D. LE RÔLE DES POLICES MUNICIPALES EN CAS D'ÉMEUTES : UN COMPLÉMENT QUI NE DOIT PAS S'APPARENTER À UN SUBSTITUT
À la lumière de la réponse policière nationale et municipale aux violences urbaines de l'été 2023, il apparaît indispensable de renforcer la complémentarité opérationnelle entre les polices municipales et les forces de l'ordre en période d'émeutes, dans le respect de leurs prérogatives, en modernisant les outils de coordination existants et en facilitant la constitution de patrouilles mixtes entre policiers municipaux et forces de sécurité intérieure.
Parallèlement, elle propose plusieurs pistes d'évolution visant à faciliter l'action des polices municipales en période d'émeutes urbaines, sans préjuger d'une réforme globale des polices municipales appelée de leurs voeux par les syndicats de policiers municipaux et de nombreux élus :
· aligner les prérogatives de police judiciaire confiées aux policiers municipaux sur celles des gardes champêtres ;
· élargir à la saisie d'objets dangereux (mortiers d'artifice, armes par destination) leurs prérogatives de police judiciaire afin de répondre aux nécessités du contexte émeutier ;
· améliorer l'équipement et le matériel des polices municipales et des gardes champêtres pour faire face, sur la durée, à des violences urbaines de forte intensité ;
· renforcer l'équipement en vidéoprotection dans l'ensemble des communes volontaires, y compris rurales ou de petite taille par une aide financière renforcée et une simplification des procédures.
E. LA PLACE DES ÉLUS LOCAUX DANS LA GESTION DES ÉMEUTES : UNE RELATION À CONFORTER
La mission a jugé indispensable, au regard des témoignages de nombreux maires rencontrés et auditionnés, d'améliorer la place des élus locaux dans la gestion des émeutes.
Pour ce faire, elle propose d'assurer l'information systématique du maire quant aux interventions organisées sur le territoire de la commune, singulièrement celles lourdes ou à effet médiatique fort et de permettre sa présence aux centres territoriaux de crise et aux réunions locales de sécurité. En complément, la formation des élus locaux à la conduite à tenir face à des jeunes violents doit être encouragée.
F. LA RÉPONSE JUDICIAIRE : UNE MOBILISATION INÉDITE DE L'ENSEMBLE DE LA CHAÎNE PÉNALE EN DÉPIT DU MANQUE D'OUTILS MATÉRIELS ET LÉGISLATIFS ADAPTÉS À CERTAINES ÉVOLUTIONS
Fort de l'analyse de terrain exprimée par les acteurs de la chaîne pénale rencontrés, la mission suggère plusieurs propositions visant à améliorer le traitement judiciaire des émeutiers et mettre ainsi fin au sentiment d'impunité dont peuvent jouir des émeutiers opérant par groupe de plusieurs dizaines de personnes et par le biais de messageries en ligne privées ou de fonctionnalités offertes par les réseaux sociaux. Elle propose ainsi de :
· renforcer et adapter l'arsenal pénal aux évolutions des comportements et modes opératoires des émeutiers.
Sur ce point, le rapporteur préconise, notamment, de favoriser le développement de travaux d'intérêt général (TIG) en lien avec les collectivités pour sanctionner les mineurs ayant commis des dégradations volontaires au cours d'émeutes et d'adapter le contenu du stage de citoyenneté, défini localement dans le ressort de chaque tribunal, au profil spécifique des émeutiers ;
· adapter et renforcer la palette de mesures et de sanctions applicables aux mineurs impliqués dans des émeutes urbaines, y compris s'ils sont primo-délinquants.
À cette fin, la mission suggère de permettre le placement sous contrôle judiciaire des mineurs primo délinquants pour les infractions en lien avec la participation à des groupements, de rendre possible leur placement en centre éducatif fermé ou sous placement électronique mobile et enfin, de faciliter le passage en audience unique sur la culpabilité et la sanction de mineurs impliqués dans ce type d'infractions pour accélérer le prononcé de sanctions ;
· perfectionner l'organisation du traitement judiciaire en période d'émeutes urbaines ou de crise, en particulier en équipant l'ensemble des tribunaux de moyens techniques pour visionner et écouter les données numériques et visuelles et en assouplissant le mécanisme de réquisition des agents de greffe pour garantir la mobilisation de l'ensemble de la chaîne pénale, y compris en cas de grèves.