C. PRENDRE EN COMPTE TOUTES LES PRODUCTIONS AGRICOLES
L'achèvement du marché unique agricole
dépend
de l'aptitude de la Communauté Européenne à proposer une
réforme globale, prenant en compte l'ensemble des productions agricoles
Européennes.
La PAC ne peut plus et ne doit plus faire l'objet de réformes
ponctuelles qui laissent de côté des pans entiers de la production
agricole. On peut admettre que la réforme de 1992 n'ait pas inclus
l'ensemble des productions méditerranéennes, la phase transitoire
d'intégration de l'Espagne et du Portugal au sein de la
Communauté n'étant pas définitivement achevée.
Tel n'est plus le cas aujourd'hui.
1. Une réforme englobant toutes les productions
a) L'importance des productions méditerranéennes
Dès 1992, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la
Grèce
et dans une moindre mesure la France -soit à l'époque la
moitié des Etats membres de la Communauté Européenne-
avaient regretté que la réforme de la PAC prennent en compte
uniquement les productions dites " septentrionales ",
c'est-à-dire les céréales ainsi que l'élevage
allaitant et laitier.
Les propositions de la Commission de 1997 et 1998 renouvellent l'oubli de 1992.
Certes la Commission Européenne souligne, dans l'exposé des
motifs des propositions de règlements du Conseil relatifs à la
réforme de la Politique Agricole Commune, l'importance qu'elle attache
aux produits méditerranéens en présentant une proposition
de réforme de l'organisation de marché de l'huile d'olive, qui
s'ajoute à la proposition déjà présentée sur
le tabac.
Néanmoins, les productions méditerranéennes ne font
l'objet d'aucune proposition concrète de la part de la Commission.
La mission d'information juge cette position extrêmement
préjudiciable pour l'avenir de l'agriculture Européenne.
Elle considère que l'absence de véritable prise en compte dans la
réforme de la PAC de ces productions équivaut à les
considérer comme accessoires et, à terme, à les
marginaliser.
Une telle démarche constitue une grave erreur d'analyse.
En effet, sur le plan communautaire, les productions
méditerranéennes représentent une part importante de la
production totale. En ce qui concerne l'huile d'olive, 80 % de la
production mondiale (1,85 % millions de tonnes) proviennent de l'Union
Européenne et la culture de l'olivier concerne 2 millions
d'exploitations en Europe. Les fruits et légumes représentent
pratiquement 25 % de la production agricole totale en Europe. Enfin,
l'Union Européenne occupe le premier rang mondial dans le secteur
viti-vinicole avec 60 % de la production mondiale.
Au niveau national, ces productions ont un impact économique et social
déterminant. L'olive représente ainsi en Espagne 400 000
emplois directs et indirects dans des zones -souvent- à fort handicap
naturel.
Cet " oubli " des productions méditerranéennes au sein
du projet de réforme de la PAC procède dans une large mesure de
la démarche au cas par cas adoptée par la Commission
Européenne : le secteur des fruits et légumes a
été réformé en 1996. La commission a proposé
une modification des OCM tabac et huile d'olive. Elle s'est engagée
à proposer dans les semaines à venir une réforme de l'OCM
viti-vinicole.
La démarche de la commission est donc révélatrice de sa
volonté au pire de ne pas inclure les productions
méditerranéennes dans la réforme de la PAC, au mieux
d'effectuer ces réformes au cas par cas et en parallèle avec
celles des céréales, de la viande bovine et du lait.
Aux termes d'un tel constat, la mission d'information s'est interrogée
sur les raisons qui peuvent motiver le refus de la Commission de prendre en
compte ces productions dans la réforme de la PAC.
- Est-ce la relative faiblesse du coût de ces OCM au sein du
Feoga ? Si tel est le cas, nous sommes confrontés à un
véritable aveu d'inégalité de traitement : ces
productions, étant loin d'être marginales en terme de volume de
production et de commercialisation, pourquoi ne sont-elles pas autant
aidées que d'autres ?
Source : DGVI et FEOGA
- Est-ce parce qu'elles concernent un nombre relativement limité de
pays ? Une telle affirmation serait excessive puisqu'un tiers des Etats membres
de l'Union Européenne est concerné ( Portugal, Espagne,
Grèce, l'Italie et France) ;
- Est-ce parce que, aux yeux de la Commission, l'inclusion dans la
réforme de la PAC de ces productions méditerranéennes
compliquerait la négociation sur le volet agricole du " Paquet
Santer " et aboutirait peut-être à un blocage ?
Un tel argument pourrait être considéré soit comme un aveu
d'impuissance de la part des autorités communautaires, soit comme
totalement erroné puisqu'actuellement la proposition de réforme
de l'huile d'olive provoque de la part de l'Espagne un rejet complet des
propositions communautaires. La commission prendra-t-elle le risque au mois de
juin de proposer une réforme de l'OCM viti-vinicole qui
déclencherait, elle aussi, de telles réactions ?
- Est-ce, enfin, pour respecter une philosophie globale tendant à
considérer que ces productions méditerranéennes doivent
être régies par une logique de limitation de production
(viticulture, quota maximal garanti communautaire pour l'huile d'olive...)
alors que les autres productions sont destinées à s'aligner,
quant à leurs prix, sur les marchés mondiaux, sans limitation de
production ?
Cette distinction n'est pas économiquement valide : parmi les
productions méditerranéennes, le secteur des fruits et
légumes s'inscrit déjà dans une logique de
marché ; par contre, la production de lait est encadrée par
des quotas.
La mission d'information souhaite donc que la réforme de la PAC
intègre l'ensemble des productions Européennes et notamment,
méditerranéennes.
Elle s'associe aux propositions formulées par MM. Jean Huchon et
Louis Minetti, en ce qui concerne les fruits et légumes, notamment quant
à l'instauration d'un front méditerranéen dans ce
secteur
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