II. CONTRIBUER À RENDRE LES MÉDICAMENTS PLUS ABORDABLES DANS LE RESPECT DES COMPÉTENCES DES ÉTATS MEMBRES
Concernant le prix des médicaments, la Commission fait deux propositions que les rapporteurs soutiennent et complètent.
Tout d'abord, la proposition de directive prévoit que le titulaire d'AMM déclare au public tout soutien financier direct reçu de toute autorité publique ou de tout organisme financé par des fonds publics en faveur d'activités ayant trait à la recherche et au développement de médicaments faisant l'objet d'une autorisation nationale ou centralisée de mise sur le marché, quelle que soit l'entité juridique qui a reçu ce soutien. Les rapporteurs sont favorables à cette proposition qu'ils proposent de compléter en incluant également les financements indirects tels que les aides fiscales.
La Commission propose également d'élargir les conditions d'utilisation des produits brevetés6(*) afin de permettre aux développeurs de médicaments génériques ou biosimilaires de réaliser des études nécessaires à la détermination du prix des médicaments et des niveaux de remboursement. Ces médicaments arriveraient ainsi plus rapidement sur le marché à l'expiration des protections accordées aux médicaments de référence, permettant une baisse plus rapide des prix. Les rapporteurs souhaitent préciser que l'autorisation accordée par les autorités compétentes pour réaliser ces études doit être considérée comme une décision réglementaire ou administrative qui ne peut être refusée au nom de la protection des droits de propriété intellectuelle.
Par ailleurs, les rapporteurs demandent la création d'un mécanisme de solidarité financé sur le budget de l'Union et qui permettrait de prendre en charge une quote-part à déterminer, sans excéder un certain montant, du prix des médicaments innovants dans certains États membres, choisis au regard de leur produit intérieur brut par habitant.
III. RÉDUIRE LA DURÉE DE LA PROTECTION DES DONNÉES RÉGLEMENTAIRES ET PRÉVOIR SON ALLONGEMENT COMME OUTIL D'INCITATION
La Commission européenne propose de réduire la durée de la protection des données réglementaires qui est de huit ans aujourd'hui à six ans. Cette mesure doit permettre une arrivée plus rapide des médicaments génériques ou biosimilaires sur le marché et donc une réduction plus précoce du coût des médicaments. Toutefois, elle risque de limiter la recherche et développement au sein de l'Union en diminuant le bénéfice financier susceptible d'être retiré de ses résultats, et de renchérir le coût des médicaments durant la période socle de protection, les titulaires d'AMM devant rentabiliser leurs investissements sur une période plus courte.
La Commission propose en parallèle des mesures d'incitation permettant d'augmenter la durée de la protection des données réglementaires jusqu'à onze ans si les titulaires d'AMM répondent à des critères définis par la proposition de directive. Celle-ci propose notamment que les titulaires d'AMM puissent bénéficier de deux années supplémentaires de protection des données réglementaires s'ils commercialisent le médicament en question dans tous les États membres de l'Union. Si cette mesure vise à permettre un accès plus large aux médicaments, sa mise en oeuvre ne relève pas des seuls titulaires d'AMM et dépend du résultat de négociations menées avec les États membres.
Compte tenu de ces éléments, ces deux mesures ne font pas consensus au sein de la commission des affaires européennes. Si Mme Cathy Apourceau-Poly et M. Bernard Jomier les soutiennent, Mme Pascale Gruny et la majorité sénatoriale y sont opposées. Elles proposent plutôt que la durée de la protection des données réglementaires soit de sept ans et six mois, sans pouvoir excéder huit ans et six mois, quelles que soient les mesures d'incitation mises en oeuvre. Elles souhaitent également créer une obligation pour les titulaires d'AMM de présenter une demande de prix et de remboursement dans tout État membre qui le demande, sous peine de sanctions financières.
La Commission européenne propose d'autres mesures d'incitation permettant aux titulaires d'AMM d'augmenter la durée de la protection des données réglementaires :
- de six mois si le médicament concerné répond à un besoin médical non satisfait ;
- de six mois lorsque des essais cliniques utilisant un comparateur pertinent ont été soumis à l'appui de la demande d'AMM initiale ;
- d'un an si une autorisation pour une indication thérapeutique supplémentaire est accordée pour le médicament concerné.
Si Mme Cathy Apourceau-Poly et M. Bernard Jomier soutiennent ces mesures d'incitation, Mme Pascale Gruny et la majorité sénatoriale proposent plutôt de porter à douze mois la durée supplémentaire de protection des données réglementaires dont peut bénéficier le titulaire d'une AMM pour un médicament qui répond à un besoin médical non satisfait, de supprimer l'incitation proposée lorsque des essais cliniques utilisant un comparateur pertinent ont été soumis à l'appui de la demande d'AMM initiale et de limiter à six mois le prolongement de la durée de protection des données réglementaires lorsqu'une autorisation est accordée pour une indication thérapeutique supplémentaire. Mme Pascale Gruny et la majorité sénatoriale proposent également six mois supplémentaires de protection des données réglementaires lorsque la recherche et développement du médicament concerné a été réalisée au sein de l'Union européenne.
Les rapporteurs s'accordent toutefois sur la nécessité de mieux définir la notion de besoins médicaux non satisfaits en prenant en compte l'impact sur la qualité de vie des patients et en consultant les associations de patients, les développeurs de médicaments et les professionnels de la santé. Ils approuvent également la possibilité qu'envisage la Commission d'accorder quatre années de protection des données réglementaires aux titulaires d'AMM qui proposent le repositionnement d'un médicament qui ne bénéficie plus d'aucune protection permettant ainsi de stimuler la recherche et l'innovation dans le domaine des médicaments génériques ou biosimilaires.
* 6 Il s'agit d'une extension de « l'exception Bolar »