AVANT-PROPOS

Tous les États membres de l'Union européenne ont été frappés par la pandémie de COVID-19 au même moment et se sont trouvés dans l'incapacité de satisfaire leurs besoins sanitaires et encore moins de s'entraider. Le caractère transfrontalier de la menace incite à considérer comme légitime une action de l'Union européenne dans le domaine sanitaire. Pourtant, l'Union ne dispose que d'une compétence d'appui des États membres en matière de santé, selon le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Elle ne peut donc pas initier de politique commune en la matière, seulement encourager les actions conjointes des États membres.

Toutefois, elle intervient de manière indirecte dans le domaine de la santé en favorisant la libre circulation des professionnels de santé et des technologies de la santé, mais aussi en harmonisant les législations nationales dans le but d'assurer une concurrence loyale et en faisant des recommandations en matière de dépenses publiques. Ceci lui confère donc une influence bien plus grande dans le domaine de la santé que ne le laissent supposer les seules dispositions du TFUE.

La situation est identique en cas de crise sanitaire. Il revient, certes, aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de la population, mais l'Union est attendue en soutien de l'action des États membres dans les domaines de la protection civile et de la recherche, donc plus largement que ne le prévoient les dispositions du TFUE strictement consacrées à la santé.

Ce rapport analysera l'ensemble des interventions de l'Union européenne dans le domaine de la santé, puis évaluera son action face à la pandémie de COVID-19 avant de proposer des améliorations susceptibles de rendre son action plus efficace.

LISTE DES PRINCIPALES PROPOSITIONS

La commission des affaires européennes présente les recommandations suivantes :

Sur le rôle de l'Union européenne en matière de santé publique

- S'assurer que l'action de l'Union garantit un niveau élevé de protection de la santé humaine et respecte les compétences des États membres

- Encourager la coopération entre États membres et soutenir leurs actions en utilisant pleinement les possibilités offertes par l'article 168 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

- Renforcer les moyens du Centre européen de prévention des maladies et de l'Agence européenne des médicaments

Sur le programme « UE pour la santé »

- Assurer la flexibilité du programme « UE pour la santé » qui devra bénéficier à l'ensemble des États membres et dont les résultats devront être régulièrement évalués

- Garantir la complémentarité de ce programme avec les programmes finançant la recherche et la protection civile

- Favoriser la coopération transfrontière entre régions limitrophes en appuyant les initiatives locales

- S'appuyer sur les collectivités territoriales pour la réalisation des objectifs du programme

Pour garantir la disponibilité de médicaments

- Identifier les médicaments qui devront être considérés comme essentiels au sein de l'Union européenne

- Développer un système de notification pérenne à l'échelle de l'Union permettant aux industries du médicament de rapporter aux autorités compétentes le stock de médicaments disponibles et de signaler les risques de rupture

- Encourager l'investissement sur le territoire de l'Union et garantir la soutenabilité des filières du médicament

Pour garantir la disponibilité de dispositifs médicaux

- Inclure les fabricants de dispositifs médicaux dans les réflexions qui devront être développées pour organiser la réponse de l'Union en cas de nouvelle pandémie

- Prévoir comme critère d''évaluation des soumissionnaires aux marchés publics de dispositifs médicaux la capacité à garantir les approvisionnements

- Favoriser la croissance des PME et des ETI du secteur des dispositifs médicaux pour garantir leur pérennité

- I. L'UNION EUROPÉENNE NE DISPOSE, SELON LES TRAITÉS, QUE D'UNE COMPÉTENCE D'APPUI EN MATIÈRE DE SANTÉ

A. UNE COMPÉTENCE EN DÉVELOPPEMENT CONSTANT MAIS QUI RESTE LIMITÉE

1. Une compétence qui s'est étoffée à la suite de crises sanitaires transfrontières

L'idée que l'Union européenne puisse disposer d'une compétence en matière de santé publique ne s'est imposée que tardivement. En effet, dans le Traité de Rome, aucun article ne traite de santé. Mais le Traité prévoit, pour les États membres, la possibilité de limiter la libre circulation des travailleurs ou la libre circulation des biens pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique.

L'Acte unique européen de 1986 dispose que la Commission, dans ses propositions, vise un niveau de protection élevé en matière de santé publique. Mais, ce n'est qu'en 1992, à la suite du scandale du sang contaminé, que le Traité de Maastricht consacrera un article à la santé publique. Son article 129 attribue un rôle incitatif à la Communauté pour promouvoir la coordination entre États membres en matière de santé. La Communauté pourra également appuyer l'action des États membres en matière de prévention face aux grands fléaux dont la toxicomanie.

À la suite de la crise dite de la « vache folle », en s'appuyant sur l'article 152 du Traité d'Amsterdam de 1997, la Communauté se voit autorisée à adopter des mesures contraignantes fixant des normes élevées de qualité et de sécurité des organes et substances d'origine humaine, du sang et des dérivés du sang, mais aussi des mesures dans les domaines vétérinaire et phytosanitaire ayant directement pour objectif la protection de la santé publique. Elle peut également compléter l'action des États membres pour améliorer la santé publique et prévenir les maladies.

Le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) de 2007 étend encore les compétences de l'Union qui sont précisées dans l'article 168, notamment en ce qui concerne la lutte contre les menaces transfrontières graves, notamment à la suite de l'épidémie de SRAS de 2003.

2. Une compétence aujourd'hui encadrée par l'article 168 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne
a) Une compétence réglementaire

Le paragraphe 4 de l'article 168 du TFUE reprend la possibilité d'adoption par l'Union de mesures réglementaires en matière de santé dans les cas prévus par le Traité d'Amsterdam. L'Union peut également prendre des mesures fixant des normes élevées de qualité et de sécurité des médicaments et des dispositifs à usage médical.

Le paragraphe 5 de l'article 168 du TFUE étend et précise les domaines dans lesquelles l'Union peut prendre des mesures d'encouragement. Celles-ci visent notamment à mettre en place des mesures de surveillance et d'alerte contre les grands fléaux transfrontières, ainsi que des mesures ayant directement pour objectif la protection de la santé publique en ce qui concerne le tabac et l'abus d'alcool.

b) Une compétence de coordination et d'appui de l'action des États membres

Les paragraphes 1 et 2 de l'article 168 du TFUE précisent que l'action de l'Union complète les politiques nationales, en matière de prévention notamment, et vise également à encourager la coopération entre États membres et à promouvoir la coordination en vue d'établir des orientations et des indicateurs communs, mais aussi d'organiser l'échange des meilleures pratiques.

Par ailleurs, l'article 6, point a, du TFUE stipule que l'Union est compétente pour mener des actions visant à appuyer, coordonner ou compléter l'action des États membres en vue de la protection et de l'amélioration de la santé humaine.

3. Le respect des compétences des États membres

L'article 4, paragraphe 2, point k dispose que la santé publique est une compétence partagée entre l'Union et les États membres. S'applique donc l'article 2, paragraphe 5 qui prévoit que les actes juridiquement contraignants de l'Union ne peuvent pas comporter d'harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres.

L'article 168 du TFUE précise justement, dans son paragraphe 5, que les mesures d'encouragement ne peuvent consister en une harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres.

De même, le paragraphe 7 du même article prévoit que l'action de l'Union est menée dans le respect des responsabilités des États membres en ce qui concerne la définition de leur politique de santé, ainsi que l'organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux.

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