B. LES COÛTS SANITAIRES DES SUBSTANCES CHIMIQUES DANS LES PLASTIQUES SONT EXORBITANTS POUR LA SOCIÉTÉ

· Les résultats des premières études sur les coûts sanitaires liés à l'usage des plastiques sont particulièrement inquiétants

Christos Symeonides a présenté une étude de 202411(*) sur les plastiques et la santé humaine. Cette étude a quantifié les effets sur la santé de trois substances chimiques clés associées aux plastiques, à savoir les PBDE, le BPA et le DEHP, puis les a traduits en coûts économiques.

Les résultats concernent uniquement les États-Unis car à l'époque, c'était le seul pays pour lequel il existait des données de biosurveillance de l'exposition de la population aux substances chimiques liées aux plastiques. Seuls un ou deux effets sur la santé par substance chimique ont été retenus.

Pour les coûts liés à l'exposition aux PBDE, l'étude prend en compte les coûts économiques résultant d'une baisse des performances cognitives, du quotient intellectuel et du capital humain à la suite d'une exposition aux PBDE dans l'utérus. Ils sont évalués à 202 milliards de dollars pour 2010.

Pour les coûts liés à l'exposition au BPA, l'étude se concentre sur le coût de l'augmentation des maladies cardiaques, évalué à 166 milliards de dollars, ainsi que le coût des accidents vasculaires cérébraux, estimé à 62,4 milliards de dollars résultant d'une perte de la productivité.

Pour les coûts liés à l'exposition au DEHP, l'étude tient compte de l'augmentation de la mortalité à l'âge adulte entre 55 et 64 ans sur la base de la valeur de la vie statistique12(*). Elle conclut à plus de 40 000 décès annuels supplémentaires qui peuvent être attribués à la seule exposition au DEHP de la population américaine, ce qui correspond à un coût de 245 milliards de dollars.

Au total, les coûts s'élèveraient à 675 milliards de dollars par an pour ces trois substances chimiques et pour les États-Unis seulement.

Selon Christos Symeonides, au-delà du caractère inacceptable de ces 40 000 décès, la quantification des externalités négatives du plastique remet en cause l'idée répandue selon laquelle le plastique ne coûte pas cher. Martin Wagner a relevé que c'est bien la population qui subit les effets et les coûts liés à ces substances chimiques et non leurs producteurs.

· Les coûts indirects, liés à la production de plastiques, sont également très élevés

Plusieurs intervenants ont insisté sur le fait que les produits chimiques ont des conséquences en termes de pollution et de santé humaine tout au long du cycle de vie des plastiques.

Selon Megan Deeney, la production primaire de plastiques est ainsi responsable de quatre fois plus d'émissions de gaz à effet de serre que le secteur de l'aviation. 75 % de ces émissions auraient lieu pendant les phases d'extraction des matières premières puis jusqu'à la production des monomères et des autres produits chimiques.

Elle a ajouté que les travailleurs sont particulièrement exposés aux pollutions induites par les plastiques et que des niveaux élevés de produits toxiques sont observés dans l'air, les sols et les aquifères autour des sites de production. Le benzène, par exemple, est associé à un risque accru de cancer au sein des populations locales, comme dans la « vallée du cancer » de Louisiane aux États-Unis.

À l'instar de Megan Deeney, Christos Symeonides a cité les coûts sanitaires liés à l'exposition aux particules et aux gaz des travailleurs et des populations vivant près des sites de production. Il a rappelé que l'élimination des déchets par incinération provoque également l'émission de particules fines très dommageables pour la santé. Il a reconnu que les évaluations chiffrées13(*) des coûts liés à la production de plastiques, qui pourraient s'élever à plusieurs centaines de milliards de dollars, devraient être encore affinées et confirmées. Il a néanmoins estimé qu'elles permettaient de faire prendre conscience des coûts en matière de santé et de dépenses publiques engendrés par l'industrie du plastique.


* 11 Christos Symeonides et al., « An Umbrella Review of Meta-Analyses evaluating Associations between Human Health and Exposure to major Classes of Plastic-associated Chemicals », Annals of Global Health, 2024; 90 (1).

* 12 Le concept de « valeur de la vie statistique » est utilisé par les économistes lorsqu'ils désirent déterminer la somme d'argent que la société est disposée à débourser pour sauver un citoyen, ou réduire l'exposition au risque de chacun de ses membres.

* 13 Philip J Landrigan et al. « The Minderoo-Monaco Commission on Plastics and Human Health », Annals of Global Health, 2023, March 21. Erratum in Annals of Global Health, 2023 October 11.

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