C. LA MISSION DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME PREND UNE PART CROISSANTE DANS L'ACTIVITÉ DU GID DEPUIS LES ATTENTATS DE NOVEMBRE 2015

La GID contribue également à la lutte contre la menace terroriste. Ainsi, les démineurs sont amenés à intervenir sur des colis suspects, à assister les forces de sécurité intérieure pour les missions d'assistance à perquisition et sont associés à la sécurisation des grands évènements et des voyages officiels.

Depuis les attentats de novembre 2015, la mission de lutte contre la menace terroriste a pris de l'ampleur. Le nombre d'interventions réalisées au titre de cette mission est en effet passé de 2 866 à 4 181 entre 2014 et 2023, soit une hausse de 45,9 %.

La croissance du nombre d'interventions réalisées par les démineurs sur la période a donc été plus marquée pour la mission de lutte contre la menace terroriste (+ 45,9 %) que pour la mission EOD (+ 21 %).

Il convient toutefois de relever que cette mission demeure aujourd'hui minoritaire dans l'activité des démineurs, puisqu'elle représente en 2023 environ 25 % des interventions réalisées par le GID.

Évolution du nombre d'interventions réalisées par le GID
dans le cadre de la mission de lutte contre la menace terroriste

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

1. L'intervention sur objets suspects occupe désormais une part substantielle de l'activité des démineurs

Dans le cadre de leur mission de lutte contre la menace terroriste, les démineurs de la sécurité civile peuvent être amenés à intervenir sur des colis suspects (mission IEDD ou Improvised Explosive Device Disposal). En cas de découverte d'un colis suspect en heures ouvrables, les services de la préfecture sollicitent le centre de déminage compétent. En heures non ouvrables, la permanence de la préfecture sollicite le centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC) qui relaie l'information vers l'équipe d'astreinte du centre de déminage compétent.

Au total, 2 806 interventions IEDD ont été réalisées en 2023, contre 2 127 en 2014, et 4 004 en 2017. Le nombre d'interventions réalisées dans le cadre de cette mission a ainsi augmenté de 31 % sur les dix dernières années.

Les interventions sur objets suspects sont en grande partie concentrées sur les aéroports parisiens de Roissy Charles de Gaulle (CDG) et d'Orly. En effet, 1 190 interventions ont été réalisées par les antennes de Roissy CDG et Orly en 2023, soit 42,4 % des interventions IEDD réalisées par le GID.

Évolution du nombre d'interventions sur colis suspects entre 2014 et 2023

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Le rapporteur spécial a eu l'occasion de constater, dans le cadre de son déplacement, le très haut niveau de qualification et d'engagement des démineurs sur cette mission, qui se traduit dans les faits par des délais d'interventions satisfaisants. En ce qui concerne les interventions hors antennes de Roissy CDG et Orly, 95,5 %des interventions ont été réalisées dans les délais fixés par la DGSCGC, c'est-à-dire, dans les 2 heures suivant le signalement du colis suspects aux démineurs.

Interventions IEDD réalisées dans les délais*

2019

2020

2021

2022

2023

96,9 %

96,9 %

98 %

96 %

95,5 %

* Hors interventions réalisées par les équipes prépositionnées dans les aéroports parisiens

Source : commission des finances, d'après le rapport annuel de performances (RAP) de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2023

Si les délais d'intervention hors aéroports sont stables et satisfaisants, on constate une dégradation des résultats des sites aéroportuaires parisiens d'année en année. Les résultats de l'année 2023 apparaissent particulièrement préoccupants, puisque seules 77 % des interventions ont été réalisées dans le délai de 15 minutes fixé par la DGSCGC, contre 96,2 % en 2019.

Interventions IEDD réalisées dans les délais par les équipes
des antennes de Roissy CDG et Orly

2019

2020

2021

2022

2023

96,2 %

95,15 %

95,13 %

91 %

77 %

Source : commission des finances, d'après le rapport annuel de performances (RAP) de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2023

D'après la DGSCGC, cette dégradation du délai de réponse dans les aéroports parisiens s'explique « par la réduction de la plage horaire de présence sur site dû à une baisse des effectifs, augmentant le nombre d'interventions réalisées lors d'astreintes hors site, ajoutant un temps de transport au délai global. » Concernant plus particulièrement le site d'Orly, elle estime que la hausse des délais d'intervention résulte également « de nouvelles restrictions d'accès imposées aux équipes prépositionnées sur l'aéroport », qui ont eu pour effet d'allonger le temps d'intervention dans certaines parties du site jusqu'à 25 minutes.

2. La sécurisation des grands évènements peut impliquer une très forte mobilisation des démineurs, comme l'illustre l'exemple des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
a) Les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 mobilisera près de la moitié des effectifs du GID

Le GID est régulièrement amené à participer à la sécurisation de grands évènements culturels et sportifs organisés sur le territoire national. L'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024 en France impliquera une mobilisation exceptionnelle des démineurs de la sécurité civile. Ils participeront ainsi à la sécurisation de 14 sites de compétition, 21 hôtels, 2 villages olympiques et 22 sites d'entraînements.

Pour ce faire, le GID mobilisera au total 190 de ses agents :

- 80 démineurs hors Île-de-France et 10 personnels dédiés à l'appui et au soutien opérationnel ;

- 100 démineurs, dont 40 démineurs plongeurs, qui interviendront en renfort des démineurs du laboratoire central de la préfecture de police (LCPP) de Paris pour assurer les inspections de sécurité et la sécurisation de la cérémonie d'ouverture, mais aussi, pour intervenir sur la voie publique dans Paris et sur les zones à fort flux de passagers.

b) La mobilisation de moyens supplémentaires est apparue nécessaire pour garantir la sécurité des JOP

D'après la DGSCGC, « le principal enjeu impliqué par l'organisation des JOP réside dans la planification de la ressource opérationnelle11(*) ». En effet, les démineurs du GID devront d'une part, répondre au besoin de sécurisation des sites olympiques, d'autre part, continuer de réaliser leurs interventions quotidiennes et habituelles.

Le ministère de l'intérieur a donc sollicité des moyens humains complémentaires pour venir en renfort des démineurs sur le terrain.

Tout d'abord, la DGSCGC a demandé l'appui de plusieurs pays partenaires, dans plusieurs spécialités, telles que le déminage ou la recherche d'explosifs par des équipes cynotechniques12(*).

Parallèlement, le Gouvernement a mis en place un dispositif appelé « EOR » (Explosive Ordnance Reconnaissance), consistant en la mobilisation de personnels administratifs et techniques relevant du ministère de l'intérieur pour travailler en appui des équipes de déminage. Il convient de souligner que ces agents n'ont pas vocation à se substituer aux démineurs pour les actions de neutralisation des explosifs, mais plutôt de participer à la recherche d'engins suspects et à la détection des menaces NRBC13(*) au sein des sites olympiques. Ainsi, 214 EOR ont suivi au cours du premier semestre 2024 une formation de 35 heures répartie sur 5 jours. Ils percevront en outre une indemnisation de 130 euros par vacation, dans la limite de deux vacations par jour.

Le rapporteur spécial a interrogé l'ensemble des personnes auditionnées sur la pertinence du recours à des personnels administratifs et techniques pour réaliser des missions de ce type. Force est de constater que tous les acteurs entendus sont unanimes sur l'intérêt de cette initiative, dans la mesure où celle-ci :

se limite uniquement à la levée de doute, et non aux missions de neutralisation des engins explosifs, qui requiert naturellement une expertise beaucoup plus importante ;

- est peu contraignante dans sa mise en oeuvre, puisqu'elle nécessite un temps de formation relativement court des agents ;

- est peu coûteuse, contrairement au recours aux sociétés privées pour la réalisation de ces missions.

En complément de ces renforts en moyens humains, le GID a pu bénéficier dans le cadre de la LOPMI de 6,2 millions d'euros en AE et en CP alloués à l'achat de matériels ayant vocation à être utilisés pour la mission de neutralisation des engins suspects, tels que des systèmes de radiocommunication ou des brouilleurs14(*). Ces crédits ont intégralement été inscrits sur les exercices 2023 et 2024 afin que ces équipements puissent renforcer les moyens du GID dès les JOP de 2024.

La DGSCGC a également indiqué mener une réflexion pour faire appel à moyen terme à des réservistes qui seraient mobilisés pour réaliser des missions EOR lors de grands évènements, mais aussi, pour réaliser des missions ponctuelles de formation.


* 11 Réponses au questionnaire du rapporteur spécial.

* 12 La cynotechnique consiste à recourir à des chiens pour détecter les explosifs.

* 13 Nucléaire, radiologique, biologique ou chimique.

* 14 Les brouilleurs utilisés par les démineurs permettent d'empêcher qu'un terroriste situé à proximité du colis suspect et équipé d'un téléphone portable puisse activer le dispositif explosif en neutralisant les ondes cellulaires.

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