II. CONSOLIDER LE SOCLE RÉGALIER : LES PRINCIPALES RECOMMANDATIONS

Face à ce constat alarmant, le défi de la sécurité dans les outre-mer doit être impérativement relevé. Toutefois, pour inverser réellement la tendance face à des menaces de nature exogène - narcotrafics, immigration parfois massive, trafic d'armes, orpaillage illégal, pêche illicite, ingérences... - l'État doit adopter une posture offensive, pleinement régalienne, souveraine. À défaut, l'État « arrosera le sable ».

Cela passe par la priorité donnée à la coopération régionale policière et judiciaire, un durcissement de l'emploi des forces et la restauration de l'étanchéité de nos frontières maritimes et terrestres.

Au total, le rapport formule 38 recommandations autour de cinq axes principaux.

A. RESTAURER LA SÉCURITÉ AU QUOTIDIEN

Première priorité : s'attaquer à la délinquance du quotidien, celle du « bas du spectre » qui empoisonne la vie des concitoyens ultramarins.

Les moyens des forces de sécurité intérieure et de la justice ont augmenté ces dernières années et devraient continuer à croître si les récentes lois de programmation sont bien mises en oeuvre. Aller au bout des renforts promis et des moyens annoncés est la première exigence. Mais d'autres leviers d'action existent :

 Densifier l'implantation territoriale des forces de sécurité, notamment par la création de brigades conjointes de proximité police nationale-police municipale et le développement de la réserve (recommandation n° 1).

 Privilégier les actions conjointes des forces de sécurité en lien avec l'autorité judiciaire pour cultiver l'esprit « Équipe France » (recommandation n° 2).

 Laisser aux forces de sécurité intérieure une liberté d'initiatives sur chaque territoire pour s'adapter rapidement aux besoins opérationnels (recommandation n° 3).

 Démultiplier la lutte contre les violences intrafamiliales et la judiciarisation des faits de violence, notamment par la création d'au moins une brigade de gendarmerie spécialisée dans chaque territoire et la généralisation du « pack Nouveau Départ » (recommandation n° 6).

 Accélérer l'exécution du « Plan 15 000 » pour la réhabilitation et la construction de places de prison outre-mer (recommandation n° 11).

 Préparer le transfert des extractions judicaires à l'administration pénitentiaire (recommandation n° 12) pour libérer des effectifs police-gendarmerie sur le terrain.

 Renforcer l'incarnation de la justice partout, avec le développement des audiences foraines dans les zones isolées, des points d'accès au droit, la création d'une cour d'appel à Mayotte et d'un tribunal judiciaire à Saint-Martin et l'accélération des grands chantiers immobiliers de la justice (recommandation n° 14).

Ces orientations doivent être couplées à une adaptation en continu des lois et règlements. Les contraintes opérationnelles de nombreux territoires ultramarins, et en particulier de ceux parmi les plus pauvres ou les plus isolés comme Mayotte et la Guyane, appellent des dispositions ad hoc complémentaires. Ces adaptations sont notamment nécessaires pour sécuriser juridiquement les procédures, tout en offrant aux justiciables des garanties suffisantes de leurs droits.

 Afin de prendre en compte les contraintes opérationnelles dans les zones isolées en Guyane et en Polynésie française, adapter les dispositions du code de procédure pénale relatives à la garde à vue, en faisant démarrer le début de celle-ci à compter de l'arrivée dans les locaux et non de l'interpellation dans la limite de 20 heures et en aménageant l'obligation de présence d'un avocat dès le début des auditions (recommandation n° 7).

 En l'absence d'avocat, faire usage de l'article 879 du code de procédure pénale qui permet la désignation de citoyens défenseurs agréés par le président de chambre d'appel de Mayotte, et étendre cette faculté à d'autres régions comme la Guyane (recommandation n° 8).

 Dans les territoires isolés ou manquant d'interprètes agréés, autoriser des interprètes non experts inscrits sur une liste arrêtée par le procureur de la République et ouvrir largement le recours à l'interprétariat par visioconférence ou par des logiciels d'intelligence artificielle (recommandation n° 9).

 À Mayotte, étendre le rappel à l'ordre par le maire aux violences volontaires sans ITT ou aux dégradations mineures, en coordination avec le procureur de la République (recommandation n° 10).

 Avancer à 5 heures du matin l'heure légale des perquisitions dans les territoires où le lever du jour est plus précoce que dans l'Hexagone.

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