II. UN RÈGLEMENT NÉCESSAIRE MAIS DONT LA MISE EN OEUVRE EST CRITIQUÉE ET DEMEURE INCOMPLÈTE

La Commission européenne a présenté, le 20 mai 2020, les conclusions de l'évaluation de la mise en oeuvre du règlement (CE) n° 1924/2006 réalisée par ses services (document SWD(2020) 96 final 4 ( * ) ). Si cette évaluation reconnaît que les objectifs de ce règlement restent pertinents, elle fait état de difficultés d'application , mais seulement en ce qui concerne la définition des profils nutritionnels et les critères d'évaluation des allégations relatives aux plantes .

A. UN RÈGLEMENT NÉCESSAIRE QUI A PERMIS DE RESTREINDRE LE NOMBRE D'ALLÉGATIONS AUTORISÉES

1. Le caractère commercial des allégations rend nécessaire leur encadrement

Pour l'association UFC-Que choisir, les allégations nutritionnelles et les allégations de santé ne sont que des arguments de vente utilisés par les exploitants du secteur alimentaire . Elles ne correspondent ni à une demande du corps médical ni à un besoin du consommateur. Elles n'ont donc aucune utilité, sauf en cas de carences. C'est ce que le professeur Ambroise Martin, professeur de biochimie et de nutrition à la faculté de médecine de Lyon, a confirmé à votre rapporteur.

Utilisées dans les années 60, notamment par les producteurs de céréales pour le petit déjeuner, les allégations se sont imposées comme un moyen d'améliorer l'image d'un produit. Toutefois, l'ajout de vitamines ne permet pas de garantir la qualité nutritionnelle d'un produit. En effet, celui-ci peut contenir une quantité trop importante de sucre, de sel ou d'acides gras notamment. C'est le cas de céréales pour le petit déjeuner qui contiennent généralement trop de sucres. En outre, sans contrôle indépendant, ces allégations peuvent être inexactes, ambigües ou trompeuses.

Dans son article intitulé « how package design and packaged-based marketing claims lead to overeating » 5 ( * ) , Pierre Chandon, professeur de marketing à l'Insead qualifie les allégations nutritionnelles et les allégations de santé d'allégations marketing. Il démontre que celles-ci entraînent une consommation plus élevée .

Pour les exploitants du secteur alimentaire, le risque est de voir des allégations s'afficher sur les produits des concurrents qui seront alors perçus comme plus sains.

Selon la FNSEA que le rapporteur a auditionné, ces allégations n'ont pas d'utilité et pourraient être supprimées .

Pour garantir une information de qualité au consommateur, il était donc nécessaire soit de réglementer l'utilisation des allégations, soit de les interdire. En 2006, la Commission a fait le choix d'encadrer leur utilisation.

2. Un encadrement qui aboutit à une limitation du nombre des allégations autorisées

L'annexe du règlement (CE) n° 1924/2006 propose 24 formulations devant permettre d'exprimer une allégation nutritionnelle. Cette annexe pose également les conditions quantitatives relatives à l'emploi de ces allégations.

Concernant les allégations de santé autres que celles faisant référence à la réduction d'un risque de maladie ou au développement et à la santé infantiles, les paragraphes 2 et 3 de l'article 13 du règlement (CE) n° 1924/2006 prévoient que les États membres transmettent à la Commission les allégations qu'ils souhaitent voir autoriser. Dans ce cadre, la Commission a reçu plus de 44 000 allégations sur lesquelles elle a effectué un travail de consolidation pour en transmettre 4 637 à l'AESA pour avis. 1 548 d'entre elles concernant les plantes n'ont pas fait l'objet d'une évaluation à la demande de la Commission. Parmi les allégations évaluées, seules 229 ont été autorisées.

S'agissant des allégations reposant sur des preuves scientifiques nouvellement établies, on constate, dans le registre de l'Union européenne des allégations de santé, que 136 demandes d'autorisation concernant ce type d'allégations ont été évaluées et que seulement 6 ont été autorisées.

Pour les allégations faisant référence à la réduction d'un risque de maladie, 41 ont été évaluées et 14 autorisées. Enfin, concernant les allégations faisant référence au développement et à la santé infantiles, 57 ont été évaluées et 12 autorisées.

La mise en oeuvre du règlement (CE) n° 1924/2006 a donc harmonisé mais aussi considérablement réduit le nombre d'allégations utilisées au sein de l'Union européenne.


* 4 https://ec.europa.eu/food/sites/food/files/safety/docs/labelling_nutrition-claims_swd_2020-96_sum_fr.pdf

* 5 http://ipubli-inserm.inist.fr/bitstream/handle/10608/7472/?sequence=119

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