2. Les autres facteurs de la compétitivité espagnole dans le secteur des fruits et légumes

L'Espagne bénéficie de facteurs favorables qui contribuent à accroître considérablement sa capacité d'exportation. La conjonction de plusieurs phénomènes augmentent ainsi les tensions entre la France et l'Espagne. Il s'agit principalement :

des avantages climatiques : en effet, la température permet à l'Espagne d'étaler sa production sur plus de 10 mois de l'année pour un grand nombre de produits.

Ainsi en 1997, le climat a été une des premières causes de désorganisation de la production en France. Après un temps exceptionnellement chaud, les gelées sont venues détruire tout ou partie de la production des vergers. L'Espagne concurrence ainsi les régions méridionales de l'Europe, ainsi que les pays serristes du Nord qui doivent utiliser, à contre saison, le chauffage.

En outre, le décalage des productions dû aux modifications de climat a souvent des effets très sensibles. Ainsi, en 1997, la production de fraises françaises s'est " télescopée " avec celle d'Espagne. La tomate, le melon voire la pomme de terre primeur se sont retrouvés sur le même étal, au même moment.

de la présence d'unités de production équilibrées au niveau financier et disposant de " cash flow ". Celles-ci ont certes bénéficié, en 1992 et 1993, des dévaluations successives de la peseta, qui leur ont fourni un apport d'oxygène au moment où la concurrence marocaine s'affirmait ; néanmoins, durant cette période, les entreprises espagnoles n'ont pas pour autant augmenté leurs marges ;

de la stabilisation de la masse salariale, mise en place par la réforme du marché du travail en 1994 ;

de ressources en matière première végétale et matériel de production adéquats et innovants. L'utilisation de plants frais, par exemple pour la fraise, permet d'étaler la production sur plus de six mois. La délégation sénatoriale a en outre constaté la mise en oeuvre d'un processus de protection intégrée sur près de 400 hectares de cultures de fraises. On peut noter, par ailleurs, d'importants efforts en matière d'investissements en recherche-développement dans le secteur : la délégation a ainsi pu visiter à Mazzaron le nouveau laboratoire d'une entreprise consacré au contrôle de qualité. Ce laboratoire, financé à 55 % par les fonds opérationnels, utilise notamment des appareils à résonance magnétique ;

du poids notable de la FEPEX (Fédération espagnole d'organisations régionales représentant les exportateurs de fruits et légumes), qui regroupe les principaux acteurs de la filière, notamment de la tomate fraîche, réalisant conjointement 90 % de la production destinée à l'exportation. Son action consiste essentiellement en l'exercice d'un lobbying auprès des administrations, tant nationale qu'européenne. La délégation sénatoriale, qui a pu rencontrer certains dirigeants de la Fepex, a constaté leur grand dynamisme : ils considèrent que la production des fruits et légumes doit être avant tout consacrée à l'exportation ;

de la recherche de nouveaux marchés : si l'Espagne continentale conforte sa position sur ses marchés " traditionnels ", (Italie exceptée), elle développe aussi ses ventes vers de nouvelles destinations comme l'Autriche, la République tchèque et la Pologne notamment.

En outre, les échanges commerciaux entre l'Espagne et l'Amérique Latine s'établissent en volume à 1 262 milliards de pesetas (environ 50,5 milliards de francs) en progression de 9,5% par rapport à 1994. Cette hausse modérée, qui s'explique par une baisse de 38% du commerce de l'Espagne avec le Mexique en raison de la situation économique de ce pays, fait suite aux fortes progressions enregistrées depuis 1992 : + 14,4 %, + 23,7 % en 1993 et + 38,5% en 1994. Entre 1990 et 1995, le volume total des exportations a progressé de 121,0% alors que l'augmentation des exportations espagnoles vers l'ensemble du monde ne s'établit qu'à 103,0 % sur la même période.

de l'apport de l'irrigation qui est un atout considérable. Actuellement, environ 3,5 millions d'hectares sont irrigués en Espagne. La progression des terres irriguées en dix ans a fortement cru. Ces surfaces sont passées de 2,5 millions d'hectares à plus de 3,4 millions.

Le Gouvernement espagnol prépare actuellement un nouveau plan hydraulique qui tend à limiter l'irrigation tout en améliorant les investissements existants. Néanmoins, la forte décentralisation de l'Espagne provoque d'importantes surenchères et d'âpres discussions sur ce sujet. Aussi certaines communautés autonomes poursuivent-elles l'irrigation.

Votre délégation a pu visiter une entreprise de dessalinisation d'eau de mer à Mazzaron en vue d'irriguer 3.500 hectares de surfaces agricoles. Doté d'un réservoir de 100.000 m 3 d'eau dessalinisée, cette usine va chercher l'eau à plus de 600 mètres sous terre.

Votre commission des affaires économiques s'interroge à moyen terme sur les conséquences environnementales de l'irrigation systématique qu'entraîne le développement intensif des productions légumières et fruitières dans certaines régions de l'Espagne.

de l'importance des cultures sous serres : l'Espagne compte en effet près de 90.000 hectares de serres.

CULTURES SOUS SERRES 6( * ) EN ESPAGNE

Régions

Hectares

Galice

963

Navarre

173

Rioja

57

Aragon

171

Baléares

168

Castille et Léon

156

Madrid

248

Castille-La Mancha

111

Murcie

3.162

Estremadure

223

Valence

3.162

Andalousie

30258

Sources : Ministère de l'agriculture - Espagne

Par comparaison, la France totalise moins de 9.000 hectares de cultures sous serres. Votre délégation a été impressionnée par la présence à Almeria de centaines d'hectares recouverts de serres en plastique. Aucune région française n'est en mesure actuellement d'être comparée aux communautés de Murcie, d'Huelva et d'Almeria en matière de surfaces sous serres.

SURFACES SOUS SERRES

(en hectares)

France

8 174

Provence-Alpes Côte d'Azur

2 877

Pays de Loire

843

Languedoc - Roussillon

776

Aquitaine

774

Rhône - Alpes

615

Bretagne

593

Sources : Agreste-Structures 1995 (estimations)

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page