'un prix de
référence mondial (dont la liste fait partie de la liste d'offres
Européennes au GATT),
une clause de sauvegarde " prix "
peut être déclenchée : des droits additionnels sont
imposés, en fonction du différentiel de prix ;
- lorsque les importations annuelles dépassent un certain volume,
une clause de sauvegarde " volume "
peut être
déclenchée, en cas d'augmentation de 25 % des importations
pour un pays dont les importations représentent entre 0 et 10 % de
la consommation ; de 10 % pour les pays dont la part est de 10 et
30 % ; de 5 % pour les pays dont les importations représentent
plus de 30 % de la consommation.
Ces droits de douane additionnels ne s'appliquent toutefois que jusqu'à
la fin de l'année civile ; en outre, certains contingents d'importation
en sont exclus.
Au total, on peut estimer que dans ce nouveau système,
la
préférence communautaire est fragilisée par sa
dépendance à l'égard de plusieurs paramètres
:
- le niveau des équivalents tarifaires pour chaque produit ;
- le niveau des prix de référence mondiaux
déclenchant la " clause de sauvegarde " ;
- le degré d'efficacité de la " clause de
sauvegarde " en cas de baisse du prix mondial : rapidité de
déclenchement, volume des importations déjà
réalisées avant son déclenchement, importance et effet des
droits additionnels, pérennité du dispositif.
Au-delà des changements imposés dans le mécanisme
Européen de mise en oeuvre de la préférence communautaire,
le GATT a imposé l'ouverture aux pays tiers de contingents d'importation
à tarifs préférentiels.
Les contingents d'importation octroyés aux pays tiers
Des contingents préférentiels d'importation, quantités
importables sous des régimes douaniers spécifiques
(prélèvements réduits, droits de douane faibles voire
nuls) ont été imposés à toutes les parties
contractantes à l'accord du GATT.
L'accord prévoit
une ouverture des marchés
, de telle sorte
que les possibilités de telles importations par secteur soient
égales à
3 %
(en 1995)
puis 5 %
(en 2000)
de la consommation
de ces produits observée en 1986-1988.
Signalons que, sous la pression de la France, ces contingents ont
été calculés par " agrégation ", par
groupes de produits, alors que le projet initial raisonnait produit par produit.
Les contingents concédés par l'Union Européenne sont les
suivants :
CONTINGENTS D'IMPORTATION PRÉFÉRENTIELLE DANS L'UNION EUROPÉENNE
(en tonnes)
PRODUITS |
ACCÈS COURANT 16( * ) |
ACCÈS MINIMUM 17( * ) |
||
Bovins vivants |
194.000 (têtes) |
|
||
Viande bovine |
151.050 |
20.000 |
||
Viande porcine |
|
75.600 |
||
Ovins et caprins (vivants et viande) |
319.875 |
|
||
Volailles |
|
29.000 |
||
Oeufs |
|
208.000 |
||
Beurre |
76.667 |
90.000 |
||
Poudre 0 % |
|
69.000 |
||
Fromages |
15.250 |
104.000 |
||
Manioc, patates douces |
6.857.390 |
|
||
Bananes |
2.000.000 |
|
||
Oranges et agrumes |
45.000 |
|
||
Maïs-sorgho |
2.300.000 |
500.000 |
||
Blé |
|
300.000 |
||
Sucre de canne ou de betterave |
1.565.000 |
|
||
Sons |
475.000 |
|
||
Champignons |
62.660 |
|
Source : Commission Européenne
Rappelons que ces contingentements ne s'appliquent pas aux produits de
substitution des céréales et notamment au corn gluten feed, qui
entrent toujours sans protection douanière dans la Communauté
depuis les accords du " Dillon Round " de 1961.
c) Un principe menacé par la multiplication des accords préférentiels avec les pays tiers
Les
négociations agricoles du GATT ne sont pas le seul facteur de dilution
de la préférence communautaire. En plus de ce cadre
multilatéral, se sont multipliés nombre
d'accords
bilatéraux
d'échange entre la Communauté et
différents pays, très souvent pour des raisons politiques et
historiques, comme conséquence de liens particuliers entre des Etats
membres et certains pays (pays d'Afrique et des Caraïbes pour les accords
de Lomé), ou par suite d'un tropisme géograhique particulier
(bassin méditerranéen pour la France et l'Espagne, Europe de
l'est pour l'Allemagne).
Certes, les zones de libre-échange régional se développent
partout dans le monde, qu'il s'agisse de l'ALENA nord-américain, du
MERCOSUR Sud-Americain, des associations entre états du Sud-est
asiatique (ANASE) ou d'Asie Pacifique (APEC).
L'intérêt bien compris de l'Europe est de ne pas se laisser
marginaliser : elle doit sauvegarder ses débouchés
extérieurs. La Communauté n'a donc pas tout à perdre
à nouer, elle aussi, des relations commerciales
privilégiées.
Toutefois, il faut, en la matière, raison garder
:
l'établissement de tarifs préférentiels à
l'importation ou de zones de libre-échange n'est justifié que si
les avantages qui en résulteront pour la Communauté sont plus
importants que les inconvénients.
Comme l'ont montré encore récemment certains projets -tel le
" nouveau marché transatlantique ", écarté, pour
l'instant, à la demande expresse de la France- qu'élabore,
parfois, l'un ou l'autre des 4 commissaires Européens
chargés des relations extérieures (MM. Hans Van den Broeck, Leon
Brittan, Manuel Marin et Juao de Deus Pinheiro), les accords déjà
signés ou envisagés par la Communauté,
parfois depuis
de nombreuses années, mais surtout, de plus en plus nombreux, ces
dernières années
peuvent avoir des conséquences
importantes pour l'agriculture Européenne qu'il s'agisse :
- des conventions de Lomé entre l'Union Européenne et les
pays
d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
(ACP), dans un
objectif de développement de ces régions ;
- des accords d'association signés en 1991 avec les
pays
d'Europe centrale et orientale
, dans l'optique de la préparation de
l'adhésion future de ces pays ;
- de l'union douanière avec la
Turquie
;
- des projets d'accord de libre-échange avec le
Conseil de
coopération du Golfe
(Arabie Saoudite, Barhein, Oman, Koweit,
Emirats Arabes Unis) avec les pays du
Mercosur
, avec des pays
d'ex-URSS
(Russie, Moldavie, Ukraine, Bélarus) avec l'Afrique du
Sud, avec le Mexique... ;
- des accords bilatéraux négociés avec les pays tiers
du pourtour méditerranéen, dans le cadre de la politique de
" partenariat Euro-méditerranée
",
définie à Barcelone en 1995.
La France a toujours eu le souci de concilier la nécessaire ouverture
de la Communauté sur l'extérieur avec l'indispensable
préservation de ses intérêts, notamment agricoles
.
On se souvient d'ailleurs des réserves, exprimées à
plusieurs reprises, dès 1996, par des représentants officiels
français au sujet de la prolifération désordonnée
de tels projets d'accords préférentiels, la France
réclamant en la matière une " pause active " de la part
de la Commission, cette dernière étant invitée à ne
plus ouvrir de nouveaux chantiers de négociations bilatéraux.
En ce qui concerne plus particulièrement la négociation en cours
avec les
pays du pourtour méditerranéen -
qui sont lourdes
d'enjeux en matière agricole- puisque ces accords prévoient un
système de préférences à l'exportation, la
Commission Européenne a présenté, au mois d'octobre
dernier, un rapport
18(
*
)
au Conseil
étudiant l'impact des concessions de la Communauté à ces
pays pour l'agriculture Européenne et en particulier pour certains
produits " sensibles " comme les tomates, l'huile d'olive, les
agrumes, le raisin, le melon, les fraises, le vin, mais aussi les fleurs.
Douze pays sont concernés par des négociations avec la
Communauté, qui ne sont le plus souvent qu'un approfondissement des
accords de coopération signés dans les années 1970 :
Algérie, Chypre, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Malte, Maroc,
Palestine, Syrie, Tunisie, Turquie.
Rappelons que
la Turquie, le Maroc et Israël
sont trois
exportateurs importants de produits agricoles vers l'Union Européenne
(fleurs, agrumes, tomates, raisin, melon, noisettes, fraises et vins).
Chypre
exporte des volumes significatifs de pommes de terre, d'agrumes
et de raisin. La
Tunisie
exporte principalement de l'huile d'olive, mais
aussi des oranges.
Le rapport précité de la Commission aboutit à la
conclusion globale suivante : "
Une analyse des données
commerciales disponibles
ne permet pas d'établir un lien
évident
entre les augmentations des importations ou des concessions
et la situation de la production, de la consommation et de l'exportation
communautaires. Il semble, par exemple, qu'il n'y ait pas de substitution
directe des importations à la production intérieure "
.
Cette appréciation - optimiste- doit être nuancée, en
particulier dans certains secteurs
. Les différents
entretiens
19(
*
)
de votre mission d'information
ont en effet conforté les conclusions que tirait, en 1997, le groupe de
travail de la Commission des Affaires économiques sur les fruits et
légumes
20(
*
)
:
"
(...) le secteur agricole, et notamment celui des fruits et
légumes, se révèle être
une monnaie
d'échange courante dans la plupart des accords bilatéraux ou
multilatéraux
conclus par la Communauté avec les pays tiers.
Votre commission considère qu'il est temps que l'Union Européenne
ait
une vision claire de la politique commerciale extérieure
,
notamment en matière d'échanges agricoles et fasse des choix
cohérents (...) ".
Disposant d'acquis, mais aussi de faiblesses, la PAC doit en outre faire face
à de nouveaux défis pour aborder le
XXIème siècle.
II. LES ENJEUX DE LA PAC À L'AUBE DE L'AN 2000
A l'aube
de l'an 2000, la question en ce qui concerne la PAC n'est plus :
" faut-il la réformer ? ", mais :
" jusqu'où cette réforme ira-t-elle ?
21(
*
)
L'analyse détaillée des
différents enjeux auxquels l'agriculture Européenne doit faire
face, montre en effet l'importance des mutations Européennes et
internationales au sein desquelles la PAC doit évoluer.
Le monde agricole est, chaque jour, soumis à une demande toujours plus
grande d'adaptation, de qualité, de respect de l'environnement, de
préservation des territoires et de développement de l'emploi en
zone rurale...
Ces défis exigent des réponses. Il appartient à
l'agriculture Européenne de les fournir.
A. UN PAYSAGE EUROPÉEN EN PLEIN BOULEVERSEMENT
1. Les aspects financiers
Basée à son origine sur un " pacte "
politique franco-allemand, moteur de la construction de l'Europe,
la PAC a
concrétisé la solidarité communautaire en assurant un
transfert de ressources vers un secteur d'activité plus présent
dans certains Etats membres que dans d'autres.
En conséquence, certains membres bénéficient de meilleurs
" retours ", notamment, en matière agricole, par rapport
à leur contribution au budget communautaire.
Pour l'ensemble du budget communautaire
De fortes différences apparaissent en effet entre les Etats membres de
l'Union Européenne en termes de retour global par rapport aux
contributions versées, comme le montre le tableau suivant :
CONTRIBUTIONS ET RETOURS DES DIFFÉRENTS ETATS
MEMBRES EN
1995
(EN MILLIONS D'ÉCUS)
Etat membre |
Contribution budgétaire |
Paiements reçus |
Solde |
Taux de retour |
CONTRIBUTEURS NETS |
||||
Suède |
4 658 |
721 |
-937 |
15% |
Autriche |
1 763 |
588 |
-905 |
33% |
Allemagne |
21 324 |
7 893 |
-13 431 |
37% |
Pays-Bas |
4 349 |
2 345 |
-2 004 |
54% |
Luxembourg |
167 |
113 |
-45 |
68% |
Royaume-Uni |
6 252 |
4 531 |
-4 720 |
72% |
Finlande |
887 |
723 |
-164 |
82% |
France |
11 877 |
10 149 |
-1 727 |
85% |
Belgique |
2 680 |
2 369 |
-311 |
88% |
Italie |
6 414 |
5 799 |
-614 |
90% |
BENEFICIAIRES NETS |
||||
Danemark |
1 295 |
1 601 |
306 |
124% |
Espagne |
3 645 |
10 863 |
7 218 |
298% |
Irlande |
665 |
2 552 |
1 887 |
384% |
Portugal |
865 |
3 246 |
2 381 |
375% |
Grèce |
985 |
4 474 |
3 489 |
454% |
Source : Commission Européenne
Si la majorité des pays est contributrice nette au budget
Européen (10 pays sur 15),
4 Etats membres ont un taux de
retour inférieur à 60 %
(Autriche, Allemagne,
Suède, Pays-Bas). L'Allemagne qui a, par exemple, enregistré un
solde net négatif de 13,4 milliards d'écus en 1995, souhaite
une correction de ce déséquilibre, à son sens excessif.
La France contribue actuellement au budget communautaire
à hauteur de
18 %
, contre 29 % pour l'Allemagne, et
reçoit à
peu près la même part des dépenses communautaires
(17 %).
Le retour financier en matière agricole
recouvre des
disparités fortes entre Etats membres et pose donc la question de
l'avenir de la solidarité Européenne en matière
d'agriculture :
Source : Commission Européenne
Si la France reçoit globalement 17 % des dépenses
communautaires, elle perçoit 24,5 % des dépenses du
FEOGA-garantie, la PAC représentant 80 % des retours
français.
Certains pays souhaitent remédier à cette situation et demandent
que soit revue leur contribution autour du
concept de " solde
net "
entre les sommes versées et les sommes reçues,
concept qui est évidemment
contradictoire avec le principe de
solidarité Européenne
. Toutefois, la question est
posée et sera d'autant plus forte que l'élargissement de l'Union
Européenne devrait conduire à un nouveau déplacement des
solidarités communautaires.
2. Les nouveaux défis internes
L'agriculture Européenne est confrontée à
de
nouvelles exigences des consommateurs, qui attendent d'elle toujours plus de
qualité et de sécurité en matière alimentaire,
ainsi qu'une intégration plus harmonieuse dans l'environnement.
Les citoyens souhaitent lui voir confiée une fonction essentielle,
traditionnellement assumée par l'agriculture : au-delà de l'acte
de production, l'agriculture est sollicitée pour sa contribution
à l'aménagement du territoire.
a) L'importance de la qualité et de la salubrité des produits agricoles
Plusieurs événements récents ont
révélé le besoin accru des consommateurs de voir assurer,
en Europe, un très haut niveau de qualité et de
sécurité des produits destinés à l'alimentation
humaine et animale.
- Il s'agit, tout d'abord, du problème des résidus
d'hormones de croissance contenus dans la viande bovine.
Sur cette question, toujours pendante à l'OMC entre la communauté
et, notamment, les Etats-Unis, l'Europe a montré sa détermination
à garantir aux citoyens de l'Union un fort niveau de protection
sanitaire, en refusant l'utilisation d'hormones pour la production de viandes
de boeuf.
La communauté Européenne a en effet souhaité ne pas
autoriser -et, partant, ne pas importer- de viandes de boeuf produites à
l'aide d'anabolisants. Elle considère en effet qu'en l'absence de
certitude scientifique quant aux conséquences sur la santé
humaine de la consommation de ce type de produits, il convient de ne pas
exposer le consommateur Européen. Elle souhaite ainsi appliquer le
principe de précaution et garantir un haut niveau de protection des
citoyens Européens.
Cette décision a fait l'objet, dans un premier temps, de l'imposition de
sanctions unilatérales de la part des Etats-Unis, sous la forme de
droits prohibitifs frappant certaines exportations communautaires de produits
agricoles et de fruits et légumes pour une valeur de 90 millions de
dollars. La Communauté ayant dénoncé ces mesures de
rétorsion devant l'OMC, elles ont été levées en
juillet 1996.
Sur la base d'une plainte américaine, à laquelle s'étaient
joints le Canada, ainsi que l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la
Norvège, au titre de " tiers concernés ", un
comité d'arbitrage, ou " panel ", constitué de trois
juges, a considéré en juin dernier que l'interdiction
communautaire était contraire à plusieurs dispositions de
l'accord de l'OMC sur les mesures sanitaires et phytosanitaires.
La Commission a immédiatement réagi à cette condamnation,
en interjetant appel à l'OMC, sur le fondement de l'insuffisance des
évaluations scientifiques réalisées sur les risques pour
la santé humaine de la consommation de viandes anabolisées.
Ce contentieux -qui est encore loin d'être réglé, les
résultats de nouvelles études plus précises étant
attendues de la part de la Commission- montre la spécificité des
exigences Européennes en matière de sécurité des
produits alimentaires.
- Il s'agit aussi des organismes génétiquement
modifiés (OGM).
Notre collègue Jean Bizet a récemment présenté, au
nom de votre commission, un remarquable rapport d'information
22(
*
)
sur cette question, qui ne fera en conséquence
ici que l'objet d'un bref rappel.
Depuis la découverte, dans les années 1970, des techniques
d'isolation et de recombinaison des gènes, il est devenu possible de
découper les molécules d'ADN (acide
désoxyribonucléique), constituant le noyau de la cellule et
supportant les informations génétiques, qui, en quelque sorte,
" programment " le fonctionnement de l'être vivant.
Les séquences d'ADN ainsi isolées peuvent être, par
transgénèse, implantées dans le patrimoine
génétique d'un autre être vivant, grâce à
l'universalité du " code génétique ", qui est le
même pour tous, qu'il s'agisse d'animaux ou de végétaux. Le
caractère associé au gène considéré est
ainsi transmis d'une espèce à une autre.
Bien que dans la continuité de la sélection variétale
classique, cette technique est toutefois plus précise (seul le
gêne désiré est transmis) et plus puissante (franchissement
de la barrière d'espèces). En agriculture, elle a conduit
à la mise au point des plantes transgéniques aux qualités
agronomiques modifiées dans l'optique d'une amélioration des
conditions de culture.
Ainsi, les premières plantes transgéniques ont-elles
été dotées de gènes de résistance à
des insectes ravageurs. C'est le cas du maïs " Bt ",
auto-résistant à la pyrale, autorisé à la culture
en France en février 1998.
Testées depuis une dizaine d'années, des deux côtés
de l'Atlantique, ces plantes ont été semées à
grande échelle aux Etats-Unis dès 1996, puis exportées,
comme c'est le cas, vers l'Europe, pour un soja résistant à un
herbicide, ainsi que pour certaines variétés de maïs.
Au total, c'est une cinquantaine de plantes modifiées qui sont
déjà autorisées aux Etats-Unis, mais aussi au Canada, au
Brésil, en Argentine, en Australie, au Japon. Pourtant, comme l'a
analysé le rapport précité de notre collègue Bizet,
en Europe, l'accueil réservé à cette technologie est
mitigé. Les craintes pour l'environnement et la santé humaine y
sont plus vives qu'ailleurs, malgré les procédures
d'évaluation scientifique des risques mises en place au niveau national
et communautaire.
Rappelons que l'Autriche, mais aussi le Luxembourg, refusent toujours la
commercialisation et la culture de ces plantes sur leur territoire.
Après l'acceptation, le 18 décembre 1996, par la Commission
Européenne, de la commercialisation des premières plantes
transgéniques, les autorités communautaires doivent
présenter prochainement des orientations précises concernant
l'étiquetage des OGM, afin de mettre en place une information, sur
l'étiquette de l'aliment, permettant un choix effectif du consommateur.
Cette attitude est spécifiquement Européenne, puisque nos
partenaires commerciaux s'engagent résolument dans la voie des cultures
transgéniques : on parle pour les semis 1998 d'une proportion
oscillant entre le tiers et la moitié de soja transgénique aux
Etats-Unis, suivant la capacité des firmes semencières à
fournir le marché. Elle montre une relation particulière à
la nourriture et à l'agriculture en Europe. Elle résulte aussi de
la crise de confiance des consommateurs à la suite de l'affaire de
l'encéphalopathie spongiforme bovine.
- Il s'agit enfin de l'attitude de défiance
révélée par la crise de la filière bovine
L'excellent rapport budgétaire pour avis de notre collègue Alain
Pluchet
23(
*
)
, sur l'agriculture, pour le projet
de loi de finances pour 1997, comporte une analyse détaillée de
la crise de la filière bovine. Ce " véritable
séisme ", comme l'a qualifié M. Joseph Daul,
Président de la Fédération nationale bovine et de
l'interprofession bétail et viande, n'a pas été une crise
classique de surproduction, mais plutôt une crise, d'un nouveau type, de
la consommation
24(
*
)
.
Les différentes analyses menées, notamment, par l'Office national
interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture ont
permis de mesurer plus particulièrement l'impact de la crise sur la
consommation des ménages dès l'année 1996.
Si la mise en place, par l'interprofession bovine, avec l'appui du
ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, du
label " VBF " (Viande Bovine Française), dès le 25 mars
1996, a permis de freiner le mouvement à la baisse de la consommation,
la gravité exceptionnelle de la crise agricole induite par
l'effondrement de la consommation de viande bovine apparaît pour le moins
disproportionnée eu égard au faible nombre de cas d'ESB
constatés en France.
Cette crise de la consommation est, en grande
partie, une crise de confiance, due, pour une large part, à l'ampleur
des incertitudes sur cette affection.
Ainsi, les effets de cette crise, non seulement au sein de la filière
agricole et de la chaîne alimentaire, mais aussi sur le comportement du
consommateur, témoignent du très fort désir de ce dernier
de voir garantir un maximum d'hygiène et de qualité à
toutes les denrées alimentaires, quelle que soit leur origine. Ils
posent aussi un nouveau défi à l'agriculture : le consommateur,
désorienté, demande de plus en plus l'histoire des aliments qu'il
ingère.
Rappelons que le Règlement (CE) n° 820/97 du Conseil en date
du 21 avril 1997 impose un étiquetage de la viande bovine et
des produits à base de viande bovine à compter du
1er janvier 2000, ainsi qu'un système d'identification et
d'enregistrement des bovins.
Sur tous ces points, l'Europe fait preuve, vis-à-vis de son
agriculture, d'une exigence forte en termes de qualité et de
sécurité des produits alimentaires, qui se traduit par une
demande de traçabilité des filières et d'étiquetage
des produits.
Attentif à la qualité de la production agricole, comme le
démontre par ailleurs l'augmentation des productions sous label, le
citoyen Européen est aussi de plus en plus soucieux du respect de
l'environnement.
b) Le respect de l'environnement
Depuis 1972
, la politique de l'environnement est l'une
des
priorités de l'Union Européenne, que l'adoption de
l'Acte
unique Européen
en 1986 a renforcée.
Le Traité de
Maastricht
(1992) confirme une orientation désormais essentielle :
"
l'intégration des exigences en matière de protection de
l'environnement dans la définition et la mise en oeuvre des autres
politiques de la Communauté ".
Ainsi, progressivement, les Etats membres se sont efforcés
d'harmoniser leurs législations nationales en matière
d'environnement : les règles et les normes de protection sont donc,
pour la plupart, d'origine communautaire. Elles concernent tous les milieux
naturels, industriels et urbains.
Le cinquième programme d'action sur l'environnement 1993-2000,
exprimé dans le rapport "
Vers un développement
durable
", adopté par le Conseil des Ministres, s'appuie sur
une situation pessimiste de l'état de l'environnement de l'Union
Européenne.
Il estime nécessaire un changement radical de
mesures et de moyens.
Cinq secteurs
économiques ont
été identifiés
en priorité
: industrie,
énergie, transports, tourisme et agriculture.
En ce qui concerne l'
agriculture
, la Commission Européenne dresse
en effet, dans ce rapport, le constat suivant :
les mécanismes de la
PAC
ont permis d'atteindre plusieurs objectifs économiques, mais
exercent
des effets moins positifs
en matière d'environnement :
hyper-intensification, dégradation des ressources naturelles,
érosion des sols, uniformité génétique en
élevage, conséquences des effluents d'élevage, rôle
néfaste du drainage vis-à-vis des zones humides,
phénomène d'eutrophisation lié à l'usage exclusif
et excessif des engrais phosphatés...
La conjonction de ce constat et de l'orientation de l'Union Européenne
en faveur de l'environnement a donné naissance à plusieurs
directives ou règlements communautaires concernant l'agriculture, parmi
lesquels :
-
le règlement agri-environnemental
, qui a accompagné
la réforme de la PAC (1992), et qui a encouragé
l'extensification, la reconversion à l'agriculture biologique, la
protection des races menacées...
REPÈRES
Le
règlement de 1992 sur " les méthodes de production agricole
compatibles avec les exigences de la protection de l'environnement ainsi que
l'entretien de l'espace naturel " vise à encourager l'agriculture
biologique et à faible consommation d'intrants, les productions
végétales extensives (y compris fourragères),
l'extensification de l'élevage et d'autres pratiques environnementales.
Il concerne aussi le soutien aux races d'élevage menacées,
l'entretien des terres abandonnées, le retrait des terres à long
terme pour au moins vingt ans et l'accès au public.
A ce stade, 127 programmes ont été approuvés dans
quinze Etats membres, avec un cofinancement de l'Union Européenne de
75 % dans les régions en retard de développement
(objectif 1) et de 50 % par ailleurs.
Les dépenses communautaires, à la charge du Feoga-garantie,
s'élèvent ainsi à 2,455 milliards d'écus pour
la période 1993-1997. Ces programmes concernent 1,356 million de
personnes (17 % des personnes employées dans l'agriculture) et
couvrent 22,628 millions d'hectares (17 % de la SAU).
Près de 150.000 agriculteurs français ont souscrit un contrat
agri-environnemental pour cinq ans. Cette
politique de contractualisation
est appelée à se développer
dans les prochaines
années dans la mesure où elle constitue une manière
efficace de concilier au niveau local les impératifs économiques
avec les nécessités environnementales ;
-
la lutte contre la pollution par les nitrates
. En application de
la directive Européenne sur les nitrates (1991), la France a
délimité un ensemble de zones dites
" vulnérables ", représentant près de 30 %
du territoire national, dans lesquelles les agriculteurs sont incités
à modifier leurs pratiques de fertilisation, dans un objectif de
protection des eaux souterraines et superficielles. Les chambres d'agriculture
s'intègrent dans le cadre de cette action, comme dans celui du programme
national de mise aux normes des bâtiments d'élevage (PMPOA) ou de
certaines opérations volontaires, telle l'opération
" Ferti-Mieux " ;
-
l'interdiction de mise en décharge des boues.
Les
directives communautaires visant l'épuration des eaux usées, tout
en interdisant parallèlement la mise en décharge des boues de
stations d'épuration, vont conduire les collectivités locales
à chercher à utiliser la voie de l'épandage des boues sur
les terres agricoles. Devant l'insuffisante harmonisation des
législations nationales, comme devant le manque d'organisation de la
filière,
la profession agricole
a fait des propositions pour
durcir la réglementation française,
pour améliorer
les relations entre les acteurs et la transparence des échanges.
La tendance de l'Union Européenne à renforcer la protection de
l'environnement devrait se poursuivre. L'Europe doit impérativement
valoriser les fonctions positives de l'agriculture concernant l'environnement
(gestion de l'espace, paysage, biodiversité...) et éviter de
répartir les problèmes d'un secteur sur un autre (cas des boues
urbaines) par exemple).
Par ailleurs,
l'agriculture doit pouvoir répondre aux nouvelles
attentes de la société
: celle-ci s'inquiète de la
dégradation des ressources naturelles devenues rares, de la disparition
de paysages ruraux et d'une certaine " culture paysanne ". Un
modèle de développement économique non
maîtrisé conduit en effet à une mauvaise gestion des
ressources naturelles.
L'agriculture
ne peut pas échapper à cette logique. En
tant qu'activité productive, elle génère un ensemble
d'effets dommageables pour l'environnement qu'il lui faut minimiser. Toutefois,
elle n'a pas qu'une action de prélèvement et d'exploitation du
milieu naturel : elle
génère aussi un ensemble d'effets
positifs
sur l'environnement par la reconstitution du potentiel du sol,
et par une action -essentielle- d'occupation et de mise en valeur du
territoire
.
c) L'aménagement du territoire et la protection des paysages
Les
exigences de l'agriculture moderne ont contribué à la
dégradation des paysages ruraux par l'agrandissement des parcelles, la
disparition des haies, ou la construction de bâtiments agricoles plus
fonctionnels. La modernisation de l'agriculture française a aussi
conduit à une très forte diminution de la population active
agricole et de l'occupation du territoire. Il serait irréaliste
d'imaginer reconstituer le paysage d'il y a cinquante ans. Mais un travail
d'aménagement du paysage actuel est possible et est, d'ailleurs,
déjà engagé, qui ne remet pas en cause la recherche de la
productivité.
Cette prise en compte de la dimension territoriale de l'agriculture est
intégrée par la
politique régionale de l'Union
Européenne
, mise en place afin de renforcer sa cohésion
économique et sociale en réduisant les écarts de
développement au profit des régions les moins favorisées,
dont les zones rurales fragiles.
Les outils de cette politique sont pour l'essentiel, les " fonds
structurels " : FEDER (Fonds Européen de développement
régional), FEOGA-section Orientation, FSE (Fonds social
Européen), Fonds de cohésion.
Cette action a été mise en oeuvre sur l'ensemble du territoire
communautaire à partir de 1989 avec une première programmation
(cinq ans : 1989-1993). Elle se poursuit au cours de la seconde programmation
(1994-1999). Elle absorbe une part grandissante du budget communautaire et en
représentera environ le tiers à la fin de l'année 1999,
tandis que la PAC passera à moins de la moitié de ce même
budget.
Ainsi,
l'objectif 5a
couvre l'ensemble du territoire communautaire. Il a
un impact particulier pour les zones rurales, d'adaptation des structures des
exploitations agricoles et des structures de transformation et de
commercialisation des produits de l'agriculture, dans le cadre de la
précédente réforme de la PAC.
Âme de nos terroirs, l'agriculture a façonné la France.
Facteur d'équilibre spatial, de continuité, de présence
humaine, elle est aujourd'hui fortement sollicitée pour sa vocation
d'animation du territoire.
Si elle fait face à des exigences toujours plus grandes, l'agriculture
Européenne doit également absorber un choc de taille : celui de
l'intégration des anciens pays de l'Est.
3. L'élargissement de l'Union Européenne aux pays d'Europe centrale et orientale : un défi sans précédent pour la PAC
a) Une étape décisive de la construction Européenne
L'Europe réconciliée au sein de l'Union Européenne : un
principe acquis dès 1993
Depuis
le Conseil Européen de Copenhague en juin 1993
, le
principe d'un élargissement de l'Union Européenne aux pays
d'Europe centrale et orientale (PECO) est arrêté. Le Conseil a
estimé que les pays devaient être sélectionnés en
fonction des trois critères suivants :
- la stabilité des institutions et fonctionnement
démocratique ;
- l'existence d'une économie de marché viable et d'une
capacité à faire face à la pression concurrentielle ;
- la capacité à assumer les obligations résultant de
l'adhésion et à souscrire aux objectifs de l'Union politique,
économique et monétaire.
Alors que les premiers à Etats à entamer des négociations
en vue de leur entrée dans l'Union sont, suivant les propositions de la
commission, la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque,
l'Estonie et la Slovénie, (et Chypre) sont également candidats
" en attente " la Slovaquie, la Roumanie, la Bulgarie, la Lituanie et
la Lettonie.
L'approche préconisée par la Commission est pragmatique : la
conclusion des négociations est conditionnée, sur chaque pays,
à la réalisation des progrès jugés
nécessaires, dans le cadre d'une stratégie de
" pré-adhésion ", visant à une acclimatation
progressive.
Même si l'échéance n'en est pas encore
précisément fixée, cet élargissement à venir
de l'Union Européenne sera un défi majeur de la construction
Européenne.
Un élargissement aux enjeux sans précédent
L'élargissement aux ex-pays de l'Est diffère en effet très
largement des précédents. D'une part, il revêt
une
très forte portée symbolique
puisqu'il est la
conséquence politique de la chute du mur de Berlin et qu'il consacre
l'émergence d'une nouvelle Europe, réconciliée au sein de
l'Union Européenne.
D'autre part, il est un défi posé à la communauté :
-
par sa nature
: les candidats ont des économies " en
transition ", de l'économie planifiée vers l'économie
de marché ;
-
par son ampleur
: 10 pays sont candidats, le dernier
élargissement ne comportant que 4 candidats (et 3 pays admis) ;
-
par l'hétérogénéité des situations
de ces pays et par leur retard de développement avec le reste de
l'Union
: infrastructures, transports, protection de l'environnement,
législation sociale, capacité administrative ; l'écart de
développement, s'il est important en termes de richesse par habitant,
diffère cependant d'un candidat à l'autre, comme
détaillé ci-dessous :
PIB
PAR HABITANT DES " PECO " CANDIDATS
(en écus par habitant)
Source : Commission Européenne
Après l'élargissement aux 10 PECO candidats et à Chypre,
le territoire de l'Union Européenne augmentera de 34 %, sa
population s'accroîtrait de 29 % mais son PIB n'augmenterait que de
9 %, ce qui représente
une baisse de 16 % du PIB
communautaire moyen par habitant
25(
*
)
par
rapport à la situation actuelle.
Enfin, la dernière caractéristique singulière de ces pays
-la place de l'agriculture dans l'économie-, fait de
l'élargissement à venir un immense défi pour la politique
agricole commune.
b) La place de l'agriculture dans l'économie et la société des pays candidats
Une
part relativement plus importante du secteur agricole
L'agriculture occupe une place plus importante dans l'économie des pays
d'Europe centrale et orientale candidats que dans celle du reste de l'Union
Européenne, en termes de superficie relative, de part du PIB, et plus
spécialement de part dans l'emploi total.
Une moyenne de plus de
25 % de la population active y est en effet employée dans
l'agriculture
, soit un total de 9,5 millions de personnes (contre
6 %, soit 8,2 millions dans l'Union Européenne). L'agriculture
représente encore 8 % du PIB (contre 2,5 % dans l'UE).
Cette différence de structure est représentée
ci-après par quelques agrégats importants :
PART
DE L'AGRICULTURE DANS L'ECONOMIE DES EX-PAYS DE L'EST PAR RAPPORT A L'UNION
EUROPEENNE
Source : Commission Européenne
Une capacité productive obérée
La production agricole des ex-pays d'Europe de l'Est est en baisse depuis 1989,
en raison de l'éclatement des structures anciennes de commercialisation
et de la baisse de la demande intérieure de produits domestiques, au
profit d'une hausse de la demande de produits de meilleure qualité,
venus de l'étranger.
La
Slovénie
est le seul pays à échapper à
cette tendance baissière de la production, illustrée ci-dessous :
LA
BAISSE DE LA PRODUCTION AGRICOLE BRUTE DEPUIS 1989
(1989 : base 100)
Source : Commission Européenne
Malgré la reprise récente de la production, les estimations ne
sont pas très optimistes et laissent penser que le niveau de production
se stabilisera à un niveau inférieur à celui de 1989, mais
plus proche des capacités -et des besoins- de ces pays.
Pour les cinq PECO dont les négociations en vue de leur
adhésion à l'Union sont les plus avancées, rappelons que
leur production agricole représente moins de 10 % de la production
agricole de l'Union Européenne : la Pologne représente
5,39 % de la production communautaire actuelle, la Hongrie 1,97 %, la
République Tchèque 1,79 %, la Slovénie 0,56 % et
l'Estonie 0,13 %.
La
Pologne
reste, malgré les difficultés actuelles du
secteur agricole (près d'un quart de la main-d'oeuvre est
employée dans l'agriculture, où sévit déjà
un chômage rural élevé, et où les exploitations sont
très petites), le principal pays producteur à moyen terme, en
particulier dans les secteurs où l'Europe est déjà
exportatrice nette, telles que les céréales, la production
disposant d'un potentiel d'accroissement pour la viande bovine et le lait.
Dans ces circonstances, la plupart de ces pays sont devenus importateurs nets
de produits agricoles depuis 1989, sauf la Hongrie.
L'Union Européenne est souvent le premier fournisseur agricole de ces
économies. Pour la Pologne par exemple, l'Union Européenne est le
premier partenaire commercial agricole et représente 47 % des
exportations polonaises (contre 30 % pour l'ex-URSS) et 46 % des
importations agricoles.
La pénétration des produits agricoles et agro-alimentaires de la
communauté devrait se poursuivre avec l'élévation des
niveaux de vie.
Un difficile problème de compétitivité
-
la population active agricole :
Si
un actif sur quatre
est, en moyenne pour l'ensemble des 10 pays
candidats, employé dans le secteur agricole et si la contribution de ce
secteur à la richesse nationale est d'environ 8 % en moyenne, la
situation est en réalité plus nuancée pays par pays :
POIDS DE L'AGRICULTURE PAR PAYS CANDIDAT
Source : Commission Européenne
La productivité agricole de la Hongrie, par exemple, n'est pas la
même que celle de la Pologne ou de la Roumanie. Même si la
surpondération du secteur agricole est parfois à relativiser au
vu de la petite taille de certains Etats candidats, elle reflète
toutefois de réels problèmes de compétitivité de
ces agricultures.
A l'heure actuelle, les pays candidats à l'adhésion comptent
quasiment autant d'agriculteurs que l'Union Européenne dans son
ensemble, alors qu'ils ne produisent l'équivalent que de 10 % de la
production communautaire actuelle.
La population agricole est d'ailleurs en régression depuis 1989 et les
restructurations à venir poseront de lourds problèmes d'emploi
dans les régions concernées.
- les structures de production et de distribution :
Les structures des exploitations
restent un des handicaps majeurs des
secteurs agricoles des PECO. La privatisation a essentiellement produit de
petites structures très fragmentées
qui sont en moyenne de
cinq hectares environ, tandis que subsistent de
très vastes ensembles
collectifs
de plusieurs centaines (voire milliers) d'hectares qui souffrent
d'un sous-investissement.
La Pologne
s'est singularisée, sous le régime de
planification centralisée, par son faible degré de
collectivisation et par l'importance de son secteur privé agricole. On y
compte 7,5 millions d'agriculteurs, sur des exploitations de 6 à 7
hectares en moyenne.
L'indispensable réforme agraire se heurte, dans ces pays, d'après
la Commission Européenne
26(
*
)
, à
la difficulté
d'émergence d'un véritable marché
foncier
et à la lenteur du processus de privatisation des terres. La
commission relève
que
" les lenteurs de la privatisation
et de l'abolition de grands monopoles d'Etat dans les secteurs en amont et en
aval ont été une des causes de l'effet d'étau subi par les
exploitants agricoles au cours des premières années de
transition
".
Mais l'aval de la production agricole
participe aussi de la faible
compétitivité de ce secteur. Il a besoin d'une profonde
restructuration (circuits de distribution, technologies de transformation
alimentaire...). Parfois, les prix des productions à l'export peuvent
doubler entre l'exploitation et la sortie du territoire, en raison de
l'inefficience des circuits d'aval.
Cette différence de nature entre l'agriculture communautaire et celle
des pays candidats a souvent été mise en avant par la Commission
comme un argument pour réformer la PAC actuelle
, son extension pure
et simple aux futurs Etats membres étant à son sens impossible,
car trop coûteuse pour le budget communautaire et même
contre-productive en terme de restructuration des filières pour les pays
concernés.
On exposera ici cet argument de la Commission, avant d'en relativiser la
portée immédiate pour la PAC.
c) Le coût d'un élargissement sans réforme de la PAC : un argument de la Commission pour justifier la réforme proposée
La
Commission a présenté, dès 1995, à la demande du
Conseil Européen d'Essen de décembre 1994, un "
document
de stratégie agricole
" sur le volet agricole de
l'élargissement
27(
*
)
, qui en a
apprécié les conséquences probables.
Dans ce document, la Commission a fait une évaluation du coût
théorique que représenterait l'extension de la PAC actuelle aux
10 pays d'Europe centrale et orientale candidats à l'entrée dans
l'Union Européenne. Précisons d'emblée " qu'Agenda
2000 " a par la suite affiné et nuancé certaines projections
initiales.
Le coût théorique pour le FEOGA-Garantie
Tout en soulignant le caractère hasardeux de ce type de projections, la
Commission a pris pour hypothèse une adhésion en 2000 des 10 PECO
candidats, et a évalué le coût de l'extension de la PAC
actuelle à ces pays, en envisageant un alignement progressif de leurs
prix (souvent inférieurs) sur les prix communautaires.
Dans ces conditions, le surcoût est estimé à environ
12 milliards d'écus par an
après une période de
transition et d'ajustement, à comparer aux 42 milliards d'Ecus
projetés pour l'Europe des 15.
Cette somme comprendrait les soutiens de marché ainsi que les aides
directes aux cultures arables, les primes animales et les mesures
d'accompagnement (programme agri-environnemental, afforestation et
préretraites).
Le surcoût se décomposerait, sur la période 2000-2010, de
la façon suivante :
SURCOÛT THÉORIQUE POUR LE FEOGA-GARANTIE D'UNE
EXTENSION EN 2000 DE LA PAC ACTUELLE AUX 10 PECO
(en millions d'écus)
Source : Commission Européenne, 1995
Soulignons qu'il s'agit bien d'une simulation, qui a toutes les chances de ne
pas se réaliser en l'état.
Ce chiffrage est, de
surcroît, présenté par la Commission peu avant ses
propositions, dans " Agenda 2000 ", de baisse des prix d'intervention
de la PAC, justifiée opportunément par l'argument de
l'élargissement :
en effet, l'introduction brutale des prix
communautaires actuels dans les agricultures des 10 PECO provoquerait,
d'après la Commission, une hausse qui stimulerait la production, tout en
freinant la demande intérieure, dans des pays où une part encore
conséquente du budget des ménages est consacrée à
l'alimentation. La constitution d'excédents serait alors
inévitable. En outre, l'industrie de transformation alimentaire de ces
pays, déjà confrontée à la concurrence des produits
communautaires, subirait de la sorte un renchérissement du coût de
ses intrants.
Cette étude a toutefois le mérite d'entamer une nécessaire
réflexion et de mettre l'accent sur le défi important que
représente l'élargissement en matière de coût de la
PAC, à l'heure où cette dernière absorbe
déjà la moitié du budget communautaire.
L'impact sur les prix et les productions
La commission a réactualisé
28(
*
)
,
à l'occasion de la présentation " d'Agenda 2000 " en
juillet dernier, ses estimations des conséquences de l'entrée
dans l'Union Européenne des PECO candidats
sur les marchés
agricoles communautaires d'ici à 2005.
En prenant l'hypothèse d'une intégration des 10 PECO en 2002, -et
non plus en 2000- et d'une application de la PAC actuelle à ces nouveaux
Etats membres, avec une hausse progressive des prix jusqu'à rejoindre
les prix communautaires, une instauration de quotas pour le lait et le sucre et
l'imposition d'un gel des terres, l'impact sur les différents
marchés serait le suivant :
L'IMPACT SUR LES PRODUCTIONS ET LES PRIX
Céréales :
Si le retrait des terres est appliqué,
les 10 PECO deviendraient importateurs nets de céréales (pour
1 million de tonnes en 2005), les quinze devant être à cette
date excédentaires (pour 40 millions de tonnes). Sans gel des
terres, l'excédent des PECO serait de quelques millions de tonnes.
Oléagineux :
La capacité exportatrice des PECO
après 2000 serait de 900 000 tonnes, alors que les besoins
d'importation des quinze s'élèvent à 16 millions de
tonnes.
Sucre :
En ce qui concerne les pays partie à l'accord de
libre-échange centre-Européen
29(
*
)
, la production resterait excédentaire en 2005
malgré l'instauration de quotas.
Lait :
La production des PECO serait stabilisée par
l'application du régime des quotas laitiers, mais le rattrapage à
la hausse des prix pour s'aligner sur les prix communautaires freinerait,
d'après la Commission, la consommation intérieure,
entraînant ainsi l'apparition d'un excédent laitier de
2 millions de tonnes en 2005, contre 9,4 millions d'excédent
pour les 15.
Viande bovine :
De même, l'alignement sur les prix communautaires
stimulerait la production dans les PECO et aurait un effet négatif sur
la consommation intérieure. Un excédent de 435 000 tonnes
pourrait apparaître dans les 10 PECO (contre 500 000 tonnes pour les
15) d'ici à 2005.
Viande porcine :
Le même phénomène d'accroissement
de la production de diminution de la consommation intérieure, lié
à l'effet de rattrapage des prix, conduirait à un excédent
de 252 000 tonnes pour les 10 PECO (contre 700 000 pour les 15)
Volaille :
L'excédent des 10 PECO atteindrait de 170 000
à 194 000 tonnes après 2000, contre 400 000 tonnes pour
les 15.
Vin de table et fruits et légumes :
La Commission estime que des
"
déséquilibres
" pourraient
"
également
" affecter ces marchés.
Source : " Agenda 2000 ", Commission, juillet 1997
Sur cette argumentation communautaire, votre mission d'information souhaite
formuler deux remarques :
- L'élargissement ne fera réellement sentir ses
conséquences pour la PAC qu'à un horizon d'au moins 5 ans
(voire plus). Il n'est donc
pas le facteur le plus immédiat
pour
la réforme de la PAC ;
- En revanche, il constitue, sur le moyen terme, un défi immense
pour la Politique agricole commune. Mais il semble à votre mission
d'information que son impact se fera encore davantage sentir sur
la
politique des fonds structurels Européens
.
L'élargissement et les fonds structurels
Une forte demande d'actions de cohésion
Les pays candidats présentent -on l'a vu- en moyenne un PIB par habitant
égal à seulement
un tiers de la moyenne communautaire
actuelle
. Au sein de ces pays, l'écart est important : il va de 1
à 3,2 entre les deux candidats " extrêmes ", la Lettonie
et la Slovénie, disparité plus forte que les écarts
actuels de développement qui existent entre le plus riche et le moins
riche des quinze (rapport de 1 à 2,6 entre la Grèce et
Luxembourg). Dans " Agenda 2000 ", la Commission souligne que
la
baisse du PIB par habitant moyen de l'Europe du fait du passage des 15 Etats
aux 26 Etats sera supérieure à l'ensemble des baisses intervenues
lors des précédents élargissements
.
Or
le principe de cohésion
, qui est l'un des piliers de l'Union
Européenne, impose de réduire les disparités entre les
Etats membres. Dans " Agenda 2000 ", la Commission souligne que
" ni dans le cadre de la planification centralisée, ni au
début de la transition économique, les pays candidats n'ont pu
mobiliser des moyens administratifs et budgétaires importants pour
atténuer ces disparités. Face à la montée du
chômage et à la prise de conscience du coût social et
régional des transformations économiques, ils se sont
récemment dotés de quelques instruments (...) [qui] restent
encore insuffisants ".
Faibles contributeurs au budget communautaire, les PECO, une fois
intégrés dans l'Union, seront en revanche fortement consommateurs
de crédits des politiques structurelles.
Bien plus, l'action structurelle conditionne en quelque sorte le succès
de l'intégration de ces pays.
Une extension des instruments actuels difficilement envisageable
Afin de montrer l'ampleur du défi auquel doit faire face, du fait de
l'élargissement, la politique structurelle Européenne, la
commission a calculé l'augmentation qu'entraînerait, à
réglementation inchangée, en terme de population éligible
aux différents objectifs, l'entrée des 10 PECO (et de Chypre)
dans l'Union, par rapport à la situation de 1989 à celle de 1995 :
AUGMENTATION DE LA POPULATION ÉLIGIBLE AUX FONDS
STRUCTURELS ACTUELS
|
||
|
|
|
Source : Commission Européenne
Sur les critères actuels,
tous les PECO seraient éligibles
à l'objectif 1
des fonds structurels (régions en retard
de développement pour l'ensemble de leur territoire). Si rien n'est
changé, le nombre d'habitants pouvant bénéficier de cette
aide passerait alors de 94 à 200 millions, soit près des 2/3
de l'Union (60,4 %) !
Ces chiffres montrent le caractère difficilement soutenable de la
politique structurelle actuelle. Ils posent ainsi le problème du
transfert de la solidarité intra-communautaire, d'un mouvement Nord/Sud
(et vers l'Irlande) à un mouvement Ouest/Est, sur le modèle de
l'Allemagne unifiée.
Ils hypothèquent à terme la capacité de l'Union
Européenne à venir en aide aux zones rurales des pays
" riches " de la Communauté.
En plus des chocs internes, à l'ampleur sans précédent, la
PAC est également confrontée à de rapides mutations
internationales.
B. UN CONTEXTE INTERNATIONAL EN MUTATION
1. Les négociations commerciales multilatérales à venir : une contrainte à prendre en compte
C'est en
principe à la fin 1999 que doivent s'ouvrir de nouvelles
négociations agricoles multilatérales.
Les négociations du cycle de l'Uruguay, qui ont abouti, après de
difficiles débats, à la signature des accords de Marrakech, le
15 avril 1994, instituant l'organisation mondiale du commerce (OMC),
ont déjà bouleversé le paysage agricole Européen et
les principes fondateurs de la PAC.
Aujourd'hui, comme en 1992, se pose la question de la
compatibilité
de la PAC
et de la réforme proposée avec ces
négociations et de
la tactique à adopter face à
l'offensive prévisible de certains partenaires
: faut-il
réformer la PAC avant les négociations de l'OMC pour adopter une
stratégie commune mettre l'Europe en position plus confortable ? Ou
faut-il, au contraire, garder du " grain à moudre " pour les
négociations et ne pas faire par avance les concessions auxquelles le
cycle de discussions aurait dû aboutir se condamnant par là
même à en faire de nouvelles ? En tout état de cause, les
deux sujets ne peuvent être envisagés séparément.
Le précédent de 1992 se révèle, à cet
égard, particulièrement instructif.
a) Le précédent des négociations agricoles du cycle de l'Uruguay
C'est
à Punta del Este, en Uruguay, en septembre 1986, qu'a
été prise la décision, aux lourdes conséquences, de
réintégrer l'agriculture au sein des négociations
commerciales internationales
visant à une libéralisation
accrue des marchés mondiaux.
Sept années de discussions, souvent tendues, ont été
nécessaires pour aboutir à un accord, les négociations
agricoles -les plus âpres, entre les Etats-Unis et l'Europe-
conditionnant l'issue de l'ensemble de l'accord, autour de trois thèmes
principaux :
- les politiques de soutien interne à l'agriculture ;
- les mesures d'aides à l'exportation ;
- l'accès aux marchés.
L'échec des premières tentatives d'accord
La position de départ des Etats-Unis
(qui avaient eux-mêmes
demandé le lancement d'une grande négociation agricole),
qualifiée "
d'option zéro
", visait à
éliminer toutes les mesures de politique agricole à
l'échéance 2000 : suppression en dix ans des aides
internes liées à la production ; suppression en cinq ans des
subventions à l'exportation ; suppression en dix ans de toute protection
aux frontières.
Cette position maximaliste, bien que rejetée par la Communauté
Européenne, le Japon et les pays scandinaves, reçut le soutien
très ferme des
pays dits du " Groupe de Cairns ".
Ces
Etats, qui, dans leur majorité, ne pratiquent pas de subvention à
l'exportation, représentent environ le tiers des exportations agricoles
mondiales. Ils s'estiment être des " exportateurs loyaux " et
réclament une très forte libéralisation du commerce de
produits agricoles.
LES PAYS DU GROUPE DE CAIRNS
Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chili, Colombie,
Iles
Fidji, Hongrie, Indonésie, Malaisie, Nouvelle-Zélande,
Philippines, Thaïlande et Uruguay
.
La Communauté Européenne
, quant à elle,
considérait que la réduction du soutien interne ne devait pas
excéder le niveau nécessaire au seul rétablissement de
l'équilibre des marchés. Elle proposait une discussion globale
des mesures de soutien interne, autour de l'indice synthétique de la
" mesure globale de soutien " (MGS), égale à la
différence entre le prix interne et le prix mondial, multipliée
par le volume de production, permettant de comparer les diverses formes de
politiques de soutien.
La position de la Communauté Européenne était donc la
suivante :
- prise en compte des mesures globales de soutien ;
- réduction de 30 % de la MGS, en dix ans à partir de
1986, pour les principaux produits (céréales, riz, sucre,
oléagineux et produits animaux) ;
- rééquilibrage de la protection extérieure au moyen
de la " tarification " (introduction d'un droit de douane à
l'importation des oléagineux et des produits de substitution aux
céréales, produits non protégés alors que les
secteurs à prélèvement variable
bénéficiaient d'une grande protection).
L'éloignement des positions des deux partenaires a d'abord conduit
à
l'échec de la tentative de compromis
(le
" Compromis Hellström ") à la Conférence du
Heysel, en décembre 1990.
C'est ensuite, le "
compromis Dunkel
", présenté
le 20 décembre 1991 par le Secrétaire
général du GATT, qui a tenté, sans succès,
d'aboutir à une solution. La Communauté s'y est opposée,
notamment en raison du non règlement par cette proposition du
contentieux entre l'Europe et les Etats-Unis sur le régime des
oléagineux.
La réforme de la PAC et le pré-accord de Blair House
C'est dans ce contexte de blocage des négociations internationales qu'a
été lancée la réforme Mac Shary de 1992,
précédemment décrite, qui a profondément
modifié le jeu de la négociation au GATT.
La réforme accomplie, l'Europe a cherché à obtenir au GATT
l'assurance d'une exemption de la réduction du soutien en faveur des
nouvelles aides de la PAC réformée, les Etats-Unis cherchant de
leur côté à obtenir une exemption similaire pour leur
système d'aide directe au producteur (deficiency payment).
Des discussions furent entreprises dans un cadre bilatéral
, entre
les Etats-Unis et la Communauté, afin de mettre au point les
modalités d'un accord à deux, prélude à un accord
définitif de toutes les parties contractantes. Ces discussions
aboutirent, le 20 novembre 1992 à Washington,
au
pré-accord dit de " Blair House "
(du nom du
bâtiment, proche de la Maison Blanche, où elles se
déroulèrent), qui a fait par la suite l'objet d'une vive
contestation de la part de la France.
La teneur de cet accord, comportant des engagements pour six ans à
compter de 1995, est résumé ainsi par un document de la
Commission Européenne :
LE PRÉ-ACCORD DE " BLAIR-HOUSE " : PRINCIPALES DISPOSITIONS
Soutien interne
: Il a été convenu d'exempter de
l'engagement de réduction au titre de la mesure globale de soutien les
aides directes versées par la Communauté dans le cadre de la PAC
réformée. Il était donc possible d'offrir aux exploitants
agricoles de la Communauté une compensation intégrale pour les
pertes de revenu résultant des réductions de prix ;
Exportations subventionnées
: Le chiffre de réduction du
volume des exportations subventionnées était de 21 % (contre
24 % prévus dans le " compromis Dunkel ").
Rééquilibrage dans l'accès au marché
: Les
deux parties se sont mises d'accord pour engager des consultations si les
importations de produits de substitution des céréales (PSC)
augmentaient au point de compromettre les résultats de la réforme
du marché des céréales.
Clause de paix
: Les deux parties se sont accordées sur un texte
prévoyant que les instruments appliqués dans la politique
agricole d'un pays ne seraient pas contestés au titre des
articles XVI et XXIII (protection des concessions et des avantages) du
GATT aussi longtemps que les disciplines résultant de l'Uruguay Round
dans les trois domaines de négociations seraient intégralement
respectées.
Contentieux oléagineux
: L'accord mettait fin au contentieux
-vieux de 4 ans- Européo-américain sur les
oléagineux. Il a été convenu que la Communauté
appliquerait un taux de jachère, sur la base d'une superficie de
5,128 millions d'hectares, ne pouvant être inférieur à
10 %. Selon l'accord, la Communauté offrirait une concession
tarifaire pour l'importation de 500.000 tonnes de maïs. La production
d'oléagineux à des fins non alimentaires (bioéthanol, par
exemple) sur les terres mises en jachère serait possible jusqu'à
concurrence d'un certain niveau correspondant à un plafond de
sous-produits de 1 million de tonnes de tourteaux exprimés en
équivalent tourteaux de soja.
Source : " Le GATT et l'agriculture Européenne ", Cahiers
de la PAC, Commission Européenne, direction générale de
l'agriculture.
La réaction française et l'accord de
décembre 1993
Face à cet accord bilatéral,
la France
, grâce
à la détermination du Gouvernement issu des élections de
1993,
a vivement réagi
, en mettant en cause notamment l'absence
de disposition précise en matière de rééquilibrage
dans l'accès au marché (problème des produits de
substitution des céréales) et le régime prévu pour
les oléagineux.
En outre, la compatibilité de cet arrangement avec la PAC
réformée n'était pas, à son sens, pleinement
garantie.
Un comité spécial agriculture du Conseil Européen,
réuni en mars 1993, a d'ailleurs identifié les nombreuses
conditions de cette compatibilité (accroissement de 12 millions de
tonnes de l'utilisation de céréales communautaires dans
l'alimentation animale, fixation du gel des terres à 15 % pour
l'ensemble de la période, réduction de 2 % des quotas
laitiers, possibilité d'exporter les viandes blanches sans
restitution...). Certaines estimations, plus alarmistes -ou plus
réalistes ?-, faisaient état de la nécessité d'un
doublement du taux de gel des terres en Europe pour rentrer dans le cadre du
pré-accord de Blair House
!
Le document précité de la Commission Européenne
retraçant l'histoire de cette négociation constate laconiquement
: "
Il allait donc falloir continuer à négocier fermement
avec les Etats-Unis, afin d'obtenir toutes les garanties nécessaires
pour qu'un accord final au GATT ne soit pas défavorable à
l'agriculture Européenne
".
Soulignons que la France, et singulièrement son ministre des affaires
étrangères de l'époque, a joué un rôle de
premier plan sur ce dossier difficile.
En septembre 1993, le Conseil " Jumbo " (ministres des affaires
étrangères et de l'agriculture) demandait à la Commission,
sans aller jusqu'à la réouverture du dossier conclu à
Washington, de clarifier certains points avec les Américains en vue de
conclure la négociation agricole du GATT : clause de paix, clause de
sauvegarde, produits de substitution des céréales,
appréciation des engagements en fin de période, agrégation
des produits pour les calculs de baisse des droits, écoulement des
stocks, croissance du marché mondial... En demandant cette
clarification, le
Conseil voulait sauvegarder les grands principes qui sont
à la base de la PAC : sa pérennité, la
préférence communautaire et la nécessité du
maintien de sa vocation exportatrice
.
Finalement, un accord était trouvé sur l'agriculture le
8 décembre 1993, et le cycle de l'Uruguay était conclu
le 15 décembre 1993, après 7 ans de débats
difficiles. La signature de l'Acte final eut lieu le 15 avril à
Marrakech, réunissant 117 pays.
b) Le cadre actuel issu des accords de Marrakech de 1994
Le
soutien interne : une baisse de la " mesure globale de soutien " qui
différencie les types d'aides directes.
Les aides internes à l'agriculture, calculées sous forme de
" mesures globales de soutien ", ont été
diminuées de 20 % par rapport à 1986-1988 :
BAISSE
DE LA MESURE GLOBALE DE SOUTIEN (MGS)
(en millions d'écus)
Source : Commission Européenne
Soulignons que la baisse des prix d'intervention Européens, dans le
cadre de la réforme de 1992, avait déjà fait baisser de
plus de 20 % la mesure globale de soutien communautaire.
Toutefois, certaines aides sont exclues des engagements de
réduction.
Les aides dites de la " boîte verte "
,
considérées comme n'ayant aucun effet sur les échanges ou
la production, en sont totalement exclues.
Il s'agit des aides intervenant dans les domaines suivants :
- recherche,
- lutte contre les parasites et les maladies,
- formation,
- services de vulgarisation et de consultation,
- services d'inspection,
- services de commercialisation et de promotion,
- services d'infrastructure,
- détention de stocks publics à des fins de
sécurité alimentaire,
- aide alimentaire intérieure,
- soutien du revenu découplé (c'est-à-dire
indépendant de la production et des
rendements),
- sécurité des revenus,
- aide en cas de catastrophes naturelles,
- cessation d'activités,
- adaptation des structures agricoles,
- protection de l'environnement,
- aide régionale (zones défavorables).
Les aides de la " boîte bleue "
, liées
à une limitation de la production, sont exclues de l'obligation de
réduction, sous certaines conditions.
Il s'agit en pratique des aides suivantes :
- aides fondées sur une superficie et des rendements fixes,
- aides accordées pour maximum 85 % du niveau de base de la
production,
- aides pour le bétail attribuées pour un nombre de
têtes fixe.
Les aides directes Européennes, mises en place lors de la
réforme de la PAC de 1992, sont incluses dans la boîte bleue
(notamment les paiements compensatoires directs). Elles n'ont donc pas
été touchées par l'obligation de réduction
imposée par le GATT.
En vertu de la " clause de paix ", elles ne pourront être
attaquées devant le GATT pendant neuf ans.
Les aides de la " boîte jaune "
concernent le
soutien par les prix, avec effets sur les échanges. Ce sont les aides
principalement visées par les mesures de réduction.
La diminution des subventions à l'exportation
Suite à l'accord du GATT, les subventions à l'exportation sont
réduites de
21 % en volume et de 36 % en budget
, en
l'espace de six ans. Cette réduction touche 20 catégories de
produits.
La diminution oscille entre 2 % pour le sucre et 38 % pour le tabac
et la viande de volaille :
POURCENTAGE DE DIMINUTION DES SUBVENTIONS À L'EXPORTATION
Source : Commission
Enfin, le troisième volet des accords de Marrakech concerne
l'accès aux marchés pour les produits agricoles.
Les mesures d'accès aux marchés et les
" équivalents tarifaires "
L'un des principes de base du GATT -opposé, on l'a vu, à la mise
en oeuvre Européenne du principe de préférence
communautaire- est de convertir les mesures de protection aux frontières
en droits de douane fixes appelés " équivalents
tarifaires
" (et de réduire ces derniers).
Les " équivalents tarifaires "
En conséquence des accords du GATT, les mesures de protection aux
frontières communautaires, ont été transformées en
droits fixes,
réduits de 36 % en six ans
en moyenne, pour
tous les produits, et d'au moins 15 % pour chaque type de produits, par
rapport à la période 1986-1988, comme indiqué ci-dessous :
RÉDUCTIONS TARIFAIRES EN SIX ANS
Source : National farmers union, cité par la
Commission
Européenne
L'accord du GATT a prévu -on l'a vu- l'intervention d'une
"
clause de sauvegarde
" déclenchant l'imposition, dans
des conditions encadrées, de droits additionnels, en cas de
dépassement du volume des importations par rapport à une moyenne,
ou de chute du prix des importations.
L'accès minimum aux marchés
Dans l'optique d'une plus grande ouverture des marchés, l'accord du GATT
prévoit que chaque pays signataire ouvre des
contingents
d'importation à droit douanier réduit
(32 % du tarif de
base)
aux pays tiers
. Les possibilités d'importation ainsi
offertes seront, pour chaque groupe de produits, de 3 % de la consommation
de la période de base (1986-1988). Ce taux sera porté à
5 % à la fin de la période de mise en oeuvre de six ans.
La " clause de rééquilibrage "
Loin des espérance françaises en la matière, l'accord
final du GATT prévoit une simple
clause de consultation
en cas
d'accroissement des importations communautaires de produits de substitution des
céréales (PSC) par rapport à la moyenne 1990-1992.
L'accord du GATT, en effet, ne prévoit pas d'instrument de limitation
effective des importations de ces produits, car il :
- n'instaure pas de contingentement qui aurait limité les
importations,
- n'introduit pas de définition rigoureuse des PSC,
- ne fixe pas d'obligation de résultat à l'éventuelle
" concertation " Euro-américaine prévue par la
" clause de sauvegarde ".
Ce marathon de négociations agricoles a, on le constate,
profondément influé sur le cadre de l'agriculture
Européenne.
Il importe donc de saisir aujourd'hui l'enjeu que représentent les
négociations multilatérales à venir et de s'y
préparer au mieux.
c) Le cadre des futures négociations de l'OMC
La
perspective de la reprise des négociations d'ici à 2000 est
hypothéquée par les difficultés actuelles du
Président des Etats-Unis à obtenir de la part du
Congrès l'autorisation d'utiliser la procédure de
négociation dite "
fast track
",
qui lui permet de
négocier plus librement à l'OMC, le Congrès ne pouvant par
la suite que ratifier ou rejeter en bloc, dans un délai limité,
l'accord obtenu par le Gouvernement, sans pouvoir y apporter de modification.
Votre mission d'information estime qu'en aucun cas l'Europe ne doit engager
de discussions commerciales internationales si l'administration
américaine n'obtient pas une telle autorisation de la part du
Congrès.
En effet, en l'absence de " fast track ", l'issue des
négociations pourrait être remise en cause -et en particulier les
éventuelles concessions américaines- au moment de sa ratification
par le Congrès, lequel se garderait bien de supprimer les concessions
Européennes.
Certaines personnalités entendues par votre mission d'information ont
estimé qu'en tout état de cause, le président
américain obtiendrait vraisemblablement, dans les tous prochains mois,
une telle autorisation, si elle était sollicitée pour un mandat
plus restrictif que la demande actuelle, pouvoirs exécutif et
législatif étant globalement d'accord en matière agricole.
Malgré les développements les plus récents de
l'actualité, on ne peut donc exclure la perspective d'une reprise rapide
des négociations, même si l'échéance en est
provisoirement repoussée.
Sans préjuger du résultat de ces négociations, qui seront
certainement longues et difficiles, il serait irresponsable de ne pas tenir
compte, à l'heure de la réforme de la politique agricole
Européenne, des éléments du contexte qui se mettent en
place peu à peu et laissent entrevoir les stratégies des
principales parties.
En particulier, votre président et vos rapporteurs ont pu constater,
lors de leur déplacement aux Etats-Unis, dans le cadre de la
préparation du présent rapport, que la récente
réforme de la politique agricole américaine s'inscrivait dans une
démarche offensive pour la conquête des marchés
mondiaux
et affirmait jouer le jeu de la compatibilité avec les
règles de l'OMC.
La stratégie agricole mondiale des Etats-Unis
La loi agricole (ou " Farm
Bill ") votée en 1996 aux
Etats-Unis vise notamment à
augmenter la pénétration
des produits agricoles américains sur les marchés
extérieurs
. Dans ce but, l'administration a prévu une
optimisation des soutiens à l'exportation et l'intégration de
plus en plus d'aides aux agriculteurs dans la " boîte verte "
de l'OMC. Les Etats-Unis ont donc adopté une logique de
compatibilité entre leur politique agricole et les règles
actuelles du commerce international, cherchant à se mettre en situation
de bénéficier du développement annoncé des
marchés mondiaux et de dénoncer à l'OMC les partenaires
qui ne seraient pas, à leur sens, aussi vertueux.
Cette stratégie est un tournant dans la politique agricole
américaine, vieille de plus d'un demi-siècle.
La politique agricole américaine : un soutien actif, né en
1933
Les fondements de la politique agricole américaine remontent aux
années 1930 : dans le cadre de sa politique de relance, ou "
New
Deal
", après la grande dépression le président
Roosevelt fit adopter en 1933 l'"
Agricultural Adjustement
Act
", qui a jeté les bases de l'intervention de l'Etat
fédéral en agriculture, par des mesures de soutien des prix et
des revenus agricoles (aides directes en contre-partie d'une réduction
des emblavements ; prêts de soutien (10 ans) jouant le rôle de prix
de soutien...) ainsi que par des programmes de développement rural et de
conservation des ressources naturelles.
En 1938, puis en 1949, le cadre législatif du soutien
fédéral à l'agriculture fut complété par 2
lois, souvent amendées par la suite, modifiant peu à peu les
formes de l'intervention de l'Etat, comme le détaille l'encadré
ci-après :
SOIXANTE CINQ ANS DE POLITIQUE AGRICOLE AMÉRICAINE
Les fondements
: En 1933, dans le cadre du New Deal est adopté
l'" Agricultural Adjustment Act " qui prévoit des mesures de
soutien des prix et des revenus et de diminution de l'offre :
- les producteurs qui acceptent de réduire leurs emblavements, ou
de conclure des accords de commercialisation avec les transformateurs,
reçoivent
des aides directes
;
- les agriculteurs participant aux programmes de
réduction des
surfaces
cultivées bénéficient de
prêts de
soutien
(loans) qui leur permettent de ne pas commercialiser
immédiatement leurs récoltes. Ces prêts sont " non
exigibles ", ce qui signifie que l'agriculteur peut les rembourser en
abandonnant sa récolte à l'organisme d'intervention,
appelé Commodity Credit Corporation (CCC). Le loan joue donc le
rôle de prix de soutien.
En 1938
: la loi fixe le montant du prix de soutien des principales
cultures. Des quotas de surface et éventuellement des limitations de
quantités commercialisées sont instaurées par
exploitation. Les aides directes sont plafonnées à
10 000 dollars par agriculteur. Un programme
d'assurance-récolte est crée.
En 1949
: la loi introduit un dispositif d'intervention pour les
produits laitiers
.
En 1965
: la politique agricole américaine amorce un tournant
puisque la loi réduit les prix de soutien au niveau des cours mondiaux.
Désormais, l'aide aux revenus agricoles dépend surtout de
l'effort budgétaire (sous forme d'aides directes), beaucoup plus que du
niveau des prix de soutien et des mesures de contrôle de la production.
En 1973
est crée le système de prix d'objectif (target
price) et de
paiements
compensatoires
, appliqué jusqu'en
1995. Le prix d'objectif, différencié par culture, est
sensé assurer une rémunération correcte aux producteurs.
Son calcul est fondé, non sur la notion de parité de revenu
utilisée jusqu'alors, mais sur une estimation des coûts de
production. L'agriculteur qui participe aux programmes des grandes cultures
(blé, céréales, fourragères, riz et coton)
reçoit un paiement compensateur égal à la
différence entre le prix d'objectif et le prix moyen de marché.
En 1985
, dans un contexte de crise agricole (effondrement des cours,
explosion des mesures de soutien direct, hausse des stocks...) sont mis en
place de nouveaux outils qui amorcent un
découplage des aides par
rapport à la production
: la loi autorise les agriculteurs à
recevoir les aides de certains programmes même s'ils ne sèment
aucune culture ; les " marketing loans " sont mis en place pour le
riz et le coton (prêts remboursés sur la base du prix de
marché s'il tombe au-dessous d'un seuil fixé, correspondant
à une subvention indirecte pour la différence entre ce seuil et
le prix du marché) ;
les subventions à l'exportation
(programme " EEP ") sont mises en place.
En 1990
, la loi confirme l'orientation de l'agriculture vers le
marché, avec une diminution des dépenses de soutien et une
meilleure prise en compte de l'environnement. Pour remplir ces objectifs, un
compromis budgétaire introduit dans les programmes de soutien une mesure
dite " triple base " qui réduit de 15 % la surface
primable tout en laissant au producteur une plus grande
flexibilité
d'assolement
. Sur la triple base, non indemnisée, les agriculteurs
peuvent semer les cultures de
leur choix, sans réduire leurs
droits aux aides " céréales " les années
suivantes.
Le découplage des aides est ainsi accentué. Les " marketing
loans " sont étendus aux oléagineux puis aux
céréales (en 1993) ce qui traduit une priorité
accordée à l'exportation.
Le budget agricole américain
a été en moyenne
entre 1991 et 1995 de
360 milliards de francs par an
(58,2
milliards de dollars), dont
60 % consacrés à
" l'aide alimentaire " intérieure
. Les dépenses
plus directement consacrées à l'agriculture se sont
élevées à environ 122 milliards de francs par an
(19,8 milliards de dollars) sur la même période, les aides
directes représentent en moyenne 96 milliards de francs annuels.
LES
DÉPENSES DU MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE
(moyenne 1991-1995, en millions de dollars)
Source :
USDA
En avril 1996
, la nouvelle loi agricole ou " FAIR ACT "
(Federal Agricultural Improvement and Reform Act) marque un tournant dans la
politique agricole américaine, qui résulte notamment des
nouvelles priorités de la majorité républicaine du
Congrès. Elle reflète la volonté d'une maîtrise des
dépenses et d'une simplification des aides, mais aussi de
l'affirmation de la nécessaire compétitivité de
l'agriculture en vue de la conquête des marchés mondiaux et de la
volonté de préparer les futures négociations de l'OMC par
un découplage accru des aides
.
D'après " La nouvelle politique agricole
américaine ", table ronde du 72è Congrès de l'AGPB
à Tours, Juin 1996.
Le tournant de 1996 : une volonté et des outils de conquête
des marchés mondiaux
Le " FAIR Act " de 1996 est résolument tourné vers les
marchés extérieurs. Volonté clairement affichée,
suppression des freins à la production, système de soutien
compatible avec les règles du GATT : la stratégie adoptée
est offensive.
-
une augmentation prévisible des volumes produits :
En ce qui concerne notamment les grandes cultures, le "
FAIR
ACT
" a consacré la
suppression des programmes annuels de
gel des terres
. Même si cette mesure est actuellement sans incidence,
le taux de gel obligatoire étant de 0 % depuis 1992 pour le
blé et depuis 1995 pour le maïs, cette mesure pourrait se
révéler lourde de conséquences en période de stocks
élevés et de récoltes importantes. De plus, a
été décidée une diminution du programme
décennal de conservation des sols, qui devrait avoir une incidence
importante sur la production. Les experts du ministère de l'agriculture
(USDA) et de l'institut de recherche américain FAPRI
30(
*
)
considèrent
qu'environ 3 millions
d'hectares pourraient être remis en culture d'ici l'an 2002,
essentiellement en maïs
. La production de riz devrait diminuer, au
profit du maïs, du soja, de la betterave et du blé.
En outre,
la liberté d'emblavement des agriculteurs américains
est accrue
, afin de leur permettre de réagir rapidement aux signaux
du marché. Signalons que le soja bénéficie
dorénavant en quelque sorte d'une aide indirecte, puisqu'il peut
être ensemencé sur des surfaces aidées au titre des
contrats de transition (voir ci-après).
Au total, d'après les études du FAPRI, l'augmentation de
certaines productions entre la période 1993-1995 et 2004 devrait
être la suivante :
L'AUGMENTATION PRÉVUE D'ICI À 2004 DES VOLUMES PRODUITS
Source : Food and Agricultural Policy Research Institute
-
des aides directes classées dans la " boîte
verte " de l'OMC
Pour les grandes cultures, le "
FAIR Act
" découple le
système d'aide au revenu agricole des quantités produites et des
prix du marché, en transformant les paiements compensatoires
(" deficiency payments ") en
aides forfaitaires
(avec la
fixation d'enveloppes budgétaires annuelles plafonnées).
Les aides directes sont octroyées sur la base de la signature de
contrats dits " de transition ", par exploitation, d'après des
références historiques de surfaces, de rendements et de types de
production. Elles sont dégressives sur les sept années du
programme et déconnectées de l'usage futur des terres agricoles.
Une liberté quasi-totale est rendue à l'agriculteur dans le choix
de ses assolements, même si un lien est établi entre le
bénéfice des programmes de transition et l'obligation de respect
de mesures environnementales.
Ainsi, sur le plan du soutien interne à l'agriculture, les aides
américaines sont passées dans la " boîte verte "
du GATT. Cette situation risque de se traduire par une position plus dure lors
des futures négociations multilatérales, vis-à-vis des
pays qui ne sont pas dans ce cas de figure.
L'arbre ne doit pas cacher la forêt : la " vertu "
réelle de la politique agricole américaine doit être
mesurée, aussi, au vu de l'importance des montants financiers
consacrés à l'aide alimentaire intérieure, au-delà
des aides directes aux producteurs.
-
une optimisation des programmes de soutien à
l'exportation
Si le "
FAIR Act
" a diminué le montant global des
aides à l'agriculture, il a maintenu intacte l'enveloppe des programmes
de promotion des exportations, qui reste élevée. Ces outils sont
toutefois aménagés en vue d'un développement des
marchés et de l'expansion de produits à plus forte valeur
ajoutée.
Le dispositif de soutien fait intervenir plusieurs programmes :
*
pour la promotion des exportations
, le " Market access
programm " prévoit le remboursement des frais de promotion à
l'étranger ; le " Cooperator programm " permet de financer les
opérations de promotion visant la recherche de nouveaux marchés
(pays en voie de développement) ;
*
pour les aides à l'exportation,
dans le secteur
végétal, le programme " Export Enhancement programme ",
(EEP) voit sa dotation augmentée les années à venir, dans
le secteur laitier, un programme similaire existe, doté jusqu'en 2002 au
niveau maximal compatible avec les accords du GATT.
*
pour les garanties de crédit à l'exportation,
la
politique d'aide américaine se réoriente vers ce type de soutien
indirect puisque les programmes concernés sont dotés de
5,5 milliards de dollars par an jusqu'en 2002.
Ils pourront
désormais s'appliquer aux produits à haute valeur ajoutée,
traditionnel point fort du commerce extérieur Européen.
*
pour le développement des exportations vers les pays
émergents,
un programme pour les pays émergents,
(" Emerging markets programm "), est doté d'une enveloppe de
1 milliard de dollars de prêts et de crédits garantis sur
1996-2002 et de 10 millions de dollars par an d'assistance technique. Il
est conçu à l'origine pour les anciennes républiques
soviétiques. Quatre pays en bénéficient
particulièrement actuellement : la Russie, l'Ukraine, l'Egypte
(où les exportations ont été multipliées par 2,5
entre 1994 et 1996) et l'Afrique du Sud. Ce programme est
particulièrement bien ciblé stratégiquement, et constitue
en quelque sorte un " vivier " de pays à fort potentiel
d'importations. Il est piloté par un comité de 16 personnes de
haut niveau (industriels, banquiers, consultants et anciens fonctionnaires
internationaux).
-
une volonté de conquête clairement
affichée
La politique actuelle de soutien revenu agricole américain vise à
remplacer de plus en plus l'aide interne par l'accroissement de la production
et l'ouverture des débouchés extérieurs.
La nécessité de raffermir la vocation exportatrice des Etats-Unis
a d'ailleurs été le principal point d'accord entre le
Congrès et le Président au moment de l'adoption du " Farm
bill " de 1996.
Alors que les Etats-Unis réalisent déjà près du
quart du commerce mondial, l'objectif du Ministère de l'Agriculture
Américain est d'augmenter les exportations agricoles de cinquante pour
cent entre 1994 et l'an 2000, soit de les porter à soixante-cinq
milliards de dollars. Pour l'année fiscale 1995, les exportations
agricoles s'élevaient déjà à 53 milliards de
dollars, et en 1996 à 59,8 milliards de dollars.
Au-delà de cette stratégie américaine expansionniste,
plusieurs éléments laissent présager des
difficultés pour les négociations à venir.
Des perspectives inquiétantes
La détermination réaffirmée des pays du groupe de
Cairns
Les représentants agricoles de ce groupe de pays ont récemment
fait part, lors d'une réunion à Sydney en avril dernier, de leurs
revendications pour les négociations multilatérales à
venir dans le cadre de l'OMC :
- interdiction totale des subventions à l'exportation pour les
produits agricoles ;
- réduction du niveau de soutien interne autorisé par l'OMC ;
- réduction des quotas et des tarifs douaniers ;
- élimination des barrières sanitaires
"
scientifiquement non justifiées
" ;
- non-utilisation des réglementations environnementales et sociales
comme barrières commerciales ;
- application des règles de l'OMC aux programmes d'aide
alimentaire, de promotion et de crédits à l'exportation, pouvant
être des subventions déguisées.
La politique agricole Européenne est sans nul doute l'une des cibles
privilégiées de ce groupe d'Etats.
L'offensive prévisible des Etats-Unis
Le secrétaire américain à l'agriculture, M. Dan Glickman,
a récemment énuméré, lors d'une audition publique
devant une commission de la chambre des représentants américaine,
les sujets qu'il souhaitait voir abordés, lors du futur cycle de
négociations multilatérales à l'OMC :
- réduction accrue des tarifs à l'importation ;
- " élimination effective " des quotas tarifaires
d'importation (par une baisse des droits sur les produits commercialisés
au-delà de limites quantitatives) ;
- baisse, voir élimination, des subventions à l'exportation ;
- discipline plus stricte pour les entreprises commerciales d'Etat ;
- définition plus claire des mesures sanitaires et phytosanitaires
(hormones, matériaux à risque, organismes
génétiquement modifiés...).
Les Etats-Unis entendent peser de tout leur poids pour une reprise rapide des
négociations multilatérales et, en particulier, pour la
révision de l'accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires,
prévue par les accords de Marrakech.
Un dialogue multilatéral déjà difficile
L'institutionnalisation de l'organisation mondiale du commerce (OMC), à
la suite des accords de Marrakech, s'est accompagnée de la mise en place
d'un organe permanent de règlement des différents (ORD), qui
émane du conseil général de l'OMC et formalise les
procédures de conciliation, d'arbitrage et de règlements des
litiges (les fameux " panels ") de l'ancien GATT.
Force est de constater, plus de trois ans après la mise en place de
l'OMC, que c'est
l'Europe qui figure le plus souvent au banc des
accusés
, puisque l'Union Européenne est concernée par
plus d'une plainte sur cinq.
LES
PLAINTES DÉPOSÉES A L'OMC
ETATS CONTRE LESQUELS SONT DÉPOSÉES LES PLAINTES
ETATS A L'ORIGINE DES PLAINTES
L'agriculture Européenne est souvent visée :
après le contentieux relatif au régime communautaire
d'importation de bananes, le comité d'arbitrage de l'OMC a
examiné, on l'a vu, la décision communautaire de ne pas autoriser
l'importation de viandes anabolisées.
La réforme de la PAC est donc indissociable du contexte commercial
international. Pour qu'elle soit pérenne, il est vital de relever le
défi de sa compatibilité avec les règles du commerce
international.
Mais le dialogue commercial multilatéral (et transatlantique) n'est pas
le seul facteur de la mutation actuelle du contexte international de la PAC,
même s'il en constitue un puissant levier.
2. La sécurité alimentaire à l'échelle mondiale pour les décennies à venir
Le contexte international des prochaines années, dans lequel devra s'inscrire la politique agricole Européenne, devrait être marqué, d'après les projections de diverses organisations internationales compétentes en la matière, par une baisse de l'index de sécurité alimentaire de certaines régions du monde, qui connaîtraient une forte expansion démographique.
a) Un fort accroissement démographique des pays du Sud
Les
projections démographiques à moyen terme, réalisées
par des organisations telles que la FAO (Food and Agriculture Organisation,
rattachée à l'organisation des nations unies), laissent
prévoir, d'ici un demi-siècle,
un doublement de la population
mondiale
. Les " vieux " pays industrialisés ne seraient
que peu concernés par cette évolution, puisque la très
grande majorité des habitants supplémentaires proviendraient
d'Asie et d'Afrique.
Avec des hypothèses moyennes de date de déclenchement, dans
ces pays, de la " transition démographique ", et de rythme de
la baisse corrélative à venir de la fécondité, les
projections des Nations Unies prévoient que l'augmentation de la
population des pays en développement serait de 95 % entre 1995 et
2050 -sous réserve du caractère aléatoire de
prévisions démographiques à échéance de cinq
décennies-.
Les études de la Banque Mondiale donnent les chiffres suivants d'ici
à 2030 :
L'ACCROISSEMENT DE LA POPULATION MONDIALE
(en millions d'habitants)
D'après : Banque Mondiale
b) Une augmentation plus forte des besoins nutritionnels
D'après les études élaborées pour
le
sommet mondial de l'Alimentation, organisé par la FAO en 1996,
l'augmentation des besoins nutritionnels
connaîtrait un rythme
encore plus rapide que l'accroissement démographique, notamment en
raison du vieillissement de la structure par âge de ces populations,
lié à la transition démographique, l'énergie
alimentaire moyenne nécessaire à un adulte étant
supérieure à celle nécessaire à un enfant.
En conséquence, il est prévu que les
besoins en énergie
d'origine végétale tripleront dans le demi-siècle à
venir
: ils seront doublés en Amérique latine mais
quintuplés en Afrique.
L'ACCROISSEMENT DES BESOINS EN PROTÉINES
VÉGÉTALES
D'ICI A 2050 (en %)
Source : Document d'information technique du sommet mondial
de
l'alimentation, FAO, 1996
Or, les différentes régions du monde ne disposent pas des
mêmes atouts naturels pour répondre à cette demande
accrue.
c) Des ressources naturelles limitées
Le
sol
D'après la FAO, de toutes les terres du Monde,
11 % seulement
sont naturellement cultivables
. Le reste est trop sec (pour 28 %),
trop humide (10 %), trop superficiel (22 %), gelé en
permanence (6 %), ou affecté par des problèmes chimiques
(23 %).
Les zones du Sud à forte croissance démographique
sont
assez touchées, bien que diversement, par cette limitation du potentiel
cultivable liéé aux contraintes géographiques et
géologiques :
SOL
CULTIVABLE DANS LES PAYS DU SUD
(EN %)
* sol
pentu, sableux, superficiel, pierreux, sec, à problèmes chimiques
Source : FAO
L'eau
La disponibilité en eau pure est le facteur de limitation le plus
important à la mise en culture dans ces régions du monde.
Si 1,4 milliard de km
3
d'eau circulent à travers le
cycle hydrologique de la planète, seul un dix millième en est
disponible et d'accès facile. Les deux tiers en sont utilisés
pour l'agriculture.
Mais cette ressource est extrêmement
concentrée géographiquement
: si on compte en Suède
100 habitants par million de mètres cubes d'eau, on en compte 350 en
Inde et 4000 en Arabie Saoudite et en Israël.
La pression démographique dans les pays du Sud est susceptible de faire
encore reculer le volume d'eau offert par habitant.
La FAO estime que le volume d'eau par habitant aura diminué, entre 1950
et 2000, de moitié en Amérique du Nord et dans les trois quarts
de l'Afrique. Dans 20 pays d'Afrique et au Proche-Orient, plus de 230 millions
de personnes sont actuellement en dessous du seuil de pénurie hydrique,
défini à 1000 m
3
par personne et par an. Le nombre de
pays concernés par ce phénomène devrait passer à 29
en 2000 et à 38 en 2025
Cette donne future impose, en premier lieu, de la part des pays
industrialisés, de développer une coopération active
visant à structurer l'agriculture de ces pays pour lui permettre de
répondre à l'augmentation des besoins.
Elle impose, aussi, de réfléchir à la
nécessité d'une nouvelle " révolution verte "
pour nourrir la planète.
d) Vers une nouvelle révolution verte ?
L'augmentation des rendements depuis 50 ans
La problématique de l'accroissement de la population mondiale et des
besoins nutritionnels n'est pas nouvelle pour l'agriculture, qui a,
jusqu'à présent, répondu aux sollicitations qui lui
étaient adressées.
Depuis la deuxième guerre mondiale, une augmentation considérable
des rendements et de la productivité agricole, ou
"
révolution verte
", a ainsi permis d'assurer la
sécurité alimentaire de la planète.
Sous le triple effet de la
sélection des variétés,
de la
mécanisation
et de l'utilisation des
produits
phytosanitaires,
les rendements agricoles se sont spectaculairement accrus.
Ainsi, en France, le rendement moyen du maïs est passé de
12,5 quintaux à l'hectare en 1950 à 84 quintaux en
1996, soit une multiplication par 7 qui a permis d'atteindre les meilleurs
rendements du monde. L'augmentation des rendements moyens est presque aussi
spectaculaire pour le blé, dont on ne récoltait avant la
révolution verte que 20 quintaux à l'hectare -soit à
peu près autant qu'au moyen-âge-, alors que le rendement actuel
atteint, dans certaines zones, 130 quintaux à l'hectare, pour une
moyenne avoisinant les 70 quintaux.
Comme le rappelle l'excellent rapport précité de notre
collègue Jean Bizet sur les organismes génétiquement
modifiés,
les progrès de la génétique
,
permettant la sélection des
variétés, auraient
été à l'origine de la
moitié des grains de
productivité
réalisés pendant la
" révolution verte ".
A cet égard, les évolutions récentes en matière de
génie génétique, retracées dans le rapport
d'information précité, laissent entrevoir les prémices
d'une nouvelle révolution agricole.
Une nouvelle révolution verte en marche ?
Les évolutions de ces dernières décennies ne se sont pas
faites sans dommage : les progrès agronomiques, importants,
réalisés, ont entraîné une augmentation de
l'utilisation des engrais -multipliée par 3,6 en 20 ans- et des
produits phytosanitaires -multipliée par 4,2-. Cette logique ne peut
impunément être menée à terme.
La " révolution génétique " dont on ressent
déjà les prémices, au travers de l'adaptation de plus en
plus rapide des biotechnologies par de nombreuses puissances agricoles telles
que les Etats-Unis, le Canada, l'Argentine, le Brésil, la Chine ou
l'Australie, pourrait être à l'origine d'une
nouvelle
révolution verte,
d'une ampleur considérable, donnant un
nouveau souffle à l'augmentation des rendements et s'insérant
dans une logique de développement durable, moins consommatrice
d'intrants agricoles, même si la compatibilité de ces nouvelles
technologies avec l'indispensable respect de l'environnement doit être
assurée, de même que l'acceptation par le consommateur de cette
technique.
Certains Etats s'engagent, en effet, résolument dans l'ère des
cultures transgéniques, ainsi que le détaille l'encadré
suivant, tiré du rapport précité de notre collègue
Jean Bizet :
GÉOPOLITIQUE MONDIALE DES BIOTECHNOLOGIES
- l'Amérique du Nord dispose d'une avance certaine
en
matière de biotechnologie ;
- la sphère Pacifique semble s'engager dans cette voie (notamment
le Japon et l'Australie) ;
- d'autres Etats émergents se sont résolument investis dans
ce secteur : ainsi l'Amérique du Sud et la Chine ;
- au sein des pays Européens, des différences sensibles
apparaissent dans la politique des différents Etats, des refus
autrichien et luxembourgeois à la mobilisation des pouvoirs publics
allemands.
QUELQUES CHIFFRES ÉLOQUENTS :
SURFACES DE CULTURES TRANSGÉNIQUES PAR PAYS EN 1997
TAUX DE CROISSANCE DES SURFACES TRANSGÉNIQUES ENTRE 1996 ET 1997
(en %)
Source : rapport de M. Jean Bizet
précité.
Ainsi, un récent rapport de la Banque mondiale
31(
*
)
, consacré à la contribution que les
biotechnologies pourraient apporter à la résolution du
problème de la sécurité alimentaire mondiale, constatait
que les techniques modernes de transgénèse sont un outil puissant
pour améliorer l'agronomie, la lutte contre les pathologies, la
physiologie des plantes et le rendement des cultures.
La Banque mondiale soulignait en outre que les biotechnologies sont
" hautement compatibles " avec le but d'une agriculture durable, en
raison de leur précision " chirurgicale " dans la lutte contre
certains problèmes spécifiques, sans interférer sur les
autres composantes du système agricole (contrairement aux herbicides et
aux pesticides).
Les applications en vue de ces méthodes génétiques sont en
effet, comme le détaille le rapport précité de notre
collègue Jean Bizet, édifiantes : lutte contre les maladies,
les ravageurs, adaptation des cultures aux conditions climatiques
extrêmes, à la sécheresse, au froid, à la
salinité des sols...
La " révolution génétique " en marche
pourrait contribuer à enclencher une nouvelle révolution verte
qui permette à l'agriculture d'accroître la quantité et la
qualité de ses productions et de répondre aux besoins
alimentaires du siècle à venir.
3. Les perspectives d'avenir des marchés agricoles mondiaux
Malgré la difficulté et l'incertitude
fondamentale qui
s'attachent à ce type d'exercice, qui repose sur des hypothèses
de travail dont la réalisation n'est pas assurée, des
perspectives de moyen terme pour l'évolution des marchés
agricoles mondiaux ont été dressées récemment, que
ce soit par la Commission Européenne
32(
*
)
, dans l'optique de la révision de la PAC, ou
par l'organisation de coopération et de développement
économique (OCDE) qui a, à l'occasion de la réunion au
niveau ministériel du comité de l'agriculture les 5 et 6 mars
dernier à Paris, rendu publiques ses prévisions en la
matière
33(
*
)
.
Ces études concluent globalement à un accroissement futur des
marchés agricoles mondiaux, cohérent avec la globalisation de
l'économie et les perspectives démographiques
évoquées ci-dessus.
a) Les prévisions de la Commission Européenne : des tendances favorables pour les marchés mondiaux.
Effectuant sa propre analyse, ainsi que la synthèse de
différents travaux internationaux, (FAO, Administration
américaine (USDA, FAPRI), Banque mondiale, OCDE), la Commission
prévoyait, en 1997, des perspectives favorables pour les marchés
mondiaux.
La Commission rappelle
34(
*
)
que :
- l'accroissement prévisible de la demande de produits alimentaires
(résultant de l'accroissement démographique mais
surtout de la
croissance économique
), dans les pays en développement,
combiné à des possibilités limitées d'accroissement
proportionnel des productions intérieures de ces pays, a
créé une vague d'optimisme pour les pays exportateurs ;
- certaines organisations internationales mettent en doute la
capacité de l'agriculture mondiale à répondre à ces
besoins croissants. L'augmentation la plus forte de la demande solvable
proviendrait de la sphère Pacifique ;
- les prix des produits agricoles devraient donc être tirés
à la hausse.
La Commission relève l'existence d'un large consensus quant à la
prévision d'une expansion du commerce agricole mondial plus importante
entre 1995 et 2005 que pendant les années 1980 et 1990. C'est le
commerce des
céréales
qui devrait croître le plus.
En
Asie
, (et en Chine surtout), en Afrique du Nord et au Moyen-Orient,
l'élévation des niveaux de vie conduisent à la
diversification des régimes alimentaires et à l'accroissement
de la consommation de viande
, dont profite le secteur de l'alimentation
animale. Les importations de blé vers ces zones devraient augmenter
fortement (un doublement de la demande chinoise est, par exemple,
envisagé).
Les marchés du
soja et de ses dérivés
profiteraient
d'une forte expansion, également liée à l'accroissement
des besoins pour la nutrition animale. La consommation de
viande de
boeuf
devrait croître dans les régions émergentes, de
même que pour la
viande de porc
.
Le commerce international de la
viande de volailles
devrait être
multiplié par 10, pour répondre aux demandes d'importation de la
Chine, du Japon, du Moyen-Orient, du Mexique et de l'ex-Union
Soviétique. Seule la demande de
lait écrémé en
poudre
ne subirait pas de tendance à la hausse.
b) L'optimisme de l'OCDE pour les 5 ans à venir
Les
prévisions de l'OCDE sont proches de celles de la Commission. La
croissance prévue de la demande, tirée par celle des revenus,
stimulerait les échanges mondiaux et soutiendrait les prix agricoles.
La
croissance des exportations des pays de l'OCDE
35(
*
)
, entre aujourd'hui et 2003, devrait être la
suivante :
LA
HAUSSE PRÉVUE DES EXPORTATIONS AGRICOLES
DE L'OCDE D'ICI A 2003
Source : Secrétariat de l'OCDE, 1998
Par secteur, les prévisions de cette organisation sont les suivantes :
-
pour les céréales
L'OCDE prévoit
une augmentation de la consommation et de la
production
de céréales, faisant progresser les
échanges internationaux de 27 % pour le blé et 63 %
pour les céréales secondaires d'ici à 2003/2004, surtout
au bénéfice de l'Union Européenne et des Etats-Unis. Les
importations de céréales augmenteraient surtout en Asie, au
Moyen-Orient et en Amérique latine. Après un record à la
hausse en 1995/1996, puis 2 années de recul, les prix mondiaux des
céréales augmenteraient pour atteindre 190 dollars la tonne pour
le blé et 135 dollars pour le maïs.
Le détail de ces prévisions est reproduit ci-après :
PRÉVISIONS MONDIALES POUR LE BLÉ
(en
dollars)
PRÉVISIONS MONDIALES POUR LES CÉRÉALES
SECONDAIRES
(en dollars)
Source : Secrétariat de l'OCDE
-
pour les oléagineux
L'OCDE prévoit une augmentation moyenne annuelle de 3 % sur la
période, de la production et de la consommation d'oléagineux La
demande d'importation
progresserait vigoureusement à la suite du
développement de l'élevage en Asie. Les prix baisseraient, avant
de retrouver les niveaux élevés récemment atteints : en
2003, le prix mondial des tourteaux de soja serait de 260 dollars la tonne.
PRÉVISIONS POUR LES GRAINES OLÉAGINEUSES
(en
dollars)
PRÉVISIONS POUR LES TOURTEAUX D'OLÉAGINEUX
(en dollars)
Source : Secrétariat de l'OCDE
-
pour la viande
Les exportations des pays de l'OCDE devraient progresser de 2 % par an. Le
prix de la viande bovine devrait se raffermir à moyen terme, celui de la
viande porcine étant prévu à la baisse.
PRÉVISION D'EXPORTATIONS DE VIANDE DANS LA ZONE
OCDE
(en dollars)
Source : Secrétariat de l'OCDE
-
pour les produits laitiers
Dans ce secteur, où de nombreuses productions sont limitées par
des quotas (dans l'Union Européenne, mais aussi au Canada, en Suisse, en
Norvège, en Hongrie...) l'OCDE prévoit une augmentation de la
production dans les pays n'appliquant pas de quotas.
Les prix mondiaux devraient se maintenir, les exportations augmentant, sauf
pour le lait écrémé en poudre.
L'Inde, la Chine et le Pakistan devraient le plus accroître leur
production laitière. La croissance de la demande asiatique
bénéficierait surtout à l'Australie et à la
Nouvelle-Zélande, pays exportateurs notamment vers la Corée et la
Malaisie.
*
* *
Le contexte Européen et international de l'agriculture est donc en mutation rapide. Face à des défis à relever, à des dangers à éviter, à des chances à exploiter, la PAC doit répondre aux mutations de son environnement. C'est en juillet dernier que la Commission Européenne a fait part de son analyse et de ses propositions en la matière.
DEUXIÈME PARTIE -
PROJET ET
RÉACTIONS
I. VERS UN NOUVEAU CADRE COMMUNAUTAIRE ?
L'" Agenda 2000 " présenté par la
Commission Européenne en juillet 1997 s'efforce de définir une
approche globale pour préparer l'Union à son élargissement.
La réforme de la PAC est conçue comme un élément de
cet ensemble,
qui comprend également une réforme des fonds
structurels et une révision des perspectives financières -la
question de la réforme des institutions restant pendante, quant à
elle, compte tenu des décisions du Conseil Européen d'Amsterdam-.
La démarche de la Commission ne doit donc pas être comprise
seulement par référence à l'état et aux
perspectives des marchés agricoles, et en fonction des
négociations commerciales internationales à venir : ces facteurs
sont certes essentiels, mais ils ne sont pas les seuls, ce qui distingue la
nouvelle réforme de celle de 1992. Pour la première fois dans
l'histoire de la politique agricole commune, on est en présence d'une
tentative de réforme " à froid " : la ligne directrice
agricole laisse une marge importante, et la Communauté n'a pas à
gérer d'importants excédents par de coûteuses
opérations de stockage ou d'exportations subventionnées.
Il
s'agit de prévenir les difficultés plus que de les
résoudre
.
Les objectifs poursuivis par la Commission sont donc de moyen
terme
: empêcher la réapparition d'excédents non
exportables, rendre la PAC plus facile à défendre dans les
futures négociations de l'OMC, la concilier avec le processus
d'élargissement à l'Est, garantir durablement son financement,
enfin désarmer l'hostilité de certaines fractions des opinions
publiques, notamment en mettant l'accent sur l'effort de développement
rural. Autant d'objectifs louables, que bien peu contesteraient. Mais les
moyens retenus sont-ils vraiment de nature à les atteindre ?
Ces moyens, déjà esquissés dans " Agenda 2000 ",
ont été présentés en mars 1998 sous la forme d'un
ensemble de propositions d'actes communautaires (document COM (98) 158
final).
A. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
1. Dans les différentes productions
a) Le secteur des grandes cultures
La
Commission Européenne, tout en soulignant la situation actuellement
satisfaisante de ce secteur
-avec des stocks d'intervention à un
niveau très bas, une vive progression de la demande intérieure,
et une forte baisse des restitutions à l'exportation- estime probable la
reconstitution à moyen terme de stocks d'intervention très
élevés, compte tenu des limites fixées aux subventions
à l'exportation par les accords du GATT, et relève la
complexité du système d'aides ainsi que sa mauvaise perception
dans l'opinion publique.
S'inscrivant dans la logique de la réforme de 1992, la Commission
propose donc une baisse de 20 % (de 119,19 à 95,35 écus/tonne) du
prix d'intervention des céréales. Cette nouvelle baisse
interviendrait en une seule étape, au 1er juillet 2000 ; elle
s'accompagnerait d'une suppression des majorations mensuelles.
Elle serait compensée à 50 % par une augmentation de l'aide
directe, qui passerait de 54,34 à 66 écus/tonne.
Le système de calcul des aides directes, transformant l'aide à la
tonne en aide à l'hectare par application d'un coefficient de rendement
régional, dans la limite de surfaces de base définies par des
références historiques, est maintenu sous réserve de la
suppression de deux facultés offertes jusqu'à présent aux
Etats : celle de recourir au système de la superficie de base
individuelle (aucun ne l'avait fait), et celle d'établir des superficies
de base spécifiques pour le maïs ; en revanche, les Etats peuvent
désormais prévoir, dans leurs plans de régionalisation, un
coefficient de rendement particulier pour les cultures irriguées, dans
la limite de surfaces de base spécifiques définies par des
références historiques.
Les aides directes ainsi définies s'appliqueraient de la même
manière aux céréales, aux graines oléagineuses, aux
graines de lin non textile et à la mise en jachère volontaire.
Les céréales à ensiler continueraient également
à bénéficier des aides directes, contrairement à ce
qu'avait initialement prévu la Commission en juillet 1997.
Ce schéma général est complété par des
mesures particulières :
- l'aide directe accordée au titre des cultures de protéagineux
serait fixée à 72,5 écus/tonne, dans le but de
préserver leur rentabilité par rapport aux autres cultures
arables ;
- les aides supplémentaires accordées aux producteurs de
blé dur seraient maintenues à leur niveau actuel
(344,5 écus par hectare pour les zones de production
traditionnelles ; 138,9 écus par hectare pour les zones non
traditionnelles) ;
- le prix minimum des pommes de terre destinées à la
féculerie serait abaissé de 20 % (de 209,78 à
167,82 écus/tonne), cette diminution étant compensée
pour moitié par une augmentation de l'aide directe, qui passe de 86,94
à 105,6 écus/tonne.
La Commission Européenne propose également une refonte des
dispositions applicables au gel des terres.
L'instrument de la jachère obligatoire subsisterait juridiquement, mais
son taux normal serait désormais de 0 % ; les petits producteurs
resteraient exemptés de gel obligatoire des terres si ce taux
était relevé (la définition du petit producteur
étant inchangée, à savoir le producteur sollicitant des
aides directes pour une superficie n'excédant pas celle
nécessaire, compte tenu du rendement régional, pour produire 92
tonnes de céréales).
La jachère volontaire (pour une durée pouvant aller
jusqu'à cinq ans) serait maintenue ; chaque Etat pourrait fixer une
limite supérieure par exploitation à la superficie pouvant
être gelée, la limite inférieure étant fixée
en tout état de cause à 10 % de la surface arable. Les
dispositions en vigueur concernant les cultures non alimentaires sur les terres
gelées subsisteraient " sous réserve que des systèmes
de contrôle efficaces soient appliqués " ; il en est de
même des dispositions concernant les aides nationales pour les cultures
pluriannuelles destinées à la production de biomasse sur les
terres en jachère.
Le régime des pénalités serait également
aménagé. Les sanctions financières, en cas de
dépassement de la limite résultant du mécanisme de la
superficie de base régionale seraient maintenues sous la forme d'une
diminution des paiements lors de la campagne suivante, proportionnellement au
dépassement constaté ; en revanche, le " gel
extraordinaire " serait supprimé.
b) Le secteur de la viande bovine
La
Commission Européenne souligne que la réduction du prix
d'intervention des céréales doit s'accompagner d'une baisse
analogue des prix garantis de la viande bovine,
sauf à donner une
compétitivité accrue à la viande blanche, ce qui serait
particulièrement mal venu alors que les statistiques de vente
suggèrent déjà une tendance spontanée de longue
durée à la diminution de la consommation de viande bovine,
indépendamment de la chute provoquée, un temps, par
l'épidémie d'ESB (entre 1992 et 1996, la consommation de viande
bovine aurait ainsi diminué en Europe de 3 kg par habitant et par an).
Une baisse importante des prix garantis permettrait, selon la Commission, de
faire regagner du terrain à la viande bovine auprès des
consommateurs Européens, et de pouvoir exporter sans restitution une
partie de la production, évitant à celle-ci de buter sur les
contraintes de l'OMC. A l'inverse, le maintien des prix conduirait à
l'accumulation d'excédents de plus en plus difficilement exportables.
La Commission propose donc une baisse des prix garantis de 30 % en trois
étapes (2000, 2001, 2002), compensée au fur et à mesure
par une revalorisation des aides directes.
Cette revalorisation prendrait deux aspects :
- tout d'abord, une augmentation des primes spéciales aux bovins
mâles (PSBM) et de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes
(PMTVA). La prime aux jeunes bovins mâles passerait de 135 à 220
écus par tête (+ 63 %) ; la prime aux gros bovins passerait, quant
à elle, de 108,7 à 170 écus par tête (+ 56 %),
tandis que la PMTVA passerait de 144,9 à 180 écus par
tête (+ 24%) ;
- ensuite, l'octroi d'aides complémentaires financées par la
Communauté, mais gérées par les Etats membres, en fonction
de leurs propres priorités, dans le cadre de règles communes. La
détermination des enveloppes nationales s'effectuerait en fonction de la
part de chaque Etat membre dans la production. Les aides devraient être
accordées par animal ou par hectare de pâturage permanent, ces
deux critères pouvant être combinés.
La Commission souligne que, au total,
" si l'on tient compte des
ressources fournies par les primes de base et les aides supplémentaires,
le niveau des primes qui pourraient être versées aux producteurs
serait le suivant : 310 écus par tête (+ 130 %) pour les
taureaux, versés en une fois, 232 écus (+ 113 %) pour les
boeufs, versés en deux fois, 215 écus par tête (+ 48
%) et par année pour les vaches allaitantes et 70 écus par
tête (nouvelle prime) et par année pour les vaches
laitières, afin de tenir compte de l'incidence de la réduction
des prix de soutien de la viande bovine sur la valeur des vaches
laitières "
. Le montant exact des primes effectivement
perçues par les producteurs dépendrait toutefois des
décisions des Etats membres sur l'utilisation des enveloppes
financières accordées dans le cadre des aides
supplémentaires.
Les droits à prime resteraient enfermés dans des plafonds. Le
nombre maximal de primes, pour les bovins mâles, demeurerait
limité à 90 par exploitation ; les plafonds régionaux
de droits à la prime pour les bovins mâles resteraient
fixés au niveau atteint pour la campagne 1997-98 ; des plafonds
nationaux seraient par ailleurs introduits pour les droits à la PMTVA
(la référence étant au choix le niveau de 1995 ou de 1996,
majoré de 3 %). En outre, le plafond de 2 unités de gros
bétail (UGB) par hectare pour l'éligibilité aux primes
serait maintenu.
La prime à l'extensification pour les exploitations dont la
densité est inférieure à 1,4 UGB/ha serait sensiblement
relevée (de 36 à 100 écus/tête). Le régime
d'aide à la " transformation " des veaux (" prime
Hérode ") serait supprimé.
Compte tenu de ces éléments,
les achats publics seraient
supprimés
à compter du 1er juillet 2002, pour être
remplacés par un régime d'aide au stockage privé qui
serait déclenché lorsque les prix descendraient à 103 % du
prix de base.
c) Le secteur laitier
La
Commission pronostique une diminution de la demande de lait d'environ 3 % d'ici
à 2005, en raison notamment de la réduction de la consommation de
beurre et d'une moindre utilisation de produits laitiers pour l'alimentation
des animaux. L'excédent de la production sur la consommation se
situerait alors autour de 9 millions de tonnes en équivalent lait entier.
Compte tenu des contraintes pesant sur les productions laitières du fait
des accords du GATT, des stocks d'intervention importants de lait
écrémé en poudre pourraient se constituer. Le
développement des exportations de fromages se heurterait aux limites
fixées pour les restitutions ; dans le cas du beurre, la marge
laissée par les accords du GATT permettrait en principe d'écouler
les excédents par des exportations subventionnées, mais à
la condition que des débouchés suffisants puissent être
trouvés, ce qui ne serait nullement acquis.
Ainsi, la Commission considère
que, sans justifier des mesures
radicales (suppression des quotas et forte baisse des prix garantis),
les
perspectives du secteur laitier ne permettent pas de s'en tenir au statu
quo.
Ecartant un système de " doubles quotas " -selon elle
probablement incompatible avec les règles de l'OMC, et par ailleurs
difficile à gérer-
elle suggère une réforme
comptant quatre volets
: le maintien du système des quotas laitiers
jusqu'en 2006 ; une augmentation progressive, qui atteindra finalement
2 %, de la quantité globale de référence ; une baisse
progressive des prix de soutien ; une réforme et un relèvement
des aides directes.
La baisse des prix finalement proposée est plus forte que celle
envisagée dans l'" Agenda 2000 " (10 %). Elle serait de
15 % pour les prix d'intervention de la poudre de lait
écrémé et du beurre (qui passeraient respectivement
à 174,69 et à 278,97 écus/100 kg) et de 17 %
pour le prix indicatif du lait (qui passerait à
25,72 écus/100 kg). La Commission souligne que le maintien des
aides pour la culture des céréales à ensiler ainsi que
l'augmentation des quotas disponibles -mesures qui n'étaient pas
prévues dans l'" Agenda 2000 "- permettent d'envisager une
baisse plus importante, dont l'impact sur la compétitivité serait
plus que proportionnel (une baisse de 15 % serait deux fois plus efficace
qu'une baisse de 10 %, en permettant notamment d'exporter sans
restitutions la plupart des productions Européennes de fromages).
L'augmentation des quotas s'effectuerait en quatre campagnes, de 2001 à
2004 ; pour la France, l'augmentation (2,3 %) serait
légèrement supérieure à la moyenne, portant la
quantité nationale de référence à
24 297 594 tonnes en 2004. La moitié de l'augmentation
serait affectée aux exploitations situées dans des zones de
montagne (sans possibilité de transfert au cours des deux
premières années) ; l'autre moitié irait en
priorité aux jeunes agriculteurs souhaitant commencer ou
développer une production laitière.
La prime à la vache laitière que la Commission prévoit
d'instaurer comprendrait plusieurs éléments :
- une prime de base au titre de la production laitière. Le nombre
d'unités de prime, pour chaque producteur, serait défini en
divisant le quota laitier de l'exploitation par le rendement moyen
communautaire (5,8 tonnes par an) ; cette prime passerait de
25 écus en 2000 à 50 écus en 2001,
75 écus en 2002 et 100 écus en 2003 ;
- une prime complémentaire de base au titre de la production de viande,
calculée en fonction des rendements nationaux (pour la France, le
montant supplémentaire par unité de prime serait de
12,1 écus en 2000, 23,1 écus en 2001, et
35,2 écus à partir de 2002) ;
- une aide octroyée par les Etats membres, qui recevraient à cet
effet des dotations déterminées en fonction de la quantité
nationale de référence pour la production laitière. Cette
aide pourrait prendre la forme d'un complément aux primes de base, ou
d'un paiement à l'hectare de pâturage permanent (" prime
à l'herbe "). Elle serait fondée sur des critères
objectifs, indépendants des fluctuations des prix de marché, de
manière à assurer l'égalité de traitement entre
producteurs et à éviter toute distorsion de concurrence. Pour la
France, le montant global de l'aide serait de 47,2 millions d'écus
en 2000, puis de 93,9 millions en 2001, puis de 141,1 millions
d'écus en 2002, puis enfin de 187,9 millions d'écus à
partir de 2003.
Le total des aides par unité de prime (y compris les paiements
effectués au titre de l'organisation de marché de la viande
bovine) ne pourrait excéder 90 écus en 2000,
180 écus en 2001, 270 écus en 2002, et
330 écus en 2004.
Dans les mêmes conditions, le paiement maximal à la surface ne
pourrait excéder, par hectare, 210 écus en 2000,
280 écus en 2001, et 350 écus à partir de
2002.
2. Les propositions en matière de gestion des soutiens
La
Commission Européenne propose que les Etats membres aient la
faculté de moduler, dans certaines limites, les paiements directs aux
agriculteurs. Cette modulation ne serait pas applicable aux indemnités
compensatoires spécifiques que la Commission prévoit par ailleurs
d'accorder aux agriculteurs des zones défavorisées au titre du
développement rural.
Le premier type de modulation prévu est une application du principe
d'" éco-conditionnalité "
. Les Etats membres sont
invités à préciser les exigences environnementales devant
être respectées " compte tenu de la situation
spécifique des terres agricoles utilisées et des productions
concernées ", et à prévoir des sanctions pour
non-respect de ces exigences ; ces sanctions pourraient être une
réduction, voire une suppression des aides directes.
Le deuxième type de modulation suggéré est lié
à l'emploi
. Les Etats membres fixeraient un taux minimum
d'utilisation de main-d'oeuvre, en deçà duquel les paiements
directs pourraient être réduits, dans une proportion pouvant aller
jusqu'à 20 % ; cette règle s'appliquerait avant le
" plafonnement " global des aides par exploitation.
Les montants éventuellement économisés par les modulations
seraient affectés aux actions agro-environnementales menées dans
le cadre de la politique de développement rural.
Les Etats membres sont par ailleurs invités à prendre " les
mesures appropriées " pour que les aides directes
bénéficient seulement aux agriculteurs capables de prouver
" qu'ils n'exercent pas les activités liées à l'aide
principalement dans le but de bénéficier des paiements
prévus dans le cadre des régimes de soutien ".
Enfin, le montant total des aides directes par agriculteur serait soumis
à une règle de dégressivité au-delà d'un
plafond de 100 000 écus par an ; les paiements seraient
réduits de 20 % pour fraction comprise entre 100 000 et
200 000 écus, et de 25 % pour la fraction
dépassant les 200 000 écus.
3. Les mesures préconisées en matière de développement rural
Les
propositions de la Commission dans le domaine du développement rural
sont liées à celles concernant la politique de cohésion.
Une profonde réforme de cette dernière est prévue. Les
objectifs des Fonds structurels seraient ramenés à trois :
l'objectif 1, concernant les régions en retard de développement
(PIB/habitant inférieur à 75 % de la moyenne communautaire), un
nouvel objectif 2, concernant les zones en reconversion économique et
sociale quelles que soient leurs caractéristiques, et un nouvel objectif
3, sans critère régional, portant sur le développement des
ressources humaines. Les " initiatives communautaires "
(gérées par la Commission elle-même) seraient
concentrées sur trois domaines : le développement rural, la
coopération transfrontalière, l'action contre les discriminations
dans l'accès au marché du travail. Le fonds de cohésion
serait maintenu. Un " instrument structurel de
pré-adhésion " (ISPA) serait par ailleurs créé
au bénéfice des PECO candidats à l'adhésion,
préfiguration d'un fonds de cohésion pour ces pays ; l'action de
l'ISPA s'ajouterait à celle menée au titre du programme PHARE,
ainsi qu'aux aides agricoles de pré-adhésion.
C'est en fonction de ce nouveau cadre que la Commission présente, sous
forme d'un projet de règlement unique, ses propositions concernant le
développement rural, qu'elle considère comme un volet
particulièrement important de la réforme, dans la mesure
où elles tendent à élargir sensiblement le champ des
actions possibles et à en modifier les modalités de financement.
Les diverses mesures pouvant être financées au titre du
développement rural seraient les suivantes :
- soutien aux investissements dans les exploitations, dans la limite de
montants maximaux fixés par les Etats membres ;
- aides à l'installation des jeunes agriculteurs ;
- actions de formation professionnelle ;
- soutien à la cessation anticipée de l'activité agricole
(préretraite) à partir de l'âge de 55 ans (dans la limite
de 15 000 écus par exploitant et de
3 500 écus par travailleur) ;
- octroi d'indemnités compensatoires dans les zones
défavorisées, pour un montant compris entre 40 et 200
écus/hectare ;
- soutien aux méthodes de production conçues pour protéger
l'environnement et préserver l'espace naturel, dans la limite de
montants maximaux modulés en fonction de la zone d'implantation de
l'exploitation (ces montants maximaux seraient de 600 écus/hectare pour
les cultures annuelles, de 900 écus/hectare pour les cultures
pérennes spécialisées, et de 450 écus/hectare
pour les autres utilisations des terres) ;
- aides aux investissements destinés à améliorer les
conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles ;
- soutien à la sylviculture (par l'octroi de primes au boisement des
terres agricoles, dans la limite de 600 écus/hectare pour les
exploitants ou groupements d'exploitants, cette limite étant
abaissée à 150 écus/hectare pour les autres personnes
de droit privé ; par l'attribution d'aides directes à la
préservation des forêts, pour un montant compris entre 40 et
120 écus/hectare) ;
- soutien aux mesures destinées à encourager l'adaptation et le
développement des zones rurales (y compris la diversification des
activités, la rénovation des villages, l'amélioration des
infrastructures...).
Dans les zones rurales situées dans des régions relevant de
l'objectif 1 des Fonds structurels, les actions de développement
rural seraient financées en règle générale par la
section " orientation " du FEOGA ; toutefois, les
indemnités compensatoires pour les zones défavorisées, les
mesures agri-environnementales, les aides au boisement et les
préretraites seraient prises en charge par la section
" garantie " du FEOGA.
Dans les autres zones, l'ensemble des actions serait financé par la
section " garantie " du FEOGA.
Pour certaines des mesures destinées à encourager l'adaptation et
le développement des zones rurales (aides à la commercialisation
de produits de qualité, à la diversification des
activités, à l'amélioration des infrastructures), le FEOGA
interviendrait subsidiairement dans le cas des zones relevant de
l'objectif 1 ou du nouvel objectif 2, le financement de telles
mesures dans ces zones pouvant être assuré par le FEDER.
4. Les prévisions de la Commission en matière de financement de la PAC
Les
prévisions de la Commission pour la période 1999-2006 concernant
l'évolution de la ligne directrice agricole, qui définit le
plafond des dépenses agricoles communautaires, la conduisent à
juger possible de financer à la fois la réforme qu'elle propose
et les dépenses agricoles liées à la première vague
de l'élargissement à l'Est, tout en conservant une marge
budgétaire importante.
La ligne directrice évoluerait en effet comme suit :
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
45 205 |
46 940 |
48 750 |
50 630 |
52 600 |
54 650 |
56 790 |
59 020 |
(en millions d'écus courants)
A supposer que les six PECO avec lesquels des négociations d'adhésion sont entamées (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovénie, Estonie, Chypre) adhèrent à l'Union en 2002, la ligne directrice serait la suivante :
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
50 940 |
52 990 |
55 120 |
57 350 |
59 680 |
(en millions d'écus courants)
La
Commission évalue à 3 145 millions d'écus en
2006 le coût supplémentaire entraîné par la
réforme des OCM qu'elle préconise
. Compte tenu des autres
mesures proposées, et notamment du développement des
dépenses structurelles supportées par le FEOGA, l'augmentation
totale des dépenses relevant de la ligne directrice agricole serait de
6 035 millions d'écus en 2006. Les dépenses agricoles
supplémentaires entraînées par l'élargissement
s'élèveraient, quant à elles, à
3 900 millions d'écus.
Dans ces conditions, le total des dépenses relevant de la ligne
directrice agricole atteindrait, en 2006, 49 350 millions
d'écus pour l'Union à quinze, et 53 250 millions
d'écus pour l'Union élargie, ce qui dans les deux cas laisserait
subsister une marge importante sous la ligne directrice agricole (cette marge
serait de 9 670 millions d'écus pour une Union à
quinze, et de 6 430 millions d'écus pour une Union à
vingt-et-un).
Il est à noter que les prévisions de la Commission ne font
apparaître aucune difficulté pour que les dépenses totales
de la Communauté restent en dessous de l'actuel plafond des ressources
propres, soit 1,27 % du PIB communautaire.
B. UNE COHÉRENCE PROBLÉMATIQUE
La
réforme de la PAC paraît, au total, procéder d'un double
mouvement
: d'une part, un approfondissement de la réforme de 1992
tendant, par de nouvelles baisses de prix, à permettre des exportations
sans restitutions, de manière à libérer l'agriculture
Européenne des contraintes découlant des accords en vigueur de
l'OMC et à mettre les Européens en position plus favorable lors
de la reprise des négociations internationales ; d'autre part, un effort
pour que la PAC, qui reste vivement contestée, notamment dans certains
pays membres, soit mieux perçue par les opinions publiques.
Ainsi, la PAC se trouverait consolidée face aux facteurs externes et
internes susceptibles de la fragiliser. Mais les propositions de la Commission
sont-elles de nature à assurer cette consolidation ?
1. Une légitimité plus forte ?
Dans
ses propositions, la Commission Européenne a voulu tenir compte des
critiques récurrentes contre certains aspects de la PAC. L'exposé
général des motifs qui précède, dans le document
COM (98) 158 final, les propositions de règlements relatifs à la
réforme, précise même que
" réconcilier le
citoyen, le consommateur, avec la politique agricole est une des tâches
primordiales pour les années à venir ".
Plusieurs aspects des propositions de la Commission sont dirigés vers
ces objectifs. Les mesures concernant la dégressivité des aides
au-delà d'un plafond, celles concernant la modulation des aides en
fonction de critères relatifs à l'emploi et à la
présentation de l'environnement, celles tendant à garantir que
les aides soient la contrepartie d'une véritable activité
agricole, sont autant d'efforts pour remédier à des situations
susceptibles de détériorer l'image de la PAC.
De manière plus positive, la Commission assure vouloir " mieux
répondre aux attentes de la société ", en
réorientant la PAC en fonction des exigences qui s'expriment en
matière d'environnement et d'aménagement du territoire. Elle met
en avant, à cet égard, ses propositions concernant les zones
défavorisées, l'élevage extensif, l'augmentation des
quotas laitiers dans les zones de montagne, l'encouragement aux méthodes
de production respectueuses de l'environnement ; elle souligne également
que le développement rural devient le " second pilier de la
PAC ", avec la mission d'intégrer celle-ci à un effort
global d'aménagement de l'espace et de protection de la nature.
La Commission souligne par ailleurs que ses propositions relatives à la
simplification de la réglementation et à la prise en compte du
principe de subsidiarité devraient contribuer à corriger l'image
d'une PAC " technocratique ", trop complexe et trop
éloignée du terrain, prêtant le flanc à la fraude.
Enfin, elle fait observer que la baisse des prix prévue, tout en
permettant aux consommateurs Européens de bénéficier de
produits à meilleur marché, améliorera sensiblement la
compétitivité de l'agriculture Européenne, permettant
ainsi de corriger, vis-à-vis de l'extérieur, l'image d'une Europe
protectionniste, faussant le jeu du marché par des subventions à
l'exportation.
Au contraire, en l'absence de réforme, la persistance des faiblesses
actuelles -développement de pratiques agricoles trop intensives,
distorsions dans la répartition des soutiens- encouragerait les remises
en cause globales, alors même que tendraient à se reconstituer
pour certaines productions, ces stocks d'intervention d'un niveau très
élevé qui, dans le passé, ont beaucoup contribué
à ternir l'image de la PAC.
Le plaidoyer de la Commission Européenne pour une meilleure prise en
compte des attentes des opinions, afin d'obtenir un consensus sur un
" modèle agricole Européen ", ne manque
assurément pas de force.
L'idée générale de ce
" modèle " - permettre à l'agriculture
Européenne, grâce au développement des aides directes, de
poursuivre simultanément des objectifs apparemment contradictoires : des
prix compétitifs d'une part, une occupation harmonieuse du territoire et
une meilleure protection de l'environnement, d'autre part - est une tentative
séduisante de faire la synthèse des préoccupations en
présence.
Toutefois, précisément par rapport aux objectifs retenus, les
solutions envisagées paraissent présenter des faiblesses et des
lacunes.
Tout d'abord, à l'issue de la réforme, les aides directes
représenteraient une part considérable du revenu des
agriculteurs. Schématiquement, on peut estimer que, pour un grand nombre
d'exploitations, le produit des ventes couvrirait à peine les charges
d'exploitation, et que le revenu serait essentiellement constitué par
les paiements directs. Dans ces conditions, la PAC ne risque-t-elle pas
d'apparaître comme un mécanisme d'assistance
particulièrement favorable et relativement peu équitable ? Les
agriculteurs eux-mêmes ne pourraient-ils craindre d'être
perçus plus comme d'habiles capteurs de subventions que comme des
producteurs à la rencontre de consommateurs sur un marché ? La
réforme pourrait ainsi aboutir à un paradoxe : d'un
côté, les revenus réels des agriculteurs diminueraient,
dans la mesure où les propositions de la Commission prévoient une
compensation seulement partielle des baisses de prix par les aides directes,
mais d'un autre côté, les aides directes étant par
définition plus " visibles " que le soutien par les prix- qui
repose sur le consommateur plus que sur le contribuable- les agriculteurs
pourraient apparaître comme plus " assistés ", plus
" favorisés " qu'auparavant. Finalement, loin de
réconcilier les opinions avec la PAC, la réforme proposée
pourrait, notamment dans certains pays membres, prêter le flanc à
des commentaires démagogiques qui pourraient aggraver le trouble
d'opinions souvent peu au fait des réalités et des enjeux des
marchés agricoles.
Le risque serait sans doute beaucoup moins grand s'il existait une
correspondance relativement claire entre les aides directes et les missions non
rémunérées par le marché qui sont en même
temps assignées aux agriculteurs Européens en matière
d'aménagement de l'espace, de protection de la nature, de participation
au développement rural. Mais, telles qu'elles sont définies dans
les propositions de la Commission, les aides restent essentiellement
conçues par rapport au processus productif, calculées en fonction
de la taille et des activités de l'exploitation. De ce fait, leur
justification reste trop ambiguë pour qu'il soit aisé de convaincre
les opinions publiques de leur bien-fondé.
On peut par ailleurs estimer que certaines attentes fortes des opinions
semblent trop peu prises en compte dans les propositions de la Commission,
alors qu'elles font partie intégrante d'une meilleure
acceptabilité de la PAC.
Il s'agit tout d'abord de l'emploi agricole
, dont l'évolution
constamment négative contrarie les efforts de revitalisation du milieu
rural. La Commission assure que la réforme de 1992 a ralenti la tendance
à la réduction du nombre d'exploitations et, plus
généralement, à la baisse de l'emploi agricole ; elle fait
également valoir que les actions structurelles menées par la
Communauté ont permis de créer ou de sauvegarder un nombre
important d'emplois en milieu rural. Toutefois, la tendance n'est nullement
enrayée, alors que la population active agricole a une moyenne
d'âge élevée. Face à cela, la
" modulation " des aides en fonction de critères d'emploi
sera-t-elle un remède adapté ? On peut craindre qu'une mesure de
caractère négatif, et d'application sans doute difficile, ne soit
pas à la mesure du problème. La politique de développement
rural apparaît comme un instrument plus convaincant, mais, à
nouveau, l'objectif d'amélioration de l'emploi ne paraît pas
occuper dans les mesures proposées la place centrale qu'il a dans les
opinions.
La qualité des produits agricoles constitue également un souci
croissant des consommateurs :
dans son exposé des motifs, la
Commission en fait certes un des objectifs essentiels du " modèle
agricole Européen ", mais cette exigence n'occupe qu'une place
mineure dans le dispositif proposé : elle n'est mentionnée que
dans le cadre de " l'encouragement de l'adaptation et du
développement des zones rurales ", et sous le seul angle de la
commercialisation. Certes, les mesures envisagées pour mieux
intégrer à la PAC les préoccupations environnementales
peuvent être présentées comme concourant, indirectement,
à la politique de qualité des produits. Mais ces mesures, qui
auront au demeurant à faire la preuve de leur efficacité, ne
sauraient suffire à répondre aux attentes croissantes des
consommateurs-attestées par la vogue des produits
" biologiques "- en matière de sécurité
sanitaire et de valeur gustative des produits. Une chose est de
décourager les méthodes de production les plus nuisibles à
l'environnement, une autre est, plus positivement, d'orienter la production
dans le sens d'un effort constant de qualité.
Ainsi,
telle qu'elle est conçue,
la poursuite du processus de
disparition du soutien par les prix au profit d'un système d'aides
directes ne paraît en mesure de donner à la PAC la plus forte
légitimité auprès des citoyens et des consommateurs dont
la Commission Européenne souligne la nécessité pour
justifier sa proposition de réforme.
2. Un financement mieux garanti ?
La
réforme proposée est-elle, par ailleurs, de nature
à
consolider le financement de la PAC
, dont la place importante dans le
budget de la Communauté est périodiquement mise en cause ?
A cet égard,
les avantages de la démarche adoptée par
la Commission peuvent paraître importants.
En l'absence de
réforme, les dépenses budgétaires agricoles
évolueraient certes moins rapidement, mais la marge considérable
qui apparaîtrait alors sous la ligne directrice agricole pourrait
favoriser la remise en cause de son mode de calcul. A l'inverse, en continuant
à remplacer par des paiements directs le soutien par les prix et surtout
en faisant assumer par le FEOGA-garantie une part notable des dépenses
consenties au titre du développement rural, les propositions de la
Commission permettraient de " remplir " suffisamment la ligne
directrice agricole pour que celle-ci conserve sa signification et puisse donc
être maintenue sous sa forme actuelle.
Surtout, le principe d'une baisse des prix compensée par des aides
directes peut sembler justifié dans la perspective de
l'élargissement. Les prix pratiqués dans les pays candidats sont
très sensiblement inférieurs à ceux en vigueur dans
l'Union Européenne, et resteront encore inférieurs si la baisse
des prix proposée est décidée. Les agriculteurs de ces
pays, qui bénéficieront ainsi d'une hausse des prix lors de
l'adhésion, n'ont donc pas vocation à bénéficier
des aides directes compensatoires. La réforme proposée devrait
dès lors aider à maîtriser le coût budgétaire
de l'élargissement, en permettant de limiter les dépenses de
soutien des prix qui joueront pour tous les Etats membres, et en mettant
l'accent sur les aides compensatoires qui n'ont pas vocation, du moins dans un
premier temps et sous leur forme actuelle, à s'appliquer dans l'ensemble
de l'Union.
Cependant, les propositions de la Commission comportent également,
sur le plan budgétaire, des incertitudes et des risques.
Certes, la hausse des dépenses budgétaires pour le fonctionnement
des OCM serait surtout sensible au milieu de la période couverte par la
réforme puisque, en fin de période, elle se trouverait
atténuée par la diminution des dépenses d'intervention.
Néanmoins, au total, la réforme se traduirait par une
augmentation durable de dépenses budgétaires n'ayant pas le
caractère structurel, et donc réparties selon des critères
ne reflétant pas la richesse relative des pays membres.
Or, ces propositions interviennent dans un contexte marqué par une
tension entre les pays les plus fortement contributeurs nets -Allemagne et
Pays-Bas- qui réclament un plafonnement de leurs contributions, et les
pays les plus bénéficiaires de la politique de cohésion
économique et sociale, qui craignent un redéploiement des
dépenses structurelles vers les pays d'Europe centrale et orientale.
Dans un tel contexte, l'idée d'un accroissement des aides directes
n'apparaît pas sans risques.
Comme on l'a souligné plus haut,
la réforme envisagée ne paraît pas renforcer suffisamment
l'" acceptabilité " de ces aides, qui pourraient
dès lors se trouver contestées plus encore qu'aujourd'hui. Si la
réforme préservait clairement la distinction entre
dépenses obligatoires (que le Parlement Européen ne peut
modifier) et dépenses non obligatoires (pour lesquelles il a le
" dernier mot "), la protection des crédits destinés
aux paiements directs serait cependant assurée : mais il n'en est pas
ainsi. En prévoyant le financement partiel du développement rural
par le FEOGA-garantie, la Commission a voulu introduire un
élément de souplesse, permettant d'utiliser une partie de la
marge éventuellement laissée disponible par la gestion des OCM
pour des actions de développement rural ; mais si cette proposition
était approuvée par le Conseil, on se trouverait alors dans une
situation où une partie des crédits inscrits au FEOGA-garantie
(les dépenses relatives aux OCM) relèverait du régime des
dépenses obligatoires (D.O.), et l'autre partie (les dépenses
relatives au développement rural) du régime des dépenses
non obligatoires (D.N.O.), sans qu'il y ait de frontière nette dans leur
utilisation. La distinction D.O./D.N.O. y résisterait-elle ?
Comme le Parlement Européen n'a cessé de contester cette
distinction dans laquelle il voit une atteinte à ses pouvoirs
budgétaires, on peut craindre qu'il n'y ait là l'ouverture d'une
brèche qui pourrait, à terme, conduire à une modification
profonde des conditions de fixation des dépenses agricoles
communautaires.
En prévoyant d'accroître la part des aides directes dans le revenu
des agriculteurs, et en ouvrant simultanément la voie à ce que le
devenir de ces aides relève du Parlement Européen, les
propositions de la Commission paraissent donc introduire un
élément de fragilité dans le financement de la PAC.
3. Une agriculture plus compétitive, moins exposée dans les négociations internationales ?
La
Commission souligne que la baisse des prix qu'elle préconise rendra les
productions Européennes plus compétitives sur le marché
communautaire comme sur le marché mondial, réduira le risque de
réapparition de surplus invendables, facilitera l'adhésion des
PECO et fortifiera la position Européenne dans le prochain cycle de
négociations commerciales multilatérales.
Toutefois, il semble que les effets pouvant être attendus de la baisse
des prix prévue soient plus incertains que ne le suppose la Commission,
et que les modalités de la compensation envisagée puissent
entraîner de graves déséquilibres.
Dans le cas des
grandes cultures,
l'alignement des aides aux cultures
des oléagineux sur celles accordées aux cultures
céréalières pourrait conduire à des distorsions.
Cette formule, souligne la Commission, permettrait à l'agriculture
Européenne de se libérer des contraintes de l'accord de Blair
House conduisant à limiter les surfaces pouvant être
plantées en oléagineux. En réalité, son effet
principal serait d'entraîner une diminution très sensible de la
production Européenne d'oléagineux, les agriculteurs ayant
intérêt à se tourner vers les cultures
céréalières, plus rentables et bénéficiant
des mécanismes régulateurs communautaires qui ne jouent pas pour
les productions oléagineuses. Le risque serait particulièrement
accentué en cas de forte hausse du prix des céréales, qui
pourrait entraîner une baisse généralisée des aides
(
36(
*
)
) et dissuader de ce fait doublement la
production d'oléagineux.
On aboutirait ainsi à un paradoxe : la production Européenne
d'oléagineux se réduirait alors que la Communauté est
fortement déficitaire dans ce domaine, où elle couvre moins du
tiers de ses besoins, tandis que la production céréalière,
qui est largement excédentaire, se trouverait encouragée, ce qui
pourrait conduire à un encombrement du marché.
Cette distorsion s'accompagnerait d'un déséquilibre entre les
régions, les zones où les cultures oléagineuses
correspondent à des contraintes d'assolement se trouvant
défavorisées. Ce phénomène pourrait être
aggravé par la compensation seulement partielle de la baisse des prix,
qui sera proportionnellement mieux supportée par les exploitations
situées dans des zones bénéficiant d'avantages comparatifs
: la production devrait avoir dès lors plus tendance qu'aujourd'hui
à se concentrer dans les zones les plus productives, à rebours
des objectifs de développement rural que la Commission met par ailleurs
en avant.
La forte baisse des prix prévue dans le cadre de la
viande
bovine
pourrait également susciter de
graves
déséquilibres
, sans pour autant permettre d'atteindre les
objectifs qui la justifient en principe.
Certes, à supposer qu'une baisse du prix des céréales soit
décidée, une répercussion sur le prix de la viande bovine
paraît indispensable pour préserver l'équilibre entre les
différents types de viande sur le marché Européen. Mais
une forte baisse principalement destinée à conquérir des
marchés extérieurs, et compensée seulement en partie par
des aides directes, soulève des difficultés d'une autre ampleur.
Tout d'abord, on peut de toute manière douter qu'une baisse de 30 % des
prix d'intervention suffise pour que la production Européenne puisse
s'imposer sans restitutions sur les marchés émergents, compte
tenu des prix pratiqués par les exportateurs d'Amérique du Nord
et du Sud. Il n'est pas même certain que cette baisse suscite un
mouvement marqué de reconquête du marché intérieur :
en effet, d'une part, on ne peut savoir dans quelle mesure elle sera
répercutée par la filière, et d'autre part, la relative
désaffection des consommateurs pour la viande bovine ne paraît pas
tenir seulement à un facteur de prix.
Ensuite, la compensation partielle de la baisse des prix, alors que le revenu
brut d'exploitation moyen des éleveurs bovins est déjà
inférieur à celui de la plupart des autres secteurs agricoles,
affaiblirait gravement nombre d'exploitations spécialisées. La
plupart
37(
*
)
des projections sur les
conséquences de la réforme proposée doivent être
considérées avec précaution dans la mesure où elles
ont été réalisées en tenant pour acquise la
suppression de la prime au maïs-ensilage, alors que celle-ci a finalement
été maintenue dans les propositions définitives ; en
outre, des inconnues subsistent puisque, dans le projet de réforme, des
marges importantes sont laissées aux Etats membres pour les
modalités d'application. Néanmoins, les analyses convergent pour
mettre en évidence une forte chute de l'excédent brut
d'exploitation, allant de 15 à 35 % selon les systèmes
d'exploitation. L'impact serait particulièrement négatif dans les
systèmes naisseurs, ce qui signifie que le bassin allaitant
français, déjà en situation de fragilité, se
trouverait particulièrement affecté, à l'encontre, une
fois de plus, des objectifs d'aménagement de l'espace.
Enfin, le remplacement des achats publics d'intervention par des aides au
stockage privé ferait peser une incertitude sur la possibilité de
conserver un soutien efficace des prix, notamment en cas de crise grave.
Au total, la réforme proposée mettrait en cause
l'équilibre de nombreuses exploitations et créerait de fortes
disparités entre les types de producteurs
. La tendance à la
concentration des exploitations se trouverait encouragée, accentuant le
processus de désertification de certaines zones. On irait ainsi, par
certains aspects, à l'exact opposé des objectifs affichés
par la Commission.
La cohérence de la réforme des
productions
laitières
apparaît plus incertaine encore
. La baisse
des prix de 15 % ne semble pas suffisante pour améliorer la situation
concurrentielle de la production Européenne sur le marché
mondial, puisque, dans le cas du beurre comme de la poudre de lait, les
restitutions sont de deux à quatre fois plus importantes que le taux
retenu. L'efficacité de la baisse serait certes plus grande dans le cas
des fromages, mais la quantité supplémentaire qui pourrait alors
vraisemblablement être exportée sans restitutions compenserait
seulement la diminution des exportations subventionnées qu'imposent les
accords du GATT pour les prochaines années. Ainsi, la réduction
des prix ne paraît pas réellement justifiée par la
perspective d'un développement des exportations Européenne.
On peut par ailleurs douter que les consommateurs Européens
bénéficient de manière significative de cette baisse
,
dans la mesure où le prix du lait à la production n'entre souvent
que pour une part relativement réduite dans le prix des produits
laitiers à la consommation.
En revanche, l'impact serait sensible et clairement négatif pour la
situation des producteurs de lait, le relèvement des aides directes ne
compensant que partiellement la baisse des prix des produits laitiers et de la
viande bovine. La chute de l'excédent brut d'exploitation pourrait,
selon les premières estimations, être supérieure à
15 %.
Compte tenu par ailleurs du coût élevé de la
réforme, on peut se demander si celle-ci a sa justification en
elle-même, ou si, dans les modalités actuellement
envisagées, elle n'a pas plutôt pour but principal de
préparer une réforme de plus grande ampleur incluant l'abolition
du système des quotas.
Enfin, la réforme proposée est-elle de nature à
fortifier la situation de l'agriculture dans la perspective de la reprise des
négociations commerciales internationales
? La Commission assure
qu'une réforme menée préalablement aux
négociations, selon le schéma retenu en 1992, donne une position
plus forte aux négociateurs Européens, qui peuvent s'abriter
derrière une législation récente et constituant une
concession.
On peut estimer au contraire que cette approche revient à
déplacer unilatéralement le point de départ de la
négociation, en défaveur de l'agriculture Européenne : ne
peut-on interpréter en ce sens la manière dont se sont
déroulées les négociations de l'Uruguay round ?
Toujours est-il que la démarche de la Commission ne paraît pas
pleinement convaincante, pour deux principales raisons
: d'une part, les
baisses de prix envisagées ne paraissent pas, du moins dans certains
secteurs, de nature à assurer aux productions Européennes une
compétitivité indépendante de l'octroi de restitution ;
d'autre part et surtout, il n'est pas acquis que les aides directes telles
qu'elles sont conçues dans la réforme, c'est-à-dire non
dépourvues de liens avec la production, ne se trouvent pas le moment
venu au centre de la controverse sur les subventions à
l'agriculture.
II. UN PROJET QUI SUSCITE DE NOMBREUSES RÉACTIONS
La
présentation, le 16 juillet 1997, par la Commission
Européenne, de son document "
Agenda 2000 : pour une
Union plus forte et plus large
" a été suivie des
premières propositions de règlement, en date du 18 mars
dernier.
Durant ces dix mois, les instances Européennes, les Etats membres ainsi
que les organisations professionnelles agricoles Européennes et
nationales ont pu prendre connaissance de ces propositions et les analyser. Ils
les ont, à de nombreuses reprises, commenté et n'ont pas
manqué, soit de les approuver, soit de les rejeter, soit d'y apporter
des modifications.
La mission d'information
tient
, tout d'abord,
à saluer
le travail effectué par la Commission, qui
a rempli le rôle
d'initiative que lui confèrent les traités, et répondu
à une demande du Conseil Européen de décembre 1995.
En effet, en présentant dans un document global, faisant directement
suite à la Conférence intergouvernementale, une communication sur
le futur cadre politique et financier de l'Union, compte tenu des perspectives
de l'élargissement, la Commission a donné ainsi un contenu au
cadre institutionnel et juridique de l'Union Européenne. Le lien avec le
Traité d'Amsterdam est donc indiscutable.
La mission d'information considère nécessaire d'examiner les
positions des différents partenaires face à la réforme de
la PAC. Certes, ces positions sont appelées à évoluer. Il
n'en demeure pas moins essentiel de comprendre les différents enjeux en
présence pour prévoir les stratégies que chaque partenaire
va développer dans les mois à venir. Enfin, les orientations que
la mission d'information proposera devront tenir compte, par souci de
réalisme et d'efficacité, des positions des différents
partenaires.
A. AU NIVEAU EUROPÉEN
1. Les instances Européennes et le calendrier de la réforme de la PAC
Les
propositions de la Commission Européenne ont entraîné peu
de réactions de la part des autres institutions communautaires (et
notamment du Parlement Européen), ce qui est tout à fait logique,
puisque les propositions de la Commission sont relativement récentes.
La plupart des interlocuteurs rencontrés par la mission d'information
prévoient d'ailleurs que l'aboutissement des négociations sur la
réforme de la PAC devrait intervenir qu'après les
élections législatives allemandes, mais avant les prochaines
élections Européennes
.
Les discussions se situent actuellement au niveau
du Conseil des ministres
de l'agriculture.
C'est en septembre dernier que ceux-ci se sont
livrés à un premier échange de vue sur cette
réforme. Depuis, chaque réunion des ministres de l'agriculture
(la dernière en date étant celle des 25 et 26 mai dernier) a
donné lieu à un débat sur les propositions de
réforme de la PAC, notamment au mois de novembre 1997. La
réunion du 30 mars dernier, qui a fait suite à la
présentation par la Commission Européenne de ses propositions de
règlements, a suscité de nombreuses réactions des
différents Etats membres.
De son côté,
le Parlement Européen
est resté
jusqu'à présent très " discret " sur le
thème de la réforme de la PAC. La mission a examiné
néanmoins avec attention le document de travail sur l'Agenda 2000
présenté par la Commission de l'agriculture et du
développement rural du Parlement Européen.
Le
Comité économique et social
(CES) Européen a
adopté son avis sur le projet de réforme de la PAC en
séance plénière le 10 décembre 1997. Le
CES approuve la présentation par la Commission d'orientations sur
l'avenir de l'Union. Il regrette cependant que plusieurs objectifs n'aient pas
été cités parmi les priorités de la politique
agricole, comme l'occupation du territoire, en tenant compte des secteurs
amont et aval de l'agriculture, et la situation de l'emploi dans le milieu
rural.
Il craint que les mesures proposées par la Commission ne soient pas de
nature à garantir le maintien du revenu des agriculteurs et regrette que
cet aspect n'ait pas été pris en compte dans l'Agenda 2000.
Le comité demande que la réforme de la PAC conforte le
caractère multifonctionnel de l'agriculture Européenne. En dehors
de sa vocation à produire des biens agricoles sains et de
qualité, il souligne également son rôle essentiel dans
l'aménagement du territoire, dans le développement des zones
rurales et dans la préservation de l'environnement.
Les
chefs d'Etat et de Gouvernement
des quinze, lors du sommet de
Luxembourg des 12 et 13 décembre 1997, ont eu à se
prononcer sur l'ensemble du projet de l'Agenda 2000. Le texte final se
limite à constater que les propositions de la Commission
Européenne "
constituent une bonne base de travail
",
et invite cette dernière à présenter "
dans les
meilleurs délais
" des propositions détaillées.
Le Conseil Européen a toutefois avalisé deux demandes
françaises : la Commission doit ainsi séparer la
programmation financière des Quinze de celle prévue pour
l'adhésion des pays candidats. Les moyens financiers mis à la
disposition de la politique agricole commune, dont la France est un grand
bénéficiaire, seront calculés sur la base actuelle de la
ligne directrice agricole. La réforme envisagée doit, en outre,
aboutir, selon les conclusions de Luxembourg, "
à des solutions
économiquement saines et viables, socialement acceptables et permettant
d'assurer des revenus équitables ainsi qu'un juste équilibre
entre secteurs de production, producteurs et régions et en
évitant des distorsions de concurrence
".
Le prochain sommet Européen de Cardiff des 15 et 16 juin
prochain devrait prendre acte des nouvelles propositions de la Commission
Européenne, sans aboutir, en raison de la proximité des
élections allemandes, à de nouvelles
décisions.
2. Une forte opposition des organisations professionnelles agricoles Européennes
Plusieurs organisations professionnelles agricoles
Européennes ont exprimé de fortes critiques à l'encontre
des propositions de la Commission Européenne. Il s'agit du Comité
des organisations professionnelles agricoles (COPA), du Comité
général de la coopération agricole (COGECA), de la
Coordination paysanne Européenne (CPE) et du Comité
Européen des jeunes agriculteurs (CEJA).
Pour l'ensemble de ces organisations, l'Agenda 2000 ne contient pas
d'élément vraiment porteur permettant de défendre et
d'améliorer un modèle agricole Européen fondé sur
un juste équilibre entre les exploitants, les productions et les
territoires.
a) Une absence de " modèle agricole d'avenir " pour le COPA
Le COPA
réaffirme le " rôle multifonctionnel " de l'agriculture,
autour des fonctions de production, d'aménagement du territoire et de
son rôle social. Ce tryptique, est, selon le COPA, le seul moyen
d'assurer un équilibre acceptable entre les forces contradictoires
auxquelles est soumis ce secteur : libéralisation accrue des
échanges et évolutions technologiques d'un côté,
sécurité des denrées alimentaires, protection de
l'environnement, bien être animal, valorisation de l'espace naturel et
cohésion sociale de l'autre.
Le COPA regrette l'absence, avant que le détail des propositions de
réforme de la Commission Européenne ne soit examiné, de
véritables débats de fond sur la place de l'agriculture dans
notre société.
Il relève cinq difficultés essentielles dans les propositions de
la Commission : la " durabilité " des aides
directes ; le risque de " renationalisation rampante " de la
PAC ; la complexité administrative, surtout dans le secteur
laitier ; la nécessité d'une réflexion plus
approfondie sur la modulation des aides et
l'" éco-conditionnalité ", cette dernière ne
devant en tout cas pas se concrétiser par des sanctions, mais par des
" incitations " ; enfin le " manque de
précisions " sur le sort qui sera réservé aux aides
directes lors des prochaines négociations de l'Organisation mondiale du
commerce.
En outre, le COPA estime que ces propositions devraient aboutir à une
baisse des revenus agricoles, comprise entre 5,5 et 6,5 milliards
d'écus.
En conclusion, le COPA reproche au volet agricole du Paquet Santer de ne pas
esquisser les premiers traits d'un véritable modèle agricole
Européen.
b) " Une mauvaise voie " pour la CPE
La
Coordination paysanne Européenne (CPE) considère que la
réforme de la PAC est "
sur une mauvaise voie
". Elle
rejette le thème central des propositions -privilégier le
marché mondial par rapport au marché intérieur de l'Union
Européenne- qu'elle qualifie d'"
inacceptable pour les
agriculteurs Européens
".
La CPE estime que l'Union Européenne s'engage dans une
"
spirale
destructrice
" en choisissant, comme moteur
de la PAC, la "
course
mondiale
aux plus bas coûts
de production
". "
La vente des produits agricoles en dessous
des coûts de production, associée à des aides directes
compensatoires, ne peut être durable
", craint le groupement de
petits agriculteurs Européens. La CPE affirme que la nouvelle PAC fera
"
disparaître chaque année des centaines de milliers
d'exploitations agricoles
".
Par ailleurs, selon la CPE, la réforme encourage la production intensive
et ne propose pas au niveau Européen d'instrument sérieux de
modulation et de plafonnement des aides ?
c) Une quasi absence de prise en compte des jeunes agriculteurs dans le projet Européen pour le CEJA
Lors de
la présentation du projet de l'Agenda 2000 en juillet 1997, le
Conseil Européen des jeunes agriculteurs (CEJA) a manifesté sa
vive opposition aux propositions de la Commission Européenne. Il est
vrai que la Commission a maladroitement omis de faire référence
au terme " jeunes agriculteurs " dans son document. Ainsi,
M. John Lee, président du Ceja, a indiqué que le projet de
réforme "
démontre que les aspirations des jeunes
agriculteurs n'ont manifestement pas la priorité dans l'Union
".
Le Conseil Européen des jeunes agriculteurs s'est
félicité, en mars dernier, des projets de règlements de la
Commission tendant à l'augmentation des quotas laitiers. Il est vrai que
cette proposition n'avait jamais été envisagée, depuis
15 ans, par la Commission. Toutefois, la proposition de réduction
de 15 % du prix des produits laitiers annule les effets positifs de la
hausse du quota, selon le CEJA.
Notons par ailleurs que le Bureau Européen de l'environnement (BEE), le
World wide fund for nature (WWF), Bird Fife International et l'Eurogroup pour
le bien être animal considèrent "
qu'en dépit de
changements apparents, les propositions de la Commission continuent de stimuler
l'agriculture intensive et polluante
".
Ils résument ainsi leurs positions : "
Quelques bons
éléments dans un paquet globalement mauvais
".
B. LA POSITION DES DIFFÉRENTS ETATS MEMBRES
Afin de
mener une étude comparative des attitudes des différents Etats
membres face aux propositions de la réforme de la PAC, la mission s'est
rendue en Allemagne, en Italie, en Espagne et en Grande-Bretagne ainsi qu'en en
Pologne. Il a également interrogé les ambassades de France des
quinze pays de l'Union Européenne, mais aussi d'Argentine, d'Australie,
du Canada, de Chine, des Etats-Unis, du Japon et des pays d'Europe centrale et
orientale, qui ont fourni des éléments de réponse fort
intéressants.
Qu'elles en soient ici remerciées.
1. Un consensus sur le principe d'une réforme de la PAC
Dès le mois de juillet 1997, les Etats membres ont
réagi aux propositions de la Commission Européenne. La session
informelle d'Echternach, au Luxembourg entre les ministres de l'agriculture, en
septembre 1997 a constitué le " lancement " des
premières discussions.
Outre les nombreuses réunions de travail hebdomadaires qui permettent
aux experts agricoles de chaque pays d'approfondir les propositions de la
Commission, deux temps forts ont, comme indiqué ci-dessus, marqué
les premières négociations sur ce dossier : les réunions
des ministres de l'agriculture de novembre 1997 et du
30 mars 1998.
Lors de la réunion des ministres de l'agriculture de novembre 1997,
quatorze Etats membres -l'Espagne refusant de signer ces conclusions- ont
adopté
un texte commun
transmis aux Chefs d'Etat et de
Gouvernement, qui se sont réunis les 12 et 13 décembre
dernier.
Ce document - présenté comme un compromis synthétique sur
la PAC, présenté par la Présidence luxembourgeoise-
dégage les orientations communes, de nature générale, et
indique que, "
sans préjudice de ce que la
ligne directrice
agricole
recouvre, il serait nécessaire de la maintenir en tant que
plafond dans son principe et ses modalités actuelles de
calcul
". Par ailleurs, ces conclusions évaluent positivement
la réforme de la PAC de 1992 et recommandent, dans les grandes lignes,
la poursuite du projet de réforme actuelle. A ce titre, le document de
compromis estime que les prévisions de développement du
marché effectuées par la Commission dans les secteurs de la
viande bovine, des céréales et des produits laitiers
"
constituent une bonne hypothèse de travail
". Il est
fait spécifiquement référence
aux surplus structurels
substantiels à prévoir si le statu quo est maintenu.
S'agissant des objections de l'Union Européenne au cours du prochain
cycle de négociations commerciales de l'OMC, les Quinze ont
exprimé la volonté de "
préserver un
mode de
production agricole qui réponde aux besoins et aux attentes de
l'agriculteur et du consommateur Européen
, tout en veillant à
ce que la libéralisation des marchés s'inscrive dans un contexte
international, dans lequel les contraintes de l'agriculteur Européen
sont reconnues et dans lequel ni les préférences communautaires
ni la solidarité avec les pays en développement ne sont en
péril
". Pour le reste, le document de compromis parcourt les
propositions de la commission, tout en mentionnant les thèmes
généralement négligés -les produits originaires du
bassin méditerranéen et le statut critique des jeunes
agriculteurs-.
Au-delà de ce cadre de référence, important sur le
principe, mais assez vague pour dégager une quasi unanimité,
l'éventail des positions exprimées est très large,
les
négociations promettant d'être longues et difficiles.
Le débat du 30 mars dernier, organisé par le ministre
britannique de l'agriculture et président du Conseil, M. Jack
Cunningham, a permis aux quinze de présenter dans le détail leurs
positions sur la réforme de la PAC.
Le consensus, quasi unanime, de novembre dernier, a montré sa
fragilité quand il s'est agi de se prononcer sur les propositions de
règlement de la Commission Européenne.
L'accord global sur le
principe d'une " réforme bis de la PAC " a dès lors
cédé devant l'importance des divergences entre les
différents partenaires.
Le texte de compromis auquel sont parvenus les Etats membres lors du Conseil
Agriculture se limite à reconnaître que la réforme est
nécessaire et s'engage à poursuivre les négociations, en
privilégiant cinq secteurs clé, mais
sans se fixer
d'échéance
.
2. De profondes divergences d'appréciation
Le
présent paragraphe se propose d'examiner la position des Etats membres,
hormis celle de la France qui fait l'objet d'une analyse plus
détaillée.
La réaction générale que suscitent ces propositions de
réformes est globalement négative.
Néanmoins, si
certains Etats les ont rejetées catégoriquement, d'autres ne se
sont pas prononcés officiellement, ou n'ont pas émis d'avis sur
toutes les propositions de la Commission.
Aussi la mission d'information, tout en procédant à un examen
approfondi des déclarations de chaque Etat, a surtout cherché
à dégager des orientations générales.
A ce stade de l'analyse, et à moins de quinze jours du sommet
Européen de Cardiff, les positions des Etats Européens peuvent
faire l'objet d'une répartition -quelque peu simplificatrice, mais
nécessaire pour la clarté de notre présentation- en quatre
groupes.
Ces positions sont le reflet des contacts pris par la mission
sénatoriale lors de ses différents déplacements, ainsi que
des informations qu'elle a pu recueillir dans la presse française et
étrangère.
La
première catégorie de pays regroupe les pays globalement
favorables au contenu de la réforme
. Ces Etats souhaitent d'ailleurs
que la Commission aille plus loin dans la baisse générale des
prix. Il s'agit du Royaume-Uni, de la Suède et du Danemark.
La deuxième catégorie comprend les Etats, qui tout en
étant plutôt favorables au " Paquet Santer " et aux
propositions de la Commission sur la PAC, souhaitent certaines
modifications
(Pays Bas, Autriche).
La troisième catégorie réunit les pays qui souhaitent
utiliser ces négociations pour améliorer leur situation.
Alors qu'ils s'étaient fortement opposés à la
réforme de la PAC en 1992, ou qu'ils estiment ne pas en avoir
véritablement profité, les Etats ne veulent ni rejeter les
propositions de la Commission ni les accepter. Ils désirent, sur des
domaines très ponctuels et très précis,
une
amélioration de leur traitement
. On pourrait qualifier cette
démarche de pragmatique : la Grèce et l'Italie ont
adopté cette position.
La
quatrième et dernière catégorie rassemble les Etats
opposés aux propositions de la Commission
: ces pays ne proposent
pas pour autant de projet alternatif, mais souhaitent des modifications
substantielles au texte présenté. Ce groupe est le plus
nombreux : il rassemble notamment la France, l'Allemagne, l'Espagne, le
Portugal et l'Irlande.
a) Une " bonne réforme " à accentuer
Le
Royaume-Uni, la Suède et le Danemark jugent que les propositions de la
Commission vont dans le " bon sens ", même s'ils souhaitent
généralement une accentuation du dispositif. Ces Etats estiment
que l'Union Européenne doit aller plus loin et plus vite, en mettant en
place des aides dégressives et temporaires.
Les performances de l'agriculture
danoise
38(
*
)
, sa dépendance vis-à-vis de
l'exportation (les 2/3 de sa production sont exportés, à
50 % vers les pays tiers) et la valorisation du progrès technique
conduisent le Danemark à prôner
une politique agricole commune
orientée vers le marché
et un accroissement de la
compétitivité.
Les priorités
du gouvernement danois
sont donc :
-
le maintien du marché commun agricole
et le refus de toute
renationalisation de la PAC ;
-
le refus de la voie malthusienne
(réduction de quotas, gel
des terres, ...) ;
- une option favorable
à une baisse des prix garantis
;
-
un mouvement graduel vers la libre-entreprise
pour permettre au
secteur agricole de s'adapter ;
-
des compensations, totalement découplées
,
liées à des objectifs environnementaux et structurels ;
-
une anticipation des tendances lourdes :
rapprochement vers
les prix des PECO (impact commercial positif de l'élargissement) ;
préparation de la négociation internationale de l'OMC.
Compte tenu de ces priorités, le Danemark a été le premier
Etat membre à ce jour à se prononcer fermement en faveur des
réformes. Prônant une approche libérale et
compétitive pour la PAC, il voit dans les propositions Santer la fin de
la limitation de la production.
Approuvant globalement les orientations générales de la
Commission pour les OCM " grandes cultures " et " viande
bovine ", le ministre Paul Ottosen prône
l'abolition de
l'ensemble des quotas avant 2006 et une réduction des prix
institutionnels supérieure aux 15 % proposés actuellement.
Il invite la Commission à veiller à ce que les changements
apportés aux fonds structurels (y compris le FEOGA- développement
rural) n'accroissent pas les lourdeurs administratives. M. Ottosen a, en
outre, incité ses collègues à considérer les
réformes à long terme en prenant en compte l'élargissement
à l'Est et les négociations à l'OMC.
Les organisations agricoles danoises approuvent les propositions de la
Commission mais demandent une compensation intégrale de la baisse des
prix, qui soit équitable entre les agriculteurs et les pays.
La Suède
, dont l'agriculture se caractérise par un
élevage principalement laitier, est favorable depuis le début des
années 1990 à une réforme libérale de la
politique agricole, pour favoriser le consommateur et la
compétitivité du secteur agricole.
La Suède a dénoncé à plusieurs reprises
les mécanismes actuels de la PAC et notamment
:
- son coût pour le consommateur et le contribuable ;
- ses effets négatifs pour l'environnement ;
- son caractère obsolète (réglementation datant des
années 1960, promouvant le productivisme sans souci de
qualité ni de durabilité) ;
- sa production d'excédents qu'il faut stocker ou brader sur les
marchés mondiaux ;
- son injustice (les soutiens vont en majorité aux grandes
exploitations) ;
- sa complexité inextricable et son opacité.
La Suède plaide donc en permanence en faveur d'une réforme
libérale de la PAC, par la recherche de trois objectifs :
- axer davantage la production agricole et les OCM
sur le
marché
dans les mêmes conditions que les autres secteurs de
l'économie ;
- mieux intégrer les
objectifs environnementaux
dans la PAC et
rémunérer les prestations de services correspondants ;
- mieux prendre en compte la
demande du consommateur
(qualité des produits, bien être des animaux).
Une
libéralisation
accrue des échanges agricoles
entraînée par le prochain cycle de l'OMC est jugée
favorable aux exportateurs, aux consommateurs et aux budgets publics. La
Suède prône l'ouverture sur les marchés extérieurs
(à l'importation et à l'exportation), génératrice
de croissance et seule voie d'avenir pour la PAC selon elle.
La disparition
de la préférence communautaire
, voulue par la Suède,
lors du prochain cycle de l'OMC, devrait provoquer une baisse des prix
intérieurs qui rendrait tout encadrement de la production insupportable
; la boîte bleue du GATT serait supprimée, et imposerait
le
découplage des paiements compensatoires
, ainsi que leur modulation
en fonction de la taille de l'exploitation. La Suède considère
les paiements compensatoires comme transitoires : ils doivent être
à son sens supprimés avant le premier élargissement.
La Suède est un contributeur net au budget communautaire, très
attachée à la rigueur budgétaire en matière de
dépenses agricoles communautaires. Les propositions de la Commission
sont l'occasion pour ce pays d'exprimer la nécessité d'une
réforme de la PAC allant dans le sens d'une agriculture orientée
vers le marché, compétitive et moins contenue.
C'est pourquoi, la Suède est satisfaite des orientations de la
Commission et prône, pour les différents secteurs de la
production, le rapprochement progressif vers les prix mondiaux, compensé
de manière à éviter toute distorsion de concurrence pour
le secteur du lait -signifiant la disparition à terme des quotas-.
Le consommateur (faible niveau des prix à la consommation), la
sécurité alimentaire, le bien-être animal, et la protection
de l'environnement par l'occupation de l'espace rural restent,
parallèlement à une diminution du coût de la PAC, ses
quatre principales préoccupations.
Si la
Confédération des agriculteurs suédois
(LRF) est globalement favorable à une libéralisation progressive
du commerce mondial des produits agricoles et à des réformes
supplémentaires, elle ne partage toutefois pas toutes les positions du
Gouvernement suédois. La Confédération estime que les prix
des produits agricoles doivent couvrir les coûts de production et que la
proposition de la Commission ne permet pas d'atteindre cet objectif en
Suède. De plus, elle s'oppose à la modulation et au plafonnement,
car ces mesures ne favorisent pas la compétitivité des
exploitations agricoles. Elle est également opposée à tout
système qui " renationaliserait " la politique agricole
commune. De même, l'introduction de l'écoconditionnalité
dans le système d'aides est vue avec prudence par le LRF. En revanche,
le LRF serait favorable à une dotation budgétaire plus importante
pour l'environnement et la politique rurale, à condition qu'elle ne
pénalise pas les politiques de marché. Par ailleurs, la prime
unique pour les grandes cultures n'a pas les faveurs de la
Confédération, qui craint que la production d'oléagineux
ne disparaisse en Suède. Depuis l'adhésion de la Suède
à l'Union Européenne, la production d'oléagineux a
déjà diminué de 50 %. En revanche, le LRF voit
positivement un certain nombre d'objectifs de la Commission exprimés
dans l'Agenda 2000, comme par exemple le soutien du revenu. Toutefois, le
LRF plaide pour une compensation intégrale des baisses de prix.
Les fondements de la position
du Royaume-Uni
concernant la PAC
s'expliquent en partie par la prévalence d'une doctrine libérale,
par une conception de l'alimentation " bon marché " pour le
consommateur, une contribution financière Européenne jugée
élevée de ce pays et par la densité de population d'un
Etat qui ne craint pas la désertification.
Le Royaume-Uni estime que la PAC coûte cher au consommateur et
au contribuable et que le soutien par les prix conduit à une allocation
des ressources qui n'est pas optimale.
Le Royaume-Uni juge ce
système inefficace et coûteux par rapport à un
système d'aide directe au producteur.
Le Royaume-Uni regrette que le revenu des agriculteurs n'ait pas
augmenté malgré un soutien jugé considérable aux
producteurs, et que le nombre d'exploitations ait sévèrement
diminué. Il considère que la fraude et la bureaucratie sont les
deux maux endémiques de la PAC. Les Britanniques insistent sur le fait
que la PAC n'est budgétairement pas supportable à cause de la
surproduction qu'elle encourage et de l'élargissement aux PECO, qui
figure au programme de l'Union Européenne.
Enfin, les perspectives des prochaines négociations de l'OMC sont
extrêmement présentes dans l'argumentaire des britanniques, qui y
voient l'argument d'une réforme radicale de la PAC. Ils
considèrent qu'en signant les accords de Marrakech, l'agriculture
Européenne s'est engagée dans un processus qui lui impose
d'être compétitive sur les marchés extérieurs, sans
aide à l'exportation. Pour le Royaume-Uni, l'OMC est une contrainte
majeure et l'Union Européenne ne saurait imposer son modèle de
politique agricole. La libéralisation de la PAC est jugée
inévitable et urgente, pour que l'agriculture Européenne puisse
avoir une position offensive sur les marchés extérieurs et soit
à même de se défendre sur son marché
intérieur.
Le contenu de la réforme souhaitée par les Britanniques
comprend :
- l'abandon du soutien à l'agriculture communautaire par les
prix
;
- l'abolition du
contrôle de l'offre
(fin du gel des terres
et du système des quotas) ;
- des aides directes
dégressives
,
découplées
de la production et limitées dans le
temps ;
- un renforcement des aides spécifiquement liés à
l'environnement
;
- la mise en place d'une
politique rurale intégrée
.
Le scénario idéal britannique peut être
résumé de la manière suivante
: les agriculteurs
modulent leur production en fonction des exigences du marché. Ils
peuvent exporter sans restitutions et les plus productifs (exploitations
localisées en Angleterre) ne sont plus bridés par le gel des
terres ou par les quotas. De nouveaux marchés sont conquis par
l'agriculture et par l'industrie agro-alimentaire britanniques.
La réforme devrait entraîner une diminution de la valeur des
capitaux puis, après ajustement, devrait leur assurer un meilleur taux
de rendement. A terme, la baisse du nombre d'exploitations agricoles et un
usage plus rationnel des intrants doivent assurer un revenu convenable aux
agriculteurs désormais compétitifs sans aide directe.
Les différents acteurs britanniques concernés par la PAC
(ministère de l'agriculture, organisations agricoles, institut de la
consommation, associations de protection de l'environnement) ont une position
très convergente. Ils sont unanimement pour une réforme qui fasse
évoluer l'économie des produits agricoles vers le marché.
Ils réclament donc l'abandon du soutien par les prix, la fin des
restitutions à l'exportation et des droits à l'importation, ainsi
que l'abolition des mesures de contrôle de l'offre.
La question des compensations ou de l'aide à l'ajustement suscite plus
de divergences dans la réponse proposée. Mal nécessaire
toléré de manière transitoire pour certains, ou
complément indispensable de la réforme pour d'autres, tous se
rejoignent cependant pour appeler de leurs voeux un système d'aides
directes découplées de la production.
Les divergences de position entre Britanniques portent essentiellement sur
l'utilisation des économies réalisées par la fin du
soutien par les prix.
Le ministère de l'agriculture
(MAFF) est satisfait des
propositions faites dans Agenda 2000. Il souhaiterait que les mesures
soient plus radicales et plus rapides, dans le sens d'une forte
évolution libérale, surtout dans le domaine du lait et de la
viande bovine. D'une manière générale, il souhaite que les
paiements directs soient découplés de la production et compensent
partiellement la baisse du prix d'intervention. Il souhaite que les taux des
aides soient fixés pour trois ans. En outre, le ministère
souhaite une réforme de l'OCM ovine avec une baisse de 40 % sur
cinq ans des prix de base, compensée par une prime
découplée, à taux unique.
Le MAFF est très réservé sur la modulation des aides
proposée par l'Agenda 2000. Il est tout à fait opposé
au plafonnement individuel de l'ensemble des aides directes, qui serait
hautement discriminant et contraire à l'esprit de la réforme qui
consiste à encourager les agriculteurs à être
compétitifs. La proposition selon laquelle les Etats pourraient
introduire une modulation au niveau national, dans le cadre de règles
communément admises, pourrait être à son sens
envisagée.
La dernière déclaration du secrétaire d'Etat britannique
confirme cette démarche très " libérale ". Il
s'est notamment déclaré favorable aux propositions de baisse des
prix, préconisant une diminution de 30 % pour les produits
laitiers, et la création d'enveloppes budgétaires nationales. Il
a réclamé des aides directes temporaires et moins
élevées, ainsi qu'une date d'expiration du régime des
quotas laitiers.
Pour la National Farmers' Union (NFU),
principal syndicat agricole
regroupant 1.200.000 membres, il est indispensable de réformer la
PAC dans la perspective des prochaines négociations de l'OMC. Il n'y
aurait pas d'alternative à la baisse des prix communautaires pour
s'aligner sur des cours mondiaux.
La NFU souhaite que la prochaine réforme de la PAC anticipe cette
évolution vers une agriculture compétitive en diminuant le
soutien par les prix et en supprimant les mesures de contrôle de l'offre
(quotas et gel des terres).
Elle estime que des aides directes compensatoires doivent aider les
agriculteurs dans la période de transition vers une agriculture plus
compétitive. A terme, la baisse de revenu des agriculteurs sera
compensée par la diminution du nombre d'exploitations. Cette
concentration des exploitations, déjà largement commencée
au Royaume-Uni, apparaît comme inéluctable pour la NFU et va de
pair avec la modernisation de l'agriculture.
Les agriculteurs britanniques s'estiment prêts à affronter la
concurrence et pensent pouvoir prendre des parts de marché là
où la demande de produits agricoles est croissante (Asie,
Amérique du Sud).
Face au projet de l'Agenda 2000, la NFU salue l'effort de diminution des
prix d'intervention. Elle s'oppose au plafonnement des aides qui est à
son sens contraire à l'évolution vers des grandes exploitations
compétitives (cinq adhérents de la NFU, dont deux
particuliers, reçoivent déjà plus de 1 million de
livres d'aide directe). De plus, elle est contre le conditionnement des aides
(" cross compliance ") au respect de normes environnementales. Elle
estime qu'il faut avoir une politique environnementale spécifique et ne
pas donner deux objectifs différents à une même politique.
Enfin, elle pense que la dégressivité des aides directes ne
pourra être envisagée que dans le cadre d'un accord
multilatéral avec les principaux pays tiers exportateurs.
Enfin, une priorité de la NFU est de faire en sorte que la
réforme de la PAC ne pénalise pas les filières
économiques britanniques liées à l'agriculture. La NFU
n'envisage qu'une seule alternative aux propositions de la Commission : la
maîtrise de la production, (augmentation de la jachère, diminution
des quotas), qui, selon elle, freine le rapprochement vers les prix de
marché.
b) Une orientation jugée plutôt favorable sous réserve de quelques modifications
Les
Pays-Bas
sont globalement favorables aux propositions du " Paquet
Santer " mais restent vigilants sur certains points : ce pays,
deuxième ou troisième exportateur mondial de produits
agro-alimentaires, est très dépendant de ses
débouchés extérieurs. Devenu contributeur net au sein de
l'Union Européenne, les Pays-Bas ont placé la question agricole
au coeur du débat public.
La réflexion menée par le ministre néerlandais se
situe dans un contexte national spécifique, caractérisé
par trois contraintes majeures :
- l'avance technique de l'agriculture néerlandaise sur ses
partenaires Européens s'est considérablement réduite ces
dernières années ;
- des contraintes environnementales fortes pèsent de plus en plus
lourdement sur les coûts de production dans des secteurs aussi
différents que l'horticulture sous serre ou l'élevage hors sol.
Cette évolution se traduira, dans les années à venir, par
une réduction du cheptel porcin néerlandais et une
délocalisation partielle des cultures sous serres vers le nord ou le sud
du pays ;
- un assainissement des finances publiques qui se traduit par une
diminution des soutiens aux secteurs productifs, entre autres agricole et une
plus grande responsabilisation des différents acteurs économiques.
La réforme " Mac Sharry " a eu un impact globalement
défavorable sur les retours du budget communautaire en faveur des
Pays-Bas, les versements à son profit diminuant de 38 %. Ils sont
donc devenus le deuxième pays contributeur net au budget communautaire
après l'Allemagne et le
premier contributeur net par habitant
.
Cette situation explique que le Gouvernement néerlandais, quel qu'il
soit, doive rester très réservé vis-à-vis de tout
projet de dépense nouvelle, et très demandeur d'une
réforme du financement des politiques communes.
Cette attitude a une conséquence directe sur le devenir de la PAC :
alors que les Pays-Bas adoptent sur de très nombreux dossiers
Européens (Conférence intergouvernementale, Euro...) des
positions voisines de celle de l'Allemagne, La Haye montre, au contraire de
l'Allemagne, une grande prudence sur les élargissements à venir,
demandant que l'Union agisse sans hâte et -cela concerne tant les fonds
structurels que la PAC- que de longues périodes de transition soient
ménagées, sur le modèle de ce qui avait été
appliqué il y a dix ans à l'intégration de l'Espagne et au
Portugal.
Les objectifs de la politique agricole néerlandaise pour les
années à venir sont une plus grande responsabilisation des
agriculteurs, une restructuration autour des plus performants ainsi qu'une
orientation accrue de l'agriculture vers le marché et une meilleure
prise en compte de l'espace rural. Pour les autorités
néerlandaises ces dernières options devraient également
guider les évolutions et les choix en matière de politique
agricole commune.
Les Pays-Bas ont le mois dernier salué la " bonne
orientation " du projet de Bruxelles.
Ils reconnaissent la
nécessité de procéder à des changements, à
la veille de l'élargissement de l'Union Européenne et du prochain
cycle de négociations de l'OMC relatif à la libéralisation
des échanges. La volonté exportatrice des autorités
néerlandaises les conduit à prôner un rapprochement
à terme des prix Européens et des prix du marché mondial,
accompagné d'une compensation partielle des baisses de revenu des
agriculteurs Européens par des aides directes, qui pourraient être
elles-mêmes subordonnées à des contreparties
environnementales. Ces nouvelles orientations devaient être suivies sans
dérapage des dépenses communautaires.
Ce pays considère que la baisse des prix agricoles est la seule option
sérieuse pour la PAC après l'an 2000, pour éviter un
renforcement de la maîtrise de la production.
Une aide directe aux revenus est jugée acceptable, à la condition
d'un traitement uniforme de tous les agriculteurs. Bien que
M. Van Aartsen, Ministre de l'agriculture, soutienne la Commission
dans le choix d'une politique plus libérale, il juge que le mode de
compensation proposé de la baisse des revenus agricoles ne convient pas
; la compensation devant à son sens être proportionnelle à
la production totale, faute de quoi les pertes des agriculteurs
néerlandais seraient plus fortes que celles de leurs collègues
Européens. Ainsi, la perte du revenu doit être calculée par
secteur et par pays. La compensation doit représenter un certain
pourcentage de cette perte, les Etats-membres devant avoir la liberté de
la répartir eux-mêmes entre leurs agriculteurs, dans les limites
d'un cadre fixé par l'Union Européenne. Une compensation
proportionnelle à la production est jugée logique, du fait que
tous les producteurs seront confrontés à des baisses de prix.
Le ministre néerlandais n'est
pas prêt à accepter de
dégradation de la position financière néerlandaise
face aux versements de l'Union Européenne, à la suite de
compensations de baisses de prix. Il a, de plus, marqué sa ferme
opposition à l'augmentation des quotas et à la baisse
supplémentaire des prix de 5 % envisagée dans le secteur
laitier. Il s'est dit, en outre, préoccupé par le fait que
l'éleveur de veau doive supporter la majeure partie de la
réduction des prix de soutien de la viande bovine.
M. Jozias Van Aartsen souhaite par ailleurs une compensation accrue pour le
producteur de fécule de pommes de terre (produit d'une grande importance
aux Pays-Bas) qui aurait plus à perdre à la réforme que le
cultivateur de céréales.
Les organisations agricoles
sont beaucoup plus critiques que le
Gouvernement. Le principal syndicat agricole néerlandais (LTO)
prévoit une
forte dégradation des revenus
des exploitants
agricoles
si la proposition de la Commission était adoptée en
l'état.
Il trouve injuste que l'agriculture soit le seul secteur qui
doive, dans l'Agenda 2000, supporter la charge budgétaire
liée à l'élargissement de l'Union Européenne et
à la réforme des fonds structurels.
Le LTO
s'oppose
à ce que certaines
actions structurelles
(notamment les objectifs 5a et 5b) soient
financées sur le budget
agricole.
Concernant le
secteur laitier, le LTO est très réticent
sur le principe d'une
prime à la vache laitière
qui ne
tiendrait
pas compte du rendement par vache laitière.
Par ailleurs, le LTO s'interroge sur l'absence, dans l'Agenda 2000,
d'étude sur l'avenir des productions des PECO et leurs
conséquences sur les secteurs de productions communautaires.
Le LTO est également attaché au rôle multifonctionnel de
l'agriculture. En matière d'objectifs à atteindre pour
l'agriculture (compétitivité, environnement,
multifonctionnalité...), le LTO souligne les limites engendrées
par une politique unique.
La réflexion sur le découplage est
ainsi engagée.
Le LTO observe également la plus grande prudence quant au coût
budgétaire des mesures envisagées par la Commission.
L'Autriche
, composée de petites exploitations familiales d'une
moyenne de 13 hectares, dont 35 % situées en zone de montagne,
défend la
multifonctionnalité de l'agriculture
(production, activité rurale, paysage, environnement,
bio-énergie, agriculture biologique, agri-tourisme). Elle est donc
très attachée aux mesures d'accompagnement de la réforme
de la PAC.
Ce pays a souvent modifié ses positions durant ces premiers mois de
négociations. Dans un premier temps hostile, il s'est montré peu
à peu plus favorable au projet de la Commission. Après un examen
détaillé, il a réalisé que les diverses aides
compensatoires seraient favorables à ses agriculteurs, qui travaillent
plutôt en secteur extensif (en lait ou en viande) et dont les structures
d'exploitations sont petites et familiales (et à faible rendement). En
outre, il voit d'un bon oeil la possibilité de moduler les aides en
fonction de critères environnementaux et de critères locaux (la
montagne par exemple). L'Autriche souhaite que les pertes de revenus
liées à la baisse des prix soient pleinement compensées,
et que les aides soient pérennisées afin qu'elles ne soient pas
remises en question par l'OMC. Les propositions de la Commission
présente également l'avantage de développer la politique
de l'espace rural qui constitue une priorité pour le Gouvernement.
L'Autriche souhaite néanmoins peser sur le Commissaire Fichler afin
d'orienter les propositions de la Commission vers un modèle agricole
Européen.
Les nouvelles propositions de la Commission ont ensuite entraîné
une réaction à nouveau très réservée de ce
pays. Le ministre autrichien a, en effet, demandé, au mois de mars
dernier, à la Commission d'adapter son projet pour parvenir à une
réforme " supportable ". M. Wilhelm Molterer, ministre de
l'agriculture, a récemment jugé
" incompréhensible " l'ampleur des baisses de prix
préconisées et a réclamé des compensations
intégrales.
Signalons qu'il est difficile au Gouvernement autrichien de s'opposer au projet
de M. Fischler, qui appartient à la majorité politique qui
dirige actuellement ce pays.
Dans l'ensemble, le " Präsidentenkonferenz der Landwirtschaftkammen
Osterreichs " (PLO) conduit une
analyse très critique
des
propositions de la Commission Européenne, considérant qu'elles
conduisent à une baisse du revenu des agriculteurs.
Même si le PLO indique partager avec la Commission Européenne
l'objectif essentiel d'assurer le revenu des agriculteurs et de leur famille,
il souligne en revanche la nécessité de considérer
davantage les agriculteurs comme des occupants et des aménageurs de
l'espace rural.
Il estime que les baisses de prix compensées par des aides directes,
dépendantes du budget communautaire, n'ont aucune raison d'être et
qu'elles ne résoudront pas les problèmes auxquels va être
confrontée l'Union Européenne.
Le PLO regrette que l'Union Européenne propose de baisser les prix
intérieurs pour les rapprocher du niveau des prix mondiaux, sans prendre
en compte le niveau de compétitivité des agriculteurs
Européens. En outre, il déplore que l'Union Européenne ne
se donne pas de marge de négociation en vue des discussions au sein de
l'OMC.
IL considère, de plus, que les baisses de prix proposées par la
Commission Européenne sont telles qu'une pleine compensation ne serait
pas supportable par le budget Européen. En parallèle, il fait
valoir qu'il n'est pas possible de demander aux agriculteurs de remplir des
objectifs croissants en matière d'environnement et de protection des
animaux et, dans le même temps, d'introduire le principe du plafonnement
des aides ou celui de l'instauration de nouvelles taxes sur la production, dans
le but de réduire les paiements compensatoires, d'autant que le PLO
craint que les compensations ne soient de plus en plus remises en question et
dénoncées comme subventions aux agriculteurs, augmentant ainsi
fortement la dépendance des exploitations.
En matière de modulation des aides, le PLO souhaite, avant de se
prononcer, attendre des propositions plus détaillées de la
Commission Européenne.
Enfin, le PLO estime qu'il n'y a aucune nécessité de changement
radical de la PAC, mais qu'il faut poursuivre le développement des
instruments actuels, simplifier les règlements et renforcer les liens
entre la politique de l'espace rural, l'agriculture et la
forêt.
c) Une approche pragmatique : entre incertitude et réserve
Il est
très difficile de classer les pays ayant adopté une attitude
pragmatique dans une catégorie particulière, notamment parce que
leur position a évolué fortement durant les six derniers mois et
qu'ils ne se sont pas encore prononcés sur l'ensemble de la
réforme.
La
Grèce
, initialement très opposée à
l'Agenda 2000, se concentre désormais sur deux ou trois points,
rendant assez imprévisible sa position sur l'ensemble du projet. Elle
déplore principalement l'approche différenciée
adoptée pour les
produits méditerranéens
(huile
d'olive et tabac notamment) et pour les autres produits agricoles. Elle
regrette l'absence " d'un paquet unique pour les productions du Nord et du
Sud ". En effet, la Grèce indique que les secteurs des cultures
arables, de la viande bovine et du lait sont voués à obtenir la
part la plus importante de l'effort communautaire, tandis que les secteurs de
l'huile d'olive, du tabac et du lin sont peu pris en compte dans la
réforme de la PAC. De même, les petites exploitations seront,
estime-t-elle, lésées par rapport aux grandes exploitations dans
les secteurs visés.
Récemment, M. Stéphane Tzoumakas, ministre de
l'agriculture, a demandé une augmentation des ressources propres de
l'Union Européenne, une augmentation du quota laitier et de la
quantité de production d'huile d'olive prévue pour la
Grèce.
La position de
l'Italie
est tout à fait originale. En effet, les
réactions italiennes, tant des pouvoirs publics que des professionnels,
sont à ce jour, du moins officiellement, assez négatives.
Néanmoins, l'Italie paraît désireuse d'appuyer le contenu
des propositions de la Commission. Faut-il y voir le souhait
de peser le
plus et le mieux possible dans la négociation afin de ne pas
apparaître comme un adversaire déterminé de la
réforme de la PAC
?
Les conséquences de la réforme de la PAC de 1992 pour ce pays
sont en partie à l'origine de cette démarche. En effet, cette
réforme s'est traduite en Italie par une diminution des aides
communautaires. Tandis que les dépenses totales du FEOGA-Garantie sont
passées de 31,3 milliards d'écus en 1992 à
39,1 milliards d'écus en 1996, soit une progression de 24,9 %,
les sommes revenant à l'Italie sont passées de 5,1 milliards
d'écus en 1992 à 4,2 milliards d'écus en 1996
(3,4 milliards d'écus en 1995), soit une chute de 17,6 %.
Les professionnels expliquent cette évolution par les changements
intervenus dans la PAC en 1992 et, notamment, par l'introduction des aides
compensatoires en faveur des grandes cultures. Ce dernier secteur, qui
bénéficiait de 10,2 milliards d'écus en 1992, soit
32,8 % des crédits du FEOGA-Garantie, a reçu
16,4 milliards d'écus en 1996, soit 49 % des crédits du
FOEGA-Garantie.
Pendant la même période, l'Italie, troisième producteur
agricole de l'Union Européenne, a constaté que la part des
dépenses du FEOGA-Garantie allant à l'huile d'olive, aux fruits
et légumes, au vin et au tabac s'est fortement réduite, passant
de 17,1 % en 1992 à 13,9 % en 1996.
Dans la négociation de l'Agenda 2000, les Italiens souhaitent
ainsi se montrer très pragmatiques et défendre un meilleur taux
de retour en faveur de l'agriculture italienne.
Très hostiles au régime des quotas dans le secteur laitier
qui bloque le développement de la production nationale, qui ne couvre
que 87,9 % des besoins domestiques,
les Italiens plaident pour
plusieurs aménagements substantiels de l'actuelle proposition de
réforme
:
- augmentation du quota alloué à l'Italie ;
- possibilité de transférer la partie du quota italien
" ventes directes " inutilisé sur le quota " ventes aux
laiteries " ;
- possibilité d'exclure du régime des quotas laitiers les
quantités de lait produites pour la fabrication de fromages à
appellation d'origine contrôlée (Parmiggiano, Grana Padane...). A
cet égard, les Italiens sont prêts à renoncer aux
restitutions dont bénéficient ces fromages sur certaines
destinations ;
- octroi de quotas supplémentaires pour les zones
défavorisées et les jeunes agriculteurs.
En matière de
viande bovine
, face à la proposition de la
Commission qui maintient les critères de densité à
l'hectare et le plafond d'animaux éligibles aux primes par exploitation,
l'Italie réclame une plus grande mise en oeuvre du principe de
subsidiarité pour la répartition des droits à prime
alloués à chaque Etat membre.
Les Italiens souhaitent donc sauvegarder leur modèle
d'élevage
intensif
très spécifique et pour lequel ils n'envisagent pas
de solution alternative.
Enfin, dans le secteur des
céréales
, les Italiens sont
très inquiets des répercussions du découplage des aides,
c'est-à-dire de l'instauration d'une prime unique pour les grandes
cultures. Rappelons que l'Italie, avec un taux de couverture agro-alimentaire
de 61 % (comme l'Allemagne et le Royaume-Uni), ne partage pas les
intérêts des pays exportateurs nets sur le marché mondial.
Par ailleurs, M. Pinto, ministre de l'agriculture, déplore que
l'Agenda 2000 soit muet sur les
productions
méditerranéennes
. Il demande avec vigueur qu'intervienne une
réforme des OCM du tabac, de l'huile d'olive, du vin et du riz et en
attend un rééquilibrage des dépenses communautaires en
faveur des productions et des producteurs méditerranéens.
Les principales organisations professionnelles italiennes (Coldiretti,
Confederazione italiana Agricoltori et Confagricoltura) sont plus
réservées que les pouvoirs publics. Elles estiment inacceptable
le fait que l'Agenda 2000 ne traite pratiquement pas des productions
méditerranéennes, aussi bien en termes de mesures que de retours
budgétaires. Elles s'opposent globalement aux propositions agricoles
contenues dans l'Agenda 2000 et demandent une augmentation du retour
budgétaire au bénéfice de l'Italie.
d) Une opposition globale aux propositions de la Commission
Plusieurs pays s'opposent globalement à la philosophie
de la
baisse des prix proposée par Commission Européenne.
Le
Luxembourg
n'a pas caché se triple
préoccupation : les nouvelles réductions de prix
proposées vont trop loin pour pouvoir être absorbées, la
compensation est insuffisante et l'octroi de quotas laitiers est
inéquitable. Ce dernier point fait référence à la
hausse des quotas des régions montagneuses ou
périphériques nordiques (dont est évidemment exclu le
Luxembourg).
Le ministre de l'agriculture, M. Fernand Boden, est le premier
délégué a avoir indiqué que la proposition lie
l'agriculture à la protection de l'environnement est très
impopulaire dans les milieux ruraux, qu'elle représente un fardeau trop
lourd pour l'agriculteur et qu'elle est une source de tâches d'ordre
administratif supplémentaires.
L'agriculture finlandaise
se caractérise par des coûts de
production élevés et un élevage principalement laitier.
Avec son entrée dans l'Union Européenne, l'agriculture
finlandaise a subi le choc de la PAC (baisse des prix) et de la concurrence des
productions communautaires.
Trois ans après l'adhésion
, la production a peu
changé, mais la baisse du revenu agricole intervenue en 1996 devrait se
poursuivre avec celle des aides transitoires.
L'avenir du secteur agricole et agro-alimentaire finlandais est donc
incertain
, notamment dans la perspective de la fin des aides transitoires
en 2000. C'est pourquoi :
-
sur le plan général
, compte tenu de ses handicaps
particuliers et de ses coûts de production élevés,
la
Finlande demande un traitement spécifique
dans le cadre de la PAC et
des fonds structurels ;
-
sur le plan sectoriel
, la Finlande critique le fonctionnement
actuel des
primes végétales
, basées sur des
rendements de référence qui soutiennent davantage les
régions disposant d'avantages naturels comparatifs. Elle est, par
ailleurs, attachée à la
préservation du régime
de quotas laitiers
et plaide pour
un dispositif favorisant la production
bovine extensive
.
En outre, elle approuve la proposition de la Commission sur la
dégressivité des " aides OCM " par exploitations,
mesure qui permet d'orienter les aides en faveur des régions de
production les plus défavorisées. Il est également
important à son sens que les aides versées par l'Union
Européenne puissent être complétées à
l'avenir par des aides nationales, si nécessaire.
D'une manière générale, le Central Union of Agricultural
Producers and Forest Owners (MTK) constate que les bénéfices
annoncés de l'adhésion ne se sont pas confirmés. Les
niveaux d'aides et de prix sont demeurés inférieurs à ceux
qui avaient été annoncés, la baisse des prix agricoles
étant le facteur le plus lourd de conséquence pour l'agriculture
finlandaise.
Le MTK juge
inacceptable
le projet de réforme de la PAC contenu
dans l'
Agenda 2000.
Alors que l'adhésion de la Finlande avait
déjà engendré une baisse des prix agricoles du
marché intérieur de 40 %, le niveau de soutien prévu
par la réforme va encore accentuer les difficultés des
producteurs finlandais, notamment dans le secteur des céréales et
de la viande bovine.
Le MTK estime que la proposition agricole de la Commission conduit à une
perte pour l'agriculture finlandaise de 500 millions de FIM et risque de
faire disparaître toute motivation de l'exploitant finlandais. Les prix
obtenus sur le marché ne couvriraient plus les coûts variables de
production, en particulier dans le secteur des
céréales
.
L'essentiel des pertes de revenu serait endossé par le secteur des
cultures arables, et le secteur
oléagineux
connaîtrait les
difficultés les plus graves.
Par ailleurs, le MTK souligne que la Commission Européenne ne propose
pas de mesures concrètes
pour les régions qui doivent
faire face à des
handicaps climatiques.
Le MTK considère
qu'il n'est pas raisonnable, ni même possible, de pratiquer une politique
agricole en tous points identique sur l'ensemble du territoire de l'Union
Européenne.
Dans l'ensemble, la Finlande considère que le projet de la Commission ne
va pas "
dans le bon sens
". Le premier ministre finlandais,
M. Paavo Lipponen, tout en reconnaissant l'utilité d'une
réforme de la PAC, a demandé à Bruxelles d'aménager
les propositions de réforme de la PAC pour tenir compte des
difficultés spécifiques de son pays. Il souhaite une compensation
intégrale pour les pertes de revenu qui résulteront de la mise en
oeuvre de ce projet.
De la réponse de Bruxelles sur la reconnaissance de la place
particulière de l'agriculture finlandaise au sein de l'Europe,
dépend la réaction finlandaise.
Le
Portugal
a manifesté son désaccord avec les
propositions de la Commission. M. Fernando Gones Da Silva, ministre de
l'agriculture, a précisé que les agriculteurs portugais avaient
les revenus les moins élevés de la Communauté et qu'ils
recevaient un soutien très faible dans l'ensemble. En outre, le Premier
ministre, M. Antonio Anterres a insisté surtout sur le fait que les
négociations entre les Quinze sur la réforme des fonds
structurels, proposées parallèlement par la Commission, seront
longues et difficiles.
Avec 2,1 % de la population active employée dans l'agriculture, la
Belgique
est l'État membre où cette proportion est la plus
faible.
Contributrice nette au budget de l'Union et de la PAC, l'agriculture belge a
reçu, au titre du FEOGA-Garantie, 1.146 millions d'écus
(7,5 milliards de francs), soit un taux de retour qui classe le pays au
11e rang communautaire pour l'exercice 1996.
Très attachée à la construction communautaire en
général et à la PAC en particulier, la Belgique a
été un allié précieux lors des négociations
du GATT. Elle est aujourd'hui particulièrement opposée à
toute renationalisation des politiques communes, qui lui fait craindre des
distorsions de concurrence.
Elle a rappelé récemment quels devaient être les objectifs
de la production agricole : dans un cadre de développement durable,
répondre aux exigences du consommateur, lui assurer la
sécurité alimentaire et préserver l'environnement. D'un
point de vue économique, la production agricole doit rechercher une
meilleure intégration à la filière agro-alimentaire.
L'agriculteur doit être au centre de la production alimentaire en tant
que partenaire et non comme simple fournisseur.
Très critique, la Belgique estime l'Agenda 2000 et les processus
d'élargissement
prématurés par rapport aux
réformes institutionnelles
qu'il serait urgent de faire pour
améliorer le fonctionnement interne de l'Union Européenne.
Elle s'interroge sur le bien-fondé, du point de vue stratégique,
d'une réforme de la PAC
avant le prochain cycle de l'OMC
. Plus
généralement, elle craint pour la pérennité de son
agriculture. La Belgique s'inquiète des analyses et propositions
déjà très précises faites par la Commission, tant
sur les principales OCM et les questions budgétaires. Elle se montre
aussi très réservée devant la perte de revenu qu'induirait
la baisse des prix, compensée seulement partiellement.
Enfin, la Belgique craint que la réforme de la politique des structures
envisagée n'exclue les régions agricoles de tout soutien au
développement rural.
Lors du Conseil agricole du mois de mars dernier, M. Karel Pinxten,
ministre de l'agriculture, a évoqué "
une occasion
manquée
" et a repoussé la réforme
préconisée. Il a notamment qualifié les propositions
relatives à la viande bovine de "
tout à fait
négatives
". Il a précisé que l'impact de cette
réforme sur le revenu au niveau national (-10 à 15 % en
moyenne, -20 à 35 % pour les éleveurs de bovins) serait
"
indéfendable
".
Cette prise de position des pouvoirs publics est soutenue par l'Alliance
agricole qui juge "
désolant de constater que la Commission se
repose de plus en plus, en guise de justification, sur des accords
internationaux visant à organiser un retour vers le capitalisme
sauvage
".
En raison de ses spécificités
méditerranéennes
(vin, huile d'olive, fruits et
légumes) qui jouent un rôle en termes économiques,
d'emploi, d'occupation du territoire et de protection des sols,
l'Espagne
considère que, depuis son adhésion,
l'Union
Européenne
conduit et
réforme sa politique agricole
principalement pour les productions septentrionales.
Pour elle, ces secteurs (céréales, viande bovine, lait) font
l'objet d'adaptation assortie d'un financement budgétaire, alors que,
concernant les productions de type méditerranéen
, les
réformes des OCM sont entreprises selon le principe de la
neutralité budgétaire
(OCM fruits et légumes).
En raison de facteurs propres à l'Espagne
(95 % du
territoire espagnol relèvent des objectifs 1 ou 5b des fonds
structurels),
les financements Européens
, qui ont
contribué à faire évoluer les structures des exploitations
agricoles mais aussi des entreprises agro-alimentaires,
constituent donc
pour l'Espagne une priorité
. Elle sera donc particulièrement
vigilante à
négocier une contrepartie
(maintien d'un fonds
de cohésion)
à son accord sur l'élargissement aux
PECO,
dans le cas où un certain redéploiement du " Sud
vers l'Est " serait décidé pour les fonds structurels.
Le Gouvernement espagnol
a globalement une position défavorable
sur l'Agenda 2000, auquel il reproche son " incohérence ", la
non-prise en compte des produits méditerranéens et du principe de
cohésion.
L'incohérence résulte du caractère partiel de la
réforme proposée qui ne concerne que trois OCM touchant
principalement les pays du nord de l'Union ; en conséquence, toute
réflexion globale est jugée impossible.
En outre, une réforme de la PAC ne lui paraît pas urgente ou
utile, ni pour préparer le prochain cycle de l'OMC (il est
nécessaire d'attendre que les autres parties aient arrêté
leur position) ni en raison de l'élargissement (les aides de la PAC ne
bénéficieront pas aux nouveaux membres). L'état des
marchés ne justifie pas non plus, selon ce pays, une réforme
à court terme.
Les espagnols souhaitent que les budgets des fonds structurels et leurs
critères d'attribution aux quinze Etats-membres actuels soient
nettement séparés de ceux destinés aux nouveaux
adhérents. Le financement de la PAC et des fonds structurels pour les
membres actuels ne doit pas être menacé par le coût des
aides pré et post-adhésion pour les nouveaux membres : si
nécessaire, il faudra augmenter le plafond des ressources propres de
l'Union.
L'Espagne critique le choix de la réforme, c'est-à-dire
l'objectif de la compétitivité mondiale par une baisse drastique
des prix
. L'amélioration de la compétitivité passe par
l'amélioration des structures de production et de commercialisation, et
l'amélioration de la qualité des produits.
Pour l'Espagne, la qualité des produits, leur sécurité, le
respect de l'environnement, ont un coût : s'il n'est pas pris en
compte par les prix, il doit être totalement compensé par des
aides.
Le gouvernement s'oppose, en outre, au financement des nouvelles mesures
rurales par le FEOGA-Garantie : une politique et des budgets distincts
doivent demeurer en la matière.
De même, l'Espagne s'oppose totalement à la régionalisation
de la gestion de la PAC et au cofinancement proposés par l'Agenda 2000
pour des raisons de souplesse et de subsidiarité, jugeant que cette
dérive provoquerait une renationalisation de la PAC et des distorsions
de concurrence, au détriment des agriculteurs espagnols.
Au niveau budgétaire, le gouvernement pense que les nouveaux coûts
supportés par le FEOGA-Garantie selon l'Agenda 2000,
l'empêcheront de dégager des budgets suffisants pour les OCM. A
fortiori, l'Espagne déplore que les OCM des produits
méditerranéens soient réformées sans aucun moyen
budgétaire.
Dans l'ensemble, les organisations professionnelles espagnoles se sont
élevées contre les propositions agricoles de l'Agenda 2000
.
Ces organisations estiment que les propositions de la Commission conduiraient
à une discrimination à l'encontre des produits
méditerranéens et elles demandent un traitement équitable
pour tous les produits.
Selon l'ASAJA (qui fédère la plupart des organisations
sectorielles), la proposition de réforme de la PAC de la Commission
Européenne laisse entrevoir trois risques majeurs : la
renationalisation de la politique agricole, la déprofessionnalisation et
la fragmentation des exploitations.
La COAG (qui regroupe les petite et les moyennes exploitations) estime que
les propositions de l'Agenda 2000 sont hautement préjudiciables
pour l'agriculture
. Elle s'oppose notamment à la réforme du
mode de
financement du FEOGA-Orientation
: cette réforme risque
de nuire à l'agriculture ibérique en portant atteinte à la
compétitivité de cette dernière qui a besoin d'une
modernisation structurelle importante.
L'UPA (petits agriculteurs et pluriactifs) exprime des
préoccupations
sur la proposition de réforme de la PAC de l'Agenda 2000
,
notamment parce qu'elle laisse la porte ouverte à la possibilité
d'une renationalisation de la politique agricole.
L'Espagne s'oppose donc résolument à la réforme de la PAC
et à la doctrine qui la sous-tend. Selon le
ministre de
l'agriculture
, Mme Loyola de Palacio, les propositions de la
Commission négligent la dimension humaine, l'importance sociale et le
principe de " multifonctionnalité " de l'agriculture.
Mme de Palacio a déploré dernièrement la
" renationalisation " du budget agricole. Elle a estimé que
pour la première fois, le cofinancement par les Gouvernements nationaux
signifiait la fin de la solidarité, des difficultés accrues parmi
les Etats membres et des pratiques discriminatoires se traduisant par la fin de
l'intégration en Europe.
Rappelons que des membres de la mission sénatoriale se sont rendus en
Espagne au mois de février dernier afin d'analyser les relations entre
la France et l'Espagne dans le secteur des fruits et légumes. Le rapport
de cette mission préconise notamment le renforcement d'un axe
méditerranéen Européen dans ces secteurs et une
révision de l'OCM fruits et légumes
39(
*
)
.
La mission d'information s'est rendue en
Allemagne
au mois d'avril
dernier.
Elle a ainsi pu se rendre compte de l'importance de trois
éléments essentiels dans l'approche de ce pays ami sur la
réforme de la PAC : l'hétérogénéité
des structures entre les Länders de l'Est et ceux de l'Ouest, le poids du
fédéralisme et la diversité des positions sur les
orientations de cette réforme.
L'agriculture
d'Allemagne occidentale
est constituée d'un
grand nombre de petites exploitations agricoles (les exploitations à
temps plein font en moyenne 36 hectares) tandis que 60 % des
terres agricoles orientales
sont occupées par des exploitations
sociétaires d'une dimension moyenne de 1.100 hectares. Les
exploitations individuelles des deux parties de l'Allemagne ne se ressemblent
guère, puisque la dimension moyenne de celles de l'Est est de
150 hectares.
Ces deux agricultures se distinguent également par le statut juridique
des exploitations et des exploitants (familiale à l'Ouest à
85 %, salariée à l'Est à 83 %), le mode de
faire-valoir (exploitation en propriété à l'Ouest, en
fermage à l'Est), l'orientation des productions (intensive -surtout
élevage- dans les petites structures occidentales et grandes cultures
dans les structures orientales), et le marché foncier (la valeur
vénale des terres agricoles reste largement supérieure à
l'Ouest).
Le processus de restructuration dans les nouveaux Länders explique que
l'Allemagne soit le pays dont le volume de production croît actuellement
très rapidement.
Si producteurs et consommateurs s'accordent pour assigner à
l'agriculture une double fonction d'approvisionnement du marché national
(voire régional) et de préservation de l'espace rural, ils se
séparent sur la question des soutiens financiers.
De façon très idéologique, les puissantes organisations de
consommateurs récusent, au nom du libéralisme, la
pérennité des soutiens financiers aux agriculteurs.
Ceux-ci, soutenus par les autorités fédérales, adaptent
leur argumentaire en faveur de tels soutiens et font de plus en plus valoir le
lien qui doit exister entre de fortes contraintes environnementales de gestion
d'un espace très occupé donc rare, et les compensations
financières au profit des gestionnaires de cet espace.
Ce même argument est invoqué par le ministère
fédéral de l'agriculture pour récuser tout
démantèlement de la politique agricole dans le cadre notamment du
prochain cycle de négociation à l'OMC.
Enfin, le niveau significativement plus bas du revenu des actifs agricoles par
rapport aux autres secteurs économiques, s'il est dénoncé
par les organisations agricoles, ne leur permet pas moins de démontrer
que la redistribution par le biais des aides à l'agriculture est loin
d'être excessive.
La compréhension du fonctionnement des institutions allemandes et de la
position allemande sur la réforme de la PAC, suppose que l'on ait en
permanence à l'esprit
le caractère fédéral de
l'Etat allemand
.
Ainsi le ministère fédéral de l'agriculture, de
l'alimentation et de la forêt (également en charge des
pêches maritimes), s'il est le coordonnateur incontesté des
réflexions stratégiques et le porte-parole du secteur agricole au
sein du Gouvernement fédéral, doit très largement compter
avec les ministères de l'agriculture de chaque Land.
La plupart des dossiers liés à l'agriculture relève de la
double compétence de la Fédération et des Länder, ce
qui suppose au plan législatif, que les projets de loi soient
adoptés par le Bundestag (assemblée nationale -
majorité gouvernementale) et par le Bunderast (représentant les
Gouvernements des Länder - majoritairement dans l'opposition). La
recherche de solutions de consensus est donc une nécessité.
Au niveau fédéral, d'autres ministères traitent de sujets
ayant une dimension agricole :
- le ministère fédéral de la santé est
compétent en matière de denrées alimentaires d'origine
animale et suit par conséquent les affaires vétérinaires
relatives à l'hygiène des aliments ;
- le ministère fédéral de la justice gère les
appellations d'origine et les indications géographiques
protégées.
Rappelons que le budget du ministère fédéral de
l'agriculture, après avoir connu une lente croissante à la fin
des années 1980 pour atteindre 10 milliards de deutschmarks en
1990, a été revu à la hausse de 40 % en 1991 pour
tenir compte de la réunification. Actuellement il se monte à
12,1 milliards de deutschemarks pour 1997.
Au niveau des Länder, dans la plupart des cas, la répartition des
compétences entre départements ministériels reprend la
configuration fédérale, avec un ministère de l'agriculture
autonome. Il faut noter le regroupement dans certains Länder des
ministères de l'agriculture et de l'environnement
(Rhénanie-Palatinat, Saxe-Anhalt), des ministères de
l'agriculture et de l'aménagement du territoire (Schleswig-Holsteig),
des ministères de l'agriculture, de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (Rhénanie du Nord-Westphalie).
La mission sénatoriale, lors de son déplacement à Bonn,
a pu mesurer l'importance de la question des retours budgétaires pour
l'Allemagne et la difficulté de faire cohabiter, sur un même
territoire, deux agricultures si différentes que celle par exemple de la
Bavière et de la Saxe Anhalt.
En ce qui concerne les propositions de la Commission Européenne
sur la PAC, l'Allemagne n'a pas, du moins pour l'instant, de position
homogène tant au niveau interministériel qu'entre les
différents Länders.
Au sein de la coalition gouvernementale
, le ministre de l'agriculture,
M. Borchert, défend le principe du maintien d'un financement de la
PAC à un niveau élevé. Il estime non convaincantes les
justifications des propositions contenues dans l'Agenda 2000.
Selon lui, l'élargissement peut se faire en respectant les principes et
la réglementation de la PAC actuelle, avec une longue période de
transition.
Par ailleurs, les perspectives sur les marchés mondiaux, de la FAO, de
l'OCDE et des Etats-Unis, la croissance de la population mondiale et de la
demande solvable se révèlent plutôt favorables à
l'Europe.
M. Borchert considère que c'est une mauvaise tactique de
négociation que de revoir la position Européenne, définie
avec succès lors de la réforme de 1992, avant l'ouverture des
négociations à l'OMC. Il importe au contraire, selon la
Commission, de préparer ces négociations de façon à
ne pas se faire dicter la conduite de l'Europe. Il convient de définir
des objectifs et de les défendre de façon offensive. Sans
protection aux frontières, il est impossible de garantir une agriculture
sur tout le territoire et le maintien du monde rural. Pour cela,
M. Borchert estime qu'il faut aller plus loin que négocier
l'accès des marchés et de démantèlement des droits
de douane et faire valoir des standards internationaux en matière
d'environnement, d'hygiène, de protection des animaux qui satisfassent
les consommateurs allemands.
Pour le ministère de l'agriculture, le modèle Européen
doit donc être défendu à l'intérieur et hors de
l'Union Européenne. M. Borchert estime ainsi globalement qu'une
politique de baisse des prix communautairse ne s'impose pas.
La question du coût des mesures projetées par la Commission est
également particulièrement " brûlante ". En
effet, les propositions du paquet " Santer " conduiraient à
alourdir le coût de la PAC de l'ordre de huit milliards de Deutschmark
par an et surtout la contribution nette de l'Allemagne de 800 millions de
deutschemarks.
Par ailleurs, l'augmentation des primes et la baisse des prix ne sont pas
perçus comme des facteurs améliorant la
compétitivité de l'agriculture Européenne, au contraire.
Ceci dit, une évolution de la PAC est tout de même jugée
nécessaire dans les secteurs de la viande bovine et du lait.
M. Borchert considère déterminant de prendre des mesures qui
garantissent la qualité et l'origine pour répondre à la
demande d'information et de transparence du consommateur, en particulier
l'étiquetage des viandes bovines.
L'intervention permanente doit être ramenée à sa fonction
d'origine et n'être utilisée qu'à l'occasion de crises
exceptionnelles et le stockage privé est jugé inopérant.
Le ministre des finances, M. Waigel
-comme l'opposition
social-démocrate-, met l'accent sur la nécessité de
réduire la contribution allemande au budget communautaire, ce qui
suppose une réduction des dépenses agricoles.
Le ministre des affaires étrangères, M. Kinkel
,
plaide pour une réorientation de l'agriculture vers les marchés
internationaux et pour un démantèlement progressif des aides.
Sur le plan interrégional
, les ministres de l'agriculture des
Länder de l'Est récusent toute idée de plafonnement des
aides qui pénaliserait gravement les grandes structures agricoles
héritières des coopératives de l'ex-RDA. A l'inverse, la
Bavière et le Bade-Wurtemberg approuvent cette perspective de
plafonnement, ou du moins de dégressivité, qui permettrait
d'améliorer le taux de retour financier au profit des petites
exploitations familiales traditionnelles du sud de l'Allemagne.
En conséquence, l'Allemagne adopte pour l'instant une position
très générale
: elle conteste
l'opportunité d'une réforme basée sur une baisse
générale des prix. Seul le
secteur bovin, selon elle,
a
réellement besoin d'être réformé mais cette
réforme ne doit pas pénaliser l'élevage intensif.
L'Allemagne juge que
le contrôle de la production
plutôt que
la baisse des prix permettra d'adapter l'offre à la demande. Concernant
l'OMC, l'Europe ne doit pas se priver d'arguments avant la prochaine
négociation ; elle doit également apprendre à
défendre ses normes qualitatives et de sécurité
alimentaire.
Sur le plan sectoriel
, les Allemands souhaitent, notamment dans le
secteur laitier, renforcer les producteurs dynamiques. La réglementation
des quotas doit être ainsi plus flexible, en particulier en suspendant le
lien des quotas à la surface et faciliter ainsi les transferts de quotas
par le marché.
Tous s'accordent cependant pour estimer que la préservation de la
production laitière dans les zones difficiles doit rester un
élément important de la politique laitière et que la
réglementation des quotas doit y contribuer.
La poursuite du régime des quotas laitiers
après 2006 fait
l'objet de discussions. A la base, la baisse des prix de 15 %
compensée au moins partiellement par une prime proposée par la
Commission a mis en évidence que les quotas n'étaient pas une
garantie contre la baisse des prix même si certains producteurs se
laisseraient pourtant tenter par la prime. De plus, la chute des prix
institutionnels paraît totalement déphasée avec la hausse
actuelle des prix payés aux producteurs allemands, signe que
l'équilibre du marché Européen est enfin atteint. Tout se
passe comme si des signaux contradictoires incitaient les uns et les autres
à prendre position pour ou contre la poursuite du régime des
quotas.
Mais c'est surtout le régime de transfert de quotas et le coût des
droits à produire qui fait l'objet de contestations. Le coût des
quotas, ainsi que les systèmes de fermage, de location et de leasing
fortement développés Outre-Rhin, sont accusés de
bénéficier de plus en plus à des non agriculteurs et de
faire " grimper " les prix des quotas. Quant au lien à la
surface officiellement en vigueur en Allemagne, il est dans les faits largement
contourné par un marché des quotas à l'intérieur
des frontières de chaque région.
On peut cependant estimer qu'une majorité d'agriculteurs est favorable
au maintien des quotas et à la mise en place d'un marché
régionalisé des droits à produire, de façon
à éviter l'évasion de la production en dehors du
territoire des länders.
En matière de grandes cultures,
le principe même d'une
nouvelle réduction de prix est rejeté. En outre, la situation et
la compétitivité de la production d'oléagineux ne semblent
pas devoir être appréciées de façon aussi
négative de ce côté-ci du Rhin qu'en France. En revanche,
la question du plafonnement des aides ou de leur modulation est très
" sensible " même si le principe d'une solution flexible
permettant notamment de tenir compte des coûts de production et
évitant les distorsions entre secteurs de production, n'est pas
écarté.
En ce qui concerne la viande bovine
, curieusement, les responsables
allemands laissent entendre que le régime des primes bovines
proposé par la Commission est discriminatoire à l'encontre de
l'élevage intensif. Toutefois, l'orientation générale
convient à l'Allemagne : elle pourrait accepter une baisse du prix
d'intervention en raison du caractère jugé coûteux (sur le
plan budgétaire) et inefficace (sur les marchés) du régime
d'intervention. On peut toutefois s'attendre à une négociation
difficile concernant l'équilibre entre les différents types de
primes.
Pour la politique de développement rural
, l'Allemagne est
favorable au statu quo. Elle demande que les zones rurales ne relèvent
pas de l'objectif 2, qu'un financement par le FEOGA-Orientation soit
maintenu à l'intérieur des fonds structurels, et qu'un objectif
spécifique soit créé pour le développement rural
afin d'éviter la concurrence avec les zones urbaines et industrielles.
La mission sénatoriale a rencontré longuement le Deutsher
Bauernverband (DBV). Celui-ci reconnaît que des réflexions
stratégiques sont nécessaires du fait du prochain cycle de l'OMC
et de l'élargissement aux PECO, mais il souligne que les agriculteurs
allemands ont besoin de perspectives d'entreprise et qu'ils veulent recueillir
leur part de l'évolution générale des revenus.
Le DBV considère que les propositions agricoles de l'Agenda 2000 auront
des conséquences négatives sur les intérêts des
agriculteurs allemands et il reste très sceptique sur l'approche de la
Commission. Le DBV estime que les propositions de baisse de prix de la
Commission auront pour conséquence
une baisse du revenu des
agriculteurs allemands de 15 à 20 % en termes réels
. Il
réclame donc une
compensation
pour cette perte de revenu.
Les propositions risquent également, selon le DBV, d'affaiblir la
position de l'Union Européenne lors des négociations dans le
cadre de l'OMC et de compromettre des instruments d'une politique agricole
commune spécifique à l'Union Européenne.
En matière budgétaire,
le DBV s'inquiète du financement
par le FEOGA-Garantie de mesures de type structurel
et d'une partie des
coûts liés à l'élargissement.
Le DBV souligne le risque d'une dépendance croissante des agriculteurs
compte tenu de l'augmentation du poids des aides et des incertitudes qui
pèsent quant à leur pérennité.
Le plafonnement des aides et la possibilité d'établir un lien
entre ces aides et des exigences environnementales sont, selon le DBV, des
facteurs d'iniquité en terme de partage du soutien.
Dans l'ensemble, le DBV souhaite conserver le principe de la maîtrise de
la production.
S'agissant du
secteur laitier
, le DBV soutient l'introduction d'une
prime directe à la vache laitière, qui devrait enrayer les
évolutions négatives des prix et des revenus dans ce secteur. En
revanche, il estime que la baisse de prix et la suppression de la protection
extérieure constituent les prémices d'une sortie du régime
des quotas laitiers auquel le DBV est très attaché.
Le 30 mars dernier, M. Jochen Borchert, a annoncé qu'il
opposerait une " résistance absolue " aux propositions de la
Commission
. " L'Agenda 2000 pèse sur les contribuables et
les paysans " a-t-il estimé, affirmant que celui-ci provoquerait
à la fois une chute du revenu agricole de 10 % en moyenne, et
même 20 % dans certains cas, et une augmentation de
1,2 milliard de marks des paiements nets de Bonn à la
Communauté, qui atteignent 10 milliards.
"
Au lieu de diminuer les prix, il vaudrait mieux, comme ces
dernières années, limiter les quantités
produites
", selon M. Borchert, qui explique aussi que le fait de
limiter les compensations pour la viande bovine à 90 animaux par
exploitation va pénaliser les entreprises performantes, en particulier
celles des Länder de l'Est. Enfin, le ministre de l'agriculture
désapprouve l'idée de lier les aides directes au respect de
l'environnement, considérant que les efforts consentis en la
matière doivent être payés en sus.
Au mois d'avril dernier, l'Allemagne a dénoncé une nouvelle fois
les conséquences du projet de Bruxelles : augmentation des
dépenses avec des " effets très importants " sur le
contribution nette de Bonn au budget communautaire, diminution du revenu,
aggravation de la situation dans les zones rurales, blocage de la
compétitivité, accroissement de la technostructure et
dépendance de plus en plus forte à l'égard des aides
publiques.
Avec une production agricole fortement dominée par les élevages
bovin et laitier, un taux de couverture agro-alimentaire record au sein de
l'Union (278 %), une production bovine exportée à 90 %,
une place prépondérante de l'agriculture extensive dans
l'économie et sur le territoire, les orientations suivies par
l'Irlande
au niveau communautaire sont claires : le pays se
satisfait de la réforme de la PAC de 1992 qui lui attribue 23 % des
crédits de l'OCM bovine (pour un cheptel qui représente 8 %
du cheptel communautaire) et qui a institué des primes à la vache
allaitante et à l'extensification correspondant bien à ses
spécificités nationales. Il est très attentif à ce
qu'un changement de cet équilibre ne se produise pas à ses
dépens.
Bénéficiant de coûts de production relativement bas,
l'Irlande est cependant dépendante de soutiens communautaires
pour assurer le revenu de ses agriculteurs. Le gouvernement est donc
particulièrement attentif au maintien de ses retours budgétaires
communautaires (1,7 milliard d'Ecu au titre du FEOCA-Garantie, auxquels
s'ajoutent les fonds au titre de l'objectif 1 des fonds structurels), pour
une contribution de 700 Mecu en 1996) qui ont permis le
développement économique et agricole irlandais
.
L'Irlande juge une nouvelle réforme de la PAC
nécessaire. Si l'Irlande accepte une certaine baisse des prix de
soutien, elle demande que ces mesures ne se traduisent pas par une perte de
revenu des agriculteurs.
Ainsi, l'Irlande souhaite que cette baisse de prix
soit intégralement compensée.
S'estimant bien placée pour bénéficier du marché
mondial,
l'Irlande
exige néanmoins que les
spécificités
de l'élevage irlandais (cheptel allaitant
extensif)
soient prises en compte
. Pour le lait, la même logique
de compensation intégrale est avancée.
Les organisations agricoles irlandaises
(Irish Famer's Association
(IFA) et Irish Creamery Milk suppliers Association (ICMSA) affichent des
positions divergentes.
Si l'IFA souligne les dangers que représentent les orientations
proposées pour la PAC, au contraire, l'ICMSA semble satisfaite des
propositions de la Commission.
C. LA RÉACTION FRANÇAISE
Les
propositions de la Commission Européenne ont entraîné
depuis près d'un an des réactions nombreuses des pouvoirs publics
et des organisations agricoles français.
Ceux-ci remettent en cause
dans l'ensemble le bien fondé du projet de Bruxelles
.
La mission sénatoriale tient à saluer tout
particulièrement l'engagement de M. Jacques Chirac,
président de la République, dans ce débat qui concerne non
seulement l'agriculture, mais, au-delà, les fondements de notre
société à l'aube du XXIe siècle.
Par ailleurs, de multiples instances non agricoles ont souhaité apporter
leur contribution au volet d'Agenda 2000 relatif à la PAC,
démontrant, s'il en était besoin, les implications de cette
réforme sur l'ensemble de la société.
1. Les fortes réserves des pouvoirs publics
a) L'engagement du Président de la République pour préserver l'avenir de la politique agricole commune
Le
Président de la République a toujours marqué son profond
attachement aux questions agricoles. Il a, au cours de ces derniers mois,
notamment lors de sa visite au salon de l'agriculture, manifesté son
souhait de ne pas hypothéquer l'avenir de l'agriculture
française, les négociations sur la réforme de la PAC
mettant en jeu la place de la France et de l'Europe dans le monde.
Le Conseil restreint qui s'est tenu à l'Elysée, le
vendredi 25 mars, a permis de dégager une
" identité d'approche " entre le Président de la
république et l'ensemble du Gouvernement contre les dernières
propositions de la Commission Européenne sur la réforme de la
PAC.
b) La position gouvernementale
Le
Gouvernement français a, dès le 16 juillet 1997,
réagi au document " Agenda 2000 " de la Commission
Européenne par un refus des propositions de la Commission.
Le 31 juillet, M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la
pêche, a diffusé un long communiqué dans lequel il a
effectué tout d'abord trois observations relatives à la
nécessaire concertation avant d'envisager toute évolution de la
PAC, à la non urgence de la réforme et à l'absence
d'études d'impact présentées par la Commission sur le
revenu des agriculteurs. Il a fait état, en outre, de ses
préoccupations sur le fondement même de cette réforme. Le
communiqué se termine pas la phrase suivante : "
en
conclusion, ces propositions sont à discuter et elles sont discutables
dans tous les sens de ce mot
".
Au mois de septembre, lors du conseil national de la FNSEA, M. Louis Le
Pensec a de nouveau abordé la réforme de la PAC.
Il a évoqué la réforme de la PAC. Il a rappelé son
désir de voir les ministres de l'agriculture garder la maîtrise
des débats sur les questions agricoles, même si le " Paquet
Santer " lie la réforme de la PAC au budget et à
l'élargissement de l'Union Européenne.
En ce qui concerne les propositions de la Commission, il a fait part de son
refus d'agir dans la perspective de la discussion sur les accords OMC. Il a
souligné que rien ne permet d'affirmer que la stratégie
adoptée par la Commission soit la meilleure et qu'il est souhaitable
qu'elle soit discutée au niveau des représentants des
Gouvernements de l'Union Européenne.
Il a rappelé l'importance stratégique de l'alimentation pour
l'Europe et évoqué l'impossibilité pour certaines
productions (lait, viande) de se rapprocher des prix internationaux face
à des pays comme l'Australie ou la Nouvelle Zélande.
Procédant à un examen détaillé des propositions de
la Commission, il a émis d'importantes réserves sur la
proposition de baisse des prix des céréales et son opposition
à la proposition concernant les oléagineux. Il a demandé
la révision des mesures projetées pour l'élevage. Enfin,
il a exprimé se désapprobation au sujet de l'orientation
proposée en matière de production laitière.
Il a donc appelé les organisations syndicales à participer
à l'élaboration de propositions alternatives.
Le ministre a rappelé, au Conseil de Bruxelles des 22 et
23 septembre, sa volonté de voir la PAC, non seulement permettre
à l'agriculture d'approvisionner les marchés Européens et
mondiaux, mais aussi prendre en compte des objectifs d'emploi et d'occupation
plus harmonieuse de l'espace. Pour y parvenir, il a souhaité que soit
favorisée la diversité des modes de production et que soient
mises en place des aides communautaires appuyant ces orientations, comme des
primes à l'hectare ou des primes à l'herbe.
Le ministre a émis le souhait que soient maintenues les dispositions
efficaces en ce domaine, citant en particulier les aides à
l'installation des jeunes agriculteurs et les aides aux zones
défavorisées ou de montagne.
Il a aussi réaffirmé la nécessité de respecter le
principe de subsidiarité pour optimiser les actions de
développement rural en rapprochant le citoyen des centres de
décision.
Le ministre a par ailleurs regretté le flou qui entoure la nature, les
modalités et les coûts financiers des actions envisagées
par la Commission pour conserver un tissu rural actif sur l'ensemble du
territoire communautaire.
Au mois d'octobre, lors de la visite du commissaire Franz Fischler à
Paris et du Conseil agriculture du 20 octobre, M. Louis Le Pensec a
précisé ses positions, sortant ainsi du flou entretenu depuis le
dépôt des suggestions de Bruxelles. Après avoir
rappelé que " les propositions de la Commission n'étaient
pas acceptables en l'état actuel et qu'elles devraient être
sensiblement modifiées ", le ministre a insisté sur
"
deux préalables fondamentaux
" : l'affirmation
de l'identité agricole de l'Europe et la nécessité de
disposer des moyens financiers nécessaires à la réforme de
la PAC dans la perspective du futur élargissement de l'Union
Européenne aux candidats d'Europe de l'Est.
Le ministre a défendu cinq grands axes devant servir de contours
à la position française sur la réforme de la PAC :
- la baisse des prix " n'est pas une panacée " pour
toutes les productions ;
- la prime unique grandes cultures compromettrait les soutiens en faveur
de l'élevage extensif ;
- il faut créer une " prime liée au sol " afin de
rééquilibrer les soutiens en faveur de l'élevage
extensif ;
- les quotas laitiers doivent être maintenus et " une
flexibilité additionnelle " doit être introduite afin
d'exporter plus facilement sur le marché mondial ;
- les Etats doivent pouvoir, dans un souci d'équité,
" octroyer davantage à certains agriculteurs et moins à
d'autres ".
Le ministre a eu d'ailleurs l'occasion de rappeler, à la demande de
nombreux sénateurs, et notamment du président Jean
François-Poncet, sa position vis-à-vis de la réforme de la
PAC lors du débat d'orientation pré-budgétaire sur
l'agriculture qui s'est tenu au sénat le 5 novembre 1997.
Lors du Conseil des ministres de l'agriculture à Bruxelles en
novembre 1997, M. Louis Le Pensec a considéré que
"
les propositions de la Commission ne paraissaient pas à la
mesure de l'enjeu de la réforme
". Il a ainsi souhaité
des amendements importants au projet de la Commission notamment pour la
production de viande bovine et le lait.
La France a signé à cette occasion avec treize de ses partenaires
un document destiné à préparer les travaux du Conseil
Européen de Luxembourg des 12 et 13 décembre sur
l'Agenda 2000 et fondé sur la défense de l'identité
agricole Européenne et le maintien de la ligne directrice agricole.
A l'issue de la présentation par la Commission de ses propositions de
règlement de la PAC en mars dernier, le ministre a regretté que
ce projet soit un simple " aménagement " des règles en
vigueur depuis 1992, consistant à accentuer la baisse des prix garantis
et à augmenter les compensations versées aux agriculteurs, dans
des conditions qui ne permettront pas de préserver les revenus.
Il a estimé que des propositions reposent sur une erreur d'analyse et
d'orientation. "
L'avenir de l'agriculture Européenne ne
réside pas dans la production de matières premières
à bas prix, mais dans sa capacité à produire et à
commercialiser en Europe et dans le monde des produits à haute valeur
ajoutée
", a-t-il ajouté.
Il a suggéré d'engager "
une véritable
réforme, faute de quoi les compensations partielles proposées
aujourd'hui pourraient demain s'avérer être un marché de
dupes dans les prochaines négociations internationales ".
Selon
M. Le Pensec, le Gouvernement français, qui souhaite que les Etats
membres puissent répartir une partie des aides communautaires en
fonction de leurs priorités nationales, estime que la Commission
"
fait un pas timide dans ce sens
", mais que "
les
modalités qu'elle propose sont trop complexes pour être
effectivement mises en oeuvre ".
Il a considéré que la baisse généralisée et
systématique des prix n'est pas la réponse à toutes les
questions posées. Tout cela l'a conduit à exprimer un profond
désaccord avec ces propositions.
Lors du Conseil des ministres de l'agriculture du 30 mars et du 26 mai
derniers, M. Louis Le Pensec a exprimé son profond désaccord
avec le projet de réforme de la PAC. Il a souhaité que ces
propositions soient profondément modifié pour faire place
à une nouvelle orientation de la politique agricole.
M. Lionel Jospin, premier ministre
, a manifesté à de
maintes reprises son profond désaccord avec les propositions de la
Commission. De même, M. Pierre Moscovici, ministre
délégué des affaires Européennes, a jugé
souhaitable que la PAC soit " rapidement " réformée
tout en soulignant que la défense des intérêts agricoles
français "passait par le maintien " des moyens budgétaires
de l'agriculture Européenne. Il a indiqué, lors de son audition
par la mission qu'il ne s'agissait "
pas du tout de suivre le
modèle américain, mais bien de poursuivre un modèle
Européen
". Dans la perspective du nouveau round agricole de
l'Organisation mondiale du commerce, il a souhaité également
" ne pas payer deux fois ". Le ministre a soulevé
l'adéquation de la réforme de la PAC à l'OMC lors des
négociations.
La mission sénatoriale donne acte à M. Louis Le Pensec de
ses nombreuses condamnations des propositions de la Commission.
Elle regrette néanmoins que le Gouvernement soit rentré dans la
négociation très rapidement, sans chercher à
présenter un projet alternatif pour l'agriculture
Européenne.
c) Les travaux de l'Assemblée nationale
M. Henri Nallet, Président de la
délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union
Européenne a précisé la position de la
délégation le 9 octobre 1997
40(
*
)
. Il a souligné que la PAC semblait
prédéterminée, pour la Commission, par l'impératif
de l'élargissement, par le nouveau cycle de négociations
commerciales multilatérales et par le nouveau cadre financier,
d'où sa proposition de programmes d'une baisse générale
des prix des produits agricoles et un découplage maximal des aides
compensatoires. M. Henri Nallet a estimé que le volet agricole
d'Agenda 2000 prenait l'élargissement insuffisamment en
considération et s'est interrogé sur la crédibilité
de la modeste progression de la ligne directrice agricole. La
délégation s'est, en outre, interrogée sur
l'opportunité de réformer la PAC avant l'ouverture d'un cycle de
négociation de l'accord sur l'agriculture dans le cadre de l'OMC.
Votre mission tient à saluer, par ailleurs, le travail
intéressant mené par M. Christian Jacob,
député de Seine-et-Marne, et les commissaires du groupe RPR de la
Commission de la Production et des échanges qui ont effectué
à la fin de 1997 de nombreuses auditions sur
l'Agenda 2000.
2. " Un projet sans ambition " pour les organisations agricoles
La
mission sénatoriale a auditionné plus d'une soixantaine de
personnalités sur la réforme de la PAC. Elle a été
très attentive à l'ensemble des propositions formulées par
les organisations qu'elle a entendues.
Malgré quelques nuances, l'ensemble des organisations agricoles ont,
dès l'été 1997, repoussé le projet de la
Commission.
a) L'assemblée permanente des chambres d'agriculture : un véritable " réservoir " de contre propositions
L'APCA a présenté, depuis le mois de septembre
dernier, plusieurs documents importants et intéressants sur la
réforme de la PAC. Son analyse et ses prospectives ont constitué
un élément essentiel dans la réflexion de la mission
sénatoriale.
L'APCA juge que les propositions de Bruxelles, fondées sur un
démantèlement progressif de la PAC et une renationalisation
insidieuse, ne permettent pas de préserver le modèle agricole
Européen.
Une telle politique est considérée comme contraire aux
intérêts de l'Union Européenne :
- l'alignement systématique sur les prix mondiaux ignore la
réalité des débouchés des produits agricoles
Européens qui sont essentiellement dirigés sur le marché
intérieur ;
- son coût restera élevé alors que le consommateur ne
bénéficiera pas d'une baisse du prix de son alimentation ;
- la restructuration de l'agriculture risque de s'accélérer
au détriment du maintien de l'emploi et de l'équilibre des
territoires ;
- le métier d'agriculteur changera de nature en distendant ses
liens avec le consommateur et le marché.
Les Chambres d'agriculture rappellent qu'une autre politique est possible
reposant sur :
- des approches différenciées selon les productions,
basées sur un soutien des prix adapté à la
réalité des marchés Européen et internationaux ;
- des mécanismes de régulation rénovés,
permettant aux agriculteurs de tirer l'essentiel de leur revenu d'un
marché Européen solvable tout en répondant aux exigences
des consommateurs et des citoyens ;
- des aides prenant mieux en compte les spécificités des
productions, des exploitations et des territoires, dans le souci d'une plus
grande légitimité vis-à-vis de la société.
Ainsi l'APCA dénonce l'absence d'un véritable projet de
politique agricole Européenne qui traduirait une vision
stratégique du rôle de l'agriculture au XXIe siècle
. Le
projet de la Commission ne repose pas, selon l'APCA, sur un choix de politique
agricole adopté à l'Europe et à son modèle de
développement.
Les propositions de la Commission Européenne vont à l'encontre du
modèle élaboré ces derniers mois par les Chambres
d'agriculture qui tentent de concilier, par des approches
différenciées, les hommes, les produits et les territoires.
M. Jean-François Hervieu, Président de l'APCA,
considère que les propositions de la Commission portent en germe
" la fin d'une politique agricole
", transformée en une
politique de revenus constitués d'aides payées par le
contribuable.
La baisse " systématique " des prix qui est prévue
risque de casser des pans entiers de l'activité agricole, comme les
systèmes extensifs dans le domaine du lait et les oléagineux.
S'agissant des grandes cultures, le point le plus inacceptable selon l'APCA est
le démantèlement des majorations mensuelles (primes de stockage,
sans lesquelles les organismes collecteurs vendraient la plus grande partie des
récoltes en début de campagne) et le sort réservé
aux oléagineux. Au chapitre du développement rural, elle souhaite
préserver la politique d'installation à l'ensemble du territoire
et qu'elle ne soit pas seulement liée à des mesures en faveur de
zones de handicap.
Ainsi, l'APCA estime que les projets de règlements de la Commission
n'apportent d'amélioration ni pour le contribuable ni pour le
consommateur ou le citoyen et préparent l'avènement d'une
agriculture moins nombreuse, plus artificialisée, plus industrielle et
globalement plus coûteuse.
b) Un rejet catégorique des propositions de la Commission Européenne par les organisations syndicales agricoles
La
FNSEA : " l'affirmation d'une identité agricole
Européenne "
Lors de son 52e Congrès fédéral à
Clermont-Ferrand du 7 au 9 avril 1998, la FNSEA a adopté un
rapport d'orientation dont le titre, " Pour un pouvoir économique
fort des agriculteurs ", résume la position de la FNSEA sur les
propositions de réforme de la PAC.
Dans le cadre de l'évolution de la PAC, à l'horizon 2000 et
à plus long terme en vue de l'intégration des pays d'Europe
centrale et orientale (PECO), la FNSEA s'est fixée pour orientation un
rééquilibrage des outils et des moyens de la PAC entre les
soutiens aux produits, les soutiens aux territoires et aux hommes.
La FNSEA souhaite notamment que la PAC ait une approche plus territoriale que
par le passé de l'activité agricole. Afin de favoriser
l'agriculture multifonctionnelle qui fonde l'identité agricole
Européenne, la PAC doit clairement reconnaître et valoriser la
fonction d'occupation du territoire remplie par l'agriculture et les
agriculteurs.
Or, pour la FNSEA :
Le " Paquet Santer " constitue la négation même de
cette orientation
41(
*
)
" La réforme contenue dans " Agenda 2000 " néglige
totalement les équilibres territoriaux entre productions et
régions agricoles, et les emplois à la clé dans des zones
rurales où l'agriculture joue un rôle économique essentiel
et dans lesquelles les possibilités de reconversion professionnelle sont
souvent très limitées. "
La FNSEA considère que :
" - Avec sa " pensée unique ", voire dogmatique, en
faveur d'une baisse des prix institutionnels généralisée,
systématique (compensée seulement partiellement), la Commission
Européenne va favoriser de fait la concentration des exploitations sur
les territoires les plus productifs, la déprise dans les autres, la
course à l'agrandissement et aux primes ;
- la prime unique que la Commission propose dans le secteur des grandes
cultures, entraînerait un fort recul de productions déficitaires
(notamment les oléagineux et les protéagineux, mais
également le maïs dont elle souhaite faire disparaître la
spécificité), ce qui ne manquerait pas de créer de
nouveaux déséquilibres dans les zones de production
concernées (en particulier les zones intermédiaires) ;
- la Commission Européenne ne tient aucun compte des
spécificités régionales de l'Union Européenne.
C'est vrai pour les productions méditerranéennes qu'elle
n'intègre pas dans sa réflexion (ni dans sa programmation
budgétaire). Cela vaut également pour la réforme
proposée dans le secteur de la viande bovine qui va à l'encontre
d'une politique d'occupation de l'espace en pénalisant fortement les
bassins allaitants (notamment français) ;
- enfin, sa proposition pour le secteur laitier est incohérente,
compliquée à l'excès et inopérante. Elle constitue
de facto une attaque en règle contre le système des quotas
laitiers qui joue pourtant un rôle central pour fixer la production
laitière au territoire (à commencer dans les zones de
montagne). "
La FNSEA souhaite la réorientation du " Paquet Santer "
Pour la FNSEA, une politique agricole assurant un rééquilibrage
entre les hommes, les produits et les territoires est un impératif
.Cette politique doit s'appuyer sur trois orientations fortes,:
" - le refus de la baisse systématique et
généralisée des prix institutionnels et du
démantèlement des OCM (cf. chapitre 3 § 21) ;
- la volonté de voir reconnaître la fonction territoriale de
l'agriculture, son rôle dans l'occupation et la valorisation des
territoires, à travers des soutiens de base à l'hectare. C'est le
principe économique de la rémunération de la
multifonctionnalité de l'agriculture qui est en jeu ;
- les soutiens de base aux territoires doivent être
complétés par des soutiens aux produits qui demeurent
indispensables comme leviers de régulation des marchés
(maîtrise quantitative de l'offre), pour favoriser des objectifs
qualitatifs et pour répondre aux logiques spécifiques des
filières en matière de production et d'échanges. En ce
sens, la prime unique proposée par le Paquet Santer pour les grandes
cultures est inacceptable : la FNSEA demande des soutiens
complémentaires pour orienter les productions, notamment pour les
productions déficitaires comme les oléagineux et les
protéagineux. L'Europe doit également mettre en place un nouveau
" plan protéines " afin de réduire son déficit
en protéines végétales et d'accroître la
sécurité de son approvisionnement.
D'une façon générale, conformément aux orientations
du Congrès de Toulouse, la FNSEA propose un soutien communautaire de
base pour l'ensemble des terres " SCOP " et fourragères.
La Commission Européenne va dans ce sens lorsqu'elle propose une prime
non liée aux cultures pour le secteur végétal. Mais elle
s'en éloigne dans le secteur animal, en proposant de concentrer les
aides sur les animaux et en faisant l'impasse sur le territoire. Sa
récente proposition de modulation des primes, tant à
l'intérieur de l'OCM " viande bovine " que de l'OCM
" lait ", est inacceptable en l'état. La Commission entend se
défausser sur les Etats membres de la responsabilité de
rechercher l'équilibre entre les systèmes de production.
Elle propose de constituer des enveloppes nationales à hauteur (en
moyenne) de 30 % des aides compensatoires. Des enveloppes d'une pareille
ampleur équivaudraient à une renationalisation, certes partielle
mais inadmissible, de la PAC. Car le système deviendrait vite
ingérable par les Etats membres et pourrait engendrer des distorsions de
concurrence entre les producteurs Européens, selon les choix retenus sur
le plan national.
C'est pourquoi la FNSEA demande, avec plus de fermeté que jamais, un
soutien communautaire de base à l'hectare. Ce n'est qu'une fois cette
prime actée que l'Europe pourra envisager le recours limité
à la subsidiarité éventuellement nécessaire pour
trouver le meilleur équilibre possible entre systèmes
d'élevage sur le plan national.
En outre, la FNSEA souhaite une vision Européenne offensive de la
ruralité, à partir de l'agriculture. "
Le CNJA : une approche différenciée des productions
Dénonçant la conception par trop libérale de la
réforme de la PAC envisagée par la Commission, le CNJA souhaite
une approche s'articulant autour du triptyque
hommes-marchés-territoires. Il revendique la reconnaissance à
parts égales des dimensions quantitatives et qualitatives de
l'activité agricole. En outre, le CNJA regrette que le renouvellement
des générations ne soit pas considéré par la
Commission Européenne comme un objectif prioritaire.
A travers les nombreux documents élaborés par le CNJA,
celui-ci :
" - exige une refondation de la PAC eu égard au contexte
Européen (baisse du nombre d'exploitations, préoccupations des
consommateurs...) et au contexte international (élargissement à
l'Est, OMC, croissance des marchés...), qui militent en faveur d'une
nouvelle réforme ;
- valide les objectifs affichés par la Commission Européenne
pour une nouvelle réforme (compétitivité de l'agriculture,
renforcement de la politique rurale...) ;
- dénonce l'absence de prise en considération de la
diminution constante du nombre d'exploitations, du vieillissement de la
population agricole et de l'évolution des structures agricoles.
L'approfondissement de la logique " anti-jeunes " de 1992, qui vise
à lier les aides aux facteurs de production, accélérera
encore ces tendances ;
- récuse le schéma général de réforme
retenu par la Commission Européenne qui tend à faire de la
libéralisation des marchés la composante quasi-unique de la
politique agricole ;
- propose au contraire une réforme articulée autour d'une
conception radicalement nouvelle des missions diversifiées de
l'activité agricole, justifiant une reconnaissance à parts
égales et une rétribution des dimensions productives et
qualitatives du métier d'agriculteur ;
- refuse l'approche d'uniformisation des politiques sectorielles retenue
par la Commission et plaide au contraire en faveur d'une politique
différenciée par secteur agricole, en fonction des
spécificités des productions ;
- constate des lacunes majeures dans les dispositifs de réforme
proposés et notamment :
le désengagement de la Commission Européenne dans la gestion des
marchés ;
l'absence des secteurs méditerranéens de ce projet, pourtant
confrontés à d'importants problèmes structurels, qui
militent en faveur d'une réforme profonde ;
l'absence de mesures en faveur de l'allégement des charges et de
l'organisation des filières, sans lesquelles la
compétitivité de l'agriculture et la recherche d'un revenu stable
et durable pour les agriculteurs n'ont que peu de sens ;
l'absence d'une politique de qualité, témoin du peu de
considération dont les consommateurs font aujourd'hui l'objet
auprès de la Commission ;
l'absence d'une politique spécifique pour les zones de montagne.
- invite la Commission à lever les ambiguïtés
concernant :
les nouvelles mesures rurales envisagées mais dont les modalités
ne sont pas précisément définies. Le CNJA se
réjouit de la volonté du projet de simplifier les
procédures existantes, de supprimer les incohérences du zonage et
de mieux prendre en compte les spécificités locales au travers du
rôle accru des régions dans la définition des mesures
éligibles. Toutefois, le CNJA ne peut se prononcer sur un principe sans
connaître la volonté politique réelle de la Commission de
rétribuer les agriculteurs pour les missions économiques de
l'activité agricole liées à l'acte de production (emploi,
environnement, aménagement du territoire...) ;
le projet de regrouper toutes les mesures de politique agricole dans un seul
budget (FEOGA-Garantie). Cette orientation ne doit pas se traduire par un
" habillage " des mesures liées au marché par du
" rural " pour mieux justifier les soutiens (auprès des
contribuables et de l'Organisation Mondiale du Commerce), mais bien par la
reconnaissance des dimensions qualitatives et quantitatives des exploitations
agricoles.
Par ailleurs, un tel regroupement ne doit pas conduire à opposer les
mesures " marché " aux mesures " rurales " au
gré des aléas budgétaires ;
la pertinence d'une nouvelle réforme de la PAC avant les prochaines
négociations au sein de l'Organisation mondiale du Commerce. Il est en
outre nécessaire que la Commission précise en quoi la proposition
de réforme formulée est à même de satisfaire les
exigences de nos partenaires à l'OMC (notamment au regard du couplage
des aides directes) et quelles seront ses priorités de
négociations ;
la motivation réelle de la Commission de mieux répartir les
aides eu égard au dispositif de plafonnement proposé ;
la volonté de tenir compte des préoccupations exprimées
par les citoyens et les consommateurs, qui ne se concrétisent pas dans
les dispositifs envisagés. "
En tout état de cause, le CNJA ne peut cautionner l'approche
générale de la Commission Européenne, qui est une
réponse plus que partielle aux défis auxquels est
confrontée l'agriculture Européenne et aux objectifs qui lui sont
assignés.
La Confédération paysanne : pour une agriculture solidaire et
durable
Pour ce syndicat agricole, la forte baisse des prix programmée pour les
céréales, le lait, la viande bovine montre que la Commission a
choisi, en proposant le démantèlement des organisations de
marché, de s'aligner sur la politique agricole américaine au lieu
de défendre le modèle Européen.
En outre, la Confédération paysanne "
n'admet pas la
logique de la baisse des prix et des aides compensatrices "
. Elle
estime qu'une politique ne se construit pas pour 5 ou 10 % de la
production sans valeur ajoutée mise sur le marché mondial. Une
politique agricole doit aussi, selon la Confédération paysanne,
répondre aux besoins des citoyens Européens en termes d'emploi,
de santé publique, de qualité des produits et de cadre de vie.
La Confédération paysanne exige une " utilisation judicieuse
des aides publiques ". La solution préconisée consiste en
une modulation et le plafonnement des aides en fonction de la taille des
exploitations et du nombre d'actifs.
La Confédération souhaite, de plus, que soit instaurée une
prime unique à la surface fourragère de 800 francs par
hectare. Celle-ci remplacerait la prime au maïs ensilage et la prime
à l'herbe. La Confédération a présenté pour
chaque organisation commune de marché (OCM) -grandes cultures, viande
bovine et lait-, des propositions, la maîtrise de la production restant
le fil conducteur de ces mesures.
La coordination rurale : pour une PAC fondée sur de " justes
prix "
La coordination rurale affirme que les propositions de réforme de la
politique agricole commune signent la "
disparition des
paysans
" Européens.
" La baisse des prix nettement en-dessous des prix de revient oblige
à verser des primes compensatoires pour éviter la faillite
immédiate de tous les paysans ".
Elle considère que
" l'agriculture est sortie du cadre de l'économie réelle et
plongée dans une économie virtuelle dépendante de
l'imaginaire des technocrates bruxellois ".
" L'agriculture, source de richesses fondamentales, est artificiellement
transformée en boulet parce qu'on refuse aux paysans le juste prix de
leur travail, les transformant ainsi en assistés ",
a
déclaré la Coordination rurale devant la mission d'information.
La coordination se place dans le contexte d'une PAC fondée sur de
" justes prix " jugés
" rémunérateurs " et ne nécessitant pas le
versement d'aides. Elle estime que les accords commerciaux passés
-surtout celui de Blair House- ne peuvent pas assurer la sécurité
alimentaire quantitative et qualitative, créer des emplois et vont
conduire à modifier les paysages et détruire les fermes.
M. Jacques Laigneau, président, estime possible de mettre en place
des prix rémunérateurs en convainquant les américains que
la politique des prix va dans leur intérêt. Deux arguments sont
susceptibles, selon lui, dans ce sens. Il estime en premier lieu inutile de
" casser les prix des matières premières agricoles ".
En second lieu, il considère que l'Europe n'est pas surproductrice et
qu'elle n'a pas de vocation exportatrice. Il s'agirait dans ce cas de cultiver
davantage d'oléagineux et de protéagineux en Europe et
" d'échanger à égalité de volume l'arrêt
des importations de PSC contre l'abandon des exportations de
céréales ". Ainsi ce prix rémunérateur serait
" un prix moyen par produit qui permettrait à un maximum
d'agriculteurs de vivre sans aides ", a expliqué M. Jacques
Laigneau devant la mission sénatoriale. Dans ce schéma, les
régions " pauvres " bénéficieraient d'une aide
compensatoire de handicaps naturels.
La Coordination revendique en fait le droit des peuples à définir
leur politique agricole afin de "
sauvegarder leur propre modèle
agricole
".
Le Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF)
dénonce une agriculture livrée au négoce international
Le MODEF a estimé que
" la PAC 2000 telle que définie par
la Commission Européenne livre l'agriculture au négoce
international par l'alignement des prix agricoles sur les cours mondiaux ".
Le MODEF considère que " la chute des revenus agricoles sera fatale
à des milliers d'exploitants familiaux " et contraindra les autres
à " augmenter leur productivité au détriment de
l'emploi, de l'environnement et de la qualité des produits ".
Par ailleurs, le MODEF est favorable à un plafonnement des aides -par
exemple à environ un SMIC par personne-. En outre, il s'est
prononcé pour la multifonctionnalité reposant sur les prix et non
sur les aides.
c) La position des organisations spécialisées
La
position commune de la FOP, de l'AGPB et de l'AGPM.
Les représentants des producteurs de blé, de maïs et
d'oléoprotéagineux se sont associés à la
démarche de la FNSEA pour demander la révision du projet
d'Agenda 2000 tel qu'il est connu aujourd'hui, car il présente des
lacunes et des insuffisances.
Il ont attiré toutefois l'attention sur le fait qu'il n'y a pas
d'alternative crédible à l'orientation générale de
cette nouvelle étape de la réforme de la PAC pour les productions
concernées par l'Agenda 2000, consolidées dans les accords
de Marrakech.
De plus, les organisations spécialisées jugent que la
nécessité de conserver et d'accroître les parts de
marché intérieur en maintenant une organisation Européenne
du marché impose de renforcer la compétitivité des
productions concernées et des viandes. Parallèlement, elles
estiment utile le maintien des compensations au niveau et selon la durée
qui conviennent, notamment en ce qui concerne les
oléoprotéagineux qui sont déjà au prix mondial.
Les organisations de producteurs de blé, maïs et
oléoprotéagineux, mettent en garde tous ceux qui, en France et en
Europe, voudraient détourner de leurs objectifs économiques les
soutiens publics qui restent pour le moment les armes indispensables pour
affronter la concurrence américaine et préparer la prochaine
négociation de l'OMC qui doit s'ouvrir dans moins de deux ans.
La Fédération nationale des producteurs de lait
Pour la Fédération nationale des producteurs de lait, les
propositions d'actes communautaires présentées par la Commission
en mars 1996 sont encore plus complexes que le " Paquet Santer "
de juillet 1997.
Ces propositions laissent prévoir, selon elle, des conflits potentiels
entre régions d'élevage et entre systèmes de production.
De plus, des risques de distorsion de concurrence peuvent surgir entre Etats
membres selon qu'ils choisissent de mettre l'accent sur la compensation au
kilogramme de lait ou à l'hectare.
En outre, selon la FNPL, le revenu des producteurs pourrait diminuer dans des
proportions importantes, différentes pour chaque catégorie selon
les formules retenues par les pouvoirs publics nationaux et sera encore plus
dépendant que dans les propositions de juillet 1997 du niveau des
aides.
Le marché intérieur, pourtant capable d'assurer un niveau
relativement élevé de valorisation est définitivement
sacrifié dans le dispositif proposé. La FNPL regrette que la
Commission conforte son refus d'une flexibilité de la maîtrise qui
aurait permis de conserver cette valorisation tout en assurant la
présence Européenne sur les marchés extérieurs.
La Fédération nationale bovine
A la suite des propositions de la Commission Européenne, la FNB
considère que :
le projet de la Commission se fonde sur la seule logique d'abandon de toute
régulation du marché. Il aboutirait nécessairement
à accentuer les cycles de crise et accélérer la
disparition des exploitations ;
la question du rééquilibrage du revenu des éleveurs
bovins-viande demeure totalement ignorée ;
le troupeau allaitant se trouve littéralement sacrifié, à
la fois par l'option d'alignement vers le marché mondial et une
compensation effective à seulement 50 % ;
la production de veau de boucherie n'est toujours pas prise en compte ;
l'impact du Paquet Santer est aggravé par des effets pervers :
- les enveloppes nationales de " subsidiarité ", sont
une source directe de distorsions de concurrence ;
- les nouvelles conditions d'accès au complément extensif
excluent et condamnent les exploitations naisseurs-engraisseurs, principal
facteur de valeur-ajoutée et d'emploi, au risque d'aboutir à un
modèle de production " à l'américaine ".
Les simulations de l'impact du projet sur les résultats d'exploitation,
réalisées tant par l'Institut de l'Élevage que par
l'INRA-Nantes mettent en évidence l'ampleur des pertes sur tous les
types de systèmes bovins viande spécialisés. Elles sont
les plus importantes en systèmes naisseurs-engraisseurs.
La FNB constate que la France se trouve dans une position isolée, compte
tenu de la spécificité française du troupeau allaitant, et
plus généralement des priorités qu'elle doit
défendre. Elle déplore que les discussions communautaires n'aient
pas permis à ce jour l'émergence d'un projet
alternatif.
d) La CNMCCA et la coopération agricole
La
Confédération nationale de la mutualité, de la
coopération et du crédit agricoles s'interroge sur le sens et
l'efficacité des propositions de la Commission. Elle affirme la
spécificité de chaque secteur de production et souhaite
promouvoir " un modèle Européen d'agriculture ".
Pour la CFCA, la réforme de " Paquet Santer " semble proposer
une vision duale de l'agriculture. En effet, il tendrait à dissocier
deux objectifs inhérents au modèle Européen agricole.
Ces deux objectifs sont :
- d'une part,
l'objectif de l'efficacité et de la
capacité concurrentielle
dépendrait de la réforme des
organisations communes de marché pour lesquelles la Commission semble
avoir fait le choix global de la baisse des prix, facteur de
compétitivité et de régulation des marchés, avec en
corollaire, l'abandon progressif du principe de maîtrise de l'offre,
voire des mécanismes de gestion des marchés pour certains
secteurs.
Des compensations de revenu sont certes prévues, mais partielles ;
elles posent la double question de leur pérennité et de leur
légitimité puisqu'elles pourraient dans certaines productions,
constituer les 2/3 du revenu.
La CFCA considère qu'on assiste là, insensiblement, au glissement
d'une politique de compensation vers une politique de revenu qui, dans ce cas,
n'échapperait pas à la question de sa redistribution.
- d'autre part, l'objectif du territoire, de l'emploi, de l'environnement
dépendrait du volet politique rurale de l'Agenda 2000 -au contenu
flou et incertain- et d'une certaine renationalisation de la PAC dans le cadre
de la subsidiarité.
La concentration des moyens publics sur les zones défavorisées,
la mise en place de contrats de développement durable encourageant la
reconversion vers l'agriculture biologique ou la production fermière, le
renforcement du contrôle des structures, sont actuellement
préconisés pour mettre en cause cette politique.
Pour les entreprises coopératives, ces outils ne sont pas de nature,
seuls, à fixer durablement une activité agricole dans les
territoires. Probablement nécessaires, ils ne seront efficaces que s'ils
inscrivent dans une politique ayant pour objectif d'adapter l'agriculture aux
besoins et à la réalité des marchés.
Si cette analyse se confirmait, la dissociation entre
compétitivité et territoire fonderait un projet soutenant :
- d'une part, les compétiteurs sur le marché mondial ;
- d'autre part, les détenteurs de niches ou de créneaux
liés aux zones défavorisées.
La CFCA considère que cette analyse signifierait la négation
d'une large partie de l'agriculture française, qui ne peut affronter les
conséquences d'une régulation par les prix mondiaux, mais n'est
pas, pour autant, concentrée sur les zones défavorisées.
Les coopératives agricoles attendent donc une politique communautaire et
nationale qui apporte des réponses à l'ensemble des exploitations
et des filières, ce qui suppose une vision non monolithique de la PAC et
une approche différenciée des OCM prenant en compte : le double
objectif de la compétitivité et du territoire selon la
réalité des secteurs ; la nécessité et
l'importance des outils industriels qui assurent un débouché aux
productions.
C'est à cette condition que les agriculteurs et leurs outils
économiques pourront :
- relever le défi des marchés qui se mondialisent et se
concentrent ;
- peser significativement sur ces marchés par une organisation
renforcée ;
- fixer la production et l'activité économique dans les
territoires.
e) La FNPA
La
Fédération nationale de la propriété agricole a
fait part de ses plus vives inquiétudes. Elle considère que la
baisse des prix et la compensation partielle entraîneront
inévitablement sur une baisse des prix du fermage et donc un
désengagement inévitable des propriétaires dans le foncier
agricole.
Pour l'ANIA, la PAC doit aider le secteur agro-alimentaire à faire face
aux défis du futur, la production agricole étant le premier
client de l'industrie alimentaire.
L'agriculture doit donc prendre en compte les besoins de l'industrie en termes
d'approvisionnement sur les marchés intérieurs et
extérieurs. De plus, la politique agricole doit promouvoir la
qualité des matières premières nécessaires à
l'industrie.
L'ANIA considère, dans ce contexte, qu'une baisse raisonnée et
progressive des prix doit tenir compte des situations sectorielles. Par
ailleurs, la PAC doit garder une capacité à orienter l'offre
agricole à travers les prix garantis, les protections du marché
et les restrictions à l'exportation. L'ANIA juge indispensables la mise
en place, sur le marché intérieur, de conditions de concurrence
équitables pour l'industrie alimentaire et le développement d'une
politique volontariste d'exportation.
3. La contribution d'autres organisations à la réforme de la PAC
La
mission sénatoriale souhaite présenter brièvement les
positions de l'ANIA (association nationale des industries agro-alimentaires),
de la FCD (Fédération pour le commerce et la distribution) et de
l'Union fédérale des consommateurs sur cette réforme.
Certains considèrent que seules les organisations agricoles sont
concernées par la réforme de la PAC. Si elles le sont en
priorité, la prise en compte pour l'avenir de l'agriculture
Européenne de la position de l'ensemble de la filière alimentaire
à travers quelques exemples (industries de transformation, associations
des distributeurs) ainsi que celle des consommateurs est indispensable,
étant donné l'importance de la réforme de la PAC pour
l'ensemble de notre société.
a) Un renforcement nécessaire de la compétitivité de l'agriculture pour l'industrie alimentaire française
L'industrie alimentaire
est directement
concernée par
la PAC qui exerce des influences directes sur ses conditions
d'approvisionnement et donc sur sa capacité à faire face à
la concurrence. En outre, comme le souligne l'Association nationale des
industries agro-alimentaires, les entreprises ont un besoin impératif de
lisibilité des évolutions à venir pour prendre, en
conséquence, les décisions d'investissements de demain.
Rappelons pour mémoire que l'industrie alimentaire constitue le
premier secteur industriel Européen, le premier exportateur
mondial et la première industrie mondiale.
b) La Fédération des entreprises du commerce et de la distribution
La
grande distribution, à travers la FCD, a souhaité affirmer son
attachement à plus de transparence et à l'établissement
d'un vrai dialogue dans les filières agricoles.
Elle a rappelé quelques initiatives conduites depuis un an : les
opérations " tomate " et " fraise " en mai 1997, la
signature de l'accord-cadre national sur la promotion et la qualité des
légumes le 25 juin 1997, les mesures prises en juillet 1997
sur les fruits d'été, l'accord sur la viande fraîche de
porc en janvier 1998, l'accord national de bonnes pratiques de la
filières endive entre producteurs et distributeurs du début de
l'année 1998 et l'opération " salade " de
mars 1998.
Au-delà des nombreux conflits opposant producteurs et consommateurs -que
la Commission des Affaires économiques n'a pas manqué
d'évoquer dans chacun de ses rapports d'information sur la
filière fruits et légumes- la mission sénatoriale souhaite
rappeler que la baisse des prix garantis engagée en 1992 n'avait en
aucune façon entraîné de baisse à la consommation.
La FCD a déclaré devant la mission d'information que "
le
fétichisme des prix ne doit donc pas constituer le seul et unique
objectif de la réforme de la PAC
".
c) L'UFC - Que choisir ?
Les
principes auxquels les consommateurs, et notamment " l'UFC - Que
Choisir ? ", sont attachés en matière d'agriculture
peuvent se décliner ainsi :
- la durabilité : l'agriculture, respectueuse de l'environnement et
de la préservation des ressources, maintiendra le potentiel de
production pour les générations futures en ne détruisant
pas la biodiversité ;
- la sécurité : elle est un droit pour tous et le
préalable nécessaire pour s'assurer la confiance des
consommateurs ; elle doit être garantie pour toutes les catégories
de population et pour tous les produits alimentaires ;
- la diversité : valorisée dans le domaine de
différentes espèces, tant animales que végétales,
elle est nécessaire aux goûts, aux modes d'alimentation et aux
besoins différents des consommateurs, afin qu'ils puissent trouver tous
les types de produits agricoles (standards, biologiques, OGM, etc.) ;
- la qualité : elle doit être multiple car les consommateurs
ont des besoins, des goûts, des budgets différents et parce que le
mode de consommation d'un produit conditionne la qualité du produit
qu'on achète.
Ces objectifs doivent, pour cette association, faire partie des missions
majeures de la PAC.
L'UFC considère que la PAC propose aujourd'hui un système qui a
pour but de permettre aux produits agricoles d'être compétitifs
pour qu'ils puissent être vendus sur le marché mondial. Du coup,
l'essentiel des moyens publics est consacré à donner sous forme
d'aides directes aux agriculteurs, les revenus qu'ils ne peuvent pas retirer du
marché.
" Poursuivre dans cette voie, selon l'UFC, c'est emmener les
agriculteurs dans une impasse. Il est temps de refonder la politique agricole
commune sur de nouveaux objectifs, de sortir progressivement d'un
système qui conduit aujourd'hui à l'appauvrissement de notre
agriculture, en la spécialisant sur un type de production pour lequel
nous n'avons aucun avantage par rapport à nos partenaires, en
l'orientant vers des productions de produits standardisés, en faisant fi
de la diversité des modes de production, en ne s'intéressant
qu'aux producteurs capables de tenir des rendements
élevés ".
Il convient de rompre avec cette logique, qui, en tout état de cause,
n'est favorable ni à l'ensemble des producteurs, ni aux consommateurs.
Il convient de valoriser l'agriculture Européenne au travers de la PAC
et cela en mettant en avant ses atouts, à savoir :
sécurité, innovation, produits à forte valeur
ajoutée, qualité, diversité des produits, etc.
C'est pourquoi l'UFC souhaite que la réforme de la PAC soit :
- affirmer le droit de l'Europe à sa propre politique agricole, qui
ne saurait être soumise à la seule loi du marché et doit
satisfaire à d'autres exigences comme la sécurité, la
qualité, la diversité des produits, le respect des
différentes aspirations des consommateurs Européens, etc. ;
- affirmer un modèle de développement original de
l'agriculture Européenne, respectueuse de notre environnement, et
maintenir une agriculture vivante et diverse sur l'ensemble du territoire
Européen ;
- orienter les soutiens et les aides vers les agriculteurs et pas
seulement vers les productions agricoles.
Les contributions des différentes personnalités entendues par
la mission d'information ont été particulièrement
intéressantes. Basées sur une réflexion approfondie et
étayées souvent de statistiques précises, les intervenants
ont analysé le projet de la Commission Européenne et
effectué de nombreuses propositions.
A l'issue de ces cinq mois de travaux, la mission sénatoriale est en
mesure de présenter un véritable projet alternatif pour
l'agriculture Européenne de l'an 2000.
TROISIÈME PARTIE -
OFFRIR À
L'AGRICULTURE EUROPÉENNE UNE VISION DYNAMIQUE ET MODERNE DE SON
AVENIR
Lors du
52e " Farming Conference " d'Oxford, le 6 janvier 1998,
M. Jack Cunningham, ministre de l'agriculture britannique, a fait la
déclaration suivante :
"
Nous devons abandonner la vision utopique d'un " modèle
agricole Européen " difficile à définir, basé
sur des exploitations non viables, mais maintenues en vie grâce aux
subventions des contribuables et des consommateurs... Nous devons aligner les
prix d'intervention sur les prix mondiaux comme le propose Franz Fischler.
Cette mesure doit concerner non seulement la viande bovine et les
céréales, mais aussi le lait et le sucre... Nous ne faisons
à les maintenir que perdre des parts de marché au profit de nos
concurrents des pays tiers, ce qui ne saurait servir les intérêts
de nos agriculteurs...
".
Après la réforme de 1992 dont la " philosophie "
repose, notamment, sur une forte réduction du soutien par les prix,
cette déclaration prône une nouvelle rupture avec les
mécanismes de soutien de la PAC, définis en 1962 dans un contexte
déficitaire.
Les propositions de la Commission Européenne de juillet 1997 et mars
1998 poussent un peu plus loin la logique retenue en 1992. Et cela pour une
raison essentielle : cette réforme a globalement réussi. Certes
les causes de ce succès, si relatif soit-il, sont loin d'être
imputables uniquement aux mécanismes mis en place en 1993.
Néanmoins, la réforme Mac Sharry a permis, au minimum,
d'éviter une " implosion " de la PAC, notamment sur le plan
budgétaire.
Faut-il se satisfaire d'un tel constat ? La mission d'information en doute.
Aujourd'hui, l'Europe est confrontée, à nouveau, à un
choix en matière agricole, comme l'a indiqué le sommet de Madrid
de décembre 1995 :
la première possibilité est de
baisser les prix fortement, démanteler les aides et abattre les
protections : cette solution, dite libérale
, est prônée
par certains au nom de la mondialisation des échanges et de la
satisfaction du consommateur.
La mission d'information considère qu'une telle option, si elle
était retenue, conduirait au suicide et ce pour deux raisons : la
première est l'impossibilité pour les agriculteurs
Européens de s'aligner à tout moment et pour tous les produits
sur des prix mondiaux dont les modalités de formation ne sont en aucun
cas le résultat d'une concurrence loyale ; la seconde réside
dans la volonté des Européens de ne pas transformer leurs
territoires en zones désertiques.
La deuxième solution consiste à ne plus exporter, ne plus
importer, fermer ses frontières et ériger
l'auto-approvisionnement en règle absolue
. Le simple
énoncé d'une telle option suffit à en démontrer
l'irréalisme, notamment au niveau français.
Seule subsiste l'option intermédiaire, qui vise deux objectifs pouvant
apparaître contradictoires : d'une part, la préservation d'une
agriculture Européenne forte au sein de régions rurales et
péri-urbaines revitalisées et, d'autre part, l'insertion dans un
contexte international aujourd'hui omniprésent.
On ne peut, en effet, ni appréhender la réforme de la PAC ni lui
offrir de solides perspectives d'avenir sans la replacer dans le contexte
mondial où elle s'inscrit.
La communauté n'est pas un ensemble clos, replié sur
lui-même. Si elle est devenue le deuxième exportateur mondial,
elle est aussi le premier importateur. Il faut être conscient de ce fait.
L'analyse attentive de l'évolution de la PAC, de ses crises, de ses
réformes et des contraintes qui de l'extérieur pèsent sur
la Communauté, met en lumière une vérité
d'évidence : réformer la PAC ne relève pas d'une seule
orientation, d'un remède unique, mais d'une thérapeutique
à plusieurs remèdes dont l'action convergente est une
nécessité.
La mission d'information s'est déplacée aux Etats-Unis et dans
six Etats membres de la Communauté Européenne. Elle s'est rendue
à deux reprises à Bruxelles et a procédé à
l'audition d'une soixantaine de personnalités.
A l'issue de ce travail, la mission d'information souhaite, au-delà
des critiques qu'elle formule contre telle ou telle proposition de la
Commission Européenne, présenter de nouvelles perspectives pour
la Politique Agricole Commune de l'an 2000. Ce projet alternatif s'articule
autour de quatre axes essentiels qui doivent permettre d'offrir à notre
agriculture française et Européenne une vision dynamique et
moderne
.
L'avenir de la PAC, pour la mission d'information, repose sur quatre piliers :
- la consolidation du marché commun agricole,
- une approche différenciée des productions,
- la préservation de l'espace et de l'emploi rural,
- la redéfinition du mode de participation de la Communauté
aux échanges mondiaux.
I. CONSOLIDER L'UNITÉ DU MARCHÉ COMMUN AGRICOLE
Les
auteurs du Traité de Rome avaient redouté que laisser
l'agriculture en dehors des négociations ne conduise
inévitablement à l'échec d'un marché commun au
niveau Européen.
La PAC a été en fait la véritable locomotive de l'Europe
communautaire et " d'un grand marché unique ". Celui-ci doit
être consolidé car toute fissure entraînerait
inévitablement la remise en cause de la PAC et donc, à terme, du
projet Européen.
Afin d'achever cette unité du marché commun agricole, la
mission d'information considère comme impératif
de :
- réussir la mise en place de l'Euro -ce qui nécessite un
suivi particulièrement important en raison des zones d'ombre que
l'instauration de la monnaie unique laisse subsister ;
- parvenir à une véritable égalité de
concurrence entre les producteurs Européens ;
- constituer un projet global pour l'agriculture Européenne
permettant de prendre en considération l'ensemble des productions
agricoles -et notamment les productions méditerranéennes et
celles des départements d'outre-mer- ;
- présenter un véritable projet pour les usages non
alimentaires des produits agricoles.
A. RÉUSSIR LA MISE EN PLACE DE L'EURO
Les fluctuations des taux de change ont eu, depuis la fin des années 60, de profondes répercussions sur l'agriculture Européenne, qu'il s'agisse des fluctuations des monnaies de l'Union les unes vis-à-vis des autres ou de leurs évolutions par rapport au dollar.
1. L'Euro : des avantages incontestables pour l'agriculture
La
création de la monnaie unique, qui se substituera dès le
1er janvier 1999 aux monnaies nationales dans une large zone de
l'Union, mettra fin aux fluctuation monétaires
42(
*
)
.
C'est ainsi une page importante de l'histoire de la PAC qui va se tourner : les
mesures " agri-monétaires " n'auront plus d'objet pour les
pays " in ", c'est-à-dire faisant partie de la zone
Euro
43(
*
)
. La fin des perturbations
monétaires intra-zone apportera également d'autres avantages,
notamment en mettant les agricultures nationales à l'abri des effets,
sur leur compétitivité, des dévaluations des monnaies de
leurs partenaires. Comme les autres secteurs, l'agriculture
bénéficiera également d'économies substantielles,
liées à la suppression des différents coûts dus
à la coexistence des monnaies nationales.
a) La fixation de prix communs : un instrument privilégié de la PAC soumis à de fortes tensions
La
PAC avait fait de la fixation de prix communs, applicables dans l'ensemble de
la Communauté, l'instrument privilégié de son action en
faveur du soutien du revenu de la population agricole, de la stabilité
des marchés, du développement de la productivité et du
respect des intérêts des consommateurs.
Ces prix communs, fixés au cours de mémorables
" marathons " en une unité de compte puis, plus tard, en Ecus,
devaient évidemment être convertis en monnaies nationales pour
être appliqués dans les Etats-membres. Un inconvénient de
la méthode tenait au fait que la dévaluation ou la
réévaluation des monnaies provoquait, systématiquement, la
hausse ou la baisse des prix agricoles domestiques.
En 1969, à la suite d'une dévaluation du franc français de
11 %, se trouva institué entre l'unité de compte
Européenne et le franc un taux de conversion spécifique (ou
"
taux vert
"), différent du taux de
référence établi à partir du taux de change
officiel du franc. Le bénéfice de cette disposition fut
bientôt étendu à l'Allemagne, qui aurait dû, à
la suite de la réévaluation du deutschmark, accepter une baisse
de ses prix, défavorable à ses agriculteurs.
L'adoption des taux verts introduisait des disparités de prix, qu'il
fallut compenser
, afin de maintenir les conditions d'une concurrence
équitable entre les producteurs nationaux. La compensation fut
réalisée au moyen des fameux " montants compensatoires
Monétaires " (MCM), agissant comme des taxes ou des subventions
lors du franchissement des frontières par les produits.
ÉVOLUTION DES TAUX VERTS - situation au 27 avril 1998
|
|
Taux vert - 1 Ecu = |
Evolution des écarts entre les taux verts et les taux du jour (en %) |
||
|
Monnaie |
A partir du 3/04 |
Ancien |
Effet sur les prix en % |
du 23/04/98 au 27/04/98 |
Belgique |
BFR |
40,9321 |
40,9321 |
0 |
+0,369 |
Danemark |
DKR |
7,56225 |
7,55234 |
+0,13 |
+0,346 |
Allemagne |
DM |
1,98391 |
1,98243 |
+0,07 |
+0,421 |
Grèce |
DRA |
349,703 |
349,703 |
0 |
+1,304 |
Portugal |
ESC |
203,183 |
202,764 |
+0,20 |
+0,375 |
France |
FF |
6,68769 |
6,68769 |
0 |
+0,953 |
Finlande |
FMK |
6,02811 |
6,02811 |
0 |
+0,532 |
Pays-Bas |
HFL |
2,23593 |
2,23286 |
+0,13 |
+0,564 |
Irlande |
IRL |
0,796521 |
0,796521 |
0 |
+1,667 |
Italie |
LIT |
1973,93 |
1973,93 |
0 |
+1,087 |
Autriche |
OS |
13,9576 |
13,9485 |
+0,06 |
+0,416 |
Espagne |
PTA |
168,336 |
167,997 |
+0,20 |
+0,323 |
Suède |
SKR |
8,79309 |
8,79309 |
0 |
+3,600 |
Royaume-Uni |
UKL |
0,695735 |
0,695735 |
0 |
+5,060 |
L'usage conjugué des taux verts
et des
MCM, bien
qu'il ait été destiné à maintenir les conditions
d'une concurrence équitable,
a souvent conduit à des
distorsions
. Tandis que leurs prix étaient faiblement
modifiés, les producteurs des pays à monnaie
dépréciée payaient plus cher les produits
intermédiaires importés (engrais, semences, aliments pour le
bétail), les producteurs des pays à monnaie forte les payaient
moins cher, ce qui pénalisait les uns et favorisait les autres. Le
système agri-monétaire permit également aux Etats-membres
bénéficiant de MCM négatifs (on qualifiait ainsi les
montants destinés à compenser les écarts négatifs
entre les prix domestiques des pays à monnaie dévaluée et
les prix communs) d'atténuer à leur profit des baisses de prix
adoptées par la PAC. La Grande-Bretagne et l'Italie en particulier ont
bénéficié de cette faculté à plusieurs
reprises.
La réforme de 1992 et l'abandon des MCM n'ont pas fondamentalement
modifié cette situation
. C'est ainsi que dans son rapport pour
l'année 1995 sur "
La situation de l'agriculture dans l'Union
Européenne
", la Commission confirme que les fortes
perturbations monétaires enregistrées à partir de 1993
"
ont constitué une grave menace tant pour la réussite du
programme de réforme proprement dit que pour la réalisation d'un
marché véritablement unique
". Les effets de la
dévaluation de la livre sterling illustrent ce danger.
Les statistiques du commerce extérieur des pays de l'Union confirment
incontestablement l'existence de distorsions dues aux fluctuations de change.
Les exemples abondent, comme celui des tomates espagnoles, dont la
compétitivité a été ces dernières
années renforcée de façon spectaculaire par les
dépréciations cumulées de la peseta.
b) La substitution de l'Euro aux monnaies nationales et ses effets
Conséquence de l'instabilité
monétaire,
le système agri-monétaire n'a pu être véritablement
démantelé qu'à partir du moment où les monnaies
Européennes ont connu une plus grande stabilité, sous l'effet du
Système Monétaire Européen (SME). C'est ainsi que le
Conseil des ministres de l'agriculture a décidé, en
décembre 1992, l'abandon des MCM. Il faut reconnaître que les
orientations de la nouvelle PAC, diminuant le soutien par les prix au profit
d'un système d'aides directes, ont facilité cet abandon.
Gardons à l'esprit, toutefois, que l'abandon des MCM n'a pas mis fin
à l'usage des taux de conversion agricoles
. A défaut d'une
stabilité suffisante des monnaies, le recours aux taux verts est
resté nécessaire pour éviter les répercussions en
continu des variations de change sur les prix et les aides communautaires.
Ainsi, les crises monétaires de juillet-août 1993 et de
mars-avril 1995, dont l'ampleur a été considérable,
ont reposé brutalement le problème de la compensation des
fluctuations monétaires.
Aussi longtemps que subsiste l'instabilité des taux de change, un
abandon complet des mesures agri-monétaires reste difficilement
envisageable. La substitution de l'Euro aux monnaies nationales vient à
point nommé.
Ainsi, l'Euro permettra la suppression des pertes de change, des
coûts de couverture et d'assurance, actuellement supportés, dans
leurs relations réciproques, par les importateurs et les exportateurs
des pays qui seront déclarés " in ". Le rapport Emerson
(1991) évaluait l'économie réalisée par l'Europe
des onze de l'époque (tous secteurs confondus) sur les coûts de
couverture et d'assurance à 0,5 % du produit intérieur brut
(PIB) communautaire. S'y ajoutent les coûts de conversion des monnaies
actuelles.
A ces premiers gains s'en ajoutent d'autres, indirects comme le fait que les
taux d'intérêt devraient cesser de constituer, comme cela a
été longtemps le cas en France, les instruments
privilégiés de la politique de change. Ils devraient, par
conséquent, pouvoir mieux répondre aux besoins de
l'économie de l'Union. La rigueur des politiques monétaire et
budgétaire de l'Union, garantie par le pacte de stabilité et de
croissance signé à Amsterdam en juin 1997, devrait asseoir la
stabilité de l'Euro. L'argument trouve également un prolongement
dans le fait que les marchés Européens de capitaux devraient
être attractifs et permettre aux entreprises de trouver plus facilement
que par le passé des financements répondant à leur
besoins.
2. D'importantes zones d'ombre
L'Euro ne sera pas néanmoins immédiatement une panacée. Deux grandes zones d'ombre subsistent. Il s'agit, d'une part, de l'absence d'unanimité quant à l'adoption de l'Euro en Europe, et d'autre part, de la question des relations entre l'Euro et le dollar
a) Le maintien d'une zone " non Euro "
Une
première limite aux avantages que présente l'Euro, tient au fait
que tous les pays Européens n'adopteront pas la monnaie unique le
1er janvier 1999
44(
*
)
. On sait que le
Conseil Européen de Dublin a adopté, en
décembre 1996, le principe de la mise en place, pour les pays
n'adhérant pas à l'Euro, ou " pré-in ", d'un
SME-bis calqué sur le SME actuel. Il est prévu que la Banque
Centrale Européenne (BCE) interviendra en coordination avec les banques
centrales nationales des pays concernés, pour faire respecter des marges
de fluctuation qui seront, au départ, de plus ou moins 15 % et
seront susceptibles, ensuite, d'être rétrécies. Les
interventions de la BCE seront toutefois soumises à la condition
qu'elles ne nuisent pas à la réalisation des objectifs de la
politique monétaire (principalement à l'objectif de
stabilité des prix) : en achetant, sur le marché des changes, une
monnaie " pré-in " qu'elle devra soutenir, la Banque mettra
des Euros en circulation qui viendront grossir la masse monétaire de la
zone Euro, ce qui pourrait avoir des effets inflationnistes.
Il est donc peu
probable que le SME-bis permette véritablement de stabiliser les
monnaies " pré-in "
, de sorte que, pour les pays
n'adhérant pas à L'Euro, l'existence de mesures
agri-monétaires restera indispensable. On peut ajouter qu'à la
demande du Royaume-Uni et de la Suède,
l'adhésion au SME-bis
n'a pas été rendue obligatoire, ce qui introduit un facteur
supplémentaire d'incertitude
.
La mission d'information regrette cette absence d'unanimité dans la
mise en place de la monnaie unique, surtout de la part de pays qui, lorsqu'ils
s'apercevront des avantages procurés par l'Euro, s'empresseront
très probablement de rejoindre cette zone Euro.
La mission souhaite que ces Etats soient au minimum fortement incités
à participer au dispositif qualifié de SME-bis.
b) L'incertitude des relations entre l'Euro et le Dollar
Les
mécanismes de la PAC (restitutions et prélèvements) ont
permis, jusqu'à la réforme de 1992, d'atténuer les effets
des variations du dollar sur la compétitivité de l'agriculture
Européenne. Mais, dans le même temps, comme l'ont montré
différentes études portant notamment sur les marchés
céréaliers, les variations de change ont incontestablement eu des
répercussions sur les parts de marché de pays comme les
Etats-Unis, l'Australie ou le Canada.
En outre, des études avaient indiqué que les Etats-unis avaient
pu, particulièrement dans la période 1979-1985, limiter les
effets de la hausse du dollar en faisant pression sur les prix, à la
baisse. En d'autres périodes, la baisse du dollar avait permis, au
contraire, des hausses de prix, tout en continuant de stimuler les exportations
américaines. Les Etats-Unis cumulent, en somme, les avantages de leur
position dominante, à la fois comme " price-makers " et comme
pays à monnaie-clé.
Rappelons que la réforme de 1992 a modifié la situation de
l'agriculture Européenne en prévoyant une réduction
importante, sur la période de 1995 à l'an 2000, des restitutions
à l'exportation et des prélèvements à
l'importation, ainsi qu'une baisse des prix agricoles Européens.
La nouvelle réforme de la PAC, telle que la prévoit
" l'agenda 2000 " publié par la commission Européenne,
confirme la volonté d'aligner les prix Européens sur les prix
mondiaux. L'objectif déclaré est d'assurer la
compétitivité de l'agriculture Européenne et de confirmer
sa vocation exportatrice face à une demande mondiale dont on anticipe
l'expansion. Dans cette nouvelle situation, l'agriculture Européenne se
trouve davantage exposée à la concurrence des autres producteurs,
sur les marchés mondiaux et, par conséquent, aussi, aux effets
des fluctuation du dollar.
L'une des grandes ambitions des Européens est que l'Euro constitue un
contrepoids au dollar et contribue à stabiliser les relations
monétaires internationales
. Les considérations
précédentes montrent qu'il s'agit d'un enjeu important, mais
aussi incertain, pour l'agriculture Européenne.
Le degré d'ouverture de l'économie communautaire,
évalué d'après le rapport de ses échanges
extérieurs à son PIB, est faible : il est comparable à
celui des Etats-Unis et du Japon (9 % du PIB).
L'impact d'éventuels " mésalignements "
(appréciés en référence à la parité
des pouvoirs d'achat) de l'Euro vis-à-vis du dollar s'en trouverait
minimisé. Certains experts estiment que l'Europe pourrait même,
sans inconvénient, adopter une attitude de " douce
insouciance " (politique dite du " benign neglect ") en
matière de change. En réalité, le raisonnement
effectué à partir du degré d'ouverture de l'Union n'est
pas satisfaisant.
Lorsque la Commission propose d'aligner les prix agricoles Européens
sur les prix mondiaux (qui sont exprimés en dollars), ce
paramètre ne vient pas atténuer les effets de la politique des
prix : c'est l'ensemble des transactions, internes et externes, de l'Union, qui
est concerné.
Pour étayer la thèse selon laquelle la création de l'Euro
permettrait de stabiliser les taux de change, si possible à des niveaux
compatibles avec une concurrence équitable, on fait notamment valoir le
fait que le G7 (groupe des sept principaux pays industrialisés) se
trouverait réduit à un G4 (à partir de 2002, si le
Royaume-Uni adhère à cette date à l'Euro). Les pays
Européens, qui représentent une puissance économique
comparable à celle des Etats-Unis (le PIB des Quinze a
été, en 1996, de 8.600 milliards de dollars, celui des
Etats-Unis de 7.300 milliards de dollars), parleraient d'une seule voix.
Les relations entre les " gendarmes " du système
monétaire international s'en trouveraient plus
équilibrées. En s'affirmant comme une
" devise-clé ", l'Euro viendrait contester
l'omniprésence du dollar dans les relations internationales (le dollar
intervient actuellement dans 48 % des transactions commerciales
internationales, alors que les Etats-Unis ne réalisent que 12 % du
commerce mondial).
On observera, tout d'abord, que ce partage plus équilibré des
pouvoirs ne pourra se manifester que très progressivement.
L'Union
devra, en effet, pour parler d'une seule voix, résoudre auparavant un
certain nombre de difficultés d'ordre politique
. Par exemple, seuls
des Etats peuvent être membres du Fonds monétaire international.
L'Union ne pourra donc pas, dans l'immédiat, adhérer au Fonds. La
question se pose également à propos du G7 : l'Union y
sera-t-elle effectivement représentée en tant que telle ?
Ainsi, la réalisation de l'Union et les avantages qui en sont
attendus ne peuvent pas se ramener à une arithmétique
fondée sur le " poids économique de l'Europe "
. En
outre, quelle sera la politique de change de l'Union ? Il apparaît,
comme l'ont confirmé les Quinze en septembre 1997, que le Conseil de
l'Union, qui doit en principe définir les orientations
générales de la politique de change, ne pourra pas faire
prévaloir son point de vue, si celui-ci n'est pas compatible avec
l'objectif de stabilité des prix assigné à la Banque
Centrale Européenne.
Enfin et surtout, il faut bien reconnaître que l'émergence de
relations monétaires internationales plus stables n'est pas le seul
scénario vraisemblable. La compétition entre le dollar et l'Euro
peut très bien déboucher sur une instabilité accrue.
La mission d'information considère que la puissance économique et
commerciale de l'Europe, ainsi que la rigueur de ses politiques
monétaire et budgétaire, ne seront donc pas une condition
suffisante pour assurer la stabilité de l'Euro ni, a fortiori, pour
amener son taux de change face au dollar à un niveau compatible avec le
respect d'une concurrence équitable entre les deux continents.
Un renforcement de la coopération politique entre Etats membres est donc
plus que jamais nécessaire dans le respect des identités
nationales.
Par ailleurs, rappelons que le Traité de Maastricht a
privilégié la recherche d'une convergence nominale,
définie en référence à la stabilité, interne
(absence d'inflation) et externe (stabilité des taux de change), des
monnaies nationales. Or, la suppression des monnaies nationales suppose
également la convergence d'un certain nombre de variables
" réelles " ou " structurelles ", comme le niveau de
développement ou le niveau de productivité atteint par les pays.
Pour s'en convaincre, il suffit de se rappeler que les taux de change
constituent traditionnellement des instruments d'ajustement. Ils permettent
à des productions nationales dont les niveaux de productivité
sont hétérogènes, d'être également
compétitives sur les marchés internationaux : la comparaison des
prix s'effectue par leur intermédiaire. Supprimer les taux de change,
c'est donc mettre en concurrence des producteurs qui sont inégalement
armés, sauf si l'on s'est préalablement préoccupé
de faire converger les conditions dans lesquelles il exercent leurs
activités.
Il est donc nécessaire d'assurer une véritable
égalité de concurrence entre les producteurs.
B. ÉTABLIR UNE VÉRITABLE ÉGALITÉ DE CONCURRENCE ENTRE LES PRODUCTEURS
Nous
aborderons, lors de l'examen des propositions relatives à la
quatrième orientation, la nécessité de diminuer, au niveau
international, les distorsions de concurrence. Néanmoins, ce souhait ne
peut être exprimé que si, déjà, au niveau
Européen, on procède à une harmonisation de la
législation fiscale et sociale entre les agriculteurs.
En outre, au-delà du problème des aides nationales, les
propositions de la mission sur la modulation conduisent à s'interroger
sur l'émergence, à moyen terme, de fortes distorsions de
concurrence.
1. La nécessaire harmonisation des charges sociales et fiscales entre les agriculteurs Européens
Dès lors qu'il n'y a plus de taux de change pour compenser les disparités, l'instauration d'une concurrence équitable suppose une harmonisation sur le plan social et fiscal.
a) Des disparités sociales à réduire
Les
différences de rémunération et de niveau de charges
sociales créent d'importantes distorsions de concurrence en
matière agricole, notamment sur des produits à faible valeur
ajoutée.
Ainsi, les cotisations sociales patronales sur le salaire minimum sont, par
exemple, d'un peu plus de 38 % en France contre 12 % en Irlande.
De même, l'analyse des charges de main d'oeuvre entre la France et
l'Espagne conduit à constater d'importantes différences. En 1986,
on estimait que le coût salarial horaire minimum était de
35,15 francs en France et de 13,80 francs en Espagne. Dix ans plus
tard, d'aucuns estiment que le coût horaire dans le maraîchage
varie de 3 pour la France à 1 pour l'Espagne.
Coût total annuel
d'un ouvrier agricole salarié dans
les pays de l'Union Européenne
|
|||||
|
Ouvrier agricole : catégorie la plus représentative des salariés agricoles de chaque pays |
||||
|
ÉCU : Taux de change annuel |
SPA : Standard de pouvoir d'achat |
|||
|
1991 |
1995 |
1996 |
1991 |
1995 |
B |
16 688 |
19 214 |
|
16 934 |
18 299 |
Dk |
18 588 |
22 360 |
|
15 077 |
17 668 |
D |
17 744 |
22 453 |
20 955 |
16 391 |
18 942 |
E |
9 963 |
9 559 |
9 826 |
10 912 |
11 584 |
F |
14 150 |
17 007 |
16 874 |
14 259 |
15 590 |
I |
22 198 |
18 950 |
21 655 |
21 902 |
23 633 |
NL |
22 983 |
28 663 |
|
22 894 |
26 930 |
P |
4 597 |
5 802 |
|
7 029 |
8 672 |
UK |
16 957 |
16 634 |
|
17 610 |
19 134 |
Fin |
19 930 |
19 742 |
19 101 |
15 824 |
17 451 |
O |
16 897 |
23 170 |
23 295 |
17 172 |
20 188 |
Swe |
26 842 |
24 255 |
27 646 |
20 176 |
21 114 |
Lors des
différentes rencontres qu'ont eues des membres de la mission
d'information qui se sont rendus en février 1998 en Espagne,
certaines organisations professionnelles et syndicales ont reconnu la
réalité du problème que soulèvent ces questions
d'emploi et de protection sociale agricole. Ainsi, malgré l'absence de
véritable salaire minimum au niveau national, la
délégation a pu constater que le niveau minimum de salaire
mensuel se situait aux alentours de 2.500 francs. En outre, certains
dirigeants syndicaux ont indiqué qu'en Andalousie, les employés
recevaient en moyenne 6.500 pesetas
45(
*
)
par
jour pour 8 heures de travail, charges salariales incluses. De l'aveu
même de dirigeants agricoles, la main-d'oeuvre saisonnière est
constituée, d'une part, de personnes qui, en fonction des
récoltes, migrent d'une région à une autre et dont les
niveaux de salaires restent très en deçà des minima.
D'autre part, le recours à la main-d'oeuvre immigrée
s'avère systématique dans certaines zones de production.
Cette réalité, que plusieurs intervenants ont
évoquée lors des entretiens avec la délégation
sénatoriale, a fait l'objet de nombreux commentaires d'articles dans la
presse espagnole. Ainsi, le journal " La Veridad " du
jeudi 5 février 1998 -journal régional de la
région de Murcie- dénonce en première page les conditions
d'acheminement de cette main-d'oeuvre immigrée -y compris clandestine-
sur les lieux de récolte. Sur un salaire de 7.000 pesetas par jour,
le journal indique qu'environ 500 pesetas sont payées par cette
main-d'oeuvre pour être transportée sur les zones de production.
Ces distorsions de concurrence en matière de
rémunérations et de charges sociales entretiennent pour certaines
productions une tension permanente sur le marché
communautaire. Un
minimum d'harmonisation en la matière est d'autant plus
nécessaire que souvent, les Etats qui ont " un avantage
comparatif " (Espagne, Portugal...), se trouvent concurrencés sur
le marché mondial parce qu'ils trouvent, en face d'eux, des pays dont
les niveaux de rémunérations et de charges sociales sont encore
plus faibles comme certains Etats du Maghreb ou du Moyen-Orient.
Afin d'éviter cette spirale qui tend à favoriser le
" moins disant ", au détriment de nos producteurs, la mission
d'information, tout en reconnaissant l'utilité d'une certaine
flexibilité, propose d'accélérer l'harmonisation de la
législation sociale au niveau Européen.
b) Des législations fiscales trop disparates
Plutôt que de dresser un panorama exhaustif des
nombreuses
disparités fiscales entre les différents Etats membres, la
mission d'information a souhaité examiner plus spécifiquement la
question de l'installation des jeunes agriculteurs.
Il est important de souligner que les décisions prises dans certains
domaines, et qui ont une influence considérable sur l'installation des
jeunes agriculteurs, relèvent de l'autorité exclusive des Etats
membres.
En effet, l'aperçu des difficultés des jeunes qui s'installent
comme agriculteurs révèle qu'il s'agit, pour la plupart, des
mêmes obstacles que ceux rencontrés par les petites et moyennes
entreprises au moment délicat de la succession : droit de
succession, fiscalité, difficultés de crédit. L'analyse de
ces problèmes et de leurs conséquences économiques montre
l'utilité pour les Etats membres de coordonner certains aspects de
leurs politiques et d'envisager la possibilité d'adopter un certain
nombre de mesures
, sur le plan fiscal et légal, pour faciliter la
succession des entreprises et notamment des entreprises agricoles.
En matière de succession, les régimes juridiques, aussi bien que
les pratiques familiales, suivent et renforcent des conceptions
différentes de l'exploitation agricole. Dans certains Etats membres, la
conception fortement patrimoniale de l'exploitation entraîne le partage
égalitaire en nature des biens agricoles au moment de la succession, ce
qui conduit à un émiettement de la propriété
foncière. Ailleurs, le droit de succession reflète le principe de
la préservation de l'entreprise agricole, et dans certains cas cet
objectif s'allie à la sauvegarde économique des
cohéritiers.
La mission d'information souhaite que l'Union Européenne incite
vivement les Etats membres à examiner, dans le cadre de leur
compétence, les éventuelles solutions à apporter aux
difficultés rencontrées par les jeunes dans le cadre de la
succession des entreprises agricoles. Par exemple, là où une
compensation aux héritiers est prévue, il serait souhaitable que
le paiement de cette compensation puisse être échelonné sur
plusieurs années afin d'assurer la poursuite des activités de
l'entreprise sans la priver de ses ressources financières, ou même
pour éviter que le jeune ne renonce à la reprise.
La charge fiscale liée à l'opération de transmission (ou
aux aides à l'installation) s'avère une des principales
difficultés pour les jeunes agriculteurs. Les régimes fiscaux en
matière de transmission montrent des différences marquées
soit d'un Etat à l'autre, soit selon le mode de transmission
(héritage ou transmission du vivant comme la vente et la donation) au
sein d'un même Etat. Il y a donc lieu de recommander aux Etats membres
d'examiner, dans le cadre de la formulation de leur politique
économique, la possibilité d'octroyer des exonérations ou
des réductions fiscales sur la transmission des entreprises agricoles.
Comme condition, les repreneurs pourraient être tenus de s'engager
à poursuivre l'activité économique pendant une certaine
période. La survie d'un plus grand nombre d'entreprises permet une
diminution des pertes d'activité économique et d'emploi et la
conservation d'une source de recettes fiscales et de contributions sociales.
La mission d'information souhaite que les Etats membres fassent
prévaloir un principe de neutralité fiscale pour les
opérations effectuées en vue de préparer efficacement la
transmission d'une entreprise agricole : instauration d'une
société, fusion, scission, échange d'actions ou
autres.
2. La possibilité d'octroyer des aides nationales : un accord sous conditions
La PAC
n'a pas fait disparaître les aides nationales à l'agriculture,
dont le nombre et la diversité découragent d'ailleurs
recensements et études comparatives.
Il appartient à la Commission Européenne de contrôler dans
quelle mesure les aides nationales sont compatibles avec la
réglementation communautaire et n'entraînent pas de distorsions de
concurrence. Lorsqu'une aide est jugée contraire aux règles de
fonctionnement du marché commun, et si l'Etat membre concerné
refuse de la supprimer ou de la modifier dans le délai imparti, la
Commission ouvre une procédure d'infraction.
Aux termes de l'article 92 du Traité de Rome, un Etat membre ne
doit pas accorder d'aides qui menacent de fausser la concurrence en favorisant
certaines entreprises ou certaines productions. Ce même article
prévoit cependant une série de dérogations (aides à
caractère social, aides destinées à remédier aux
dommages causés par des calamités naturelles, etc...). D'autres
aides peuvent également bénéficier de cette
dérogation pour autant qu'elles correspondent aux catégories
suivantes :
- aides favorisant le développement économique de
régions connaissant un grave sous-emploi ou un niveau de vie
anormalement bas ;
- aides favorisant la réalisation d'un projet important
d'intérêt Européen ou visant à remédier
à une perturbation grave de l'économie d'un Etat membre ;
- aides facilitant le développement de certaines activités
ou de certaines régions ;
- toute aide acceptée par décision du Conseil statuant
à la majorité qualifiée.
Cette politique visant à faciliter la transmission-reprise des
exploitations doit être particulièrement effective dans les zones
à densité démographique et potentiel économique
faibles par une meilleure régulation des transferts des droits à
produire et à primes qui favorise vraiment les projets d'installation
plutôt que l'agrandissement et la mise en place de nouvelles initiatives
afin de se donner les moyens d'une politique volontariste de tenue de l'espace
de ces zones
46(
*
)
.
Ces dérogations ne sont pas automatiques. C'est la Commission qui
juge de la compatibilité de ces subventions avec les règles
communautaires. Pour être admise, l'aide doit répondre à
plusieurs critères :
- elle doit être économiquement nécessaire,
c'est-à-dire que l'objectif recherché ne pouvait pas être
atteint sans elle ;
- l'importance et la durée de l'aide doivent être
proportionnées à l'objectif poursuivi par l'aide ;
- elle ne doit jamais constituer qu'un financement de démarrage,
les aides illimitées destinées à soutenir des
activités courantes (aides au fonctionnement) étant interdites ;
- les seuls intérêts d'un pays ou d'une entreprise ne
justifient pas l'autorisation d'une aide : c'est l'ensemble de la
Communauté qui doit bénéficier des avantages
accordés.
La Commission a toujours cherché à contrôler ces aides
nationales afin de faire respecter les règles du Traité.
L'austérité communautaire a néanmoins souvent
incité les Etats membres, pour en compenser les effets, à
multiplier encore les aides nationales.
L'actualité communautaire est riche d'exemples d'aides d'Etat
agricoles : il peut s'agir de prêts à taux bonifié, de
capitalisation et de recapitalisation, de renonciation à des droits, de
rééchelonnement de dettes, de garanties d'Etat ou d'aides
à l'achat d'entreprises.
En 1996, la Commission a reçu 341 notifications d'aides d'Etat dans le
secteur agricole -contre 373 en moyenne au cours des trois années
précédentes-. Les notifications des nouveaux Etats membres ont
fortement contribué à ce que ce total soit élevé
(25 en provenance d'Autriche et 23 de Finlande).
Dans l'ensemble, la Commission a approuvé la plupart des mesures qui lui
ont été notifiées. Plusieurs d'entre elles ont fait
l'objet de modifications après leur notification, afin d'être
alignées sur les normes communautaires.
La mission d'information, tout en reconnaissant la légitimité
de ces aides, souhaite, néanmoins, que les autorités
communautaires veillent avec soin à éviter toute distorsion de
concurrence.
3. Le danger de la " renationalisation " de la PAC
Les
nouvelles propositions de la Commission sur la modulation des aides remettent
à jour les risques de renationalisation de la PAC, conduisant à
des inégalités de traitement importantes entre agriculteurs.
La politique communautaire agri-environnementale permet d'illustrer ce qu'on
qualifie habituellement de " délégation de la politique
d'aides directes ". Il est en effet difficile de fixer de manière
décentralisée des cahiers des charges environnementaux pertinents
au sein de l'Union Européenne, du fait des conditions agronomiques et de
la spécificité locale des problèmes. Cette
réalité est bien prise en compte par l'Acte unique de 1986
(article 130 R, 4) et par les règlements agri-environnementaux
de 1992 qui précisent que les conditions d'octroi et le niveau des aides
doivent être définis par les pays membres et être soumis
à l'approbation de la Commission. Ainsi, la Commission définit
l'instrument et demande à l'Etat de présenter un projet.
Or, dans ce cas, les gouvernements sont souvent enclins à accorder des
soutiens importants au secteur agricole, l'Etat définissant un programme
qu'il ne finance que partiellement puisque la grande majorité du
financement est assurée par Bruxelles. Il peut en résulter une
mauvaise allocation des ressources et une perte d'efficacité
environnementale.
Au simple coût budgétaire, s'ajoute le
coût des distorsions de concurrence générées par les
politiques décentralisées
.
Certes, les mesures d'accompagnement sont ciblées sur des régions
spécifiques et les sommes en jeu, sans être négligeables
(6,5 milliards d'écus pour la période 94-97) sont faibles
par rapport à d'autres formes de soutien.
La mission d'information ne souhaite en aucune façon " faire le
procès " des mesures agri-environnementales. Cependant, celles-ci
illustrent bien les limites et les dangers de multiplier des mesures tendant
à déléguer davantage la gestion d'autres composantes de la
PAC aux Etats-membres.
En principe les paiements agri-environnementaux sont limités à
couvrir des pertes de revenu liées à la mise en oeuvre de
pratiques plus respectueuses de l'environnement. En pratique, les Etats ont une
grande marge de manoeuvre et peuvent, de fait, soutenir les revenus de certains
agriculteurs sous couvert de mesures agri-environnementales.
A cause de la possibilité d'aides financées intégralement
par le budget national, et ce même dans le cadre d'une enveloppe
communautaire, certains craignent une utilisation de ces mesures comme
parapluie pour un soutien au revenu déguisé. Ces pratiques se
sont d'ailleurs généralisées en Autriche - 91 %
du territoire y sont éligibles aux primes agro-environnementales- en
Allemagne, en France et en Italie pour maintenir des cultures extensives. Il y
a ainsi lieu de penser que des objectifs de soutien au revenu se sont
rajoutées aux préoccupations environnementales dans la
définition des programmes. Il en est de même pour le niveau des
primes.
Les sommes payées pour la réalisation d'un objectif donné
sont très variables. Les aides globales des programmes sont par exemple
de 30 écu/ha et 500 écu/ménages concerné
en Espagne, contre respectivement 500 et 4 500 écu au
Luxembourg.
Si de telles politiques décentralisées modifient les incitations
à produire, elles ne se limitent donc pas à soutenir des revenus
mais peuvent avoir pour but d'influer sur les conditions de concurrence.
Or,
le fait que les aides agri-environnementales soient classées dans la
boîte " verte " dans l'Uruguay Round ne constitue bien
évidemment pas une preuve de leur absence d'impact sur la production
.
Certes cet effet de la décentralisation des politiques est difficile
à évaluer.
La mission d'information rappellera simplement que lors de la crise de l'ESB,
chaque Etat a pu disposer d'une enveloppe budgétaire pour
dédommager les productions du secteur bovin. Or, alors qu'en France les
producteurs de vaches allaitantes ont perçu une somme conséquente
par tête de bétail, les producteurs allemands ont reçu une
participation très faible de la part de l'Etat allemand.
C'est pourquoi les propositions de la Commission Européenne en
matière de " décentralisation " des politiques,
même si les sommes considérées proviennent du
Feoga-garantie, doivent être examinées avec beaucoup de
précaution et faire l'objet de projections adéquates.
L'instauration de contrôles communautaires et de mécanismes
incitatifs est, de plus, nécessaire. Ces contrôles peuvent
consister en la fixation par l'autorité communautaire de critères
précis (seuils...) permettant d'éviter toute différence
importante de traitement entre chaque Etat.
C. PRENDRE EN COMPTE TOUTES LES PRODUCTIONS AGRICOLES
L'achèvement du marché unique agricole
dépend
de l'aptitude de la Communauté Européenne à proposer une
réforme globale, prenant en compte l'ensemble des productions agricoles
Européennes.
La PAC ne peut plus et ne doit plus faire l'objet de réformes
ponctuelles qui laissent de côté des pans entiers de la production
agricole. On peut admettre que la réforme de 1992 n'ait pas inclus
l'ensemble des productions méditerranéennes, la phase transitoire
d'intégration de l'Espagne et du Portugal au sein de la
Communauté n'étant pas définitivement achevée.
Tel n'est plus le cas aujourd'hui.
1. Une réforme englobant toutes les productions
a) L'importance des productions méditerranéennes
Dès 1992, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la
Grèce
et dans une moindre mesure la France -soit à l'époque la
moitié des Etats membres de la Communauté Européenne-
avaient regretté que la réforme de la PAC prennent en compte
uniquement les productions dites " septentrionales ",
c'est-à-dire les céréales ainsi que l'élevage
allaitant et laitier.
Les propositions de la Commission de 1997 et 1998 renouvellent l'oubli de 1992.
Certes la Commission Européenne souligne, dans l'exposé des
motifs des propositions de règlements du Conseil relatifs à la
réforme de la Politique Agricole Commune, l'importance qu'elle attache
aux produits méditerranéens en présentant une proposition
de réforme de l'organisation de marché de l'huile d'olive, qui
s'ajoute à la proposition déjà présentée sur
le tabac.
Néanmoins, les productions méditerranéennes ne font
l'objet d'aucune proposition concrète de la part de la Commission.
La mission d'information juge cette position extrêmement
préjudiciable pour l'avenir de l'agriculture Européenne.
Elle considère que l'absence de véritable prise en compte dans la
réforme de la PAC de ces productions équivaut à les
considérer comme accessoires et, à terme, à les
marginaliser.
Une telle démarche constitue une grave erreur d'analyse.
En effet, sur le plan communautaire, les productions
méditerranéennes représentent une part importante de la
production totale. En ce qui concerne l'huile d'olive, 80 % de la
production mondiale (1,85 % millions de tonnes) proviennent de l'Union
Européenne et la culture de l'olivier concerne 2 millions
d'exploitations en Europe. Les fruits et légumes représentent
pratiquement 25 % de la production agricole totale en Europe. Enfin,
l'Union Européenne occupe le premier rang mondial dans le secteur
viti-vinicole avec 60 % de la production mondiale.
Au niveau national, ces productions ont un impact économique et social
déterminant. L'olive représente ainsi en Espagne 400 000
emplois directs et indirects dans des zones -souvent- à fort handicap
naturel.
Cet " oubli " des productions méditerranéennes au sein
du projet de réforme de la PAC procède dans une large mesure de
la démarche au cas par cas adoptée par la Commission
Européenne : le secteur des fruits et légumes a
été réformé en 1996. La commission a proposé
une modification des OCM tabac et huile d'olive. Elle s'est engagée
à proposer dans les semaines à venir une réforme de l'OCM
viti-vinicole.
La démarche de la commission est donc révélatrice de sa
volonté au pire de ne pas inclure les productions
méditerranéennes dans la réforme de la PAC, au mieux
d'effectuer ces réformes au cas par cas et en parallèle avec
celles des céréales, de la viande bovine et du lait.
Aux termes d'un tel constat, la mission d'information s'est interrogée
sur les raisons qui peuvent motiver le refus de la Commission de prendre en
compte ces productions dans la réforme de la PAC.
- Est-ce la relative faiblesse du coût de ces OCM au sein du
Feoga ? Si tel est le cas, nous sommes confrontés à un
véritable aveu d'inégalité de traitement : ces
productions, étant loin d'être marginales en terme de volume de
production et de commercialisation, pourquoi ne sont-elles pas autant
aidées que d'autres ?
Source : DGVI et FEOGA
- Est-ce parce qu'elles concernent un nombre relativement limité de
pays ? Une telle affirmation serait excessive puisqu'un tiers des Etats membres
de l'Union Européenne est concerné ( Portugal, Espagne,
Grèce, l'Italie et France) ;
- Est-ce parce que, aux yeux de la Commission, l'inclusion dans la
réforme de la PAC de ces productions méditerranéennes
compliquerait la négociation sur le volet agricole du " Paquet
Santer " et aboutirait peut-être à un blocage ?
Un tel argument pourrait être considéré soit comme un aveu
d'impuissance de la part des autorités communautaires, soit comme
totalement erroné puisqu'actuellement la proposition de réforme
de l'huile d'olive provoque de la part de l'Espagne un rejet complet des
propositions communautaires. La commission prendra-t-elle le risque au mois de
juin de proposer une réforme de l'OCM viti-vinicole qui
déclencherait, elle aussi, de telles réactions ?
- Est-ce, enfin, pour respecter une philosophie globale tendant à
considérer que ces productions méditerranéennes doivent
être régies par une logique de limitation de production
(viticulture, quota maximal garanti communautaire pour l'huile d'olive...)
alors que les autres productions sont destinées à s'aligner,
quant à leurs prix, sur les marchés mondiaux, sans limitation de
production ?
Cette distinction n'est pas économiquement valide : parmi les
productions méditerranéennes, le secteur des fruits et
légumes s'inscrit déjà dans une logique de
marché ; par contre, la production de lait est encadrée par
des quotas.
La mission d'information souhaite donc que la réforme de la PAC
intègre l'ensemble des productions Européennes et notamment,
méditerranéennes.
Elle s'associe aux propositions formulées par MM. Jean Huchon et
Louis Minetti, en ce qui concerne les fruits et légumes, notamment quant
à l'instauration d'un front méditerranéen dans ce
secteur
47(
*
)
.
b) La réalité agricole de l'Outre-mer
Très éloignés de l'Europe, les quatre départements
français d'Outre-mer totalisent un million et demi d'habitants sur une
superficie qui dépasse le sixième de celle du territoire
métropolitain.
A la signature du traité de Rome le 27 mars 1957, les DOM
français étaient la seule partie du territoire communautaire
extrêmement éloignée du continent Européen. La
reconnaissance de cette spécificité par l'article 227.2 du
traité, confortée par l'arrêté " HANSEN "
de la Cour de Justice des communautés Européennes de 1978, a
justifié des dérogations dans l'application de l'acquis
communautaire, dérogations dont ont pu bénéficier depuis,
les régions ultrapériphériques de l'Espagne et du Portugal.
Ainsi que le définit le nouvel article 299.2 du traité de
Rome, la situation de ces territoires est "
aggravée par leur
éloignement, l'insularité, leur faible superficie, le relief et
le climat difficile, leur dépendance économique vis-à-vis
d'un petit nombre de produits, facteurs dont la permanence et la combinaison
nuisent gravement à leur développement
".
De plus, l'héritage historique colonial a laissé des traces
durables. La logique coloniale, tournée vers l'exportation, a
privilégié les cultures de la canne (transformée en sucre
ou en rhum), de la banane, de la vanille, des plantes à parfum ou encore
de l'ananas, au détriment des productions vivrières.
Malgré les réformes foncières entreprises en Guadeloupe et
à la Réunion, la répartition des terres et les modes
d'exploitation sont, en outre, restés assez archaïques ; le
fermage est, ainsi, peu fréquent.
Par ailleurs, dans les îles, une forte pression urbaine réduit
inexorablement la surface agricole utile et renchérit le coût du
foncier du fait d'un marché quasi inexistant. Les très petites
exploitations prédominent : neuf sur dix comptent moins de cinq hectares.
Les handicaps qui résultent d'un relief souvent accidenté et de
sols peu adaptés aux techniques modernes freinent la mécanisation
des récoltes. Les actifs sont assez peu formés et insuffisamment
organisés. Le statut d'agriculture est peu rémunérateur,
donc plutôt dévalorisant.
Enfin, la réalité agricole doit aussi être replacée
dans un contexte social difficile, caractérisé par des taux de
chômage très largement supérieurs à ceux
rencontrés en métropole ou dans les autres régions
communautaires. La préservation de l'emploi agricole constitue donc un
impératif pour l'économie toute entière de ces
départements.
Rappelons que la filière canne-rhum représente 30 000
emplois totaux dont 22 000 emplois directs, la filière banane
25 000 emplois totaux dont 15 000 emplois directs et la
filière ananas transformé 600 emplois totaux dont 550
directs.
Or le marché local de ces régions est étroit et fragile.
Des déséquilibres peuvent apparaître très rapidement
alors que le poids de l'import-export est prépondérant.
Les productions des DOM sont toujours dépendantes de l'importation
d'intrants dont les surcoûts liés au transport grèvent leur
prix de vente. Par ailleurs, ces marchés sont captifs pour les
productions des pays environnants dont les coûts de la main-d'oeuvre ne
sont pas comparables à ceux supportés par les producteurs domiens.
Les exportations des DOM rencontrent des difficultés croissantes du fait
de la libéralisation des marchés, engagée avec force, en
particulier par les Etats-Unis, ce qui conduit la Communauté
Européenne à accepter de plus en plus de concessions tarifaires
sur les produits tropicaux.
Face à ces handicaps, l'agriculture domienne, quels que soient ses
efforts pour accroître sa technicité et réduire ses
coûts, ne pourra pas compenser en totalité son manque de
compétitivité.
En raison de la place importante du secteur agricole dans les
équilibres socio-économiques des DOM, l'Etat, les
collectivités territoriales et l'Union Européenne ont
cherché à préserver les activités agricoles
existantes, tout en encourageant une indispensable diversification.
Nombre de produits des DOM dépendent des mécanismes de soutien
que certains aimeraient remettre en cause. Des attaques en ce sens proviennent
régulièrement des Etats-Unis (et le dernier en date à
l'encontre de la banane est tout à fait significatif), mais
s'élèvent également au sein même de l'Union
Européenne, et plus particulièrement de sa moitié
septentrionale.
L'agriculture des DOM bénéficie des aides PAC à
travers plusieurs organisations communautaires de marchés
:
-
l'OCM sucre
(Organisation Commune du Marché du Sucre)
réserve un quota aux DOM suffisant au regard de leur production
(436 000 T de quota A et 46 000 T de quota B pour une
production globale d'environ 300 000 T).
En outre, une aide au transport du sucre vise à assurer aux sucres des
DOM le prix d'intervention communautaire lors de leur écoulement dans la
Communauté. Son coût de 60 à 70 MF/an est relativement
modique.
-
l'OCM banane
(Organisation Commune du Marché de la banane)
mise en place en 1993 a permis, après la suppression des marchés
cloisonnés, le maintien d'une activité fondamentale pour les deux
départements antillais. L'aide communautaire de l'ordre de
600 millions de francs en 1997 pour 370 000 T de production, ne
peut à elle seule assurer la présence de la banane antillaise sur
les marchés français et Européens. En effet, le prix de
revient pour le producteur communautaire antillais est 3 fois supérieur
à celui des producteurs d'Amérique centrale (4,50 F/kg
contre 1,50 F/kg).
C'est pourquoi la réforme de l'OCM banane en cours, qui fait suite
à la condamnation de l'Union Européenne par l'OMC (organisation
mondiale du commerce) doit nécessairement inclure une garantie
d'écoulement aux productions communautaires comme le propose le rapport
de M. Jean Huchon en date du 25 février 1998
48(
*
)
.
-
les OCM liés à l'élevage
ne
bénéficient que partiellement aux départements
d'outre-mer, l'octroi des primes animales étant conditionné
à l'identification du cheptel, qui n'est pas toujours
opérationnelle dans ces départements.
-
l'OCM ananas
(Organisation Commune du Marché de l'ananas)
dont seule la Martinique bénéficie, puisqu'elle ne vise que
l'ananas transformé, a permis le maintien d'une activité tant de
production (500 employés) que de transformation
(300 employés permanents et occasionnels). L'aide communautaire
d'un montant de 50 et 70 MF/an, jugée trop coûteuse par les
instances Européennes, ne fait que refléter les distorsions de
concurrence avec les pays du Sud Est asiatique. Pourtant la Commission
Européenne souhaite réviser profondément le soutien
à cette production.
Les soutiens reçus doivent être relativisés : le sucre
et plus ponctuellement l'ananas transformé, l'élevage, le riz
guyanais et plus récemment la banane ont certes profité de
l'organisation des marchés de la Politique agricole commune (PAC), mais,
comme d'autres productions, ont souffert de la concurrence des pays ACP
(Afrique, Caraïbes et Pacifique) qui bénéficient d'un
accès privilégié au marché communautaire au titre
des conventions de Lomé.
Outre la place qu'ils occupent sur les marchés Européens, les
produits importés de pays en voie de développement sont, pour une
part, vendus dans les DOM. Les producteurs locaux voient en conséquence
leurs débouchés se restreindre doublement.
Face à ce problème de l'applicabilité de la PAC aux
départements d'outre-mer et à la quasi ignorance de cette
agriculture " lointaine " par la Commission Européenne
jusqu'au milieu des années 1980, l'agriculture domienne a vécu de
plans de relance en plans de redressement.
Ce n'est que le 29 décembre 1989, suite au dépôt
par la France, d'un mémorandum " pour une meilleure insertion des
DOM dans la Communauté Européenne ", que l'Europe a
accepté de reconnaître concrètement les handicaps de cette
agriculture insulaire
.
Les aides POSEIDOM (programme d'options spécifiques à
l'éloignement et à l'insularité des départements
français d'outre-mer) viennent compléter les aides PAC.
Sur la base de l'article 227, paragraphe 2 du Traité, le
Conseil des communautés Européennes a adopté le
22 décembre 1989 un programme dont l'objectif était de
permettre le développement économique et social des DOM.
Le règlement adopté le 16 décembre 1991,
modifié le 30 octobre 1995 comporte diverses mesures en
particulier des aides visant à :
- favoriser l'approvisionnement en céréales destinées
à l'alimentation animale ;
- développer l'élevage, la culture du riz en Guyane, les
productions de fruits, légumes et fleurs et la commercialisation de ces
produits ;
- améliorer la compétitivité de la filière
canne/sucre/rhum ;
- mettre en place des actions en matière vétérinaire
et phytosanitaire ;
- soutenir des programmes instaurés dans le cadre des
interprofessions.
Malgré les délais souvent très long mis par la Commission
pour engager ces mesures, la plupart d'entre elles sont maintenant
entrées en vigueur. Les lourdeurs administratives imposées par la
Commission pour leur application ne doivent pas conduire à sous-estimer
l'intérêt majeur que présente le POSEIDOM pour
l'agriculture des DOM, intérêt qui devrait apparaître dans
le bilan actuellement en cours de réalisation.
L'ensemble des aides communautaires, qu'elles s'inscrivent dans le cadre de
la politique agricole commune ou dans POSEIDOM, ne font que compenser certains
handicaps. Si le chemin est encore long pour une véritable
professionnalisation de l'agriculture outre-mer, les progrès accomplis
sont indéniables.
Toutefois, la politique de parité sociale engagée -à juste
titre- dans ces départements et leurs handicaps géographiques ne
leur permettront pas d'être compétitifs avec des pays de latitude
comparable : les soutiens, s'ils doivent être
réorientés, restent donc indispensables.
Si les produits méditerranéens (huile d'olive, tabac, vin) sont
cités dans l'exposé des motifs du projet de réforme du
FEOGA -orientation et garantie,
les régions
ultrapériphériques ne sont mentionnées ni dans
l'exposé des motifs, ni dans les textes de règlement
. Seules
sont évoquées dans ce document les régions de
l'objectif 1 en particulier dans les articles 13 à 19 du
projet (chapitre V), dont les départements d'Outre-mer
relèvent. Comme l'introduit le considérant correspondant :
"
le soutien aux zones défavorisées doit être un
instrument de base du maintien et de la promotion des méthodes de
culture à faible consommations intermédiaires
". Ainsi,
les zones défavorisées sont de manière implicite les zones
de montagne ou les zones en déprise mais aucunement une agriculture
ultrapériphérique. Ceci est confirmé lorsqu'on regarde le
plafonnement des aides compensatoires aux handicaps figurant en annexe du
projet : le niveau de l'aide fixé à 200 écus/ha
maximum ne correspond pas aux besoins des DOM mais s'adresse à une
agriculture extensive, consommatrice d'espace. Ceci est d'autant plus vrai que
l'article 53 du texte abroge l'article 21 du POSEIDOM agricole. Cet
article permettait de déroger aux divers règlements structurels.
La mission d'information constate ainsi, non seulement que le texte
proposé ne répond pas aux attentes de ces régions, mais
qu'il remet en cause la spécificité des DOM et de l'agriculture
tropicale.
Des adaptations paraissent nécessaires
.
Alors que les enveloppes financières globales réservées
aux régions de l'objectif 1 seraient largement
approvisionnées, les DOM ne bénéficieraient pas de
façon marginale des aides correspondantes.
Des modifications à la proposition actuelle sont donc
nécessaires indépendamment de toutes mesures
complémentaires prenant en compte les handicaps lourds et notamment
celui de l'éloignement.
Une mention particulière sur la situation originale des régions
ultrapériphériques doit être obtenue dans le projet de
règlement, soit dans le cadre du chapitre V " zones
défavorisées ", soit dans un article autonome.
Cette référence doit s'accompagner de proposition de
critères particuliers, sans relation avec ceux figurant pour les autres
zones de l'objectif 1 : l'agriculture des DOM ou
ultrapériphérique est intensive. Si nous ne devons pas ignorer
les critères environnementaux, de protection des paysages,... ils ne
doivent pas constituer les références exclusives pour
l'attribution des aides.
Enfin, non seulement l'article 21 du POSEIDOM doit être maintenu
mais, il doit être dans le projet de règlement du FEOGA,
conforté.
Au stade actuel des négociations, aucune proposition émanant de
la France ou des 3 autres pays concernés par les régions
ultrapériphériques (Grèce, Espagne, Portugal) n'a
été formulée.
De plus, la politique générale agricole doit être
complétée dans les DOM par l'élaboration d'un POSEIDOM III
qui devra être mis en place simultanément à la
réforme de la PAC et sera élaboré à partir du bilan
des deux programmes initiaux qui est en cours. Les productions de
diversification et vivrières devront y trouver une place
privilégiée en laissant une large place à la
subsidiarité, dans l'esprit de la réforme de la PAC.
L'agriculture des DOM doit tout à la fois se défendre et
s'adapter. A l'avenir, les soutiens qu'elle reçoit devront mieux prendre
en compte ces deux objectifs, et ne plus ignorer sa spécificité.
La mission d'information souhaite que cette agriculture soit reconnue par
l'Europe, et que soit pris en compte le retard de développement de ces
régions afin de maintenir le revenu de nos agriculteurs.
D. DÉVELOPPER LES USAGES NON ALIMENTAIRES DES PRODUITS AGRICOLES
Si la
première finalité de l'agriculture est l'alimentation, celle-ci
n'est pas exclusive : ainsi les biocarburants, lubrifiants ou plastiques
biodégradables, molécules pour la pharmacie, les
cosmétiques ou les détergents sont autant de valorisations
industrielles possibles pour les matières premières agricoles.
Trois types d'utilisation sont envisageables :
- en consommation directe par les ménages (horticulture, animaux de
compagnie),
- en fourniture directe pour la transformation vers les industries non
alimentaires (laine, tabac, lin, gomme, plantes pharmaceutiques),
- en fourniture directe, via les industries non alimentaires (amidon,
sucre, caséine, collagène, cuir).
Ces différents usages ont une caractéristique commune. Tous se
fondent sur la valorisation des molécules carbonées qui sont la
base de toute matière vivante.
Les secteurs concernés sont soit traditionnels (filière bois,
filière cuir, textiles, tabac), soit plus récents, permettant
l'utilisation des molécules carbonées pour la chimie ou la
pharmacie. Il est à noter qu'avant même l'introduction de la PAC,
les industries chimiques et pharmaceutiques s'approvisionnaient en sucre et en
amidon, en huile et en graines végétales pour la fabrication de
leur produits.
Certes, seuls les biocarburants donnent l'impression d'avoir franchi
l'étape industrielle à grande échelle. Quant aux autres
" éco-produits ", ils avancent à petits pas, toujours
cantonnées aux marchés de niche où la concurrence du
pétrole et de sa chimie se fait moins acharnée.
L'étude de l'industrie de l'amidon et des bio-carburants tend
à démontrer la possibilité pour l'Europe de
répondre à la demande de matières premières
agricoles pour des utilisations non alimentaires.
1. Des exemples d'utilisation de produits agricoles à des fins non alimentaires
a) Les débouchés non alimentaires du secteur amidonnier
La
mission d'information s'est intéressée tout
particulièrement à cette industrie.
Le secteur amidonnier de l'Union européenne représente plus de
18 000 emplois directs pour un chiffre d'affaires de l'ordre de
30 milliards de francs dont une partie non négligeable, 15 %,
liée à l'export vers les pays tiers. La France représente
entre 25 % et 30 % de l'activité amidonnière
Européenne. La croissance du secteur est comprise entre 3 et 5 %
par an.
Cette industrie transforme des céréales, principalement du
maïs, du blé et des pommes de terre issus de près d'un
million cinq cent cinquante mille hectares dans l'Union Européenne.
Près de 7 millions de tonnes d'amidon et de fécule sont
produites chaque année en Europe.
La matière première reste le premier coût de production.
Cette industrie, aussi dynamique et innovante soit elle, peut difficilement
rivaliser avec l'industrie amidonnière des pays tiers et en particulier
des Etats-Unis.
En l'absence d'un débouché " isoglucose "
conséquent
49(
*
)
, l'industrie
Européenne a développé ses débouchés dans le
non alimentaire (hors éthanol), à savoir le papier, le carton et
la fermentation. Dans ce dernier secteur, la France abrite les principales
unités Européennes avec Eurolysine, Orsan, Rhône-Poulenc
notamment.
Mais, ces industries utilisatrices sont ouvertes à la concurrence et ne
bénéficient pas ou peu de protections aux frontières.
C'est pourquoi, un régime de restitutions à la production a
été mis en place dès 1968 puis réformé en
1978 et en 1986. Depuis 1986, ces restitutions sont sensées compenser
l'écart de prix de matières premières
céréales de l'Union Européenne et le prix mondial du
maïs.
Toutefois, depuis 1994, la Commission ne compense plus intégralement
cette différence, avec pour conséquence un arrêt des
investissements dans l'industrie de la fermentation en Europe alors que les
Etats-Unis investissent fortement aujourd'hui dans ce secteur à valeur
ajoutée.
b) Les biocarburants : un programme à inscrire dans la durée
Le
développement de la production des biocarburants en France répond
à l'objectif prioritaire de lutte contre la pollution de l'air. En
outre, il offre de nouveaux débouchés pour les productions
agricoles et contribue à la réduction de la facture
énergétique de la France.
Deux familles de biocarburants sont actuellement développées
dans notre pays :
-
les esters d'huiles végétales (ester de colza
incorporé dans le gazole ou le fioul domestique, ester de tournesol
actuellement testé pour être incorporé dans un premier
temps au fioul) ;
- l'éthanol, produit à partir de blé et de
betteraves, incorporable dans le supercarburant sans plomb sous forme d'Ethyl
Tertio Butyl Ether (ETBE).
Au plan agricole
Au titre des semis automne 1996-printemps 1997, cette production a
concerné plus de 85 % des 234 000 hectares de cultures
pratiquées sur terres gelées dans le cadre de la réforme
de la PAC :
Colza Ester |
150 000 ha |
Tournesol Ester |
30 000 ha |
Blé éthanol |
10 500 ha |
Betteraves éthanol |
12 500 ha |
En 1995,
près de un million d'hectares de jachère étaient
consacrés aux cultures bioénergétiques. Or, elles ont
couvert seulement 350 000 ha en 1997.
Confirmant la tendance observée depuis la campagne
précédente, on note un nouveau recul des superficies
emblavées en colza ester du fait :
- du maintien à 5 % du taux de gel minimal obligatoire et de
la suppression de l'obligation de rotation des parcelles gelées,
permettant de localiser définitivement la jachère sur des terres
de moins bonne qualité ;
- de l'écart de rémunération entre graines
alimentaires et non alimentaires ; les efforts entrepris par les
filières de production ont généré une diminution de
cet écart au cours des deux dernières années.
Cette baisse des surfaces emblavées ne remet cependant pas en cause le
développement de cette filière.
Afin d'assurer sa pérennité, l'interprofession des
oléagineux s'est d'ailleurs engagée dans un schéma
prévoyant un net encouragement aux producteurs de colza
énergétique, notamment par l'amélioration progressive du
prix payé, en augmentation de 37 % par rapport à l'avant
dernière campagne.
En ce qui concerne la filière éthanol, la mise en service en 1996
de deux unités d'ETBE, construites par TOTAL et ses partenaires
agricoles à Dunkerque et à Gonfreville, s'est traduite par une
augmentation des surfaces emblavées en blé et betteraves
éthanol.
Au plan industriel
La mise en place d'un tissu industriel se réalise par l'agrément
d'unité pilotes de production.
Pour la production d'ester-carburant, sept usines sont actuellement
agréées pour un volume de 322 500 tonnes par an, dont
120 000 tonnes pour l'unité de Rouen, premier outil affecté
en totalité à la production de biocarburants.
L'éthanol est destiné à la fabrication d'ETBE (Ethyl
Tertio Butyl Ether) dont la production est assurée par les unités
suivantes :
- ELF à Feyzin pour 92 900 tonnes d'ETBE incorporant
550 000 hl d'éthanol ;
- TOTAL à Dunkerque pour 59 000 tonnes d'ETBE soit
350 000 hl d'éthanol ;
- TOTAL à Gonfreville identique à la
précédente.
Au plan fiscal
Au titre du soutien public pour l'année 1996,
le montant de
l'exonération fiscale dont ont bénéficié en France
les bio-carburants s'est élevé à 564 millions de
francs pour l'ester de colza (4 millions hl) et 250 millions de
francs pour l'éthanol-ETBE (760 000 hl).
Introduite par la loi de finances initiale pour 1992, l'exonération
fiscale de la taxe intérieure de consommation sur les produits
pétroliers (TIPP) dont bénéficient les biocarburants a
été plafonnée par la loi de finances rectificative pour
1993.
Compte tenu du coût de production des carburants d'origine agricole,
actuellement supérieur de 2F/lt à celui des carburants fossiles,
cette exonération est indispensable pour assurer l'équilibre
économique de la filière.
A terme, le niveau de défiscalisation est appelé à
décroître en fonction de l'évolution du contexte
économique et des gains de productivité réalisés
par la filière.
Au plan communautaire, le dispositif national d'exonération fiscale
des biocarburants a été mis en cause par la Commission
Européenne, qui juge que les mesures prises par la France introduisent
une discrimination entre :
-
les productions agricoles autorisées pour la production de
biocarburants et les autres productions susceptibles d'être
utilisées à de telles fins ;
- les cultures sur jachère et hors jachère ;
- les producteurs français et communautaires de biocarburants.
La Commission Européenne considère que l'avantage fiscal
constitue une aide indirecte à certaines productions agricoles,
incompatible avec les organisations communes de marché et une aide
directe à certains produits industriels, contraire à
l'article 92 du Traité de Rome.
Tout en contestant les critiques adressées par Bruxelles à son
dispositif passé et afin de poursuivre le développement de la
filière biocarburant,
la France a engagé avec la Commission
des discussions qui l'ont conduite à proposer aux autorités
communautaires un dispositif amendé en février 1996.
Ce dispositif consiste :
- d'une part, à autoriser tout type de biocarburant
répondant à des critères techniques objectifs, sans
référence à une matière première
précise ou à un mode de culture déterminé (sur
jachère ou hors jachère) ; en pratique, le dispositif serait
ouvert aux esters d'huiles végétales et à l'ETBE ;
- d'autre part, à procéder à un appel de candidatures
publié au Journal officiel des Communautés Européennes
pour les unités de production de biocarburants, qui se verraient alors
agréées dans le cadre d'une enveloppe fiscale fixée par la
France.
Parallèlement à sa décision en date du
29 janvier 1997 de demander à la France de supprimer
l'avantage fiscal actuellement accordé, la Commission Européenne
a donné son aval à la mise en place d'un nouveau dispositif.
A cet effet, le Gouvernement a présenté au Parlement à la
fin de l'année 97, les dispositions législatives
nécessaires à sa mise en oeuvre. Le régime fiscal est
maintenu avec un appel à candidatures permettant à tous les
opérateurs d'avoir accès au marché national des
biocarburants.
Ce schéma permet notamment d'assurer une continuité indispensable
entre le dispositif ancien et le nouveau afin d'éviter tout arrêt,
même momentané, de l'exonération fiscale, qui
compromettrait gravement l'équilibre financier des unités de
biocarburants dont la production s'effectue sur toute l'année.
La mission d'information considère anormal que la TIPP soit
appliquée aux biocarburants alors qu'ils ne sont pas des produits
pétroliers. Elle souligne que le gaz et l'électricité,
bientôt concurrents des carburants verts sur le marché des
carburants propres, ne sont soumis à aucune TIPP ou taxe
équivalente.
L'impact de la loi sur l'air et de la modification du taux de gel
Adoptée par le Parlement le 30 décembre 1996, la loi
sur l'air vise à définir les principes devant guider la
prévention, la réduction ou la suppression des pollutions
atmosphériques, odeurs et radiations ionisantes ainsi que l'utilisation
rationnelle de l'énergie.
Au titre des mesures techniques nationales de prévention de la pollution
atmosphérique,
la loi sur l'air prévoit notamment
:
- l'incorporation obligatoire d'un taux minimal d'oxygène dans les
carburants et combustibles liquides avant le 1er janvier 2000
(article 21-III) ;
- la redéfinition des spécifications (ou reformulation) des
carburants avant le 1er janvier 2000 (article 21-IV) ;
- l'utilisation de carburants superoxygénés dans les flottes
spécifiques urbaines (article 24-III).
Ces dispositions sont de nature à élargir le marché des
biocarburants, étant précisé que les mesures en cause
concernent l'introduction d'oxygène quelle que soit l'origine -fossile
au végétale- des composants utilisés.
Un taux d'incorporation de 2 %, proche de la limite maximale qui pourrait
être autorisée au niveau communautaire dans la directive sur la
composition des essences de l'an 2000 impliquerait, en faisant
l'hypothèse d'un marché alimenté à 50 % par
l'ETBE, la production de près de 800 000 tonnes d'ETBE
incorporant 365 000 tonnes d'éthanol mobilisant
41 000 hectares de betteraves et 76 000 hectares de
blé.
S'agissant de la filière ester, l'introduction d'un taux renforcé
d'oxygène (2,2 à 3,3 % soit entre 20 et 30 % d'ester)
dans le gazole utilisé par les flottes spécifiques urbaines
visées à l'article 24-III de la loi constituerait une
solution optimale en matière de réduction des émissions
polluantes et impliquerait la production de 80 000 tonnes d'ester
soit 70 000 ha de colza et de tournesol.
La faculté ouverte aux agriculteurs de pratiquer des cultures
destinées à des usages non alimentaires sur les terres
gelées au titre de la réforme de la PAC a incontestablement
favorisé l'émergence de la filière biocarburants.
Toutefois, la fluctuation du taux de gel, conçue par Bruxelles comme un
instrument de régulation des marchés alimentaires ne permet pas
de répondre totalement au besoin des outils industriels de disposer d'un
approvisionnement régulier en matières premières agricoles.
La mission d'information préconise la mise en place de
mécanismes permettant d'assurer la sécurité des
approvisionnements, indépendamment des décisions communautaires
relatives à la jachère.
Tel est le cas de l'accord interprofessionnel, initié par la
filière oléagineuse française, relatif à la gestion
des surfaces d'oléagineux conclu pour la récolte 1997 et
reconduit pour la récolte 1998. Cet accord engage les agriculteurs
à affecter 12 % de leurs surfaces cultivées en
oléagineux à des usages non alimentaires afin de consolider
l'approvisionnement des nouvelles filières industrielles (biocarburants
en particulier) et de minimiser les risques de pénalités sur les
aides compensatoires " spécifiques oléagineuses "
versées aux producteurs français.
c) L'émergence de nouvelles énergies d'origine agricole
Jusqu'à présent, le nucléaire a
été et demeure une réponse adéquate à la
question de l'indépendance énergétique.
L'objectif pourrait être maintenant de promouvoir les énergies
créatrices d'emploi et facteur d'aménagement du territoire
.
Les chaufferies à haut rendement (80 %) pourraient être ainsi
développées, et les propriétaires forestiers seraient
incités à vendre du bois de qualité, éventuellement
sous label. La qualité du bois compte pour 50 % dans ses
performances énergétiques.
Le potentiel d'amélioration de la rentabilité du bois
utilisé comme énergie est important : une large part du chauffage
au bois est assurée par des cheminées ayant un rendement
énergétique de 30 à 40 %. Le rendement des
chaufferies à bois s'est nettement amélioré ces
dernières années et peut atteindre 80 %, voire dans certains
cas 90 %. Dans ces conditions, le bois devient une source d'énergie
compétitive avec l'électricité et les énergies
fossiles, comme moyen de chauffage.
Outre le développement du bois pour l'énergie domestique,
l'Ademe vise le développement des cultures énergétiques
à haut rendement (saules, peupliers, eucalyptus, sorgho, miscanthus)
pour fabriquer de l'électricité. Un effort pourrait être
entrepris pour favoriser la valorisation des déchets agro-alimentaires
en combustion et méthanisation.
Des agriculteurs vendeurs de chaleur
Des agriculteurs peuvent produire et vendre de la chaleur. Il n'est pas rare d'en rencontrer en Suède et en Autriche. En France, un groupement d'intérêt économique de 16 agriculteurs vendant de l'eau chaude a été mis en place à Millay, dans la Nièvre. Les agriculteurs alimentent avec du bois une chaufferie collective. Cette initiative permet de réinjecter 150 000 à 200 000 francs par an dans la commune. Le bois utilisé comme moyen de chauffage se prête bien aux micro-réalisations décentralisées. Il est moins bien adapté à la production d'électricité. En revanche, la production d'électricité à partir de biomasse est bien valorisée dans des usines où elle est un sous-produit, par exemple dans les papeteries ou des industries agro-alimentaires.
2. Les réserves de la Commission Européenne
L'émergence de ces filières non alimentaires
utilisant
des produits agricoles suscite l'intérêt des consommateurs et des
industriels. Ces filières de production sont récentes mais la
mission d'information estiment qu'elles sont vouées à progresser.
Il existe des débouchés significatifs pour ces productions
agricoles de l'Union Européenne, qu'elles soient excédentaires
(sucre, céréales) ou déficitaires (bois, tabac).
Mais
il est évident que si l'Europe ne met pas à la disposition de ces
industries des hydrates de carbone d'origine agricole nécessaires
à un prix compétitif, de nombreux investissements seront
réalisés dans les pays tiers.
L'Europe doit poursuivre ses
efforts afin de préserver ces acquis.
Or, la Commission se montre fort réservée sur ce sujet dans ses
propositions de juillet 1997 et mars 1998.
Tout au plus maintient-elle les dispositions en vigueur concernant les cultures
non alimentaires sur les terres gelées "
sous réserve que
des systèmes de contrôle efficaces soient
appliquées
" ; il en est de même des dispositions
concernant les aides nationales pour les cultures pluriannuelles
destinées à la production de biomasse sur les terres en
jachère.
Interrogé sur cette question, M. Franz Fischler a indiqué
que "
la Pac est disposée à apporter sa pierre à
cet édifice, mais que cela ne pourrait se faire que dans le cadre d'une
politique globale, associant l'énergie, l'environnement et la
fiscalité
". Toutefois, si le Commissaire à
l'agriculture sous-entend ainsi que Bruxelles continuera à soutenir ces
productions, la forme que prendra cette aide et l'origine des fonds restent
flous. Tout au plus a-t-il indiqué que la Commission poursuivra le
financement des projets pilotes et la promotion des matières
renouvelables issues de l'agriculture, ces productions étant
créatrices d'emplois au niveau local. Mais dans le même temps, le
commissaire a souligné qu'il est "
inconcevable d'introduire de
nouvelles aides alors que nous souhaitons réduire les
anciennes
". Cette affirmation est renforcée par le fait que
Franz Fischler semble convaincu que ces productions nécessiteront dans
l'avenir moins de subsides pour être viables, et ce pour deux
raisons : la baisse des prix garantis des céréales et des
oléagineux planifiée par l'Agenda 2000, qui devrait leur
apporter une compétitivité accrue face aux matières
synthétiques, et le développement des plantes
transgéniques, qui permettra d'augmenter la productivité.
Cette attitude de la Commission est doublement préoccupante.
En premier lieu,
le programme auto-oil
adopté récemment
par le Parlement Européen sur les émissions automobiles
constitue aux yeux de la mission d'information, le signe indéniable
d'une prise de conscience de l'importance de l'utilisation des produits
agricoles à des fins non alimentaires
, afin notamment de lutter
contre les effets de serre et d'encourager le développement des
matériaux biodégradables. Or, si le marché existe et si
l'industrie est prête, la mise en place d'un tel programme
nécessitera des incitations nationales ou communautaires.
En second lieu, le respect des engagements pris au Sommet de Kyoto devrait
nécessiter l'emploi de 18 millions de tonnes d'équivalent
pétrole de biocarburants.
Afin que l'Europe soit prête pour cet enjeu planétaire que
constitue le legs aux générations futures d'un air propre, la
mission d'information considère que les autorités communautaires
doivent donner un signal fort à l'ensemble des Européens. Des
mesures incitatives sont nécessaires et il est urgent que soit
engagée une approche commune sur le plan législatif et fiscal,
quant à l'utilisation des produits agricoles à des fins non
alimentaires.
II. UNE APPROCHE PRAGMATIQUE DE L'AGRICULTURE EUROPÉNNE : POUR UNE DIFFÉRENCIATION DES PRODUCTIONS
Si la
philosophie du projet de réforme de la Pac nécessite une vision
ambitieuse et globale, ses modalités d'application doivent être
empreintes d'un certain pragmatisme.
Chacune des productions végétale ou animale, doit, dès
lors, susciter aussi une réflexion sectorielle.
A cet égard, la mission d'information se refuse à tout
dogmatisme. Le principe d'une baisse importante et
généralisée -préconisée par la Commission
sur les céréales, la viande bovine et le lait- lui paraît
peu réaliste. Cependant, il ne suffit pas de considérer ces
propositions Européennes comme " inacceptables en
l'état ". C'est pourquoi, la mission d'information souhaite
examiner chaque secteur et faire des propositions
concrètes.
A. POUR UNE COMPÉTITIVITÉ ACCRUE DU MARCHÉ DES CÉRÉALES
1. Une logique de compétitivité justifiée
Rappelons que la baisse des prix des céréales
répond directement à plusieurs objectifs :
- consolider la position de l'Union Européenne comme grande
puissance exportatrice mondiale ;
- préparer l'Union Européenne aux prochaines
négociations de l'OMC ;
- améliorer la compétitivité de l'agriculture
Européenne sur le marché intérieur ;
- faciliter l'intégration de nouveaux membres.
Assortie d'une compensation partielle et d'un taux de jachère
fixé à 0 %, cette logique de compétitivité
s'accompagne d'aides spécifiques à la surface, non liées
à la culture. Il s'agit donc de découpler le niveau de l'aide du
type de production, ce découplage répondant directement à
l'objectif de " contribuer à la préparation de l'Union aux
prochaines négociations de l'OMC ".
La proposition de la Commission paraît être la seule alternative
possible à l'augmentation du taux de gel dans un contexte d'expansion du
marché mondial. Elle devrait permettre une augmentation de la production
céréalière de l'Union Européenne et un
accroissement des utilisations intervenues de céréales sur le
marché de l'alimentation animale. Enfin, une telle politique devrait
aboutir à un renforcement de la situation exportatrice de l'Union
Européenne et notamment de la France.
2. De substantielles modifications à apporter
Après le rétablissement par la Commission dans ses propositions de mars 1998, de la prime au maïs ensilé , ce dont la mission d'information se félicite , plusieurs points précis des propositions de la Commission nécessitent des modifications importantes.
a) Une baisse raisonnable et entièrement compensée du prix d'intervention
Globalement les débouchés de la production
céréalière française se répartissent
ainsi : 1/3 pour le marché national, 1/3 dans l'Union
Européenne et 1/3 pour le reste du monde. En outre, la campagne 96/97 a
montré qu'une production de 200 millions de tonnes dans l'Union
Européenne ne posait pas de problèmes d'écoulement.
La commission propose une baisse de 20 % du prix d'intervention en
matière de céréales compensée à 50 %
par des aides directs.
La mission d'information considère qu'une baisse de 10 % serait
amplement suffisante.
En effet, rappelons que le prix d'entrée dans l'Union Européenne
est
le plus bas des deux prix suivants :
- " prix mondial + équivalent tarifaire de 63 F/q "
pour le blé et " prix mondial + équivalant tarifaire de
62 F/q " pour le maïs,
- " 155 % du prix d'intervention ".
A l'issue de l'accord de Marrakech, ces deux prix sont respectivement :
-
pour le blé
(dans l'hypothèse d'un prix mondial
moyen de 83 F/q départ Golfe, auquel il faut rajouter 7 F/q de
transport transatlantique) : 153 F/q et 122 F/q,
-
pour le maïs
(dans l'hypothèse d'un prix mondial de
65 F/q départ Golfe + 7 F de transport) : 134 F/q et
122 F/q.
Dans le cadre de la PAC actuelle
, la préférence
communautaire :
- est
effective,
tant pour le blé que pour le maïs,
même dans
l'hypothèse de prix mondiaux faibles (68 F/q
départ Golfe, pour le blé et 55 F/q pour le maïs).
Dans la pratique, le prix d'entrée calculé à partir de
l'équivalent tarifaire est plus élevé que le prix
d'intervention x 155 %, soit 122 F/q. C'est donc ce dernier qui
détermine le prix d'entrée potentiel,
-
continuerait à être effective
avec une diminution
des équivalents tarifaires de 52 % pour le blé et de
23 % pour le maïs. Le prix d'entrée potentiel serait alors de
105 F/q pour le blé et 110 F/q pour le maïs, niveaux de
prix d'entrée considérés comme minimum pour garantir la
préférence communautaire
50(
*
)
.
La proposition " Santer " de baisse de 20 % aurait deux types
de conséquences contradictoires
sur les marges de manoeuvre au sein
de l'OMC :
-
d'une part
,
la baisse du prix d'intervention se traduirait
mécaniquement par une baisse du prix d'entrée potentiel
puisque le seuil de " 155 % du prix d'Intervention " qui
constituera le prix d'entrée, passera de 122 à 98 F/q.
En situation de prix communautaires élevés, ce prix
d'entrée potentiel pourrait être insuffisant pour garantir une
préférence communautaire effective pour le maïs.
La
préférence communautaire ne serait véritablement garantie
que si le prix d'intervention était plus élevé que ce que
propose la Commission soit au moins 67 F/q (on aurait alors
" 155 % prix d'Intervention " = 103 F/q), ou si le
mécanisme des " 155 % " était
réaménagé (augmentation à " 163 % "
afin d'avoir 63 F/q x 163 % = 103 F/q) ou
supprimé. Ce mécanisme avait été institué
dans le cadre particulier de la négociation du cycle de l'Uruguay, pour
éviter que le niveau des équivalents tarifaires ne soit trop
élevé lors de la première année de l'application
des accords du GATT (1995). Sa suppression ne serait donc pas aberrante ;
-
d'autre part,
la baisse du prix d'entrée potentiel
calculé à partir
de " 155 % du " prix
d'intervention ", qui passerait de 122 F/q à 98 F/q
permettrait de réduire les équivalents tarifaires
sans
remettre en cause la préférence communautaire effective (qui
impliquerait un prix d'entrée potentiel d'au moins 103 F/q). Ceci
est particulièrement vrai pour le blé, pour lequel la protection
communautaire est aujourd'hui la plus largement assurée.
Ainsi :
- pour le blé
, l'équivalent tarifaire pourrait
être ramené à 3 F/q (soit - 95 %,
contre -52 % dans le cadre de la PAC actuelle),
-
pour le maïs
, l'équivalent tarifaire pourrait
être ramené à 41 F/q (soit -34 %, contre
-23 % dans le cadre de la PAC actuelle).
La baisse des prix de 20 % fragilise donc la protection extérieure
en réduisant le différentiel entre prix intérieur et prix
d'accès sur le marché Européen.
Une baisse de 10 % permettrait d'éviter un effondrement de la
protection tarifaire.
La mission d'information souhaite que cette baisse raisonnable du prix
d'intervention s'accompagne d'une suppression progressive des taxes à
l'exportation, sur lesquelles la commission Européenne est très
discrète.
Par ailleurs, aucun argument n'a été avancé par la
Commission pour justifier l'absence de compensation intégrale de la
baisse des prix. Faut-il y voir une volonté de rechercher une
compétitivité qui entraînerait la disparition d'un nombre
encore plus importants d'agriculteurs ?
b) Le maintien des majorations mensuelles
Durant
la période d'intervention, les organismes publics achètent au
prix d'intervention les céréales qui leur sont offertes, sans
limitation de volumes.
Pendant cette période, le prix d'intervention est augmenté pour
tenir compte des frais de stockage (location de bâtiments, pertes,
etc...) et des frais financiers. Ces augmentations sont appelées
" majorations mensuelles ".
La mission d'information souhaite le maintien de ces " majorations
mensuelles ".
En effet, leur suppression entraînerait, outre une baisse
supplémentaire du prix d'intervention de 4 à 6 % :
- un afflux de livraisons à la récolte,
- un affaiblissement de la préférence communautaire, puisque
le " prix d'entrée " des céréales des
pays-tiers, en dessous duquel sont perçus des droits de douanes, est de
155 % du prix d'intervention, majorations mensuelles incluses.
c) La question des surfaces de base maïs
La
Commission Européenne souhaite supprimer les surfaces de base maïs,
et donc les rendements de référence maïs.
La mission d'information s'interroge sur l'opportunité d'une telle
décision.
En effet, le maïs offre des opportunités différentes de
celles du blé puisque, en Europe, cette production est
déficitaire. Le déficit est comblé par les contingents
GATT de 2,5 millions de tonnes que la péninsule ibérique,
notamment, est contrainte d'importer chaque année des pays tiers.
La mission d'information considère que le maïs doit conserver
une spécificité du fait de ses débouchés
essentiellement européens.
Elle estime donc que la suppression des rendements de référence
maïs n'est pas la solution adéquate pour assurer une réelle
pérennité à cette production.
B. L'INDÉPENDANCE PROTÉIQUE : UN ENJEU EUROPÉEN ESSENTIEL POUR L'AGRICULTURE DE LA COMMUNAUTÉ
1. L'importance des oléoprotéagineux pour la France et pour l'Union Européenne
a) Un rôle agronomique et une importance vitale pour de nombreuses régions françaises
Les
oléagineux et les protéagineux sont produits sur des
exploitations céréalières spécialisées, en
association avec les céréales.
La place des oléagineux et des protéagineux dans les
exploitations est essentielle :
- par leur rôle de tête d'assolement optimisant les rotations
des grandes cultures (le rendement d'un blé derrière une
tête d'assolement est supérieur à celui d'un blé sur
blé) ;
- par leur adaptation aux conditions agronomiques des régions moins
productives en céréales, les oléagineux
représentant un facteur essentiel d'équilibre du revenu agricole
(il s'agit notamment de la Lorraine, de la région
Midi-Pyrénées, du Centre-Loire, de l Aquitaine...).
b) L'enjeu des protéines végétales et des matières grasses
La
production d'oléagineux et de protéagineux est stratégique
pour l'Union Européenne et pour la France.
Elle a été encouragée depuis l'embargo américain de
1973 sur le soja, afin d'assurer un minimum de sécurité dans
l'approvisionnement Européen en protéines et en huiles
végétales.
Malgré les résultats de la politique menée depuis,
l'auto-approvisionnement n'est que de 26 % pour les protéines
végétales et de 80 % pour les huiles.
L'un des aspects importants de ce dossier est la reconquête du
marché de l'alimentation animale par les oléo-protéagineux
communautaires (tourteaux de colza et tournesol et autres plantes riches en
protéines comme le pois, févercles, lupin, luzerne).
Cette reconquête s'avère difficile
car, d'une part, les
huiliers triturent la graine avant tout pour l'huile et, d'autre part, les
fabricants d'aliments du bétail sont habitués à faire des
substitutions. Aucun produit n'est irremplaçable en alimentation
animale, exceptés le blé, le maïs et le tourteau de soja.
La grande différence entre le secteur des céréales et
celui des oléoprotéagineux
, c'est ce que ce dernier ne
bénéficie d'aucun soutien de prix, puisqu'il est soumis
directement au marché, sans système d'intervention
.
Les insuffisances des propositions de la commission :
Le volet " grandes cultures " des propositions de la Commission
prévoit :
-
un " filet de sécurité " pour les
céréales (intervention) baissé de 20 % ;
-
un paiement compensatoire, commun à toutes les grandes
cultures, de 66 écus/tonne ;
-
un paiement complémentaire pour les protéagineux,
de 6,5 écus/tonne ;
-
un taux de jachère obligatoire ramené à
0 %.
Dans son état actuel, le projet de la Commission bouleverse
profondément l'équilibre des soutiens à l'intérieur
des grandes cultures et notamment des oléoprotéagineux :
Oléagineux : -28 écus par tonne (soit
-1100 francs/hectare) ;
Protéagineux : de -19 à -30 écus/tonne (soit -750
à -1 200 francs/hectare) selon les hypothèses de
répercussion du prix des céréales sur le prix des
protéagineux).
Il en résulterait :
- un recul accentué des surfaces françaises et
Européennes d'oléagineux et de protéagineux ;
- des pertes importantes de revenu pour les exploitations des bassins de
grandes cultures spécialisés en oléagineux (Lorraine,
Bourgogne, Centre, Poitou-Charentes, Sud-Ouest,...).
Les projections faites à partir de ces données montrent
qu'Agenda 2000 entraînerait pour la France une réduction des
surfaces oléagineuses totales
(usages alimentaires et
non-alimentaires) de 30 à 50 % (entre 600 000 et
1 million d'hectares) par rapport à la situation actuelle.
Au lieu de permettre de s'affranchir des contraintes de Blair House, comme
le prétend la Commission, ces propositions auraient donc pour effet de
ramener les surfaces françaises et Européennes en
deçà des plafonds négociés en 1993.
Les solutions préconisées par la mission d'information
Pour les oléagineux, la suppression de tout " paiement
spécifique " est présentée par la Commission comme un
moyen d'échapper aux limites de surfaces négociées
à Blair House. La réforme n'aura d'intérêt que pour
autant qu'elle permette effectivement un développement de la production
au-delà des limites de Blair House, pour la production à usage
alimentaire comme pour celle à usage non-alimentaire.
Or, les pertes de compétitivité entraînées par la
baisse des soutiens provoqueraient des baisses de surfaces importantes sur la
partie à usage alimentaire. En outre, le projet n'envisage pas de
solution permettant d'éviter la disparition de la production
non-alimentaire consécutive à la fixation de la jachère
obligatoire à un taux de 0 %.
Dans le secteur des protéagineux, le niveau de paiement
complémentaire proposé par la Commission représenterait en
réalité un recul par rapport à la situation actuelle,
alors que la priorité à donner aux protéines
végétales impose au contraire que l'on améliore leur
compétitivité au sein des grandes cultures.
La base de toute proposition doit être au minimum de maintenir le niveau
actuel de surfaces oléagineuses et si possible de permettre leur
développement. La mission d'information propose :
-
un paiement complémentaire
" multi-produits
"
de 20 à 30 écus/
tonne (oléagineux, protéagineux, etc...) dont le caractère
découplé permettrait de s'affranchir des contraintes de Blair
House, tout en assurant un développement effectif des surfaces
oléagineuses. Ce paiement pourrait comporter une prime unique, plus un
complément d'aide variable en fonction du marché
(élevé quand les cours mondiaux sont bas et inversement), pour
éviter que les producteurs ne cumulent l'avantage de prix mondiaux et de
primes élevées, ou l'inconvénient de prix mondiaux et de
primes simultanément basses.
-
un filet de sécurité
(prix de
référence et variabilité du paiement compensatoire en
fonction de l'évolution des cours) comparable au système
américain (Marketing loan), afin de pallier l'absence d'intervention
dans le secteur des oléoprotéagineux ;
-
un régime spécifique pour les cultures à usage
non alimentaire
évoqué ci-dessus.
C. UNE GESTION PLUS EFFICACE DU MARCHÉ DE LA VIANDE BOVINE
1. Un scénario qui voue ce secteur à sa perte
La
mission d'information ne reviendra pas sur les critiques qui ont
été faites à l'encontre des propositions de la Commission
Européenne relatives au secteur de la viande bovine. Tout au plus
peut-on remarquer que ces propositions traduisent parfaitement l'absence de
pragmatisme de l'Union Européenne en matière agricole.
L'option envisagée par Bruxelles conduit inévitablement à
la disparition programmée de ce secteur, et ce pour trois raisons
essentielles :
le pari de l'exportation sans restitution sur les pays d'Asie qui
justifie une baisse de 30 % des prix, est
irréaliste
, alors
que le marché intérieur absorbe 90 % de la production
Européenne,
l'abandon
des mécanismes
d'intervention publique
et
la régulation du secteur bovin sur le modèle du secteur porcin
seront lourds de conséquences pour une production qui va connaître
des déséquilibres offre/demande considérables dans les
prochaines années,
malgré une augmentation de la part du FEOGA affectée au
secteur de la viande bovine, le soutien par les primes animales conduit
à une
pénalisation des systèmes extensifs à
l'herbe.
La mission d'information considère que ce scénario est le pire
qu'on puisse imaginer. La production est livrée au seul cours du
marché mondial avec des compensations partielles, -à savoir, 50
à 60 %- des pertes de revenus, à condition que les prix se
stabilisent à environ 13 F/kg. Or, les cours risquent de descendre
beaucoup plus bas puisque nos concurrents d'Amérique du Sud, d'Australie
et de Nouvelle-Zélande se situent à des prix de 6 à
8 F/kg.
Rappelons que l'élevage bovin est présent sur la majeure partie
du territoire national avec 345 exploitations dont 45 % en production
allaitante, 35 % en production laitière et 20 % mixte.
La France rassemble 36 % du cheptel des 15 Etats Européens avec une
production annuelle de 1,9 millions de tonnes soit 24 % de la
production communautaire.
La localisation de la production allaitante est située dans des zones
herbagères, donc quasiment inconvertibles dans la plupart des cas. Dans
les régions montagneuses, le troupeau allaitant occupe 70 % des
surfaces.
D'autre part, les éleveurs spécialisés ont les revenus
agricoles les plus bas -50% de moins que le revenu moyen-.
Le marché a été particulièrement
déstabilisé par la crise de l'ESB, la chute de la consommation et
les difficultés d'exportation. Un équilibre précaire a pu
être retrouvé par des mesures exceptionnelles de stockage à
l'intervention et par les mesures d'abattage sanitaire.
Au-delà de la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine
(ESB), deux autres éléments contribuent au
déséquilibre du marché :
- l'absence de régulation de la production ;
- un accès au marché mondial limité du fait des
règles du GATT -environ 10 % de la production communautaire-.
La proposition de la Commission empêche toute exportation sans
restitution et ne permettra pas non plus de regagner des parts sur le
marché intérieur puisque la filière n'a jamais
répercuté la baisse de prix à la production, et ce,
malgré des chutes de prix à la production supérieur
à 20% (étude OFCE de 1996).
Par ailleurs, les gains de productivité sont quasi inexistants en
raison :
- d'un niveau élevé de charges ;
- de l'interdiction des activateurs de croissance ;
- de la prédominance dans le secteur de petites structures
familiales.
Enfin, rien ne prouve que ces compensations ne seront pas remises en cause dans
les prochaines négociations de l'OMC comme cela avait été
le cas lors des dernières négociations.
2. La solution de rechange dans le secteur de la viande bovine
La mission d'information considère comme impérative la modification des propositions de la Commission dans ce secteur. Néanmoins, deux approches très différentes peuvent être envisagées.
a) Une maîtrise stricte de l'offre
Cette
politique consiste en un mécanisme de " garanties de prix sur des
quantités limitées ", en un mot des quotas. Ceux-ci sont
souvent mal perçus car il s'agit de restrictions quantitatives de
production. Il faut dès maintenant préciser que ces quotas de
production ne doivent pas être assimilés aux quotas d'importation;
qui constituent une entrave aux échanges.
Les quotas de production ne sont pas forcément incompatibles avec
l'insertion sur le marché international. On le voit avec l'exemple du
vin, où les limitations de production ont provoqué une
concurrence par la qualité qui a permis aux producteurs français
de conserver leur part de marché.
On constate la même chose pour le sucre. Pour ce dernier produit, les
producteurs ne s'interdisent nullement les " bonnes affaires "
à l'exportation lorsque la conjoncture s'y prête, ce qui arrive de
temps à autre. En même temps, les quotas ont délivré
le consommateur de la hantise du prix du sucre, au point que les
Européens ont perdu toute notion du danger des " sautes
d'humeur " dévastatrices, sur le marché international, de ce
produit en apparence banal.
Les quotas " cheptel individuel " -puisqu'il existe
déjà des quotas de primes- pourraient représenter une
solution " élégante " au problème de la
sécurité alimentaire. Par ailleurs, il est sûr que la
quantité prévue par le quota sera produite sans pour autant
distordre les marchés. Quant au coût de la différence entre
le prix " libre " et le prix " garanti ", pour les
quantités sous quotas, il représente simplement une prime
d'assurance avantageuse, dont le montant devrait être inférieur
à celui de l'espérance du dommage, contrairement à ce qui
se passe habituellement en matière d'assurance et sur les marchés
à terme.
La mission d'information regrette fortement que :
- le Gouvernement français n'ait pas considéré
opportun de privilégier, dès la présentation des
propositions de la Commission, cette solution ;
- qu'il n'ait pas recherché à rallier des partenaires
à cette hypothèse de travail, alors que certains Etats -comme
l'Allemagne- y sont très favorables.
Est-ce aujourd'hui trop tard ? La mission d'information est consciente, d'une
part, que le retard pris dans les propositions gouvernementales
françaises sur ce secteur sera difficile à rattraper et, d'autre
part, qu'il n'est plus guère possible aujourd'hui de pallier cette
solution.
Une solution sans doute plus immédiatement praticable consisterait en
une gestion plus efficace du secteur en développant des incitations
à l'extensification et à la valorisation des productions de
qualité.
b) Une adaptation substantielle des mécanismes proposés par la Commission
Cette
seconde solution implique l'acceptation d'une légère baisse de
prix assortie de certaines conditions qui modifient substantiellement le projet
de la Commission.
En premier lieu
,
la défense du niveau de prix dans un
marché équilibré doit être affirmée
. La
proposition de baisse de 30 % du soutien des prix n'ouvrant aucune
perspective pour l'élevage bovin, celle-ci doit être revue en
fonction des contraintes du marché et du niveau de concurrence avec les
autres viandes (baisse du prix des céréales).
En tout état de cause, la décision sur le futur niveau de prix,
qui constituera un choix politique majeur, doit être
complétée par un dispositif efficace de gestion du marché,
qui préserve les éleveurs d'un effondrement des cours en cas de
crise : il s'agit bien entendu du maintien de
l'intervention publique qui
s'avère être un impératif.
En second lieu, une revalorisation de la prime " vache
allaitante " est indispensable
La proposition actuelle de la Commission (180 écus), soit
1.203 francs contre 1.170 francs aujourd'hui, démontre
l'iniquité des propositions actuelles, qui sacrifient l'élevage
allaitant.
Une forte revalorisation du soutien aux systèmes allaitants doit
constituer une priorité française et se concrétiser par :
- une hausse du montant de base de la prime " vache allaitante "
;
- l'amélioration des conditions actuelles d'accès au
complément extensif.
En troisième lieu, la préservation de la valeur
ajoutée afin d'éviter toute distorsion de concurrence
s'avère impérative
L'activité d'engraissement des différentes catégories
d'animaux mâles et femelles constitue un volet essentiel de la production
bovine, en assurant la création de valeur ajoutée et le maintien
de l'emploi tout au long de la filière.
La mission d'information est
attachée à préserver ce potentiel
, ce qui suppose de
définir des dispositifs d'aides équilibrés et non
discriminants au plan communautaire entre naisseurs et engraisseurs.
Or, une subsidiarité trop importante introduirait des distorsions de
concurrence graves entre pays, selon les productions privilégiées
par les arbitrages de chaque Etat membre. Des productions, telles que
l'engraissement des jeunes bovins ou les veaux de boucherie pourraient
être particulièrement pénalisées par une
différence forte d'un soutien qui est désormais un
élément déterminant de la rentabilité.
Par ailleurs, la mission d'information considère que l'instauration
d'une prime unique à l'unité de gros bétail (U.G.B.)
permettrait non seulement de simplifier l'ensemble des formalités
administratives pour les éleveurs mais aussi d'atténuer les
dangers de distorsions de concurrence entre les différents pays.
Cette disposition permettrait de combiner plus étroitement les primes
à l'animal et à l'utilisation de l'herbe, en transformant les
primes animales -PSBM, PMTVA- en une prime unique à l'UGB
indifférenciée, plafonnée et modulée pour prendre
en compte les systèmes extensifs. Un tel dispositif n'est pas exclusif
du maintien de la prime à l'herbe dont le montant devra être
ajusté au nouveau contexte de prix.
Par ailleurs, l'examen des différentes options de répartition de
l'enveloppe nationale de subsidiarité démontre clairement que
cette mesure ne pourrait pas constituer une solution pour assurer la
compensation nécessaire dans les différents systèmes de
production en France.
La subsidiarité ne peut donc s'envisager qu'à la marge, et non
à hauteur de 30 % du soutien total, ainsi que le propose la
Commission.
La mission d'information préconise l'examen d'une solution
alternative d'utilisation des crédits proposés pour la
subsidiarité. L'objectif est de privilégier un dispositif d'aide
fixé au niveau communautaire. Il devra nécessairement, en raison
des contraintes de négociation :
- bénéficier à l'ensemble des animaux (vaches
allaitantes et vaches laitières, bovins mâles, génisses,
ensembles des veaux de boucherie) ;
- assurer une répartition des " retours
budgétaires " acceptable par tous les pays.
En quatrième lieu, la filière bovine doit faire l'objet
d'une gestion régulée de la production, de façon à
assurer un meilleur équilibre entre les types de productions allaitantes
et laitière, au moyen :
- de la gestion des veaux, comme le soutien au veau de boucherie et le
maintien de la possibilité d'abattage des veaux de huit jours en cas de
crise ;
- d'une meilleure organisation de la production du cheptel allaitant et de
la filière beaucoup plus stricte.
Cette régulation du marché impose une réelle politique
d'équilibre entre l'offre et la demande de façon à
encourager les productions de qualité.
D. PRÉSERVER LA FILIÈRE LAITIÈRE
1. Les spécificités de la politique laitière
Les propositions de la Commission paraissent
incohérentes à un triple égard :
- elles font coexister maîtrise quantitative et baisse des prix, ce
qui entraîne au niveau des exportations la gestion d'un quota de
production et la gestion d'un quota de primes ;
- elles sont inefficaces pour contourner la contrainte GATT, la baisse des
prix étant insuffisante pour exporter significativement sans restitution
;
- elles génèrent un coût budgétaire
supplémentaire exorbitant au regard de l'efficacité attendue.
Par ailleurs, la baisse des prix institutionnels (beurre et poudre de lait) et
des restitutions sur les exportations tendent à accréditer
l'idée selon laquelle la politique laitière Européenne
risque, après 2006, de s'orienter vers un libéralisme sans frais
(baisse des prix partiellement compensée, disparition des quotas,
démantèlement des différentes modalités
d'intervention et de gestion du marché).
On peut s'interroger sur l'opportunité de vouloir modifier si
radicalement une politique qui a, dans l'ensemble, réussi :
La consommation des produits laitiers Européens continue de
croître sur le marché pourtant limité -si l'on
considère le marché solvable- de la consommation alimentaire :
c'est le résultat de la démarche de qualité et
d'innovation de la filière qui, par la diversité des gammes de
produits qu'elle propose, sait s'adapter à l'évolution et aux
modifications du comportement alimentaire. En outre, le marché mondial
des produits laitiers est en expansion en volume à raison de 2 %
par an ;
La plupart des observateurs estiment qu'une baisse significative du prix du
lait n'aurait qu'un effet mineur quant à la dynamique de consommation
des produits laitiers ;
Une maîtrise de la production efficace, grâce à la mise en
place de la politique des quotas en 1984, a conduit, après quelques
ajustements, à une gestion équilibrée du marché des
produits laitiers tant sur le marché intérieur Européen
que sur les marchés mondiaux ;
Le coût budgétaire du soutien de la production laitière et
modique pour le budget du FEOGA et bien inférieur au poids relatif de la
filière dans le secteur agro-alimentaire ;
Une évolution structurelle importante et équilibrée sur
l'ensemble du territoire a pu être assurée en France, grâce
à la politique de contrôle des transferts de
références laitières gérée de façon
décentralisée. Entre 1984 et 1997, la référence
moyenne de chaque producteur français est passée de
60.000 litres à 160.000 litres sans transfert entre les zones
de montagne et les zones spécialisées dans la production
laitière.
La mission d'information souhaite insister sur le fait qu'aucun des
grands pays producteurs laitiers (Canada, Etats-Unis, Inde, Australie) n'est
prêt à abandonner sa politique laitière pour mieux
s'aligner sur les fluctuations du marché mondial
, et qu'aucun ne
demande à l'Europe d'abandonner sa politique de maîtrise de la
production, qui a indirectement contribué à l'équilibre du
marché mondial.
Rappelons que les échanges mondiaux de produits laitiers ne portent que
sur 30 millions de tonnes d'équivalent lait quand la production
mondiale s'élève à 540 millions de tonnes, soit moins
de 6% de celle-ci.
Par ailleurs, le poids des PECO dans cette filière est relativement
modeste :
32 millions de tonnes dont 50% de produits pour la Pologne
alors que la production Européenne est d'environ 110 millions de
tonnes dont 23 millions pour la France.
Les exportations laitières de l'Europe à Quinze -premier
exportateur mondial de produits laitiers -ne représentent que 11% de la
production laitière Européenne-.
Pourquoi alors se hâter d'adopter un système de paiement du
lait fondé uniquement sur le marché international de la poudre et
du beurre
? N'est-ce pas lâcher la proie pour l'ombre, sans
bénéfice assuré ni pour le contribuable Européen
qui devra financer des aides compensatoires importantes, ni pour
l'éleveur laitier Européen dont le revenu dépendra pour
une large part de décisions arbitraires et vouées aux
fluctuations des interventions publiques ?
Comme l'a indiqué M. Jean-Michel Lemetayer, Président de la
Fédération nationale des Producteurs de lait et du Centre
national interprofessionnel de l'Economie laitière, les pays du Nord de
l'Europe, plus libéraux, ont cherché à assurer la
flexibilité des quotas par le marché de la location de droits
à produire, voire par la vente de ces droits. Tant et si bien que le
bilan de ces exploitations est grevé par des actifs immatériels
qui obèrent les capacités de financement de ces exploitations.
Pour beaucoup de ces exploitants, la disparition des quotas se traduirait
à moyen terme par une baisse des coûts.
Dans le sud de l'Europe, le système des quotas est synonyme de
référence archaïque, définie dans des conditions
historiquement datées, durant la période 1981-1983, à un
moment où ces pays attachaient peu d'importance à la production
laitière. Aujourd'hui, du fait du développement de la
consommation, leur auto-approvisionnement laitier n'est pas assuré.
Aussi, réclament-ils une réévaluation de leur quota. Il
n'est qu'à voir les nombreuses manifestations des producteurs de lait
italiens à ce sujet.
Enfin, l'Allemagne, qui n'a pas mis au point un système de
redistribution des quotas, est gênée par le décalage qui se
développe entre détenteurs des droits à produire et
utilisateurs effectifs de ces droits, qui louent fort cher les quantités
supplémentaires qui leur sont accordées.
2. Les mesures nécessaires
La mission d'information préconise deux dispositions principales :
a) Une réelle flexibilité dans la gestion des quotas
Cette
flexibilité pourrait se concrétiser par la mise en place d'un
système de double quota-double prix
qui, tout en préservant
et en pérennisant le système actuel qui fonctionne correctement,
maintiendrait le courant des exportations. Le Luxembourg, l'Irlande, le
Portugal et le Danemark s'étaient déclarés favorables
à ce système dans le courant de l'année 1997.
Ce dispositif se composerait de deux quotas :
le premier quota de
production
(" A ") concernerait le marché Européen
et permettrait de garantir les revenus des producteurs pour une quantité
correspondant à la consommation des Quinze
; le second quota
(" B ") pourrait concerner une petite partie du quota
européen. Il pourrait ainsi correspondre, au minimum, aux pertes
d'exportations subventionnées liées aux accords du GATT à
l'horizon 2000, qui équivalent à la production d'au moins
1,8 million de tonnes de lait (dont 1,1 million de tonnes pour les
fromages et 700.000 tonnes pour les autres produits). A l'horizon 2000, ce
quota B pourrait concerner 3 millions de tonnes de lait dont
1,5 million de tonnes de fromages et autant d'autres produits laitiers.
Le mode d'emploi du double quota pourrait être le suivant :
Les quantités à exporter dans le cadre du quota B seraient
fixées en fonction de la demande internationale et au niveau
Européen.
Le prix du lait B serait fixé périodiquement en fonction de celui
du lait Européen et du niveau de valorisation des exportations non
subventionnées des produits concernés.
La répartition des quantités à produire entre Etats
membres se ferait notamment en fonction de leurs exportations des années
passées.
Pour le producteur, le quota B serait à l'extérieur de son
quota A ; il s'agirait de quantités supplémentaires à
produire.
En France, il serait souhaitable que le double quota soit ouvert à tous
les producteurs volontaires.
La gestion du quota B serait totalement indépendant du quota A :
les laiteries qui collecteraient le lait B devraient s'engager à
exporter ces quantités vers les pays tiers (documents administratifs et
contrôles existent déjà : certificats d'exportation et
dépôt de cautions bancaires).
Les principales objections invoquées à ce système sont
généralement la baisse de revenu pour l'éleveur,
liée à une réduction du quota A, la non garantie du
prix du quota A (étanchéité des marchés), le risque
que le quota B concerne à terme toutes les exportations,
l'hétérogénéité des pays, entreprises, ou
producteurs, vis-à-vis de son utilisation, et enfin, sa
complexité.
Or, la baisse de 15 % ne conduira-t-elle pas à une baisse encore
plus forte du revenu des agriculteurs ? En outre, la mise en place d'un quota
n'est-elle pas un encouragement à plus de compétitivité,
souhait affirmé à maintes reprises par la Commission ?
Par ailleurs, l'instauration d'une prime à la " vache
virtuelle " proposée par la Commission ne promet-elle pas
d'être nettement plus complexe qu'un système de double quota ?
D'aucuns estiment, de plus, qu'un tel système serait contraire aux
règles de l'OMC. La mission d'information constate, tout d'abord,
qu'aucune étude sérieuse n'a été effectuée
sur ce dispositif et, notamment, sur ses " soi-disant
contradictions " avec les mécanismes de l'OMC. De plus, de nombreux
Etats (Canada, Australie...) ont instauré un prix du lait sur le
marché intérieur différent de celui pour l'exportation.
Le système du double prix-double quota se présente donc comme
une proposition alternative intéressante à celle avancée
par la Commission Européenne dans le secteur du lait.
b) La reconnaissance de la spécificité des signes de qualité
Les AOC
laitières doivent pouvoir atteindre pleinement l'objectif de
développement économique dans le cadre d'une production de lait
spécifique, en lien fort avec un terroir, et permettant
d'élaborer des produits à forte valeur ajoutée. A ce
titre, il faut qu'une place leur soit faite dans l'organisation communautaire
et nationale des marchés du lait et que la future OCM laitière
permette un traitement différencié du lait standard et du lait
destiné à une production d'AOC.
Rappelons que les 22 " départements AOC "
rémunèrent globalement le prix de lait de 2,5 % de plus que
les 27 " départements non AOC ".
Selon l'INAO, les 33 fromages français d'appellation
(bientôt 34 avec le Valençay) ont totalisé, en 1996,
une production de 170.600 tonnes, dont 145.700 tonnes de fromage de
vache, 3.500 tonnes de fromage de chèvre et 21.400 tonnes de
fromage de brebis.
Par ailleurs, les ventes d'AOC ont davantage progressé que la moyenne
des fromages depuis dix ans (2,7 % par an contre 1,5 %).
La reconnaissance de la spécificité des AOC au sein de l'OCM,
en levant les freins à leur développement, permettrait d'assurer
un nouveau débouché à la filière
lait.
III. REPLACER L'EMPLOI ET L'ESPACE AU COEUR DE LA RÉFORME
Les
questions relatives à l'emploi et à l'espace en zones rurales
sont très présentes dans le débat public sur la
réforme de la PAC.
Certes, l'espace rural n'est plus -et de loin- limité à la seule
surface utile agricole. En outre, la forte baisse tendancielle du nombre
d'actifs agricoles dans la population active Européenne tend à
accroître, inexorablement, le fossé entre l'emploi agricole et
l'emploi rural. Ainsi, la contribution de l'agriculture à l'emploi doit
se mesurer dans une perspective beaucoup plus large que celle de la seule
population active agricole, la place de l'agriculture dans l'espace
n'étant plus circonscrite à la seule fonction de production.
Si elle refuse de remettre en question la fonction économique
primordiale de l'agriculture, la mission d'information n'est pas moins
consciente de l'importance des fonctions territoriale et sociale de ce secteur
d'activité.
La prise en compte par l'agriculture de nouvelles dimensions comme l'emploi, la
qualité, l'environnement, consacre l'idée d'une
multifonctionnalité de l'agriculture qui doit se concrétiser dans
le cadre d'une politique agricole commune repensée et
vivifiée.
A. ALLIER COMPÉTITIVITÉ ET MAINTIEN DU REVENU DES AGRICULTEURS
D'aucuns
estiment que l'objectif de " maintien du revenu des agriculteurs ",
inscrit dès 1957 dans le Traité de Rome, n'a plus lieu
d'être et que ceux-ci doivent trouver sur le marché les moyens de
dégager un revenu. Outre le fait qu'une telle politique dite
" libérale " conduirait inévitablement à la
disparition de millions d'agriculteurs, une telle doctrine fait fi à la
fois des particularités des facteurs de production en agriculture, de
l'importance des biens agricoles et alimentaires, ainsi que des risques de
totale désertification de certaines zones -avec les conséquences
que provoque l'urbanisation excessive-.
Dès lors, le maintien du revenu des agriculteurs garde tout son sens, et
ce, même dans un contexte de recherche d'une plus grande
compétitivité. Néanmoins, les outils pour préserver
ce revenu ont dû s'adapter. La réforme de 1992 a commencé
à introduire une rupture entre la politique de gestion des
marchés et la politique des revenus des agriculteurs. Le revenu est
désormais moins assuré par les prix payés par le
consommateur, et davantage par des aides directes payées par le
contribuable. Cependant, le soutien à l'agriculture en Europe,
malgré la réforme de la PAC de 1992, reste encore
réalisé pour près des deux-tiers par les prix, même
si dans certains Etats membres -comme l'Autriche- 75% des revenus des
agriculteurs proviennent d'aides directes.
La mission d'information, fortement attachée à l'objectif de
maintien de revenu pour les agriculteurs, souhaite présenter trois
pistes de réflexions.
1. L'importance d'un découplage à l'Européenne
a) Le découplage, un système en devenir ?
Le
découplage peut se définir comme la déconnexion des aides
de la production et des prix du marché. Il vise à réduire
les distorsions économiques engendrées par le soutien des prix
-c'est-à-dire les prix garantis- sur la production et les
échanges de produits agricoles. L'objectif de ce mécanisme est
donc de rendre au prix de marché leur fonction de signaux d'orientation
des productions, en séparant radicalement la politique de prix
(théoriquement condamnée par l'OMC) de la politique de revenu
(assurée par des aides directes).
Le découplage n'est pas une idée récente en
agriculture. Toutefois, cette notion a rencontré un succès
croissant depuis une dizaine d'années
, en raison du lancement du
processus de réforme des politiques agricoles dans les pays
industrialisés à l'instigation de l'Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE) et du
démarrage des négociations commerciales sur l'agriculture au GATT
à partir des années 80.
Alors que le début des années 80 a été
marqué par un retournement des marchés mondiaux et par
l'apparition d'excédents de production chroniques aux Etats-Unis et dans
l'Union Européenne, les politiques agricoles sont remises en cause pour
deux raisons principales :
leur
coût budgétaire
, qui augmente fortement dans la
plupart des pays développés ;
leurs
modalités d'intervention,
qui encouragent la surproduction
(par le biais de prix garantis) et faussent la concurrence entre les pays
exportateurs sur le marché international (par l'octroi de subventions
à l'exportation), engendrant des conflits commerciaux de plus en plus
vifs.
Parallèlement, se développent dans l'opinion publique des
préoccupations concernant les nuisances environnementales
engendrées par l'activité agricole (pollution de l'eau,
dégradation des paysages...) et la désertification de certaines
parties du territoire entraînées par la réduction du nombre
d'agriculteurs.
Les avantages des aides directes découplées selon l'OCDE 51( * )
Selon
l'OCDE, les aides directes découplées, c'est-à-dire
liées ni aux prix, ni à la production ou aux facteurs de
production, permettent de réduire les distorsions économiques
résultant du soutien des prix ou des aides directes non
découplées. Les raisons avancées sont les suivantes :
- les aides découplées favorisent la
compétitivité car, étant neutres par rapport à
l'offre, elles permettent une allocation optimale des ressources en fonction
des prix de marché. En d'autres termes, l'exploitant détermine le
volume et le type de ses productions en fonction de sa
compétitivité propre par rapport aux signaux du marché, et
non par rapport aux garanties de l'Etat ;
- l'effet sur la compétitivité est d'autant plus
bénéfique que les aides découplées ne sont pas
capitalisées dans le prix de la terre. Ce dernier point est
particulièrement important pour les jeunes agriculteurs qui souhaitent
reprendre une exploitation ;
- les aides découplées permettent des économies dans
le montant des transferts publics, car elles sont indépendantes du
volume de production, d'une part, et bénéficient
entièrement aux agriculteurs, sans perte vers les secteurs d'amont et
d'aval d'autre part ;
- enfin, comparé au soutien des prix, les aides directes
découplées favorisent une plus grande transparence
budgétaire, gage d'une meilleure efficacité des politiques
publiques.
La mise en oeuvre d'aides découplées a d'importantes
conséquences au plan international car, estime l'OCDE, ces aides ne
faussent pas la concurrence entre pays exportateurs sur les marchés
mondiaux. Le découplage des aides est donc un outil
privilégié par l'Organisation mondiale du Commerce lors des
discussions sur l'agriculture.
Par ailleurs, selon l'OCDE, les aides découplées favorisent une
meilleure intégration des objectifs économiques et non
économiques de la politique agricole :
* elles sont favorables à la protection de l'environnement, car elles
n'incitent pas à l'intensification de la production et ne
pénalisent pas les systèmes de production (prairies, rotations de
plantes améliorantes...) bénéfiques à la
conservation des ressources naturelles ;
* elles freinent la diminution de la population agricole, car elles
n'encouragent pas l'agrandissement des exploitations, contribuant ainsi au
maintien du tissu rural.
L'accord sur l'agriculture, négocié dans le cadre du cycle de
négociations
d'Uruguay -qui a abouti à la signature de
l'Accord de Marrakech en 1994-
applique des restrictions différentes
aux différents types d'aides selon l'intensité avec laquelle
elles sont censées fausser la concurrence sur les marchés
mondiaux
:
- les aides non découplées -c'est-à-dire,
essentiellement, les aides apportées par le soutien des prix de
marché- doivent diminuer au titre de la réduction de la mesure
globale de soutien ;
- les aides directes " semi-découplées " sont
classées dans la " boîte " bleue de l'OMC, et
exemptées de réduction du soutien à condition d'être
associées à une maîtrise de la production ;
- les aides complètement découplées entrent dans la
boîte verte et son exemptées des engagements de réduction
du soutien.
Ce même Accord couvre une période de six ans (1995-2000).
L'article 20 prévoit que des négociations
" seront
engagées un an avant la fin de la période de mise en
oeuvre "
-ce que l'on peut interpréter comme le
1er janvier 2000- en vue de "
la poursuite du processus de
réforme
". Celui-ci est défini comme
" des
réductions progressives substantielles du soutien et de la
protection
".
Les aides compensatoires communautaires bénéficient d'une
" clause de paix ", c'est-à-dire qu'elles ne seront pas
attaquables par les pays tiers, pendant neuf ans (1995-2003), si elles
respectent certains engagements sur le niveau de soutien interne. L'Union
Européenne disposera donc d'une période de trois ans (2001-2003),
après l'expiration de l'Accord sur l'agriculture, pour négocier
de nouvelles règles sur l'agriculture à l'OMC.
Quel que soit le statut de la " boîte bleue ", la mission
d'information est consciente du fait qu'une forte pression s'exercera pour
faire évoluer les aides communautaires vers la " boîte
verte ".
Plusieurs options sont possibles pour atteindre cet objectif, puisque la
boîte verte regroupe une dizaine de types d'aides.
Si l'Union
Européenne choisit de transformer les aides communautaires en
" soutien du revenu découplé ", elle devra
procéder à deux ajustements essentiels dans les règles
actuelles de la PAC. En effet, selon la définition du soutien du revenu
découplé à l'OMC :
- les aides ne doivent pas être différenciées par
production ;
- les aides ne doivent pas être liées à l'obligation
de produire.
La boîte bleue et la boîte verte
La
boîte verte
L'Accord de Marrakech exempte des engagements de réduction du soutien
les mesures de soutien interne dont les effets de distorsion sur les
échanges ou sur la production sont "
nuls ou, au plus,
minimes
". Ces mesures doivent répondre à deux
conditions :
- le soutien doit être financé par un programme
budgétaire, "
n'impliquant pas de transferts de la part des
consommateurs
" ;
- et le soutien "
ne doit pas avoir pour effet d'apporter un
soutien des prix aux producteurs
".
L'Accord cite douze types d'aides entrant dans cette catégorie. Parmi
celles-ci, on trouve le " soutien du revenu découplé ".
Le soutien du revenu découplé est défini de la
façon suivante :
a) le droit à bénéficier de versements à ce titre
sera déterminé d'après des critères clairement
définis, tels que le revenu, la qualité de producteur ou de
propriétaire foncier, l'utilisation de facteurs ou le niveau de la
production au cours d'une période de base définie et fixe.
b) Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera
pas fonction ni établi sur la base du type ou du volume de la production
(y compris les têtes de bétail) réalisée par le
producteur au cours d'une année donnée suivant la période
de base.
c) Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera
pas fonction ni établi sur la base des prix intérieurs ou
nationaux, s'appliquant à une production réalisée au cours
d'une année suivant la période de base.
d) Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera
pas fonction ni établi sur la base des facteurs de production
employés au cours d'une année suivant la période de base.
e) Il ne sera pas obligatoire de produire pour pourvoir
bénéficier de ces versements.
La boîte bleue
Certaines aides directes qui ne satisfont pas aux critères de la
boîte verte sont exemptées temporairement des engagements de
réduction du soutien -et, à ce titre, n'entrent pas dans le
calcul de la Mesure globale de soutien- si elles sont subordonnées
à la maîtrise de la production. Ces aides doivent satisfaire aux
conditions suivantes :
- elles sont fondées sur une superficie et des rendements fixes ; ou
- elles sont versées pour 85% maximum du niveau de base de la
production ; ou
- ce sont des aides pour le bétail calculées sur la base
d'un nombre de têtes fixe.
Cette définition a été taillée sur mesure pour les
aides compensatoires issues de la réforme de la PAC et pour les
paiements compensateurs existant aussi avant la mise en oeuvre de la nouvelle
loi agricole (le FAIR Act) aux Etats-Unis.
La réforme de la PAC, en 1992, a introduit des
éléments de découplage du soutien dans le secteur des
grandes cultures et de l'élevage bovin.
Les prix de soutien ont
été sensiblement réduits, au profit d'aides directes
partiellement déconnectées de la production. La double fonction
de l'agriculteur -marchande (production) et non marchande (contribution
à la protection de l'environnement et à l'occupation du
territoire)- a été reconnue : le système de soutien
intègre des éléments d'encouragement à
l'extensification, ainsi que des mesures agri-environnementales
spécifiques.
Au regard des critères de l'OCDE, cependant, la réforme de la
PAC n'a réalisé qu'un " semi-découplage ". En
effet :
- le prix de soutien continue de jouer un rôle important dans le
secteur des céréales. Le niveau du prix d'intervention est encore
supérieur aux prix mondiaux ;
- les aides compensatoires communautaires sont liées aux facteurs
de production -elles sont versées par hectare- et
différenciées par production. Les aides aux grandes cultures
diffèrent de celles aux éleveurs bovins. Au sein même des
grandes cultures, les aides varient selon le type de production
(céréales/oléagineux/protéagineux) ;
- le soutien est lié à la maîtrise de la production,
que ce soit sous forme de jachère (grandes cultures), de quotas (sucre,
lait) ou de densité de chargement en bétail par hectare. Si cette
condition est bénéfique aux yeux de l'OMC, parce qu'elle
réduit les distorsions sur les échanges, elle contrevient aux
principes du découplage, selon lequel les aides doivent être le
plus neutre possible par rapport à la production ;
- certaines modalités du soutien -la jachère, l'exclusion du
système d'aide des surfaces en herbe- sont contradictoires avec
l'objectif affiché de valorisation de l'occupation de l'espace, de
moindre intensification de la production et de protection des ressources
naturelles.
En 1996, les Etats-Unis ont adopté le Federal Agriculture
Improvement and Reform Act (FAIR Act), qui constitue le cadre législatif
des programmes de soutien à l'agriculture pour sept ans (1996-2002).
Si le FAIR Act accélère l'orientation de l'agriculture vers le
marché, initiée par deux précédents Farm Bills
(1985 et 1990) (suppression de la jachère annuelle, découplage
des aides aux grandes cultures),
le découplage des aides mis en
oeuvre dans le FAIR Act n'est que partiel :
- les prix minima aux grandes cultures sont conservés. Le soutien
des prix reste le pivot du système d'aide aux producteurs de betteraves
et de cannes à sucre ;
- les aides directes sont liées au foncier, et donc
capitalisées dans le prix de la terre ;
- les aides directes sont en partie subordonnées au type de
production : elles ne sont pas versées si l'agriculteur plante des
fruits et des légumes ;
- le dispositif du " prêt de commercialisation "
(marketing loan) est reconduit. Ce dispositif est lié à la fois
aux prix de marché, au volume et au type de production. Il permet le
versement d'une aide aux producteurs de grandes cultures, destinée
à combler la différence constatée, le cas
échéant, entre le prix minima et le prix de marché. Le
marketing loan agit donc, à ce titre, comme une
" restitution " sur le marché intérieur et à
l'exportation, qui encourage les producteurs à vendre leurs
récoltes plutôt qu'à les mettre à l'intervention, en
cas d'effondrement des cours. En outre, les aides au titre du marketing loan ne
sont pas incluses dans l'enveloppe budgétaire globale des aides directes
; elles ne sont limitées que par le plafonnement des aides par personne,
qui est peu restrictif.
A la lumière de ces différents éléments, la
mission d'information fait un triple constat :
le découplage parfait n'existe
pas
car il est
fondé sur l'hypothèse d'une neutralité possible du
système d'aide par rapport à l'offre agricole : or, toute
intervention de l'Etat -y compris sous la forme d'une aide
découplée- entraîne des distorsions économiques ;
le découplage
reflète une vision très
libérale de l'économie et de la société.
Poussé à l'extrême, il signifie la négation de toute
politique agricole au profit du marché. Cette conception ignore la
spécificité des marchés agricoles et les rapports de force
internationaux sur l'échiquier du commerce mondial de produits agricoles.
le découplage peut réduire la légitimité des
aides à l'agriculture
. En effet, si l'objectif du soutien est
d'assurer la sécurité alimentaire du pays, d'encourager certaines
productions déficitaires et de protéger le revenu des
agriculteurs, quel est le sens d'une aide déconnectée du volume
et du type de production, et des prix de marché ?
Dès lors, la tentation est grande, pour les pouvoirs publics, de
justifier l'aide à l'agriculture par des objectifs non
économiques, tels que la protection de l'environnement et le
développement rural. Mais si l'agriculture remplit moins bien ses
fonctions non marchandes, la justification du soutien recule encore
davantage.
Ce point joue en faveur, soit de la subordination des aides au respect de
certains critères environnementaux ou ruraux, soit de la
réorientation d'une partie des aides de marché vers des mesures
agri-environnementales ou rurales. Le découplage favorise donc, à
terme, la réduction du soutien à l'agriculture.
Face à ce constat, la mission d'information considère que le
découplage n'est pas un objectif en soi, mais une modalité de la
politique agricole qu'il faut manier avec précaution
.
Elle souhaite donc que la question du découplage des aides
à l'agriculture soit examinée sous ses différentes
facettes
. Poussé à l'extrême, le découplage nie
la légitimité de toute politique agricole, dans la mesure
où il suppose l'efficience parfaite du marché. Mais l'application
concrète du découplage dans les politiques agricoles des pays
industrialisés, depuis une dizaine d'années, montre que cette
position doctrinaire est irréaliste. Les Etats-Unis eux-mêmes ont
conservé dans le FAIR Act des instruments de régulation du
marché, et introduit des programmes pilotes d'assurance-revenu
destinés à protéger le revenu des producteurs contre
l'instabilité croissante des cours.
La mission d'information considère que le découplage
pose donc le problème de l'équilibre à réaliser par
la politique agricole, entre le rôle dévolu au marché et la
régulation du marché par les pouvoirs publics.
Dans cette
optique, les aides découplées ne sont qu'un élément
du système de soutien parmi d'autres, coexistant avec des
éléments non découplés (protections à
l'importation, subventions à l'exportation, prix minima) et, le cas
échéant, avec une politique de gestion des marchés
(fixation du taux de jachère, programmes de stockage, etc...). La
régulation du marché par les pouvoirs publics est
justifiée par l'instabilité spécifique des marchés
agricoles, et par la nécessité, pour la société, de
pallier au moins en partie cette instabilité pour garantir son
approvisionnement alimentaire.
Elle estime que l'agriculture française pourrait, dans une
certaine mesure, tirer parti d'un découplage accru de la PAC.
Les
principaux bénéfices attendus en sont le renforcement de la
compétitivité de l'agriculture communautaire, dans les
différentes régions de l'Union et par rapport aux pays tiers, et
la validation de la PAC au plan international, grâce à la
classification des aides communautaires dans la boîte verte de l'OMC. Sur
ce dernier point, il faut cependant rappeler que le découplage n'est
qu'un des enjeux des prochaines négociations commerciales. Celles-ci
devraient traiter également, comme dans le cycle de négociations
précédent, de la réduction des subventions à
l'exportation et de l'amélioration de l'accès aux marchés.
Elle juge, en revanche, qu'un découplage trop accentué
du dispositif de soutien menacerait l'existence de certaines productions,
éventuellement moins compétitives,
mais que l'Union peut
souhaiter maintenir pour des motifs stratégiques ou autres. Plus
généralement, le découplage fragilise le système
d'aide à l'agriculture, en faisant évoluer celui-ci d'une aide
aux produits à une aide à l'exploitation et,
éventuellement, une aide à la personne. Il réduit la
légitimité du soutien aux yeux de l'opinion, et favorise le
" recouplage " des aides au revenu avec des objectifs non
économiques de la politique agricole, tels que la protection de
l'environnement et le développement rural.
En somme, deux écueils doivent être évités dans
l'évolution future de la PAC : celui d'un découplage " tous
azimuts ", qui s'exercerait aux dépens des fonctions de
régulation des pouvoirs publics ; et celui d'un glissement de la
justification des aides à l'agriculture d'objectifs économiques
à des objectifs de politique rurale au sens large.
b) La question de la légitimité des aides agricoles
Actuellement, peuvent être classées parmi
les
aides de la boîte verte, les indemnités compensatrices de
handicaps naturels (ICHN), les mesures agri-environnementales, les aides
à l'installation, à la cessation d'activité...
La Commission Européenne propose un plus grand découplage des
aides de la production à travers :
- un calcul des niveaux d'aides qui n'est plus indexé sur les
baisses de prix institutionnels ou sur les variations effectives de prix de
marché (cas de l'aide actuelle aux oléagineux) ;
- des aides directes forfaitaires qui ne dépendent plus du type de
production : aide de base commune aux céréales,
oléoprotéagineux avec toutefois un complément pour les
protéagineux ; objectif d'aide unique à la vache qu'elle soit
laitière ou allaitante.
Néanmoins, le découplage proposé reste limité
:
- compte tenu des modalités qui risquent d'être retenues :
marginalisation des compléments extensifs, prise en compte des
rendements pour la prime vache laitière... ;
- en raison du niveau de soutien qui risque d'être attaqué au
regard de son importance dans la formation du revenu agricole. Le degré
de dépendance des revenus est, en effet, plus important dans l'Union
Européenne que dans les autres grands pays agricoles. Une étude
de J-C Debar a ainsi montré qu'en moyenne sur 1992-1994, ces
données sont respectivement pour la France de 15 % et 53 %. La
comparaison avec 1996 serait encore plus probante, compte tenu de la
progression des aides de la réforme de la PAC sur 1993-1995. Par
ailleurs, l'application du nouveau Farm Bill aux Etats-Unis devrait à
terme se traduire par une réduction de l'importance des aides dans le
revenu, alors que le paquet Santer conduit à une substitution accrue des
prix par les aides directes.
D'après les simulations ROSACE, les aides directes pourraient
représenter jusqu'à 200 à 300 % chez un
spécialisé SCOP, 200 à 400 % chez un
spécialisé viande bovine et 60 à 170 % dans les
systèmes laitiers. Quel que soit le découplage introduit, en
imaginant même une aide directe à l'agriculteur, il sera difficile
de montrer que les subventions n'ont pas de lien avec la décision de
produire alors que, sans elles, l'agriculteur serait contraint de cesser son
activité.
Il est donc prévisible que le droit à subventionner l'agriculture
dans de telles proportions fera l'objet de plus âpres négociations
que la manière de subventionner. Si l'enjeu est effectivement plus le
niveau du soutien direct que le découplage, les propositions du paquet
" Santer " contribuent à accentuer la fragilité du
soutien Européen à l'agriculture.
Or, la recherche d'une plus grande légitimité du soutien
vis-à-vis de l'opinion publique est, en effet, une
nécessité :
- pour justifier auprès de la société le niveau de
soutien accordé à l'agriculture. Cet effort de
légitimité paraît d'autant plus nécessaire que l'on
se situe dans un contexte de rigueur budgétaire et d'exclusion sociale
par le chômage et que l'image de l'opinion publique sur l'agriculture est
troublée par divers problèmes sanitaires et écologiques ;
- pour mettre en cohérence la politique d'aides directes de la PAC
avec le modèle de développement de l'agriculture que l'on
défend. Même si les aides ont pour première vocation et
justification de compenser les baisses de prix, elles constituent
également un levier pour favoriser les objectifs d'équilibre
entre productions et entre régions, de territorialisation de la
production, de maintien d'une agriculture plurielle, nombreuse et reproductible.
Les propositions de la Commission ne vont pas dans ce sens.
Au
contraire, elles conduisent à des aides directes plus discutables que
celles instaurées ou renforcées en 1992 vis-à-vis de la
société.
Par ailleurs, ce n'est pas la modulation -ou la subsidiarité- qui
permettra de justifier -au nom de l'éco-conditionnalité et de
l'emploi- et de stabiliser des niveaux d'aide qui pourront représenter
jusqu'à 100, voire 200 %, du revenu, ce qui renvoie au rôle
de la politique des prix.
Tout en refusant d'intégrer la PAC au sein d'une politique rurale
intégrée communautaire (PRIC) comme le suggérait le
document de stratégie agricole -
ou proposition Fischler- de
décembre 1995,
la mission d'information souhaite valoriser le
rôle multifonctionnel de l'agriculture.
La mission d'information a conscience qu'il faut s'attendre
à ce que
la justification des paiements compensations issus de la réforme de la
PAC de 1992 soit de plus en plus contestée
alors que
les citoyens
accordent une importante croissante (...) aux notions de qualité, de
santé, de développement personnel et de loisirs
et que
les
zones rurales sont exceptionnellement bien placées pour répondre
à ces attentes
.
La mission d'information s'interroge sur les véritables objectifs qui
guident la
Commission Européenne. En décembre 1995, le
document de stratégie agricole présenté par
M. Fischler tendait à fondre la PAC au sein d'une grande politique
rurale communautaire (PRIC) en vue de " promouvoir " le rôle
multifonctionnel de l'agriculture ". Or, ce projet aurait eu de graves
répercussions sur l'agriculture en confondant notamment les objectifs
économiques et non économiques de la politique agricole. Le
danger ne résidait pas dans le découplage des aides mais dans le
recouplage des aides au revenu à des critères sociaux ou
environnementaux, qui sont hors du champ de la politique agricole proprement
dite. La PAC et la PRIC visaient des objectifs distincts et ne pouvaient donc
pas être substitués l'un à l'autre. L'efficacité des
politiques publiques commande de traiter chaque objectif avec des instruments
différents, et présentant le moins d'incompatibilité entre
Moins de deux ans plus tard, la Commission Européenne propose des
orientations en matière d'aides directes qui s'avèrent
extrêmement fragiles car elles ne sont justifiées :
-
ni par le marché
puisqu'elles perdent leur caractère
strictement compensatoire par rapport à une baisse des prix ;
-
ni par la volonté de défendre un type d'agriculture
au niveau Européen, puisque les choix sont différents selon les
productions.
La Commission propose un découplage difficilement défendable dans
le cadre de l'OMC, en laissant, d'une part, à la seule
subsidiarité la possibilité d'instaurer des critères
territoriaux et environnementaux et en mettant, d'autre part, en contradiction
entre elles, ses propres propositions dans les différents secteurs.
Pour la mission d'information, la proposition de la
Commission :
- risque de ne pas répondre à la problématique
extérieure des aides directes liée à la prochaine
négociation de l'OMC au cours de laquelle la question du
découplage fera l'objet de négociations ;
- s'éloigne des préoccupations de l'agriculture
Européenne, pour laquelle les aides directes doivent évoluer,
à la fois pour des raisons d'équilibre au sein de ce secteur et
dans un souci de légitimation du soutien auprès de l'opinion
publique.
Les orientations de la
Commission sont
donc très confuses.
La mission d'information considère, en accord avec les conclusions du
groupe " Demeter " que :
- la politique agricole répond à une pluralité
d'objectifs économiques. C'est une politique sectorielle, qui doit
conserver sa cohérence interne, tout en étant incompatible avec
les autres politiques ;
- le découplage est une modalité de la politique agricole,
non de la politique rurale, comme le laissait entendre il y a deux ans
M. Fischler. La réalisation des objectifs de la PAC
(approvisionnement des consommateurs, contribution à la
sécurité alimentaire mondiale), et la prise en compte des
contraintes Européennes (intégration des PECO) et internationale
(futures négociations à l'OMC) conduisent à la recherche
d'un équilibre entre un découplage accru des aides directes et le
maintien d'instruments de régulation du marché ;
- Si un certain accroissement du découplage paraît
inéluctable dans les années à venir, cet accroissement a
lui-même ses limites. En effet la part de l'aide dans le revenu total des
producteurs ne doit pas dépasser un certain seuil, au-delà duquel
la viabilité du système est mise en cause. Par ailleurs,
l'introduction d'aides totalement découplées de la production,
telle qu'une aide à la personne, semble difficilement concevable en
Europe, sauf à créer un dispositif complètement
inintelligible et une rupture radicale avec l'histoire de la politique agricole.
- Le problème n'est pas d'être pour ou contre le
découplage, mais de savoir comment l'utiliser afin de mieux
légitimer les aides.
2. La question du plafonnement des aides
La mission d'information considère que le
plafonnement limitant les aides directes par exploitation ne peut suffire
à légitimer le soutien
. Même s'il peut permettre de
répondre à des situations difficilement défendables et
d'éviter de jeter le discrédit sur l'ensemble des aides directes,
il
présente néanmoins des effets pervers
dans la mesure
où :
- il génère des effets de seuil : intérêt
à l'agrandissement jusqu'au seuil, démantèlement des
exploitations au-delà du seuil ;
- il peut être en contradiction avec l'objectif de
préservation de l'emploi ;
- il s'applique de façon identique aux exploitations
spécialisées dans les productions soutenues par les primes et aux
exploitations mixtes qui tirent une partie de leur revenu d'activités
non soumises au plafonnement mais soutenues éventuellement par les prix
(lait, betteraves, hors-sol, viticulture...).
Par ailleurs, compte tenu de l'arrivée de nouveaux pays dans l'Union
Européenne, la mise en place d'un plafonnement pourrait se
révéler inégalitaire : en effet, des subsides seraient
redistribués aux pays où le nombre d'agriculteurs est très
supérieur à celui de la France. En outre, notre niveau de
technicité est tel par rapport à nos concurrents Européens
que nous n'avons que peu de marge d'augmentation de rendement.
Rappelons quelques données importantes dans le secteur des grandes
cultures :
|
France |
Etats-Unis |
Rendements |
71 quintaux/ha |
26 quintaux/ha |
Revenu |
2000 F/ha |
425 F/ha |
Superficie |
100 ha |
400 ha |
Outre,
le problème de l'extensification, qui nécessiterait d'accepter de
diviser par 4 ou 5 le nombre d'agriculteurs céréaliers pour
retrouver un revenu équivalent par exploitation, le plafonnement des
compensations peut s'avérer problématique.
Afin d'éviter certains excès, ne serait-il pas plus opportun de
mieux identifier qui est agriculteur et qui ne l'est pas, qui doit
bénéficier des aides ou non, afin que des sociétés
financières n'aient pas comme principale activité de
spéculer sur les aides.
C'est pourquoi la mission d'information est favorable au principe d'un
mécanisme de dégressivité des aides, en fonction de la
taille de l'exploitation, prenant en compte les actifs et le territoire. Ce
mécanisme permettrait, sous réserve qu'il ne soit pas source de
distorsions, de mieux répondre aux objectifs de politique
agricole.
3. La mise en place d'un dispositif de maintien du revenu agricole face à une compensation partielle de la baisse des prix
La
compensation partielle du rapprochement des prix communautaires vers les prix
mondiaux, proposée par la Commission Européenne, pose le
problème des baisses de revenu que subiront les producteurs, et de
l'instabilité croissante des revenus en fonction des prix de
marché.
Les marges de manoeuvre pour répondre à des baisses de prix non
compensées sont très variables selon les secteurs. Elles sont a
priori plus importantes en grandes cultures, du fait de la croissance moyenne
des rendements et de la possibilité de réduire le taux de
jachère pour augmenter la production.
La plus grande instabilité du revenu des producteurs, davantage
exposé aux fluctuations des cours, devrait rendre nécessaire
l'utilisation de dispositifs de gestion du risque (marchés à
terme, programmes d'assurance-récolte ou d'assurance-revenu, etc.). La
question se pose du coût et du financement de ces dispositifs (secteur
privé, pouvoirs publics ou combinaison des deux).
a) Des expériences étrangères intéressantes : les concepts d'assurance " récoltes " et " revenu "
Alors
qu'en France, le dispositif de protection des exploitants agricoles contre les
aléas climatiques et épidémiques repose sur les contrats
d'assurance, le régime des catastrophes naturelles et celui des
calamités agricoles, certains pays étrangers, ont retenu une
approche différente en matière de protection de l'agriculture
face aux risques climatiques.
Ces dispositifs qui privilégient l'assurance sont relativement nombreux
et concernent des pays aussi différents que le Mexique, le Japon ou
l'Afrique du Sud. Cependant, trois pays -le Canada, les Etats-Unis et
l'Espagne- semblent avoir pris, en ce domaine, une avance importante.
Au préalable, il convient de définir deux concepts, à
savoir ceux d'assurance " récoltes " et d'assurance
" revenu ".
L'assurance " récoltes " couvre des événements
de nature catastrophique dont ni la fréquence, ni l'importance, ne sont
connues. Elles consiste en l'indemnisation des pertes de récoltes dues
à des aléas naturels, c'est-à-dire, climatiques ou
épidémiques. L'assurance " récoltes " est donc
une garantie de rendements.
En matière d'assurance " revenu ", peu importe la nature du
risque. L'exploitant s'assure contre une diminution de recette, qu'elle soit
provoquée par un aléa naturel ou économique. Cette
protection offre donc une garantie de rendement pour une garantie de
prix
52(
*
)
. Il serait ainsi plus opportun de
parler d'assurances " recettes ".
Le Canada : un encouragement à l'épargne
Le système de protection canadien cherche à encourager
l'épargne en période de hauts revenus par le versement d'une
cotisation volontaire doublée par le Gouvernement fédéral
et les provinces.
Le Canada a mis en place, en 1959, un régime d'assurance
" récoltes " dont l'objectif dont l'objectif était de
protéger les exploitants agricoles contre les aléas climatiques.
Mais, dans les années 1980, la politique agricole canadienne
était devenue trop coûteuse. En 1991, les aides gouvernementales
concouraient à plus de 75 % des recettes des agriculteurs. Un vaste
réaménagement de la politique agricole canadienne s'est donc
imposé.
Une loi du 12 avril 1992 a assuré à chaque exploitant
un revenu stable et prévisible en le protégeant des fluctuations
de rendement et de prix. Elle devait permettre non seulement la
cohérence de la plupart des programmes existants mais aussi, à
moyen terme, d'assurer un découplage des aides de la production, afin de
les rendre compatibles avec les dispositions du GATT.
Après plusieurs adaptations successives, rendues notamment
nécessaires par le désengagement financier de l'Etat
fédéral, le système de protection actuel comporte trois
étages :
- un programme de stabilisation du revenu net (CSRN) ;
- un régime d'assurance " récoltes " ;
- des programmes complémentaires provinciaux.
Le montant de chaque versement est doublé par le Gouvernement
fédéral (pour les deux tiers) et les provinces. Les
dépôts de l'exploitant bénéficient
d'intérêts bonifiés supérieurs de 3 % au taux
pratiqué par la Banque du Canada.
Le fonctionnement pratique du CSRN connaît des variations suivant les
provinces, notamment en ce qui concerne les taux de contribution. En revanche,
l'utilisation des sommes épargnées est soumise à un
régime unique. Les retraits ne peuvent intervenir que lorsque la marge
brute de l'exploitation (c'est-à-dire la différence entre les
recettes nettes et les charges) est inférieure à la marge brute
moyenne des cinq années précédentes et lorsque le revenu
imposable de l'agriculture tombe sous un seuil préalable fixé.
Dans chacune de ces deux hypothèses, les retraits sont limités au
montant de cette perte de marge ou de revenu.
Les pouvoirs publics canadiens ont dépensé 97 millions de
dollars canadiens (407 millions de francs) au titre du CSRN en 1993. Au
terme de l'année fiscale 94/95, le montant cumulé des
dépôts s'élevait à 677 millions de dollars
(soit environ 2,8 milliards de francs) dont 366 millions
épargnés par les agriculteurs (1,5 milliard). On estime
qu'environ 80 % exploitations " professionnelles " admissibles
adhèrent au CSRN et que la plupart le font à hauteur du montant
maximum pouvant bénéficier de l'aide publique.
Les Etats-Unis : la garantie d'une recette minimale
Le dispositif américain vise à garantir aux agriculteurs une
recette minimale par culture basée sur le rendement moyen de leurs fonds
et sur le prix du marché attendu.
La protection des récoltes contre les aléas naturels est
très ancienne aux Etats-Unis.
On retiendra simplement qu'en 1978, 7 % des exploitants étaient
assurés, ce qui représentait 2 % de la valeur totale de la
production. Au début des années 1990,
800.000 agriculteurs, soit 30 % avaient recours à l'assurance
" récoltes ". Si la progression ainsi enregistrée est
remarquable, elle reste toutefois insuffisante.
Le Gouvernement a modifié très profondément, en 1996, la
philosophie générale du système. Jusqu'alors, en effet,
l'assurance " récoltes " était un programme accessoire.
La loi sur l'amélioration et la réforme de l'agriculture (FAIR
Act), votée le 29 mars 1996, applicable pour la période
1996-2002, en favorisant une plus grande fluctuation des prix et des revenus et
en imposant le principe d'un découplage total des aides des surfaces et
des prix du marché, a fait de la gestion du risque l'une des
préoccupations majeures du Gouvernement fédéral et des
agriculteurs.
Il s'agit avec le dispositif de garantir aux exploitants une recette minimale
par culture et par hectare, en se fondant sur le rendement moyen de leur fonds
et sur le prix de marché attendu. Une aide est versée quand la
recette réelle est inférieure à la recette garantie.
Il ne fait guère de doute que la gestion du risque devrait se
développer dans les années à venir. Les produits
d'assurance offerts aux agriculteurs seront de plus en plus sophistiqués
et devraient couvrir à la fois les risques naturels et les risques
économiques. Le partenariat entre les Pouvoirs publics et les assurances
ayant porté ses fruits, celui-ci devrait être maintenu.
L'assurance " récoltes " américaine comprend deux
volets : le " CAT program " et ses garanties " buy
up " et le " nomisured crop disaster assistance program "
(NAP).
Ces dispositifs ne couvrent jamais des pertes provoquées par la
négligence, une pratique agricole non conforme, le vol, la baisse des
prix, etc.. En cas de défaut de toute souscription alors qu'elle est
possible, ce qui est le cas pour soixante quatre cultures, l'exploitant renonce
à toute éligibilité à l'assistance d'urgence pour
des récoltes sinistrées. Il conserve, en revanche, la
possibilité d'obtenir des frais d'urgence ou de recevoir des
indemnités du NAP.
La garantie minimum accordée (" catastrophic converage "
-CAT)
est limitée à 50 % du rendement moyen de
l'exploitation, calculé à partir d'un historique de quatre ans ou
plus. En cas d'impossibilité de calculer ce rendement historique, seule
la production antérieure connue sera retenue comme base et on lui
appliquera un taux de rendement transitoire.
L'indemnisation des pertes s'élève à 60 % du prix de
marché escompté. Cela signifie que, pour chaque unité de
production, le rendement effectif et le rendement garanti sont comparés.
Si le premier est inférieur au second, une indemnité sera
versée.
Cette couverture CAT prend un compte les dommages provoqués par la
sécheresse, l'humidité excessive, la grêle, le vent, le
feu, les insectes et les maladies. L'exploitant assuré s'engage à
respecter la date limite de souscription, à fournir un historique de
production à déclarer les surfaces qu'il cultive, les pertes
subies dans un délai rapide, à certifier exact le montant et la
cause de la perte et à stipuler la production finalement obtenue. Il ne
paye pas de rime mais des frais administratifs, ou de gestion, de
50 dollars par culture. La gestion de cette garantie est, en principe, de
la compétence des compagnies privées.
Les compagnies d'assurances proposent aux exploitants de souscrire des
garanties supplémentaires " buy up " qui peuvent aller
jusqu'à 75 % du rendement historique à 100 % du prix du
marché. Ces primes afférentes à ces garanties
bénéficient de polices d'assurance à des prix attractifs,
couvrant les frais de nouvelle plantation ou des pertes de qualité.
Le programme " NAP " propose aux exploitants une protection contre
les aléas naturels touchant des productions non assurables
. Il
s'agit d'une assistance locale, indépendante des procédures
d'urgence qui est alimentée par des fonds fédéraux. La
seule contrainte, impérative, pour l'exploitant, consiste à
fournir une déclaration d'assolement à l'administration.
Les récoltes éligibles sont celles dont le rendement local
attendu est inférieur à 65 % de la normale, avec application
d'un plafond de 100.000 $ par récolte annuelle. Il existe, de
surcroît, trois façons de définir la zone éligible -
le comté, au moins 320.000 âcres ou une superficie où
la valeur totale des récoltes excède 80 millions de $-
ce qui permet de cibler l'assistance en fonction des besoins.
Aucun système global d'assurance " revenu " n'est
actuellement mis en oeuvre aux Etas Unis. Tout au plus assiste-t-on, depuis
quelques années, à des expérimentations, toutes
fondées sur le volontariat, et différentes d'un Etat à
l'autre. Le grand débat suscité par la préparation du Farm
Bill a permis d'officialiser certaines initiatives et expériences.
Le programme dit " Income protection " est une initiative
privée, approuvée par le FCIC, Federal Crop Insurance
Corporation. Expérimenté en 1996 sur le maïs, le coton et le
blé de printemps dans un petit nombre de comtés, il a
été étendu au blé d'hiver en 1997. L'agriculteur
qui désire participer à cette expérimentation
bénéficie d'une garantie de recette égale à son
rendement historique multiplié par le taux de couverture choisi (de 50
à 75 % du rendement historique) et multiplié par le prix du
marché projeté.
Le revenu historique est le rendement moyen défini par l'assurance
" récoltes ". Le prix du marché projeté est le
prix constaté sur le marché à terme de Chicago.
Le " Crop Revenu Coverage " (CRC) élaboré par le
Gouvernement fédéral, a été testé sur le
maïs et le soja dans deux Etats en 1996. L'extension de son
expérimentation au blé d'hiver dans six Etats a été
autorisée en 1997. L'agriculteur qui souscrit au CRC
bénéficie d'une recette garantie égale à son
rendement historique multiplié par le taux de couverture choisi,
multiplié par 95 % du plus haut des deux prix suivants : le prix du
marché projeté avant les semis, le prix de récolte
à Chicago. Le dispositif permet donc un accroissement de la recette
garantie si les cours augmentent entre la période des semis et
l'époque de la moisson.
La recette garantie s'accroît si les cours augmentent entre le semis et
la récolte. L'exploitant conserve la possibilité de
prévendre sa récolte au moment des semis, minimisant ainsi le
risque d'une éventuelle mauvaise récolte. Si les cours montent,
l'augmentation de l'aide compensera ses éventuelles pertes de
production. Mais cet avantage du dispositif à un coût, puisque le
montant de la prime est 60 % plus élevé que dans le
programme " Income protection ".
Il est important de souligner que le département américain de
l'agriculture a annoncé début avril une série de mesures
destinées à aider les agriculteurs à mieux se
prémunir contre la volatilité des prix et les variations
météorologiques.
Les initiatives de l'administration portent sur l'assouplissement des
règles en matière d'octroi d'assurance pour les nouvelles
productions et surfaces cultivées et le développement de
programmes pilotes pour renforcer la protection sociale des agriculteurs. Le
secrétaire à l'agriculture, Dan Glickman, a ainsi proposé
au congrès un projet de loi visant à étendre la
durée de prêts agricoles en période de creux des
marchés et à permettre aux agriculteurs une plus grande
liberté de plantations lorsque leurs premières récoltes
sont perdues.
Par ailleurs, l'agence de gestion des risques de l'USDA (RMA) a
été chargée d'envisager de nouveaux types d'assurance
permettant aux agriculteurs de mieux se prémunir contre les risques de
la profession. En cas de désastres successifs, une couverture
insuffisante des récoltes peut en effet limiter la capacité d'un
producteur à emprunter les fonds nécessaires à la reprise
de son activité. La RMA devrait mener un programme pilote de
renforcement de la couverture des agriculteurs des régions de plaines
dans les contés du Nord.
De plus, la politique agricole américaine encourage les agriculteurs
à semer en fonction des signaux du marché, ce qui a fortement
augmenté la variabilité des récoltes. Dans le but de
subvenir à la demande croissante d'assurance pour ces cultures
alternatives, le RMA veut moderniser la législation et
accélérer les procédures.
Espagne : un programme ambitieux d'assurance récoltes
La loi du 28 décembre 1978 a introduit l'assurance
" récoltes " en Espagne. Ce dispositif est très
ambitieux, puisque, dès l'origine, son champ d'application s'est
étendu à l'ensemble du territoire de l'Etat espagnol et à
l'ensemble des risques naturels.
L'assurance-récoltes espagnole concerne aujourd'hui une cinquantaine de
productions végétales, l'élevage des bovins, des ovins et,
depuis cette année, celui des caprins, ainsi que l'élevage des
truites et l'aquaculture marine (dorades, bars et turbots). En ce qui concerne
les productions végétales, les contrats couvrent des aléas
climatiques prédéfinis, au minimum la grêle, le gel, la
tempête. Quelques productions particulières
bénéficient d'une couverture " tous risques naturels ".
Il s'agit de l'oignon de l'île de Lanzarote par exemple ou des
céréales d'hiver non irriguées. De très nombreux
aléas naturels sont pris en compte par l'assurance
" récoltes ". La couverture est toutefois plus ou moins
étendue, selon les productions et les zones géographiques. Le
taux de couverture varie en fonction des risques assurés. Il est en
général de 100 % de la valeur de la production
mentionnée au contrat pour l'incendie et la grêle et de 80 %
pur le gel, la tempête, le vent, la pluie et l'inondation.
En cas de sinistre, dans des conditions normales, une franchise de 10 %
reste à la charge de l'exploitant. mais pour les risques de grande
intensité, notamment les inondations, s'applique une franchise de
30 %, qualifiée " d'absolue ".
Les pouvoirs publics espagnols ne se contentent pas de créer les
conditions favorables à la mise en place et à l'essor de
l'assurance " récoltes " ; ils participent très
largement au financement du dispositif, notamment en prenant une partie du
montant de la prime payée par l'exploitant.
On évalue souvent cette participation au paiement de la prime à
hauteur de 50 % de son montant. En réalité, le dispositif
est beaucoup plus complexe, les taux de subvention applicables dépendant
à la fois de la situation de l'exploitant et de la nature des
productions assurées. La participation de l'Etat se décompose
toujours en trois tranches : une subvention de base, une subvention pour
contrat collectif et une subvention additionnelle. Il résulte du jeu des
combinaisons possibles que certaines cultures, céréalières
par exemple, bénéficient d'une taxe de subvention plus proche de
25 ou 30 % que de 50 %.
Le coût total moyen (c'est-à-dire national) de l'assurance,
exprimé en pourcentage de la valeur du capital assuré, est bien
entendu variable selon la nature de la production. Il serait de 1,7 % pour
les pommes, de 1,9 % pour les céréales d'hiver, de
3,4 % pour le colza et de 7,1 % pour les tomates.
Le rythme très rapide auquel les nouvelles options ont vu le jour
provoquera d'importantes pertes qui ont mis le système en danger. Pour
la période allant de 1980 à 1993, l'assurance
" récoltes " a généré un déficit
évalué à plus de 35 milliards de pesetas
(1,4 milliards de francs).
Le dispositif espagnol s'inscrit dans la durée. Il progresse depuis
plusieurs années à un rythme très régulier et il
est clair que l'objectif final reste de parvenir à un système
unique de protection applicable partout, à toutes les cultures et pour
tous les risques naturels. La dernière conférence nationale des
assureurs agricoles, qui s'est tenue à Madrid le 13 mars 1997,
a confirmé cette ambition d'universalisation progressive de la
protection du secteur agricole.
b) Des évolutions jugées nécessaires par la mission d'information
La
réforme du régime d'indemnisation des calamités agricoles
est depuis longtemps souhaité.
Pour les uns, ce ne sont pas les
principes sur lesquels repose la loi du 10 juillet 1964 qui sont en
cause mais plutôt la mauvaise application qui en a été
faite, dans un contexte de désengagement financier de l'Etat. Pour
d'autres, le système de protection, dans son ensemble, ne répond
plus aux besoins de l'agriculture.
En France,
deux évolutions peuvent légitimer la demande d'une
réforme du dispositif français de protection
. La
première tient à l'agriculture elle-même qui, en se
modernisant, semble avoir besoin de dispositifs financiers et juridiques
nouveaux. La seconde évolution concerne l'adaptation qui doit être
la sienne en période de restrictions budgétaires. C'est ainsi que
le financement du Fonds des calamités se trouvent placé sous le
signe de la précarité, l'Etat accumulant un retard de plus de
850 millions de francs.
Le contexte international et, notamment, le mouvement de
libéralisation des marchés, qui implique un plus grand
découplage nécessite la mise en place d'un véritable
mécanisme de prévoyance pour les agriculteurs.
Par ailleurs,
la réforme de la PAC proposée par la Commission Européenne
renforce le besoin d'un dispositif nouveau (national et/ou communautaire) de
protection contre, au minimum, les risques naturels. Dans cette optique, le
recours à l'assurance se trouve incontestablement favorisé par le
discours actuel, qui tend à responsabiliser davantage l'exploitant.
Les dispositions de l'article 92 du Traité de l'Union permettent
aux Etats membres de l'Union Européenne de mettre en place des
régimes publics favorisant la protection des exploitants contre une
baisse des revenus provoquée par les dommages climatiques. Certains
pays, l'Espagne bien sûr, mais aussi le Portugal, l'Autriche ou l'Italie,
sont à la recherche de solutions. Ces dispositifs pourront certainement
permettre aux exploitants de ces pays, pour peu qu'ils soient assurés
bien entendu, de mieux faire face à la baisse des soutiens
Européens.
Ce constat devrait, comme l'indique l'APCA, convaincre les professionnels
français de l'urgence qu'il y a à mettre au point un dispositif
de protection adapté à cet environnement économique et
politique nouveau.
Les instances communautaires ne se sont que rarement prononcées
officiellement sur le sujet. L'action de l'Union en vue de faire face aux
dommages causés à la production et à l'investissement par
des calamités naturelles, ou d'autres circonstances exceptionnelles,
s'est principalement exercée sous forme de contrôle des aides
accordées au niveau national.
Si l'initiative en la matière appartient aux Etats membres, une
participation plus active des instances communautaires n'est pas exclue. C'est
ce qui ressort de l'avis relatif au régime communautaire d'assurances
agricoles du Comité économique et social en date du
23 septembre 1992 et des conclusions de la réunion des
ministres de l'agriculture qui s'est tenue à Burgos en
septembre 1995.
Au niveau français, de très nombreuses instances dont le
Sénat se sont prononcées pour une refonte de la loi de 1964.
Les compagnies d'assurance se sont en outre déclarées à de
nombreuses reprises favorables à la mise en place de l'assurance
" récoltés ".
En 1995, 1996 et 1997, Groupama a conduit une étude de terrain dont le
but était de mettre au point une méthode d'expertise
adaptée à chaque type de culture et à chaque aléa
climatique.
Cette étude s'inscrit dans le cadre d'une réflexion d'ensemble,
puisqu'elle porte tout à la fois sur la connaissance des
expériences étrangères et sur ce que pourrait être
l'organisation d'un régime de protection rénové. Mais elle
touche aussi à ce qui intéresse plus particulièrement un
assureur, à savoir l'expertise des dommages.
En la matière, tout est à découvrir et à
définir. C'est pourquoi Groupama a décidé de tester,
pendant trois ans et sur quelques 220 exploitations volontaires, des
méthodes d'expertise d'assurance des dommages climatiques aux
récoltes.
Groupama insiste sur le fait que ce sont les connaissances acquises en
matière d'expérimentation qui ont le plus d'importance. La
compagnie estime qu'il lui sera bientôt possible de proposer aux
exploitants spécialisés dans les grandes cultures des formules
d'assurance " récoltes " à caractère
multirisques.
Par ailleurs, le Crédit agricole a mené plusieurs études
sur ces outils de réduction des aléas en agriculture. Selon les
informations obtenues par le Président et les rapporteurs de la mission,
le Crédit agricole sera largement partie prenante si un tel
système se mettant effectivement en place au cours des prochaines
années.
La mission d'information estime qu'un rééquilibrage du
système de protection français paraît de plus en plus
nécessaire, et ce même malgré le bon fonctionnement du
régime des calamités agricoles.
Certes, la France dispose, en effet, d'une panoplie d'instruments qui
rappellent les dispositifs étrangers :
- son assurance " grêle " est une assurance
" récoltes " mais limitée à un risque
particulier ;
- son régime des catastrophes naturelles rassemble, sur le plan
organisationnel, en particulier pour tout ce qui touche aux relations entre
Pouvoirs publics et assurances, aux régimes d'assurance
" récoltes " canadien et américain ;
- l'option " capital à l'hectare " mise au point par
Groupama Ile-de-France, dans le cadre de son contrat forfaitaire Assurit, est
un dispositif qui va au-delà des garanties de rendement habituelles en
matière d'assurance " grêle " ;
- le principe de la déduction pour investissement (DPI) est
très proche de celui du Compte de stabilisation du revenu net
(CSRN) canadien ;
- l'étude " terrain " de Groupama correspond tout
à fait à la logique espagnole d'étude des
phénomènes naturels sur le terrain avant tout lancement d'une
nouvelle garantie.
Seulement, ces initiatives dispersées ne constituent pas une
politique. Bien au contraire, il s'agit d'initiatives dispersées. Par
ailleurs, la multiplication du nombre des produits proposés risque
d'entraîner une certaine confusion.
L'agriculture doit éviter deux écueils : ignorer les
expériences étrangers et les copier.
Ainsi, il convient en la matière de mettre en place rapidement des
expérimentations et d'instaurer une coopération entre personnes
publiques et personnes privées.
La mission d'information souhaite que :
- la mise en oeuvre d'une garantie partielle des recettes fasse l'objet
d'un véritable débat dans le cadre de la réforme de la
PAC, celle-ci pouvant participer au financement de ce dispositif ;
- la réforme de la loi de 1964 fasse partie intégrante du projet
de loi d'orientation agricole.
B. UNE PRÉSENCE AGRICOLE NÉCESSAIRE SUR L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE
Il est regrettable que la réforme de la PAC n'appréhende pas, ou peu, deux types d'agriculture qui sont pourtant essentiels dans le paysage Européen.
1. Une nouvelle impulsion pour l'agriculture de montagne
a) Le dispositif mis en place pour l'agriculture de montagne
Le
dispositif spécifique de soutien Européen aux zones
défavorisées a été conçu en 1975 et n'a que
peu évolué depuis.
Il repose sur deux leviers principaux :
- l'attribution annuelle d'une indemnité de compensation de
handicaps naturels (ICHN), plafonnée par le nombre d'animaux
(50 UGB) ou d'hectares éligibles (maximum de l'UGB/ha de surface
utilisée pour l'alimentation du bétail) ;
- le financement d'investissements collectifs pour les
améliorations pastorales.
De plus, le financement des investissements de modernisation de même que
le soutien à l'installation des jeunes agriculteurs,
bénéficient d'un régime plus favorable en zone
défavorisée.
Ces soutiens ont une triple justification : maintenir une
activité économique, valoriser l'espace et assurer un revenu
équitable par la compensation financière des surcoûts de
production.
Toutefois, ce dispositif présente certaines lacunes
- en remboursant 25 % des aides quelle que soit la zone
concernée, la réglementation communautaire ne tient pas compte de
la gravité des handicaps naturels qui affectent différemment les
zones (piedmont, montagne, haute-montagne...).
- cette même réglementation prend en compte uniquement les
surcoûts liés à l'acte de production, en ignorant que dans
les zones de montagne, ces surcoûts affectent également la
collecte, les services (insémination, contrôle laitier...), la
transformation ;
- la politique d'extension des zones considérées comme
défavorisées, de 1987 à 1996, a conduit à une
dispersion du soutien public sur des zones de plus en plus vastes alors que les
mesures avaient initialement été créées pour les
zones de montagne en considérant les handicaps que sont la pente,
l'altitude et le climat. On peut citer à titre d'illustration
l'indemnité spéciale montagne (ISM) née en France en 1972,
puis étendue à l'ensemble de la Communauté en 1975 sous
forme d'ICHN, globalisant à la fois les soutiens aux zones de montagne
et ceux aux zones défavorisées ;
- la réforme de la PAC a ignoré les
spécificités propres aux zones défavorisées
même si un effort limité a été déployé
en faveur d'une agriculture plus extensive et plus gestionnaire de l'espace
(complément extensif prime à l'herbe).
En termes de soutien, la politique suivie en France a conduit à
concentrer le soutien sur l'ICHN avec en contrepartie, un abandon progressif et
concomitant de la politique nationale pour les zones de montagne à
travers les aides à l'investissement (bâtiments d'élevage,
matériel spécifique...).
Ceci entraîne des problèmes graves de renouvellement de la
capacité de production des exploitations et accroît les
écarts structurels entre les exploitations des zones de montagne et les
autres, sans compter les coûts liés à l'intégration
paysagère ;
EXEMPLE DE SURCOÛT DES BÂTIMENTS D'ÉLEVAGE EN MONTAGNE (MASSIF DES PYRÉNÉES)
Type de bâtiment |
Prix moyen hors taxes par animal logé (F) |
||
|
Plaine |
Montagne |
Haute-Montagne |
Vaches laitières |
Environ 50 vaches |
Environ 40 vaches |
Environ 25 vaches |
Bâtiment avec salle de traite |
17.000 |
20.000 |
25.000 |
Source : Secrétariat général du plan,
instance d'évaluation de la politique de la montagne -
Octobre 1996.
En termes de revenu, les mécanismes de soutien ne sont pas parvenus
à combler les retards structurels de l'agriculture des zones
défavorisées et en particulier ceux de l'agriculture de montagne.
Les écarts de revenu entre zones restent conséquents : -45 %
en zone de montagne par rapport à la zone de plaine. De plus, c'est en
zone de montagne, là où les exploitations sont appelées
plus qu'ailleurs à participer à l'aménagement du
territoire, que les soutiens sont les plus faibles. A moyens de production
équivalents (capital, travail), la disparité de revenu est de
25 . Même si l'ISM joue un rôle déterminant, son poids
dans la formation du revenu tend à se réduire. La réforme
de la PAC de 1992, avec la mise en place de paiements compensatoires aux
diminutions de prix, a dilué les aides spécifiques.
b) Des propositions inquiétantes pour l'agriculture de montagne
Les
propositions agricoles de la Commission Européenne sont
inquiétantes pour l'avenir de l'agriculture de montagne à de
nombreux égards :
- elles n'accordent aucune reconnaissance spécifique à
l'agriculture de montagne ;
- elles entretiennent le doute sur le maintien, sous sa forme actuelle, de
l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN).
Bien que majorée, l'ICHN comme d'autres aides pourrait être remise
en cause par l'éco-conditionnalité. Les aides à
l'agriculture seraient soumises de façon croissante au respect de
critères environnementaux. L'application de ce principe à la
compensation des handicaps naturels permanents serait difficilement
inacceptable car elle ne supporte pas dans son principe de contrepartie.
- Les baisses de prix garantis partiellement compensées par des
aides directes affecteraient fortement les secteurs de production
spécifiques à la montagne (-30 % compensés à
85 % pour la viande et -15 % compensés à 60 % pour
le lait). Le maintien de la prime au maïs ensilage et la prime uniforme
à la vache laitière conforteraient l'élevage intensif.
- Les quotas semblent menacés à terme. Malgré une
augmentation de 2 % des références, dont 1 % en faveur
des zones de montagne, ils sont uniquement maintenus jusqu'en 2006.
- Les Etats membres auront la possibilité de gérer par OCM
une partie des aides (qui pourrait aller jusqu'à 30 %) selon des
critères propres. C'est donc à ce niveau qu'une approche
spécifique de la production de montagne pourrait se faire provoquant
ainsi de sérieuses distorsions de concurrence.
c) Une nécessaire prise en compte de l'agriculture de montagne
La
mission d'information souhaite :
- accentuer significativement l'aide aux systèmes herbagers,
notamment dans le cadre de la prime à la vache laitière
supposée compenser les baisses de prix du lait, mais aussi par le
maintien de la prime à l'herbe parmi les mesures de développement
rural ;
- préserver les droits à produire pour les productions
montagnardes qui sont une condition sine qua non de la pérennisation de
l'agriculture de montagne, faute de quoi, les gains de productivité
obtenus par la plaine conduisent à affaiblir la production
montagnarde ;
- maintenir l'attribution de l'ICHN sans contrepartie ce qui en
l'état des propositions n'apparaît pas clairement ;
- instaurer au niveau Européen une vraie politique d'aide à
l'investissement pour les exploitations de montagne.
2. Pérenniser l'agriculture en zone périurbaine
L'espace
qui s'étend entre les marges de la ville et les frontières de
l'espace rural est qualifié de périurbain. Celui-ci couvre
environ en France 10 % du territoire national et comprendrait
12 millions d'habitants, soit 21 % de la population. Au niveau
agricole, 12 % des exploitations représentant 10 % de la SAU
sont situées dans cette zone.
L'agriculture périurbaine a fait l'objet d'une étude
détaillée par notre collègue Gérard
Larcher
53(
*
)
. Il a ainsi montré la
fragilité agricole de cette agriculture périurbaine qui se
traduit par une déprise progressive, mais forte, des zones
cultivées.
La mission d'information souscrit à l'ensemble des propositions
figurant dans l'excellent rapport de notre collègue Gérard
Larcher.
Elle juge, notamment, "
indispensable de pérenniser
l'agriculture périurbaine afin de protéger un patrimoine humain,
économique, culturel et esthétique
".
Ces propositions tendent à notamment à accroître la
stabilité des exploitations agricoles à long terme en :
- améliorant la législation sur les baux ruraux ;
- valorisant la production des exploitations par un accroissement des
exploitations d'élevage et la promotion de nouveaux
débouchés ;
- intensifiant les contacts entre la ferme et la ville et en favorisant
l'apparition de nouvelles activités ;
- généralisant la mise en place de plans de
développement durable.
Ce type de mesures doit donner lieu à une réflexion dans le cadre
de la réforme de la PAC.
Une politique en faveur de l'agriculture périurbaine pourrait faire
l'objet, dans un cadre communautaire prédéfini, de mesures
nationales prises au titre de la subsidiarité, sans que cela soit
assimilé à des distorsions de concurrence.
C. METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DE DÉVELOPPEMENT RURAL
1. Un enjeu fondamental
Rappelons que la Commission Européenne a défini
dans
l'Agenda 2000 trois objectifs à la politique de
développement rural :
- assurer l'adaptation des structures agricoles ;
- mener une politique de l'environnement plus active ;
- promouvoir la diversité économique en milieu rural.
La mission d'information approuve sans réserve ces objectifs.
Dans ce contexte, l'orientation principale est de proposer deux critères
pour cette politique rurale : l'une liée à la politique de
cohésion, l'autre à la PAC. L'ensemble étant
financé, pour l'essentiel, par le FEOGA-Garantie, à
l'intérieur de la LDA et non plus par le Feoga-orientation.
Pour la mission d'information, l'orientation globale sur le
développement rural proposé par la commission n'appréhende
pas de façon suffisamment cohérente à travers les
politiques intérieures la problématique du territoire.
Ainsi l'objectif majeur de la réforme des différentes OCM est la
libéralisation des marchés sous la pression de la mondialisation
des échanges. A ce stade donc, la territorialisation des productions ne
constitue pas un enjeu fondamental pour la Commission.
Or, il s'agit d'un des premiers leviers de la répartition des
activités sur le territoire. La Commission est donc amenée
à proposer des politiques d'accompagnement à la PAC, consciente
des déséquilibres d'une plus grande ouverture au marché
fait peser sur les différentes économies agricoles
régionales.
2. De légitimes interrogations
La
politique de développement rural proposée par la Commission
suscite de nombreuses questions :
- la cohérence entre les mesures prises au titre des fonds
structurels (objectif 2 : zonage, reconversion économique et
sociale) et celles en accompagnement de la PAC n'est pas assurée. Or, la
simplification constitue l'une des trois orientations mises en avant par la
Commission dans sa présentation de la réforme de la politique de
développement rural dans le cadre de la cohésion ;
- " l'horizontalité " de certaines mesures peut
être remise en question : ainsi dans le cadre de l'objectif 2,
quelle sera la part des interventions en faveur des structures agricoles et du
développement rural par rapport à la reconversion industrielle et
aux problèmes urbains ? Pourra-t-on réellement
élaborer des programmes intégrés ? De plus, les
actions relevant de l'objectif 5a (ICHN, DJA, PAM, IAA)
transférées au Feoga-Garantie, peuvent rester du ressort d'une
politique nationale ou être régionalisées.
En outre, l'introduction de taux de cofinancement différenciés
risque, selon les modalités retenues, de générer des
distorsions de concurrence, sauf à faire une large place à la
subsidiarité, ce qui n'est pas sans poser un problème ;
- l'enveloppe de 2 milliards d'Ecu par an et éventuellement la
marge dégagé sur la LDA pourraient apparaître largement
insuffisantes pour financer cette politique rurale, qui, par ailleurs, devra
être mobilisée pour compenser les déséquilibres
générés par certains dispositifs de la PAC, notamment dans
le secteur bovin.
- si l'introduction à l'intérieur de la LDA des mesures
financières actuellement au titre du FEOGA-orientation pourrait
être considérée comme le gage d'une meilleure prise en
compte de la dimension rurale et de la spécificité agricole, elle
conduit aussi à introduire au sein de la PAC, la procédure
appliquée aux dépenses non obligatoires, ce qui
soulèverait certaines difficultés.
La mission d'information, tout en approuvant l'orientation
générale des propositions de la Commission en matière de
développement rural souhaite que soit préservée
" l'horizontalité " de certains dispositifs et la
diversité des actions conduites.
D. PROMOUVOIR UNE POLITIQUE RÉALISTE EN FAVEUR DE L'INSTALLATION DES JEUNES AGRICULTEURS
1. Des mesures qui restent insuffisantes face à l'enjeu que constitue l'installation des jeunes
L'Union Européenne compte aujourd'hui presque
8,5 millions d'exploitations. Selon la dernière enquête
d'EUROSTAT sur la structure des exploitations agricoles relative aux Douze
(1989/1991), seulement 8,3 % des chefs d'exploitation ont moins de
35 ans, tandis que 24,5 %, soit presque un exploitant actif sur
quatre, a dépassé l'âge de 65 ans. L'âge moyen
des exploitants s'est accru considérablement durant les dernières
années : les données les plus récentes indiquent que
53,6 % des exploitants Européens sont âgé d'au moins
55 ans. Bien que des données complètes ne sont pas encore
disponibles, cette situation semble être similaire dans les nouveaux
Etats membres
54(
*
)
.
La situation actuelle des jeunes agriculteurs dans l'Union Européenne
est caractérisée par une grande diversité de
données qui rend difficile une comparaison significative de leur
situation dans les différents Etats membres. En outre, dans une
situation de changement économique importante, l'absence ou le
dépassement rapide de certaines données statistiques s'ajoute
à la difficulté d'établir un bilan complet.
Les données confirment qu'en général les jeunes
gèrent des exploitations dont la superficie moyenne est non seulement
bien plus importante que la moyenne nationale, mais la plus
élevée parmi toutes les classes d'âge. Au niveau
Européen, la SAU moyenne gérée par les exploitants de
moins de 35 ans d'âge est de 19,5 hectares, alors que la
moyenne globale est de 15 hectares. La superficie moyenne diminue
régulièrement à chaque tranche d'âge, pour arriver
à 6,7 hectares pour les exploitations dirigées par des
agriculteurs âgés de 65 ans et plus. Une tendance similaire
peut être observée dans tous les Etats membres, compte tenu de la
diversité de situation de la SAU moyenne au niveau de chaque pays en
termes absolus, ce qui rend la condition des jeunes agriculteurs plus similaire
à celle de leurs aînés qu'à la situation des jeunes
installés dans un autre Etat membre. Aussi, pour ce qui concerne la
situation économique des exploitants, de grandes disparités
existent entre Etats membres, mais par contre, la condition des jeunes ne
s'écarte pas tellement de la condition des agriculteurs plus
âgés dans la même région. Pour les orientations de
production, il faut souligner une présence importante des jeunes dans
les secteurs de l'horticulture et de l'élevage laitier.
Dans le domaine de l'installation, les règles communautaires fournissent
un cadre approprié pour l'action dans de nombreux cas,
particulièrement à travers les Fonds structurels qui donnent les
moyens permettant aux Etats membres et aux régions de mettre en place
des mesures spécifiques Toutefois, aussi bien dans l'utilisation des
instruments des fonds structurels que dans les secteurs des marchés, il
y a lieu de souligner les différences considérables entre les
mesures prises par les différents Etats membres en faveur des jeunes
agriculteurs.
Les mesures communautaires en faveur des jeunes agriculteurs existent. On
peut ainsi relever :
- les mesures structurelles relevant de l'objectif 5 A comme les
aides à l'installation et aux investissements et les aides à la
formation professionnelle ;
- les mesures d'accompagnement à la réforme de la PAC ;
- la politique du développement rural dans le contexte des
programmes régionaux au sens de l'objectif 1, de l'objectif
5 B, de l'objectif 6, des programmes " leader " et certains
projets pilotes ;
- les OCM, qui offrent un accès plus ou moins facile aux nouveaux
producteurs en fonction de leur réglementation (droits de production ou
individuels comme pour le lait, mesures de limitation de la production
appliquées de manière collective : grandes cultures et OCM
qualifiées de libre -OCM fruits et légumes-) ;
- enfin des programmes communautaires de formations, de recherche et
d'information existent.
2. Les recommandations de la mission d'information
a) au niveau communautaire
Pour
l'installation
Pour mieux répondre aux demandes et aux difficultés des jeunes
agriculteurs, des améliorations des mesures communautaires peuvent
être envisagées. Toutefois, une telle amélioration ne passe
pas forcément par l'adoption de nouvelles aides, mais surtout, à
ce stade, par l'utilisation pleine des mesures existantes.
Sur la formation
La formation du jeune agriculteur, surtout dans le cas d'enfant d'agriculteur,
est fondamentale afin de maîtriser la complexité technique et
comptable de la gestion d'une exploitation agricole. Il faut surtout souligner
l'importance des nouvelles formations liées à l'environnement et
d'une meilleure intégration des préoccupations environnementales
dans les formations traditionnelles afin d'apprendre aux jeunes à
valoriser la dimension environnementale dans leurs décisions et à
prendre conscience de leur rôle dans le maintien d'un environnement de
qualité.
Toutefois, il reste de fortes disparités entre les systèmes de
formation des Etats membres, et entre le niveau requis par chacun pour l'octroi
des aides.
La mission d'information estime donc important d'examiner d'une
façon plus approfondie si la formation requise est adéquate
à son but, et de réfléchir sur la meilleure manière
d'orienter les programmes existants
.
Le régime de préretraite
Il serait souhaitable que les mesures de préretraite, en tant que
complément à la politique d'installation, soient mieux
ciblées sur le rajeunissement du secteur, bien que le jeune soit a
priori favorisé par rapport aux autres repreneurs potentiels puisqu'il
pourra bénéficier de l'aide à l'installation.
En matière de régimes de marché
La mission d'information considère que, dans certains secteurs des
droits spéciaux pourraient être dégagés en
permanence pour être alloués à de jeunes agriculteurs.
Sans augmenter systématiquement et de manière
exagérée les droits actuellement garantis dans le cadre de la
PAC, il est nécessaire d'étudier, grâce à la
combinaison de différentes mesures, les moyens de créer et de
maintenir une réserve d'une taille suffisante pour répondre aux
besoins des jeunes agriculteurs, sans trop empiéter sur les attentes
d'autres groupes d'agriculteurs prioritaires.
b) Au niveau national
La
mission d'information a déjà abordé dans le premier
chapitre de ces propositions la question de la nécessaire harmonisation
des droits de succession, de fiscalité et de transmission en faveur des
jeunes agriculteurs.
La
mission d'information se félicite de la politique
initiée par M. Philippe Vasseur en faveur des jeunes agriculteurs
et poursuivie par M. Louis Le Pensec. Elle souhaite que ces mesures soient
poursuivies notamment en ce qui concerne les services de remplacement et les
installations de jeunes non issus du milieu rural.
IV. REDÉFINIR LE MODE DE PARTICIPATION DE L'UNION EUROPÉENNE À LA RÉGULATION DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX
Le
projet alternatif de réforme de la PAC préconisée par la
mission d'information ne peut guère s'affranchir des contraintes
internationales. Il doit donc utiliser au profit de l'ensemble de la
Communauté Européenne les opportunités offertes par les
marchés agricoles internationaux.
Le délai qui nous sépare de la prochaine échéance
des nouvelles négociations au sein de l'OMC doit être mis à
profit pour redéfinir le mode de participation de l'Union
Européenne dans les échanges internationaux, notamment dans le
domaine agricole.
La Communauté Européenne doit, avant toute chose, en finir
avec l'exemple du soi disant modèle américain dans le domaine
agricole
. En effet, présenté à tort comme une
réforme totalement " libérale ", le
Fair Act
américain de 1996
laisse aujourd'hui entrevoir plusieurs
faiblesses
que l'Europe doit savoir utiliser à bon escient : ainsi
comment ne par remarquer que le soja, production qui, il y a trois ans, ne
percevait aucune aide, a été intégré dans le
mécanisme du Fair Act ? Le gouvernement américain n'a-t-il
pas récemment décidé d'apporter une aide financière
aux secteurs agricoles " en difficulté ", notamment les
producteurs de blé. Un plan de relance des exportations et une aide
à la consolidation des trésoreries des agriculteurs ont par
ailleurs été mis en place. Ces aides sont-elles à
intégrer dans la boîte bleue ou verte ? Par ailleurs, est-il
logique que des soutiens mis en place en 1996 aient conduit à aider des
productions qui, en raison des prix élevés des marchés
mondiaux, n'y auraient pas eu droit dans l'ancien dispositif
législatif ?
L'Europe doit désormais ne pas craindre, à tout moment, de
défendre, ses intérêts, au premier rang desquels ses
intérêts agricoles dans les négociations internationales
notamment avec nos voisins d'outre-Atlantique. C'est pourquoi la mission
d'information souhaite que la Communauté redéfinisse son mode de
participation aux échanges internationaux
en affirmant sa
volonté de se préparer et de négocier au sein d'une
enceinte clairement définie sur les bases d'une concurrence loyale dans
un domaine spécifique que constitue l'agriculture.
Un tel souhait ne peut rencontrer que l'adhésion de nos partenaires. La
Communauté doit enfin mesurer l'importance de l'agriculture dans le
cadre d'une Europe future élargie à l'Est et au sud, sans
négliger, en outre, l'image que revêt " l'Europe verte "
au sein de la coopération internationale.
A. AFFIRMER LA VOLONTÉ DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE DE SE PRÉPARER AUX PROCHAINES ÉCHÉANCES INTERNATIONALES TOUT EN RAPPELANT LES SPÉCIFICITÉS DE L'AGRICULTURE
1. De la naissance de la politique communautaire aux accords de Maastricht
Lors du
" Dillon Round " de 1961, les Etats-Unis avaient envisagé
d'inclure l'agriculture dans les négociations, dans la crainte
-justifiée- que l'instauration du Marché commun ne vienne
réduire leurs exportations agricoles vers l'Europe.
Les membres de la Communauté Européenne avaient, à
l'époque, refusé, au motif -tout aussi justifié- qu'il
était prématuré de troubler l'application du Traité
de Rome avant même sa mise en place.
D'ailleurs les Européens ont souvent considéré que
l'agriculture était un sujet trop compliqué et trop sensible pour
en parler dans ce type de négociations vouées à
l'abaissement des barrières douanières et à
l'uniformisation de la concurrence.
L'Uruguay Round a donc innové en incluant explicitement le commerce
agro-alimentaire dans l'agenda des négociations. Si cette innovation est
restée prudente -le commerce agricole étant bien loi d'être
libre-, elle est néanmoins déterminante car il a
été admis que " les produits agricoles sont comme les
autres ", et donc, devraient être soumis aux lois de la concurrence
et à la régulation par le marché.
La mission d'information considère qu'il est difficile de
considérer les produits agricoles comme n'importe quel produit de base
en raison non seulement des caractéristiques des facteurs de production
inhérents à l'agriculture mais aussi de l'importance de l'enjeu
que constitue la sécurité alimentaire de la planète.
Cependant, il faut s'attendre à une nouvelle offensive sur la
libéralisation des produits agricoles dans la prochaine
négociation, l'agriculture étant considérée comme
le dernier bastion " massif " de protectionnisme
55(
*
)
.
Rappelons que l'insistance des USA à conclure un accord agricole vient
de deux sortes de préoccupations bien distinctes. La première est
celle de la tendance permanente de l'agriculture américaine à
produite des excédents difficiles et coûteux à
résorber. La seconde est la confiance des américains dans la
capacité du marché à assurer un équilibre durable
et harmonieux entre l'offre et la demande de tous les produits, y compris les
produits agricoles. La mission d'information note là une vision quasi
philosophique de l'organisation économique dont elle a pu mesurer
l'ampleur lors de son déplacement aux Etats-Unis.
Les Américains considèrent que les " avancées "
de la Communauté Européenne en 1992 ont répondu plus
à la première préoccupation des négociateurs
américains, celle de résorber les excédents, qu'à
la seconde, celle d'organiser durablement les échanges. Aussi, la
Communauté a-t-elle calqué son nouveau système sur celui
en usage aux Etats-Unis à l'époque. Mais, la mission
d'information a très bien perçu que les Américains ne se
contenteraient pas de la réforme de 1992. Ces derniers jugent d'ailleurs
que si les propositions du Paquet " Santer " vont dans le bon sens,
elles doivent être élargies. Ils estiment que l'Uruguay Round est
loin du retrait annoncé des Etats dans la gestion de l'agriculture, et
de la régulation du marché mondial par les prix
uniquement.
2. L'agriculture Européenne face à la prochaine négociation de l'OMC
Dans un
tel contexte, quelle doit être la position française et
Européenne à la veille de nouvelles négociations ?
La mission d'information comprend que l'on puisse faire des concessions dans
l'agriculture pour " arracher " des avantages plus importants
ailleurs. C'est souvent le raisonnement de nombre de diplomates
français. Elle souhaite néanmoins que cette logique soit parfois
réciproque et que chaque négociation internationale ne
s'achève pas systématiquement par de nouvelles concessions
agricoles.
En outre, si le désengagement de l'Etat et le libéralisme
économique sont possibles et souhaitables dans beaucoup de domaines, le
sont-ils tout autant dans l'agriculture, c'est-à-dire un secteur qui
produit l'essentiel de l'alimentation, et dont le bon fonctionnement est vital
pour la paix sociale dans l'ensemble des pays du monde ?
L'intervention des différents Etats dans les questions agricoles existe
depuis toujours. On ne saurait ramener la justification de cetinterventionnisme
à un simple problème politique, en évoquant notamment le
pouvoir de négociation des organisations professionnelles agricoles et
" leur poids sur le terrain ".
Cette thèse a été utilisée à grande
échelle lors des négociations de l'Uruguay Round.
Or, l'interprétation théorique des mécanismes
agricoles, tend à mettre en lumière un fait essentiel : on
constate une propension systématique de la production agricole à
dépasser tous les plafonds dès lors que l'on en garantit les
prix. Le problème vient fondamentalement de la très forte
instabilité de l'équilibre entre l'offre et la demande à
prix garantis.
Mais pourquoi dès lors ne pas accepter la faillite de ces producteurs et
leur reclassement dans d'autres secteurs d'activité : tout simplement
car on pense, qu'à terme, cette ruine pourrait entraîner
brusquement une telle diminution de la production qu'elle provoquerait des
pénuries pour les consommateurs.
Cette instabilité se vérifie " naturellement " sur les
marchés libres d'autres produits, sans pour autant que l'on puisse faire
intervenir aucune explication naturelle comme les saisons ou la
météorologie.
Dans le domaine agricole, ces fluctuations conduisent à ce que le
coût marginal du producteur soit rarement égal au prix, ruinant
ainsi l'argumentaire classique sur " l'optimalité des
marché ".
L'intervention, qui apparaît ainsi nécessaire permet donc de
réguler les marchés et de garantir la sécurité
alimentaire, du moins sous sa forme quantitative.
Mais, au delà de ces premières justifications, l'aspect
qualitatif de la sécurité alimentaire et la vociation
" territoriale " de l'agriculture renforce la nécessité
de réguler les marchés agricoles.
Deux grands types de politiques sont concevables dans ce cadre. Outre celle des
" garanties de prix sur des quantités limitées "
-c'est-à-dire les quotas- dont l'analyse a été
effectuée précédemment, l'autre politique consiste dans la
solution du " marché contrôlé ".
On laisse en principe le marché agir, mais en fixant des " filets
de sécurité " propres à éviter les
dérapages incontrôlés. Les Etats-Unis ont d'ailleurs
multiplié ces filets de sécurité. Les textes
législatifs sont libellés de telle sorte que tout l'arsenal des
politiques peut être réactive presque instantanément.
L'actualité américaine en apporte d'ailleurs la preuve.
La mission d'information, tout en affirmant sont souhait de voir la
Communauté participer activement aux négociations internationales
sur les questions agricoles, estime nécessaire que :
- l'Europe se prépare à ces prochaines
échéances en adoptant des positions communes aux Etats membres,
suffisamment claires pour pouvoir être expliquées à
l'opinion publique. La Commission Européenne ne doit en aucun cas
outrepasser les limites et le contenu de son mandat ;
- l'Europe réaffirme la spécificité de l'agriculture,
notamment pour la sécurité alimentaire quantitative et
qualitative du monde.
B. DIALOGUER DANS UN CADRE CLAIREMENT DÉFINI
1. Le choix du multilatéralisme
Le
prochain cycle de négociations sur le commerce mondial devrait
débuter à la fin de 1999 comme l'ont indiqué les
représentants des pays membres de l'OMC réunis à
Genève le mois dernier.
Un conseil général extraordinaire agricole au sein de l'OMC
devrait d'ailleurs se tenir au mois de septembre prochain pour préparer
ces négociations.
L'Europe doit affirmer son souhait de traiter des problèmes agricoles
au sien de cette enceinte internationale, privilégiant ainsi une
démarche multilatérale
.
En effet, la position de l'Europe vis-à-vis du multilatéralisme a
été souvent ambiguë. Incapable d'adopter des mesures
sérieuses vis-à-vis des Etats-Unis, ne serait-ce qu'à
titre de rétorsion, la Communauté Européenne a assez
largement pratique le bilatéralisme et le commerce administré
vis-à-vis du reste du monde (Asie, Europe de l'Est), par un usage
intensif des droits antidumping (à peine moins nombreux que ceux
pratiqués par les Etats-Unis) ou des accords d'autolimitation.
Les partenaires devront décider préalablement s'ils
négocient secteur par secteur ou dans un cadre plus global. Si les
Etats-Unis avancent l'argument de la rapidité et de l'efficacité
pour préconiser la négociation secteur par secteur, les
Européens privilégient des négociations globales plus
souples qui permettent de parvenir à de réels
compromis.
2. Les conséquences de ce choix
Le
choix de l'OMC comme enceinte privilégiée des négociations
sur le commerce international a deux conséquences notables
:
En premier lieu, il exige de
l'Europe la définition d'une
stratégie cohérente
. Si les Etats-Unis ont su valoriser,
à leur profit, les mécanismes de l'OMC, l'Europe, au contraire a,
du moins initialement, mal compris les implications du multilatéralisme
et n'a pas su transformer en avantage le handicap relatif a son processus de
prise de décision -les Etats-Unis utilisent judicieusement les relations
conflictuelles entre l'exécutif et le législatif-. Ainsi,
l'Europe doit-elle aujourd'hui refuser d'entamer toute négociation
internationale au sein de l'OMC en l'absence d'une garantie que le Gouvernement
américain obtiendra le " Fast Track ". Sans que la certitude
sur ce point, la négociation ne peut s'engager.
En second lieu, il implique, non pas l'exclusion de toute discussion
bilatérale entre Etats, ce qui est ni souhaitable ni envisageable,
mais que celles-ci respectent les échéances et les
règles fixées à l'OMC.
A ce propos, la France a
été prise au dépourvu par la récente initiative du
commissaire Sir Leon Brittan, Commissaire en charge de la politique
commerciale. Le projet de nouveau marché transatlantique (NTM) proposait
une zone de libre-échange à l'horizon 2010 entre l'Union
Européenne et les Etats-Unis. A la grande satisfaction de plusieurs
Etats membres, cette initiative a été écartée du
sommet du 18 mai sur le Nouvel Agenda transatlantique approuvé en
1995. Mais elle témoigne à l'évidence d'un certain manque
de méthode et de cohérence dans la démarche des
autorités communautaire
Par ailleurs, le choix du multilatéralisme nécessite de la
part de la Communauté un refus de " jouer sur les deux
tableaux
".
S'opposer à l'unilatéralisme
américain au nom des grands principes du multilatéralisme et s'y
rallier dans ses relations avec le Japon, Taiwan ou la Pologne serait manquer,
là encore, à la cohérence.
Enfin, la multiplication des accords préférentiels conclus par
l'Union Européenne doit, d'une part, ne pas mettre en danger les
productions communautaires et, d'autre part, ne pas s'effectuer en
contradiction avec les règles de l'OMC
.
Pour la mission d'information, le fait de trancher sans
ambiguïté en faveur du multilatéralisme implique
l'affirmation d'une réelle présence Européenne au sein de
l'OMC. Celui-ci mettrait ainsi en conformité l'influence réelle
de la Communauté avec sa position de première puissance
exportatrice. En défendant l'affirmation de l'OMC et du
multilatéralisme, la Communauté Européenne rallierait, en
outre, à la cause la plupart des pays tiers.
C. NÉGOCIER SUR LA BASE D'UNE CONCURRENCE LOYALE
Si les
prochaines échéances internationales conduisent à terme
à une plus grande libéralisation des produits agricoles,
ce
renforcement de la concurrence mondiale doit s'effectuer dans des conditions de
concurrence loyale
. En effet, comment accepter, par exemple, de multiplier
les importations en provenance de pays tiers lorsque les produits
concernés ne respectent pas des minima en matière sanitaire.
De même, est-il logique que la production de denrées agricoles se
fasse en dehors de tout respect de normes environnementales et sociales ?
Enfin, la reconnaissance de la notion de produits de qualité au sein des
instances internationales doit être une priorité.
1. Le respect et l'harmonisation des mesures sanitaires : une exigence de santé publique et de démocratie
L'étude des relations entre l'Union Européenne
et les
Etats-Unis en matière sanitaire illustre la dificulté de ce
dossier.
La mission d'information a pu mesurer la différence d'approche entre les
Américains et les Européens en matière de santé
publique. Elle peut comprendre l'absolue confiance qu'ont les USA dans la
science, même si des exemples récents dans un tout autre domaine
que l'agriculture tendent à remettre sérieusement en question les
procédures de contrôle et d'information scientifique existants
dans ce pays.
La mission d'information estime tout à fait légitimes les
préoccupations Européennes et notamment françaises en
matière sanitaire
.
Il serait, certes, anormal d'invoquer à tort et à travers des
raisons sanitaires pour légitimer des entraves aux échanges.
Cependant, sur plusieurs dossiers, l'Europe doit faire comprendre à son
partenaire d'outre-Atlantique que le consommateur français est
exigeant,qu'il l'est à juste titre.
a) Reconnaissance et harmonisation des normes au niveau international
Vers une reconnaissance mutuelle des normes dans les
secteurs sanitaire et vétérinaire
Les négociations Euro-américaines dans le secteurs
vétérinaire ont été engagées depuis
déjà plusieurs années.
Elles avaient abouti, le 30 avril 1997, à un accord technique
englobant toutes les catégories de produits d'origine animale, à
l'exception des viandes de volaille.
Les ministres de l'agriculture ont approuvé le 13 mars dernier un
projet d'accord devant déboucher sur la reconnaissance
d'équivalences dans les secteurs sanitaire et vétérinaire,
en vue de faciliter le commerce d'animaux vivants et de produits animaux.
L'Union Européenne a, en effet, obtenu des garanties fermes sur la
reconnaissance par Washington du statut sanitaire de la Communauté en
tant que telle, de ses Etats membres et de ses régions. Il en est de
même pour le principe de la régionalisation prévalant dans
l'Union Européenne en cas d'épizootie.
La situation semble, en revanche, encore confuse en ce qui concerne la nouvelle
réglementation américaine " Magareg ", applicable aux
viandes fraîches. La France, l'Italie et l'Allemagne redoutent en
particulier de devoir se plier à une série de contrôles
supplémentaires au titre de " Magareg ", alors que
l'application des règles communautaires permet d'atteindre un niveau de
protection sanitaire le plus souvent supérieur à celui en vigueur
aux Etats-Unis. Rappelons que la réglementation " Magareg "
impose quatre types d'obligations supplémentaires pour les exportateurs
Européens de produits de viande : la mise en place de programmes de
surveillance de l'hygiène SSOP (Sanitation standard operating
procedures), l'application du système HACCP (Hazard analysis and
critical control point) dans chaque entreprise, la recherche d'E-coli dans les
abattoirs, et celles, par les contrôles officiels, de salmonelles dans
tous les établissements.
La normalisation agricole et alimentaire : un enjeu fondamental
Au fur et à mesure du développement des échanges
internationaux de produits agricoles, un besoin de normalisation internationale
s'est fait ressentir.
La présence de l'Union Européenne dans ces organismes de
normalisation est essentielle, notamment au sien du principal d'entre eux, le
CODEX Alimentarius.
Ces normes, qui avaient jusqu'alors un impact souvent limité sur la
réglementation française et communautaire, ont acquis
récemment une dimension nouvelle avec les accords du GATT de 1994.
Les péripéties de " l'affaire des hormones " au sein du
CODEX Alimentarius, puis de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)
permettent de comprendre les enjeux socio-économiques, ainsi que les
stratégies internationales en présence.
La normalisation internationale en matière de produits agricoles et
alimentaires est le fait de nombreux organismes tels que l'Office international
des épizooties (santé animale), la Convention internationale pour
la protection des végétaux (santé des
végétaux), la Commission économique pour l'Europe des
Nations unies -CEE-NU (fruits et légumes, viandes de volailles, ...), ou
encore l'Organisation internationale de normalisation -ISO- (méthodes
d'analyse).
Le principal organisme de normalisation internationale reste toutefois le
CODEX Alimentarius
. Il est issu d'un programme mixte de l'Organisation des
Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et de l'Organisation
mondiale de la santé (OMS) créé en 1962 et chargé
d'élaborer des normes internationales relatives aux denrées
alimentaires, dans le double objectif de protéger la santé des
consommateurs et d'assurer la loyauté des pratiques loyales dans le
commerce.
Au sens strict, le CODEX Alimentarius est l'ensemble des normes, directives,
codes d'usage et recommandations élaborés par l'organe
exécutif du programme FAO/OMS : la commission du CODEX Alimentarius.
Il est actuellement constitué d'environ 250 Normes, et de plus de
40 codes d'usage. En matière de résidus de pesticides,
à titre d'exemple, environ 3.300 limites maximales de
résidus (LMR) ont été fixées
56(
*
)
.
La commission du CODEX Alimentarius (CCA) est une instance intergouvernementale
regroupant 157 membres qui disposent chacun, comme à la FAO, d'une
voix lors des votes pour l'adoption des normes. Le recours au vote est
toutefois très rare, les normes étant le plus souvent
adoptées par consensus.
La CCA se réunit tous les deux ans alternativement au siège
de la FAO (Rome) et au siège de l'OMS (Genève). La prochaine
réunion aura lieu en juin 1999 à Rome. Le travail est
préparé par une trentaine de comités dont certains
traitent de questions à caractère horizontal applicables à
l'ensemble des denrées alimentaires (principes généraux,
additifs et contaminants, résidus de pesticides, résidus de
médicaments vétérinaires, étiquetage,
hygiène alimentaire, ...) et d'autres s'intéressent à des
catégories de produits (lait et produits laitiers, produits de la
pêche, ...).
Par ailleurs, cinq comités régionaux (Europe, Afrique, Asie,
Amérique du Nord et Pacifique du sud-ouest, Amérique latine et
Caraïbes) assurent la coordination des politiques alimentaires des Etats
de leur région et envisagent l'élaboration des normes de
caractère régional.
Il existe en outre un comité exécutif constitué de dix
membres, dont fait partie la France, qui y représente les trente-huit
pays de la région Europe.
Pendant longtemps, les normes du CODEX Alimentarius ont surtout servi aux pays
en voie de développement qui n'avaient pas les moyens d'élaborer
eux-mêmes un systèmes réglementaire, ou à certains
pays exportateurs souhaitant limiter les risques d'entraves aux échanges
auxquelles leurs produits pouvaient être soumis.
La France et les autres Etats membres de la Communauté Européenne
n'ont que très peu tenu compte de ces normes, ne serait-ce qu'à
cause du processus d'élaboration des règles communautaires qui ne
laissait de place à une contrainte supplémentaire.
La signature, le 15 avril 1994 de l'accord de l'Uruguay Round et la
création de l'Organisation mondiale du commerce ont donné une
importance nouvelle aux normes internationales du fait de l'adoption de
l'accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et de l'accord sur les
obstacles techniques aux échanges, d'une part, et de la modification de
la procédure de règlement des différends, désormais
beaucoup plus efficace et contraignante, d'autre part.
En matière d'innocuité des denrées alimentaires, les
normes internationales pertinentes sont celles établies par la
commission du CODEX Alimentarius. Sont également concernées les
normes de l'Office international des épizooties (santé animale et
des organisations régionales opérant dans le cadre de la
concertation internationale pour la protection des végétaux.
Lors de la
21e session
de la commission du CODEX Alimentarius (du 3
au 8 juillet 1995), les pays anglo-saxons (Etats-Unis, Canada,
Australie, Nouvelle-Zélande) ont remporté sur la
Communauté une victoire exemplaire : élection d'un
Thaïlandais à la présidence, à la place du
Norvégien soutenu par la Communauté, élargissement des
travaux du CODEX sur les fruits et légumes aux dépens de la
CEE-NU et surtout adoption des limites maximales de résidus pour
cinq hormones naturelles interdites dans la Communauté.
Cette victoire tenait surtout au poids de ces pays dans le secrétariat
et au comité exécutif du CODEX et à leur capacité
à proposer ou imposer des documents de travail, base des futures normes,
ou le recours à leurs experts. Les causes de l'échec
communautaire étaient néanmoins autant imputables aux
dysfonctionnements communautaires qu'à l'efficacité anglo-saxonne.
Tirant les conclusions de la défaite de la 21e session, l'Europe,
à l'initiative de la France, a renforcé la coordination de la
position des Etats membres.
Les résultats ne se sont pas fait attendre. Lors de sa
22e session
, la commission du CODEX Alimentarius avait à
traiter en particulier trois questions conflictuelles : la
définition des eaux minérales, le statut des fromages au lait cru
et l'utilisation de la somatotropine bovine pour l'amélioration des
performances laitières.
Grâce à un important travail technique et diplomatique
préalable, la norme définissant strictement les eaux
minérales a pu être adoptée et le projet de limites
maximales de résidus pour la BST repoussé. Quant à la
question du statut des fromages au lait cru, il a été
décidé de la renvoyer, pour examen complémentaire, au
comité de l'hygiène alimentaire.
En ce qui concerne la BST, la commission du CODEX Alimentarius, sur proposition
de la Communauté Européenne, a décidé, d'une part,
une réévaluation des risques qu'elle peut présenter y
compris en termes de santé animale (augmentation du nombre de mammites,
baisse de l'immunité, ...) et, d'autre part, d'engager une
réflexion sur les facteurs autres que scientifiques (économiques,
qualitatifs, d'attente des consommateurs) à prendre en compte dans le
processus de décision.
De manière générale, il appartient à la France
et à la Communauté de se doter des outils et procédures
nécessaires à la conduite d'évaluations
. C'est la
raison pour laquelle le Sénat a souhaité créer une Agence
française de sécurité sanitaire des aliments qui aura
à évaluer l'ensemble des risques alimentaires, sanitaires et
nutritionnels.
En 1999, la commission du CODEX Alimentarius aura à statuer sur la
place des facteurs autres que scientifiques dans l'élaboration des
normes sur base de l'exemple de la BST
.
Derrière ces termes se cache le choix entre une approche purement
économique (sous réserve, au moins en théorie, d'une
sécurité des produits) de l'agriculture et de l'alimentation, ou
une approche beaucoup plus globale incluant d'autres préoccupations,
comme la satisfaction des attentes qualitatives des consommateurs, le respect
des traditions culturelles, l'équilibre nutritionnel de la population,
l'aménagement du territoire ou la protection de
l'environnement.
b) Une nécessaire information du consommateur
En
ce qui concerne
les résidus d'hormones de croissance contenus dans la
viande bovine
, l'Union Européenne dispose d'un délai de
quinze mois pour apporter la preuve que ces hormones sont un danger pour
la santé publique.
La mission d'information ne souhaite pas entrer dans ce débat
scientifique, même s'il lui semble que la totale innocuité des
hormones dans la viande bovine peut être difficilement prouvée
à l'heure actuelle en l'état des connaissances
.
Si au terme de ce délai l'Union Européenne ne parvenait pas
à apporter la preuve scientifique des risques potentiels que
présente la présence d'hormones dans la viande bovine,
la
mission d'information souhaite que ces viandes soient clairement et
distinctement identifiables
. En effet, il serait tout à fait
choquant d'imposer aux consommateurs la consommation de tels produits à
des consommateurs qui, pour certains d'entre eux, les refusent.
Sur le dossier épineux des OGM, la mission d'information approuve
sans réserve les propositions présentées par M. Jean
Bizet
57(
*
)
le mois dernier devant la Commission
des Affaires économique.
L'utilisation d'OGM doit se faire ainsi de
manière totalement transparente pour le consommateur
Européen
. Agir de façon différente provoquerait
inévitablement une nouvelle crise de confiance.
2. La prise en compte des mesures environnementales et des coûts sociaux
a) La multiplication des mesures environnementales
La
Communauté a mis en place depuis 1992 des mesures
agro-environnementales. En outre, la France poursuit d'importants efforts pour
parvenir à mettre en place une agriculture dite durable. La mise en
place de plus de 700 plans de développement durable répartis
dans cinquante départements illustrent cette volonté d'associer
agriculture et environnement.
Cette démarche est mise en oeuvre, en France, non seulement par les
pouvoirs publics, mais aussi par l'ensemble des organisations professionnelles
agricoles.
La mission d'information estime que l'agriculture Européenne se trouve
confrontée, toutefois à "
un contexte
contradictoire
" :
- l'Union Européenne développe des
contraintes
environnementales
(milieu naturel, bien-être des animaux)
qui
renchérissent les coûts de production
. Or, cette tendance est
bien moins développée dans d'autres pays,
caractérisés par des espaces agricoles vastes et par une moindre
densité démographique (Etats-Unis, Australie, Argentine) ;
- les pays tiers exportateurs et
l'Organisation mondiale du
Commerce
exercent une pression en faveur d'une libéralisation des
échanges agricoles qui exige
la recherche du moindre coût
en agriculture.
Il faut donc que l'Union Européenne :
- fasse mieux prendre en compte la réalité environnementale
communautaire dans les négociations internationales ;
- prévoie, dans le cadre de la discussion sur l'évolution de
la PAC,
des soutiens environnementaux spécifiques
et distincts
des aides économiques accordées aux productions
végétales et animales.
b) Des coûts sociaux non négligeables
Les pays
Européens ne supportent pas les mêmes coûts sociaux que bon
nombre de leurs concurrents.
Cette disparité se répercute inévitablement sur le niveau
des prix et fausse la concurrence.
Si en matière de fiscalité, la mission d'information
considère qu'il appartient à la Communauté
Européenne et à ses Etats membres, dont la France, de mener
à bien certaines réformes,
elle estime nécessaire que
les prochaines négociations, au sein de l'OMC, prennent en compte les
coûts sociaux
. En effet, ceux-ci sont révélateurs d'un
certain état de développement. Or, est-il admissible de
tolérer des importations de produits dont le prix excessivement bas
provient à la fois d'une absence totale de couverture sociale et d'une
rémunération très faible pour les personnes qui vivent
dans ces pays ?
Deux solutions ont été déjà
préconisées pour faire face à ce problème :
l'une globale par le CNJA, l'autre, plus sectorielle, par le groupe de travail
" fruits et légumes " de la Commission des Affaires
économiques.
La mission d'information tient à rappeler brièvement ces deux
options :
Le CNJA a proposé depuis quelques années la
création d'une TVA emploi.
Celle-ci est présentée dans
le rapport d'orientation du CNJA des 24, 25 et 26 juin 1997 sous la
forme suivante :
" Aujourd'hui, les charges sociales sont financées par la
production à travers les charges sur les salaires. Ce système a
pour principal inconvénient de nuire à la
compétitivité de nos produits tant sur le marché
intérieur (concurrence des produits moins onéreux qui sont
importés) que sur le marché mondial (concurrence des produits
à faibles coûts de production des autres grands pays exportateurs).
C'est pourquoi nous proposons que soit instaurée au niveau national, une
" TVA-emploi ". Cette TVA-emploi repose sur le transfert de tout ou
partie des charges sociales vers une augmentation proportionnelle du taux de
TVA. Le coût de production de nos produits diminue tandis que le prix
payé par le consommateur reste identique.
Les avantages de ce système sont multiples
:
il permet de préserver l'emploi et de lutter contre le travail
clandestin ;
les exportations étant réalisées en prix hors taxes,
l'Union Européenne devient plus compétitive sur le marché
mondial ;
il tend vers une équité de charges sociales entre
production intérieure et extérieure, puisque les produits
importés sont soumis à cette même TVA ; la TVA-emploi
permet ainsi de réduire les distorsions de concurrence entre produits
Européens et produits importés. Ceci est particulièrement
bénéfique pour les secteurs peu ou pas protégés
comme les fruits et légumes dans le domaine agricole ;
il permet d'affronter plus facilement l'élargissement de l'Union
Européenne et les prochaines négociations au sein de l'OMC.
Après avoir été expérimentée
préalablement dans le secteur agricole, cette " TVA-emploi "
ou " sociale " serait à terme étendue à tous les
secteurs économiques, voire à l'Europe. Elle permettrait de
renforcer la compétitivité de notre économie et de faire
appel à davantage de solidarité, sans hausse de prix ".
La mission d'information chargée d'étudier le secteur
des fruits et légumes avait préconisé en 1993 la mise en
place d'une TVA sociale afin de compenser le coût du dumping
social
58(
*
)
.
MM. Jean Huchon, Jean-François Le Grand et Louis Minetti ont
préconisé :
" La mise en place à l'entrée dans la Communauté
d'une
taxe complémentaire destinée à rapprocher le prix
d'entrée du prix communautaire
.
Le produit de cette taxe pourrait, pour tout ou partie être
ristournée au pays exportateur pour aider à son
développement, notamment agricole en aidant à l'essor des
cultures vivrières. Une fraction pourrait être conservée au
sein de la Communauté pour l'amélioration de la gestion des
marchés des produits considérés.
Une telle taxe aurait un double objectif. Elle permettrait tout d'abord de
rétablir une concurrence acceptable
entre produits d'importation
et produits communautaires en réduisant l'avantage procuré par
l'utilisation d'une main-d'oeuvre bon marché. Elle permettrait, d'autre
part, de
réellement aider au développement du pays
exportateurs
".
3. Mieux valoriser les produits de qualité dans les échanges agricoles mondiaux
L'Union
Européenne, et tout particulièrement la France, doivent valoriser
les savoir-faire et les compétences qui leur sont reconnus en
matière alimentaire.
Le développement de la qualité peut générer de la
valeur ajoutée sur les produits agricoles, et, surtout, favoriser nos
exportations sur les marchés mondiaux.
Plusieurs mesures peuvent être envisagées au niveau
Européen pour, dans un premier temps, valoriser ces produits
:
-
accompagner l'investissement
des producteurs qui s'engagent
à moderniser leurs exploitations pour produire de la qualité et
à se former ;
-
octroyer une aide directe transitoire qui compenserait la perte de
revenu engendrée par la recherche d'une qualité maximale
. De
tels systèmes existent déjà pour l'agriculture biologique
et méritent d'être renforcés, étendus et
pérennisés sur la durée d'adaptation de
l'exploitation ;
-
soutenir l'identification, la traçabilité et la
promotion des produits
afin qu'ils soient valorisés sur les
marchés tiers ;
-
encourager la recherche agronomique
, en tant qu'outil
déterminant dans le développement de la filière agricole
et agro-alimentaire, en veillant à coordonner suffisamment les offres de
recherche et la diffusion des résultats avec l'ensemble des partenaires,
pour éviter les incompréhensions de l'opinion publique. La
recherche doit être adaptée aux nouveaux enjeux que sont par
exemple, l'amélioration de la compétitivité de la
filière, la prise en compte des attentes des consommateurs et des
citoyens en matière d'environnement et de conditions de production des
aliments, l'hygiène et la sécurité alimentaires.
- favoriser la promotion des produits agricoles et alimentaires : ainsi la
mission d'information estime que la diminution des crédits
affectés à la SUPEXA dans la loi de finances pour 1998 constitue
une grave erreur stratégique pour le développement des
exportations agricoles et alimentaires françaises. Rappelons que les USA
consacrent des milliards de dollars à la promotion à
l'exportation de ces produits.
Une fois cette valorisation confortée, il appartiendra à
l'Europe de faire respecter ces mesures de qualité dans les
négociations internationales
.
La mission d'information estime nécessaire que l'Europe reconnaisse
des normes sanitaires adaptées aux signes de qualité comme les
AOC et aux produits fermiers. Il n'est pas question de remettre en cause la
qualité sanitaire des produits, mais celle-ci ne doit pas se faire sur
des bases telles que seule la production standard soit possible. Cela
conduirait à terme à la fin de ces productions, qui participent
autant que l'exportation au maintien d'une agriculture sur tout le
territoire.
En outre, la Communauté Européenne pourrait développer les
productions couvertes par des normes de qualité de façon à
protéger notre marché intérieur et à
conquérir de nouveaux marchés haut de gamme dans les pays tiers.
Ceci passe par la reconnaissance et la protection des appellations et
indications d'origine (AOP-IGP) au niveau international et l'adoption d'une
politique de qualité par l'ensemble de nos partenaires Européens.
Une " démarche qualité " peut permettre à
l'Europe de renforcer sa présence sur les marchés. Mais elle
nécessite, au sein des enceintes internationales, une reconnaissance de
ces productions.
D. CONFORTER LE RAYONNEMENT DE " L'EUROPE VERTE " DANS LE MONDE
Cette vocation de rayonnement international de l'Europe à travers son agriculture peut se concrétiser à travers, d'une part, l'ouverture à l'Est et au Sud, et d'autre part, sa volonté de poursuivre en matière agricole une véritable coopération internationale à l'égard notamment des pays en voie de développement.
1. L'ouverture de l'Europe en direction de l'Est et du Sud
a) Le processus d'élargissement " en marche "
La
mission d'information ne souhaite pas revenir ici sur l'opportunité de
l'élargissement de l'Europe aux PECO ainsi que sur les modalités
de celui-ci.
Elle souhaite cependant rappeler l'importance des PECO en matière
agricole, et la nécessité qui s'attache, à moyen terme,
à l'adaptation de leurs structures et de leurs marchés agricoles.
Ce constat, évident, implique que cet élargissement se fasse avec
détermination mais aussi de manière progressive.
Il ne s'agit pas ici de mettre en doute les capacités d'adaptation de
ces pays. Mais, de nombreux Etats membres de l'Union Européenne ont mis
à profit une phase transitoire relativement longue pour
s'intégrer parfaitement dans le courant Européen. Il est donc
tout à fait normale que ces pays mettent à profit, notamment sur
le plan agricole, une période transitoire (de 10 à 15 ans)
afin de ne pas perturber leur économie et ne pas déstabiliser la
PAC.
La mission d'information souhaite, en outre, profiter de cette occasion pour
renouveler son voeu de réformer les institutions politiques de l'Union
Européenne avant tout élargissement
définitif.
b) L'importance des accords avec les pays méditerranéens
L'Union
Européenne a conclu dès 1976 des accords avec les pays
partenaires du bassin méditerranéens. Ces accords, devenus
aujourd'hui de " la nouvelle génération " ont
été conclus avec la Tunisie, le Maroc, le Liban, l'Egypte.
Ces accords visent à créer des zones de libre échange
impliquant une ouverture réciproque des marchés des produits
industriels et une ouverture, également réciproque, mais
graduelle, des marchés des produits agricoles et des produits de la
pêche.
La mission d'information a conscience que les termes de ces accords sont
parfois difficiles à accepter par bon nombre de producteurs
Européens et notamment français. Si elle souhaite que ces accords
soient négociés avec précaution, elle rappele
néanmoins qu'ils sont indispensables pour assurer, dans le pourtour
méditerranéen cette zone de stabilité dont l'Europe a un
impérieux besoin.
2. L'agriculture Européenne et la coopération internationale
La mission d'information ne peut élaborer un projet d'avenir pour la PAC sans y inclure la coopération avec les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et celle au titre des pays les plus démunis en matière alimentaire.
a) Vers de nouvelles négociations entre l'Union Européenne et les pays ACP
Précisant un document d'orientation
présenté en
octobre dernier, la Commission Européenne prévoit l'ouverture,
après la conclusion d'un nouvel arrangement global entre l'Union
Européenne et les ACP, de négociations en vue de parvenir
à des accords de partenariat économique
régionalisés. Ceux-ci auraient pour but d'établir
progressivement des zones de libre-échange adaptées au niveau de
développement des pays partenaires et à leurs capacités
d'ajustement.
Pour la durée de ces négociations, qui se dérouleraient de
2000 à 2005, le régime commercial de la Convention de Lomé
serait maintenu, ce qui nécessiterait une nouvelle dérogation aux
règles de l'OMC (Organisation mondiale du commerce), mais pour une
période limitée. A terme, les pays les moins avancés (PMA)
continueraient de bénéficier du régime le plus favorable,
régime que l'Union Européenne vient d'ailleurs d'étendre
à l'ensemble des PMA, qu'ils appartiennent ou non à la zone ACP.
Dans son document d'octobre, la Commission souligne que les
préférences commerciales octroyées par l'Union
Européenne dans le cadre des protocoles spécifiques (banane,
sucre, viande bovine) annexés à la Convention de Lomé
"
ne pourront être maintenues pour les PMA que si elles sont
couvertes par une dérogation
" à l'OMC. "
Pour
les pays qui s'engageraient dans des accords de coopération
économique avec l'Union Européenne,
précise-t-elle,
les bénéfices procurés par les protocoles pourraient
être préservés, pleinement ou partiellement, en les
intégrant sous une forme appropriée dans ces nouveaux
accords
".
"
Pour ce qui concerne le protocole sucre, compte tenu de son
caractère particulier d'accord entre consommateur et fournisseur,
portant sur des quantités fixes, l'Union Européenne et les pays
ACP pourraient convenir de le maintenir comme un accord séparé,
non lié à l'accord global de coopération. Une
dérogation pourrait dans ce cas s'avérer nécessaire pour
assurer la conformité avec l'OMC
".
La mission d'information approuve totalement cette initiative.
b) Dépendance alimentaire et agriculture Européenne
La mission d'information souhaite tout d'abord faire
état du dernier rapport de l'International food policy research
institute qui précise
que le fossé entre la production
alimentaire par les pays en voie de développement et leur consommation
devrait profondément s'aggraver d'ici 2020. En effet, le décalage
entre la production de riz, de blé, de maïs et d'autres
céréales de ces pays et leurs besoins en nourriture devrait plus
que doubler. La demande sur le marché mondial pourrait ainsi passer de
94 millions de tonnes en 1993 à 228 millions de tonnes dans
une vingtaine d'années.
L'IFRI ajoute que le nombre d'enfants mal nourris devrait
considérablement augmenter en Afrique sub-saharienne. Dans cette partie
du continent africain, ils seraient 40 millions à ne pas manger
suffisamment, ce qui représenterait 45 % des enfants souffrant de
malnutrition dans le monde. En Asie du sud, où le problème se
pose de façon positive, on estime qu'encore deux enfants sur cinq
souffriront de la faim en 2020.
Cette situation s'explique, selon l'IFRI, par des sécheresses plus
fréquentes, des guerres civiles à répétition, la
faiblesse des réserves de céréales et, surtout, le
déclin de l'aide publique au développement.
La croissance de la production agricole qui était déjà
très basse en 1982-1994 par rapport à la démographie, avec
+ 2,3 %, devrait, en outre, tomber à 1,5 % pour la
période 1993-2020.
Les pays en voie de développement devraient ainsi être contraints
d'importer plus de céréales des pays industrialisés.
La mission d'information constate pourtant qu'une relance des productions
vivrières dans nombre de pays serait nécessaire
.
Rappelons
que les agriculteurs n' étant pas reconnus comme acteurs
économiques, ces Etats ont souvent des régions cloisonnées
sur le plan des transports
. De plus les intermédiaires, qu'ils
soient publics (offices de commercialisation) ou privés
(commerçants) ne jouent pas la fluidité du marché et
n'offrent pas suffisamment de débouchés aux agriculteurs,
même quand des prix mondiaux sont élevés. Enfin, nombre
d'Etats du Sud trouvent plus intéressant d'importer que de produire sur
place parce qu'ils perçoivent des taxes à l'importation et qu'ils
y trouvent plus de commodité pour nourrir leurs villes.
Il est donc indispensable que l'Europe poursuive la politique de
coopération avec ces Etats dans le domaine agricole et
alimentaire.
CONCLUSION
Plus de
quarante ans après le Traité de Rome, la politique agricole
commune est de nouveau à la croisée des chemins.
Profondément réformée en 1992, elle fait l'objet de
nouvelles propositions de la Commission Européenne qui souhaite
rapprocher les prix communautaires des prix mondiaux. Malgré des
objectifs économiquement ambitieux, la " philosophie " du
projet Européen de réforme de la PAC manque néanmoins
cruellement de souffle.
La mission d'information a tenté de proposer, à travers un projet
alternatif, une vision moderne et dynamique de l'agriculture Européenne.
Ses conclusions et ses réflexions forment un tout dont les
éléments se complètent et s'équilibrent.
La mission sénatoriale souhaite que le projet de loi d'orientation
agricole et celui relatif à l'aménagement du territoire soient
examinés à l'aune de ses propositions. En effet, comment
concevoir, par exemple, d'une part, une agriculture française
axée uniquement sur la qualité et le territoire et, d'autre part,
une agriculture Européenne uniquement vouée à une
politique de marché et de compétitivité.
Mais, une refonte aussi ambitieuse de la PAC appartient-elle au domaine du
possible ? La question ne manquera pas d'être posée et les
discussions qui existent entre les pays membres de la Communauté
n'incitent pas, en la matière, à beaucoup d'optimisme.
Il sera sans nul doute difficile de consolider l'unité de notre
marché agricole tout en adoptant une démarche pragmatique de
différenciation des productions.
Il sera sans nul doute tout autant difficile de préserver les paysages
qui font la beauté de nos territoires et de maintenir dans cet espace,
une vie rurale et agricole économiquement significative.
Il sera sans nul doute plus difficile encore de faire accepter à nos
partenaires et, en premier lieu, aux Etats-Unis, une redéfinition de la
participation de la Communauté Européenne au commerce mondial
agricole.
Mais l'avenir de la PAC, et peut-être de l'Europe à l'aube de
l'an 2000, dépend de ce double effort de solidarité interne
et de fermeté vis-à-vis du reste du monde.
La mission d'information tient à remercier tous ceux qui, lors de ses
auditions et de ses déplacements tant en France qu'à
l'étranger, ou au travers de leurs observations écrites, ont
contribué au bon déroulement de ses travaux.
RAPPEL DES PRINCIPALES PROPOSITIONS
I -
CONSOLIDER L'UNITÉ DU MARCHÉ COMMUN AGRICOLE
Si la mise en place de l'Euro présente des avantages
incontestables pour l'agriculture, d'importantes zones d'ombre
subsistent
.
La mission d'information considère :
la non-participation de certains Etats membres à la zone Euro comme
regrettable pour le bon fonctionnement du marché unique
. La mission
souhaite que ces Etats soient au minimum fortement incités à
participer au
dispositif qualifié de " SME bis ".
le renforcement de la coopération politique
entre Etats membres
comme indispensable, dans le
respect des identités nationales.
Le renforcement du marché commun agricole passe par
l'établissement d'une véritable égalité de
concurrence entre les producteurs
Européens
:
en rapprochant les
réglementations sociales
,
en harmonisant les
législations
fiscales
, notamment en
matière de transmission d'entreprises agricoles et de succession,
en contrôlant plus strictement les
aides nationales
,
en évitant une "
renationalisation
" de la PAC
Il faut aussi constituer un véritable projet Européen
englobant toutes les productions agricoles ;
en premier lieu les
productions méditerranéennes
en second lieu celles
d'outre-mer
.
Il importe également de développer les usages non
alimentaires des produits agricoles.
L'Europe doit inciter au développement :
des
bio-carburants
;
du secteur
amidonnier
;
des
nouvelles sources d'énergie
à base de produits
agricoles.
II - UNE APPROCHE PRAGMATIQUE DE L'AGRICULTURE EUROPÉENNE, QUI
DIFFÉRENCIE LES PRODUCTIONS
La mission souhaite renforcer la compétitivité des
céréales Européennes
et préconise :
une baisse
raisonnable
des prix, limitée à 10 %
;
la suppression
des taxes à l'exportation
;
le maintien des
majorations mensuelles
;
le rétablissement des
surfaces de base maïs
.
L'indépendance protéique : un enjeu essentiel pour
l'agriculture de la Communauté, qui doit être mieux pris en
compte.
La mission d'information préconise :
un paiement complémentaire multiproduits
;
la mise en place d'un
filet de sécurité
dans ce
secteur.
Une gestion plus efficace des marchés de la viande bovine
La mission d'information préconise :
la
défense du niveau de prix
dans un marché
équilibré et le maintien de
l'intervention publique
;
une
revalorisation de la prime à la vache allaitante
et un
meilleur accès au complément extensif ;
la préservation de la valeur ajoutée par le refus de
toute distorsion de concurrence
-notamment par l'intermédiaire d'une
subsidiarité trop importante- ; en outre, la mission d'information est
favorable à
l'instauration d'une prime unique à l'unité
de gros bétail alliant simplification administrative et
égalité de traitement entre les producteurs ;
une
gestion efficace du secteur
se traduisant notamment par une
organisation plus rationnelle de la production et de l'ensemble de la
filière ;
Il faut aussi préserver la filière laitière, afin
de prendre en compte ses particularités. La mission d'information
préconise à cet égard :
une réelle flexibilité dans la gestion des quotas par la
mise en place du
système de double quota/double prix
;
la reconnaissance de la
spécificité des signes et labels
de qualité.
III - REPLACER L'EMPLOI ET L'ESPACE AU COEUR DE LA RÉFORME
Tout
en refusant de remettre en question la fonction économique de
l'agriculture,
la mission d'information est consciente, cependant, de
l'importance de ses fonctions territoriales et sociales.
Elle suggère d'
allier compétitivité et
maintien du revenu de l'agriculteur
La mission s'est longuement penchée sur la question du
"
découplage des aides par rapport à la
production
". Elle a estimé que la PAC pourrait
bénéficier d'un découplage accru des aides, à
condition de maintenir celui-ci à un niveau raisonnable.
La mission d'information préfère à un dispositif de
plafonnement, l'instauration d'un
mécanisme de
dégressivité
en fonction de la taille des exploitations,
prenant en compte l'emploi et les territoires
.
La mission d'information estime indispensable et urgent d'étudier
et d'initier des
expériences à grande échelle en
matière de garantie partielle de recettes. Elle considère qu'en
la matière, aucun retard ne doit être pris
.
Une présence et une activité agricole sont
nécessaires sur l'ensemble du territoire
une nouvelle impulsion doit être donnée à
l'agriculture de montagne
. Pour ce faire, la mission d'information
souhaite :
accentuer significativement
l'aide aux systèmes herbagers
,
notamment dans le cadre de
la prime à la vache laitière
,
supposée compenser les baisses de prix du lait, mais aussi par le
maintien de la prime à l'herbe
parmi les mesures de
développement rural ;
préserver les droits à produire pour les productions
montagnardes,
qui sont une condition sine qua non de la
pérennisation de cette agriculture ;
ne pas conditionner à une contrepartie
l'attribution des
indemnités compensatrices de handicaps naturels,
ce qui en
l'état des propositions, n'apparaît pas clairement ;
instaurer au niveau Européen une
vraie politique d'aide à
l'investissement
pour les exploitations de montagne.
Il faut aussi pérenniser l'agriculture en
zone
périurbaine.
La mission souhaite une politique ambitieuse de développement
rural
La mission d'information souhaite que soient préservées :
l'horizontalité
de certains dispositifs ;
la diversité
des actions conduites ;
L'intégrité du budget agricole Européen.
Enfin, il est essentiel de promouvoir une politique réaliste et
menée avec détermination en faveur de l'installation de jeunes
agriculteurs :
au niveau Européen, en faveur de
l'installation et de la
formation
,
au niveau national, en renforçant, notamment, les installations de
jeunes non issus du milieu rural.
La mission souhaite affirmer la
volonté de la
Communauté
Européenne de
se préparer aux
prochaines échéances internationales
, tout en
rappelant
la spécificité de son
agriculture
:
La mission d'information estime
qu'il n'est pas possible de
considérer les produits agricoles comme n'importe quels autres produits
de base
.
Ainsi, la mission d'information, tout en affirmant son souhait de voir la
Communauté participer activement aux négociations internationales
sur les questions agricoles, estime nécessaire que l'Europe se
prépare à ces prochaines échéances en adoptant des
positions claires et communes aux Etats membres
: la Commission
Européenne ne doit en la matière en aucun cas
outrepasser les
limites et le contenu de son mandat,
fixés par les traités et
le Conseil des ministres ; l'Europe réaffirme
la
spécificité de l'agriculture
, lors des négociations
internationales.
La mission propose de dialoguer dans un cadre clairement
défini : celui de l'Organisation mondiale du commerce
La mission d'information considère qu'en tranchant sans
ambiguïté en faveur du multilatéralisme,
l'Europe pourra
affirmer son existence, voire son " leadership " au sein de
l'OMC
, mettant ainsi en conformité l'influence de la
Communauté et sa position de première puissance exportatrice.
Le dialogue, oui, mais sur la base d'une concurrence loyale
Pour la négociation à venir, la mission considère
que :
L'harmonisation (notamment au sein du " codex alimentarius ")
et le respect des
mesures sanitaires
ainsi que la
claire
information du consommateur
doivent être des préoccupations
fondamentales ;
la prise en compte du coût des
mesures environnementales
et
sociales (" clause sociale ") doit être mieux
assurée ;
les produits de qualité
doivent être justement
valorisés dans les échanges agricoles mondiaux ;
la communication et la promotion à l'exportation des produits
agricoles et agro-alimentaires Européens
doit devenir une
réelle priorité, à l'image du programme américain
d'aides à l'exportation.
La mission propose de conforter le rayonnement de l'Europe verte dans le
monde :
par
l'ouverture de l'Europe
en direction de l'Est :
la mission estime que l'élargissement en direction des PECO doit se
faire avec détermination
mais de manière très
progressive
;
la mission d'information souhaite profiter de cette occasion pour renouveler
son voeu de réformer
le fonctionnement institutionnel de l'Union
Européenne avant tout élargissement
.
par un renforcement de la
coopération
internationale
.
ANNEXE N° 1 -
EXAMEN EN
COMMISSION
Au cours
de sa réunion du mardi 2 juin 1998, la commission a
procédé à l'examen du rapport d'information de MM.
Philippe François, Marcel Deneux et Jean-Paul Emorine, sur l'avenir
de la politique agricole commune.
M. Philippe François, Président, MM. Marcel Deneux et
Jean-Paul Emorine, rapporteurs, ont tout d'abord présenté les
conclusions de leur rapport. Puis un débat s'est instauré.
Après l'exposé, par le président et les rapporteurs, des
conclusions de la mission d'information,
M. Jean
François-Poncet, président,
s'est interrogé sur
l'évolution de l'équilibre entre l'offre et la demande de
denrées alimentaires.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que, parallèlement
à cette évolution démographique incontestable,
l'augmentation du niveau de vie suscitait le développement d'une
" économie de gaspillage " en denrées alimentaires.
S'agissant de l'offre de produits agricoles,
M. Jean François-Poncet,
président,
a insisté sur l'importance de l'augmentation de la
productivité due au progrès scientifique, en particulier à
la génétique. Il a rappelé à cet égard le
rôle que pourrait jouer le développement des organismes
génétiquement modifiés.
Après avoir souscrit ces propos,
M. Marcel Deneux et M. Jean-Paul
Emorine, rapporteurs,
ont précisé que la mission avait
entendu le président de l'institut national de recherche agronomique
(INRA) et des représentants des industries du secteur de
l'agro-alimentaire. Ils ont ajouté que les perspectives, sur les
cinquante prochaines années, de l'évolution de la production,
établies par la FAO (Food and agriculture organisation) et
l'Organisation de la coopération et du développement
économique (OCDE) avaient été intégrées dans
le rapport de la mission d'information.
M. Dominique Braye
a souligné qu'il était en tout
état de cause très difficile de prévoir les
évolutions de l'offre et de la demande en matière alimentaire.
M. Jacques de Menou
a indiqué qu'il fallait tenir compte, de
l'augmentation de la production due à une meilleure mise en valeur des
surfaces agricoles aujourd'hui sous-exploitées, comme par exemple dans
les pays d'Europe centrale et orientale (PECO).
M. Jean Bizet
a précisé que l'augmentation prévue
de la population mondiale, ainsi que l'élévation des niveaux de
vie, entraîneraient une consommation accrue de protéines animales,
par rapport aux protéines végétales. Il a
considéré qu'en raison du volume supérieur de
protéines végétales nécessaire à la
production d'une quantité donnée de protéines animales, la
demande de productions végétales s'accroîtrait d'autant.
Par ailleurs, il a jugé que la meilleure préservation des
biotopes et de l'environnement était une condition indispensable de
l'acceptation des progrès scientifiques par le consommateur.
M. Hilaire Flandre
a souligné que les consommateurs acceptaient
de moins en moins certaines nouvelles techniques de production. Revenant sur le
bilan de la réforme de la PAC de 1992, il a indiqué que le
maintien des revenus agricoles s'était accompagné d'une baisse de
la population agricole et d'un agrandissement des exploitations, le niveau de
revenu à surface constante n'ayant pas été
préservé. Il a, en outre, jugé que la compensation des
baisses de prix, opérée par la réforme de 1992, n'avait
pas été réellement intégrale, la
référence de revenu retenue pour le calcul de cette compensation
étant globalement défavorable.
Au sujet des aides directes,
M. Hilaire Flandre
a
considéré qu'elles pouvaient avoir des effets néfastes,
tel que l'agrandissement des exploitations au détriment de l'occupation
de l'espace et de l'installation des jeunes. Dans le secteur de la viande
bovine, il a estimé que la prime à l'herbe favorisait
l'occupation de l'espace, qu'une prime indexée à l'unité
de gros bétail (UGB) favoriserait la production et qu'une prime
indexée au nombre d'actifs employés favoriserait le maintien du
nombre d'agriculteurs. Enfin, il a considéré qu'une
réforme de la politique agricole commune avant l'ouverture du cycle de
négociations multilatérales de l'organisation mondiale du
commerce revenait à " mettre la charrue avant les boeufs ".
M. Désiré Debavelaere
, considérant que la
réforme proposée de la politique agricole commune visait à
préparer l'Europe aux futures négociations internationales,
s'est
interrogé sur son but, redoutant qu'il s'agisse uniquement
de " copier " la politique agricole américaine. S'opposant
à une limitation de la production, il a ensuite souhaité que soit
clairement réaffirmée la nécessité d'une
conquête, par l'Europe, des marchés agricoles mondiaux. Citant
l'exemple du secteur betteravier, il a rappelé qu'à
l'époque où la production française n'était que de
40 millions de tonnes, un " plan de maîtrise " du secteur
avait été évoqué, alors que l'accroissement de la
capacité d'absorption du marché réalisé depuis lors
avait permis à la France de produire aujourd'hui 120 millions de
tonnes, dont une bonne partie était exportée.
M. Désiré Debavelaere
a donc jugé que la
vocation exportatrice de l'Europe devait être l'horizon de la politique
agricole commune.
M. Philippe François
a indiqué que le rapport de la
mission d'information prônait la conquête des marchés
extérieurs par les productions Européennes.
M. Jean François-Poncet, président
, a
considéré que le choix de la mission d'information qui
s'écartait le plus des propositions de la Commission Européenne
était la proposition d'une instauration d'un système de
" double quotas double prix" dans le secteur laitier. Evoquant les propos
tenus par M. Guy Legras, directeur général de l'agriculture
à la Commission Européenne, lors de son audition devant la
commission et la délégation à l'Union Européenne,
au sujet des quotas, le président a rappelé que la
généralisation d'un tel système risquait de conduire
à une répartition de la production entre les Etats membres telle
que chacun dispose d'un volume de production égal à sa
consommation, chaque pays étant incité à produire son
quota. Le président a, par ailleurs, déclaré partager
entièrement le choix d'un développement de la vocation
exportatrice Européenne, qui avait toujours été, a-t-il
précisé, l'orientation française.
M. Jean François-Poncet, président
, a, d'autre part,
regretté que la réforme de la PAC de 1992 ait fait supporter aux
contribuables un soutien à l'agriculture jusqu'alors financé par
le consommateur.
M. Hilaire Flandre
a, sur ce point, précisé que le
consommateur n'avait en fait que peu bénéficié de la
baisse des prix des produits agricoles.
M. Jean François-Poncet, président
, a rappelé la
conjoncture exceptionnelle dont avait bénéficié
l'agriculture depuis 1992, avec des prix mondiaux élevés, alors
que les primes Européennes avaient été instituées
en compensation de la baisse des prix garantis.
M. Marcel Deneux, rapporteur
, a précisé que le cours du
dollar durant cette période avait, en outre, accentué l'effet de
" surcompensation " décrit par le président.
M. Jean François-Poncet, président
, a rappelé le
succès de la réforme de 1992 en ce qui concerne le marché
Européen de l'alimentation animale, partiellement reconquis par les
céréales communautaires.
Répondant à
M. Gérard Braun
qui s'inquiétait
de cet aspect
,
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que
les propositions de la mission d'information réservaient une place
importante à l'agriculture de montagne.
M. Jacques de Menou
a insisté sur le rôle essentiel que
jouaient sur les marchés mondiaux les productions hors sol ainsi que le
secteur de l'aviculture. Il a rappelé que ces productions connaissaient
une croissance importante et représentaient, dans certaines
régions, une activité considérable.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que l'importance de ces
productions au niveau mondial était évoquée dans le
rapport. Il a, en outre, précisé que ce secteur
bénéficierait de la baisse du prix des céréales.
M. Jean Bizet
a fait état du danger qu'impliquaient les
propositions de la commission en matière de subsidiarité. Il a
ensuite abordé le problème de la dépendance
protéique de l'Europe et s'est enquis de l'accueil reçu par les
différents Etats membres quant à la proposition de double-prix
double-quota en matière laitière.
M. Philippe François et M. Marcel Deneux, rapporteur,
ont admis
qu'une trop grande subsidiarité risquait en effet de conduire à
une " renationalisation " de la PAC et qu'il convenait d'être
attentif à ce danger. Ils ont ensuite rappelé les enjeux que
représentait le développement pour l'Europe des
oléo-protéagineux et ont fait état des avantages
procurés par le système du double prix double quota pour le lait.
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur,
a souligné que 10 % de la
production de viande bovine était stocké chaque année. Il
a ensuite insisté sur le fait que 90 % de cette même
production était consommée en Europe. Il en a conclu que les
propositions de la commission risquaient de faire perdre à ce secteur
des débouchés sur les marchés tant Européens que
mondiaux. Il a ensuite précisé les modalités de mise en
oeuvre d'une prime unique à l'unité gros bétail.
M. Marcel Deneux, rapporteur
, a rappelé qu'actuellement
20.000 bovins étaient abattus chaque semaine en Angleterre, et
transformés en farines animales stockées, ensuite, dans des
entrepôts.
M. Jean Bizet
s'est interrogé sur le mode de reconstitution du
cheptel anglais.
En réponse,
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur
, a indiqué
que ce renouvellement ne se faisait pas avec une nouvelle race bovine qui
aurait la faveur des consommateurs, mais avec les jeunes animaux, en principe
indemnes. De plus, évoquant le risque d'une délocalisation des
productions agricoles, il a insisté sur la nécessité de
lier les productions aux territoires.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
s'est réjoui d'avoir
rencontré, dans la plupart des postes d'expansion économique
visités à l'étranger, outre d'excellents attachés
agricoles, des vétérinaires chargés du contrôle des
mesures sanitaires.
M. Jean François-Poncet, président
, a conclu la
réunion de la commission en remerciant les auteurs du rapport pour la
qualité de leurs travaux.
La commission a ensuite adopté les conclusions du rapport
d'information et décidé sa publication.
ANNEXE N° 2 -
COMPOSITION DE LA MISSION
D'INFORMATION SUR L'AVENIR DE LA PAC
Président :
M. Philippe Francois (RPR)
(Seine-et-Marne)
Vice-Présidents :
M. Bernard Barraux (UC) (Allier)
M. Georges Berchet (RDSE) (Haute-Marne)
M. Louis Minetti (CRC) (Bouches-du-Rhône)
M. Jean-Marc Pastor (SOC) (Tarn)
Secrétaires
: M. Roland Courteau (SOC) (Aude)
M. Jacques de Menou (RPR) (Finistère)
Rapporteurs
: M. Marcel Deneux (UC) (Somme)
M. Jean-Paul Emorine (RI) (Saône-et-Loire)
Membres
:
Mme Janine Bardou (RI) (Lozère)
M. Michel Barnier (RPR) (Savoie)
M. Jean Bizet (RPR) ( (Manche)
M. Désiré Debavelaere (RPR) (Pas-de-Calais)
Mme Josette Durrieu (SOC) (Hautes-Pyrénées)
M. Jean François-Poncet (RDSE) (Lot-et-Garonne)
M. Jean Huchon (UC) (Maine-et-Loire)
M. Louis Moinard (UC) (Vendée)
M. Bernard Piras (SOC) (Drôme)
M. Paul Raoult (SOC) (Nord)
M. Charles Revet (RI) (Seine-Maritime)
M. Roger Rigaudière (RPR) (Cantal)
ANNEXE N° 3-
LISTE DES PERSONNALITÉS
ENTENDUES PAR LA MISSION D'INFORMATION
Mardi 27
janvier
16 h
M. Antoine Herth, vice-Président du Centre national des
jeunes agriculteurs
17 h
M. Jacques Lemaître, Président de la
Fédération nationale porcine
18 h
M. Marcel Cazalé, Président de l'Association
générale des producteurs de maïs et
M. François-Gilles Le Theule, Directeur
Mercredi 28 janvier
15 h
M. François Dufour, porte parole de la
Confédération paysanne, et M. Francis Poineau, Secrétaire
national
16 h
M. Jean-François Hervieu, Président de
l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture et M. Guillaume
Baugin, Responsable des relations avec le Parlement
17 h
M. Bernard Martin, Président de la Fédération
nationale ovine et M. Bertrand Bouffartigues, animateur
Mardi 10 février
16 h
M. Luc Guyau, Président de la Fédération
nationale des syndicats d'exploitants agricoles, M. Paul Bastian,
Vice-Président en charge des relations internationales, M. Joseph
Garnotel, Directeur-adjoint des questions agricoles, M. Eric Humbert,
Attaché de direction, et Mme Nadine Normand, Chargée des
relations avec le Parlement
17 h
M. Benoît Canis, Président de la
Fédération nationale de l'agriculture biologique des
régions de France
18 h
M. Joseph Ballé, Président de la
Confédération française de la coopération agricole,
Mme Catherine Lion, Directrice, et Mme Irène de Bretteville,
Attachée parlementaire
Mercredi 11 février
15 h
M. David King, Secrétaire général de la
Fédération internationale des producteurs agricoles et M. Rashid
Pertev, Assistant du Secrétaire général
16 h
M. Pierre Cuypers, Président de l'Association pour le
développement des carburants agricoles, M. Jean-Pierre Leroudier,
Directeur, et M. Olivier de Gasquet, Directeur de la Fédération
des producteurs d'oléagineux et de protéagineux
17 h
Mme Carole Piwnica, Présidente d'Amylum France et M.
Jérôme Bignon, expert
Mardi 24 février
16 h
M. Guy Paillotin, Président de l'Institut national de la
recherche agronomique
17 h
M. Jean-Claude Trunel, Directeur des produits et matériels
agro-alimentaires du Centre français de commerce extérieur
18 h
M. Philippe Chalmin, Directeur de la Collection Cyclope des
Editions Economica
Mercredi 25 février
15 h
M. Yves Montécot, Président du Syndicat national des
industries de nutrition animale et M. Arnaud Bouxin, Responsable du Service des
matières premières
16 h
M. Marc Bué, Président de la
Confédération nationale de la Mutualité, de la
Coopération et du Crédit agricole, M. Roland Combier, Directeur
général et M. Dominique Moreau-Ferellec, Responsable des
ralations parlementaires à la Fédération nationale du
Crédit agricole.
17 h
M. Jean-Michel Lemétayer, Président de la
Fédération nationale des producteurs de lait, et M. Guy de Haut
de Sigy, Directeur
Mardi 3 mars
16 h
Mme Marie-José Nicoli, Présidente de l'Union
fédérale des consommateurs, et M. Nicolas Larmagnac,
Responsable du Secrétariat du Mouvement
17 h
M. René Groussard, Président de la Commission des
comptes de l'agriculture et membre de l'Académie d'agriculture.
18 h
M. Jean Pinchon, Président du Conseil permanent de
l'Institut national des appellation d'origine
Mercredi 4 mars
16 h
M. Dominique Ducroquet, président de la
Confédération générale des planteurs de betteraves,
et M. Alain Jeanroy, Directeur
17 h
M. Eugène Schaeffer, Président de la
Confédération française de l'aviculture
18 h
M. Henri de Benoist, Président de l'Association
générale des producteurs de blé, et M. Pascal Hurbault,
Directeur
Mardi 24 mars
16 h
M. Hubert François, Directeur de production des Grands
Moulins de Paris
17 h
M. Jean-Claude Sabin, Président de la
Fédération française des producteurs d'oléagineux
et de protéagineux
Mercredi 25 mars
15 h
M. Philippe Brayer, Président de la Fédération
nationale de la propriété agricole, et M. Bruno Ronssin,
conseiller
16 h
M. Victor Scherrer, Président de l'Association nationale des
industries de l'agro-alimentaire, M. Marc Roquette, Président de la
Commission des échanges extérieurs, M. Benoît
Mangenot, Secrétaire général et Mme Liliane Rousseau,
Chef du service économique
17 h
M. Jérôme Bédier, Président de la
Fédération du commerce et de la distribution, et Mme
Véronique Etienne-Martin, Conseiller Chargé des relations avec le
Parlement et les Institutions Européennes
Mardi7 avril
16 h
Mademoiselle Hacina Benhamed, Chargée de mission du
Commissariat général du Plan
17 h
M. Christian Lapointe, Président de l'Office national
interprofessionnel des céréales, et M. Alain Moulinier, Directeur
Mercredi 8 avril
15 h
M. Gérard Chappert, Président de la
Confédération nationale des syndicats d'exploitant familiaux, M.
Alain Gaignerot, Directeur et Mme Jeanine Marty, Animatrice
16 h
M. Michel Jacquot, ancien Directeur du Fonds Européen
d'orientation et de garantie agricole
17 h
M. Rémi Losser, Président de la
Fédération nationale des producteurs de tabac, et M. Michel
Jarrige, Directeur
Mardi 21 avril
16 h
M. Laurent Roy, Conseiller technique au Ministère de
l'aménagement du territoire et de l'environnement et Mme Julie
Majerbzak, Conseiller technique Chargée des relations avec le Parlement
et les élus
17 h
M. Denis Onfroy, membre du Bureau de la Fédération
nationale des producteurs de légume et Mme Corine Ciprès, Adjoint
du Directeur, et Mme Angélique Delahaye
Mercredi 29 avril
16 h
M. Guy Legras, Directeur général de La DG VI à
la commission de Bruxelles
Mardi 5 mai
15 h M. Georges Dutruc-Rosset, Directeur général de l'Office
international de la vigne et du vin
17 h15
M. Pierre Moscovici, Ministre des Affaires Européennes
18 h
M. Pierre Banc, Président de la Fédération
nationale des producteurs de fruits et M. Vincent Delhoume
Mercredi 6 mai
15 h
M. Raymond Lacombe, Président de l'Association nationale
pour le développement de l'aménagement foncier agricole et M.
Sylvain Cazes
16 h
M. Christian Jacob, Député de Seine et Marne
17 h
M. Jean Gonnard, Président de l'Agence Sygma, et M. Bruno
Catton, Directeur général
Mardi12 mai
16 h
M. Joseph Daul, Président de la Fédération
nationale bovine
17 h
M. Dominique Mathieu, Président de la Société
des agriculteurs de France
18 h
M. Jacques Laigneau, Président de la Coordination rurale, M.
François Lucas et M. Christian Pradeau, Directeurs
19 h
Mme Jeanette Gros, Présidente de la Caisse centrale de la
Mutualité sociale agricole
Jeudi14 mai
9 h
M. Louis Le Pensec, Ministre de l'agriculture
Mardi 19 mai
16 h
M. Jean-Marc Bergamelli, Président de la
Fédération nationale des groupements d'éleveurs de lapins
et M. Michel Fort, Association de coordination des techniques agricoles
17 h
M. Philippe Vasseur, Député du Pas de Calais, ancien
Ministre de l'agriculture
18 h
M. Jean Vidal, Secrétaire général du
Comité interministériel pour les questions de coopération
économique Européenne, et Mme Valérie Métrich, Chef
du service agriculuture et pêche
Mercredi 20 mai
15 h
M. Claude Chéreau, conseiller du Premier ministre pour
l'agriculture
16 h
M. Thierry Lataste, Directeur de cabinet du Secrétaire
d'Etat à l'outremer, M. Frédéric Veau, Conseiller
technique, Mme Catherine Delmas-Comolli, Directeur, M. Jean-Yves Sommier,
Chef du département agriculture et pêche et Mme Emmanuèle
Plas, Attachée parlementaire
ANNEXE N° 4 -
COMPTE RENDU DE L'AUDITION
DE M. GUY LEGRAS, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGRICULTURE DE LA
COMMISSION EUROPÉENNE
LE MERCREDI 29 AVRIL 1998
Au cours
d'une séance tenue dans l'après-midi, la commission a
procédé,
conjointement avec la délégation du
Sénat pour l'Union Européenne, présidée par M.
Jacques Genton, à l'audition de M. Guy Legras, directeur
général de l'agriculture (DGVI) à la Commission
Européenne, sur le projet de réforme de la politique agricole
commune (PAC
).
M. Jean François-Poncet, président
, après avoir
rappelé le vif intérêt suscité, au Sénat, par
les questions agricoles, a présenté M. Guy Legras, en insistant
sur sa connaissance très approfondie des dossiers. A la Commission
Européenne depuis 1985 -a-t-il précisé-, M. Guy Legras a
connu les profondes mutations de l'agriculture communautaire, notamment avec la
réforme de la PAC en 1992.
Puis,
M. Jean François-Poncet, président,
a fait
état des vives inquiétudes que provoquait, en France, le projet
de réforme en cause, tout en observant que la réforme de 1992,
qui avait suscité bien des craintes, s'était finalement
révélé favorable, dans l'ensemble, pour le pays. Les
inquiétudes nées de la première réforme de la PAC
en 1992, a-t-il fait remarquer, n'étaient en définitive pas
réellement fondées puisque cette réforme a globalement
favorisé la France.
Enfin,
M. Jean François-Poncet, président,
a relevé
que parmi les raisons avancées pour justifier une nouvelle
réforme, la reprise des négociations avec les Etats-Unis dans le
cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pourrait ne pas constituer
une menace, dès lors qu'il semble acquis que l'administration
américaine ne devrait pas obtenir l'autorisation du Congrès
concernant la procédure dite du " fast-track ".
M. Jacques Genton, président de la délégation du
Sénat pour l'Union Européenne
, a réaffirmé la
volonté du Sénat, et en particulier de la
délégation, de réunir une information objective sur des
sujets difficiles et d'apporter une contribution efficace à
l'élaboration de la politique communautaire.
M. Guy Legras, directeur général de l'agriculture à la
Commission Européenne
, a salué la tenue d'un tel débat
au Sénat sur la PAC, à la veille d'une réforme de grande
ampleur qui engage l'avenir de toute l'agriculture Européenne, et pour
laquelle un consensus entre tous les Etats membres paraît indispensable.
M. Guy Legras
a ensuite passé en revue les différentes
raisons qui motivent le projet de réforme en cours.
Au-delà du constat a priori satisfaisant qui peut être fait
aujourd'hui de la situation de l'agriculture communautaire (évolution
positive des revenus des agriculteurs, absence de crise grave sur les
marchés, relative faiblesse des stocks, stabilisation de la
dépense budgétaire),
M. Guy Legras
a
présenté, tout d'abord, les raisons internes qui motivent une
réforme de la PAC, et en particulier la question des stocks. En effet,
des analyses portant sur l'évolution future des principaux
marchés révèlent qu'à l'échéance 2000
ou 2002, sans réforme de la PAC, des stocks extrêmement
coûteux pourraient faire leur apparition dans le secteur des
céréales, de la viande bovine et même du lait.
M. Guy Legras
a fait état d'une seconde raison interne, plus
politique, relative à l'image de la PAC auprès des opinions
publiques. Il a rappelé, à ce propos, que la politique commune
représente environ la moitié du budget communautaire et que ces
dépenses sont de plus en plus contestées, comme en
témoignent les discussions et débats qui accompagnent le vote du
budget du fonds Européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA).
Parmi les raisons internationales qui justifient une réforme de la PAC,
M. Guy Legras
a tout d'abord évoqué
l'élargissement futur de l'Union Européenne à certains
pays d'Europe centrale et orientale. Ce processus devrait avoir un impact
certain sur la politique agricole commune puisqu'il concerne des pays où
l'agriculture occupe une place économique et sociale majeure (la Pologne
comptant autant d'agriculteurs que la France et l'Allemagne réunies) et
dont les écarts de prix agricoles avec l'Union Européenne sont de
l'ordre d'un tiers à la moitié selon les produits.
M. Guy
Legras
a indiqué que deux pistes de rapprochement étaient
envisageables : soit les prix agricoles de ces pays évoluent vers
les prix Européens (dans le cadre d'une période de transition
telle que l'ont connue l'Espagne ou la Grande Bretagne par exemple), ce qui
constituerait une très forte incitation à la production ; soit
l'écart de prix se réduit à la fois par la hausse des prix
des nouveaux Etats membres et par la diminution des prix Européens, une
solution que la Commission Européenne juge plus adaptée.
Les négociations sur le commerce international constituent, a-t-il
souligné, une seconde raison d'ordre international à la
réforme de la PAC. Il a précisé que ces
négociations concernaient de façon croissante des accords de
libre-échange signés avec différents pays, accordant
notamment des concessions commerciales en matière agricole que l'on peut
considérer comme excessives. Par ailleurs, il a noté que les
négociations de l'OMC devraient reprendre en 1999, en dépit des
difficultés que l'administration américaine semble rencontrer
pour obtenir du Congrès l'accord sur une procédure de " fast
track ",
M. Guy Legras
a estimé qu'une proposition de
" fast track " limitée à l'agriculture pourrait aboutir
et permettre de nouvelles négociations agricoles entre américains
et Européens dans le cadre de l'OMC.
M. Guy Legras
a rappelé le caractère global des
réformes en cours, à la différence de celle de 1992 : en
effet, l'Agenda 2000 regroupe, outre la réforme de la PAC, celle des
fonds structurels et les perspectives budgétaires de l'Union pour
2000-2006. Il a estimé qu'une non-réforme de la PAC permettrait,
certes, à l'Union Européenne de réaliser quelque 4
milliards annuels d'économies mais serait préjudiciable aux
agriculteurs Européens.
Puis
M. Guy Legras
a présenté les trois différentes
options pour une réforme de la PAC présentées au Conseil
de Madrid de 1995. Le premier schéma, d'inspiration libérale, est
d'ores et déjà écarté. Une seconde option
" quantitative " s'inspire du système des quotas ; il a
estimé que ses conséquences devaient être clairement
exposées : cette option signifie, en effet, que le marché
communautaire serait déconnecté des prix mondiaux et que l'Europe
devrait renforcer ses frontières et renoncer à sa vocation
exportatrice.
M. Guy Legras
a présenté une
troisième voie qui a les faveurs de la Commission
;
elle repose
sur la recherche de la compétitivité de l'agriculture
communautaire et passe par des baisses de prix en partie compensées pour
les céréales, la viande bovine et le lait.
M. Guy Legras
a expliqué qu'une partie, volontairement
limitée, des sommes correspondant à la compensation de ces
baisses de prix serait affectée aux Etats-membres, qui devraient les
distribuer aux exploitants en respectant des critères communautaires
prédéterminés afin d'éviter toute distorsion de
concurrence. Afin de justifier ce nouveau système, il a avancé
deux arguments : d'une part, tous les problèmes ne peuvent se
régler à Bruxelles et une certaine subsidiarité est
d'autant plus nécessaire que l'Union s'élargit à de
nouveaux membres ; d'autre part, certains pays, dont la France, qui
souhaitent, par exemple, privilégier l'élevage extensif par
rapport à l'élevage intensif, ne le pourront que dans le cadre
d'enveloppes nationales. Il ne s'agit toutefois pas d'une
" renationalisation des aides " , a-t-il insisté, puisque
des critères communautaires demeurent et que ces aides seront
financées en totalité par le FEOGA-Garantie à l'exclusion
de tout financement national.
Enfin,
M. Guy Legras
a évoqué la politique ambitieuse de
développement rural qu'entend mettre en oeuvre la Commission, et dont il
a présenté les trois caractéristiques principales :
elle devrait être applicable à tout le territoire communautaire,
elle serait financée par le FEOGA-Garantie -plus souple que le
FEOGA-Orientation-, et elle devrait reposer sur une forte subsidiarité,
puisque des programmes nationaux ou régionaux devraient être
établis conformément à un règlement-cadre.
M.
Guy Legras
s'est étonné du faible enthousiasme
rencontré en France par ces propositions, qui constituent un
élément important de la réforme.
M. Philippe François,
président
de la
mission
d'information sur la politique agricole commune
, a souligné que les
politiques de quotas, mises en oeuvre notamment dans les secteurs du lait et de
la betterave, avaient donné des résultats satisfaisants. Il a
demandé si un système similaire ne pourrait être
envisagé dans le secteur de la viande bovine et des
céréales.
Evoquant l'amélioration de l'image de l'agriculture, il a rappelé
que la Commission Européenne proposait une baisse des prix visant
à rendre les productions Européennes compétitives sur les
marchés mondiaux, -ce débouché extérieur ne
représentant pourtant que 10 % de la production-, cette baisse
étant compensée par l'augmentation des soutiens directs aux
agriculteurs ; il a douté qu'une telle augmentation améliore
l'image de l'agriculture dans l'opinion publique.
En ce qui concerne les quotas,
M. Guy Legras, directeur
général de l'agriculture à la Commission
Européenne,
a précisé :
- que la Commission avait écarté l'option -certes possible-
de la maîtrise quantitative de la production, qui conduit
inévitablement à couper l'agriculture du marché mondial.
En effet, l'instauration de quotas implique une protection forte à la
frontière, qui ne peut être négociée avec les
partenaires commerciaux de la Communauté qu'en contrepartie d'une
importante baisse des subventions à l'exportation, ce qui éteint
peu à peu le débouché extérieur pour l'agriculture,
hypothéquant ainsi l'avenir de près d'un dixième de
la production communautaire ;
- que la France n'avait pas intérêt, selon lui, à la
mise en place d'un système de quotas sur les céréales et
la viande bovine, puisque l'expérience prouve qu'un tel système
s'accompagne de l'instauration d'un volume national de production sous quotas
équivalant à la consommation de chaque pays. Or, la France
exporte actuellement une partie importante de sa production dans d'autres Etats
membres ; elle ne pourrait plus le faire dans un système de quotas.
A propos de la redistribution par les Etats membres de crédits de la
politique agricole commune,
M. Guy Legras
a jugé que le
financement intégral par le FEOGA-garantie de ces enveloppes
empêchait tout risque de " renationalisation " de la PAC.
M. Marcel Deneux
s'est déclaré sceptique quant à la
pertinence d'un rejet, par la Commission Européenne, de toute politique
de maîtrise quantitative de la production. Il a toutefois indiqué
qu'il lui paraissait nécessaire d'engager la négociation à
partir du projet actuellement proposé.
En ce qui concerne l'image de l'agriculture, il a souligné que
l'augmentation proposée des aides ne serait pas forcément de
nature à l'améliorer. Au sujet de la distribution nationale de
certaines enveloppes budgétaires de la PAC, il s'est dit
préoccupé par les éventuelles distorsions de concurrence
entre régions ou Etats membres qui pourraient en découler.
M. Marcel Deneux
a rappelé son attachement à la
préférence communautaire et s'est dit étonné de ne
pas voir figurer dans les propositions de la Commission l'objectif d'une
amélioration de l'autosuffisance Européenne en matière de
protéines végétales -oléagineux et
protéagineux-. Il a évoqué le problème posé
par l'importation dans la Communauté, à tarif
préférentiel, de 74.000 tonnes de beurre en provenance de
Nouvelle-Zélande.
Au sujet de la politique de développement rural, il a exprimé ses
craintes de ne pas voir le monde rural bénéficier au premier chef
de la politique d'aménagement du territoire de l'actuel gouvernement
français. Enfin, évoquant le récent entretien de certains
membres de la mission d'information sur l'avenir de la PAC avec
M. Jacques Santer, président de la Commission
Européenne,
M. Marcel Deneux
a fait part de ses doutes
quant à la fermeté de l'intention de la Commission
Européenne de ne pas entamer de négociations
multilatérales dans le domaine agricole, si le président des
Etats-Unis n'obtenait pas du Congrès l'autorisation d'utiliser la
procédure de négociation dite " fast track ".
M. Jean François-Poncet, président
, a partagé
ce point de vue, indiquant que lors d'un récent entretien avec le
président de la commission de l'agriculture de la Chambre des
représentants américaine, celui-ci lui avait dit son souhait de
voir s'engager des négociations, même en cas de refus du
" fast track " de la part du Congrès.
M. Jean-Paul Emorine
, constatant que l'agriculture représentait
près de 50 % du budget Européen, s'est demandé si la
volonté d'une compensation de la baisse des prix exprimée dans le
projet de réforme de la PAC était compatible avec le financement
du futur élargissement de l'Union Européenne aux pays d'Europe
centrale et orientale. Revenant sur l'élevage allaitant, il a fait
valoir le sentiment de beaucoup d'éleveurs d'une possible maîtrise
de cette production. En ce qui concerne plus particulièrement les
différentes primes affectées à cette activité
(prime à la vache allaitante, prime spéciale au bovin
mâle...), il a souhaité qu'une simplification soit
opérée, sur la base d'une centralisation des demandes autour du
livre des bovins, au lieu des quatre ou cinq imprimés administratifs
actuellement nécessaires pour les demandes d'aide.
S'agissant des futures négociations multilatérales,
M. Guy Legras
a considéré, à titre personnel,
qu'il serait " suicidaire " pour la communauté
Européenne d'entamer des négociations en l'absence de mise en
place du " fast track " américain. Il a toutefois
estimé qu'en dépit des difficultés actuelles du
président des Etats-Unis sur ce point, un arrangement pourrait
être trouvé avec le Congrès autour d'un " fast
track " recentré sur les sujets strictement agricoles.
Revenant à la question des éventuelles distorsions de concurrence
entre les Etats membres, potentiellement induites par la redistribution
nationale de certaines enveloppes communautaires, il a fait valoir que le
système français de distribution mis en oeuvre pour les aides
octroyées à la suite de la crise de l'encéphalopathie
spongiforme bovine s'était révélé tout à
fait efficace et que la France n'avait pas à craindre d'être moins
performante que ses partenaires Européens sur ce sujet.
Abordant la question de l'image de la PAC, il a souligné que la
proposition d'" Agenda 2000 " incluait des mesures environnementales,
une politique de développement rural et un plafonnement des aides
susceptible d'en améliorer la perception auprès du grand public.
Evoquant le mécanisme de fonctionnement de la future politique de
développement rural,
M. Guy Legras
a précisé
que des programmes, sur sept ans, présentés à la
Commission par des Etats ou des régions, se verraient allouer un
financement Européen.
Répondant à la question posée sur les oléagineux,
il a indiqué que ce sujet serait sans doute abordé dans le cadre
de la négociation à venir avec les Etats membres sur la
réforme de la PAC proposée par la Commission.
En ce qui concerne la baisse des prix proposée par " Agenda
2000 ", il a indiqué qu'il ne s'agissait pas d'une
révolution dans le secteur céréalier, mais plutôt
d'une poursuite de la réforme engagée en 1992, permettant
à la Communauté d'être compétitive sur le
marché mondial. Pour la viande bovine, il a jugé qu'en l'absence
de baisse des prix, la viande blanche se verrait conférer un très
fort avantage relatif par rapport à la viande bovine. Enfin, pour le
lait, la Commission a jugé qu'il fallait entamer une réforme,
même si celle-ci s'avérait, en effet, moins immédiatement
nécessaire que pour les autres secteurs.
Sur la question du troupeau bovin allaitant,
M. Guy Legras
a
souligné que la commission proposait un triplement de la prime
dédiée à ce secteur, encourageant ainsi l'élevage
extensif, pratiqué notamment dans certaines régions
françaises.
M. Daniel Hoeffel
a interrogé le directeur général
sur le bilan de l'utilisation de l'objectif 5b en termes d'efficacité
des procédures de distribution et de pertinence de l'utilisation de ces
crédits.
M. Christian de la Malène
, revenant sur la proposition
communautaire d'une baisse des prix qui ne serait que partiellement
compensée, s'est interrogé sur l'orientation que cette option
donnerait à l'agriculture Européenne. Il a souligné qu'un
des défauts de la PAC avait été de permettre à
chacun de développer la production qu'il souhaitait, sans grande
rationalité.
Mme Janine Bardou
a ensuite abordé le sujet de la politique de la
montagne, dont elle a regretté qu'elle ne soit pas assez présente
dans les propositions agricoles communautaires. Elle a déploré
que la spécificité de ces zones ne soit pas reconnue. Elle a
estimé qu'une véritable politique de la montagne devrait
être mise en place, indépendamment des actions
décidées pour l'ensemble des zones défavorisées.
M. Guy Legras
a indiqué, en ce qui concerne l'objectif 5b, que
" le rapport sur la cohésion ", présenté
récemment par la Commission Européenne, avait montré que
l'utilisation de ces fonds communautaires avait contribué à
créer 500.000 emplois, et que l'évaluation programme par
programme des crédits de cet objectif était actuellement en cours
à la Commission. S'agissant de la politique de développement
rural proposée par " Agenda 2000 ", elle ne sera plus
abondée, comme c'était le cas pour l'objectif 5b, par le FEDER,
mais par le FEOGA-garantie. Faisant valoir que dans l'optique de la Commission,
les crédits dévolus au développement rural avaient
vocation à s'accroître, il a estimé que la réforme
proposée serait bénéfique et permettrait de retrouver une
plus grande souplesse dans l'utilisation des fonds structurels.
En ce qui concerne la baisse des prix, il a souligné que la proposition
actuelle de la Commission différait de la réforme mise en oeuvre
en 1992, puisque la baisse des prix s'était accompagnée à
cette époque d'un gel des terres qui n'est plus envisagé
actuellement. Au contraire, a-t-il indiqué, la réforme actuelle
vise à développer les exportations Européennes sur le
marché mondial, certaines estimations américaines des
conséquences d'" Agenda 2000 " montrant d'ailleurs que, dans
cette hypothèse, la Communauté serait dans dix ans le premier
exportateur mondial de blé.
A propos de la nouvelle orientation, plus axée sur le marché, de
la politique agricole commune, il a considéré qu'il s'agissait
d'un retour à un fondement du marché commun : la
spécialisation.
S'agissant de la politique de la montagne, il a fait valoir que le commissaire
Européen chargé de l'agriculture y était très
attentif, et que dans " Agenda 2000 ", la Commission
Européenne proposait une augmentation de 2 % des quotas laitiers,
réservée pour moitié aux zones de montagne, ce qui
représentait pour ces zones un accroissement de 10 % de leur
production laitière.
M. Louis Althapé
a rappelé les difficultés qu'il
rencontrait, en tant que président de l'association Européenne
des élus de la montagne, pour faire reconnaître au niveau
communautaire la spécificité de l'agriculture de montagne, le
terme de " montagne " n'apparaissant même pas dans les
propositions relatives au futur objectif 2.
M. Charles Revet
, soulignant le rôle essentiel de l'agriculture et
de l'industrie agroalimentaire dans l'économie française, et
notamment dans sa balance commerciale, s'est interrogé sur
l'opportunité d'une limitation de la production. Revenant sur
l'élargissement futur de l'Union Européenne aux pays d'Europe
centrale, il a interrogé le directeur général sur la
possibilité de financer cet élargissement et de compenser en
même temps la perte de revenus liée à la baisse des prix
pour les agriculteurs Européens. Evoquant l'engouement des consommateurs
pour les produits naturels et les productions de qualité, il a
souhaité connaître l'avenir réservé par la
Commission à ce type de produits.
M. Alain Pluchet
a émis des réserves sur les
prévisions de reconstitution, dans un futur proche, de stocks de
céréales en Europe, indiquant que la consommation mondiale de
céréales avait atteint le volume record de 600 millions de
tonnes pour la première fois en 1997, malgré des
prévisions plus pessimistes. Il a ensuite souhaité une meilleure
adéquation entre le montant de l'aide compensatoire alloué aux
agriculteurs Européens et le niveau réel des prix mondiaux,
regrettant qu'il n'ait pas été tenu compte de ces derniers pour
fixer l'aide en cause.
A ce sujet,
M. Jean François-Poncet, président
, a
rappelé que les propositions de la Commission ne prévoyaient
qu'une compensation partielle des baisses des prix devant intervenir,
contrairement à la réforme de 1992.
M. Hilaire Flandre
s'est inscrit en faux contre la vision optimiste
d'une réussite totale de la réforme de la PAC de 1992, cette
dernière ayant en réalité entraîné une
certaine réduction du nombre d'agriculteurs ainsi que des pertes de
revenus.
Revenant sur l'argument d'une nécessité de la réforme de
la PAC en vue d'utiliser les crédits que la Commission était
actuellement prête à consentir pour assurer la bonne
réalisation de cette réforme, il a tenu à rappeler
qu'au-delà des crédits budgétaires, le marché
était, lui aussi, à même de rémunérer
l'agriculture. Abordant le sujet des produits de substitution des
céréales pour l'alimentation animale, il s'est interrogé
sur l'opportunité du maintien d'un régime spécifique
-qu'il a jugé excessivement favorable- pour certains pays tiers, dont
les Etats-Unis. Evoquant enfin le système Européen de soutien du
revenu agricole, il a souhaité une simplification des aides actuelles. A
cet égard, l'instauration d'une prime unique à l'hectare
remplaçant les divers systèmes en vigueur lui est apparue plus
compréhensible et plus adaptée à la nécessaire
rémunération de la fonction d'aménagement du territoire de
l'agriculture.
Mme Marie-Claude Beaudeau
a interrogé le directeur
général sur la formation des prix mondiaux agricoles, sur
l'existence d'éventuelles études comparatives des
différents systèmes mondiaux de soutien à l'agriculture,
ainsi que sur le nombre d'exploitations Européennes menacées de
disparition.
En réponse à ces questions,
M. Guy Legras
a indiqué
que :
- la Commission Européenne ne cherche en aucun cas à limiter
la production agricole. Elle est au contraire décidée à
faire le pari d'une croissance des marchés mondiaux et à en
saisir l'opportunité. Cette orientation est très
différente de celle retenue les années passées ;
- l'élargissement de l'Union Européenne ne devrait pas
s'accompagner d'un versement des aides compensatoires aux nouveaux
adhérents, puisque ces derniers n'auront pas eu à subir,
-n'étant pas encore partie prenante à la PAC-, la baisse des prix
proposée par " Agenda 2000 ". En conséquence, le
coût de cet élargissement n'hypothéquera pas le versement
des aides compensatoires ;
- pour les perspectives de reconstitution de stocks de
céréales en Europe, les estimations d'une tendance actuelle
à l'accroissement de la production ne sont pas, dans l'ensemble,
contestées. La réforme de la PAC proposée par la
Commission préserve, en théorie, l'outil de maîtrise de
l'offre qu'est la jachère, même si le taux proposé de gel
obligatoire des terres est nul ;
- il n'est pas possible techniquement d'ajuster finement le montant de
l'aide compensatrice à la baisse des prix au niveau réel des
cours mondiaux. En effet, il existe des écarts de prix pour un
même produit, sur les différents marchés, alors que le
niveau d'aide est identique dans toute la Communauté ;
- le régime d'importation du beurre néo-zélandais a
été défini par le traité d'adhésion de la
Grande-Bretagne à la Communauté et figure aux accords du GATT ;
la marge de manoeuvre en la matière est donc réduite ;
- la question des produits de substitution des céréales a
déjà été l'objet de vives discussions avec les
partenaires commerciaux de l'Europe, qui n'ont pu aboutir ;
- le mécanisme de fixation du " prix mondial " varie en
fonction des productions : pour les céréales, le prix
mondial est celui qui est fixé sur le marché de Chicago ou de
Kansas City ; la réalité est différente pour le lait
et la viande. Pour le calcul des restitutions à l'exportation, dans le
secteur de la viande, par exemple, la Commission se base sur le prix
américain ;
- sur la diminution du nombre des exploitations agricoles en Europe, la
Commission dispose des chiffres de l'Office statistique Européen, qui
montrent un ralentissement de ce phénomène depuis la
réforme de 1992 ; toutefois, les informations apportées par
certains Etats membres contredisant cette analyse, ces chiffres sont
actuellement en cours de vérification. La politique de
développement rural proposée par la Commission vise à
infléchir cette tendance.
M. Désiré Debavelaere
a souligné les faiblesses de
la politique Européenne d'exportation des céréales
menée l'année précédente, estimant que si la
variable d'ajustement des erreurs de commercialisation était le gel des
terres, la sanction frappait alors d'autres personnes que les responsables des
décisions incriminées.
Evoquant la gestion du marché du sucre par le fonds d'intervention et de
régularisation du marché du sucre (FIRS), il a souhaité
qu'un système équivalent soit instauré pour les
céréales.
Enfin, il s'est interrogé sur l'adhésion que recevait de la part
des Etats membres la volonté exportatrice de l'agriculture
Européenne.
M. Marcel Deneux
a évoqué le souhait allemand de
modérer la contribution de ce pays au budget communautaire.
M. Philippe François
a considéré que le
gouvernement américain octroyait une subvention -certes indirecte-
à l'agriculture par le biais de crédits importants alloués
à l'aide alimentaire intérieure. Il a décrit le
système, en vigueur outre-Atlantique, d'une assurance du revenu agricole
contractée auprès d'une compagnie privée d'assurance
-financée partiellement par l'Etat- permettant une indemnisation, en
deçà d'un certain prix de vente.
M. Guy Legras
a indiqué que pour la gestion des
exportations céréalières communautaires, la campagne
passée avait été difficile, en particulier pour l'orge.
S'agissant du blé fourrager, du maïs et de l'orge, a-t-il
ajouté, les pays d'ex-Europe de l'Est ont perturbé les cours du
marché des céréales par des ventes à très
bas prix.
Il a affirmé que la vocation exportatrice de l'Europe était un
axe central des propositions actuelles de la Commission.
Estimant que la question de la contribution allemande au budget communautaire
(qui atteint 30 % du total) ne pourrait être éludée
trop longtemps, il a souhaité qu'elle soit abordée dans le cadre
de négociations budgétaires globales et non uniquement dans le
cadre des négociations agricoles.
Il a considéré que le système décrit d'assurance du
revenu agricole, d'inspiration canadienne, relevait d'une idée à
approfondir, à la fois peu coûteuse et compatible avec les accords
du GATT. Toutefois, elle ne semble pas encore bien acceptée du monde
agricole.
Revenant sur la question de la contribution allemande,
M. Jean
François-Poncet, président
, a indiqué avoir
participé à des entretiens récents, en Allemagne, montrant
qu'une prise de conscience s'amorçait dans ce pays quant à
l'impossibilité d'aboutir à la fois à
l'élargissement de l'Europe, souhaité outre-Rhin, au maintien
d'une limitation des ressources communautaires à 1,27 % du produit
intérieur brut Européen, et à une diminution de la
participation allemande à ce budget.
Enfin, il a estimé qu'une généralisation du système
des quotas soulèverait de réelles difficultés pour la
politique agricole commune.
ANNEXE N° 5 -
COMPTE RENDU DE
L'AUDITION DE
M. LOUIS LE PENSEC, MINSITRE DE L'AGRICULTURE ET DE
LA PÊCHE
LE JEUDI 14 MAI 1998
Lors de
sa réunion du jeudi 14 mai 1998, la commission a
procédé
à
l'audition de M. Louis
Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
sur la
réforme de la politique agricole commune
Abordant la réforme de la politique agricole commune (PAC),
M. Jean François-Poncet, président,
s'est
inquiété de la concordance des échéances
respectives du vote du projet de loi d'orientation agricole et de l'adoption de
la réforme de la PAC. Il s'est également demandé s'il
était pertinent d'ouvrir des négociations dans le cadre de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dans la mesure où le
Congrès n'avait pas voté la procédure dite du
" fast-track ". Par ailleurs, les conséquences
financières de l'élargissement de l'Union Européenne aux
premiers pays d'Europe centrale et orientale ne devant vraisemblablement pas
intervenir avant 2005, il a fait valoir qu'il ne semblait pas nécessaire
de réformer la PAC dans la précipitation.
M. Jean François-Poncet, président
, a également
tenu à réaffirmer son attachement à la vocation
exportatrice de la France en matière agricole. Il s'est ému de
l'attitude de la France qui, dans le processus de réforme de la PAC, ne
semblait pas proposer de projet alternatif, alors qu'elle avait
été l'instigatrice de la mise en place de la PAC à la fin
des années 50.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
,
a présenté la position du Gouvernement sur ce dossier et
l'état de la négociation après le Conseil agricole du 31
mars et avant celui des 25 et 26 mai. Il a souligné sa volonté
d'associer la représentation parlementaire à la réflexion
sur un sujet d'une telle importance.
Estimant qu'aucune décision majeure ne devrait intervenir avant la fin
de l'année 1998, le ministre a affirmé que, d'ici là, il
s'emploierait à convaincre nos partenaires du bien-fondé des
propositions françaises.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche,
a rappelé que la position française, présentée
à Bruxelles le 31 mars dernier, était celle du Premier ministre
et du Président de la République. Il a affirmé que cette
position visait à préserver la puissance agricole de la France et
les intérêts de ses agriculteurs. Selon lui, les
conséquences prévisibles de la nouvelle PAC, telle que
proposée par la Commission (notamment la baisse des revenus des
agriculteurs, la réduction des emplois dans l'agriculture et
l'augmentation de la part des aides dans le revenu des agriculteurs),
étaient inacceptables en l'état.
Le ministre a considéré que la compensation de la baisse des prix
garantis par des aides accrues, prévue par la Commission, constituait un
" marché de dupes ", la pérennité de ces aides
n'étant pas assurée. Il a ainsi rappelé que trois facteurs
contribuaient à la faible légitimité de ce
mécanisme d'aides liées à la production : le
scepticisme de l'opinion à leur égard, les contraintes
budgétaires croissantes et la perspective des négociations
commerciales internationales qui débuteront en l'an 2000 dans le cadre
de l'OMC.
Le ministre a également souligné que les Etats-Unis avaient
commencé à transférer une partie de leurs aides de la
" boîte bleue " vers la " boîte verte ",
regroupant les soutiens découplés de la production, de sorte
qu'il importait, selon lui, que l'Union Européenne engage, de la
même façon, un découplage progressif des aides par rapport
à la production, afin de se trouver dans une situation de
négociation plus favorable face aux Américains.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
, a
fait valoir qu'un tel découplage permettrait de soutenir toutes les
activités des agriculteurs, non seulement celle relative à la
production mais aussi celles touchant à la préservation de
l'environnement, à l'occupation de l'espace rural et à la
qualité des produits. Dans cette perspective, il a jugé
nécessaire de prendre en considération la question du financement
de la politique rurale communautaire et d'être particulièrement
attentif aux critères d'application structurels. Il a
considéré que le découplage des aides qu'il
préconisait, assorti de garde-fous visant à éviter les
distorsions de concurrence et toute atteinte à l'unité de la PAC,
devrait permettre de conférer à celle-ci plus de
flexibilité, tout en écartant le risque d'une renationalisation.
S'agissant de la diminution des prix garantis, le ministre a souligné
que l'ajustement du niveau des prix ne devait se faire que là où
cela était souhaitable, par exemple pour le blé.
Abordant la question de la réforme des organisations communes de
marché méditerranéennes -principalement l'huile d'olive et
le vin-, il a réaffirmé sa détermination à
défendre les intérêts des agriculteurs.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
, a
rappelé les autres dossiers qui, avec la réforme de la PAC,
constituent l'Agenda 2000 :
- la réforme des fonds structurels ;
- les perspectives financières de l'Union Européenne ; il a,
à cet égard, rappelé son attachement à la
préservation de la ligne directrice agricole ;
- la réforme institutionnelle, qui conditionne le bon fonctionnement de
l'Union.
En réponse aux préoccupations de
M. Jean
François-Poncet, président, M. Louis Le Pensec, ministre de
l'agriculture et de la pêche
, a indiqué que le projet de loi
d'orientation agricole, actuellement devant le Conseil économique et
social, devrait être présenté en Conseil des ministres
à la mi-juin et faire donc l'objet d'un examen par le Parlement à
la session parlementaire d'automne. Il a estimé que les positions du
Gouvernement concernant le projet de loi d'orientation agricole et la
réforme de la PAC étaient concordantes : à titre
d'exemple, le contrat territorial d'exploitation pourrait s'inscrire dans la
réforme de la PAC, grâce au mécanisme de la modulation des
aides. A cet égard, il a souligné le rôle moteur
joué par la France dans la définition d'une nouvelle politique
agricole, les autres Etats membres ayant manifesté un grand
intérêt, par exemple, pour le contrat territorial d'exploitation.
A propos de la vocation exportatrice de la France,
M. Louis Le Pensec,
ministre de l'agriculture et de la pêche
, a rappelé que si la
France avait effectivement une vocation à exporter sur les
marchés extérieurs, une même logique d'alignement des prix
garantis sur les prix mondiaux n'était pas applicable à tous les
produits. Il a ajouté que la France devait se tourner vers des produits
à plus forte valeur ajoutée et ne pas se contenter de produire
des matières premières à bas prix. Sur la question de
l'élargissement, il a estimé, enfin, qu'il fallait que la
Commission évalue le coût de l'élargissement et qu'elle ne
remette pas en cause la ligne directrice agricole.
Un large débat s'est alors instauré.
M. Jean François-Poncet, président
, a estimé que
s'il convenait de se préparer aux futures négociations
commerciales internationales, notamment au moyen d'une intégration
accrue des aides communautaires dans la " boîte verte " de
l'organisation mondiale du commerce (OMC), à son sens, l'Europe ne
devait pas entamer de négociations tant que le Président
américain n'aurait pas obtenu du Congrès l'autorisation
d'utiliser la procédure du " fast track ", qui exclut la
possibilité pour le Parlement américain de modifier l'accord
final au moment de sa ratification.
Puis, faisant état de ce qu'il avait constaté " sur le
terrain ", il a déploré la rigueur excessive et le
pointillisme avec lesquels les administrations françaises, en
particulier celle des finances, appliquaient les prescriptions
Européennes. Il a opposé à cette rigueur -très mal
ressentie, à juste titre, par les agriculteurs- à la souplesse
dont faisaient montre, en la matière, les administrations d'autres Etats
membres.
M. Philippe François
,
président de la mission
d'information sur l'avenir de la politique agricole commune (PAC),
a
d'abord rappelé que les réflexions de la mission portaient
essentiellement sur la politique agricole commune, sans interférer avec
la problématique Européenne.
Évoquant les récents déplacements dans des pays
étrangers de la mission sénatoriale,
M. Philippe
François
a fait état des interrogations qui lui paraissaient
s'exprimer quant à l'opportunité d'une modification de la PAC
avant la réouverture du cycle de négociations agricoles
internationales. Il s'est inquiété de ce que deux tendances
contradictoires semblaient se manifester en Allemagne : l'une,
incarnée par le ministère fédéral de l'agriculture,
étant résolument tournée vers la construction
Européenne, l'autre -incarnée par d'autres ministères-
étant plutôt en faveur d'un rapprochement avec les Etats-Unis. Il
a, enfin, exprimé ses inquiétudes quant à la proposition
Européenne d'un accroissement de la subsidiarité en
matière agricole, rappelant que la PAC avait été
instituée autour des principes de préférence communautaire
et de gestion communautaire, et qu'une décentralisation trop
poussée de sa mise en oeuvre risquait, à son sens, de se traduire
par une " renationalisation " de cette politique commune, qui
remettrait ainsi en cause un des pivots essentiels de la construction
communautaire.
M. Marcel Deneux
, revenant sur la perspective de la discussion prochaine
du projet de loi d'orientation agricole, a souhaité que ce texte soit
adopté rapidement, afin qu'il consolide la position française
lors des négociations communautaires à venir. Il a fait part de
ses doutes quant à l'urgence d'une réforme de la PAC, l'argument
de l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale ne semblant
pas suffisant pour la motiver dans l'immédiat. Abordant le
problème de la dépendance de l'Union Européenne en
matière de protéines végétales, il a jugé
qu'" Agenda 2000 " ne proposait pas de solution remédiant
au déficit protéique communautaire. Il a ensuite souhaité
que soient remis en cause certains régimes d'importation, à son
sens excessivement favorables, accordés à des pays-tiers, comme
par exemple le contingent de 74.000 tonnes de beurre en faveur de la
Nouvelle Zélande.
Estimant que le Gouvernement français avait récemment
donné l'impression d'être opposé à l'ensemble des
propositions communautaires,
M. Marcel Deneux
a souhaité que
cette position évolue dans un sens plus constructif. Au sujet du risque
d'une " renationalisation " de la PAC, il a craint que, les Allemands
n'acceptant plus de maintenir leur contribution au budget communautaire au
niveau actuel, la latitude accrue accordée aux Etats ne soit les
prémisses d'un démantèlement futur de la PAC.
M. Marcel Deneux
a ensuite souhaité que la politique agricole
commune soit porteuse d'un véritable projet pour l'agriculture. Dans la
perspective des futures négociations à l'organisation mondiale du
commerce (OMC), il a prôné une attitude Européenne plus
offensive qu'à l'accoutumée. Il a constaté que les
consommateurs allemands consacraient 18 % de leur revenu à la
consommation alimentaire, contre 16 % en France, cette différence
démontrant, à son sens, l'existence d'une marge de manoeuvre pour
l'agriculture.
Abordant le sujet du plafonnement des aides,
M. Marcel Deneux
a
estimé que les aspects fiscaux devaient être
intégrés au projet de loi d'orientation agricole. Il a
rappelé que certaines distorsions fiscales persistaient,
évoquant, par exemple, la situation des agriculteurs allemands
imposés sous le régime du forfait, à l'origine de
60 % de la production agricole allemande, exonérés de la
rétrocession de la taxe sur la valeur ajoutée sur les produits
agricoles.
Au sujet de la diminution des prix proposée pour le blé, il a
jugé que son principal intérêt résidait dans ses
conséquences, à la baisse, sur le coût de l'alimentation du
bétail, plus que dans les perspectives d'exportation accrues qu'elle
offrait. Il a considéré que la réduction du prix de la
viande poserait des problèmes importants et il a souhaité que le
ministre aborde ce sujet de façon plus approfondie.
M. Jean-Paul Emorine
a tout d'abord souligné que si des
désaccords importants avaient été exprimés contre
les propositions de la Commission Européenne, aucune alternative n'avait
été réellement envisagée à la baisse des
prix. Il a douté de la pérennité du financement des
actuelles propositions de réforme de la politique agricole commune.
Abordant le sujet des primes au secteur de la viande bovine, il a
souhaité qu'au lieu des différents dispositifs actuels (prime au
maintien du troupeau allaitant, prime spéciale aux bovins mâles..)
soit mis en place un système unitaire, indexé sur l'unité
de gros bétail, évitant ainsi la concurrence entre les
différentes filières bovines. Il a exprimé son souci d'une
maîtrise accrue de la production de viande bovine, dont il a
considéré qu'elle ne s'opposerait pas à la volonté
exportatrice Européenne, cette production étant destinée,
dans sa très grande majorité, à la consommation
intérieure.
En ce qui concerne les préretraites, il a souhaité que le projet
de loi d'orientation agricole permette d'en faire un véritable outil au
service de l'installation des jeunes, constatant que l'application du
système de préretraites actuel, financé en partie par
l'Europe, avait conduit à la disparition de nombre d'exploitations.
Mme Janine Bardou
a, ensuite, fait part de ses préoccupations
quant aux conséquences négatives que pourraient avoir, sur les
zones de montagne, les propositions d'" Agenda 2000 ". Elle a
estimé que l'intégration des zones de montagne dans la
catégorie plus vaste des zones défavorisées revenait
à leur banalisation. Elle a demandé au ministre quelles mesures
le Gouvernement comptait prendre pour reconnaître les
spécificités des zones de montagne, qui subissaient des handicaps
physiques indéniables et qui devaient à ce titre être
reconnues comme zones d'intérêt communautaire. Estimant que les
propositions communautaires d'une modulation nationale de l'octroi des aides
étaient la seule marge de manoeuvre pour une action en faveur de la
montagne, elle a interrogé le ministre sur la façon dont le
Gouvernement entendait utiliser cette marge.
En réponse aux différents orateurs,
M. Louis Le Pensec,
ministre de l'agriculture et de la pêche
, a tout d'abord
souligné l'attention qu'il porterait aux conclusions des travaux de la
mission d'information sur l'avenir de la PAC, estimant indispensable
l'enrichissement mutuel des points de vue sur cette question, dont il a
rappelé qu'elle faisait par ailleurs l'objet d'une concertation
étroite avec les organisations professionnelles, systématiquement
consultées avant chaque Conseil des ministres Européen.
Le ministre a affirmé que la PAC était la première
politique commune Européenne et qu'elle devait le demeurer. Il a
refusé toute " renationalisation ", mais il a souhaité
néanmoins l'exercice d'une certaine subsidiarité, thème
central de la récente rencontre franco-allemande d'Avignon, qui serait
également abordé au prochain sommet Européen de Cardiff.
Il a rappelé que la subsidiarité était déjà
à l'oeuvre au sein de la politique agricole commune, et que la
perspective d'élargissement ne faisait qu'accroître ce besoin de
flexibilité. Il s'est toutefois déclaré soucieux
d'éviter l'écueil d'un basculement de la PAC dans une logique de
nationalisation, considérant qu'il fallait, en la matière, se
montrer vigilant.
Sur la position allemande,
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et
de la pêche
, a estimé que, contrairement à la France,
dont la position communautaire faisait, au préalable, l'objet d'un
arbitrage au sein du comité interministériel pour les questions
de coopération économique Européenne, le Gouvernement
fédéral ne procédait pas à une telle harmonisation
préalable des positions des différents ministères, qui
pouvaient dès lors différer, comme c'était le cas pour la
PAC.
Le ministre a affirmé que la coopération franco-allemande
était une priorité pour la construction Européenne. Il a
souhaité qu'elle se développe, indiquant qu'à cet effet
avaient été mis en place des groupes de travail
bilatéraux, chargés d'élaborer une position commune pour
la future négociation.
Répondant à la question posée sur l'absence de volet
fiscal du projet de loi d'orientation agricole,
M. Louis Le Pensec,
ministre de l'agriculture et de la pêche,
a souhaité que cette
question soit abordée dans le cadre de textes ultérieurs au
projet de loi d'orientation agricole.
Quant au calendrier de la négociation de la PAC, le ministre a
affirmé qu'il n'avait en aucun cas l'intention de négocier vite,
mais qu'il comptait bien, au contraire, consacrer à ces importantes
discussions le temps qui leur était nécessaire. Sur l'aspect du
financement du budget communautaire agricole, il a considéré
qu'une discipline budgétaire visant à respecter le cadre
fixé par la ligne directrice agricole était le moyen le plus
adapté de répondre aux inquiétudes allemandes,
l'écrêtement des soldes nets des contributions budgétaires
des différents pays étant à son sens inacceptable.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
, a
affirmé qu'une solution devait être trouvée pour le secteur
des oléo-protéagineux et qu'il s'agissait là d'un point
essentiel de la position française. A ce sujet, il a jugé que
l'attitude du Gouvernement n'était pas seulement négative
puisque, s'il s'était attaché à rappeler, dans un premier
temps, le caractère inacceptable de certaines propositions de la
Commission, il avait ensuite tenu à apporter une contribution plus
positive à l'avancée du débat.
Le ministre a ensuite répondu aux questions relatives à
l'élevage bovin, en estimant que le Conseil informel de New Castle,
consacré, notamment, à ce sujet, n'avait pas permis
d'avancée significative. Il a rappelé son opposition à la
baisse proposée des prix de 30 %. Il a, en outre, souhaité
que les effets de la baisse du prix des céréales,
améliorant la compétitivité des viandes blanches par
rapport aux viandes rouges, soient pris en compte. Il a jugé que la
possibilité d'une intervention devait être maintenue, permettant
une régulation du marché par un dispositif de contrôle de
l'offre. Il a, ensuite, regretté l'abandon de l'incitation à
l'extensification des élevages, la revalorisation de la prime
spéciale aux bovins mâles étant supérieure à
celle de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes. Il a, enfin,
estimé que la proposition de la Commission d'une modulation nationale
devait être étudiée avec beaucoup d'attention. Il a
souhaité une meilleure prise en compte de la nécessité
d'aménager le territoire et de développer les productions de
qualité.
Répondant à la question posée sur les préretraites,
il a confirmé que la loi d'orientation agricole s'attacherait à
mettre en place un dispositif favorisant l'installation des jeunes.
Sur la politique de la montagne,
M. Louis Le Pensec, ministre de
l'agriculture et de la pêche
, rappelant qu'un grand débat sur
ce thème avait eu lieu à l'occasion du salon de l'agriculture, a
indiqué que la France demandait à ce qu'elle soit davantage prise
en compte dans le cadre du nouvel objectif 2 des fonds structurels, autour
de la politique de développement rural, des indemnités
compensatrices des handicaps naturels et de la modulation des aides. Il a
précisé que la politique de la montagne serait une orientation
forte du futur projet de loi d'orientation agricole, les services du
ministère de l'agriculture s'efforçant de trouver des solutions
techniques pour que la modulation proposée par la Commission au titre de
la subsidiarité réponde aux attentes du monde agricole. Il a
déclaré apprécier l'intérêt que portait la
commission des affaires économiques du Sénat à ce
thème, jugeant que les avis et contributions extérieurs lui
seraient utiles.
Évoquant l'avant-projet de loi d'aménagement du territoire,
actuellement soumis par le ministère qui était chargé de
sa rédaction à la concertation interministérielle,
M. Jean François-Poncet, président
, a fait part au
ministre des vives inquiétudes que lui inspirait cet avant-projet.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche
, a
répondu qu'il ne s'agissait encore que d'une phase préalable de
consultation, au cours de laquelle il allait personnellement veiller à
une meilleure prise en compte de la ruralité.
ANNEXE N° 6 -
PROGRAMME DES
DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LE PRÉSIDENT ET LES
RAPPORTEURS
DE LA MISSION D'INFORMATION
I -
DÉPLACEMENTS À L'ÉTRANGER
A. ETATS-UNIS
1. Entretiens avec les représentants français et Européens
aux Etats-Unis
Représentants de l'administration française :
- Son Excellence M. François Bujon de l'Estang, ambassadeur de
France aux Etats-Unis ;
- M. Jean-François Boittin, ministre conseiller pour les affaires
économiques et commerciales ;
- M. Jean-Christophe Paille, conseiller agricole ;
- M. Jean-Michel Poirson, adjoint du conseiller agricole.
Représentant de l'Union Européenne :
- Son Excellence M. Hugo Pamen, représentant de la Commission
Européenne aux Etats-Unis
2. Rencontres avec des représentants américains politiques,
administratifs et professionnels agricoles
Élaboration de la politique agricole américaine, les acteurs
et forces en présence avec les World Perspectives Inc.
- Mme Carole L. Brookins, président and Chief Executive Officer ;
- M. Gary R. Blumenthal, Executive Vice-President and Chief Operating
Officer ;
- M. Gregg Doud, vice-président, information services.
Le point de vue des exploitants agricoles selon l'American Farm Bureau
Federation
M. Richard Newpher, directeur exécutif
Entretien avec M. le sénateur
Pat Roberts
(Republican-Kansas), Membre de la commission de l'agriculture.
JEUDI 2 AVRIL
Le " Fédéral Agriculture Improvement and Refom Act of
1996 " (" FAIR ACT ") - La politique agricole américaine
à l'international - les nouveaux moyens de soutien des revenus agricoles
au U.S. Department of Agriculture
- M. James W. Schroeder, Sous-secrétaire Adjoint pour les
programmes Agricoles et les Relations Internationales à l'USDA,
- M. Joseph W. Glauber, Deputy Chief Economist
- M. Paul Drazek, Conseiller spécial du Secrétaire de
l'Agriculture pour les questions Internationales et Multilatérales
- M. Jeff Wiggins, Bureau des Négociations Multilatérales,
Foreign Agricultural Service
- M. Mark Mulugeta, Risk Management Agency
Le prochain cycle de négociations multilatérales agricoles,
le dialogue transatlantique au U.S. Trade Representative
- M. Jim Murphy, Assistant USTR pour l'Europe
VENDREDI 3 AVRIL
Historique et avenir de la politique agricole américaine au
Congressional Research Service (Département de recherche du
Congrès)
- M. Charles Hanrahan, Senior Specialist in Agricultural Policy et ses
collaborateurs
Entretien avec M. le Sénateur
Richard G. Lugar
(Républicain-Indiana), Président de la Commission de
l'Agriculture du Sénat.
B. ITALIE
Le déplacement à Rome a été effectué les 9
et 10 avril 1998.
1. Entretiens à l'ambassade de France à Rome
- Son Excellence M. Jean-Bernard Mérimée, Ambassadeur de
France en Italie,
- M. René Ghesquière, Ministre Conseiller pour les affaires
économiques et commerciales,
- M. Laboureix, Ministre Conseiller pour les Affaires financières,
- Mme Marie Guittard, Attachée agricole,
- M. Recalde, adjoint à l'attachée agricole.
2. Rencontres avec les représentants du gouvernement italien
- M. Michele Pinto, Ministre des politiques agricoles
- M. Strarace, Conseiller diplomatique au Cabinet de M. Michele Pinto,
- M. de Castro, Conseiller du Président du Conseil, M. Romano Prodi.
- M. Possagno, Dirigeant supérieur au Ministère des
politiques agricoles, Direction générale des politiques
communautaires et internationales.
- M. Cesaretti, Commissaire de l'Institut pour l'étude, la
recherche et l'information sur le marché agricole.
3. Rencontres avec les représentants des organisations
professionnelles
- M. Ettorre Pedroni, vice-président, MM. Maurizio Reale et Paolo
Falcioni, responsables de service, Confederazione Nazionale coltivatori diretti
(COLDIRETTI) ;
- M. Guiseppe Avolio, Président, M. Francesco Serra-Caracciolo,
Responsable des relations internationales, Confederazione italiana agricoltori
(CIA) ;
- M. Agusto Bocchini, Président, M. Tabaccini, Confederazione
generale dell'agricoltura italiana (CONFAGRICOLTURA).
C. REPUBLIQUE FEDERALE D'ALLEMAGNE
Les représentants de la mission d'information se sont rendus à
Bonn les 22 et 23 avril 1998.
1. Entretiens à l'Ambassade de France à Bonn
- Son Excellence M. François Scheer, ambassadeur de France en
Allemagne,
- M. Philippe Gros, chef du service de l'expansion économique,
- M. Jean-Paul Rousseau, attaché agricole adjoint à
l'ambassade de France à Bonn.
2. Rencontres avec des représentants allemands politiques,
administratifs et professionnels agricoles
MERCREDI 22 AVRIL 1998
- Entretien avec M. Franz-Josef Feiter, secrétaire d'Etat à
l'agriculture,
- Entretien avec M. Adalbert Kierle, Secrétaire
général du Deutscher Banerverband,
- Entretiens successifs au Bundestag avec les porte-parole agricoles des
différents groupes parlementaires représentés au Bundestag
(CDU/CSU, FDP, SPD, Grünen, PDS).
JEUDI 23 AVRIL 1998
- Entretien avec le M. Arwed Blomeyer de la représentation du Land
de Saxe Anhalt,
- Entretien au Ministère des Affaires étrangères avec
M. Von Ploetz, Secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères.
D. COMMISSION EUROPÉENNE
Le président et les rapporteurs se sont rendus à la Commission
Européenne, à Bruxelles, à deux reprises :
- le 17 avril, pour un entretien avec M. Jacques Santer, Président
de la Commission Européenne,
- le 28 avril, pour un entretien avec :
- M. Franz Fischler, commissaire Européen chargé de
l'agriculture,
- M. Jean-Luc Demarty, Directeur Général du FEOGA,
- M. José Manuel Silva Rodriguez, Directeur général
adjoint chargé des structures agricoles
E. POLOGNE
Un déplacement en Pologne a été effectué le 18 mai
1998.
1. Entretiens à l'ambassade de France à Varsovie
- Son Excellence M. Benoît d'Aboville, ambassadeur de France en
Pologne,
- M. Jean-Pierre Philippe, conseiller commercial,
- M. Jean Gault, attaché agricole.
2. Entretiens sur l'agriculture polonaise face au défi de
l'élargissement
-
La politique agricole polonaise
: M. Jerzy Plewa,
Sous-Secrétaire d'Etat à l'intégration Européenne
au ministère de l'agriculture et de l'économie alimentaire,
-
Les commissions de l'agriculture du Parlement
:
M. Jósef Fraczek, président de la Commission de l'agriculture et
du Développement rural du Sénat,
M. Jerzy Pilarczyk (ancien secrétaire d'Etat au ministère de
l'Agriculture)
M. Jan Wyrowinski, adjoints du président de la Commission d'Agriculture
de la Diète.
M. le sous-secrétaire d'Etat à l'intégration
Européenne au ministère de l'agriculture,
M. Jerzy Plewa,
M. Fraczek, sénateur,
MM. Pilarczyk, Wyrowinski et Jagielinski (ancien vice-Premier ministre et
ministre de l'agriculture), députés.
- Les industriels :
Mme Grouss, société Soufflet (négoce de grains),
la société Polser (Besnier en Pologne) directeur
M. Jean-Marie Cerufi,
la Société Pomimpex, importatrice de fruits et
légumes, M. Rémi Guérin.
- Les questions sanitaires :
Mme Pascale Parisot, docteur vétérinaire, chargée
auprès de l'attaché agricole des questions d'hygiène
alimentaire, santé animale, protection des végétaux et de
la qualité.
F. ROYAUME-UNI
Les représentants de la mission d'information se sont rendus à
Londres le 27 mai 1998.
1/ Entretiens à l'Ambassade de France :
-
Son Excellence M. Jean Guéguinou, Ambassadeur de France ;
- M. Jean-Jacques Bénézit, attaché agricole ;
-
M. Olivier Louis, Ministre Conseiller pour les Affaires
économiques et commerciales.
2/ Rencontres avec des représentants anglais politiques,
administratifs et professionnels agricoles :
- M. Nick Way, Chief Political Advisor et Mme Marie-Hélène
Baneth,
- Mme Kate Timms, Deputy Secretary, Agricultural, Crops et Commodities
Directorate, Ministry of Agriculture, Fisheries et Food ;
-
M. Ben Gill, Président, National Farmers'Union.
Une délégation de la mission sénatoriale s'est en outre
rendue en Espagne en février 1998 afin d'étudier plus
précisément le secteur des fruits et légumes.
II - DÉPLACEMENTS EN FRANCE
A. SAÔNE ET LOIRE, LE 11 MAI 1998
Le président et les rapporteurs se sont rendus à Mâcon
à l'invitation du Conseil Général du Département :
ils ont eu une journée de travail en présence de :
- M. René Beaumont, Président du Conseil
Général ;
- M. Xavier La Torre, Secrétaire général de la
Préfecture ;
- M. Jean-Patrick Courtois, Sénateur ;
- M. André Pourny, Sénateur ;
- M. Christian Bajard, Président du CDJA ;
- M. Daniel Berthenet, Président du Centre de Gestion de
l'économie rurale ;
- Mme Gisèle Cornier, Présidente de la Chambre
départementale d'agriculture ;
- M. Christian Decerle, Président FDSEA ;
- M. Alain Delaye, Directeur départemental de l'Agriculture et de
la Forêt ;
- M. Louis Boutard, Directeur du Centre de gestion de l'économie
rurale ;
- M. Jacques Limoges, Directeur Général des Services
Départementaux ;
- Mme Sophie-Anne Morrin, Chargée de mission auprès du
président du Conseil Général.
- M. Maurice Vouillon, Directeur Général Adjoint des
Services Départementaux.
B. LES GRANDS MOULINS DE PARIS, À GENNEVILLIERS, LE 26 MAI 1998
Le Président et les rapporteurs se sont rendus à Gennevilliers
visiter le site des Grands Moulins de Paris. Ils y ont été
accueillis par M. Hubert François, Directeur de la production.
ANNEXE N° 7 -
L'AGRICULTURE ET L'UNION
EUROPÉENNE
I. L'AGRICULTURE, UN PIVOT ESSENTIEL DE LA CONSTRUCTION EUROPEENNE
L'histoire de l'agriculture Européenne s'identifie à celle de la construction communautaire, tant les deux destins sont liés.
A. UNE VOCATION AGRICOLE AFFIRMÉE PAR LES TEXTES FONDATEURS EUROPÉENS
1. Une volonté exprimée dès le début de la constitution de l'Europe
Dix
articles du traité de Rome concernent l'agriculture, les passages
essentiels figurant aux articles 39 à 42.
L'article 39 a défini les objectifs de la politique agricole
commune et a affirmé la spécificité de l'agriculture dans
l'économie et la société des Etats-membres.
•
La politique agricole commune a pour but :
a) d'accroître la
productivité de l'agriculture
en
développant le progrès technique, en assurant le
développement rationnel de la production agricole ainsi qu'un emploi
optimum des facteurs de production, notamment de la
main-d'oeuvre.
b) d'assurer ainsi un niveau de vie équitable à la population
agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui
travaillent dans l'agriculture,
c) de stabiliser les marchés,
d) de garantir la sécurité des approvisionnements,
e) d'assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs.
Dans l'élaboration de la politique agricole commune et des
méthodes spéciales qu'elle peut impliquer, il sera tenu
compte :
a) du caractère particulier de l'activité agricole,
découlant de la structure sociale de l'agriculture et des
disparités structurelles et naturelles entre les diverses régions
agricoles.
b) de la nécessité d'opérer graduellement les ajustements
opportuns,
c) du fait que, dans les Etats membres, l'agriculture constitue un secteur
intimement lié à l'ensemble de l'économie.
2. Trois principes fondamentaux
Mise en
place avec l'adoption des premiers règlements Européens en 1962,
la PAC s'est structurée autour de 3 principes :
-
la préférence communautaire
, destinée
à inciter à la consommation, en priorité, des produits
agricoles et alimentaires Européens dans la communauté, cette
préférence a été mise en oeuvre par une protection
extérieure aux frontières de la communauté ;
-
la solidarité financière entre les Etats-membres
,
grâce à un budget agricole commun, le fonds Européen de
garantie et d'orientation agricoles (FEOGA) ;
-
l'unité des prix et des marchés
. Première
politique commune, la PAC a longtemps été la seule à
fonctionner réellement.
3. Des objectifs peu à peu élargis
Le
développement rural
:
C'est avec l'Acte unique Européen que l'objectif du renforcement de la
cohésion économique et sociale de l'Europe devient prioritaire
dans la construction communautaire. Dans ce but, l'Europe se dote de
" fonds structurels ". Trois " objectifs " sur 6
intéressent l'agriculture (objectif 1 : régions en retard de
développement ; objectif 5a : adaptation des structures
agricoles ; objectif 5b développement des zones rurales).
L'environnement :
L'environnement a progressivement été affirmé, depuis les
années 70, comme une exigence essentielle de l'action communautaire,
consacrée par le traité sur l'Union Européenne en 1992.
Le traité de Maastrich indique que " l'intégration des
exigences en matière de protection de l'environnement " est une
nécessité " dans la définition et la mise en oeuvre
des autres politiques de la Communauté ".
B. UNE PLACE TOUJOURS IMPORTANTE DANS L'ACTION COMMUNAUTAIRE
1. L'agriculture, une composante toujours essentielle de l'identité Européenne
L'UNION EUROPEENNE AUJOURD'HUI
15
pays,
372,9 millions d'habitants (Etats-Unis 260),
1er exportateur mondial (20 % de part de marché contre
16,5 % pour les Etats-Unis), 2ème exportateur de produits agricoles
et alimentaires ;
2ème importateur mondial (19 % des importations contre
20,5 % pour les Etats-Unis), 1er exportateur mondial des produits
agricoles et alimentaires.
2. Un poids conséquent dans le budget communautaire
Les dépenses du FEOGA-garantie représentent aujourd'hui encore plus de la moitié du budget communautaire (soit environ 273 milliards de francs en 1997, sur un total de 544 milliards), malgré la montée en puissance de nouvelles compétences et politiques Européennes. Ce ratio reste important, malgré la décroissance au fil de l'approfondissement de la construction Européenne.
PART DU FEOGA-GARANTIE DANS LE BUDGET COMMUNAUTAIRE
1979 |
1987 |
1997 |
70 % |
63 % |
50,1 % |
Source : Commission Européenne
En outre, les actions structurelles, dont certaines sont destinées
à l'agriculture, représentent environ le tiers du budget
communautaire (32,4 %, soit 176 milliards de francs en
1997).
II. L'AGRICULTURE EUROPÉENNE EN CHIFFRES
A. LES EXPLOITATIONS AGRICOLES EN EUROPE
Le
nombre d'exploitations
dans l'Union Européenne à quinze
s'élève en 1995 à
7,3 millions
. Il baisse
annuellement depuis 1990 de près de 3 %. Ces exploitations
recouvrent
une superficie de 120 millions d'hectares
, pratiquement
stable durant la même période.
La taille moyenne des exploitations
augmente de manière continue
depuis vingt cinq ans : de 10 hectares pour neuf Etats-membres en 1970, elle
passe à 15 hectares en 1990 dans l'Europe des Douze et à
17,5 hectares dans l'Union Européenne à 15 de 1995.
Ces chiffres masquent toutefois des disparités importantes
: aux
immenses exploitations du Royaume-Uni, dépassant même
150 hectares en Ecosse, s'opposent celles inférieures à
10 hectares du Portugal, de l'Italie et de la Grèce, tandis que le
Danemark, la France et le Luxembourg, avec 40 hectares environ, se situent
largement au-dessus de la moyenne Européenne.
Les exploitations de 100 hectares ou plus occupent 40 % de la
surface agricole utile (SAU)
dans l'Europe des Quinze en 1995, alors
qu'elles ne représentent que 3 % en nombre d'exploitations. Cette
concentration est encore plus forte au Royaume-Uni et dans la péninsule
ibérique.
La main-d'oeuvre totale
de l'Union Européenne en 1995 approche
les 7,3 millions d'Unités de Travail Annuel (une UTA correspond au
travail d'une personne à temps plein pendant une année
entière).
Elle accuse depuis 1990 un repli moyen de 3 % par année. Cette
baisse atteint 6 % au Portugal et presque 9 % dans l'Allemagne
unifiée depuis 1990. Seul le Danemark observe la tendance inverse, avec
1,6 % de hausse moyenne annuelle.
NOMBRE D'EXPLOITATIONS
|
Nombre
d'exploitations
|
Superficie agricole
utilisée
|
SAU
par exploitation
|
Main-d'oeuvre totale
|
Belgique
|
71,0
|
1 337,4
|
18,8
|
78,7
|
Source : EUROSTAT, Sources Nationales
B. LA PRODUCTION AGRICOLE DANS L'UNION EUROPÉENNE
Avec
près de 47 milliards d'Ecus, la production agricole de la
France
représente en 1996 plus du cinquième de celle de
l'Union Européenne.
La France, l'Italie et l'Allemagne, qui représente près de
53 % de la population des Quinze, produisent à elles seules la
même part de la production finale Européenne. Après
plusieurs années de baisse en valeur, l'Italie enregistre une notable
hausse (+14 %), reprenant ainsi la deuxième place à
l'Allemagne. Autres hausses significatives en valeur : celles de l'Espagne
(+19 %), de la Suède (+11 %), du Portugal (+9 %).
LA
PRODUCTION AGRICOLE FINALE DE L'UNION EUROPEENNE
(en %)
Sources : AGRESTE, EUROSTAT
La production agricole finale de l'Union
n'augmente pas de façon
unilatérale dans ses principaux secteurs. Un seul d'entre eux est
à la baisse en 1996 : celui de la viande bovine, qui subit le contrecoup
de la crise de l'ESB (-12 % par rapport à 1995 pour l'ensemble des
Quinze, -37 % au Royaume-Uni). Cette baisse est compensée par une
hausse des secteurs de la viande porcine (+14 %) et de la viande de
volaille (+11,5 %). Le lait et les produits laitiers stagnent, sauf en
Italie et en Suède (respectivement 17 % et 13 %).La production
des produits végétaux majeurs ont augmenté de 9 %.
Les plus fortes augmentations concernent le blé et le vin espagnols
(respectivement 120 et 180 %).
Le tableau suivant détaille les productions par pays et produits
:
ANNEXE N° 8
GLOSSAIRE DES
SIGLES
ALENA |
Accord de libre échange nord-américain |
ANASE |
Association des nations d'Asie du Sud Est |
AOC |
Appellation d'origine contrôlée |
APCA |
Assemblée permanente des Chambres d'agriculture |
BST |
Somatotropine bovine |
CEE |
Communauté économique Européenne |
CNCA |
Caisse nationale de crédit agricole |
CNJA |
Centre national des jeunes agriculteurs |
DJA |
Dotation aux jeunes agriculteurs |
DO |
Dépenses obligatoires |
DNO |
Dépenses non obligatoires |
DOM |
Départements d'outre-mer |
EARL |
Entreprise agricole à responsabilité limitée |
EUROSTAT |
Office statistique des communautés Européennes |
FAIR ACT |
Federal agriculture Improvement and Reform Act |
FDES |
Fonds de développement économique et social |
FEDER |
Fonds Européen de développement régional |
FEOGA |
Fonds Européen d'orientation et de garanties agricoles |
FNSEA |
Fédération natinale des syndicats d'exploitants agricoles |
FSE |
Fonds social Européen |
GAEC |
Groupement agricole d'exploitation en commun |
GATT |
General Agreement on tariffs and trades |
IAA |
Industrie agricole et alimentaire |
ICHN |
Indemnités compensatoires de handicaps naturels |
INRA |
Institut national de la recherche agronomique |
INSEE |
Institut national de la statistique et des études et économiques |
ISM |
Indemnité spéciale de montagne |
LDA |
Ligue directrice agricole |
LEADER |
Liaisons entre actions de développement rural |
MCM |
Montants compensatoires monétaires |
MERCOSUR |
Marché commun sud américain |
MGS |
Mesures globales de soutien |
MSA |
Mutualité sociale agricole |
OCM |
Organisation commune de marché |
OGM |
Organismes génétiquement modifiés |
OMC |
Organisation mondiale du commerce |
ONIBEV |
Office nationale interprofessionnel bétail et viande |
OTEX |
Orientation technico-économique des exploitations |
PAC |
Politique agricole commune |
PAM |
Plan d'amélioration matérielle des exploitations |
PECO |
Pays d'Europe centrale et orientale |
PMPOA |
Programme national de mise aux normes des bâtiments d'élevage |
PMTVA |
Prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes |
PRIC |
Politique rurale intégrée communautaire |
PSBV |
Prime spéciale aux bovins mâles |
PSC |
Produits de substitution des céréales |
QMG |
Quantité maximale garantie |
RBE |
Revenu brut d'exploitation |
SAU |
Surface agricole utile |
SCEES |
Service central des enquêtes et études statistiques du ministère de l'Agriculture |
SCOP |
Surfaces céréales et oléoprotéagineux |
TIPP |
Taxe intérieure sur les produits pétroliers |
UE |
Union Européenne |
UGB |
Unité de gros bétail |
UTA |
Unité de travail manuel |
UTH |
Unité de travail humain |
1
Directives n° 72/159 relative
à la modernisation des exploitations agricoles, n° 72/160
relative à la cessation de l'activité agricole, et
n° 72/161 concernant la formation et l'information de la population
agricole.
Directive du 28 avril 1975 sur l'agriculture de montagne et des zones
défavorisées.
2
Plan " Agriculture 1980 " de M. Sicco Mansholt,
commissaire Européen à l'agriculture, publié le
21 décembre 1968, qui jette les bases d'une future politique
communautaire des structures agricoles.
3
Rapport d'information n° 236 (Sénat 1986-1987),
présenté par M. Jean François-Poncet au nom de la
mission d'information présidée par M. Michel Souplet, et
désignée par la Commission des Affaires économiques sur
l'avenir de la Politique agricole commune.
4
" Les terroirs urbains et paysagers ", M. Gérard
Larcher, au nom de la Commission des Affaires économiques, rapport
d'information n° 415, 1997-1998.
5
Dans le document " Agenda 2000 " présenté
en juillet 1997 par la Commission Européenne.
6
Selon le bilan effectué par le ministère de
l'agriculture à la demande de votre Commission des affaires
économiques.
7
" Bilan de 3 années d'application de la
Réforme ", Les cahiers, n°
s
1-2 spécial PAC,
juin 1996, AGRESTE
8
Notes et études économiques n° 4, juillet
1997, " L'évolution des exploitations agricoles françaises
de 1991 à 1995, une analyse à partir de résultats du
RICA ".
9
Chiffres 1995 tirés de la même étude
10
Chiffres 1995 du réseau RICA, traités par le
bureau de l'évaluation et de la prospective du ministère de
l'agriculture, juillet 1997.
11
Voir l'annexe n° 7 : l'Union Européenne et
l'agriculture.
12
Voir le rapport n° 354 du groupe de travail sur les
fruits et légumes de la Commission des affaires économiques du
Sénat, " Fruits et légumes, une véritable ambition
pour le secteur ", MM. J. Huchon, J.F. Le Grand, L. Minetti, 1997.
13
Rapporteurs au nom de la commission des affaires
économiques : MM. Jean Huchon, Jean-François
Le Grand et Louis Minetti, références citées p. 55.
14
Voir le rapport précité.
15
D'après le n°68 de la revue " Pour la
montagne "
16
Ensemble des contingents préférentiels offerts par
l'Union aux pays tiers
17
Contingents supplémentaires concédés pour
remplir les obligations du GATT (5 % de la consommation).
18
Rapport de la Commission au Conseil COM (97) 477 final.
19
Liste fournie en annexe
20
Rapport n° 354 précité, page 62
21
Agra Débat n° 2 - décembre 1995
22
" Transgéniques : pour des choix responsables "
Rapport d'information présenté au nom de la Commission des
Affaires économiques par M. Jean Bizet, Sénat
n° 440, 1997-1998.
23
Avis - Sénat n°88 (1996-1997) présenté
par M. Alain Pluchet, au nom de la Commission des Affaires économiques,
sur le projet de loi de finances pour 1997, Tome I Agriculture.
bovine.
24
Voir le rapport de l'Assemblée nationale n°3291
(1996-1997) présenté par M. Jean-Jacques Mattei au nom de la
mission d'information commune sur l'ensemble des problèmes posés
par le développement de l'épidémie
d'encéphalopathie spongiforme.
25
D'après l'évaluation de la commission
économique, monétaire et de politique industrielle du Parlement
Européen, rapport sur Agenda 2000, PE 224.339/Pavice C/déf., 1997.
26
Document de stratégie agricole en matière agricole
présenté au Conseil Européen de Madrid en
décembre 1995, " Etudes sur les différentes
stratégies pouvant être suivies pour développer les
relations entre l'Union Européenne et les pays associés dans le
domaine de l`agriculture, dans la perspective de l'adhésion de ses
futurs pays " Communication (CSE (95) du 29/11/95).
27
Document de stratégie agricole de novembre 1995
cité à la page 88.
28
Voir le document : " Agenda 2000 ", 2. " le
défi de l'élargissement ", page 31 et suivantes
29
Pologne, Hongrie, République Tchèque,
République Slovaque, Slovénie
30
Food and Agricultural Policy Research Institute
31
" Bioengineering of crops : report of the world bank
panel on transgenic Crops ", octobre 1997.
32
Voir le " document de travail " de la DGVI :
" Long term prospects : grain, milk and meat markets ", Agricultural
common policy 2000, European Commission, 1997.
33
Perspectives agricoles 1998-2003, OCDE, Mars 1998
34
Page 60 du document précité
35
En se fondant sur de nombreuses hypothèses
détaillées dans le document précité.
(
36
) Les propositions de la Commission prévoient en effet la
possibilité d'une révision des aides directes dans
l'hypothèse où la situation du marché conduirait à
des phénomènes de surcompensation.
37
Pour les études postérieures, voir le rapport de
l'INRA du 2 avril 1998 par MM. F. Colson et
V. Chatellier.
38
Chambre d'agriculture, supplément au n° 859,
octobre 1997 " Les agricultures nationales et l'approche des Etats
membres sur la réforme de la PAC -3. "
39
Rapport d'information Sénat n° 323 (1997-1998)
fait au nom de la Commission des affaires économiques par MM. Jean
Huchon et Louis Minetti.
40
Rapport d'information n° 425 - Assemblée
nationale déposé par le Délégation de
l'Assemblée nationale pour l'Union Européenne sur la
communication Européenne " Agenda 2000 " et
présenté par M. Henri Nallet.
41
Rapport d'orientation de la FNSEA des 51e et 52e Congrès
fédéraux e mars 1997 et avril 1998.
42
" L'agriculture et l'Euro " - Claude GNOS - Centre
d'études monétaires et financières et Université de
Bourgogne
43
Les onze pays concernés sont : l'Allemagne, l'Autriche, la
Belgique, l'Espagne, la Finlande, la France, l'Irlande, l'Italie, le
Luxembourg, les Pays-Bas et le Portugal.
44
Il s'agit du Royaume-Uni, de la Suède, du Danemark et de
la Grèce.
45
1 franc : 24 pesetas environ
46
Rapport du Conseil général du Génie rural,
des eaux et des forêts " les incidences de la PAC sur la tenue de
l'espace " Avril 1997.
47
Rapport d'information n° 323 - Sénat
(1997-1998) fait au nom de la Commission des Affaires économiques et du
Plan sur les relations franco-espagnoles dans le secteur des fruits et
légumes.
48
Rapport n° 308-Sénat (1997-1998)
présenté au nom de la Commission des Affaires économiques
et du Plan par M. Jean Huchon sur la réforme de l'OCM banane.
49
Forte d'une matière première abondante et bon
marché, -le maïs- , l'industrie de l'isoglucose s'est
développée à partir des années 70, sans
contraintes, aux USA pour atteindre aujourd'hui 50 % du marché du
sucre. L'Union Européenne a contingenté dès son origine
l'isoglucose qui ne représente que 2 % du marché du sucre.
50
Chambres d'agriculture - La réforme de la PAC et des
fonds structurels dans l'Agenda 2000. Analyse et pistes de réflexion-
1er octobre 1997.
51
Quel avenir pour la PAC : Atouts et limites du découplage
des aides à l'agriculture - Club Demeter 1997.
52
Chambres d'agriculture - Avril 1998 n° 864.
53
Rapport d'information du Sénat n° 415
(1997-1998) fait au nom de la commission des affaires économqiues sur la
gestion des espaces périurbains par M. Gérard Larcher.
54
Rapport de la Commission CON (96) 398 final du 4 septembre
1996 sur " les jeunes agriculteurs et le problème de la reprise des
exploitations dans l'agriculture Européenne ".
55
Cf. " L'agriculture et la prochaine négociation de
l'OMC " de M.J.M. Boussard dans la revue politique et parlementaire
n° 992 janvier/février 1998
56
Article de M. H Ferry-Xilczek dans le n° 296 de la revue
EFA, janvier/février 1998.
57
Rapport d'information n°440 - Sénat (1997-1998)
présenté au nom de la Commission des Affaires économiques
par M. Jean Bizet.
58
Rapport d'information n° 303 - Sénat (1992-1993)
présenté au nom de la Commission des Affaires économiques
par MM. Jean Huchon et Jean-François Le Grand, par la mission
d'information chargée d'étudier les fonctionnement des
marchés des fruits, des légumes et de l'horticulture?
présidée par M. Louis Minetti.