2. Pour un réseau européen de recherche en génomique végétale
La
France doit rester dans la course de la génomique
végétale, dans laquelle elle a des atouts à faire valoir,
faute de quoi l'avenir de sa recherche en biotechnologie se verrait
considérablement obscurci, surtout si les instruments juridiques de la
propriété intellectuelle " verrouillent " par la suite
les découvertes des fonctionnalités des gènes
opérées par des pays concurrents.
Dans ce domaine où la recherche fondamentale nécessite des
investissements lourds, la France dispose déjà de laboratoires
publics de grande qualité et d'une expertise en matière de
séquençage du génome humain, mais il est nécessaire
de fédérer les différentes initiatives aussi bien dans le
domaine de la recherche publique que dans celui de la recherche privée,
afin d'atteindre l'indispensable " taille critique ".
Un grand programme national de décryptage des génomes
végétaux doit être mis en place pour coordonner les
initiatives et les ressources, si possible publiques et privées.
L'initiative pourrait être élargie à l'Europe au travers,
dans un premier temps, d'une alliance franco-allemande.
Certaines entreprises françaises ont d'ailleurs déjà
entamé un mouvement de fédération de leurs ressources.
Ainsi le groupe coopératif Limagrain est-il à l'initiative de
la constitution d'un pôle français de recherche privée,
Biogemma, rassemblant plusieurs laboratoires de recherche en
biotechnologies
(Limagrain, Pau-Euralis) et bénéficiant d'un
soutien financier de plusieurs acteurs majeurs de la filière
(Sofiproteol, Unigrains). Biogemma et Rhône-Poulenc Agro ont
récemment mis en place " Rhobio ", entreprise commune dans le
domaine des biotechnologies végétales, afin de constituer un
pôle européen compétitif. Un projet de recherche
partenariale avec des organismes publics (INRA, CIRAD, ORSTOM) est actuellement
à l'étude :
le projet
" génoplante "
93(
*
)
.
Ce projet qui se veut fédérateur des ressources
européennes propose deux niveaux d'association :
-
une plate-forme technique commune
implantée sur la
génopole d'Evry, et consacrée au
décryptage
d'espèces végétales modèles
pour la recherche
(le riz, arabidopsis...). Elle rassemblerait l'ensemble des ressources et des
compétences (connaissance d'arabidopsis pour l'INRA, du riz pour le
CIRAD, expertise bio-informatique pour Rhône-Poulenc Agro, techniques
dites " de validation " pour Biogemma) ;
-
une déclinaison par programmes sectoriels
(recherche sur
le génome du blé, du colza, du maïs...).
Le Gouvernement doit soutenir cette initiative et jouer le jeu d'un
partenariat solide, dans le cadre de la mise en place de cette plate-forme
nationale -puis européenne- de décryptage des génomes
végétaux.
La génomique est d'autant plus importante que chaque nouveau
résultat (identification des gènes, connaissance de leurs
fonctions, techniques de transfert de gènes) peut aujourd'hui être
systématiquement protégé par un brevet. Avec toujours
cette conséquence : ceux qui détiendront les technologies et
la propriété intellectuelle disposeront d'avantages
décisifs pour les décennies à venir ; les autres
seront relégués au rang de sous-traitant, condamnés
à payer des licences exorbitantes ou à disparaître.
La question de la création d'un réseau de recherche
franco-allemand en biotechnologie végétale a été
évoquée lors du dernier sommet bilatéral d'Avignon, entre
le chancelier fédéral et le Président de la
République. Vu l'importance stratégique du sujet, votre
rapporteur souhaite qu'il avance rapidement.