B. CAUSES ET MÉCANISMES D'UNE CRISE FRANÇAISE ET EUROPÉENNE
Des raisons de fond, de nature culturelle, mais aussi des raisons de circonstance, liées au contexte de l'arrivée des biotechnologies, expliquent la méfiance des Européens vis-à-vis de cette technique.
1. Les raisons culturelles de certaines oppositions
Sans trop s'étendre sur ce sujet, on peut relever, dans l'histoire et la culture européenne, plusieurs facteurs qui contribuent à expliquer le rejet du génie génétique.
a) La collusion historique de la génétique, de l'eugénisme et du racisme
Un bref
survol de l'histoire de la génétique montre qu'elle s'est
manifestée, au début du XXe siècle, sous le pire des
jours : un outil au service de l'eugénisme, puis du racisme.
Malheureusement, historiquement : "
Dans les pays anglo-saxons,
germaniques et nordiques, la rencontre directe du darwinisme, de
l'eugénisme et de la génétique donne naissance au courant
dominant de l'eugénisme génétique. Sa définition
recouvre l'ensemble des actions dont le but est d'éviter que ne
s'accommodent dans les races humaines les " mauvais gènes ",
et parallèlement de faire en sorte que l'on puisse assurer la
sélection et la promotion des " bons "
gènes. "
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Cette logique, poussée à son terme, a donné lieu à
des actes inhumains, tels que la stérilisation de dizaines de milliers
de malades mentaux en Suède, Norvège, Allemagne, Etats-Unis.
Puis, la génétique a été utilisée par les
théoriciens des idéologies racistes et a servi d'alibi à
l'élimination cruelle de races jugées porteuses de " mauvais
gènes " par l'Allemagne hitlérienne.
En matière de génétique, l'Europe a donc
commencé avec le pire. Comment ne pas comprendre que ces
atrocités -qui n'ont, fort heureusement, aucun rapport avec les
biotechnologies actuelles- aient laissé des traces dans la
mémoire collective ? Le spectre d'une dictature de la science sans
conscience est en effet toujours vivace.