D. LA CHARGE ADMINISTRATIVE BANCAIRE : UN OBSTACLE POUR L'ACCÈS DES TPE-PME AU CRÉDIT

La charge administrative des demandes de crédit est également perçue comme un frein à l'accès au crédit par les dirigeants d'entreprise, en particulier les TPE-PME. Ceux-ci ont fréquemment cité, lors des auditions :

· des délais de réponse de la part des établissements bancaires trop longs pour correspondre à la réalité du temps économique et de la réactivité nécessaire à l'activité de l'entreprise, notamment dans le cas de demandes de crédits de trésorerie ;

· la multiplication des pièces justificatives et des demandes d'information émanant des banques. En particulier, les exigences en matière de performance extra-financière entraînent une surcharge administrative conséquente ;

· la méconnaissance des enjeux et des situations spécifiques des TPE et PME, notamment par manque de capacités d'analyse en interne de connaissance du tissu économique local.

La surcharge administrative, des conséquences en cascade :
Comment les dysfonctionnements du guichet unique
ont limité l'accès des entreprises au crédit bancaire

Les dysfonctionnements du guichet unique, qui avaient déjà fait l'objet d'alertes et de travaux de la délégation aux Entreprises depuis son lancement le 1er janvier 202367(*), ont pu contribuer à détériorer l'accès des TPE-PME au crédit bancaire.

Selon les témoignages des représentants d'entreprises entendus par les rapporteurs, l'extrait Kbis de l'entreprise - document officiel attestant de l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés (RCS), indispensable dans la plupart des dossiers de demande de crédit professionnel - a parfois été impossible à établir ou à modifier pendant plusieurs semaines, en raison de la défaillance du nouveau guichet unique géré par l'INPI, porte unique d'entrée des formalités de création ou de modification des entreprises.

Ces anomalies graves de fonctionnement de l'administration ont retardé de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, l'obtention de crédits par certaines entreprises.

Plusieurs pistes de solutions ont été évoquées lors des auditions menées par la délégation :

· Premièrement, veiller à l'homogénéité, voire à la standardisation des informations demandées par les établissements bancaires dans le cadre d'une demande de crédit, en particulier en matière extra-financière.

Cette recommandation fait écho à celles formulées par la délégation aux Entreprises dans son rapport d'information « Directive CSRD : « du décryptage à l'avantage »68(*), visant à simplifier la mise en oeuvre de ces obligations nouvelles et à limiter le nombre d'informations nouvelles ou différentes demandées aux entreprises dans le cadre de leurs diverses démarches.

Croissance Plus a par exemple appelé à harmoniser les différentes versions des questionnaires RSE demandés aux entreprises par les établissements bancaires, pour aller vers un modèle unique ; et à simplifier le questionnaire Climat de la Banque de France, en le rendant interopérable (par exemple par extraction) avec les informations demandées au titre de la CSRD.

Des pays voisins de la France ont par ailleurs opéré des choix permettant de simplifier et d'alléger les dossiers de demandes de crédit : ainsi, dans plusieurs pays européens, l'existence d'un répertoire national des crédits permet aux établissements bancaires de recueillir les informations relatives aux crédits déjà contractés par le demandeur sans qu'il n'incombe à celui-ci de fournir l'ensemble des justificatifs. Plus généralement, l'application au secteur bancaire de dispositifs centralisés du type « dites-le nous une fois » pourrait être étudiée, dans le respect de la confidentialité des données individuelles.

Proposition 4 : Accentuer les efforts relatifs à l'harmonisation des informations et documents demandés par les différents établissements bancaires dans le cadre des demandes de crédits bancaires.

· Deuxièmement, saisir les opportunités offertes par la FinTech pour réduire les délais d'examen des demandes de crédit et améliorer l'analyse des situations financières des PME-TPE, en prenant pleinement en compte leurs spécificités.

Memobank, jeune établissement bancaire orienté vers le financement des PME, a par exemple souligné qu'en dépit des avancées technologiques qu'ont connu le secteur bancaire et le secteur financier, « il n'y a pas eu d'investissement technologique de la part des établissements bancaires pour mieux financer les PME ». L'automatisation ou l'instantanéité de certaines actions de gestion, voire de certains pans d'analyse des risques, pourrait offrir des pistes pour traiter plus efficacement les besoins bancaires des PME, aux contraintes financières et budgétaires plus fortes.


* 67 Voir notamment le déplacement de la délégation aux Entreprises à l'INPI en février 2023 (informations disponibles sur le site Internet du Sénat, page de la délégation).

* 68 « Directive CSRD : du décryptage à l'avantage », rapport d'information de la délégation aux Entreprises, présenté le 7 février 2024 par Marion Canalès et Anne-Sophie Romagny.

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