B. UNE PRISE EN CHARGE SANITAIRE ET SOCIALE LIMITÉE

Ces répercussions professionnelles peuvent se traduire par des difficultés économiques pour les patients, comme cela a été observé au Royaume-Uni274(*) et aux États-Unis275(*). Ces difficultés peuvent en outre être aggravées par les frais de santé liés à la prise en charge de la maladie, susceptibles d'être élevés en raison de la multiplicité des symptômes. Aussi, il est primordial de disposer d'un dispositif de prise en charge sociale adapté afin d'éviter tout risque de précarisation des patients les plus gravement touchés.

Le dispositif d'ALD (affection longue durée) exonérante semble bien adapté au covid long puisqu'il permet une prise en charge intégrale des soins et traitements, dans la limite du plafond de remboursement de l'Assurance maladie, et de bénéficier du dispositif du tiers payant et d'une indemnisation prolongée des arrêts de travail.

Or, malgré les demandes portées par les associations de patients, il n'existe à ce jour pas d'ALD exonérante spécifique pour le covid long276(*). Les patients touchés par cette maladie peuvent toutefois bénéficier du dispositif ALD sous certaines conditions :

- si le patient bénéficie déjà d'une ALD pour une autre maladie et que celle-ci s'aggrave à la suite d'une infection par le SARS-CoV-2, l'aggravation est prise en charge par l'ALD existante ;

- si les séquelles associées au covid long correspondent à une maladie inscrite dans la liste des ALD, le patient peut bénéficier du dispositif au titre de cette maladie ;

- si la maladie est grave ou évolutive ou invalidante, que la durée prévisible du traitement est supérieure à 6 mois et que celui-ci est particulièrement coûteux277(*), le patient peut bénéficier d'une ALD hors liste.

Selon les chiffres communiqués par Dominique Martin, médecin-conseil national de la Caisse nationale de l'Assurance maladie, 6 430 personnes ont été admises en ALD pour covid long de mars 2020 à décembre 2023.

En 2020, un tableau de maladie professionnelle avait été créé pour les formes respiratoires sévères de la covid-19278(*). Parallèlement, pour les formes respiratoires graves de la maladie ne remplissant pas les conditions médico-administratives exigées par ce tableau (délai de prise en charge dépassé ou professionnels non désignés dans la liste limitative des travaux du tableau), ainsi que pour les formes graves non-respiratoires non couvertes par celui-ci (comme les cas de covid long), un comité unique avait été mis en place pour examiner les demandes279(*).

Les informations communiquées par la Caisse nationale de l'Assurance Maladie indiquent que, parmi les 6 051 dossiers de demandes de reconnaissance de maladie professionnelle reçus fin 2023 - dans le cadre du tableau ou du système complémentaire -, 3 421 avaient fait l'objet d'un refus et 2 630 d'une reconnaissance. Parmi ces dernières, 974 reconnaissances l'avaient été au titre de la voie complémentaire, dont 267 pour des symptômes persistants.

Ces chiffres contrastent nettement avec les estimations du nombre de personnes fortement invalidées par un covid long. Il apparaît dès lors nécessaire de résoudre les difficultés d'accès à ces dispositifs de prise en charge. Le Covars observe une certaine hétérogénéité dans les décisions d'accès à l'ALD, qui dépendraient du médecin-conseil chargé de l'examen du dossier. Cependant, le faible taux de prise en charge semble avant tout découler d'une insuffisance de demandes plutôt que d'un nombre élevé de refus. Il en est de même pour la reconnaissance du covid long en maladie professionnelle, une proportion élevée des demandes reçues par le comité unique faisant l'objet d'une reconnaissance. Par conséquent, il est crucial d'améliorer l'information des médecins généralistes sur ces possibilités de prise en charge et de leur proposer un accompagnement dans la construction des demandes grâce aux cellules de coordination post-covid.


* 274 Office for National Statistics, Coronavirus and the social impacts of `long COVID' on people's lives in Great Britain: 7 April to 13 June 2021, 2021 ( https://www.ons.gov.uk/peoplepopulationandcommunity/healthandsocialcare/conditionsanddiseases/articles/coronavirusandthesocialimpactsoflongcovidonpeopleslivesingreatbritain/7aprilto13june2021#household-finances-and-long-covid).

* 275 N. L. Hair et al., JAMA Network Open 2023, 6, e2347318 ( https://doi.org/10.1001/jamanetworkopen.2023.47318).

* 276 Dans son avis, le Covars propose d'engager une réflexion sur la mise en place d'une ALD spécifique concernant l'ensemble des syndromes post-infectieux.

* 277 Un traitement est considéré comme couteux s'il implique un traitement médicamenteux ou appareillage régulier, ainsi qu'au moins deux éléments dans la liste suivante : hospitalisation, actes techniques médicaux répétés, actes biologiques répétés, soins paramédicaux répétés.

* 278 Tableau n° 100 : Affections respiratoires aigües liées à une infection au SARS-CoV2, Tableaux des maladies professionnelles prévus à l'article R. 461-3, Code de la sécurité sociale ( https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042329374).

* 279 Les analyses de ce comité s'appuient sur les travaux d'un groupe d'experts, réalisés à la suite d'une saisine de la Direction de la Sécurité sociale et de la Direction générale du travail. Voir : INRS, Recommandations pour la reconnaissance, au titre de la voie complémentaire, de la covid-19 en maladie professionnelle, 2022 ( https://www.inrs.fr/media.html?refINRS=TM%2070).

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